Encyclopédie Médico-Chirurgicale 31-150-A-10 31-150-A-10 Déminéralisation osseuse chez l’enfant G Kalifa S Ferey Résumé. – Le rôle du radiologue s’est modifié ces dernières années dans l’appréciation de l’ostéoporose de l’enfant. Outre l’aide au diagnostic étiologique, il importe de pouvoir affirmer et quantifier cette ostéoporose grâce aux nouvelles méthodes d’investigation, notamment absorption biphotonique et mesure du contenu minéral osseux au scanner. Les auteurs rappellent les bases de ces méthodes et les principales étiologies de l’ostéoporose à cet âge : immobilisation et troubles de la nutrition sont à envisager en priorité. © 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : ostéoporose, ostéogenèse imparfaite, ostéoporose juvénile idiopathique. Introduction 1 Cliché de main d’une patiente porteuse d’un syndrome de Turner. Là, l’ostéoporose est évidente, avec des corticales minces et une augmentation de la transparence osseuse des métacarpiens. Ceci traduit une perte du capital osseux d’au moins 30 %. Le rôle du radiologue face à une déminéralisation et une ostéoporose chez l’enfant est triple. Il importe : – de pouvoir affirmer l’ostéoporose ; – de quantifier le degré de déminéralisation ; – d’approcher le diagnostic étiologique. Pendant très longtemps, l’affirmation de l’ostéoporose est restée difficile puisqu’elle reposait uniquement sur les clichés standards. Or, on sait qu’il faut une perte de 30 à 40 % de la masse osseuse pour qu’apparaissent des signes radiologiques (fig 1). Avant d’envisager les gammes étiologiques, nous considérons l’apport des méthodes actuelles d’étude du contenu minéral osseux. En effet, les indications de ces mesures sont en pleine expansion actuellement : – affirmation d’une ostéoporose, notamment devant une fragilité osseuse ; – surveillance de maladies ou de traitements à risque pour le métabolisme osseux ; – exploration de nouvelles pathologies, notamment environnementales, compte tenu des modifications alimentaires et du mode de vie (pathologies de la nutrition, pathologies du sport etc). Les méthodes actuellement proposées, au-delà de la radiologie conventionnelle, sont l’absorption biphotonique (DEXA), la mesure du contenu minéral osseux au scanner, la mesure par ultrasons et l’étude en imagerie par résonance magnétique (IRM). La méthode idéale de détermination du contenu minéral osseux devrait réunir : Gabriel Kalifa : Professeur des Universités, chef de service. Solène Ferey : Chef de clinique-assistant. Service de radiologie, hôpital Saint-Vincent de Paul, 82 avenue Denfert-Rochereau, 75674 Paris cedex 14, France. – une technique sans risque et indolore ; – une facilité d’exécution sans sédation, quel que soit l’âge de l’enfant ; – une grande fiabilité et une bonne reproductibilité ; – une possibilité d’apprécier le contenu minéral osseux à la fois du squelette axial et du squelette périphérique, tout en permettant d’apprécier aussi l’os spongieux et l’os cortical. Cette méthode devrait aussi intégrer et prendre en compte la taille de l’os examiné, ne pas être sous la dépendance du volume corporel et de la masse des parties molles, et finalement cette méthode devrait être peu coûteuse. En fait, aucune des méthodes disponibles Toute référence à cet article doit porter la mention : Kalifa G et Ferey S. Déminéralisation osseuse chez l’enfant. