159 Thème II Les microfondements de la macroéconomie • Dans l’analyse macroéconomique moderne, les ménages et les firmes sont considérés comme les principaux acteurs de l’économie. Ces agents économiques agissent de manière autonome et rationnelle : 1) ils sont guidés par la recherche de l’intérêt personnel ; 2) ils se livrent à un calcul économique consistant à comparer les pertes et les gains qui résulteraient de leurs choix ou décisions. • La rationalité implique notamment de s’abstenir d’une situation donnée lorsque les pertes (ou les peines) sont supérieures aux gains (ou aux plaisirs) escomptés. 160 Thème II Les microfondements de la macroéconomie • Par ailleurs, la rationalité économique implique de s’engager dans une situation donnée tant que les gains (ou les plaisirs) sont supérieurs aux pertes (ou aux peines), et ce, jusqu’à l’atteinte de son point d’équilibre. • Les ménages et les firmes prennent des décisions « à la marge », qui sont dictées, selon les cas, par l’utilité ou la valeur d’une unité supplémentaire d’un article sur le marché. • Cette démarche analytique est à la base des concepts de surplus du consommateur (SC) et de surplus du producteur (SP) illustrés ci-après. 161 Thème II Les microfondements de la macroéconomie • Le surplus du consommateur est la différence entre le montant maximal qu’il est prêt à payer pour un produit et le montant qu’il paie réellement (SC = utilité marginale – prix du marché). • Le surplus du producteur est la différence entre le prix de vente de chaque unité produite et le coût marginal de production de cette unité (SP = prix du marché – coût marginal). • La relation entre la quantité d’un bien donné et son utilité marginale est décroissante, tandis qu’elle est croissante par rapport au coût marginal. Le calcul à la marge (Surplus du consommateur et surplus du producteur) Prix Prix 162 Coût marginal S.C. E E S.P. Utilité marginale Quantité Quantité 163 5. Le ménage représentatif I. Analyse statique du comportement du ménage • Nous considérons le ménage comme un consommateur représentatif dont le principal objectif est de maximiser la satisfaction tirée des biens acquis sur le marché. Nous supposons que son revenu est exogène. • Deux outils sont utilisés pour caractériser le comportement d’un consommateur : la fonction d’utilité et la contrainte budgétaire. • Le choix des quantités optimales de biens découle de l’interaction des deux outils précités. 164 5. Le ménage représentatif a) La fonction d’utilité • Les individus augmentent leur satisfaction ou bien-être en acquérant des objets qui leur plaisent et en évitant ceux qui leur déplaisent. • Une fonction d’utilité est une relation qui associe un niveau de satisfaction à chaque panier de biens x1 et x2 : U = U(x1, x2) (5.1) 165 5. Le ménage représentatif • La théorie du consommateur repose sur l’hypothèse que les consommateurs peuvent classer les paniers de biens les uns par rapport aux autres. • Une fonction d’utilité peut donc être représentée par un ensemble de courbes d’indifférence. • Supposons que l’utilité du consommateur Albert pour les biens x1 et x2 est donnée par U = x1 + 2x2. Un panier de biens comportant 8 unités de x1 et 3 unités de x2 produira une utilité de 8 + 2(3) = 14. 166 5. Le ménage représentatif • Albert est indifférent entre le panier précédent et un autre panier contenant 6 unités de x1 et 4 unités de x2, du fait qu’il aboutit à la même utilité : 6 + 2(4) = 14. • Mais les deux paniers précédents sont préférés à un troisième, contenant 4 unités de x1 et 4 unités de x2, car ce dernier implique une utilité de seulement 4 + 2(4) = 12. • Une carte d’indifférence est la représentation d’un ensemble de courbes d’indifférence qui décrivent les préférences d’un consommateur. 