Croissance bactérienne 1- Définition La croissance est l’accroissement ordonné de tous les composants d’un organisme. ➢ Chez les organismes pluricellulaires elle aboutit à une augmentation de taille ou de masse. ➢ Chez les microorganismes unicellulaires, elle conduit à une augmentation du nombre d’individus. C’est donc l’équivalent d’une multiplication. Exemple: Chez E. coli, une cellule peut donner naissance à deux cellules filles toutes les 20min. Au cours de la croissance , le milieu s’appauvrit en éléments nutritifs disponibles et s’enrichit en produits du catabolisme, souvent toxiques, qui modifient le pH, le potentiel Redox, la pression osmotique etc… Il en résulte un arrêt de la croissance. 2- Mesure de la croissance Croissance sur milieu Solide: Par convention, une cellule donne une colonie comptage des colonies après incubation Liquide: Mesure du trouble après incubation (temps de croissance) 2-1-Mesure du nombre de cellules (méthodes directes) C’est la détermination de la concentration cellulaire c.à.d. du nombre de bactéries par unité de volume = Dénombrement: a/- Par mesure directe au microscope: Grâce à des lames quadrillées spéciales: cellule de Thoma ou cellule de Malassez dont l’une des faces est creusée d’une cavité de profondeur connue (piscine). Elle permet la numération de cellules vivantes et mortes. b/- Après culture: Un volume connu de suspension bactérienne est ensemencé dans un milieu de culture neuf ( le plus souvent solide). Après incubation (temps et température adéquats), les colonies sont comptées. Le nombre de bactéries est exprimé en UFC/ volume ensemencé. Elle permet la numération de cellules vivantes uniquement. Cellules de comptage Dénombrement après culture en milieu solide ➢ Le dénombrement des bactéries viables est une méthode communément utilisée. ➢ Un volume connu de la culture mère ou des dilutions sont étalés à la surface d’un milieu gélosé ou incorporé au milieu avant sa solidification. ➢ Après incubation, le nombre de colonies apparues correspond au nombre de cellules microbiennes présentes dans le volume analysé de la suspension. Le nombre de colonies retenu après lecture des boites doit être compris entre 30 et 300. Le résultat est exprimé en UFC/mL. ➢ Pour donner à la méthode le maximum de précision, la suspension doit être rendue homogène par agitation mécanique et l’opération doit se faire en plusieurs réplicas (3 ou 5 boîtes). Une cellule bactérienne donne une colonie. Cependant, les bactéries formant des agglomérats ou des groupements ne forment qu’une seule colonie. C’est pourquoi on parle de UFC/ unité de volume et non de nombre de cellules/ unité de volume. 2-2- Mesure de la masse a/-Détermination du poids sec (méthode directe) Les bactéries sont récoltées par centrifugation ou par filtration sur membrane à partir d’un volume fixe. Après lavage, le culot ou le filtre est desséché à 100-110 °C. Le poids est exprimé généralement en gramme de matière sèche/ kg ou litre de milieu. Mesure cellules viables et mortes et perte de 5 à 10% de matière pendant le lavage b/- Mesure du trouble (méthode indirecte): Spectrophotométrie/ D.O Méthode de choix. Rapide et simple = opacité ou turbidimétrie. Basée sur la propriété qu’a tout solution d’absorber une partie de l’intensité d’un faisceau lumineux qui la traverse en ligne droite: Plus une solution est concentrée, plus la lumière est absorbée, plus l’intensité du faisceau diminue à la sortie, plus l’absorbance est grande. Loi de Beer-Lambert: A= Log I0/It= K.L.C A= absorbance K= coefficient d’absorption (constant) Io= intensité de lumière incidente (entrante) It= Intensité de lumière transmise (sortante) L= largeur de la cuve= 1 cm (constante) C= concentration Mesure les cellules mortes et vivantes A =Absorbance = log I0 / I = K.l.C C’ est la concentration cellulaire Intensité de la lumière transmise Intensité