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Radiodiagnostic Neuroradiologie-Appareil locomoteur, 31-150-A-10, 2003, 7 p. Déminéralisation osseuse chez l’enfant 31-150-A-10 Radiodiagnostic ne réunit toutes ces qualités, qu’il s’agisse de la DEXA, de la mesure du contenu minéral osseux au scanner ou des études basées sur des ultrasons. Techniques de mesure du contenu minéral osseux ABSORPTION BIPHOTONIQUE Cette méthode, d’abord mise au point chez l’adulte, est maintenant couramment utilisée en pédiatrie. Elle est basée sur les différentes absorptions tissulaires de deux faisceaux de photons à énergies différentes. On peut ainsi nettement faire la différence entre tissu minéralisé et tissu non minéralisé, mais l’évaluation est beaucoup plus difficile chez le nouveau-né du fait de sa faible minéralisation et de la faible quantité de tissu mou adjacent à l’os. Plus la zone à examiner est petite, plus la mesure tend à être imprécise. La calibration des tissus de référence varie selon les fabricants, ainsi que la fiabilité des appareils. Ceci explique aussi l’absence de concordance des résultats entre les différents systèmes de mesure publiés. Les résultats sont exprimés en général en termes de densité minérale osseuse, en grammes par centimètres carrés, ce qui correspond à la quantité d’hydroxyapatite par unité de surface d’os. Plus rarement, on trouve des résultats en contenu minéral osseux en grammes, ce qui correspond à la quantité totale de l’hydroxyapatite présente dans l’os étudié. La mesure dépend du diamètre antéropostérieur de l’os étudié, ce qui complique les choses pour les petits os comme les vertèbres. Il faut aussi tenir compte de la relation qui existe entre densité minérale et hauteur du patient. Ceci est particulièrement vrai chez l’enfant dont les caractères morphologiques se modifient pendant la croissance. Par exemple, jusqu’à l’âge de la puberté, la croissance longitudinale se fait surtout aux dépens du segment inférieur alors qu’à partir de la puberté cette croissance va porter essentiellement sur le segment supérieur. La poussée de croissance précède l’accroissement du capital calcique qui survient à la fin de la puberté et qui est plus marqué dans le segment supérieur que dans le segment inférieur. Cet asynchronisme entre minéralisation et croissance longitudinale explique les controverses concernant l’âge précis d’acquisition de la masse osseuse selon que l’on examine tel ou tel os. D’autre part, toute affection qui va interférer avec le métabolisme osseux a un impact préférentiel, soit sur la croissance, soit sur la minéralisation, selon le moment de survenue par rapport à la puberté. À titre d’exemple, les modifications de forme, de longueur et d’angulation des os gênent la reproductibilité dans le temps pour deux examens séparés de quelques années. Quoiqu’il en soit, la méthode de DEXA garde toute sa valeur pour l’étude du squelette. C’est un outil irremplaçable d’appréciation, notamment des variations lors d’un traitement hormonal ou des modifications nutritionnelles ou autres. La durée moyenne d’examen est de 2 à 3 minutes pour le corps entier et nécessite une immobilisation parfaite de l’enfant, ce qui est parfois difficile à obtenir chez un tout-petit. L’irradiation délivrée est très faible, de l’ordre de quelques microSieverts. La précision de la méthode est de l’ordre de 1 à 5 % chez le petit enfant. MESURE DU CONTENU MINÉRAL OSSEUX PAR SCANNER 2 Figure explicative de la mesure du contenu minéral osseux au scanner. On obtient d’abord un mode radio de profil sur lequel sont centrées des coupes passant par les corps vertébraux de L2 à L4. Le curseur est mis au centre de la vertèbre et permet d’apprécier la densité de l’os spongieux de chacun des corps vertébraux. du squelette à condition de disposer d’un fantôme externe de référence pour la calibration et du logiciel adapté. Les mesures les plus courantes se font aux vertèbres ainsi qu’au fémur. Le scanner permet une étude de la densité de l’os spongieux et de l’os compact. La densité de l’os spongieux est le reflet à la fois de l’os minéralisé et du tissu ostéoïde, mais aussi de la quantité de moelle par pixel. Compte tenu de la faible quantité de moelle jaune chez l’enfant au rachis, le scanner permet des mesures d’une grande précision, supérieure à celle obtenue chez l’adulte. En outre, il n’y a pas d’interférence