167 5. Le ménage représentatif • Les paniers situés sur des courbes d’indifférence de niveau supérieur sont supposés engendrer plus de satisfaction que les paniers appartenant à des courbes d’indifférence de niveau inférieur (critère des choix dominants et critère des choix élargis). • Les courbes d’indifférence ne peuvent pas se croiser (critère de choix non contradictoires). • Les courbes d’indifférence sont de pente négative, reflétant l’hypothèse selon laquelle plus est préféré à moins. 168 5. Le ménage représentatif • Le taux marginal de substitution (TMS) mesure la quantité d’un bien auquel un consommateur est prêt à renoncer pour obtenir une quantité plus importante d’un autre bien. • Les courbes d’indifférence sont convexes : nous supposons qu’au fur et à mesure qu’augmente la quantité consommée d’un bien (disons x1), le consommateur est prêt à renoncer à des quantités de plus en plus faibles du bien x2 pour obtenir des unités additionnelles du premier. 169 5. Le ménage représentatif b) La contrainte budgétaire • Le fait que le consommateur tienne compte des prix et qu’ils dispose des ressources limitées, ces deux éléments restreignent la quantité de biens qu’il peut acheter. • La droite de budget est l’ensemble des combinaisons des biens x1 et x2 telles que les dépenses totales aux prix p1 et p2 soient égales au revenu : p1x1 + p2x2 = R (5.2) 170 5. Le ménage représentatif • De l’expression précédente, on déduit l’équation de la droite de budget ci-après : x2 = R/p2 – (p1/p2).x1 (5.3) où R/p2 représente l’ordonnée à l’origine, tandis que le terme – (p1/p2) est la pente de la droite de budget. • Alternativement, l’abscisse à l’origine est donnée par le terme R/p1. 171 5. Le ménage représentatif • Admettons que le consommateur dispose d’un revenu de 80 $ par semaine, et que le prix du bien x1 est de 1 $ par unité et celui du bien x2 est de 2 $ par unité. Le tableau 5.1 représente quelques combinaisons de x1 et x2 qu’il peut acheter avec son revenu de 80 $. • La figure 5.1 représente la droite de budget AG associée aux paniers de biens du tableau précité. Elle passe par les points B, D et E. La valeur de sa pente est -1/2. Le point A représente son ordonnée à l’origine. Tableau 5.1- Paniers de biens 172 Paniers de biens Bien x1 Bien x2 Dépense totale A 0 40 80 $ B 20 30 80 $ D 40 20 80 $ E 60 10 80 $ G 80 0 80 $ Figure 5.1- Droite de budget 173 50 Bien x2 40 A B 30 D 20 E 10 G 0 0 10 20 30 40 50 Bien x1 60 70 80 90 174 5. Le ménage représentatif • La position de la droite de budget dépend à la fois du revenu et des prix des biens, p1 et p2. • Une variation du seul revenu entraîne une modification de l’ordonnée à l’origine, mais n’influe pas sur la pente de la droite, puisque les prix des biens demeurent inchangés. • Une variation du prix p1 fait pivoter la droite de budget autour du point A, tandis qu’elle pivoterait autour du point G en cas de variation du prix p2. 175 5. Le ménage représentatif c) Le choix des quantités optimales de consommation • Un consommateur rationnel choisit les biens de manière à maximiser sa satisfaction avec un budget limité. Le panier optimal doit satisfaire deux conditions : 1. Il doit appartenir à la droite de budget. 2. Il doit fournir au consommateur la combinaison préférée de biens et services. 