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PURIFIE TON COEUR ! DR JOHN GOLDTHWAIT

PURIFIE
TON CŒUR !
DR JOHN GOLDTHWAIT
Je dédie ce livre à Sri Sathya Sai Baba qui en est la source et
l’inspiration et je l’offre à Ses Pieds de Lotus.
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REMERCIEMENTS
A ma femme, Barbara, qui offrit ses encouragements et son soutien constants
pendant l’écriture de ce livre et qui proposa gracieusement ses talents de
correctrice, avec amour.
A mon fils, David, qui prit la peine de réviser et de formater une version plus
ancienne du livre et qui fit quelques recommandations bien avisées pour son
amélioration.
A Gene Massey, pour ses encouragements incessants et son soutien
inestimable, sans qui ce livre n’aurait peut-être jamais été publié.
A David Alison, qui offrit de lire le manuscrit et qui apporta quelques
corrections et quelques suggestions bien senties.
Au président du Sri Sathya Sai Books and Publications Trust, va ma plus
profonde gratitude pour m’avoir autorisé à reproduire de multiples passages
des discours et des écrits de Sai Baba.
A Radha Soami Satsang Beas, pour m’avoir autorisé à reproduire deux
poèmes issus de l’anthologie de V.K. Sethi, ‘’Kabir, The Weaver of God’s
Name’’.
Et à toutes les personnes auprès desquelles j’ai eu le privilège d’apprendre
comment enseigner le processus de la purification du cœur.
3
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS
p.3
INTRODUCTION
p.6
CHAPITRE 1 : NOTRE VRAIE NATURE
p.7
CHAPITRE 2 : LE FAUX MOI
L’origine du faux moi
p.14
p.14
CHAPITRE 3 : LA PRATIQUE DE L’AMOUR
p.18
CHAPITRE 4 : COMMENT NOUS CRÉONS NOS PROPRES
‘’RÉALITÉS’’
p.21
CHAPITRE 5 : L’ESPRIT ET LES PENSÉES
Le pouvoir des pensées
Niveaux de pratique
Se détacher des pensées
Deux types d’attachement aux pensées
Les pensées qui ferment le cœur
L’exercice de la pratique du détachement
p.25
p.25
p.25
p.26
p.26
p.28
p.36
CHAPITRE 6 : LES SENTIMENTS ET LES DÉSIRS
Les sentiments
La dépression
La colère
La tristesse
La peur et l’angoisse
La joie, l’amour et la compassion
Les désirs
L’avidité
L’envie
La convoitise
Résumé
p.37
p.37
p.37
p.39
p.48
p.50
p.52
p.53
p.58
p.59
p.60
p.61
CHAPITRE 7 : LES GENS ET LES SITUATIONS COMME MIROIRS
p.63
Les gens
p.63
Nos enfants comme miroirs
p.68
Nos partenaires comme miroirs
p.69
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Les ‘’mauvaises’’ gens comme miroirs
Les figures spirituelles comme miroirs
Les situations comme miroirs
p.73
p.77
p.77
CHAPITRE 8 : LES RÊVES ET LES IMAGES MENTALES
Les rêves
Les images mentales
p.81
p.81
p.84
CHAPITRE 9 : LA MALADIE
Pratiquer le détachement envers la maladie
Recevoir l’enseignement de la maladie
Détachement et traitement médical
La douleur
La peur
La maladie qui peut être mortelle
L’effet d’ouvrir nos cœurs à la maladie
p.89
p.89
p.90
p.91
p.92
p.94
p.95
p.98
CHAPITRE 10 : LE MAITRE
p.100
CHAPITRE 11 : SE LIBÉRER DU FAUX MOI
Faire taire l’esprit pensant
Le concept du faux moi
Concepts spirituels
Les vasanas
La pratique
Comment le faux moi sabote la pratique
Les effets de la purification du cœur
p.110
p.114
p.115
p.117
p.117
p.119
p.119
p.122
RÉFÉRENCES
p.127
5
INTRODUCTION
En 1982, Sai Baba m’a révélé mon vrai Soi qui est pur amour et compassion,
mais peu après m’être éveillé à ma vraie nature, beaucoup d’anciennes
manières peu affectueuses sont revenues. Ce livre décrit la pratique spirituelle
que Baba m’a apprise pour évacuer les impuretés qui bouchaient mon cœur et
qui me séparaient de mon vrai Soi.
Cette pratique combine la psychologie occidentale et le Védanta, la
philosophie contenue dans les Upanishads. C’est une méthode puissante qui
nous permet d’appliquer les enseignements de Sai Baba dans la vie
quotidienne, de sorte que tout ce que nous expérimentons devienne un
passage par lequel nous pouvons réaliser notre vraie nature – l’amour absolu
et inconditionnel.
Vous apprendrez comment guérir la cause de votre colère, comment lâcher
vos désirs et comment contrôler votre esprit et vos sens. Vous réaliserez
comment le monde que vous pensez distinct de vous est en réalité votre
propre création, une création qui est parfaitement conçue pour vous indiquer
le chemin vers Dieu. Vous découvrirez comment tous vos succès et tous vos
échecs, toutes vos relations, toutes vos peines, tous vos désirs, tous vos
sentiments, toutes vos difficultés, tout ce que vous expérimentez, en fait,
peut être ce qui vous enseigne l’amour. La pratique décrite ici peut être
utilisée à n’importe quel moment, dans n’importe quelle situation et à
n’importe quel stade du développement spirituel. Plus vous l’utiliserez et plus
votre cœur s’ouvrira.
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CHAPITRE 1 : NOTRE VRAIE NATURE
Qui sommes-nous ? C’est la question spirituelle essentielle. Le point de vue
occidental traditionnel est que nous sommes séparés de Dieu et d’une nature
fondamentalement différente. D’un autre côté, la philosophie orientale
exprime l’idée que non seulement nous sommes un avec Dieu, mais que notre
vrai Soi est Dieu. Le Védanta contient la parole ‘’Tat Tvam Asi’’. Celle-ci
signifie : ‘’Tu es l’Atma (le Soi suprême)’’. Donc, le Védanta dit que nous
sommes l’Atma ou Dieu. Dans la Bhagavad Gita, Krishna, qui est un avatar
ou une incarnation de Dieu, dit à Arjuna : ‘’L’Atma est présent dans tous les
êtres et tous les êtres sont présents dans l’Atma’’ (VI, 29). Il poursuit : ‘’Je suis
l’Atma qui réside en tous les êtres. Je suis également le commencement, le
milieu et la fin de tous les êtres.’’ (X, 20). Krishna dit que rien n’existe à part
Dieu et que notre vraie nature est Dieu. Sai Baba affirme ceci : ‘’Vous n’êtes
pas différent de Dieu. Vous êtes Dieu, Dieu est vous.’’ (1990, p. 142).
Même si la majorité des chrétiens croient que nous sommes séparés de Dieu,
Jésus lui-même a confirmé notre unité avec Dieu, quand il a dit : ‘’Moi et le
Père, nous sommes un.’’ (Jn 10.30) et ‘’…Je suis en mon Père et vous en Moi et
Moi en vous’’ (Jn 14.20). Jésus affirme notre unité avec Dieu, quand il
déclare : ‘’Je vous dis en vérité que comme vous l’avez fait pour le plus petit
d’entre mes frères, c’est à Moi que vous l’avez fait’’ (Mt 25.40). Et dans
l’Evangile de Thomas, Jésus nous dit : ‘’Je suis la Lumière qui est sur eux
tous, Je suis le tout, le tout est sorti de Moi et le tout est revenu à Moi. Fends
un morceau de bois, Je suis là ; soulève une pierre et tu Me trouveras là’’
(logion 81). Donc, la tradition orientale et Jésus proclament notre unité avec
Dieu. J’ai reçu un aperçu de cette vérité au cours de deux expériences
inoubliables. Ces expériences m’ont fourni la compréhension qui est la base
de la pratique spirituelle décrite dans ce livre.
J’ai toujours cherché à connaître la vérité sur mon identité et la nature de la
réalité. Ma quête m’a amené à étudier la physique et la philosophie, à être
ordonné pasteur, à suivre une formation zen au Japon et à pratiquer le zen
pendant de nombreuses années par la suite. Plus tard, je suis devenu
psychologue clinicien spécialisé dans la psychologie transpersonnelle et j’ai
exploré les champs énergétiques qui sont décrits dans les pratiques
spirituelles orientales. Je sais que cet acquis, ainsi que d’autres expériences
mystiques antérieures et l’ouverture inconditionnelle de mon cœur de
compassion m’ont préparé à ce qui s’est produit, sinon je n’aurais pas pu
supporter l’énergie intense qui fit partie de mon éveil.
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En 1982, je participais à une retraite spirituelle, lorsque de grandes poussées
d’énergie kundalini, comme je l’ai appris plus tard, se sont mises à parcourir
mon corps en le secouant comme une feuille. Une force que je n’avais encore
jamais connue auparavant libérait toute l’énergie bloquée dans mon corps. J’ai
su intuitivement que ce qui se passait était juste et je me souviens avoir dit à
l’énergie : ‘’Va’’ et ‘’Prends-moi’’. Après quelque temps, les spasmes ont
diminué et un sentiment inconnu de paix et d’énergie dilatée m’a envahi.
Quelque temps plus tard, j’ai commencé à prendre directement conscience de
la façon dont j’étais tellement critique vis-à-vis de moi-même et des autres.
J’ai vu comment je comparais, comment je jugeais et comment je rejetais
constamment et j’ai vu comment cela me rendait malheureux. J’ai partagé
cela avec le guide de la retraite qui a répondu par quelques mots, mais ce que
j’ai ressenti, c’est son amour inconditionnel qui m’a ému aux larmes. Ensuite,
nous avons écouté un enregistrement du Messie de Haendel. J’ai ressenti une
profonde ouverture du cœur en embrassant le moi défectueux que je croyais
être. On aurait dit que mon cœur allait éclater. Il y avait une ‘’énergie’’
énorme qui dépassait tout ce que j’avais connu, en moi et autour de moi, et un
sentiment d’un pouvoir immense qui me dépassait. Toute ma conscience s’est
modifiée, le voile de la réalité ordinaire s’est dissout et le sentiment habituel
du moi a disparu.
Je me situais au-delà de moi-même et je pouvais me voir moi-même et le
monde à partir d’une perspective que je n’avais encore jamais expérimentée
auparavant. La vérité de l’existence ordinaire était limpide. Mon cœur s’est
rempli d’une infinie compassion en contemplant une scène où moi et les
autres, nous nous affairions à poursuivre une multitude de choses matérielles
qui nous causaient une souffrance indicible. J’ai vu l’illusion qui fait
apparaître l’argent, le pouvoir, le plaisir et la sécurité comme ayant une
importance suprême, alors que les seules choses qui comptent sont la
compassion et l’amour. C’est comme si, à notre insu, nous étions tous perdus
dans une pièce en croyant que c’est l’unique et ultime réalité, alors qu’il ne
s’agit là que d’un drame dans le théâtre de nos esprits. J’ai pu voir comment
nous poursuivons tous cette réalité apparente et comment nous basons nos
vies sur elle en croyant qu’elle est authentique. J’ai su que vivre comme si
l’illusion était vraie était la cause de notre souffrance et que ce qui nous
guérit, c’est l’amour et la compassion. Toute cette connaissance a jailli en un
seul instant. Puis, j’ai senti une ‘’énergie’’ extrêmement puissante qui
descendait sur moi, d’abord violette et qui est devenue blanche. Je me suis
senti élevé. J’ai su que je voulais m’en remettre à cette force et j’ai fait le vœu
de suivre la vérité qui m’avait été révélée et j’ai dit à voix haute : ‘’Je
n’oublierai pas’’ et le guide a dit : ‘’Si, tu oublieras.’’ Il avait raison. J’ai su
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tout de suite que ce serait le cas et j’ai éclaté de rire. Plus tard, j’ai remarqué
dans la pièce un poème écrit par Long Chen Pa :
Puisque chaque chose n’est qu’une apparition,
Parfaite en tant que telle,
Et qui n’a rien à voir avec le bien et le mal,
L’acceptation ou le rejet,
Il est permis d’éclater de rire.
J’ai su que je n’étais pas celui que j’avais toujours cru être. Je n’étais pas mon
corps, ni mon mental, ni ma personnalité, ni aucun des rôles que j’avais
adoptés, comme pasteur, mari, père, psychologue, etc. Tout ce que j’avais
pensé être, je ne l’étais pas. J’ignorais qui j’étais, mais je savais que je n’avais
jamais été celui que j’avais pensé être. J’avais vécu une illusion. J’ai su que
seule la Conscience transcendante qui est pure compassion et pur amour est
réelle, ce qui n’est qu’une autre façon de dire qu’il n’y a que Dieu. Tout le
reste fait partie de l’illusion. Pour nos esprits rationnels, c’est un non-sens. Il
paraît évident que vous, moi et le monde sommes réels, et Dieu peut paraître
irréel, mais depuis la perspective transcendante, c’est exactement l’inverse.
L’illusion donne l’apparence que nous sommes tous des êtres séparés, alors
qu’en vérité, nous sommes un. S’éveiller à cette vérité et apprendre comment
la vivre est tout ce qui compte. Tout le reste est sans importance et sans
raison d’être.
Je n’avais aucun doute sur le fait que la connaissance que j’avais reçue était
absolument vraie. Elle n’était pas venue petit à petit, mais tout d’un coup, en
un éclair. C’était instantané, complet et évident en soi. La vérité qui se situe
au-delà de l’illusion est toujours simple, évidente, incontestablement et
absolument vraie. J’ai réellement compris pour la première fois les textes
spirituels que j’avais lus. Je m’étais éveillé, inconscient du fait que je
‘’dormais’’.
L’impact fut énorme de réaliser que je n’étais pas mon corps ou mon mental
et que seul l’amour inconditionnel était réel. Il me fallait apprendre à vivre
dans un monde qui maintenant, je le savais, était une illusion. Tous les
modèles et tous les concepts de réalité que je m’étais efforcé si durement
d’acquérir n’avaient plus aucune valeur. Je savais que je n’étais pas la
personne que j’avais pensée être auparavant, mais je n’avais pas un sentiment
clair de qui j’étais. Mon ego, mal à l’aise avec cette absence de forme, était
anxieux de redéfinir un ‘’moi’’, de créer une structure et il s’est mis à soulever
des doutes. Parmi les favoris, il y avait : ‘’Que vas-tu faire, une fois rentré
chez toi ?’’ Si je suivais cette idée, je me perdais dans des imaginations sur la
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manière dont ma relation avec ma famille changerait et si je pourrais
continuer d’exercer en tant que psychologue. Le présent se perdit dans un
avenir imaginaire et ma conscience se retrouva piégée dans l’illusion. J’ai vu
avec quelle rapidité et combien insidieusement mon ego pouvait m’arracher à
l’unité. Heureusement, j’ai découvert un moyen de m’occuper de mon
ego/mental qui me coupe du présent : le tournoiement soufi. Il est
virtuellement impossible d’être dans sa tête et de tournoyer et donc, quand je
tournoyais, c’était le retour de l’éternel présent.
A l’époque, je me suis senti poussé à écrire ce poème :
Le Génie tapi au fond de mon cœur jaillit
Et remplit l’univers,
Allume toutes les étoiles,
Contemple mon petit moi…
‘’Je t’aime !’’, dit-il.
J’aime ta peur, ton arrogance, tes récriminations,
La manière dont tu Me nies
Avec tes livres, ta télévision et tes occupations.
J’aime tous les trucs incroyables
Que ton mental fabrique pour ne pas Me connaître,
Crois-Moi, mon fils,
JE SUIS.
Une fois rentré de la retraite, c’était comme si ma vieille identité m’attendait
pour que je me reglisse à l’intérieur. Tout m’invitait à continuer comme la
personne que j’avais été – mes relations avec ma femme et mes enfants, mes
amis, mon travail, mes vieilles habitudes et mes vieux modèles
comportementaux. Chacun s’attendait à ce que je sois ‘’moi’’, mais le ‘’moi’’
qui était parti, n’était pas le ‘’moi’’ qui était revenu. Je savais qu’il n’était pas
possible d’expliquer ce qui s’était passé, mais j’ai quand même essayé et j’ai
été universellement mal compris.
J’ai continué à être sans beaucoup d’identité propre. A cause de son insécurité,
mon ego a tenté à plusieurs reprises de me persuader de reprendre mon
ancienne identité. Il demandait : ‘’Comment te proposes-tu de soutenir ta
famille ?’’ ou ‘’Que vas-tu faire avec ta patientèle, maintenant ?’’ ou
‘’Comment sais-tu que toute la chose n’était pas qu’une illusion ?’’ Je savais
que si je m’embarquais dans l’une de ces questions, j’allais perdre la
perspective transcendante, mais après avoir cru l’illusion pendant quarantesept ans et après avoir développé une identité à l’avenant, la tendance à
retomber dans mes vieux schémas était forte et donc, il se fait que j’ai oublié.
Ce qui m’a fait basculer, c’est que peu après mon retour, j’ai connu un
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problème avec ma fosse septique qui n’a plus fonctionné pendant un mois.
J’ai conservé ma nouvelle perspective pendant quelques jours, mais à un
moment donné, je l’ai lâchée et j’ai commencé à être ennuyé par
l’incommodité et à me tracasser concernant les délais de réparation du
système. Je me suis ‘’réveillé’’ quelques jours plus tard, après avoir réalisé que
j’étais retombé dans l’illusion.
L’impulsion de partager ce que j’avais appris était irrésistible. Après tout,
j’avais là quelques ‘’bonnes nouvelles’’ et j’ai plusieurs fois pris la parole
depuis la chaire de l’église d’un ami. Je savais que ce que j’avais à dire était
radical, mais comment les gens pourraient-ils ne pas être intéressés par
quelque chose d’aussi important ? Plutôt facilement, comme j’allais le
découvrir, et je songeai que le ‘’moi’’ d’il y a quelques années aurait réagi de la
même manière. Ma famille, elle aussi, ne savait que penser à propos de ce qui
se passait. Ma femme s’inquiétait des changements en moi et de ce qui allait
advenir de notre relation. Ma nouvelle perspective spirituelle lui rappelait le
milieu religieux qu’elle avait rejeté et la rendait mal à l’aise et peu disposée à
me soutenir. Initialement, j’ai pensé que je devrais faire des changements
radicaux dans tout, mais j’apprenais que le changement essentiel ne consistait
pas en des revirements extrêmes au niveau de la réalité ordinaire qui, je le
savais, ne feraient que substituer un nouveau drame pour l’ancien, mais à se
libérer complètement du drame et pour y parvenir, je devais apprendre à
ouvrir mon cœur de plus en plus inconditionnellement à la vie telle qu’elle
est. L’essence de la transformation spirituelle n’est pas l’expérience
d’illumination elle-même, mais transformer sa vie en accord avec elle.
Environ neuf mois plus tard, j’ai eu une nouvelle expérience, encore plus
forte. Il n’y a littéralement aucun moyen de décrire ce qui s’est passé, car cela
dépassait le niveau du mental et c’était donc incompréhensible pour la
conscience ordinaire. Il n’y a que par l’expérience que l’on peut comprendre.
Je m’adonnais à la pratique de Ramana Maharshi de demander ‘’Qui suis-je ?’’
(une investigation de la nature du je), lorsque mon ‘’je’’ a disparu pour être
remplacé par une Conscience qui se situait loin au-delà de moi ou de tout ce
que j’avais jamais imaginé. L’énergie ou le pouvoir que j’avais ressenti comme
au-delà de moi pendant la première expérience était maintenant moi, sauf
qu’il n’y avait plus de ‘’moi’’, pas même au sens transcendant de la première
expérience où un sentiment de Moi témoin distinct existait encore. Je ne puis
même pas appeler cela une expérience, car il n’y avait personne à qui il
arrivait une expérience. Il n’y avait que l’unité. Cette Conscience était en
même temps chaque aspect de la création et sa source, non pas d’une
quelconque manière métaphorique, mais littéralement et réellement. Tout ce
que pensait cette Conscience prenait forme – les gens, les arbres, les nuages,
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les oiseaux, le vent, les couleurs, le ciel, toute chose. Mon moi individuel,
mon corps et mon mental n’existaient plus et il n’y avait même pas la
conscience de la compassion et de l’amour inconditionnels de l’expérience
précédente. Pour aimer, deux sont nécessaires : celui qui aime et l’objet de cet
amour. A présent, seul l’Un subsistait – une Conscience d’être le tout et sa
source. Cette pure Conscience était vaste, absolument immobile et immuable.