en rapport avec de possibles calcifications aortiques à cet âge. L’irradiation délivrée dépend de la technique utilisée mais reste très faible. La dose totale d’irradiation délivrée au corps entier atteint environ 40 à 90 µSv, ce qui correspond à des valeurs inférieures à n’importe quelle procédure habituelle de scanner ou de radiographie standard. On peut donc considérer que la méthode est tout à fait applicable chez l’enfant. MESURES AUX ULTRASONS Cette technique a suscité l’intérêt de par son faible coût, sa maniabilité et l’absence de radiation ionisante. Malheureusement, les valeurs obtenues dépendent de nombreuses caractéristiques de structure et semblent plus liées à la largeur de l’os qu’à n’importe quel autre paramètre osseux. Elle reflète davantage les modifications de la taille du squelette qui suivent la croissance. On mesure la vitesse de transmission en divisant la largeur de la région examinée par le temps de transit. Les valeurs s’expriment en mètres par seconde. Le coefficient d’atténuation ultrasonore se définit par la pente d’atténuation versus la fréquence et s’exprime en décibels par mégaHertz. Les mesures se font au calcanéum, à la rotule et aux phalanges du pouce, mais les corrélations avec les autres techniques sont très pauvres, ce qui fait que la méthode ultrasonore n’a pas encore acquis sa place en routine clinique. (fig 2) Le scanner permet d’obtenir une image tridimensionnelle qui n’est pas gênée par les structures sus-jacentes. En fait, les données fournies par l’image de scanner représentent les valeurs d’atténuation du faisceau de rayons X de l’objet examiné. Les mesures en scanner peuvent être obtenues en n’importe quel point 2 MESURE EN IMAGERIE PAR RÉSONANCE MAGNÉTIQUE Les travaux en IRM n’ont pas permis encore de déboucher sur des méthodes d’utilisation clinique de routine. Il s’agit essentiellement de méthodes de recherche. Radiodiagnostic Déminéralisation osseuse chez l’enfant Critères de choix d’une méthode Les deux techniques qui s’imposent, DEXA et scanner, ne sont pas concurrentielles mais parfaitement complémentaires. Le choix s’appuie sur la disponibilité et l’accessibilité de machine, l’existence de valeurs de référence fiables pour l’âge, la pathologie examinée et les questions posées. Envisage-t-on plutôt une pathologie du squelette axial ou périphérique ? L’atteinte porte-t-elle plutôt sur l’os spongieux ou sur l’os cortical ? Au-delà des polémiques qui entourent chaque technique, on peut néanmoins dégager quelques impressions. Chaque mesure doit faire référence à la technique utilisée. Les valeurs mesurées en différentes parties du squelette augmentent de la première enfance jusqu’à l’âge adulte. Ces valeurs augmentent rapidement autour de l’âge de la puberté et l’essentiel du capital osseux s’acquiert entre la puberté et la fin de la troisième décennie. L’« acquisition calcique » survient un peu plus tôt chez la fille que chez le garçon (12 à 13 ans contre 14 à 16 ans). On note une augmentation de densité importante de l’os spongieux au moment de la puberté chez l’enfant normal, avec un pic à la fin de la croissance et au moment de la fusion épiphysaire. Les différences entre les sexes tiennent plus à la taille des os qu’à la densité ellemême de l’os spongieux. Il a aussi été rapporté des différences de valeurs entre enfants noirs et enfants blancs, ces derniers disposant d’une masse calcique un peu plus importante. Ces données sont néanmoins à vérifier et à prendre avec prudence. Ostéoporose chez l’enfant L’ostéoporose est découverte chez l’enfant dans les circonstances suivantes : – avant tout fracture inexpliquée ou fracture survenant pour un traumatisme considéré comme minime ; – découverte par hasard sur un examen fait pour toute autre raison ; – surveillance d’une maladie connue comportant un risque d’ostéoporose ou surveillance d’un traitement susceptible d’induire une ostéoporose. Avant d’envisager toutes les étiologies de l’ostéoporose, il importe de répondre à deux questions : 31-150-A-10 3 Nourrisson de quelques mois présentant une raideur rachidienne. Celle-ci fait découvrir une augmentation de la transparence osseuse vertébrale avec tassement. Ce tableau est révélateur d’une ostéogenèse imparfaite dans une forme de sévérité intermédiaire. 