176 5. Le ménage représentatif • La figure 5.2 présente trois courbes d’indifférence décrivant les préférence du consommateur pour les biens x1 et x2. La courbe U3 représente le plus haut niveau de satisfaction, U2 un niveau intermédiaire, et U1 le plus bas. • Le panier B qui appartient à la courbe d’indifférence U1 n’est pas optimal, car une réaffectation du revenu en faveur de x1 permettrait d’augmenter la satisfaction du consommateur. • Bien que situé sur U3, le panier D exige une dépense exorbitante. Figure 5.2- La maximisation de l’utilité du consommateur 177 50 Bien x2 40 A D B 30 U3 E 20 U2 10 U1 G 0 0 10 20 30 40 50 Bien x1 60 70 80 90 178 5. Le ménage représentatif • Le panier E est celui qui maximise la satisfaction du consommateur. Il appartient à la plus haute courbe d’indifférence qui touche la droite de budget. En ce point de tangence, la pente de la droite de budget est exactement égale à la pente de la courbe d’indifférence : TMS = p1/p2 • Autrement dit, l’utilité est maximisée lorsque le taux marginal de substitution de x1 à x2 est égal au au rapport de leurs prix. (5.4) 179 5. Le ménage représentatif II. Analyse dynamique du comportement du ménage • Le ménage vit et prend ses décisions généralement sur plusieurs périodes. Sans perte de généralité, nous considérons ici deux moments majeurs dans sa vie : le présent (période 1) et le futur (période 2). Il n’y a pas de troisième période. • Ces restrictions permettent d’examiner deux cas de choix spécifiques : a) les choix inter-temporels (entre consommation et épargne); et b) les choix intra-temporels (entre consommation et loisir). 180 5. Le ménage représentatif a) Choix entre consommation et épargne • Les quantités de biens consommées par le ménage à la période 1 et la période 2 sont notées respectivement !1 et !2. Sa fonction d’utilité intertemporelle s’écrit : " = # (!1, !2) (5.5) • Le revenu présent du ménage est Y1 et son revenu futur $2. • Le ménage peut décider du niveau de richesse qu’il compte avoir à chaque période. 181 5. Le ménage représentatif • La richesse est rémunérée par un taux d’intérêt !. Elle peut être positive ou négative. • Admettons que le ménage hérite d’une richesse initiale, notée #0. • Il choisit de consommer la quantité $% , chaque unité de bien coûtant '% . Ainsi, sa contrainte budgétaire à la période 1 s’écrit : '% $% + #% = 1 + ! #+ + ,% (5.6) 182 5. Le ménage représentatif • La richesse du ménage à la période 1 est telle que : !" = 1 + & !' + (" − *" +" (5.7) • L’expression en (5.7) décrit l’ensemble des ressources disponibles à la fin de la période 1. • Étant donné que la richesse !" n’est pas dépensée à la période 1, elle sera rapportée à la période 2. 183 5. Le ménage représentatif • Ainsi, on peut définir deux notions importantes liées à l’accumulation de la richesse du ménage : l’épargne lorsque !. #$ + &' > )' *' , et la dette lorsque !. #$ + &' < )' *' . • La contrainte budgétaire à la période 2 s’écrit : ), *, + #, = 1 + ! #' + &, (5.8) • Puisque le ménage ne vit que deux périodes, #, = 0. Ainsi donc, le ménage dépense toutes ses ressources de la période 2. 184 5. Le ménage représentatif • Les contraintes budgétaires à la période 1 et à la période 2 ont en commun le terme !" . Par ce biais, en combinant les deux équations (5.6) et (5.8), on dérive la contrainte budgétaire intertemporelle du ménage : $" %" + '( )( "*+ = -" + .( "*+ + 1 + 0 !1 . (5.9) • La partie à gauche représente la valeur actualisée du profil des dépenses de consommation (présentes et futures) du ménage, et celle à droite mesure la valeur actualisée du profil de ses ressources. 185 5. Le ménage représentatif • La contrainte budgétaire intertemporelle représente les combinaisons de consommation courante (c1) et de consommation future (c2) accessibles au ménage. • L’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle du ménage s’écrit : !" = − %& %' 1 + * !