Ce ‘’Je’’ savait qu’Il avait toujours été et qu’Il serait toujours.
Ensuite, la conscience d’être Dieu est apparue, mais pas au sens personnel ou
au sens de l’ego, puisque mon moi individuel n’existait plus. En fait, rien
n’inspire plus d’humilité à l’ego que de réaliser qu’il n’est pas réellement réel,
et tout – l’espace, le temps, les formes – a commencé à disparaître dans un
tourbillon d’énergie indescriptible d’où il n’y aurait aucune possibilité de
retour. ‘’Je’’ disparaitrais à tout jamais dans la Conscience qui est Dieu.
L’énormité de cette disparition est devenue trop écrasante et l’énergie a
reflué. L’ ‘’expérience’’ avait ce que j’ai imaginé comme une ‘’signature
énergétique’’ que je ne comprenais pas à l’époque et j’ai découvert quatre ans
plus tard que mon Maître, Sathya Sai Baba, avait laissé Sa ‘’carte de visite’’.
Comme après la première expérience, il ne fallut pas longtemps avant qu’un
semblant d’ego ne resurgisse. J’ai su alors que l’éveil et la réalisation que
notre vraie nature est Dieu n’étaient pas la fin de ma quête, comme je l’avais
tout d’abord pensé. En dépit du fait que je connaissais mon vrai Soi, je voyais
bien que j’avais encore de l’attachement envers certains aspects de mon
ancienne identité, comme ‘’mon’’ corps, ‘’mes relations’’, ‘’ma’’ personnalité,
c’est pourquoi je n’avais pas pu disparaître en Dieu. Ce qui m’a sidéré, c’est la
manière dont mon ego, une fois revenu, n’a pas perdu de temps pour essayer
de s’accréditer ce qui s’était passé et pour l’utiliser pour son propre profit.
Mais le plus troublant, c’est que mon cœur n’était plus inconditionnellement
ouvert. Il n’y avait aucun mystère concernant la raison pour laquelle mon
amour était à nouveau conditionnel. Avec la clarté qui était maintenant la
mienne, je pouvais voir que c’était uniquement parce que je m’étais de
nouveau identifié à des parties de mon ancien moi. Contrairement à mon vrai
Soi, mon petit moi mettait d’autres choses avant l’Amour. (Lorsque j’utilise
la majuscule pour l’amour et la compassion, je parle d’Amour et de
Compassion inconditionnels et divins). Parce que mon petit moi avait
souvent poursuivi d’autres priorités que l’Amour, il avait développé des
‘’réflexes conditionnés’’ qui fermaient son cœur. Ils semblaient se produire
automatiquement, quasiment avant même que je n’en prenne conscience. Ces
réactions, comme les jugements critiques et le besoin que les gens soient
différents de ce qu’ils étaient me séparaient de la Compassion
inconditionnelle que j’avais connue. J’aspirais à retrouver cet Amour. Pour
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que ceci arrive, je savais que je devrais renoncer au reliquat d’identification
avec la personne que j’avais pensée être durant toutes ces années, à ce que je
considérais maintenant comme mon ‘’faux moi’’. Je savais que tant qu’il
subsistait la moindre identification au faux moi, mon cœur ne serait pas
inconditionnellement ouvert.
Après ces expériences, vous pourriez penser que renoncer à mon faux moi
aurait été facile. Pas du tout ! Malgré mes connaissances de psychologue,
j’ignorais à quel point renoncer à mon ancienne identité serait difficile. J’étais
plus attaché que je ne le réalisais. Alors, j’ai commencé à développer une
méthode pour purifier mon cœur, en dénouant les attachements à mon faux
moi qui limitaient mon amour. Les expériences que Sai Baba m’avaient
accordées me fournissaient précisément la compréhension dont j’avais besoin.
Elles me montraient que je n’étais ni mon mental, ni mon corps, ni ma
personnalité et que mon sentiment de séparation avec Dieu était une illusion.
J’ai su que nous sommes Dieu, non pas dans notre conscience égotiste
ordinaire, mais dans notre essence, au-delà de l’illusion de la séparation. Dieu,
ou ce que j’appelle maintenant l’Un n’est pas là-haut quelque part, mais c’est
notre véritable nature, qui nous sommes réellement. J’ai su que nous sommes
nés pour un unique but : réaliser notre nature divine et nous fondre dans l’Un
qui est Amour. ‘’Voir à travers le brouillard qui projette le multiple là où il
n’y a que l’Un est le but de toute discipline spirituelle’’ (Sai Baba, 1980, p.129).
Et le plus important, j’ai su que seul l’Un et sa manifestation d’Amour et de
Compassion absolus sont réels. Cette Compassion et cet Amour ne sont pas
un simple prolongement de l’amour et de la compassion que nous
connaissons et ne sont pas des sentiments. Il s’agit d’une Conscience
absolument différente, une Conscience que l’on peut décrire au mieux comme
une Compassion pure, qui vous submerge, au-delà de toute croyance. Rien de
ce que nous pouvons dire sur l’Amour ne peut le décrire ou le contenir en
aucune manière, parce que cet Amour transcende tous les concepts et tous les
mots. Tout ce que nous pouvons dire à son propos n’est pas lui. Si nous
pouvions dire à son propos quelque chose de vrai, il ne serait pas ce qu’il est.
C’est la raison pour laquelle l’Un qui est Amour semble si mystérieux, bien
qu’il n’est mystérieux que pour le mental et pas pour le cœur.
En utilisant la compréhension spirituelle que Sai Baba m’a donnée par
l’entremise des expériences décrites et par des enseignements ultérieurs, j’ai
développé une méthode puissante pour libérer l’Amour que nous sommes en
relâchant l’attachement au faux moi. ‘’Purifie ton cœur’’ décrit cette pratique.
En utilisant cette méthode, chaque attachement qui ferme notre cœur devient
ce qui nous enseigne l’Amour.
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CHAPITRE 2 : LE FAUX MOI
Même si notre vraie nature est l’Un, nous grandissons pratiquement tous en
croyant que nous sommes quelque chose de très différent. Comment se fait-il
que nous en arrivions à croire que nous sommes des ‘’mois’’ séparés, alors que
nous sommes l’Un ? Si nous et tout ce qu’il y a, nous sommes l’Un, vous
penseriez que ce serait évident, mais notre expérience semble plutôt
confirmer que nous sommes des individus séparés vivant dans un monde qui
est constitué de choses distinctes et absolument réelles, tout comme nous. La
supputation que nous sommes des personnes séparées est si omniprésente et
prise comme allant de soi que nous ne la remarquons même pas et que nous la
mettons encore moins en doute.
Prenez maintenant le temps de voir si vous pouvez penser ou faire quoi que
ce soit qui ne présume pas que vous êtes une personne séparée. Remarquez
comment chaque pensée ou chaque action se base sur la conviction que vous
êtes la personne individuelle que vous pensez être. Si la réalité apparente de
ce moi est une illusion, d’où provient-elle et pourquoi n’est-elle pas évidente ?
La Bhagavad Gita nous dit que Brahman (Dieu) a causé l’illusion de la
séparation. Krishna dit : ‘’Ceci est Ma divine illusion et elle est difficile à
surmonter’’ (VII, 14). Si l’illusion est causée par l’Un, quel est son but ?
L’Avatar Sathya Sai Baba décrit ainsi notre origine et la nécessité de
l’illusion : ‘’Au commencement sans commencement, Dieu était un et cette
pensée jaillit en Lui : ‘’Je suis un, que Je devienne multiple’’ (1990, p.74). Sai
Baba développe : ‘’Je Me suis séparé de Moi-même afin de pouvoir M’aimer.
Mes bien-aimés, vous êtes Mon propre Soi’’ (1988b, p.131). Ainsi, Sai Baba
affirme que l’illusion du multiple, c’est pour que l’Un puisse s’aimer. Pour
aimer, il faut être deux : celui qui aime et le sujet de cet amour. S’il n’y avait
pas l’illusion d’être des personnes séparées, l’Un ne pourrait pas s’aimer, car
si nous étions conscients d’être l’Un, il n’y aurait personne d’autre à aimer.
Lorsque nous nous aimons, l’Un s’aime, parce que nous sommes l’Un, c’est
pourquoi toutes les religions insistent sur l’amour.
L’ORIGINE DU FAUX MOI
Pour se dégager de l’identification avec le faux moi qui cache notre vraie
nature, il est indispensable de comprendre comment nous avons appris à nous
identifier à ce moi et pourquoi nous continuons d’être tellement attachés à
lui. C’est seulement alors que nous pourrons apprendre à nous délivrer de
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cette identité de méprise et à découvrir l’Amour que nous avons toujours été
et que nous serons toujours.
Avant que le ‘’Je’’ ne s’identifie à un corps physique, il est l’Un. L’illusion du
faux moi survient, lorsque ce ‘’Je’’ s’identifie au corps et divise ainsi l’Un
dans l’illusion d’un moi séparé, que nous appelons ‘’je’’ ou ‘’moi’’ et tout le
reste, que nous considérons comme ‘’pas moi’’. Une fois que nous nous
sommes identifiés au corps physique, nous perdons la conscience de notre
identité en tant que Soi et nous nous identifions au faux moi. Nous
commençons tous sous l’emprise de cette illusion. ‘’Tous les êtres depuis leur
naissance même…sont trompés par l’illusion des paires d’opposés issues du
désir et de l’aversion…’’ (Bhagavad Gita, VII, 27). L’illusion d’être une
personne séparée distincte de l’Un est appelée dualisme. Le dualisme est
l’essence du monde ordinaire. Si nous cessions de nous identifier au faux moi,
l’illusion du dualisme se dissiperait comme le mirage qu’elle est et notre vraie
nature qui est l’Amour serait évidente. ‘’L’état de non-dualisme est contenu
dans le seul principe d’amour’’ (Sai Baba, 2000c, p.228).
L’illusion d’être le faux moi est probablement inhérente, au moment de notre
naissance, mais si ce n’est pas le cas, nous sommes rapidement conditionnés à
croire que nous sommes des personnes séparées par nos parents qui nous
traitent ainsi. (J’utiliserai le terme ‘’parents’’ pour désigner l’ensemble des
personnes avec lesquelles l’enfant a des contacts significatifs, comme celles
qui jouent le rôle des parents, les frères et sœurs, d’autres membres de la
famille et les amis.) On a plus que vraisemblablement enseigné à nos parents
qu’ils n’étaient pas l’Un et que penser une telle chose était une absurdité,
voire même un blasphème. Puisque nos parents ne savaient pas qui ils
étaient, ils n’ont pas su reconnaître qui nous étions.
Souvent avec la meilleure des intentions, nos parents nous ont appris à croire,
comme ils croyaient. La majorité de cette éducation n’était pas directe, mais
implicite dans la façon dont ils se reliaient à nous. Leur a priori inconscient
suivant lequel nous sommes des personnes séparées, et non Dieu, était
invisible et n’était pas mis en doute et globalement, le monde confirmait et
renforçait cette conviction. Une fois assimilé à une personne séparée, le
monde a semblé constitué de choses individuelles distinctes, comme maman,
la nourriture, les chaises, le chien, etc. Nos parents nommaient et
définissaient ces formes apparentes et ils nous ont enseigné à voir et à
comprendre le monde à leur façon. Ils nous ont appris que l’illusion de la
multiplicité est la réalité et l’unique réalité, plutôt qu’un genre de drame qui
n’a pas plus de réalité qu’un film sur un écran. Ainsi donc, l’environnement
dans lequel nous sommes nés niait notre véritable nature et puisque ceux qui
15
l’ont fait n’étaient pas conscients de leur nature véritable, ils ne pouvaient
rien faire pour faciliter notre éveil.
Notre besoin le plus profond est d’aimer et d’être aimé. C’est un reflet de
l’Un qui s’est dédoublé pour pouvoir s’aimer. Si en tant qu’enfants, nous
n’étions pas aimés, c’était très douloureux. Sitôt que nous éprouvions la
douleur de ne pas être aimés, nous devenions fort sensibles à la moindre
désapprobation et à tout déficit d’amour de la part de notre entourage et nous
faisions tout notre possible pour faire cesser cela. Nous placions nos espoirs
dans la promesse implicite que si nous pouvions être tels que nos parents
désiraient, alors ils nous accepteraient et nous aimeraient. Ce que nous avons
expérimenté, c’est l’amour conditionnel. L’amour conditionnel dit : ‘’Je
t’aimerai, si et seulement si tu fais ou si tu es comme je veux.’’ Il divise l’Un
entre aimable et pas aimable, bon et mauvais, désirable et indésirable et toutes
les autres discriminations dualistes qui nous coupent de l’Amour. L’amour
conditionnel est la caractéristique du faux moi.
Pour obtenir leur approbation et leur amour et pour éviter la douleur d’être
rejetés, nous avons essayé l’opposé de tout aspect ‘’défectueux’’ ou
‘’détestable’’ que nous avions selon eux, et pour ce faire, il nous fallait
anticiper ce qu’ils voulaient et nous efforcer d’être ainsi avant qu’ils ne
puissent nous rejeter. Nous avons appris à cesser d’être ou de faire tout ce
qu’ils désapprouvaient. Cette stratégie a maximisé l’amour que nous avons pu
avoir, mais à quel prix ? Le prix, c’est qu’en essayant de nous changer pour
devenir plus ‘’dignes d’être aimés’’, nous avons confirmé et renforcé en nous
la conviction que nous n’étions pas dignes d’être aimés, tels que nous étions.
Sinon, nous n’aurions pas eu besoin d’essayer d’avoir l’air différent. Qui plus
est, notre espoir que cette stratégie entraîne un amour inconditionnel était
condamné, car, pour que nos parents nous aiment inconditionnellement, ils
auraient d’abord dû s’aimer eux-mêmes inconditionnellement, ce qui était
précisément ce qu’ils étaient incapables de faire. Ainsi, quoi que nous
fassions, nous n’avons jamais pu être aimés inconditionnellement par ceux
qui ne pouvaient pas s’aimer eux-mêmes inconditionnellement. Si nos
parents avaient pu s’aimer eux-mêmes inconditionnellement, ils nous
auraient aussi aimés inconditionnellement, peu importe comment nous étions
ou ce que nous avons fait.
A cause de cet ancien conditionnement, nous en sommes arrivés à croire que
nous étions quelque part défectueux et indignes d’être aimés, comme nous
étions. Après tout, c’est ainsi qu’on nous avait traités. Nous avons supposé
que, si seulement nous pouvions corriger nos soi-disant imperfections et être
comme nous ‘’devrions’’ être, nous serions finalement approuvés et aimés.
16
Nous avons imaginé que, si seulement nous pouvions être plus intelligents,
plus travailleurs, plus beaux, ou si seulement nous pouvions avoir telle ou
telle qualité qui nous manquait, alors tout serait parfait. Et donc, nous avons
tenté d’y parvenir, d’abord à la maison et puis dans le monde. Ce qui fut
d’abord une stratégie pour obtenir de l’amour est devenu un mode de vie
fondé sur notre identification de méprise avec le faux moi, un moi qui ne
connaissait pas l’Amour.
En prétendant être ou en devenant même quelque chose que nous n’étions pas
pour plaire à nos parents, nous avons tous fermé nos cœurs à divers degrés.
En bref, nous avons appris à nous trahir pour obtenir de l’amour. Ceci était
moins pénible que le fait qu’ils nous ferment leurs cœurs et c’était donc
préférable. Quand nous avons d’abord essayé d’être ou de faire semblant
d’être ce que voulaient nos parents, il est même possible que ceci n’ait pas été
ressenti comme une trahison, mais plutôt comme l’unique voie raisonnable,
étant donné l’environnement dans lequel nous nous trouvions. Mais il n’y a
pas de blessure plus sérieuse que de consciemment fermer son cœur à soimême et nous avons vite oublié ce que nous avons fait, parce que s’en
souvenir était trop pénible. Nous en sommes arrivés à croire que nous étions
en réalité les fausses personnes auxquelles on nous avait assimilés et qu’on
nous avait formés à être. En bref, nous avons adopté les manières de nos
parents et nous avons commencé à nous aimer nous-mêmes et les autres sous
condition, en cimentant ainsi notre identité avec ce faux moi.
En résumé, le faux moi apparaît, lorsque nous nous identifions au corps et
lorsque nous croyons être un moi séparé, un ‘’je’’ parmi des milliards de ‘’je’’.
Dès lors, nous ne croyons pas être l’Un et nous croyons que l’Un, s’il existe,
est quelque part ailleurs, au lieu d’être notre essence la plus profonde, qui
n’est jamais plus loin que dans nos propres cœurs. Cette fausse identité est
cimentée par notre amour conditionnel qui divise l’Un entre ce qui peut être
aimé et ce qui ne peut pas l’être, ce qui nie ainsi notre vraie nature. Avec
notre identification au faux moi, nous avons d’abord fermé nos cœurs à nousmêmes, puis aux autres. Nos façons de penser et d’agir sans amour ont
contaminé nos cœurs. Pour purifier nos cœurs, nous devons apprendre à
renoncer à notre identification et à notre attachement au faux moi et à ses
manières qui manquent d’amour.
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CHAPITRE 3 : LA PRATIQUE DE L’AMOUR
‘’Le Seigneur Krishna a déclaré dans la Bhagavad Gita : ‘’Tous sont une part de Mon
Être. Vous et Moi, nous ne sommes pas séparés. Le principe d’amour est unique et
identique en nous. Toutes vos pratiques spirituelles s’avéreront vaines, si vous
n’adhérez pas au principe de l’amour’’ (Sai Baba, 2000c, p.229).
‘’L’amour éternel et pur émane du cœur. En fait, il existe toujours et il imprègne tout.
Comment se fait-il alors que l’homme soit incapable de reconnaître cet amour qui
imprègne tout ? C’est parce que le cœur de l’homme est devenu sec aujourd’hui et qu’il
est pollué. Le cœur est rempli de toutes sortes de désirs et il n’y a pas de place pour
l’amour pur et immaculé. Ce n’est que si les attachements matériels sont évacués du
cœur qu’il y a de la place pour que l’amour réel puisse y demeurer et grandir’’ (Sai
Baba, 1999g, p.214). ‘’Ainsi, en tout premier lieu, purifiez votre cœur’’ (Sai Baba,
2001b, p.112).
Les religions ont toujours insisté sur l’amour en tant que voie qui mène à
Dieu, parce que ‘’Dieu qui est Amour ne peut être réalisé que par l’Amour’’
(Sai Baba, 1985, p.68). Les expériences que j’ai relatées dans le chapitre 1 m’ont
fait clairement comprendre que l’Amour seul est réel et qu’il ne fait pas partie
de l’illusion. Ainsi, Sai Baba nous dit : ‘’Il n’y a qu’une chose qui soit
permanente et c’est l’amour divin. Il relie le cœur au cœur et l’amour à
l’amour, nous devons donc développer l’amour’’ (1996c, p.10). Jésus proclame
également la primauté de l’amour : ‘’C’est mon commandement que vous
vous aimiez mutuellement, comme je vous ai aimés’’ (Jn 15.12). Et dans le
bouddhisme, on insiste aussi sur la compassion et sur l’amour. Un disciple
demanda une fois au Bouddha : ‘’Serait-il exact de dire qu’une partie de notre
formation sert à développer l’amour et la compassion ?’’ Le Bouddha
répondit : ‘’Non, dire cela ne serait pas exact. Il serait exact de dire que
l’intégralité de notre formation sert à développer l’amour et la compassion.’’
‘’Si vous développez l’amour, vous n’avez pas besoin de développer autre
chose’’ (Sai Baba dans Hislop, 1978, p.13).
Alors, comment pouvais-je développer l’amour ? Je pouvais certainement
choisir d’être plus aimant, mais je savais que mon attachement à mon faux
moi me limiterait. Par exemple, j’étais attaché à la justice et si je voyais
quelqu’un se montrer injuste, je réagissais par des pensées critiques qui
fermaient mon cœur. Donc, peu importe combien j’essayais d’être aimant,
mes attachements limitaient toujours mon amour. De par mes expériences,
j’ai su que si je voulais libérer l’Amour qui est mon vrai Soi, je devais trouver
un moyen pour supprimer l’unique obstacle – l’identification avec le faux
moi. Je découvris toutefois que, parce que j’étais attaché à ce moi, je ne
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pouvais tout simplement pas le lâcher et tant que j’étais attaché, il n’y aurait
pas d’Amour. Clairement, si je voulais purifier mon cœur, je devais trouver
un moyen pour défaire les attachements qui fermaient mon cœur et guidé par
Sai Baba, j’ai commencé à apprendre la méthode de la pratique du
détachement qui est décrite dans ce livre. ‘’Ce n’est que si les attachements
matériels sont évacués du cœur qu’il y a de la place pour que l’amour réel
puisse y demeurer et grandir.’’