4 Enfant d’une dizaine d’années victime d’un traumatisme minime en rollers. Tassement vertébral. En fait, l’analyse soigneuse de la transparence osseuse montre une ostéoporose qui sera confirmée par la mesure du contenu minéral osseux avec des valeurs inférieures à moins trois déviations standards pour l’âge. On retrouve dans les antécédents de cet enfant une fragilité osseuse familiale. Il s’agit là d’une forme relativement mineure d’ostéogenèse imparfaite. – l’enfant est-il immobilisé, quelle qu’en soit la raison ? – quel est son état nutritionnel ? L’encadré de la page 5 résume les principales causes d’ostéoporose chez l’enfant. Grandes étiologies En matière de pathologie congénitale, les progrès de la génétique permettent de mieux démembrer ces ostéoporoses familiales qui débordent largement du seul cadre de l’ostéogenèse imparfaite. OSTÉOGENÈSE IMPARFAITE (fig 3, 4) Elle reste la cause principale de déminéralisation constitutionnelle chez l’enfant. Plusieurs types d’ostéoporose peuvent se voir en fonction du mode de transmission et de présentation. On connaît de mieux en mieux les formes « partielles » de la maladie confirmées par la densitométrie osseuse, notamment dans les familles à risques. De telles ostéogenèses imparfaites sont souvent découvertes lors de traumatismes minimes. En outre, la mesure du contenu minéral osseux permet de suivre l’efficacité des traitements actuellement proposés (Arédiat et médicaments voisins). OSTÉOPOROSE DU SYNDROME DE TURNER (fig 5) Elle est très fréquente. Elle s’accompagne d’un risque majeur de fractures, notamment après 45 ans. Ceci justifie un traitement hormonal substitutif précoce et prolongé. OSTÉOPOROSE JUVÉNILE IDIOPATHIQUE (fig 6) C’est un diagnostic que l’on ne retient qu’après avoir éliminé les autres étiologies habituelles, notamment les hémopathies. Il s’agit le plus souvent d’enfants entre 9 et 15 ans qui présentent des lombalgies ou des fractures métaphysaires au genou. Radiologiquement, l’ostéoporose se localise d’abord dans ces régions sous la forme de bandes claires assez larges posant donc le problème d’une hémopathie. La densitométrie confirme la déminéralisation sévère. Les lésions le plus souvent disparaissent spontanément en plusieurs années ou plus rapidement sous l’effet du traitement calcique. À l’heure actuelle, aucune étiologie ni trait génétique n’ont pu être identifiés. La découverte de cette affection contre-indique l’utilisation des corticoïdes. 3 Déminéralisation osseuse chez l’enfant 31-150-A-10 Radiodiagnostic 5 Jeune fille de 14 ans présentant une ostéoporose dans le cadre d’un syndrome de Turner.Cette ostéoporose, qui se traduit par une augmentation de transparence des corps vertébraux, est à la fois considérée comme génétique dans le cadre de sa dysgénésie gonadique et comme endocrinienne dans le cadre de son syndrome de Turner par hypogonadisme. 7 Nourrisson porteur d’une insuffisance surrénale congénitale associée à des anomalies génitales. Ostéoporose découverte très tôt. Cette ostéoporose s’intègre dans le cadre du syndrome IMAGe associant insuffisance surrénalienne, dysplasie métaphysaire et anomalie des organes génitaux externes. 8 Ostéoporose sévère chez un enfant présentant une malabsorption majeure (maladie cœliaque découverte à un stade tardif). 