+ + ,& %' 1+* + ,' %' + -. %' 1+* " (5.10) 186 5. Le ménage représentatif • Sans perte de généralité, considérons en (5.6) que !" = 0. En différentiant l’équation de la droite de budget, on dérive la pente de la droite de budget intertemporelle : & '( & ') +) = −+ 1 + . . ( (5.11) • Comme dans le cas du modèle statique, pour dériver la droite de budget intertemporelle du ménage, on se sert des trois coordonnées reprises dans le tableau 5.2, à savoir : a) la pente, b) l’abscisse à l’origine et c) l’ordonnée à l’origine. Tableau 5.2-Modèle statique contre modèle dynamique 187 Pente de la droite de budget Modèle statique Modèle dynamique d "# '$ =− d "$ '# – – d "# '$ =− 1+* d "$ '# : '$ -$ -# 1 + '$ '$ 1 + * : '# -$ -# 1+* + '# '# : Pente de la droite de : budget intertemporelle Abscisse à l’origine "$, 0 Ordonnée à l’origine 0, "# 188 5. Le ménage représentatif • La pente de la contrainte budgétaire est déterminée par le prix relatif et le taux d’intérêt. • L’ordonnée à l’origine indique la consommation maximale que le ménage peut effectuer à la période 2, s’il s’abstient de consommer à la période 1. • L’abscisse à l’origine indique la consommation maximale que le ménage peut effectuer à la période 1, s’il s’abstient de consommer à la période 2. 189 5. Le ménage représentatif Conseil de Polonius à son fils « Donne à tous ton oreille ; à très peu ta voix. Prends l’avis de chacun, mais réserve le tien.… N’emprunte ni ne prête ; car prêter c’est souvent perdre et l’argent et l’ami, et emprunter use l’esprit d’épargne ». (Tiré de Hamlet, Acte I, scène III, p. 29.) Figure 5.3-La droite de budget intertemporelle 190 C2 CONTRAINTE BUDGETAIRE INTERTEMPORELLE Pente = – P1(1 + i)/P2 C2* (Y1/P1, Y2/P2) POINT DE POLINIUS C1* C1 191 5. Le ménage représentatif • Au point de Polonius, le ménage n’est ni prêteur ni emprunteur. Il consomme exactement son revenu : "# ⁄$# = &# et "' ⁄$' = &' . • À gauche du point de Polonius, le ménage est prêteur (épargne). • À droite du point de Polonius, le ménages est emprunteur. • Le taux d’intérêt qui permet au ménage de consommer au point de Polonius est unique et tel que : )*+ &# , &' = -. -/ 1+2 ∗ ⟹ 2 = −1 + -/ -. )*+ &# , &' . (5.12) C2 C2 B B' 192 B B'' ∆P2 < 0 ∆P2 > 0 ∆P1 < 0 ∆P1 > 0 Figure 5.4- Analyse de sensibilité : variation des prix et du taux d’intérêt A'' A' A A C1 C2 C1 C2 B B' ∆i > 0 : i ' > i ∆i < 0 : i ' < i B' B Point de Polonius Point de Polonius A Note : A B (Y1/P1, Y2/P2) ∆X : : : : A' C1 Abcisse à l'origine = Y1/P1 + [Y2/(1 + i)P1] Ordonnée à l'origine = [(1 + i)Y1/P2] + Y2/P2 Point de Polinius Accroissement de X = X' - X A' A C1 Baisse 193 Prix à la période 1 Pivotement de la droite Hausse budgétaire intertemporelle autour de l’ordonnée vers la droite Pivotement de la droite budgétaire intertemporelle autour de l’ordonnée vers la gauche Prix à la période 2 Pivotement de la droite budgétaire intertemporelle autour de l’ordonnée vers le haut Pivotement de la droite budgétaire intertemporelle autour de l’ordonnée vers le bas Taux d’intérêt Rotation de la droite budgétaire intertemporelle autour du point de Polonius suivant le sens contraire des aiguilles d’une montre Rotation de la droite budgétaire intertemporelle autour du point de Polonius suivant le sens des aiguilles d’une montre 194 5. Le ménage représentatif • Une hausse de prix implique un pivotement de la droite budgétaire intertemporelle autour de l’abscisse à l’origine ou de l’ordonnée à l’origine selon que le prix dans la période 1 ou dans la période 2 a changé. • En cas de variation du taux d’intérêt, la droite budgétaire intertemporelle subit une rotation autour du point de Polonius. 195 5. Le ménage représentatif • Synthétiquement, le problème du ménage revient à ceci : max ( )* , )+ $% ,$' sujet à : ,+ )+ 1+ ,* )* + = 1* + + 1 + / 23 , 1+/ 1+/ avec ,* > 0 et ,+ > 0. 