Le détachement, c’est ne pas avoir besoin que quelqu’un ou quelque chose soit
différent de ce qu’il ou elle est maintenant ni essayer de s’y accrocher en cas
de changement. Le détachement, c’est être l’éternel Témoin – prendre du
recul et observer ce qui est tout en étant complètement présent, mais
‘’désidentifié’’ de ce que l’on observe. Le détachement ne signifie pas renoncer
à tout et se retirer dans la forêt pour y pratiquer des austérités. Il signifie ne
renoncer qu’à une seule chose : à notre attachement à l’ego ou faux moi.
‘’L’Amour ne peut émerger qu’avec un tel détachement total’’ (Sai Baba,
1999h, p.199). Sai Baba parle de cet Amour : ‘’Aujourd’hui, l’homme est
totalement inconscient de ce que l’Amour signifie. L’homme assimile le désir
avec l’Amour. Il s’imagine que tout ce qu’il désire est motivé par l’Amour. Ce
n’est pas le véritable Prema. Prema est totalement sans désir. Il est purement
désintéressé. Il ne cherche aucun retour. Il englobe tout. Il ne fait aucune
différence entre ami et ennemi’’ (1999h, p.279-80).
Nous maintenons notre attachement au faux moi de deux façons. La
première, en désirant, en saisissant ou en nous accrochant à une chose et la
seconde, en l’évitant, en la refusant ou en la rejetant. Ces deux types
d’attachement sont dus à notre conviction d’être le faux moi, parce que c’est
le faux moi qui a des désirs et des aversions. Ces deux types d’attachement
combinés perpétuent notre identification avec le faux moi. Avec le premier
type d’attachement où nous nous accrochons à une chose, le détachement,
c’est lâcher prise et observer, tout en restant totalement présent et
désidentifié. Par exemple, si vous étiez attaché à l’idée d’acheter une nouvelle
voiture, vous détacher voudrait dire vous défaire de l’envie d’avoir la voiture
en observant calmement les pensées de désir, sans implication et sans agir par
rapport à elles. Si vous vous identifiiez à vos capacités athlétiques et si vous
en tiriez de l’orgueil, vous détacher serait cesser de vous identifier à elles et
devenir le témoin détaché de celles-ci et de votre orgueil. Et si vous étiez
attaché à ce que quelqu’un modifie son comportement, vous pratiqueriez le
détachement en apprenant à cesser d’essayer de modifier son comportement
et en laissant simplement la personne être elle-même.
19
Le second type d’attachement, c’est nier, rejeter ou refuser quelque chose.
Donc, le détachement dans ce cas, c’est cesser de la nier, de la rejeter ou de
l’éviter. Par exemple, si vous vouliez nier la tristesse, vous déferiez
l’attachement en mettant un terme à toutes les manières via lesquelles vous
évitiez votre tristesse et en permettant simplement à la tristesse d’être
pleinement présente sans tenter de l’altérer, de l’alléger ou de la faire partir.
Si vous étiez attaché à rejeter la critique, vous cesseriez d’objecter et de
fermer votre esprit en ce qui la concerne et vous lui permettriez d’être
pleinement présente dans votre conscience sans la juger ni la justifier. Les
prochains chapitres expliqueront en détail et précisément comment pratiquer
le détachement dans tous les types de situations qui se produisent dans nos
vies quotidiennes.
Pour vous libérer de votre attachement au faux moi, la purification du cœur
devra devenir votre plus grande priorité. Votre cœur se purifie en dénouant
les attachements qui le bloquent. Chaque fois que vous renoncez à un
attachement qui bloque votre cœur, vous vous rapprochez de l’Amour. Par
exemple, ne plus vous attacher à condamner quelqu’un fera en sorte que votre
cœur s’ouvrira à cette personne et transformera votre rejet en compassion et
vous expérimenterez la personne complètement différemment. C’est le
principe de base de la transformation spirituelle : si vous vous détachez de
quelque chose, votre cœur s’ouvre à celle-ci et votre expérience de celle-ci se
transforme et reflète plus profondément le changement de conscience avec de
l’Amour. Lorsque vous n’avez plus aucun attachement au faux moi, votre
cœur ne se ferme plus et ce qui reste, c’est votre vrai Soi – la Conscience qui
est pur Amour.
20
CHAPITRE 4 : COMMENT NOUS CRÉONS NOS PROPRES
‘’RÉALITÉS’’
Si nous envisageons de pratiquer le détachement, de quoi allons-nous nous
détacher, exactement ? La réponse peut sembler évidente – nous pratiquons
avec tout ce qui se présente, maintenant. Mais la ‘’réalité’’ extérieure n’est pas
ce qu’elle semble, ni l’intérieure. Pour réussir à purifier nos cœurs, nous
devons comprendre ce qu’est en fait la réalité que nous expérimentons.
Une partie de l’expérience de réalisation que j’ai décrite dans le premier
chapitre fut que ‘’mes’’ pensées créaient la réalité que j’expérimentais.
Lorsque mon esprit ordinaire est revenu, il m’a dit que c’était impossible.
Comment se pourrait-il bien que ce ‘’je ‘’ insignifiant crée le monde ? C’était
quand je croyais encore que le monde était réel, solide et séparé de moi plutôt
qu’existant seulement comme une image dans ma conscience. Ce n’est qu’une
dizaine d’années plus tard que j’ai vraiment compris que ma ‘’réalité’’ n’était
en fait qu’une création de mon esprit. La compréhension m’est venue, quand
j’ai remarqué qu’après que mon identification au faux moi ait suffisamment
diminué, j’ai expérimenté l’univers apparent comme provenant du centre de
ma poitrine. (Les Upanishads disent que d’un point de vue dualiste, l’Atma se
situe au centre de la poitrine.) Le monde qui semblait ordinairement ‘’làdehors’’ émanait de moi et je savais qu’il pouvait retourner en moi. Non
seulement était-il inséparable de moi, mais il avait en moi son origine et Sai
Baba le confirme : ‘’Le monde entier est une projection de l’esprit’’ (1997d,
p.190) et ‘’l’univers entier est en vous’’ (1998a, p.286). C’est vrai. L’univers que
j’expérimente est en moi. Il paraît être réel et à l’extérieur de moi, mais je sais
qu’il est en fait irréel et qu’il n’est qu’une projection de mon esprit. ‘’Le
monde n’a aucune existence en dehors de vous. A chaque instant, il n’est
qu’un reflet de vous-même. Vous le créez et vous le détruisez’’ (Nisargadatta,
1973, p.94).
Au moment où j’ai expérimenté que j’étais la source de mon monde, cela fut
aussi incroyable pour mon esprit que ce l’est sans doute pour le vôtre.
Néanmoins, c’est arrivé, comme auparavant. Ramana Maharshi (1985)
explique : ‘’Comment l’esprit qui a lui-même créé le monde peut-il accepter
son irréalité ? C’est tout le sens de la comparaison entre le monde de l’état de
veille et le monde du rêve. Tous les deux sont des créations de l’esprit et tant
que l’esprit est absorbé dans l’un ou dans l’autre, il se trouve dans l’incapacité
de refuser leur réalité’’ (p.189). Le faux moi ne croira jamais que sa réalité
n’est en fait qu’un reflet de lui-même, car cette vérité ne peut être comprise
que si nous nous sommes suffisamment dégagés du faux moi et du mental.
21
Une façon de comprendre comment nous créons nos réalités, c’est d’imaginer
que le mental est un film et que l’Un est la lumière. Quand la lumière brille à
travers le film du mental, elle projette des images du faux moi. L’Un est
toujours là, mais nous n’en avons aucune conscience, parce que nous nous
focalisons sur les images. Le faux moi réagit à cette projection de lui-même,
comme si elle était réelle et entretient ainsi l’illusion. Tant que nous croyons
que les images projetées sur nos écrans intérieurs sont réelles, nous sommes
pris par la même illusion que nous le serions, si nous croyions que tout ce que
nous avons vu dans un film était réel. Le faux moi demeure piégé dans sa
propre identité, parce que cette identité est la source du monde qu’il
expérimente et donc, ce qu’il expérimente semblera toujours confirmer que le
faux moi et son monde sont réels.
Nous expérimentons l’illusion d’une réalité extérieure, parce que nous nous
sommes identifiés au faux moi. Nos réalités sont une projection de cette
identité erronée. Bien entendu, nos expériences de cette réalité apparente
varient, parce qu’étant différents, nos mentals projettent des réalités
différentes. Ce que nous voyons, c’est qui nous sommes. ‘’Toutes ces choses
que vous voyez autour de vous sont vos propres reflets, comme dans un
miroir’’ (Sai Baba, 1990, p. 118). Par exemple, si nous croyons que le monde
est plein d’amour, il le sera. D’autre part, si nous croyons que les gens
abuseront de nous, alors, ce sera le cas. Si nous croyons : ‘’Je ne suis pas assez
bon’’, alors, nous expérimenterons que les autres nous jugent déficient. Et si
nous nous fermons nos cœurs à nous-mêmes, nous expérimenterons que les
gens sont peu aimants à notre égard et généralement nous leur en voudrons
pour ce qui se passe. En réalité, nous créons inconsciemment nos mondes à
l’image de nos propres faux mois. Chaque fois que nous expérimentons quoi
que ce soit qui n’est pas l’Un, ce que nous expérimentons est un reflet ou une
projection de nos faux mois.
Puisque nous créons tous nos propres réalités uniques, il semblerait que nous
n’ayons ni terrain commun, ni réalité consensuelle, mais nous en avons
manifestement une. La réalité consensuelle apparaît, car elle est un reflet ou
une projection de l’Un. De plus, nos aïeux nous ont appris à tous à interpréter
fondamentalement de la même façon la réalité apparente. Nos réalités
personnelles sont des variations de la réalité consensuelle qui diffèrent, parce
que ce sont des reflets de nos conditionnements et articles de foi uniques.
Ainsi, nous colorons chacun distinctement l’illusion. Si nous expérimentons
un événement de manière semblable, c’est parce que nos réalités se
recouvrent suffisamment. Si nous expérimentons différemment un
événement, c’est parce que nos faux mois divergent. ‘’Toutes les différences
que vous trouvez dans le monde ne sont que les reflets de votre mental’’ (Sai
22
Baba, 1990, p. 140). Par exemple, lorsque deux personnes parlent, quelqu’un
pourra expérimenter leur échange de paroles comme un jeu amusant et
quelqu’un d’autre pourra l’expérimenter comme une controverse. Ce que
quelqu’un pourrait considérer comme de l’amour dur, quelqu’un d’autre
pourrait l’interpréter comme de la cruauté. Si nous nous écartons toutefois
trop de la réalité consensuelle, nos parents et d’autres deviendront mal à l’aise
et tenteront généralement de nous ‘’corriger’’. Nous apprenons vite à ne pas
dévoiler toute expérience qui est trop différente.
La réalité apparente des formes séparées provient principalement des images
visuelles que nous pensons voir, et non des autres sens qui ne nous proposent
pas de séparation aussi clairement tranchée entre les choses. Il est bien connu
que ce que nous pensons voir est généré par la manière dont nos cerveaux
traitent les impulsions électriques causées par les ondes lumineuses qui
frappent la rétine. Ce ne sont pas des images qui entrent dans l’œil, mais de
l’énergie lumineuse. Les images que nous ‘’voyons’’ n’existent pas ‘’à
l’extérieur’’, comme nous le supposons, mais elles sont créées par nos
cerveaux. Karl Pribram (1971,1977) a décrit comment le cerveau traite les
ondes d’énergie reçues par l’œil et comment il les transforme en images
tridimensionnelles. Le neurologue Oliver Sacks (1995) a démontré que les
ondes d’énergie qui frappent la rétine ne sont pas perçues comme de la
couleur avant qu’elles ne soient traitées par le cerveau. Sacks
(1995) décrit également un homme ayant retrouvé la vue après cinquante ans
de cécité, mais incapable de comprendre ce qu’il ‘’voyait’’, alors qu’il pouvait
tout identifier par le toucher. Son cerveau n’avait pas appris comment donner
du sens aux impulsions électriques fournies par la rétine.
Au cours d’une expérience classique de la psychologie, des personnes mirent
des lunettes qui renversaient leur champ visuel, de sorte que le haut était en
bas. Rapidement, leurs cerveaux apprirent à inverser ce renversement et le
‘’haut’’ sembla de nouveau être le haut jusqu’à ce qu’elles enlèvent leurs
lunettes, après quoi le cerveau dut à nouveau réajuster sa perception. Il existe
des éléments qui prouvent que le cerveau traite similairement les impulsions
électriques issues des autres organes des sens pour construire les autres
aspects de la ‘’réalité’’ qui existe à l’extérieur de nous, croyons-nous. ‘’C’est
l’esprit qui crée en lui sa conception de l’univers. Il donne forme aux
perceptions reçues des sens’’ (Sai Baba, 1997d, p. 56). Donc, la réalité que nous
pensons être à l’extérieur est entièrement la création de nos cerveaux et elle
n’existe qu’en tant qu’images dans nos esprits. ‘’Le monde extérieur est créé
par notre propre esprit…Tout n’est qu’apparence…prise à tort pour être là,
mais en réalité une chose inexistante’’ (Sai Baba, 1970,p. 30).
23
En vérité, aucun objet séparé ni aucun ‘’je’’ individuel n’existe. Quand des
physiciens tentent de découvrir la présumée particule fondamentale, ils font
face à une réalité qui ne se comporte pas en modes dualistes, qui n’est pas
descriptible, ni compréhensible et qui ne peut se réduire significativement à
des particules. ‘’Les scientifiques emploient souvent deux termes – la matière
et l’énergie, mais à dire vrai, seule l’énergie existe’’ (Sai Baba, 2000b, p. 8485). Ce ne sont que nos esprits dualistes qui insistent sur le fait que le monde
doit être composé de particules séparées, comme des quarks ou des bosons, un
concept qui cadre avec la vision du monde dualiste suivant laquelle la réalité
est constituée de formes discrètes. Le théorème de Bell (Bell, 1964) démontre
que, si les prédictions statistiques de la mécanique quantique sont exactes, et
elles l’ont toujours été, alors le monde n’est pas constitué de particules
séparées, comme il semble l’être. Une possibilité suggérée par les physiciens
pour expliquer ceci, c’est que tout est interconnecté et fondamentalement
inséparable et donc, il n’y a pas de particules individuelles. Ici, la physique
commence à s’approcher de la découverte que la diversité apparente des
formes est une illusion et que la Réalité est indivisible et une.
Le problème que nous avons avec les réalités que nous créons, c’est que nous
en apprécions certaines et pas d’autres. La solution, c’est de les aimer toutes et
ce livre nous montre comment faire. Il nous aide à reconnaître que tout ce
que nous expérimentons est parfait en tant que tel pour nous encourager à
purifier nos cœurs. C’est parce que nos réalités sont des projections de nos
faux mois qui aiment conditionnellement et ces réalités nous fournissent
précisément les expériences dont nous avons besoin pour pratiquer le
détachement suivant précisément la séquence nécessaire pour défaire tous les
attachements qui bloquent nos cœurs. Si nous reconnaissons que les gens que
nous rejetons et que nous condamnons sont en fait des miroirs de nousmêmes, il devient beaucoup plus simple de nous défaire de nos manières peu
aimantes. ‘’Que vous aimiez, que vous détestiez ou que vous ridiculisiez l’une
ou l’autre personne, ce ne sont que vos reflets. Si vous renoncez à ces
‘’réactions, à ces résonances et à ces reflets’’ de votre esprit, qui vous
apparaissent dans le monde phénoménal, et si vous vous cramponnez au
Cœur appelé Réalité, alors toutes ces différences de pensées, de sentiments et
d’actions disparaîtront’’ (Sai Baba, 1990, p. 140). Donc, ‘’réalisez d’abord que
votre monde n’est qu’un reflet de vous-même et cessez de critiquer le reflet !’’
(Nisargadatta, 1973, p. 128).
24
CHAPITRE 5 : L’ESPRIT ET LES PENSÉES
‘’Le monde extérieur reflétera vos pensées. Si vous le considérez avec de l’amour, il
vous paraîtra rempli d’amour. Mais si vous le considérez avec de la haine, tout vous
paraîtra contraire’’ (Sai Baba, 1996d, p. 84).
LE POUVOIR DES PENSÉES
La majorité d’entre nous a été conditionnée à croire que nos pensées sont
inoffensives ou qu’elles ont peu d’impact, mais, comme nous l’avons vu, rien
ne nous affecte plus profondément. ‘’…L’esprit seul est la cause de toutes
choses…Tout le cosmos n’est rien qu’une projection de l’esprit’’ (Sai Baba,
1990, p. 70). L’expression ‘’Voir, c’est croire’’ devrait réellement être ‘’Croire,
c’est voir’’, puisque ce que nous voyons est la ‘’réalité’’ créée par nos pensées
et par nos convictions. Ainsi, si nous pensons des pensées d’amour et de paix,
nous deviendrons aimants et paisibles et nous verrons la paix et l’amour tout
autour de nous. Mais si nous entretenons des pensées colériques ou critiques,
c’est ainsi que nous nous sentirons et que le monde nous apparaîtra.
Puisque nos pensées créent nos réalités, si nous voulons devenir plus aimants,
il pourrait sembler que nous devrions nous efforcer de ne penser que des
pensées d’amour et éviter les pensées peu affectueuses. Pourquoi ne pas créer
nos réalités pour qu’elles soient comme nous voulons ? S’identifier à des
pensées d’amour et se désidentifier des pensées peu affectueuses pourrait nous
rendre plus aimants, en supposant que nous les croyions réellement. Cela
vaut sûrement la peine de le faire et je le recommande. Toutefois, nous
efforcer de n’avoir que des pensées aimantes ne marchera pas au bout du
compte, parce que se débarrasser de toutes les pensées peu affectueuses est
impossible tant que nous sommes attachés au faux moi qui aime
conditionnellement. Par exemple, si vous êtes attaché à ce que l’on vous traite
respectueusement et si l’on vous traite avec mépris, votre cœur se fermera et
les pensées d’amour que vous entreteniez seront remplacées par des pensées
peu affectueuses. Ou bien si vous êtes attaché à dénoncer la violence et si on
s’en prend physiquement à quelqu’un, vous réagirez par de la condamnation,
parce que votre cœur s’est fermé à cause de cet attachement, malgré votre
engagement à ne penser que des pensées d’amour. Ainsi, pour libérer l'Amour
qui est notre vraie nature, nous devons nous détacher des pensées qui
bloquent le cœur. Alors, seul l’Amour demeurera.
NIVEAUX DE PRATIQUE
25
Il y a deux niveaux pour pratiquer le détachement. Le premier et le niveau le
plus direct consiste à pratiquer le détachement vis-à-vis des pensées, puisque
les pensées sont la source de tout ce que nous expérimentons. ‘’Toutes les
formes sont des créations du mental’’ (Sai Baba, 1999e, p. 114). Si nous ne
sommes pas attachés aux pensées, celles-ci ne se manifesteront pas comme les
réalités, les sentiments, les actions et les expériences qui créent l’illusion du
faux moi et de son monde. Le second niveau de pratique consiste à pratiquer
le détachement vis-à-vis de ce qui est créé par nos pensées. Les pensées sont le
niveau causal et les réalités qu’elles créent sont l’effet ou le niveau
symptomatique. Commencez toujours par pratiquer le détachement au
niveau de la pensée, si possible, parce que se défaire d’un attachement au
niveau de la pensée est beaucoup plus facile qu’après qu’il soit devenu
manifeste. Se détacher des pensées qui bloquent le cœur est essentiel, si nous
voulons que nos cœurs s’ouvrent à l’Amour. C’est la raison pour laquelle nous
considérons comment nous détacher des pensées en premier lieu. Les
chapitres subséquents décriront comment nous détacher de ce que nos
pensées créent.