6 Jeune fille de 15 ans se plaignant de douleurs des genoux et de douleurs rachidiennes depuis quelques mois. Découverte de zones claires métaphysaires pour lesquelles le diagnostic initial d’hémopathie a été porté, mais normalité totale des hémogrammes et des examens médullaires, de la ponction sternale jusqu’à la biopsie. Aucune anomalie du métabolisme phosphocalcique. Diagnostic retenu : ostéoporose juvénile idiopathique avec cette bande claire métaphysaire caractéristique associée à une ostéoporose rachidienne. Évolution favorable. On a identifié récemment une autre cause d’ostéoporose congénitale connue le terme IMAGe : ce syndrome associe une insuffisance surrénale congénitale, une dysplasie métaphysaire et une ostéoporose d’installation très précoce (fig 7). OSTÉOPOROSES NUTRITIONNELLES (fig 8) Toutes les maladies comportant une malnutrition entraînent une déminéralisation très sévère : kwarchiorkor, grandes carences, grêles courts etc. L’ostéoporose se voit aussi couramment associée aux malabsorptions type maladies cœliaques ou maldigestions représentées en particulier par la mucoviscidose. Le défaut d’absorption des vitamines liposolubles (A, D, E, K) dans ces maladies explique le risque d’association à l’ostéoporose de signes de rachitisme (fig 9) . Les maladies inflammatoires chroniques (Crohn, colite ulcéreuse) peuvent, en l’absence de traitement 4 correctif, entraîner une ostéoporose importante. On retrouve aussi ces anomalies dans les maladies hépatobiliaires. L’ostéoporose est de plus en plus rapportée dans les troubles de l’alimentation avec, aux deux extrêmes, l’anorexie mentale mais aussi certaines formes d’obésité chez le garçon. La conjonction de facteurs génétiques et de déséquilibres alimentaires favorise ce défaut de minéralisation. Il faut noter que la minéralisation osseuse chez l’enfant diabétique bien équilibré est le plus souvent normale. On en rapproche les ostéoporoses d’origine rénale, souvent par tubulopathie. Celles-ci peuvent s’accompagner chez le jeune enfant d’un tableau combiné d’une déminéralisation majeure et de signes d’un rachitisme majeur. OSTÉOPOROSES ENDOCRIENNES Celles-ci sont assez rares chez l’enfant, hormis les ostéoporoses iatrogènes de la corticothérapie. En effet, syndrome de Cushing et hyperparathyroïdisme sont rares chez l’enfant. Nous avons cité plus haut l’ostéoporose qui accompagne des formes congénitales d’insuffisance surrénale (IMAGe). Déminéralisation osseuse chez l’enfant Radiodiagnostic 9 Ostéoporose associée à des anomalies métaphysaires dans le cadre d’un rachitisme vitaminorésistant de type hypophosphatémique. On y retrouve l’augmentation de transparence osseuse, les anomalies métaphysaires et les déformations du fût diaphysaire. L’ostéoporose fait partie du rachitisme. Elle est souvent plus sévère dans les rachitismes vitaminorésistants que dans les rachitismes carentiels simples, sauf à un stade très évolué de ces derniers. 10 Déminéralisation osseuse révélée par des douleurs diffuses. Cette augmentation de la transparence est associée aussi à une ostéoporose vertébrale. Ce tableau a été révélateur, chez cet enfant d’une dizaine d’années, d’une leucose aiguë lymphoblastique. L’ostéoporose dans ce cas peut être isolée ou associée à d’autres signes : bandes claires métaphysaires, appositions périostées etc. Enfin, l’ostéoporose fait partie du tableau du syndrome de Turner (fig 5), beaucoup plus rarement du syndrome de Klinefelter chez le garçon. OSTÉOPOROSES HÉMATOLOGIQUES La déminéralisation est un signe fréquent, parfois révélateur d’une hémopathie maligne de type leucose aiguë (fig 10). Elle peut être 31-150-A-10 • Ostéoporose généralisée • Immobilisation (défaut de mobilisation) • Fracture • Affections neuromusculaires de différents types • Maladies chroniques immobilisantes • Origine digestive • Maladies digestives diverses • Inflammatoire • Maladie cœliaque • Malabsorption • Fuites protéiques • Malnutrition (kwarshiorkor) • Anorexie mentale • Scorbut (déficit en vitamine