196 5. Le ménage représentatif • Le Lagrangien du modèle de consommation intertemporel est tel que : ℒ = # $% , $' +' 1' $' + )* +% + + 1 + - ./ − 1% $% − , 1+1+- où )* est le multiplicateur de Lagrange dynamique. • Les conditions du premier ordre d’optimisation : 2# $% , $' = #3% $% , $' − )* 1% = 0 2$% 197 5. Le ménage représentatif !" #$ , #& ,& = "(& #$ , #& − *+ =0 !#& 1+/ !" #$ , #& 1& ,& #& = 1$ + + 1 + / 23 − ,$ #$ − =0 !*+ 1+/ 1+/ 198 5. Le ménage représentatif Solution : #$% &% , &( != )% #$( &% , &( != 1+, )( #$% &% , &( )% ⟹ = 1+, , #$( &% , &( )( où #$% ⁄#$( = /01 &% , &( dénote le taux marginal de substitution intertemporel. Figure 5.5- Choix optimal dans le modèle consommation intertemporel 199 C2 B = [(1 + i)Y1/P2] + Y2/P2 B CHOIX OPTIMAL Point de Polonius C2* Pente = – P1/P2(1 + i) Y2/P2 C1* Y1/P1 A = Y1/P1 + [Y2/(1 + i)P1] A C1 200 5. Le ménage représentatif • Le choix optimal dans le modèle de consommation intertemporel implique une égalité entre le taux marginal de substitution intertemporel (pente de la courbe d’utilité) et la pente de la droite de budget. • Pour une fonction d’utilité logarithmique telle que ! "# , "% = ln "# + * ln "% , on que : + ,+ + ,. = /+ /. 1+1 ⟹ 3. 3+ =* /+ /. 1+1 . (5.13) 201 5. Le ménage représentatif • L’expression en (5.13) est appelée « équation d’Euler » ou encore « condition de Ramsey-Keynes ». • Elle pose qu’à l’optimum de consommation le ratio des utilités marginales (c’est-à-dire le taux marginal de substitution intertemporel) est égal au produit entre le facteur d’escompte (!), le prix relatif (#$ ⁄#% ) et le facteur d’intérêt (1 + (). • Plus simplement, l’équation d’Euler n’est rien d’autre que l’équation résumant la condition d’équilibre du ménage. 202 5. Le ménage représentatif • L’équation d’Euler est dite « intertemporelle » car elle met en relation la consommation de la période 1 et celle de la période 2 : !" = $ %&' %&() !% (5.14) où *" = ," − ,% ⁄,% mesure la variation du prix entre la période 1 et la période 2. • L’équation d’Euler nous renseigne sur trois faits majeurs concernant la dynamique de la consommation du ménage. 203 5. Le ménage représentatif 1) Dans le cas d’un facteur d’escompte élevé, le ménage est davantage disposé à renoncer à consommer dans le présent pour consommer plus dans le futur. 2) Dans le cas d’un taux d’intérêt élevé, le ménage est davantage incité à réduire sa consommation courante, à épargner plus pour consommer plus dans le futur. 3) Si le taux d’inflation est faible et inférieur au taux d’intérêt, dans ce cas, le prix relatif des biens est approximativement stable et ne nuit pas à la capacité budgétaire du ménage. 204 5. Le ménage représentatif b) Choix entre consommation et loisir • Supposons à présent qu’à chaque période, le ménage doit choisir entre : (i) consommation et épargne ; (ii) travail et loisir. Dès lors, la fonction d’utilité devient : ! = # $% , '% , $( , '( (5.15) où pour chaque période ), $* dénote la quantité de biens consommés, '* le nombre d’heures que le ménage consacre au loisir, tel que '* = 1 − -* . La variable -* mesure le nombre d’heures de travail. 205 5. Le ménage représentatif • Pour simplifier, considérons une fonction d’utilité additivement séparable telle que : ! "# , %# , "& , %& = ! "# , %# + ! "& , %2 (5.16) • La contrainte budgétaire du ménage période par période s’écrit : Pour la période 1 : *# "# + +# = 1 + - +. + /# 1 − %# (5.17) Pour la période 2 : *& "& + +& = 1 + - +# + /& 1 − %& (5.18) Dans chaque contrainte, / dénote le salaire horaire. 206 5. Le ménage représentatif • Ces contraintes stipulent qu’à chaque période le ménage dispose d’un niveau donné de richesse et d’un revenu qu’il est censé répartir entre la consommation et l’épargne. Remarquons que, dans ce cas, le niveau du revenu du ménage dépend également de son salaire, en plus des intérêts perçus. • En combinant les deux dernières équations et sous l’hypothèse que !" = 0, on dérive ainsi la contrainte budgétaire intertemporelle du ménage : %& '& + )* +* &,- = .