Vous pouvez commencer par pratiquer au niveau du symptôme, mais pour
réellement éliminer un attachement, vous devez vous détacher des pensées
qui l’ont causé. Le processus fonctionne généralement ainsi : vous constaterez
d’abord que vous êtes attaché à quelque chose, par exemple au désir d’avoir
une plus grosse maison. Pour vous libérer de ce désir, vous devez découvrir
son origine – la pensée à partir de laquelle il s’est manifesté. Si vous pratiquez
le détachement vis-à-vis de ce désir, vous découvrirez la pensée. Par
exemple : il me faut une maison plus spacieuse, parce que je veux
impressionner les gens. Vous passeriez alors au niveau de la pensée et vous
vous dégageriez de votre attachement à impressionner les autres. En vous
dégageant de votre attachement à impressionner les autres, le désir d’une plus
grosse maison produit par cette pensée disparaîtra.
SE DÉTACHER DES PENSÉES
Deux types d’attachement aux pensées
Nous sommes attachés aux pensées, soit si nous nous identifions à elles, soit
si nous les évitons ou si nous les rejetons. Les deux types d’attachement
renforcent et perpétuent notre identification avec le faux moi et limitent ainsi
notre amour. Nous supposons généralement qu’il y a un ‘’esprit’’ duquel
proviennent ces pensées. Néanmoins, si nous essayons de découvrir cet
esprit, ce que nous finissons par découvrir, c’est que l’esprit, en tant qu’entité
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séparée, n’existe pas. C’est seulement un nom pour une accumulation de
pensées et on ne peut pas le trouver séparément de ces pensées. Nous nous
concentrons donc sur le détachement vis-à-vis des pensées et non vis-à-vis du
mental.
La grande majorité des pensées sont celles avec lesquelles vous vous identifiez
et auxquelles vous êtes attaché en tant que ‘’vos’’ pensées. Vous êtes identifié
à des pensées, si vous les entretenez, si vous vous absorbez dedans, si vous les
croyez, si vous y réagissez émotionnellement, si vous les défendez ou bien si
vous agissez sur la base de celles-ci. Pratiquez le détachement vis-à-vis des
pensées auxquelles vous vous identifiez en les observant sans aucune
implication. Si des pensées vous invitent à vous impliquer avec elles,
concentrez-vous et restez détaché. Refusez de les alimenter et de les nourrir
en vous laissant attirer dans l’identification. Ne vous intéressez pas à ces
pensées et ne les validez pas en vous impliquant avec elles, en y réagissant ou
en faisant ce qu’elles préconisent. Si vous ne saisissez pas ces pensées, elles ne
resteront pas. Laissez-les partir sans les entretenir, sans être captivé par elles,
sans y réagir ou sans agir sur la base de celles-ci. Rien ne dit que vous deviez
faire quoi que ce soit avec des pensées ou même les revendiquer comme
vôtres. Donc, observez-les simplement comme un observateur détaché.
Laissez passer toutes ces pensées, comme si ce sont des oiseaux qui
apparaissent dans votre champ de vision, qui sont là, et qui disparaissent sans
vous impliquer avec ni être fasciné par elles en aucune façon. Si vous
constatez que vous vous êtes laissé prendre par une forme-pensée, détachezvous en immédiatement et reprenez la pratique.
Le second type d’attachement consiste à refuser ou à rejeter des pensées. Il y a
des pensées dont nous préférerions ne pas être conscients, parce qu’elles
révèlent des vérités désagréables ou parce qu’elles sont trop effrayantes, trop
tentantes, trop répugnantes, ou parce qu’elles sont autrement inacceptables
pour le faux moi. Nous avons tendance à supprimer de telles pensées de la
conscience en les refusant, en les évitant, en les réprimant ou en les rejetant.
Puisque notre attachement consiste à repousser de telles pensées, pour nous
défaire de cet attachement, nous devons cesser d’éviter d’être complètement
présents et conscients de ces pensées et leur permettre de simplement être.
Refusez de les chasser de votre esprit et laissez-les demeurer tranquillement
dans la conscience. Restez totalement, complètement présent avec ces pensées
sans les rationaliser, les juger, les édulcorer, les écarter, sans vouloir qu’elles
soient différentes ou sans utiliser aucune autre stratégie mentale
d’évitement. Regardez-les bien en face sans broncher, sans reculer et sans
vous détourner. Soyez un témoin ouvert et soyez présent
inconditionnellement.
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Nous étudierons comment pratiquer le détachement avec des pensées qui
ferment le cœur pour montrer comment pratiquer avec toutes les pensées,
parce que le processus est identique, quel que soit le type de pensées que nous
avons. Nous pratiquerons le détachement vis-à-vis d’autres types de pensées
dans les chapitres suivants.
Les pensées qui ferment le cœur
Les pensées qui ferment le cœur divisent ce qui est Un en des concepts
d’aimable et de détestable et nous enferment ainsi dans l’illusion dualiste.
Elles ne surviennent que parce que nous sommes identifiés au faux moi. Si ce
n’était pas le cas, elles ne surviendraient jamais. Les pensées qui ferment le
cœur surviennent suivant une multitude de modes, directement ou
subtilement. Elles peuvent nous concerner nous-mêmes ou autrui. Elles
ferment nos cœurs et se manifestent comme nos réalités. Des pensées
haineuses, colériques ou critiques sont clairement peu aimantes, mais
beaucoup de pensées qui ferment le cœur passent inaperçues. Quelques
exemples de pensées qui, initialement, pourraient ne pas paraître manquer
d’amour sont : ‘’Pourquoi ne fais-je jamais rien correctement ?’’ ‘’Je fais
toujours les mauvais choix.’’ ‘’Il est tellement ingrat après tout ce que j’ai
fait.’’ ‘’Oui, il est modeste et il a vraiment de quoi l’être !’’ Que penseraient
les gens de moi, s’ils savaient comment je suis réellement ?’’ Nous entendons
des gens dire : ‘’Je suis plus dur vis-à-vis de moi-même que n’importe qui
d’autre’’, comme si c’était louable, alors qu’en fait c’est une façon peu aimante
de se traiter.
Si vous écoutez comment ‘’vous vous parlez à vous-même’’, vous pouvez
facilement discerner la relation que vous entretenez avec vous-même. Vos
pensées vous traitent-elles (et autrui) avec considération, compassion et avec
amour ou bloquent-elles votre cœur ? Ecoutez-les attentivement et ressentez
leur impact. Votre cœur se sent-il ouvert et dilaté, lorsque vous écoutez ? Si
ce n’est pas le cas, découvrez les messages qui bloquent le cœur qui sont
transmis par vos pensées et désidentifiez-vous d’elles. Prenez la pensée : ‘’J’ai
vraiment commis une grossière erreur. Comment ai-je pu être aussi stupide ?
Quand apprendrai-je jamais ?’’, et imaginez cela comme un dialogue intérieur
entre un moi qui juge et un moi qui est rejeté. Cela devient : ‘’Tu as vraiment
commis une grossière erreur ! Comment as-tu pu être aussi stupide ? Quand
apprendras-tu jamais ?’’ Lorsque le moi qui écoute croit le jugement et
lorsqu’il consent à être rabaissé, vous tolérez un tel traitement peu affectueux
de vous-même et vous en souffrirez. Pourquoi feriez-vous une telle chose,
quand manifestement, cela fait mal ? La raison, c’est que vous croyez que le
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jugement est ‘’juste’’, parce que vous l’avez entendu tellement souvent
auparavant qu’il paraît juste. Vous vous identifiez avec, puis vous allez plus
loin et vous dites en fait au moi qui juge : ‘’Puisque cela est vrai, je te donne le
droit de me rabaisser en prime.’’ Vous utilisez la soi-disant vérité d’une
accusation pour justifier ce cruel rejet de vous-même et puisque vous vous le
faites à vous-même, vous permettrez sans doute aux autres de vous rejeter
également et de plus, vous rejetterez les autres de la même façon que vous
vous rejetez vous-même.
Si nous nous identifions avec nos pensées peu affectueuses en les croyant, en
les exprimant et même en nous en délectant, elles prolifèrent et elles
deviennent plus virulentes. Nos cœurs se ferment et nous souffrons. Une
pensée en entraîne une autre, à moins que nous ne stoppions le train de
pensées et que nous en descendions. Il ne faut même pas que de telles pensées
soient exprimées pour causer de la souffrance. Et si la cible est soi-même,
bien sûr, la pensée seule est plus que suffisante. Si vous n’êtes pas certain
qu’une pensée manque d’amour, sentez l’impact sur votre cœur, quand vous
la pensez. Votre cœur s’ouvre-t-il ou se ferme-t-il ?
Les pensées critiques, les pensées de rejet et les pensées qui condamnent sont
au sommet de la liste des pensées qui bloquent le cœur. Ma femme était
presque toujours en retard, quand nous sortions et j’étais presque toujours à
l’avance et pour cela, je la critiquais ainsi que pour d’autres prétendus défauts.
Lorsqu’elle commettait de graves infractions à l’encontre de ce que je
considérais être un comportement correct, je lui fermais mon cœur. J’ai
finalement réalisé que fermer mon cœur me causait (ainsi qu’à elle) beaucoup
de douleur et j’ai été motivé à l’idée de cesser de réagir ainsi. En prenant du
recul et en examinant ce que je faisais, j’ai trouvé que j’étais attaché à un
ensemble de ‘’règles’’ de comportement et que si elle les enfreignait, je me
sentais justifié de la critiquer et de la rejeter. Me détacher de ces ‘’règles’’ a
nécessité que je prenne du recul par rapport à celles-ci et que je les examine
objectivement, comme si elles ne m’appartenaient pas et quand je l’ai fait,
elles ne m’ont pas semblé si importantes. Mes règles n’étaient que de vieilles
habitudes apprises enfant de mes parents. J’ai réalisé que j’avais mis mes
règles avant l’Amour.
De plus, je fus stupéfait de découvrir que mes pensées faisaient littéralement
en sorte que ma femme apparaisse comme mes pensées disaient qu’elle était.
Mes pensées provoquaient réellement la réalité à laquelle je réagissais. Donc,
si j’avais une pensée critique, cela créait une expérience avec ma femme qui
reflétait ce jugement. Si je n’avais pas de pensées critiques, ma femme était
aussi adorable que jamais. Elle n’avait pas changé, c’était juste mes pensées.
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J’ai aussi reconnu que je m’appliquais à moi-même les mêmes règles qu’à elle.
Cependant, moi j’y obéissais, du moins la plupart du temps, mais elles me
faisaient aussi souffrir. Lorsque j’ai compris que je créais la réalité à laquelle
je réagissais, le changement de perspective et la souffrance que mes règles
provoquaient m’ont permis de les lâcher. Parfois, elles surgissent encore dans
mon esprit, mais je ne les entretiens plus et je ne leur permets plus de créer
une réalité à laquelle je réagis.
Si vous trouvez que vous critiquez toujours les autres et vous-même, prenez
du recul et observez ces pensées. Cessez de vous identifier avec ces jugements
et observez-les simplement sans les endosser et sans vous impliquer. Si vous
gardez ce point de vue détaché, ces pensées s’étioleront et disparaîtront. Mais
si vous les alimentez en les justifiant et en les approuvant, elles continuent à
proliférer et bloquent ainsi votre cœur. Si seulement nous reconnaissions que
nos pensées créent nos réalités, nous serions beaucoup plus prudents avant de
leur laisser libre cours. Donc, cessez de vous identifier à des pensées qui
bloquent le cœur et d’agir sur base de celles-ci. Pratiquez plutôt le
détachement vis-à-vis d’elles.
Parmi les pensées qui bloquent le cœur qui prédominent, il y a les pensées
rancunières, les pensées de haine, les pensées de vengeance, les reproches ou
les pensées qui ne pardonnent pas. S’accrocher à ces pensées durcit nos cœurs
et nous fait souffrir. J’essayais d’enseigner le détachement à une femme dont
le mari avait été infidèle. Elle avait divorcé, il y a plusieurs années, mais elle
avait continué à s’accrocher à sa haine en l’alimentant quasi quotidiennement
en rejouant ses transgressions dans son esprit, recréant ainsi une réalité à
laquelle elle réagissait à nouveau en fermant son cœur. Elle était
extrêmement malheureuse. Il devint manifeste qu’elle ne voulait pas
renoncer à ses ressentiments, même au prix de son propre bonheur. En
réalité, elle n’était même pas disposée à ne fût-ce que considérer de lâcher sa
colère et son ressentiment, sans parler de lui pardonner. Elle voulait plutôt
savourer son amertume et se sentir heureuse en même temps. Elle ne pouvait
pas accepter que ces buts étaient incompatibles. Comme beaucoup de gens,
elle ne voulait pas croire que ses pensées étaient la cause de son malheur.
Tout était de sa faute.
Une femme se plaignait que son mari la rabaissait toujours. Elle réagissait par
des pensées et par des explosions colériques qui semblaient justifiées par son
comportement et elle était aigrie par la manière dont il la traitait. Elle n’avait
aucun désir de laisser tomber ses pensées critiques, car son comportement
abusif les justifiait. Elle avait l’impression que se détacher de son jugement et
de son rejet serait nier ce qui se passait, ce qui était complètement
30
inacceptable. Nous envisageâmes ensuite comment la perception qu’elle avait
de lui pourrait être un reflet d’elle-même. Initialement, elle ne put voir
aucune ressemblance, mais en creusant un peu plus, elle put se rendre compte
que sous l’apparence du perfectionnisme, elle était très critique vis-à-vis
d’elle-même, elle minimisait ses capacités et elle doutait constamment d’ellemême, et c’était précisément ce qu’elle expérimentait de la part de son mari.
Elle put alors considérer que l’expérience qu’elle avait de son mari pourrait au
moins partiellement être un reflet d’elle-même. Nous travaillâmes à
reconnaître comment elle manquait d’amour vis-à-vis d’elle-même et à
apprendre comment devenir moins autodénigrante et critique. Au fur et à
mesure qu’elle devenait plus apte à ouvrir son cœur à elle-même, elle fit
l’expérience que mystérieusement, son mari devenait aussi moins critique et
plus aimant ou si ce n’était pas le cas, cela ne paraissait plus aussi important.
Quand elle a été en mesure de plus s’accueillir elle-même dans l’amour, son
cœur ne s’est plus fermé à son mari et elle a pu le voir avec plus de
compassion et de compréhension. Finalement, elle a pu lui pardonner dans
son cœur, ce qui lui a permis de l’aimer comme il était.
A titre d’expérience, voyez comment vous vous sentez maintenant. Ensuite,
voyez si vous pouvez vous souvenir de quelqu’un à qui vous n’avez pas
pardonné (les parents, les frères et les sœurs, les enfants, les conjoints et la
belle-famille sont les favoris ici). Voyez quelles sont les pensées peu
affectueuses auxquelles vous vous accrochez. Au moment où vous les pensez,
voyez quel impact celles-ci ont sur votre cœur. Vous pouvez ressentir une
contraction, un poids ou une douleur au milieu de la poitrine. Découvrez
ensuite la nature de votre attachement envers ces pensées, pourquoi vous
continuez à vous y accrocher. Voyez votre attachement à refuser de
pardonner. Il est possible que vous vouliez d’abord des excuses ou la
reconnaissance de ce que l’autre vous a fait. Ou votre sentiment est peut-être
que ce que l’autre vous a fait est impardonnable ou vous vous accrochez à une
vengeance ou à essayer de faire en sorte que l’autre souffre pareillement pour
rembourser la blessure que vous avez ressentie. Découvrez votre attachement,
ressentez l’impact qu’il a sur vous, puis pratiquez le détachement. En fait,
ressentir l’impact des pensées qui bloquent le cœur est souvent nécessaire
avant que nous ne les laissions partir et que nous ouvrions nos cœurs en
pardonnant.
Supposons que vous trouviez difficile de penser que vous pourriez ne pas
pardonner ou manquer d’amour et que vous réagissiez à cette possibilité par
le refus ou par le rejet. Puisque votre attachement consisterait à repousser une
pensée inconfortable ou inacceptable, pratiquer le détachement requerrait de
mettre un terme à tous les moyens par lesquels vous niez et vous évitez votre
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manque d’amour et de permettre à votre cœur de s’y ouvrir. Commencez la
pratique en vous ouvrant à la pensée ‘’je manque d’amour’’. Laissez-la
simplement être présente sans l’éviter, sans l’atténuer, sans la rationaliser ou
sans la justifier. Puis, voyez si vous pouvez découvrir des exemples où vous
avez fermé votre cœur, si peu que ce soit et pour quelque raison que ce soit.
Au début, reconnaître l’existence de votre manque d’amour peut être difficile
et il peut être tentant de le nier. Puis, il se peut que vous puissiez
intellectuellement reconnaître que vous agissez effectivement sans amour et
vous ouvrir à cette réalité sera peut-être la suite. Entrez profondément dans
cette conscience de manquer d’amour et permettez-lui d’être totalement
présente et sans réserve. Soyez inconditionnellement avec votre manque
d’amour sans vous en distancer, sans l’éviter, sans l’expliquer ou sans lui
fermer votre esprit. La pratique du détachement permet à votre cœur de
compassion de s’ouvrir à votre propre manque d’amour. L’acceptation
inconditionnelle et franche d’une pensée que vous vous attachez à éviter ou à
rejeter peut requérir une pratique considérable, aussi ne vous attendez pas à
réussir du premier coup.
En vous détachant de la négation de votre manque d’amour, les attachements
qui vous ont permis d’éluder la conscience de votre manque d’amour seront
évoqués. Ces pensées doivent également être reconnues et acceptées. Un
attachement à éviter représente toujours la peur et si vous continuez de
pratiquer le détachement envers ce que vous éludez, cette pensée de peur
deviendra plus claire. Dans l’exemple précédent, cela pourrait être : ‘’Je ne
puis admettre mon manque d’amour, parce que cela briserait l’image que j’ai
de moi-même et personne ne m’apprécierait.’’ Si vous vous investissez
considérablement dans le fait de paraître aimant et de croire que vous l’êtes
toujours, admettre le contraire pourrait nécessiter des changements qui font
peur, comme reconnaître le manque d’amour et risquer de le révéler aux
autres. Cependant, en vous détachant du refus ou du désaveu de tout aspect
de vous-même, votre cœur s’ouvrira à cet aspect. Ainsi, vous détacher de vos
pensées qui bloquent le cœur augmente votre compassion et votre amour.
Voici un exemple d’une pensée qui bloque le cœur et qui avait son origine
dans la peur. Une personne à qui j’enseignais le détachement craignait que si
elle demandait ce qu’elle voulait réellement, on la rejetterait comme étant
égoïste. Ce qu’elle ne voyait pas de prime abord, c’est qu’elle se jugeait égoïste
et que cette pensée créait une réalité qui reflétait ce qu’elle croyait. Elle
réagissait ensuite à cette réalité apparente en faisant toujours passer les autres
avant elle et en ne prenant pas soin de ses propres besoins pour que les autres
ne la traitent pas d’égoïste. Se détacher de cette manière de penser qui
manque d’amour a nécessité de reconnaître que la réalité qu’elle pensait être
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séparée d’elle était sa propre création et le reflet de son propre jugement
personnel. De plus, il était important qu’elle voie qu’elle se fermait son cœur
insensiblement à elle-même sans compassion ni compréhension et de réaliser
qu’elle seule était la cause de sa souffrance. Une fois qu’elle a compris que ses
propres pensées manquant d’amour étaient la cause de sa douleur, se détacher
d’elles et agir de manière plus aimante vis-à-vis d’elle-même fut nettement
plus facile. Si nous nous détachons des pensées manquant d’amour qui
bloquent nos cœurs, nos cœurs s’ouvrent, non seulement à nous-mêmes, mais
aussi aux autres.
La peur empêche ou limite votre amour, donc les pensées craintives
bloqueront toujours votre cœur dans une certaine mesure. Par exemple, si
vous imaginez que quelque chose d’effrayant va se produire et si vous croyez
cette fantaisie de la pensée, alors vous y réagirez comme si elle était réelle.