C) • Rachitisme (déficit en vitamine D) • Déficit en cuivre, acquis (prématuré), plus rarement congénital (syndrome de Menkes) • Maladies hépatiques • Origine endocrinienne • Corticothérapie • Hypercorticisme (syndrome de Cushing) • Hypogonadisme (chez la fille syndrome de Turner, chez le garçon syndrome de Klinefelter) • Hyperparathyroïdie (y compris ostéodystrophie rénale) • Hypothyroïdie (craniopharyngiome, maladie d’Addison) • Origine hématologique • Leucose (surtout aiguë) • Anémie chronique (drépanoctyose, thalassémie, carence martiale etc) • Hémophilie • Maladie de Gaucher ou de Niemann-Pick • Mastocytose • Origine congénitale • Ostéogenèse imparfaite, différents types • Autres maladies osseuses constitutionnelles • Syndrome de Turner • Pseudohypoparathyroïdie • Hypophosphatasie • Divers • Amylose • Maladie périodique • Collagénose • Hémochromatose • Hypoxémie chronique • Autres causes iatrogènes que la corticothérapie (héparine, chimiothérapie…) • Hypercalcémie idiopathique (syndrome de Williams et Beuren) • Maladie métastatique • Néphropathie (acidose tubulaire) • Maladie de Gorham • Ostéoporose juvénile idiopathique • Ostéoporose localisée • Immobilisation d’un membre (postfracturaire par exemple) • Infection • Arthrite • Néoplasie localisée • Ostéonécrose • Lésions de type brûlures ou gelures • Malformations artérioveineuses • Hémangiome • Pseudarthrose congénitale isolée ou associée de manière variable aux autres signes osseux de la maladie : bandes claires métaphysaires, lacunes osseuses, 5 Déminéralisation osseuse chez l’enfant 31-150-A-10 Radiodiagnostic 11 Jeune enfant originaire d’Afrique du Nord porteur d’une thalassémie majeure (anémie de Cooley). Augmentation de la transparence osseuse par hyperplasie médullaire. Cette hyperplasie est aussi responsable d’un défaut de modelage métaphysaire. * B * A 12 appositions périostées et plus rarement zones d’ostéocondensation Cette augmentation de transparence osseuse peut aussi se retrouver dans les anémies hémolytiques, surtout la thalassémie (fig 11). Dans cette affection, la transparence osseuse est augmentée, les corticales sont amincies du fait de l’hyperplasie médullaire et les signes sont souvent associés à des aspects de striations métaphysaires induites par le traitement au Desféralt. OSTÉOPOROSES D’IMMOBILISATION Ces ostéoporoses peuvent être localisées si l’immobilisation porte sur un membre (classique déminéralisation postfracturaire d’installation rapide en quelques jours, habituellement réversible dès la remise en fonction du membre). Elles peuvent être aussi généralisées dans toutes les affections entraînant une immobilisation, au premier rang desquelles les désordres neuromusculaires. Cette déminéralisation d’immobilisation peut être aggravée aussi par les traitements comme certains antiépileptiques (dérivés des barbituriques, hydantoïnes). Il semble que la perte de capital osseux porte autant sur l’os cortical que sur l’os spongieux, ce qui conduit à faire des mesures plus étendues sur ces deux secteurs, à la fois sur le squelette axial et périphérique, lorsqu’on pratique des mesures du capital osseux. Enfant présentant une dermatomyosite avec calcifications sous-cutanées et intramusculaires diffuses. Traitement par corticothérapie à dose élevée (2 mg/kg). Rachis du même enfant montrant une ostéoporose iatrogène aux corticoïdes, caractéristique, avec tassements vertébraux multiples. Aspect dense des plateaux, contrastant avec l’hypertransparence de la partie centrale des corps vertébraux. En fait, cet aspect est identique à celui que l’on observe dans les syndromes de Cushing endogènes. 