de la lumière incidente Constante d'absorption K ℓ est largeur de la cuve =1cm 2-3- Mesure de l’activité cellulaire (méthodes indirectes) a/- Mesure de la consommation d'un substrat Le substrat peut être carboné, un nutriment azoté, de l'oxygène ou d’un facteur spécifique de croissance. b/- Mesure des produits d’excrétion( CO2, NH3) c/- Mesure d'un constituant cellulaire Ex: Dosage par bioluminescence ( ATP) d/- Mesure des variations physico-chimiques du milieu Variation de pH (acidification par fermentation), de production de chaleur, etc. 3- Étude cinétique de la croissance A- Croissance en discontinue ou en ’’ BATCH’’ Ici les éléments nutritifs ne sont pas renouvelés, la phase de croissance ne dure que quelques heures (voire quelques jours). 3-1- Constantes de la croissance La croissance d’une bactérie placée dans des conditions optimales de culture peut être définie par 2 constantes: -Le temps de génération G - Le taux de croissance µ Le temps de génération G C’est l’intervalle de temps entre deux divisions successives L’accroissement se fait selon une progression géométrique: 1 cellule => 2 cellules 2 cellules => 4 cellules 4 cellules => 8 cellules En biologie: multiplication = division Le temps de génération correspond donc au temps nécessaire à une cellule mère pour produire 2 cellules filles (doublement de la population) G= t/n ; t: temps (connu), n= nombre de divisions, s’exprime en minutes. Ce temps de génération n’est pas le même pour toutes les bactéries Exemples: 20 min chez E.coli contre 800 à 1200 minutes chez Mycobacterium tuberculosis Taux de croissance µ C’est le nombre de divisions par unité de temps µ= 1/G µ= n/t Exemple: E. coli: G= 20 min= 0,33 heures µ= 1/G; µ= 1/0,33= 3h-1 = 3 divisions par heure 3-2- Expression mathématique de la croissance Dans une population en croissance deux scénarios peuvent être envisagés: Les bactéries ont toutes le même âge: donc elles se trouvent toutes à une même phase du cycle de croissance. Le nombre n de cellules est fonction du nombre de divisions. Cette fonction est discontinue et évolue par paliers successifs (doublement de la population) = culture synchrone (n’existe pas dans la nature, peut être provoquée en laboratoire). - Les bactéries n’ont pas toutes le même âge (modèle le plus fréquent dans la nature et in vitro): culture asynchrone, augmentation continue. Les cellules ne se divisent pas au même rythme. Soit N0 le nombre initial de bactéries que l’on ensemence dans un milieu de culture neuf = Inoculum, Sachant que 1 cellule mère donne naissance à 2 cellules filles en une génération: Après 1 génération: N1=2N0 = 21 N0 2 générations: N2 = 2 x 2N0= 22 N0 3 générations: N3 = 2 x 2 x2 N0 = 23 N0 Donc: Après N générations: Nn=2n N0 Or µ= n/t => n= µ t Donc N = 2 µtN0 Si on prend la forme logarithmique de cette formule, on obtient: Log N = Log 2µt + Log N0 Log N = µt Log 2 + Log N0 Log N – Log N0 = µt Log 2 Si µ restait continuellement constant et maximal Heureusement que la croissance est limitée par l’épuisement du substrat ou par l’accumulation de substances toxiques. 3-3- Courbe de croissance Si on représente la variation du nombre de bactéries dans une culture en fonction du temps : N= f(t), on obtient une courbe dite courbe de croissance. Dans cette courbe de croissance, le volume de milieu est limité: la quantité de nutriments diminue (le milieu s’épuise)= croissance en milieu non renouvelé = BATCH N= N0 1- Phase de latence: N est constant et égal a N0 car pas de croissance. C’est une phase d’adaptation au milieu qui dépend: - De l’âge des cellules de l’inoculum - De l’espèce étudiée - Du mileu (même milieu ou pas que le précédent) Cette phase de latence s’observe pour tous les microorganismes : levures, champignons, protozoaires, bactéries, etc la phase logarithmique ou exponentielle. et constant N augmente le temps de génération