Ces événements imaginaires peuvent être tout et n’importe quoi – être
agressé, subir un tremblement de terre désastreux, vous faire rouler, ne pas
réussir, être rejeté, perdre des biens précieux, devenir sans abri... Si vous
croyez vos pensées appréhensives et si vous les traitez comme si elles sont
réelles, vous les authentifiez et vous leur donnez le pouvoir de créer votre
réalité à leurs images. La réalité que ceci provoque est à la fois effrayante et
autonome et entraînera la fermeture de votre cœur. Vos pensées paraissent
toujours vraies, parce que la réalité qu’elles créent les confirme toujours. Vous
pouvez ensuite réagir à cette réalité apparente en générant encore plus de
pensées flippantes, comme ‘’rien ne va jamais bien pour moi’’, ce qui
augmente encore la crainte. Vos pensées sont les causes uniques de vos tracas
et de vos souffrances et vous complaire dans des pensées alarmantes est une
manière bien peu affectueuse de vous traiter vous-même. Vous vous fermez
votre cœur à vous-même et aux autres. Aussi longtemps que vous vous
effrayez avec des imaginations concernant l’avenir, vous éludez l’Amour et
vous perpétuez votre identification avec le faux moi. Là où règne la crainte,
l’Amour n’est pas.
Supposez que votre mental vous concocte une histoire suivant laquelle vous
ne pouvez même pas envisager de quitter une relation peu affectueuse, parce
que personne d’autre ne voudra de vous. Si vous croyez que cette histoire est
vraie, vous serez piégé dans les appréhensions du faux moi et vous créerez
une réalité qui reflète cette conviction. Si vous agissez aussi sur cette base,
vous validez cette réalité en lui permettant de déterminer ce que vous faites,
comme ne pas chercher une relation plus affectueuse. Une fois que vous
prenez conscience d’avoir cru ou de vous être identifié à une telle pensée, la
première mesure pour vous en détacher, c’est de cesser d’y réagir, puis de
vous en dégager et de l’observer. Commencez par prendre du recul par
33
rapport à la pensée que vous ne pouvez pas quitter votre relation actuelle,
parce que personne d’autre ne voudra de vous. Devenez témoin de cette
pensée en refusant de vous identifier avec. Tant que vous la croyez, vous lui
donnez le pouvoir de vous contrôler. Ainsi, renoncez à tout ce que vous
identifiez avec la pensée de devoir rester dans une relation que vous n’aimez
pas, comme des pensées qui déclarent que vous n’êtes pas beau ou que vous
êtes un loser. Cessez de supposer que ces pensées sont vraies, parce que dans
ce cas, elles créeront une réalité qui semblera confirmer qu’elles le sont.
Reconnaissez les jugements dénigrants implicites à de telles pensées et
l’impact de blocage sur le cœur que ces jugements ont sur vous. Une fois que
vous réalisez à quel point ces pensées critiques manquent d’amour, vous
pouvez beaucoup plus facilement cesser de leur donner libre cours et de vous
identifier à elles.
Pour cesser de vous identifier à elles, refusez de soutenir ces pensées
dégradantes avec votre conviction. Désassociez-vous de ces pensées
alarmistes qui bloquent le cœur jusqu’à ce que vous ne vous identifiiez plus à
elles ou que vous ne réagissiez plus par rapport à elles en aucune façon. Il
peut être très difficile de lâcher des pensées mues par la peur, parce que leur
dynamisme est souvent considérable. Si vous trouvez qu’il est trop dur de
vous dégager de ces pensées angoissantes, focalisez votre attention ailleurs,
par exemple sur la répétition d’un mantra ou du nom du Seigneur jusqu’à ce
que la réalité inquiétante que vos pensées ont créée diminue et disparaisse. Si
les mêmes pensées resurgissent, dégagez-vous d’elles immédiatement avant
qu’elles ne gagnent du dynamisme et du pouvoir de par votre attention et
pratiquez le détachement. Si vous ne réagissez pas ou si vous ne vous engagez
pas dans des pensées angoissantes, elles se calmeront. Par la pratique, votre
attachement sera érodé et lâchera. Alors ces pensées ne pourront plus capter
votre attention ni créer une réalité angoissante qui les reflète.
La réalisation que vous créez votre propre frayeur par la façon dont vous
pensez peut être une puissante motivation pour renoncer à votre attachement
à des pensées angoissantes. Mais vous pouvez parfois résister à assumer la
responsabilité des réalités flippantes que vous créez en préférant croire que
quelqu’un ou quelque chose d’autre est à blâmer. Assumer la responsabilité de
la création de votre monde pourra paraître plus menaçant que les réalités
angoissantes que vous créez et donc, vous l’évitez. A la place de l’éviter,
pratiquez le détachement envers votre idée alarmante de ce qui se passerait, si
vous assumiez votre responsabilité concernant la création des situations
redoutables qui vous font peur.
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La peur est toujours un signe d’attachement du faux moi et elle bloque notre
cœur. Si nous n’avions pas d’attachement, nous n’aurions aucune peur et il
n’y aurait que l’Amour. Disons que vous redoutiez que votre maison ne soit
cambriolée. Une telle pensée ne peut susciter de l’angoisse que si vous êtes
attaché aux biens matériels et si vous croyez être un moi distinct qui peut être
la victime d’autrui. Cette conviction est la source fondamentale de toute
l’angoisse et de toute l’insécurité. La pensée angoissante de perdre des biens
de valeur provoque une réalité qui valide et qui confirme votre peur et qui
renforce ainsi l’attachement. Supposez que vous installiez ensuite la toute
dernière alarme en réaction à la réalité que vous avez créée. Cela ne dissipera
pas votre angoisse, parce qu’une fois que vous êtes attaché à des biens et que
vous croyez qu’ils sont en danger, il n’y a aucun moyen de vous sentir en
sécurité. La seule solution, c’est de saper la peur à sa source. Cela requiert de
découvrir et de vous détacher des pensées qui créent et qui nourrissent votre
attachement aux biens. Il peut être très difficile de cesser de vous attacher à
de telles pensées et de vous dégager d’elles suffisamment pour pouvoir
simplement les observer sans y réagir. Une fois que vous comprenez
vraiment que vos propres pensées sont la source de la crainte que vous
expérimentez, il devient beaucoup plus simple de laisser partir ces pensées et
de vous séparer de la réalité alarmante qu’elles ont créée.
Les pensées sceptiques jouent sur les insécurités et sur les peurs du faux moi
et elles bloqueront votre cœur, si vous vous identifiez avec. Par exemple, si
vous envisagez de faire quelque chose de nouveau qui semble excitant et
pétillant, mais qui effraye le faux moi, des pensées comme celles-ci pourront
surgir : ‘’Suis-je capable de réussir ?’’, ‘’Ai-je considéré ces problèmes et ces
difficultés ?’’, ‘’Je me demande si je ne suis pas en train de commettre une
erreur’’, ‘’N’aurai-je pas l’air stupide ou idiot ?’’Si vous prenez au sérieux ces
pensées qui bloquent le cœur au lieu de ne pas vous attacher à elles, votre
enthousiasme disparaîtra vite et l’action envisagée paraîtra mal avisée ou trop
risquée. Supposez que vous vous sentiez attiré par un nouveau travail plus
intéressant, mais que la pensée d’échouer surgisse et vous effraye. Le
changement semble alors imprudent, ridicule, absurde, mauvais, inapproprié
ou pas suffisamment bon. Ou alors, la pensée surgit : ‘’Tu ne vas pas
abandonner tout ce pour quoi tu as travaillé si dur, n’est-ce pas ? Tu n’as
jamais réussi de nouveaux trucs, alors tiens-toi à ce que tu connais !’’ Si vous
croyez ces pensées qui bloquent le cœur et si vous vous identifiez à elles, elles
créent une réalité où l’enthousiasme relatif à une nouvelle carrière disparaîtra
et vous vous sentirez moins confiant et il est peu probable que vous
poursuiviez ce qui auparavant vous paraissait excitant et vivant. Refusez
plutôt de vous identifier à ces pensées qui bloquent le cœur et soyez présent et
ouvert à l’Amour.
35
L’exercice de la pratique du détachement
Maintenant que vous connaissez les bases de la pratique du détachement visà-vis des pensées, il est temps de pratiquer un peu, si vous ne l’avez pas déjà
fait ! Fermez les yeux et observez quelles pensées sont présentes,
particulièrement toutes pensées qui bloquent le cœur. Remarquez d’abord
votre identification sans réserve à ces pensées comme étant les vôtres, que
vous les croyez et que vous y prêtez attention, peut-être en vous absorbant
dedans et en suivant leur train. A la place, cessez toute implication, détachezvous des pensées et observez-les simplement. Quelles qu’elles soient, refusez
de vous impliquer avec ou de les repousser. Soyez juste présent avec elles et
laissez-les être. Si vous constatez que vous avez tendance à vous impliquer
avec certaines pensées, essayez de les considérer comme si ce n’étaient pas les
vôtres, mais plutôt comme si c’étaient des pensées que vous voyez passer et
qui n’ont rien à voir avec vous. Elles n’ont que la réalité que vous leur
accordez. Sachez qu’il n’y a rien que vous ne deviez faire avec des pensées,
comme leur accorder votre attention, les considérer, leur obéir, les croire ou
même les revendiquer comme vôtres. Laissez-les venir et partir librement.
Vous n’êtes qu’un témoin. S’il y a des pensées qui se présentent que vous
voulez éviter, restez totalement présent avec elles sans interférer en aucune
manière jusqu’à ce qu’elles s’éloignent d’elles-mêmes. Rappelez-vous, quelle
que soit la séduction ou la répugnance des pensées, ne les saisissez pas ou ne
les repoussez pas. Prenez à présent le temps de pratiquer.
36
CHAPITRE 6 : LES SENTIMENTS ET LES DÉSIRS
LES SENTIMENTS
‘’L’esprit est la cause des sentiments.’’ (Sai Baba, 1999d, p.114)
Si vous avez trouvé qu’il était difficile de vous détacher de certaines pensées,
c’est parce que vous êtes encore attaché à ce que ces pensées ont créé. Pour
vous détacher d’une pensée, vous devez d’abord vous détacher des
manifestations de cette pensée, de la ‘’réalité’’ qu’elle a créée. Se détacher de
ce que les pensées créent est le second niveau de pratique.
Les premières formes créées par les pensées que nous considérerons, ce sont
les sentiments. Comment vous vous sentez est le produit direct de la façon
dont vous avez pensé. Ainsi, si vous pensez des pensées déprimantes,
joyeuses, colériques, craintives ou tristes, ces pensées susciteront des
sentiments qui les reflètent. Reprocher aux autres les sentiments que vous
n’aimez pas peut être tentant, mais vos réactions sentimentales sont
seulement dues à vos propres convictions et à vos propres pensées. Si vous ne
vous étiez pas identifié ni attaché à ces pensées et à ces convictions, les
sentiments n’auraient même pas surgi. Par exemple, si vous aviez une pensée
triste, mais si vous refusiez de vous identifier à celle-ci et de vous impliquer
avec, elle ne produirait aucun sentiment de tristesse.
La dépression
S’identifier à des pensées et à des convictions qui ferment le cœur provoque la
dépression. Exemples de pensées déprimantes : ‘’Tout est de ma faute’’, ‘’tout
ce que je fais, je le rate’’, ‘’rien n’ira jamais plus’’, ‘’je n’aurai jamais une bonne
relation’’, ‘’personne ne m’aime’’, ‘’je n’ai aucune raison de vivre…’’ Imaginez
que vous pensez ce genre de pensées et que vous les croyez réellement. Une
fois que vous vous êtes identifié à de telles pensées, la dépression est
inévitable. Si vous ne vous étiez pas identifié à elles, elles ne se seraient pas
manifestées sous la forme d’une dépression. Donc, si possible, désidentifiezvous toujours de pensées déprimantes avant qu’elles ne vous abattent. Si vous
vous en détachez assez rapidement, elles ne provoqueront pas votre
dépression.
En pratiquant avec la dépression (ou avec tout autre sentiment), il est
important de discerner quel type d’attachement vous avez. Ainsi, déterminez
d’abord si vous vous identifiez à la dépression et si vous voulez vous
37
raccrocher à elle ou au contraire, si vous l’évitez, vous la niez et vous la
rejetez. Généralement, le type d’attachement que vous avez sera évident. La
plupart des gens, mais pas tous, ont la dépression en aversion et ils veulent la
nier ou s’en défaire et donc l’analyse qui va suivre présuppose qu’il existe un
attachement à éviter ou à éliminer les sentiments dépressifs. Par conséquent,
l’objectif sera de cesser le refus et l’évitement de la dépression et d’en prendre
pleinement et totalement conscience. (D’un autre côté, si vous vous attachiez
à la dépression, parce qu’elle vous permettait d’éviter vos responsabilités,
votre objectif serait de vous désidentifier de la dépression.)
Pour débuter la pratique, découvrez le(s) sentiment(s) dépressif(s) qui
domine(nt) et ne jugez pas, ne chassez pas, ne refusez pas, ne vous distancez
pas ou n’essayez pas d’éviter ou d’atténuer ce(s) sentiment(s) en aucune
manière. Les sentiments de dépression incluent le désespoir, l’apathie, l’autoapitoiement, le pessimisme, le manque de ressort, l’impuissance, le sentiment
d’inutilité, la désespérance, l’immobilisme et la culpabilisation. Parfois,
s’ouvrir à des sentiments dépressifs peut être très inconfortable, pénible ou
douloureux, parce que vous préféreriez de loin que de tels sentiments s’en
aillent tout simplement. Les bloquer en dehors de la conscience est possible,
mais ceci n’aboutit pas à la guérison et ferme encore plus votre cœur. Ainsi,
honorez plutôt ces sentiments comme des instructeurs d’Amour en
découvrant l’enseignement qu’ils sont venus communiquer et dont l’essence
est d’ouvrir plus pleinement votre cœur en dénouant votre attachement à des
pensées qui manquent d’amour. Renoncer à vos attachements qui ferment le
cœur vous ouvre votre cœur à vous-même, tel que vous êtes, la chose la plus
aimante que vous puissiez faire.
Une fois que vous êtes devenu tout à fait conscient des sentiments de votre
dépression, demeurez avec eux inconditionnellement sans tenter de les
alléger ou de les modifier en aucune façon. Si par exemple, il y a du désespoir,
ouvrez-vous à l’expérience directe du désespoir et prenez-en profondément
conscience. Accordez-lui toute votre attention et discernez-en chaque nuance.
Examinez chaque facette du sentiment dépressif – son poids, son inertie, sa
pénibilité. Soyez totalement présent, mais désidentifié. Permettez aux
sentiments dépressifs d’être dans toute leur ampleur sans tenter de les
modifier ou de les éviter en aucune façon et connaissez-les toujours mieux.
Ceci annulera votre attachement à éviter ou à fuir la dépression. Une fois
ouvert aux sentiments dépressifs, vous serez probablement capable de
découvrir les pensées qui ont provoqué votre dépression. A ce moment-là,
alternez la pratique entre les sentiments dépressifs et les pensées qui les ont
causés jusqu’à ce que vous puissiez maintenir la pratique au niveau de la
pensée. Il est toujours préférable de pratiquer avec la cause (les pensées),
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plutôt qu’avec l’effet (la dépression). Une fois que vous vous détachez des
pensées qui ont provoqué une dépression, elle cessera.
Prenez maintenant le temps de voir si vous nourrissez des sentiments de
dépression. Si tel est le cas, découvrez si vous souhaitez vous y raccrocher ou
les éviter. Puis appliquez-vous à vous défaire de votre attachement. Une fois
que vous aurez dénoué l’attachement à la dépression et aux pensées qui l’ont
provoquée, la dépression disparaîtra ou se transformera, comme le fait chaque
chose, si vous lui ouvrez votre cœur. Souvent la dépression se transformera
en colère.
La colère
La colère est un des sentiments les plus gênants auxquels nous sommes
confrontés. La cause de la colère est un attachement à vouloir qu’une
personne ou une chose soit différente de ce qu’elle est. Quand ce n’est pas le
cas, nos cœurs se ferment et nous réagissons par de la colère. La clé pour nous
libérer des attachements qui provoquent la colère, c’est de reconnaître que les
‘’réalités’’ auxquelles nous réagissons avec colère sont nos propres créations et
sont des miroirs de nous-mêmes. ‘’Le monde extérieur est un reflet, un écho
et une réaction des sentiments intérieurs…Ce qui est ressenti à l’intérieur
apparaît comme phénomène extérieur’’ (Sai Baba, 1999c, p.252). Ce à quoi
nous réagissons ‘’à l’extérieur’’ est en fait un miroir de nous-mêmes. La colère
est guérie, quand nous nous détachons des pensées qui provoquent la colère et
quand nous pouvons ouvrir notre cœur à la part de nous qui semble être à
l’extérieur, mais qui reflète en réalité une part peu aimante de nous-mêmes.
Quand nous réalisons que la cause de notre colère est seulement nous-mêmes
et pas ce que nous accusons, nous libérer des attachements qui provoquent
notre colère est beaucoup, beaucoup plus facile.
Il y a deux types d’attachement à la colère. Le premier est un attachement à
refouler ou à refuser la colère, qui la dirige à l’intérieur et qui en fait la dirige
contre nous-mêmes. Le second, c’est de l’extérioriser sur tout ce qui semble
être la cause de notre douleur pour tenter de le punir ou de l’éliminer. C’est
attaquer quelque chose ou quelqu’un d’autre. Nous attaquer nous-mêmes ou
attaquer autrui ne fait que fermer nos cœurs. Aucune guérison ne résulte du
refoulement de la colère, d’attaquer autrui ou soi-même ou de briser des
objets L’attachement qui a provoqué la colère existe toujours et donc, quand
une situation similaire se reproduira, la même réaction colérique resurgira.
L’expression de notre colère peut faire en sorte que nous nous sentions bien
provisoirement, parce qu’elle est cathartique et parce qu’elle nous donne un
39
sentiment de puissance, mais attaquer autrui ou s’attaquer soi-même, c’est
fermer son cœur et attaquer son Soi. Ce que nous faisons à autrui, nous le
faisons à notre Soi.
La réalisation que la fermeture de notre cœur nous cause à nous de la douleur
et de la souffrance aide à nous libérer de notre attachement à la colère. Nous
avons attaqué notre Soi et nous le sentons. Quand nous réalisons que saisir
des pensées colériques ne fait souffrir que nous, il devient beaucoup plus
simple de les laisser partir. La reconnaissance que nous sommes responsables
de notre colère nous permet de changer de cible (critique et attaque d’autrui)
et de nous focaliser sur la pratique du détachement vis-à-vis de la cause
véritable de la colère – nos propres pensées et nos propres convictions.
Vous pouvez vous identifier à la colère ou pas et donc, avant de commencer à
pratiquer, déterminez si votre attachement consiste à refuser et à éviter la
colère ou à vous identifier à elle, à l’exprimer et à penser qu’elle se justifie
pleinement. Généralement, le type d’attachement sera évident.
Si vous êtes attaché à vous identifier à la colère, déplacez votre centre
d’attention, dissociez-vous de votre colère et laissez-la se calmer. Ne pensez
pas à la personne, à la situation à laquelle vous avez réagi, parce que ce sont
vos pensées qui ont provoqué votre expérience et votre réaction colérique et
elles le feront encore, aussi longtemps que vous serez attaché à elles. Par
conséquent, ne procédez pas avant que vous ne puissiez suffisamment vous
désidentifier de la colère pour pouvoir vous en dissocier. Il faut souvent une
volonté considérable pour cesser de s’identifier à la colère, mais ceci en vaut
la peine. Pour permettre à la colère de se calmer, Sai Baba conseille d’aller
faire une bonne marche en solitaire, de boire de l’eau froide, de s’étendre
tranquillement ou de chanter des bhajans. Répéter le nom du Seigneur ou
réciter le mantra de la Gayatri est aussi très efficace.
L’objectif de la pratique du détachement vis-à-vis de la colère, c’est de
supprimer la cause de cette colère. Vous ne pourrez pas le faire avant que la
colère ne se soit dissipée. Une fois que la colère est retombée, commencez à
pratiquer en vous rappelant la situation où la colère est survenue. Découvrez
les pensées qui ont provoqué la colère et qui l’ont nourrie, comme un
jugement, un rejet, un reproche, une vengeance et des pensées justifiant votre
réaction colérique. Ne vous impliquez pas avec ces pensées, mais observez-les
simplement à distance, comme si vous observiez un personnage d’une pièce
de théâtre qui a ses pensées, mais avec lequel vous ne vous identifiez pas.