& 1 − 1& + 2* &,- 1 − 1" + 1 + 3 !4 . (5.19) 207 5. Le ménage représentatif • L’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle du ménage s’écrit : %& *& *" ,!" = − 1 + ) !& + 1 − +& 1 + ) + 1 − +" + 1 + ) ". %" %" %" %" • Si ,- = 0, en différentiant l’équation de la droite de budget, on obtient la pente de la droite de budget intertemporelle : 0 12 0 13 =− 43 42 1+) (5.20) • Graphiquement, la droite de budget est obtenue comme ci-après. 208 5. Le ménage représentatif • Pour !" = 0, l’abscisse à l’origine (A) s’écrit : !& = '( )( 1 − ,& + ) '. ( &/0 1 − ," (5.22) • Pour !& = 0, l’ordonnée à l’origine (B) s’écrit : !" = '( &/0 ). 1 − ,& + '. ). 1 − ," (5.23) • On peut voir que le niveau consommation dépend désormais du nombre d’heures que le ménage consacre au travail (cf. figure 5.6). Figure 5.6- Droite budgétaire dans l’espace (C1, C2) 209 B = [(w1/P2)(1 + i)](1 - L1) + (w2/P2)(1 - L2) C2 B CONTRAINTE BUDGETAIRE INTERTEMPORELLE Pente = – P1(1 + i)/P2 POINT DE POLINIUS C2* C1* A A = (w1/P1)(1 - L1) + [w2/(1 + i)P1](1 - L2) C1 210 5. Le ménage représentatif • Alternativement, comme illustré dans la figure 5.7, on peut également exprimer le choix du ménage dans un espace consommation et loisir (!" , $" ). • Connaissant l’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle du ménage, la pente est telle que : % &' % (' =− +' ,' ⋅ (5.24) 211 5. Le ménage représentatif • Les coordonnées à l’origine sont telles que pour !" = 0, l’abscisse à l’origine (A) est : &" = − () (* 1 + - &. + 1 + - /) (* 1 − !. + /* (* , (5.25) • Et pour &" = 0, l’ordonnée à l’origine (B) est : !" = 1 − () /* 1 + - &. + 1 + - /) /* 1 − !. . (5.26) Figure 5.7- Droite budgétaire dans l’espace (C2, L2) 212 B = [(P1/P2)(1 + i)]c1 + (1 + i)(w1/P2)(1 - L1) + (w2/P2) C2 B CONTRAINTE BUDGETAIRE INTERTEMPORELLE Pente = – w2/P2 POINT DE POLINIUS C2* L2* A A = 1 - (P1/w2)(1 + i)c1 + (1 + i)(w1/w2)(1 - L1) L2 213 5. Le ménage représentatif • Le principal point qui émerge de cette analyse est que dans le modèle de consommation-loisir : Øle choix entre consommation et épargne dépend de la décision prise sur le marché du travail, c’est-à-dire du nombre d’heures de travail ; Øle choix entre travail et loisir dépend également de la décision prise par le ménage sur le marché des produits. • ll y a donc une interdépendance entre les décisions prises sur le marché des produits et celles prises sur le marché du travail. 214 5. Le ménage représentatif c) Passage du modèle dynamique nominal au modèle dynamique réel • L’inflation mesure une hausse générale du niveau de prix dans une économie d’une période à une autre. À la période t, le taux d’inflation relatif à la période t – 1 est tel que !" = $" −$"−1 $"−1 où !" est le taux d’inflation et $" , le niveau général des prix. (5.27) 215 5. Le ménage représentatif • Nous avons vu plus haut que le taux d’inflation affecte négativement l’équilibre du consommateur lorsqu’il est supérieur au taux d’intérêt. • Par définition, on établit que : 1+#$ 1+%$ = 1 + '$ , (5.28) où '$ est appelé taux d’intérêt réel. L’équation précédente peut également s’écrire comme suit : 1 + #$ = 1 + '$ 1 + %$ . (5.29) 216 5. Le ménage représentatif • L’expression en (5.29) est appelée « équation de Fisher exacte ». Après réaménagement, elle devient : 1 + #$ = 1 + &$ + '$ + '$ &$ . (5.30) • Pour des valeurs '$ et &$ faibles, '$ &$ ≈ 0. Ainsi dérive-t-on l’équation de Fisher approximative : '$ ≈ #$ − &$ , (5.31) 217 5. Le ménage représentatif • Le taux d’inflation !" est tel que : !" = $" −$"−1 ⟹ 1 + !" = $"−1 $" $"−1 ⋅ (5.32) • Dans un modèle à deux périodes, il suit que : 1 + !2 = $2 $1 ⋅ (5.33) • Pour rappel, la contrainte budgétaire intertemporelle nominale du modèle à deux périodes est telle que : 218 5. Le ménage représentatif !1 #1 + !2 #2 1+& = (1 + (2 1+& + 1 + & )0 (5.34) • En divisant l’équation précédente par le prix !1 , on obtient la contrainte budgétaire intertemporelle exprimée en termes réels : #1 + !2 #2 !1 1+& = ,1 + 1 (2 1+& !1 + 1+& )0 !1 où ,1 = (1 ⁄!1 dénote le salaire réel à la période 1. (5.35) 219 5. Le ménage représentatif • Après une manipulation mathématique simple, la contrainte budgétaire intertemporelle réelle peut s’exprimer comme suit : !1 + $2 !2 $1 1+& = (1 + )2 $2 1 $1 $2 1+& + 1+& * 0 $0 (5.36) $1 $0 • Et finalement : !1 + !2 1+,2 1+& = (1 + (2 où (2 = )2 ⁄$2 et -0 = *0 ⁄$0 . 1+,2 1+& + -0 1+& 1+,1 . (5.37) 220 5. Le ménage représentatif • En utilisant l’équation de Fisher exacte, il découle que : !1 + !2 1+% = '1 + '2 1+% + 1 + % (0 . (5.38) • Il en ressort donc que la contrainte budgétaire intertemporelle réelle est quasi analogue à la contrainte budgétaire intertemporelle nominale. • L’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle réelle est telle que : !2 = − 1 + % !1 + 1 + % '1 + '2 + 1 + % 2 (0 . (5.39) 221 5. Le ménage représentatif • Sans perte de généralité, nous posons !0 = 0. En différentiant l’équation de la droite de budget, on dérive ainsi la pente de la droite de budget intertemporelle : d &2 d &1 =− 1++ . (5.40) • Grâce à l’équation de Fisher exacte, la pente de l’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle réelle peut être obtenue directement à partir de la pente de l’équation de la contrainte budgétaire intertemporelle nominale : 1+, 1+-2 = 1 + +. 222 5. Le ménage représentatif • Considérant le cas spécifique d’une fonction d’utilité logarithmique telle que ! "1 , "2 = ln "1 + * ln "2 , le rapport des utilités marginales est tel que : !+1 "1 ,"2 !+2 "1 ,"2 1 "2 = *" ⋅ 1 (5.41) • Et donc, l’équation d’Euler intertemporelle réelle, mettant en relation la consommation de la période 1 et celle de la période 2, s’écrit : "2 = * 1 + - "1 . (5.42) 223 5. Le ménage représentatif • La fonction d’offre d’actifs peut être caractérisée, en considérant le budget du ménage période par période. En termes réels, la contrainte budgétaire s’écrit : !1 + $1 = 1 + & $0 + (1 , (5.43) où & est le taux d’intérêt réel. La richesse réelle du ménage à la période 1 est telle que : $1 = 1 + & $0 + (1 − !1 . (5.44) • Cette dernière expression décrit l’ensemble de ressources disponibles à la fin de la période 1. 224 5. Le ménage représentatif • Ainsi, la fonction d’offre d’actifs est telle que : !1 − !0 = &!0 + (1 − )1 . (5.45) • Pour tout !0 > 0, il suit que toute hausse du taux d’intérêt réel implique une hausse d’offre d’actifs (épargne) : - !1 −!0 -& = !0 > 0. (5.46) • Le ménage ne peut être offreur net d’actifs financiers, si et seulement si !1 − !0 > 0. Par contre, pour !1 − !0 < 0, le ménage est emprunteur. 225 5. Le ménage représentatif • En conclusion, le choix optimal d’un ménage peut être caractérisé à partir de l’équation d’Euler. D’où les comportements suivants : ØLe ménage est l’agent demandeur sur le marché des produits et sa fonction de demande dépend négativement du niveau général des prix. ØLe ménage est l’agent offreur sur le marché du travail et sa fonction d’offre dépend positivement du salaire réel, si et seulement si l’effet revenu est supérieur à l’effet de substitution. ØLe ménage ayant une richesse nette positive, sa fonction d’offre sur le marché des fonds prêtables dépend positivement du taux d’intérêt réel.