est minimal 2- Phase exponentielle: N augmente rapidement , de façon exponentielle µ est constant et maximal, µ correspond à la pente (accélération) de la courbe N le max milieu devient de moins en moins favorable à la croissance sporulation se déclenche 3- Phase stationnaire: µ= 0, pas de croissance N est constant Il y a équilibre entre le nombre de cellules qui apparaisent et le nombre de cellules qui meurent C’est la phase pendant laquelle a lieu la sporulation (chez les bactéries sporulées). phase de déclin : µ diminue et devient négatif. Les bactéries meurent et sont lysées par les enzymes qu’elles libèrent. 4- Phase de déclin (de mortalité): µ diminue et devient <0 N diminue rapidement Les cellules meurent, les nutriments sont épuisés et les substances toxiques sont concentrées Autolyse Dans certains cas, les bactéries survivantes peuvent amorcer une nouvelle croissance en consommant les composés libérés lors de la destruction des cellules = croissance cryptique 3-4- Phénomène de diauxie = "deux croissances" Si une bactérie a à sa disposition deux substrats au lieu d’un seul, elle peut utiliser préférentiellement l’un des deux et ne commencer à recourir au deuxième qu’une fois le premier épuisé. Ce phénomène est appelé diauxie ou biphasie. Il existe aussi des phénomènes de triauxie avec 3 substrats carbonés. su Consommation de l’arabinose Consommation du fructose Exemple: On cultive E. coli sur un milieu contenant comme source de carbone du fructose et de l’arabinose. On observe une première phase de croissance I , suivie d’un plateau qui correspond à la phase intermédiaire de latence puis une deuxième phase exponentielle II. 4- Facteurs influençant la croissance N= f(T) Taux de croissance Max Min T° OPTIMALE T°C létale T° (°C) Le taux de croissance dépend de la nature du substrat et de la concentration d’un facteur limitant. µ augmente proportionnellement à la concentration en substrat (facteur limitant) jusqu’à atteindre une valeur constante (asymptote) 5- Croissance continue: en milieu renouvelé Inoculum Substrat Formation de la Biomasse Chargement Le système est fermé la transformation se déroule Début de réaction Déchargement Fin de réaction temps Système fonctionnant en continu (système ouvert) Les appareillages continus, sont dotés d’une ou plusieurs entrées pour introduire les réactifs et d’une ou plusieurs sorties par lesquelles les produits de la transformation sont évacués. Substrat Chemostat culture volume constant 1.Reservoir de milieu stérile (neuf) 2. Régulateur de débit 3. Entrée d’air 4. Filtre à air 5. Sortie d’air et entrée inoculum 6. Siphon déverseur de biomasse 7. Chambre de culture 8. Réceptacle collecteur. La concentration bactérienne varie en fonction de: - µ de l’espèce considérée - taux de dilution du milieu: D= d/V, où d correspond au débit de milieu neuf entrant et V au volume total de la cuve. La variation de la population peut être exprimée: dN/dt= (µ-D)N (Où N= nombre de bactéries) Si µ est max (conditions idéales), il y a 3 possibilités: µ max < D ; dN/dt <0 , la population diminue car l’effet de dilution est trop important pour que les microorganismes aient le temps d’utiliser le substrat. µ max= D ; dN/dt= constant => cas du turbidostat µ max > D; dN/dt augmente => cas du chémostat. La population est en constante augmentation jusqu’à épuisement du facteur limitant => µ= D. Turbidostat Autorégulation de D en fonction de la concentration bactérienne mesurée ( par D.O) N= constant µ= max 1.Réservoir de milieux stérile 4. Cellule photoélectrique (contrôle 2) 2. Régulateur de débit 3. Sortie 5. Source de lumière 6. Turbistat Chemostat - Volume constant - Régulation par mesure de la concentration - Limitation du substrat Turbidostat - Turbidité constante - Régulation par mesure de la D.O (spectrophotométrie) - Limitation du débit entrant Merci pour votre attention