Puisque vous étiez attaché et identifié à ces pensées génératrices de colère,
prenez garde à la moindre inclination à vous réidentifier avec, car ceci
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provoquera la récurrence de la colère. Si votre colère réapparaît, dégagez-vous
tout de suite des pensées génératrices de colère et laissez-les partir. Vous
venez juste d’avoir la démonstration vivante de la façon dont vos pensées
génèrent la colère. Ne reprenez la pratique que lorsque vous pourrez
suffisamment vous désidentifier des pensées pour pouvoir les observer sans
les saisir ou réagir vis-à-vis d’elles. Gagner cette perspective est essentiel, si
vous voulez vous détacher. La colère peut nous enseigner l’Amour, si nous
pouvons opérer ce retournement. Lorsque vous pourrez observer les pensées
qui ont généré votre colère, restez pleinement présent, mais dissocié par
rapport à elles jusqu’à ce que vous ne ressentiez plus aucune identification
avec elles. Vous pourrez même rire de la situation que vous avez créée, ce qui
est un signe de détachement.
Vous libérer de votre attachement aux pensées qui provoquent la colère est
beaucoup plus facile, lorsque vous réalisez que les jugements critiques qui
déclenchaient votre colère sont en fait des critiques d’une part de vous-même
qui se reflète comme dans un miroir chez une autre personne. Pour découvrir
ce miroir, énumérer les qualités, les actions de la personne auxquelles vous
avez réagi avec colère. Puis, voyez comment vous possédez ces
caractéristiques ou comment vous avez agi similairement. Ceci peut être très
difficile, puisque vous vous êtes caché ces attributs en les reniant et en les
projetant à l’extérieur. Par conséquent, faites un effort honnête pour
découvrir comment vous possédez les caractéristiques mêmes que vous avez
dénoncées. C’est le cas ! Si vous ne les aviez pas condamnées en vous, vous
n’auriez pas réagi par de la condamnation, quand elles se manifestent chez
autrui. Quand vous refusez de les voir en vous-même, elles ressortent dans
votre expérience avec d’autres personnes pour que vous puissiez vous les
‘’réapproprier’’ et leur ouvrir votre cœur. Regardez donc attentivement, en
laissant tomber l’orgueil ou tout autre attachement qui pourrait vous
empêcher de trouver ces caractéristiques. Une fois que vous les aurez
trouvées, exercez-vous à ne plus vous attacher à les nier jusqu’à ce que vous
puissiez laisser tomber vos jugements qui bloquent le cœur et accepter ce que
vous rejetiez en vous-même. Quand vous le pourrez, votre cœur s’ouvrira à la
part de vous-même que vous aviez condamnée et votre comportement qui
manquait d’amour ne se reflétera plus à l’extérieur comme une incitation à
ouvrir votre cœur.
Voici un incident qui illustre le processus de guérison de la colère : un matin,
je me suis rendu chez un chiropracteur/masseur pour qu’il me soulage d’une
raideur dans les hanches et le bas du dos. Il a travaillé sur moi et quand je me
suis baissé pour lacer mes chaussures avant de partir, mon dos s’est raidi. Il a
travaillé encore un peu et m’a garanti que j’allais très bien. Je suis rentré chez
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moi et une fois descendu de la voiture, j’ai pu difficilement marcher jusqu’à la
maison. Une fois rentré à l’intérieur, je ne pouvais plus du tout marcher sans
de pénibles douleurs. Ma femme a téléphoné au chiropracteur qui était
inquiet et il a suggéré des exercices que j’ai pu à peine esquisser. Il serait libre
pour me reparler dans la soirée et il n’endossait aucune responsabilité pour ce
qui s’était passé. Immobilisé à plat sur le dos, mon esprit s’est mis à craindre
que des dommages irréversibles aient été commis et que je ne puisse plus
jamais marcher. La pensée d’une rupture de disques clignotait dans mon
esprit. Puis, des pensées de colère et accusatrices ont pris le relais. J’ai
immédiatement pris conscience du processus et j’ai travaillé à me détacher de
ces pensées. Elles étaient néanmoins très tentantes et elles ne cessaient de
revenir, si je leur laissais la moindre ouverture. Il peut être excessivement
tentant de se laisser aller à des pensées colériques, mais j’étais aussi très
conscient de la souffrance que je m’infligeais en les entretenant. Qui plus est,
je savais que cette expérience s’était produite, comme toutes les expériences,
pour me servir en m’enseignant comment devenir plus détaché, dans ce cas-ci
au fait de pouvoir marcher. J’avais toutefois du mal à m’accrocher à cette
perspective durablement. Je pouvais me détacher pendant un moment et puis
les pensées colériques revenaient subrepticement.
Pour me libérer des jugements qui alimentaient ma colère, je devais découvrir
comment le chiropracteur était un reflet de moi-même. Après avoir adopté
cette perspective, ce fut évident. Il y a quelques années, un de mes patients
m’avait accusé de m’être trompé, et comme le chiropracteur, je n’avais pas
reconnu que j’avais commis une erreur, parce que je craignais des poursuites.
Quand j’ai vu la cause de ma colère, mon cœur s’est ouvert au ‘’moi’’ qui avait
commis une erreur et qui ne l’avait pas reconnue et simultanément, mon
cœur s’est ouvert au miroir de moi-même, le chiropracteur. Le processus de
détachement pour que mon cœur puisse s’ouvrir a pris environ cinq heures.
Ce fut un soulagement réel de me libérer de ces pensées qui bloquaient mon
cœur. Le lendemain, quand le chiropracteur est venu pour m’examiner, mon
cœur était ouvert. J’ai vu sa peur de m’avoir blessé et d’être potentiellement
poursuivi. Je me suis péniblement levé et je l’ai étreint en le rassurant sur le
fait qu’il n’avait rien à craindre. Il m’a fallu environ trois semaines pour me
rétablir sans aucun dommage permanent.
Le second type d’attachement à la colère, c’est de la refuser, de l’éluder ou de
la réprimer. Si vous avez ce type d’attachement, vous pouvez n’avoir aucune
conscience de la colère, aussi commencez à pratiquer avec ce dont vous êtes
conscient, comme la dépression, un sentiment de blocage ou un manque de
dynamisme. Pratiquer le détachement avec ce qui est, maintenant, peut
ramener la colère à la surface, parce que le détachement peut annuler la
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répression de la colère. Quand la colère apparaît, permettez-lui de s’introduire
dans votre conscience sans la juger ni la rejeter. Concentrez-vous sur
l’acceptation inconditionnelle d’être en colère en permettant à la colère d’être
dans votre conscience sans l’éluder ni la diminuer en aucune manière. C’est
similaire au processus d’acceptation de manquer d’amour qui est décrit au
chapitre précédant. Apprendre à ouvrir votre cœur à la colère nécessitera de
pratiquer le détachement envers les pensées qui ont soutenu votre aversion
envers elle. Ceci requiert de découvrir les pensées que vous avez utilisées
pour réprimer votre colère, comme ‘’la colère est mauvaise’’, ‘’les gens
spirituels ne se mettent pas en colère’’, ‘’la colère est dangereuse’’, ou ‘’les
gens ne m’aimeront pas, si je suis en colère’’. Une fois que vous avez trouvé
les pensées grâce auxquelles vous avez réprimé votre colère, pratiquez le
détachement vis-à-vis de celles-ci. S’identifier à la colère est moins probable,
si vous l’avez éludée ou si vous l’avez réprimée, mais cela peut se produire.
Donc, si vous avez refusé ou si vous avez éludé la colère, reconnaissez et
acceptez qu’il y a de la colère, mais restez le témoin désidentifié de la colère
elle-même. Ne pas s’identifier à la colère et rester dissocié d’elle est essentiel.
Si vous commencez à vous identifier à la colère, arrêtez immédiatement et
faites une des choses que Sai Baba recommande pour permettre à la colère de
retomber. Puis pratiquez avec votre colère de la manière décrite ci-dessus
pour vous désidentifier des pensées qui l’ont causée.
Une fois, alors que je randonnais dans les montagnes avoisinantes, deux
chiens accoururent derrière moi et ils se mirent à aboyer d’une manière qui
paraissait agressive. Il y a une obligation de tenir ses chiens en laisse, là où je
vis et je n’avais pas envie d’être harcelé par ces chiens. Cela m’embêtait. A
une centaine de mètres, j’ai vu leur propriétaire et je l’ai appelée : ‘’S’il vous
plaît ! Occupez-vous de vos chiens !’’ Ce qu’elle n’a pas fait et quand elle s’est
approchée, elle a dit : ‘’Que voulez-vous que je fasse ? Que je les tue ? Ils ne
font qu’aboyer !’’ Décontenancé par sa véhémence, j’ai dit que j’espérais qu’ils
ne mordaient pas et j’ai fait un pas sur le côté pour les laisser passer. Sa
réaction très excessive m’a alerté sur la possibilité qu’elle réagissait à l’énergie
mentale colérique que j’avais dirigée sur elle, puisque que je pensais m’être
adressé ‘’gentiment’’ à elle. Elle est passée devant moi et j’ai entrepris de
pratiquer le détachement vis-à-vis de ma colère pour que mon cœur puisse
s’ouvrir, en sachant qu’elle ne faisait sans doute que me refléter ma propre
colère. De plus, j’ai reconnu que la conduite contrevenante que je condamnais
chez elle était aussi la mienne. Une part de moi n’aime pas suivre des règles
qui semblent inutilement restrictives, quand le fait de les ignorer ne causerait
aucun mal. Reconnaître comment elle était un miroir de moi-même facilita le
fait de lâcher les pensées qui provoquaient ma colère.
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Une fois libéré de ma colère, j’espérai la revoir afin de pouvoir tester si j’étais
toujours attaché ou pas au fait qu’elle contrôle ses chiens et plus tard, je la vis
redescendre le chemin. Ses chiens accoururent et se remirent à aboyer contre
moi. Puisque mon cœur ne se fermait pas, je sus que j’étais délivré de mon
attachement. Je l’accueillis mentalement, elle et ses chiens, dans l’unité et
dans l’amour. Sans qu’une parole n’ait été prononcée, elle rappela ses chiens.
Nous eûmes ensuite une conversation agréable concernant les conditions de
randonnée. C’est incroyable comment l’amour peut vite désamorcer la colère,
qu’il s’agisse de la vôtre ou de celle d’un autre. Une conscience pleine d’amour
crée une réalité qui lui ressemble, tout comme un état d’esprit colérique.
Ainsi, quand la colère vous monte au nez, supposez toujours que vos pensées
ou que votre état d’esprit sont la cause de ce que vous expérimentez.
Le plus difficile dans le détachement vis-à-vis de la colère est peut-être de
découvrir comment ce à quoi nous réagissons avec colère est en fait un reflet
de nous-mêmes. Si nous ne prenons pas conscience de la partie de nousmêmes réfléchie dans l’autre, nous réagirons sans doute de nouveau avec
colère, quand une situation semblable se reproduira, parce que l’attachement
ou la corde sensible qui est touchée existe toujours. Lorsqu’on dit qu’on
touche une corde sensible, ce qui se passe, c’est qu’il existe un attachement à
ce que quelque chose soit différent et alors, la corde de l’attachement réagit
par des pensées qui génèrent de la colère. Parfois, se détacher de ces pensées
dénouera l’attachement (la corde sensible) qui était leur source, mais
généralement, ce n’est pas le cas et il est donc important de découvrir le point
sensible et de le désamorcer. C’est possible, parce que nos convictions créent
et le point sensible et les perceptions auxquelles nous réagissons et qui le
touchent. Pour désamorcer un point sensible, nous devons découvrir sa
source, la partie de nous-mêmes à laquelle nous avons fermé notre cœur et qui
est reflétée dans la personne que nous rejetons. Une fois que nous voyons le
miroir et que nous ouvrons nos cœurs à ce que nous avons rejeté et renié en
nous-mêmes, le point sensible disparaîtra.
L’exemple qui suit clarifie comment découvrir et désamorcer vos points
sensibles. Si votre patron se montre critique et peu appréciateur à votre égard
et si vous réagissez par de la colère, commencez par pratiquer le détachement
vis-à-vis de votre colère et des pensées génératrices de colère. Dès que vous
êtes suffisamment détaché, passez à la recherche du point sensible –
l’attachement qui a déclenché votre colère. Cela pourrait être un attachement
à la conviction : ‘’J’ai besoin que mon travail soit respecté et apprécié car, si ce
n’est pas le cas, cela signifie que je suis incompétent.’’ En supposant que votre
attachement soit d’être considéré comme compétent, lorsque cette
appréciation vous est refusée, vous réagissez par de la colère. C’est le point
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sensible. Même si vous vous détachiez de votre colère dans ce cas-ci, un
nouveau jugement d’incompétence toucherait probablement encore le point
sensible.
Pour désamorcer le point sensible, vous devez découvrir comment ce point
sensible est apparu. Tournez-vous vers la perspective que, puisque vous créez
votre réalité, votre expérience de votre patron est votre création, un reflet de
vous-même. Votre perception de la façon dont votre patron vous traite est un
miroir de la façon dont vous vous traitez vous-même, aussi découvrez
comment vous vous critiquez et vous rabaissez vos propres capacités. Il est
possible qu’il y ait une part de vous-même qui met toujours en doute ou qui
déprécie vos capacités. Votre jugement personnel crée le point sensible. Vos
pensées autodénigrantes chargent et amorcent le point sensible qui peut alors
être touché. Si vous vous traitez avec un manque d’amour, cela vous sera
reflété par des gens qui paraîtront vous traiter pareillement. Si vous
reconnaissez comment vous vous critiquez et comment vous vous appréciez
peu vous-même, vous pouvez vous détacher de ces pensées qui bloquent le
cœur et désamorcer ainsi le point sensible.
Si vous fermez votre cœur à quelqu’un, la cause en est que vous vous êtes
d’abord fermé votre cœur à vous-même de la même manière,
fondamentalement. Trouvez donc la caractéristique présumée ou le
comportement de l’autre (le point sensible) auquel vous réagissez avec colère.
S’il s’agit de malhonnêteté, regardez comment vous êtes malhonnête avec
vous-même ou comment vous vous cachez la vérité. S’il s’agit de trahison,
découvrez comment vous êtes infidèle avec vous-même ou avec vos
principes. S’il s’agit d’avidité, voyez à quels désirs vous êtes attaché. S’il
s’agit de suffisance, voyez comment vous êtes imbu de vous-même ou
prétentieux. S’il s’agit d’hypocrisie, voyez comment vous n’êtes pas vrai avec
vous-même ou comment vous trompez les autres. Aussi longtemps que nous
pensons que la cause de la colère se trouve ‘’à l’extérieur’’, nos points
sensibles resteront. Une fois que nous comprenons que nous créons et que
nous appuyons sur nos points sensibles, nous pouvons apprendre à cesser et
entreprendre de les neutraliser et de les désamorcer.
Un point sensible courant, c’est l’attachement à la conviction que ‘’les gens
devraient être courtois’’. Lorsque quelqu’un enfreint cette règle, nous
réagissons par toute une gamme d’attitudes allant de l’irritation mineure
jusqu’à la rage. Disons que vous adhérez à cette règle et alors que vous
conduisez dans le trafic, on vous fait une queue de poisson. Votre
attachement à la règle fait ressortir votre colère et il est possible que vous
klaxonniez, que vous brandissiez le poing, que vous vocifériez certaines
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paroles ou que vous essayiez même de vous venger en recoupant la route du
conducteur ou de la conductrice incriminée. La colère et sa manifestation
feront souffrir non pas le conducteur ou la conductrice attaquée, mais vousmême, puisque vous avez bloqué votre cœur. L’autre ne souffrira lui ou elle
que si son cœur se ferme, quoi que vous fassiez. Manifester sa colère à un
conducteur ou une conductrice qui commet un délit empêche de se détacher
de la colère et évite la conscience du point sensible (l’attachement) qui l’a
causée. Nous pouvons vertueusement condamner les autres pour des actes
que nous pensons ne jamais commettre, à moins de reconnaître que ce qu’ils
ou elles font est un reflet de ce que nous faisons.
Si vous réagissez par de la colère envers une personne qui semble manquer de
courtoisie, pratiquez le détachement vis-à-vis de votre colère jusqu’à ce que
vous puissiez passer à son origine. Trouvez alors la conviction spécifique ou
le point sensible qui a provoqué votre colère. Ce peut être : ‘’Si les gens ne me
traitent pas avec courtoisie, ils me disent que je suis insignifiant et je ne
supporte pas cela !’’ Votre réaction est due à l’attachement à être traité
comme quelqu’un d’ ‘’important’’ et qui mérite la considération. Même en
restant détaché du fait d’être traité courtoisement dans ce cas précis, le point
sensible restera intact et prêt à réagir à nouveau, la prochaine fois qu’on
violera cette règle.
Pour désamorcer le point sensible, découvrez comment votre expérience de
l’autre est un reflet ou une projection de vous-même. Votre première réaction
pourrait être que vous ne traiteriez jamais quelqu’un, comme la personne
incriminée vous a traité, comme en faisant une queue de poisson à quelqu’un
en plein trafic et donc, si on vous fait cela à vous, la provocation justifie
certainement votre colère. Ce que vous pouvez ignorer, c’est que vous vous
traitez exactement comme le fait le conducteur ou la conductrice incriminée
sous l’apparence que ce n’est pas là manquer d’amour ou si cela semble être le
cas, la situation le justifie. Ou vous pouvez le faire dans un autre domaine de
votre vie, mais le processus sera le même. Vous pourriez vous pousser
impitoyablement pour arriver dans la vie et être très productif et couper net
toute protestation de fatigue ou de maladie. Pour désamorcer le point
sensible, il vous faut déterminer comment vous vous traitez inconsidérément,
d’une manière qui ressemble à celle que vous percevez chez la personne
incriminée. Si ceci n’était pas vrai, vous ne réagiriez pas en lui fermant votre
cœur en réaction. A moins de guérir la relation interne, vous continuerez de
réagir à son miroir extérieur qui reflète comment vous vous êtes fermé votre
cœur à vous-même. Une fois que vous avez constaté comment la conduite
peu aimable de l’autre est le miroir de la vôtre, il est beaucoup plus simple
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d’arrêter de vous traiter ainsi vous-même. Quand vous le ferez, le point
sensible disparaîtra.
Apprendre à se détacher de la colère peut se faire en plusieurs phases.
Premièrement, vous pourriez vous souvenir de pratiquer après les faits, peutêtre en vous excusant pour tout acte peu aimable et en pardonnant. Ensuite,
vous prenez conscience de la réaction colérique en cours de route, mais vous
êtes peu disposé ou incapable de cesser de vous l’infliger ou de l’infliger à
l’autre, parce que le sentiment que vous éprouvez est tellement ‘’juste’’. A
cause de cet attachement à la ‘’justesse’’, vous pourriez trouver difficile de ne
fût-ce qu’entreprendre de vous détacher de la colère. Et finalement, vous
saisissez la réaction colérique, dès qu’elle se produit. Cette étape est facilitée,
quand vous comprenez vraiment que vous êtes la cause de votre colère.
Reconnaître que vous êtes responsable de votre colère vous permettra de
changer de cible et d’objectif, de passer de l’accusation et de l’attaque de
l’autre à la pratique du détachement vis-à-vis de la cause réelle de la colère.
Pour vous détacher, premièrement, dissociez-vous de la colère et laissez-la se
calmer. Deuxièmement, découvrez les pensées qui ont suscité la colère et
détachez-vous d’elles. Troisièmement, découvrez comment la personne ou la
situation à laquelle vous avez réagi est un miroir de vous-même et dénouez
l’attachement qui fermait votre cœur à cette part de vous-même et donc à ses
reflets dans le monde. Lorsque vous reconnaissez le miroir et que vous
apprenez à ouvrir votre cœur à la part peu aimante de vous-même qui vous
était réfléchie, vous avez guéri la cause de la colère.
Maintenant, détachez-vous de toute colère que vous pourriez ressentir. Si
vous ne ressentez aucune colère, souvenez-vous d’une fois où vous vous étiez
mis en colère et constatez qu’avec le récurrence de ces pensées, elles
recommencent à vous faire vous sentir fâché, ce qui confirme que les pensées
créent les sentiments. Dénouez ensuite votre attachement à ces pensées et
découvrez comment la cible de votre colère est en fait un reflet de vous.
Quand nous sommes détachés de la colère et des pensées qui suscitent la
colère, elles ne ferment plus nos cœurs. Ainsi, dans des situations où nos
cœurs se seraient fermés auparavant, ce n’est plus le cas. Se détacher de la
colère et des pensées qui suscitent la colère désarme la colère en ouvrant nos
cœurs à la cause de la colère. La colère, qui est accueillie dans la douce étreinte
de l’amour s’adoucit et s’apaise contrairement à la contraction dure de
l’identification avec elle. Quand nous nous détachons de la colère et des
pensées qui la suscitent, la colère disparaît ou se transforme fréquemment en
compassion ou en tristesse que la colère masque souvent.