13 Arthrite chronique juvénile chez un enfant de 13 ans. Outre le pincement et les érosions articulaires, on retrouve l’ostéoporose périarticulaire, en bandes, plus marquée au carpe. Cette ostéoporose connaît plusieurs facteurs, l’hyperémie locale d’origine inflammatoire ou l’immobilisation ; elle peut aussi être aggravée par les traitements de la maladie. OSTÉOPOROSES IATROGÈNES (fig 12) Celles-ci sont dominées chez l’enfant par la corticothérapie et les premiers signes de déminéralisation peuvent survenir pour des doses de 0,2 mg/kg pour peu que le traitement soit institué pour quelques semaines. La déminéralisation va surtout frapper le squelette axial et aboutir à des tassements vertébraux multiples. 6 Les autres ostéoporoses iatrogènes sont beaucoup plus rares chez l’enfant, exceptionnellement à l’héparine, parfois aux anticonvulsivants. On a rapporté des ostéoporoses secondaires au méthotrexate à haute dose. Les ostéoporoses iatrogènes viennent souvent se superposer aux ostéoporoses liées à la maladie de fond elle-même. C’est l’exemple Radiodiagnostic Déminéralisation osseuse chez l’enfant des ostéoporoses des arthrites juvéniles inflammatoires où se combinent l’effet de la corticothérapie, l’immobilisation et les conséquences du phénomène inflammatoire proprement dit (fig 13). OSTÉOPOROSES D’ÉTIOLOGIES DIVERSES Enfin, il a été rapporté récemment une ostéoporose très particulière connue sous le nom de « sport de haut niveau », qui associe chez des jeunes athlètes de sexe féminin une aménorrhée, une ostéoporose, des troubles de la nutrition et surtout une anorexie nerveuse. 31-150-A-10 Conclusion L’étude de l’ostéoporose reste chez l’enfant un domaine en pleine mutation, tant dans le bilan génétique des différentes étiologies que dans les conséquences des modifications alimentaires et dans l’effet des traitements hormonaux ou autres. Ces thèmes ont pris un nouvel essor depuis l’avènement des méthodes de mesure du contenu minéral osseux, dominées par le DEXA et la tomodensitométrie. Cette détermination a une signification pronostique essentielle. D’autre part, les problèmes d’alimentation à venir, notamment dans les pays du tiers-monde, risquent d’être à l’origine de complications squelettiques sévères qu’il faudra savoir prévenir et prendre en charge. Références [1] Anderson JM. The female athlete triad : disordered eating, amenorrhea, and osteoporosis. Conn Med Nov 1999 ; 63 : 647-652 [2] Arikoski P, Komulainen J, Riikonen P, Parviainen M, Jurvelin JS, Voutilainen R et al. Impaired development of bone mineral density during chemotherapy : a prospective analysis of 46 children newly diagnosed with cancer. J Bone Miner Res 1999 ; 14 : 2002-2009 [3] Bailey DA, Martin AD, McKay HA, Whiting S, Mirwald R. Calcium accretion in girls and boys during puberty : a longitudinal analysis. J Bone Miner Res 2000 ; 15 : 2245-2250 [4] Ballabriga A. Morphological and physiological changes during growth : an update. Eur J Clin Nutr 2000 ; 54 (suppl 1) : S1-S6 [5] Baudoin C, Cohen-Solal ME, Beaudreuil J, De Vernejoul MC. Genetic and environmental factors affect bone density variances of families of men and women with osteoporosis. J Clin Endocrinol Metab 2002 ; 87 : 2053-2059 [6] Benetti-Pinto CL, Bedone A, Magna LA, Marques-Neto JF. Factors associated with the reduction of bone density in patients with gonadal dysgenesis. Fertil Steril 2002 ; 77 : 571-575 [7] Cardon LR, Garner C, Bennett ST, Mackay IJ, Edwards RM, Cornish J et al. Evidence for a major gene for bone mineral density in idiopathic osteoporotic families. J Bone Miner Res 2000 ; 15 : 1132-1137 [8] Carruth BR, Skinner JD. Bone mineral status in adolescent girls : effects of eating disorders and exercise. J Adolesc Health 2000 ; 26 : 322-329 [9] Cassidy JT. Osteopenia and osteoporosis in children. Clin Exp Rheumatol 1999 ; 17 : 245-250 [10] Di Somma C, Pivonello R, Loche S, Faggiano A, Marzullo P, DiSarco A et al. Severe impairment of bone mass and turnover in Cusching’s disease : comparison between childhood–onset and adulthoode–onset disease. Clin Endocrinol 2002 ; 56 : 153-158 [11] Gilsanz V. Bone density in children : a review of the available techniques and indications. Eur J Radiol 1998 ; 26 : 177-182 [12] Gilsanz V, Boechat MI, Roe TF, Loro ML, Sayre JW, Goodman WG. Gender differences in vertebral body sizes in children and adolescents. Radiology 1994 ; 190 : 673-677 [13] Gilsanz V, Gibbens DT, Roe TF, Carlson M, Senac MO, Boechat MI et al. Vertebral bone density in children : effect of puberty. Radiology 1988 ; 166 : 847-850 [14] Gilsanz V, Skaggs DL, Kovanlikaya A, Sayre J, Loro ML, Kaufman F et al. Differential effect of race on the axial and appendicular skeletons of children. J Clin Endocrinol Metab 1998 ; 83 : 1420-1427 [15] Hougardy DM, Peterson GM, Bleasel MD, Randall CT. Is enough attention being given to the adverse effects of corticosteroid therapy ? J Clin Pharm Ther 2000 ; 25 : 227-234 [16] Iyengar GV, Nair PP. Global outlook on nutrition and the environment : meeting the challenges of the next millennium. Sci Total Environ 2000 ; 249 : 331-346 [17] Krassas GE. Idiopathic juvenile osteoporosis. Ann N Y Acad Sci 2000 ; 900 : 409-412 [18] Landin-Wilhelmsen K, Bryman I, Windh M, Wilhelmsen L. Osteoporosis and fractures in Turner syndromeimportance of growth promoting and oestrogen therapy. Clin Endocrinol 1999 ; 51 : 497-502 [19] Lequin MH, Van Rijn RR, Robben SG, Hop WC, VanKuijk C. Normal values for tibial quantitative ultrasonometry in caucasian children and adolescents (aged 6 to 19 years). Calcif Tissue Int 2000 ; 67 : 101-105 [20] Lyritis GP, Schoenau E, Skarantavos G. Osteopenic syndromes in the adolescent female. Ann N Y Acad Sci 2000 ; 900 : 403-408 [21] Lytle LA. Nutritional issues for adolescents. J Am Diet Assoc 2002 ; 102 (3 suppl) : S8-S12 [22] Molgaard C, Thomsen BL, Prentice A, Cole TJ, Michaelsen KF. Whole body bone mineral content in healthy children and adolescents. Arch Dis Child 1997 ; 76 : 9-15 [23] Mora S, Pitukcheewanont P, Kaufman FR, Nelson JC, Gilsanz V. Biochemical markers of bone turnover and the volume and the density of bone in children at different stages of sexual development. J Bone Miner Res 1999 ; 14 : 1664-1671 [24] Peacock M, Turner CH, Econs MJ, Foroud T. Genetics of osteoporosis. Endocr Rev 2002 ; 23 : 303-326 [25] Perez MD, Abrams SA, Loddeke L, Shypailo R, Ellis KJ. Effects of rheumatic disease and corticosteroid treatment on calcium metabolism and bone density in children assessed one year after diagnosis, using stable iostopes and dual energy X-ray absorptiometry. J Rheumatol 2000 ; 27 suppl 58 : 38-43 [26] Powers PS. Osteoporosis and eating disorders. J Pediatr Adolesc Gynecol 1999 ; 12 : 51-57 [27] Rauch F, Travers R, Norman ME, Taylor A, Parfitt AM, Glorieux FH. Deficient bone formation in idiopathic juvenile osteoporosis : a histomorphometric study of cancellous iliac bone. J Bone Miner Res 2000 ; 15 : 957-963 [28] Sasaki M, Harata S, Kumazawa Y, Mita R, Kida K, Tsuge M. Bone mineral density and osteo sono assessment index in adolescents. J Orthop Sci 2000 ; 5 : 185-191 [29] Singh RF, Muskelly CC. Inhaled corticosteroid-induced bone loss and preventive strategies. J Am Osteopath Assoc 2000 ; 100 (7 suppl) : S14-S17 [30] Van Der Sluis IM, De Ridder MA, Boot AM, Krenning EP, De Muino, Keizerschrama SM. Reference data for bone density and body composition measured with dual energy X ray absorptiometry in white children and young adults. Arch Dis Child 2002 ; 87 : 341-347 [31] Van Rijn RR, Van Kuijk C. Bone densitometry in children. Semin Musculoskelet Radiol 2002 ; 6 : 233-240 [32] Whilting SJ. Obesity is not protective for bones inchildhood and adolescence. Nutr Rev 2002 ; 60 : 27-30 [33] Yonemura K, Kimura M, Miyaji T, Hishida A. Short-term effect of vitamin K administration on prednisolone-induced loss of bone mineral density in patients with chronic glomerulonephritis. Calcif Tissue Int 2000 ; 66 : 123-128 7