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La tristesse
La cause essentielle de la tristesse, c’est que nous avons perdu le contact avec
notre nature véritable qui est l’Amour. Nous croyons être des mois
individuels dans un monde rempli d’autres gens et d’objets et nous nous
attachons à certains aspects de cette illusion en réagissant avec tristesse, si
nous ne pouvons pas les obtenir ou si nous les perdons. Les symptômes de
cette cause essentielle de notre tristesse sont légions, bien sûr, et vont d’une
petite déception insignifiante jusqu’au profond chagrin de perdre quelqu’un
qu’on aime.
Parce que la tristesse est un sentiment désagréable, il est possible que nous ne
voulions même pas reconnaître que nous sommes tristes. Nous pouvons
éviter d’être conscients de la tristesse en érigeant des barrages de pensées,
comme le refus (‘’je ne suis pas triste !’’), la rationalisation (‘’je n’ai aucune
raison d’être triste !’’), le rejet de soi (‘’la tristesse est une faiblesse, une
honte’’), l’auto-manipulation (‘’je devrais être fort, ne pas craquer’’ ou ‘’que
penseront les gens ?’’), la peur (‘’je vais être submergé’’ ou ‘’je me sentirai par
trop vulnérable’’). Nous essayons ainsi de nous protéger en ne ressentant pas
la tristesse trop profondément et/ou en ne permettant pas aux autres de la
voir. Reconnaître ces pensées qui barrent la tristesse et nous en détacher est
important, parce qu’alors, nos cœurs peuvent s’ouvrir à elles.
Comme d’habitude, commencez à pratiquer au niveau de la pensée, si vous le
pouvez, en découvrant les pensées qui causent votre tristesse. Généralement,
elles sont évidentes, car, quand vous les pensez, vous devenez triste.
Dissociez-vous et observez les pensées génératrices de tristesse qui s’attardent
sur ce qui a été perdu ou ce qui est inaccessible et les effets présumés de cette
perte. Si vous ne pouvez pas lâcher ces pensées, pratiquez alors au deuxième
niveau – les sentiments de tristesse engendrés par ces pensées. Parfois, les
gens s’attachent à s’accrocher à la tristesse, car cela procure certains bénéfices,
comme obtenir de l’attention. Néanmoins, plus couramment, l’attachement
consiste à éviter ou à éliminer la tristesse, comme en attestent les ventes de
Prozac et d’autres médicaments qui sont en pleine progression. Plutôt que de
tenter de fuir votre tristesse en la chassant, en la refusant ou en
désensibilisant votre esprit avec des médicaments, cessez tout évitement et
pratiquez le détachement en devenant tout à fait présent et conscient de votre
tristesse, telle qu’elle est. Tournez-vous vers la peine, vers la perte, vers le
vide, vers la douleur et vers le chagrin et acceptez-les sans réserve.
Accueillez-les plutôt que de les rejeter. Connaissez la profondeur de cette
souffrance, de ces larmes, de cette solitude et de cette blessure. Vous détacher
de l’évitement d’une tristesse mineure peut être facile, mais une tristesse plus
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profonde peut être extrêmement intense et douloureuse et vous pourrez
tenter de l’éviter ou de la fuir. Persévérez néanmoins et faites confiance au
processus jusqu’à ce que vous cessiez de vous contracter devant la tristesse et
que vous puissiez lui permettre d’être là dans toute sa totalité. Soyez
inconditionnellement avec votre tristesse et refusez d’entretenir des pensées
d’évitement commodes qui pourraient surgir, comme ‘’j’ai essayé d’accueillir
mes larmes auparavant et en conséquence, je me suis senti encore plus mal !’’
ou ‘’je n’arrêterai plus jamais de pleurer !’’. Souvenez-vous que, quand nous
nous détachons de quelque chose, nos cœurs s’ouvrent à cette chose, ce qui
aboutit à sa transformation et la tristesse n’est pas une exception.
La douleur de perdre quelqu’un est profonde et elle reviendra aussi longtemps
que nous sommes identifiés et attachés au faux moi. Le détachement n’élude
pas cette peine et cette tristesse, mais l’accepte et l’honore dans l’amour. Il
invite les larmes, la peine et la perte à être présents et il nous ouvre le cœur à
elles. Fermer notre cœur à notre propre tristesse ne fait que l’accroître et
retarde la guérison. Ainsi, dans la mesure du possible, restez totalement
présent avec le chagrin, chaque fois qu’il survient. Le chagrin pourra paraître
interminable, si nous nous efforçons de l’éviter, mais si nous cessons de
l’éviter, il évolue continuellement. Nous détacher de l’évitement du chagrin
est la chose la plus aimante que nous puissions faire pour nous-mêmes. C’est
ouvrir notre cœur à nous-mêmes, tels que nous sommes, et notre cœur guérira
avec cet amour. A présent, voyez si vous avez de la tristesse et si c’est le cas,
pratiquez le détachement.
Un homme à qui j’enseignais la pratique du détachement était fâché contre sa
femme. Il pensait qu’elle était très critique et indifférente et qu’elle le
ridiculisait sans merci. Il explosait de colère, puis il se rejetait lui-même et se
sentait coupable et il s’accusait de leurs problèmes, comme le faisait sa
femme. Il se tourmentait avec de la culpabilité d’une façon fort équivalente à
la perception qu’il avait de sa femme en train de le persécuter et il devenait
très triste. En pratiquant le détachement envers ses sentiments, sa tristesse
prit la forme d’une image d’un moi profond enfantin se sentant mal aimé,
solitaire et triste. Pour la première fois, il se vit lui-même avec compassion et
compréhension. Son cœur commença à s’attendrir. Il envisagea de s’ouvrir à
sa tristesse en lâchant tout jugement, en renonçant à tout évitement et en
voulant juste être là avec elle. En faisant cela, son cœur s’ouvrit au pathétique
de se fermer son cœur à soi-même et à la souffrance que ceci avait causé. Sa
colère et sa tristesse commencèrent alors à s’apaiser. Sa femme, qui avait été
un miroir de la façon dont il se dépréciait, commença à paraître moins
critique. Quand il n’eut plus besoin de se distancer de sa propre tristesse, son
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cœur s’ouvrit aussi à la tristesse de sa femme. Quand nous ne nous attachons
plus à éviter la tristesse, elle se transforme souvent en compassion.
A un moment donné, nous pouvons prendre conscience de l’origine véritable
de notre tristesse – le sentiment de séparation d’avec notre vrai Soi. Il faut le
reconnaître et l’intégrer. Cette tristesse peut ressembler à un sentiment de
manque, d’abandon, ou à une aspiration profonde à la plénitude, à la paix et à
l’Amour. Ces sentiments peuvent paraître non fondés ou disproportionnés
jusqu’à ce que nous reconnaissions qu’ils reflètent notre nostalgie de l’union
avec notre Soi. Se détacher de l’évitement de cette tristesse fondamentale est
essentiel.
La peur et l’angoisse
Comme tous les sentiments, la peur et l’angoisse sont causées par des pensées
et par des convictions, la plus fondamentale étant la conviction que vous êtes
un moi individuel vulnérable, et non l’Un. Toutes les peurs découlent de cette
hypothèse de base. Une fois que vous la croyez, vous pouvez provoquer la
peur en imaginant quelque chose d’effrayant survenant dans le futur au moi
que vous pensez être. Par conséquent, entreprenez toujours de vous détacher
de la peur en tentant de découvrir les pensées qui provoquent la peur et
détachez-vous d’elles pour que votre cœur puisse s’ouvrir. Observez ces
pensées génératrices de peur d’une manière détachée et reconnaissez qu’elles
ne sont que votre imagination. Si vous pouvez vous détacher des pensées qui
génèrent la peur, elles cessent d’engendrer la peur et de créer des ‘’réalités’’
effrayantes à l’extérieur. La peur disparaîtra, si vous vous détachez des
pensées génératrices de peur, parce que la peur est toujours causée en
imaginant ce qui va se passer et non ce qui se passe. Quand vous êtes
totalement centré dans le présent, la peur ne peut pas survenir.
Examinons un scénario typique de peur. Vos pensées se tournent vers un
événement, vers une situation future imaginaire où vous ou quelqu’un que
vous aimez, vous êtes physiquement menacé , un bien de valeur auquel vous
êtes attaché est en danger ou où votre ego se prend une claque. Si vous
imaginez un terrible désastre dans le futur, vos pensées créeront cette réalité
pour vous maintenant et vous réagirez ensuite par de la peur à la réalité
effrayante que vous avez créée. Vous ne devez pas céder à de telles pensées en
leur prêtant attention, en les croyant et en fabriquant un véritable film
catastrophe. Ainsi, cessez de saisir ces pensées dès que vous reconnaissez ce
que vous êtes en train de faire. Cessez de vous identifier à elles, prenez du
recul et observez-les. Cessez de traiter vos créations mentales, comme si elles
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sont réelles. Si le scénario que vous imaginez continue de vous attirer et si
vous êtes incapable de vous dégager de celui-ci et des pensées qui
l’alimentent, utilisez n’importe quelle méthode qui vous permettra de
détourner ailleurs votre attention, comme la répétition d’un mantra ou d’un
chant sacré. Une fois que vous vous êtes coupé de la scène angoissante et des
pensées qui en sont la cause, soyez prêt à vous désidentifier d’elles, si celles-ci
reviennent.
Je me rappelle qu’une fois, alors que mon fils s’apprêtait à reprendre la route
de l’université en moto sous des trombes d’eau (un parcours de près de 600
km), j’ai pensé qu’il devrait attendre que le temps soit meilleur, mais il était
décidé à partir. J’ai commencé à lui décrire ce que j’estimais être les risques et
il m’a coupé en disant qu’il ne voulait pas entendre mes pensées inquiètes, car
il pourrait commencer à les penser lui-même et il ne voulait pas commencer à
créer cette réalité, parce que cela interférerait avec sa concentration (une
petite leçon pour moi !). J’ai alors cessé de me faire peur à moi-même et j’ai
simplement laissé cela à Dieu et il est arrivé sain et sauf.
Une autre personne que j’aidais craignait de quitter son emploi actuel pour se
former pour devenir psychothérapeute. Elle travaillait dans un bizness qu’elle
détestait et bien que devenir thérapeute l’attirait beaucoup, elle n’avait aucune
expérience ni aucune garantie de succès et cela impliquait aussi des difficultés
financières. Elle a commencé à suivre des cours sans quitter son travail et elle
a vu qu’elle aimait cela. Néanmoins, elle ne voulait pas s’engager à changer de
carrière. Nous avons découvert qu’elle s’effrayait elle-même en imaginant
une scène angoissante où l’on découvrait qu’elle n’était pas elle-même
totalement saine d’esprit et une autre où elle commettait une erreur
monumentale qui était préjudiciable à quelqu’un ou qui aboutissait à son
suicide. Une fois que ces pensées génératrices de peur et bloquantes pour le
cœur ont été mises à jour, elle a commencé à pratiquer le détachement vis-àvis d’elles.
La peur de ne pas pouvoir devenir thérapeute, si elle-même avait des
problèmes disparut assez facilement, lorsqu’elle cessa de s’identifier aux
pensées de jugement qui avaient créé sa peur. Elle réalisa combien elles
étaient irréalistes et découvrit qu’elles étaient des moyens éprouvés pour
empêcher ses problèmes personnels d’affecter défavorablement son travail. La
peur de commettre une erreur irréparable fut plus complexe. En travaillant à
se détacher de son désastre imaginaire, elle prit conscience des croyances
sous-jacentes qui l’alimentaient, des variantes de ‘’tu ne seras jamais assez
bonne’’ ou ‘’tu n’es pas suffisamment intelligente’’. Elle reconnut que
c’étaient des messages qu’elle avait reçus de ses parents et qu’elle créait une
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réalité qui reflétait ces jugements. Une fois qu’elle vit l’origine de sa peur, elle
entreprit de se détacher de ces croyances. L’identification diminua et sa peur
décrut en conséquence jusqu’à ce qu’elle puisse risquer de changer de carrière.
Si la pratique du détachement vis-à-vis de pensées génératrices de peur
s’avère trop difficile, passez au second niveau de pratique – aux sensations
physiques de la peur elle-même. Dans l’hypothèse où votre attachement
consiste à vous débarrasser des sentiments de peur, pratiquez le détachement
en cessant toute tentative pour les faire disparaître et ayez plutôt l’objectif de
devenir tout à fait présent à ceux-ci sans tenter de les atténuer ou de les
altérer en aucune manière. Les symptômes physiques de la peur ou de
l’angoisse incluent la tremblote, un rythme cardiaque accéléré, un estomac
noué ou ‘’avoir les boules’’ et des contractions musculaires qui provoquent des
symptômes comme une respiration étriquée, des maux de tête ou des douleurs
dans le cou. Pour illustrer, si vous redoutez un événement à venir, mais si
vous ne savez pas vous concentrer sur les pensées qui provoquent la peur,
concentrez-vous sur l’accueil plutôt que d’éviter les sentiments causés par vos
pensées. Prêtez attention aux symptômes physiques, comme un cœur qui bat
la chamade, une respiration étriquée, une oppression dans la poitrine, un
nœud dans l’estomac. Cessez de repousser ces sentiments et apprenez à les
connaître. Ils ne sont ni injustifiés ni mauvais, aussi permettez-leur d’être là.
Ne résistez pas, ne tentez pas d’atténuer les sentiments de peur, mais
accueillez-les. Détendez-vous dans la sensation de peur jusqu’à ce que vous ne
sentiez plus aucune séparation. Une manière de s’ouvrir plus profondément à
de tels sentiments, c’est de permettre à l’énergie de la peur de s’exprimer par
le mouvement. Permettez à la peur de danser à travers vous. Quand vous ne
serez plus attaché à rejeter vos sentiments de peur ou d’angoisse, votre cœur
s’ouvrira à eux et la peur s’apaisera ou se transformera en autre chose.
Essayez de pratiquer le détachement pour ouvrir votre cœur à toute peur que
vous pourriez avoir maintenant.
La joie, l’amour et la compassion
La Compassion et l’Amour que vous êtes réellement se libèrent par la
pratique du détachement, ainsi chaque fois que vous pratiquez, vous
pratiquez l’Amour. Plus vous pratiquerez, plus la joie, la compassion et
l’amour se manifesteront dans votre cœur. Quand c’est le cas, n’essayez
surtout pas de vous attacher à eux. S’accrocher à des sentiments de joie ou
d’amour pour éviter de les perdre ne fera que les diminuer et devenir
inauthentiques. Restez plutôt détaché par rapport à la joie, l’amour ou la
compassion sans vous en emparer ni interférer avec eux en aucune façon.
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Laissez-les simplement être. Il est compréhensible que vous puissiez avoir
tendance à vouloir prolonger de tels sentiments, mais vous devez apprendre à
faire confiance au cours de la création et à ne pas vous accrocher à de tels
sentiments plus qu’à d’autres. Le détachement ouvre votre cœur d’une façon
telle que votre amour ne discrimine pas entre les choses et ne préfère jamais
une chose par rapport à une autre.
Il est aussi important que vous ne refusiez pas ou que vous ne réprimiez pas
la joie, l’amour et la compassion, quand ils se manifestent dans votre cœur.
Vous pourriez croire qu’il est peu probable que quelqu’un cache ou réprime
l’amour ou la compassion, mais ces sentiments peuvent provoquer la peur,
parce que l’amour et la compassion défont le faux moi et dissolvent le
sentiment d’être un moi séparé. Quand le faux moi résiste à se perdre dans
l’amour, la joie ou la compassion, n’essayez pas de diminuer ou d’éviter ces
sentiments d’ouverture du cœur, mais laissez-les ‘’vous’’ défaire, s’ils le
veulent.
Accueillir inconditionnellement votre compassion et votre amour
conditionnels conduit directement à l’épanouissement de la Compassion et
de l’Amour purs qui sont votre Soi. Ne prétendez toutefois jamais être
compatissant ou aimant, quand vous ne l’êtes pas. Une telle supercherie est
un manque d’amour vis-à-vis des autres et de vous-même et une trahison du
Soi. Lâchez plutôt ce qui ferme votre cœur pour que la Compassion et
l’Amour authentiques qui sont votre nature véritable puissent spontanément
se manifester.
LES DÉSIRS
‘’Le feu de la sagesse existe dans le cœur de chaque être humain. Ce feu signifie un
cœur pur. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas voir ce feu, parce que le cœur est
recouvert pas la cendre des désirs matériels’’ (Sai Baba, 1994, p.210).
‘’On ne peut pas éteindre la flamme du désir sans conquérir le mental et on ne peut
pas transcender le mental sans étouffer la flamme du désir. Le mental, c’est la graine
et le désir, c’est l’arbre.’’ (Sai Baba, 1984a, p.6).
Les désirs se manifestent en raison de notre attachement au faux moi et ils
disparaîtront, quand celui-ci disparaîtra. Les désirs contaminent notre cœur
avec ‘’la cendre des désirs matériels’’ et ils nous privent de l’Amour. Nous
cherchons à nous soulager de la souffrance causée par la contamination de nos
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cœurs en pourchassant toujours plus de désirs matériels sans être conscients
que ce à quoi nous aspirons vraiment, c’est à l’Amour inconditionnel et à
l’union avec l’Un. Nous pensons que si nous pouvons satisfaire nos désirs,
notre tristesse et notre souffrance s’en iront et nous serons heureux. Mais
puisque l’origine véritable de notre tristesse, c’est de nous sentir séparés de
l’Amour, cela ne fonctionnera jamais. Obtenir l’objet de nos désirs ne
soulagera pas notre nostalgie de l’Amour et pourra plutôt l’intensifier, parce
que les désirs nous attachent plus solidement au faux moi. Toutefois, si nous
connaissons l’Amour, nous ne désirons plus rien d’autre et pour connaître
l’Amour, il nous faut nous libérer de notre attachement aux désirs, parce que
ce sont précisément ces attachements qui ont fermé nos cœurs et qui ont
obscurci l’Amour que nous sommes.
Si vous vous attachez à vos désirs, vous les validez et vous leur donnez le
pouvoir de créer votre réalité et de déterminer votre comportement en
approfondissant et en consolidant ainsi votre attachement au faux moi.
Supposez que cette pensée surgisse : ‘’Il me faut plus d’argent parce qu’alors,
je me sentirai en sécurité.’’ Si vous croyez cette séduisante pensée et si vous
vous y attachez, vous agirez sur la base de celle-ci en vous efforçant d’obtenir
plus d’argent et ceci renforce votre attachement au faux moi en endossant sa
peur et son idée que le bonheur peut s’obtenir par la richesse. En validant ce
désir par l’action, vous créez une réalité qui semble soutenir l’idée fallacieuse
que la richesse vous conférera la sécurité et le bonheur. Il est donc important
de s’occuper des désirs au niveau de la pensée avant qu’ils ne se manifestent
comme votre réalité.
Nous pouvons avoir de ‘’bons’’ désirs : désirer le bonheur, la paix et l’amour
et il pourrait sembler que ces désirs pourraient nous permettre de devenir de
meilleures personnes et que nous devrions donc les poursuivre. Pourquoi ne
pas tenter de devenir heureux, paisibles et aimants ? OK, si nous
reconnaissons qu’il y a une restriction importante : les ‘’bons’’ désirs ont pour
origine le faux moi et donc, comme tous les désirs, ils renforcent notre
attachement au faux moi et à son amour conditionnel. Le Soi n’a aucun désir
et est l’Amour. En nous libérant du faux moi, notre vraie nature qui est
l’Amour et la Compassion inconditionnelle se révèle et il n’est donc pas
nécessaire de poursuivre leurs contreparties conditionnelles.
La pratique du détachement vis-à-vis des désirs se fait pareillement avec tous
les désirs, qu’il s’agisse d’argent et de biens matériels, de prestige, de pouvoir,
de succès, de plaisirs ou n’importe quoi d’autre. Parce que les désirs sont des
pensées, commencez à pratiquer au niveau de la pensée. ‘’Le mental est la
graine, le désir est l’arbre.’’ Ne tentez jamais de pratiquer le détachement
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directement avec l’objet de votre désir. Il est peu probable que vous
réussissiez jusqu’à ce que vous vous soyez détaché des pensées qui sont la
cause du désir. Donc, si vous voulez vous défaire du désir d’une nouvelle
voiture, par exemple, il y a peu de chose que cela se réalise à l’occasion d’un
test de conduite. Par conséquent, la première mesure, c’est d’utiliser votre
volonté pour vous détourner de ce que vous désirez et vous en séparer. Puis,
commencez à pratiquer le détachement vis-à-vis des pensées de désir. Dès
que vous reconnaissez une pensée de désir, vous cessez de vous identifier avec
ou de vous impliquer avec ou avec toute pensée qu’elle pourrait engendrer,
comme le fantasme de gagner à la loterie et de vivre toujours heureux par la
suite. Ne saisissez pas cette pensée et ne vous laissez pas attirer dans l’action
sur la base de sa séduisante promesse de bonheur ou de délivrance de la
souffrance. Laissez partir la pensée sans l’alimenter de votre intérêt ou de
votre conviction. Si vous commencez à vouloir saisir la pensée et à vous
impliquer avec, coupez-vous d’elle immédiatement.
Aussitôt que vous pouvez vous séparer d’une pensée de désir, découvrez sa
cause. Vous trouverez que vous n’êtes pas tant attaché à l’objet du désir qu’à
quelque gain, récompense ou avantage que vous pensez recevoir, si vous
obtenez ce que vous désirez. C’est cet attachement à obtenir ce bénéfice qui
est la cause de vos pensées de désir. Par conséquent, pour vous détacher d’un
désir, il vous faut découvrir ce qu’est ce bénéfice imaginaire, c’est-à-dire, ce
que vous vous plaisez à imaginer qu’il arriverait, si vous obtenez ce que vous
désirez. Une façon d’y arriver, c’est de terminer cette phrase : ‘’Si je réalise
mon désir, alors…’’ Découvrez quel est votre espoir et la nature de votre
attachement vis-à-vis de lui. Par exemple, si votre désir est d’être élu chef
d’une organisation, voyez ce que vous pensez gagner en étant élu. Imaginezvous que vous deviendrez plus puissant, plus respecté ou que vous recevrez
plus d’argent ? Ensuite, appliquez-vous à vous détacher de ce que vous croyez
être le bénéfice d’être élu. Votre attachement aux bénéfices que vous espérez
obtenir par la réalisation d’un désir est la cause réelle du désir.
Si vous n’êtes pas capable de vous détacher de ce que vous imaginez être le
résultat de la réalisation de votre désir, passez aux sensations physiques du
désir que cette pensée provoque, comme la tension, l’angoisse, l’urgence,
l’excitation ou le désir ardent. Il pourrait sembler que vous soyez attaché aux
sensations du désir, mais en fait, vous êtes attaché à l’évitement ou au
soulagement des sensations par la satisfaction du désir. Les sensations réelles
du désir non satisfait vont d’une tension mineure à une douleur aiguë. Vous
évitez les sensations intenses d’envie et de désir ardent en tentant soit de les
soulager en obtenant l’objet du désir ou bien en les niant ou en les réprimant.
Et donc, pour vous détacher des sensations du désir, il vous faut cesser de les
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éviter ou de tenter de les soulager et devenir pleinement présent et conscient
de celles-ci dans toutes leurs nuances. Cessez d’ignorer et de réprimer ces
sensations et ne vous identifiez pas aux pulsions de les soulager.
Expérimentez-les complètement sans chercher à les soulager ni à les fuir.
N’évitez pas les sensations du désir en vous divertissant avec le fantasme
d’obtenir l’objet du désir, mais focalisez-vous sur les sensations de ne pas
l’obtenir. Si vous vous mettez à tenter de soulager ou d’éviter les sensations
de folle envie, cessez de vous identifier à cette impulsion et continuez de
permettre aux sensations de remplir votre conscience. Focalisez-vous
strictement sur les sensations de manque et expérimentez la pure soif du
désir. Résistez à toutes les tentations d’agir sur la base de ces sensations et
soyez juste inconditionnellement avec elles. Cela peut être très pénible,
l’inconfort étant proportionnel à la force du désir de le soulager. Restez
présent avec cette peine sans tenter de l’atténuer ni de vous en détourner.
Quand vous pourrez réellement accepter et accueillir les sensations que cause
le désir insatisfait, votre cœur s’ouvrira à elles. Quand vous les recevrez dans
votre cœur, elles diminueront ou elles se transformeront, généralement dans
la tristesse sous-jacente de vous sentir séparé de l’Amour. Il se peut que vous
n’ayez pas conscience que vos désirs masquent une profonde nostalgie de
l’Amour. Une fois que vous prenez conscience des sentiments sous-jacents de
séparation et de tristesse que le désir couvre, pratiquez alors avec ces
sentiments. Et lorsque vous pourrez accueillir les sentiments de manque, de
nostalgie et de tristesse dans votre cœur de compassion, retournez au niveau
de la pensée. Généralement, l’attachement à l’objet du désir et à son bénéfice
imaginaire aura notablement diminué ou aura complètement disparu. Si votre
attachement persiste encore, appliquez-vous encore à reconnaître que votre
expérience de l’objet de votre désir est votre propre création et un reflet de
vous-même. Ce que vous espérez obtenir en gagnant ce que vous désirez est
précisément ce que vous n’avez pas voulu ou pu vous donner à vous-même. A
la fin, c’est toujours l’Amour.
La conversation suivante qui provient d’un enregistrement audio remanié
illustre comment se détacher d’un désir, dans ce cas-ci, une boulimie de
chocolat :
Personne accro au chocolat (AC) : Je veux absolument manger ce morceau de
gâteau au chocolat qui se trouve là, devant moi. Comment est-ce que je
pratique le détachement ?
John Goldthwait (JG) : Le détachement, c’est ne pas avoir de désir. Voyons
donc comment vous êtes attachée, ce qui vous accroche, pourquoi vous voulez
réellement mettre la main sur ce gâteau et le manger ?
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AC : J’en ai réellement envie ! Je me sentirai heureuse. Cela va me goûter et
pendant un moment, je me sentirai vraiment satisfaite.
JG : Bien ! Vous pensez que le gâteau fera en sorte que vous vous sentiez
heureuse et satisfaite. Maintenant, observez cette pensée. Prenez un peu de
recul par rapport à elle et commencez à l’observer, simplement, mais sans la
saisir. Pensez-y comme s’il ne s’agissait pas de votre pensée. Détachez-vous
d’elle.
AC : Je vois que je continue à penser à manger le gâteau.
JG : On dirait qu’il va vous falloir vous libérer d’un certain attachement
avant de pouvoir le faire, alors passons aux sensations de votre désir. Entrez
réellement dedans et voyez à quoi elles ressemblent.
AC : Vous voulez dire la sensation de manger le gâteau ?
JG : Pas les sensations que vous espérez en mangeant le gâteau, mais les
sensations qui sont là maintenant quand vous n’avez pas le gâteau !
Découvrez à quoi ressemble l’envie, le désir insatiable.
AC : Ce n’est pas très bon ! Ma sensation, c’est de vouloir avaler le gâteau
pour avoir de bonnes sensations.
JG : Ignorez vos pensées de vouloir manger le gâteau et focalisez-vous
seulement sur vos sensations, maintenant. Vous semblez les éviter.
AC : C’est dur !
JG : Je sais, c’est pourquoi vous voulez vous emparer du gâteau. Donc, soyez
totalement présente avec vos sensations, connaissez-les sous toutes les
coutures.
AC : Il y a un vide ou une tristesse inconfortable, comme un trou dans mon
estomac qui fait en sorte que je veuille le gâteau.
JG : Ouvrez-vous à la tristesse et au vide et permettez-leur d’être là sans vous
détourner d’eux ou penser à autre chose.
AC : OK, je peux le faire.
JG : Restez avec ces sentiments jusqu’à ce que vous ne ressentiez plus aucune
impulsion de les éviter et que vous puissiez réellement les accueillir.
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AC : J’y arrive. Ils ne paraissent plus si mauvais, maintenant. Une part de
moi se sent réellement triste et insatisfaite. Je ne m’en rendais pas compte. Je
crois que je plonge sur le chocolat, quand je me sens ainsi.
JG : Maintenant, repassons au niveau de la pensée. Quand vous regardez le
gâteau, quelles sont les pensées qui vous viennent ?
AC : Il a toujours l’air bon, mais curieusement, il n’est plus si attirant !
JG : Observez vos pensées et voyez si vous pouvez rester détachée d’elles,
maintenant.
AC : A peu près, bien qu’il y ait toujours l’idée que le gâteau est un bonheur,
même s’il ne dure pas.
JG : Voyez si vous pouvez vous distancer de cette pensée et simplement
l’observer. Séparez-vous de cette fantaisie de bonheur et du moi qui tend à la
croire.
AC : Cela ne marche pas vraiment, hein ? Le gâteau ne me donne pas ce que
je veux réellement.
JG : Maintenant, regardez encore une fois le gâteau…
AC : L’envie a disparu ! Je sais qu’il aurait bon goût, mais je n’ai plus besoin
de le manger ! Ce que je dois faire, c’est m’occuper de ma tristesse et non pas
chercher une solution de fortune…
Ce qui précède illustre comment pratiquer le détachement vis-à-vis d’un
désir, mais l’attachement vis-à-vis de bon nombre de désirs ne se défera pas
aussi facilement que celui-ci, aussi nous allons examiner d’autres exemples.
L’avidité
Désirer davantage d’argent et de biens est très courant. Nous supposons que
si nous pouvions accumuler suffisamment de biens matériels, de pouvoir, de
prestige ou d’argent, nous nous sentirions heureux, en sécurité et en paix et
donc, nous tentons de nous accrocher à ce que nous avons et nous cherchons
le moyen d’avoir plus. Quel que soit l’objet réel de votre avidité, ne tentez pas
de pratiquer le détachement vis-à-vis de lui. Focalisez-vous plutôt sur les
croyances qui causent votre avidité, comme : ‘’Si j’avais plus d’argent, les
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gens m’estimeraient et penseraient que je suis important’’ ou ‘’Si je pouvais
juste amasser assez d’argent, alors je me sentirais en sécurité pour toujours et
je pourrais me détendre.’’ Pour vous détacher de l’avidité, vous devez vous
détacher de ses dividendes imaginaires, comme l’importance, la sécurité ou
une vie aisée dans le cas qui précède. Reconnaissez les convictions sousjacentes à ces désirs, comme ‘’je ne suis pas important’’ ou ‘’je suis incapable
de faire confiance à la Vie pour qu’elle me soutienne’’ et pratiquez le
détachement vis-à-vis d’elles. Si vous pouvez vous détacher des convictions
qui causent l’avidité, alors vous vous détacherez de l’avidité et les actions
motivées par l’avidité ne se produiront plus.
Si vous n’arrivez pas à pratiquer le détachement vis-à-vis de l’avidité au
niveau de la pensée, passez alors aux sentiments et aux pulsions. Il peut y
avoir une soif, un ardent désir d’avoir plus d’argent, de biens ou de pouvoir.
Ouvrez-vous à ces sentiments et n’essayez pas de les soulager, de les réprimer
ou d’agir sur base de ceux-ci. Permettez simplement à ces sentiments d’être
totalement présents, ne les dénaturez pas et n’interférez pas avec eux.
Lorsque vous vous détacherez de l’évitement de ces sentiments et lorsque
votre cœur s’ouvrira à eux, ils se transformeront, souvent en des sentiments
plus profonds de vide et de manque que l’avidité masque. Il peut aussi y avoir
la peine de se sentir sans valeur ou mal aimé. Ces sentiments reflètent votre
identification au faux moi et conséquemment le sentiment de séparation
d’avec l’Amour. L’avidité durera jusqu’à ce que vous vous soyez désidentifié
des pensées et des convictions qui la provoquent et que vous puissiez ouvrir
votre cœur aux sentiments sous-jacents que l’avidité masque et évite. Donc,
cessez d’éviter ou d’essayer de soulager les sentiments de tristesse et de vide
et ouvrez-vous à eux pour les accueillir comme des instructeurs d’Amour. Ce
qu’au bout du compte vous essayez d’obtenir de vos désirs, c’est justement ce
que vous n’avez pas pu ou voulu vous donner à vous-même – la compassion
et l’amour. Lorsque vous pourrez embrasser votre tristesse et les sentiments
de manque et de vide dans votre cœur, vous vous serez donné exactement ce
que vous vous attachiez réellement à recevoir de vos désirs avides. Ceci
guérira la cause de votre avidité et les pensées avides qui étaient un
symptôme de la fermeture de votre cœur devraient disparaître.
Quand nous nous détachons des pensées avides et des fantasmes de leurs
accomplissements, nos cœurs s’ouvrent plus totalement à nous-mêmes, tels
que nous sommes en libérant l’amour, la compassion et la compréhension que
nous désirons vraiment et que l’avidité ne peut pas nous apporter.
La jalousie
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Nous pratiquons avec la jalousie, comme avec l’avidité. Comme pensée
envieuse, nous pourrions avoir : ‘’J’aimerais être aussi séduisant et aussi
intelligent que lui pour pouvoir attirer les femmes comme il le fait’’ ou ‘’Si
seulement j’avais son job, je sais que je serais heureuse.’’ Dans le premier cas,
l’attachement serait à la séduction des femmes et aux bénéfices imaginaires
que l’on pourrait en tirer et dans le second au soulagement de sa morosité et à
la conviction qu’un nouveau job pourrait le faire. Pratiquez le détachement
envers ce type de pensées, envers les convictions sous-jacentes qui les
provoquent et envers les sentiments de mécontentement et d’envie que ces
pensées engendrent jusqu’à ce que votre cœur s’ouvre à eux.
En pratiquant avec les sentiments provoqués par la jalousie, vous pourriez
découvrir les sentiments sous-jacents de tristesse et de ne pas avoir de valeur
que la jalousie a masqués. La jalousie est le symptôme, mais la cause est un
désir plus profond et non reconnu de valorisation et d’Amour. Quand vous
vous serez détaché de l’évitement de vos sentiments de tristesse et de manque
de valeur et quand vous les aurez accueillis dans l’amour, vous vous serez
donné l’amour et la compassion que vous cherchiez réellement, en
supprimant la cause de la jalousie. Ce que nous désirons vraiment, c’est
toujours l’Amour et quand nous nous ouvrons nos cœurs à nous-mêmes, nous
avons reçu le message d’Amour que nos désirs ont tenté de nous enseigner.
La convoitise
La convoitise désire obtenir la personne qui vous fera vous sentir spécial ou
aimé et qui boostera votre sentiment d’estime personnel. Vous pouvez
convoiter des objets, comme la dernière merveille électronique ou comme une
belle maison, mais le plus souvent, vous convoiterez une autre personne.
Premièrement, détachez-vous des pensées qui alimentent votre convoitise,
comme ‘’Il me faut cette femme ou il me faut cet homme qui sera la source de
mon plaisir et de ma plénitude et qui fera en sorte que tout aille bien.’’ La
conviction qui sous-tend la convoitise, c’est l’illusion que si vous obtenez la
personne que vous désirez, cela vous donnera la valorisation ou l’amour qui
manque, selon vous, et alors vous vous sentirez heureux et comblé. Donc,
pratiquez le détachement vis-à-vis de tout avantage imaginaire qui
surviendrait, si vous obteniez la personne que vous convoitez, comme un ego
planant et tout qui est merveilleux. Reconnaissez que ce que vous espérez
recevoir de l’autre est le reflet de ce que vous n’avez pas pu ou voulu vous
donner vous-même.
60
Si pratiquer au niveau de la pensée n’est pas possible, passez alors aux
sensations que ces pensées concupiscentes créent – la tension gênante du désir
sexuel. Se détacher des sensations que les pensées concupiscentes provoquent
nécessite de cesser de les éluder ou d’essayer de les soulager. Accueillez-les
plutôt inconditionnellement sans vous couper d’elles et sans tenter de vous en
démarquer. Ce faisant, vous pourrez prendre conscience des sentiments que
la convoitise masque – le sentiment de se sentir vide, mal aimé et seul.
Ouvrez-vous à ces sentiments jusqu’à ce que votre cœur les accueille
inconditionnellement. Si, ‘’par hasard’’, vous devriez vous retrouver en
présence d’une personne que vous convoitez, utilisez alors toute votre volonté
pour vous dégager de cette personne et quittez immédiatement les lieux. Si
vous ne voulez pas partir, focalisez-vous sur les sentiments que votre
convoitise a causés. Entrez bien dedans jusqu'à ce que vous preniez
conscience des sentiments sous-jacents de mélancolie et de séparation d’avec
l’Amour. Soyez totalement présent avec ces sentiments jusqu’à ce que votre
cœur de compassion s’ouvre à eux.
Le désir qui sous-tend la convoitise, c’est d’être aimé inconditionnellement,
comme nous n’avons pas pu nous aimer nous-mêmes. L’aspiration la plus
profonde, c’est l’union avec l’Un qui aime inconditionnellement, mais
puisqu’elle est inconsciente, nous la cherchons dans des rencontres sexuelles
qui ne pourront jamais nous donner ce que nous voulons réellement. Nous
pourrons éprouver un réconfort passager et un sentiment de valorisation,
mais qui se dissiperont rapidement, car le désir d’Amour véritable ne sera pas
comblé. Nous nous remettrons alors rapidement à rechercher un nouvel objet
de convoitise dans l’espoir que si nous pouvons juste posséder celui-là, alors
nous serons réellement heureux. Pour nous débarrasser de l’attachement à la
convoitise, nous devons cesser d’éluder nos sentiments de séparation et d’être
mal aimés et les accueillir dans nos cœurs. Nous défaire de l’attachement à
éviter les sentiments qui sous-tendent la convoitise permet à nos cœurs de
s’ouvrir à nous-mêmes en nous apportant l’amour même que nous
recherchions vainement chez autrui.
Résumé
En résumé, ne commencez pas par pratiquer le détachement avec l’objet du
désir lui-même, mais concentrez-vous sur le détachement vis-à-vis des
pensées de désir et des avantages imaginaires liés à l’obtention de ce que vous
désirez. Si vous ne pouvez pas soutenir la pratique au niveau de la pensée,
passez aux sensations du désir et aux sentiments plus profonds qu’elles
dissimulent. Si un attachement subsiste malgré votre pratique, ajoutez-y la
61
pratique de voir l’objet de votre désir non pas comme ce qu’il paraît être, mais
comme un reflet de ce que vous n’avez pas voulu ou pu vous donner à vousmême, ce qui en fin de compte est toujours la compassion et l’amour. Lorsque
vous pratiquerez le détachement vis-à-vis de la cause de votre désir et vis-àvis des sentiments que le désir masque, votre cœur s’ouvrira et vous réaliserez
que la compassion et l’amour que vous recherchiez à l’extérieur étaient en
vous depuis toujours.
La cause fondamentale de toutes les pensées et de tous les sentiments de
désir, c’est notre identification avec le faux ‘’je’’. Pour nous libérer de tout
désir, nous devons nous désidentifier du faux ‘’je’’. C’est ce que réalise la
pratique du détachement. ‘’Acquiert la paix celui qui, ayant renoncé à tout désir, se
meut sans envie et libre du sentiment du ‘’je’’ et de ‘’mien’’.’’ (Bhagavad Gita, II,
71)
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CHAPITRE 7 : LES GENS ET LES SITUATIONS COMME
MIROIRS
‘’Toutes les différences que vous percevez dans le monde ne sont que les reflets de
votre mental. Que vous aimiez, haïssiez ou ridiculisiez quelqu’un, tous sont seulement
vos reflets.’’(Sai Baba, 1990, p.140).
LES GENS
Cette partie décrit comment nous libérer d’attachements au faux moi qui
ferment nos cœurs à d’autres gens. A cet égard, il est crucial de comprendre
que notre expérience des autres est un miroir de nous-mêmes, car nous
sommes la source de nos perceptions d’autrui. Peut-être trouvez-vous difficile
à croire que vos pensées et que vos convictions puissent créer votre
expérience des autres. Un exemple de ceci est la manière dont nous pouvons
percevoir la même personne comme étant adorable un moment, puis ignoble,
l’instant suivant, selon ce que nous pensons. La citation, ‘’la beauté est dans la
vision de celui qui regarde’’ reconnaît aussi que nous sommes la source de nos
perceptions. Aussi longtemps que nous croyons que les gens sont vraiment
comme nous les voyons, nous resterons pris dans l’illusion dualiste et nous
continuerons de rencontrer nos créations et de réagir vis-à-vis d’elles sans les
reconnaître pour ce qu’elles sont.
Vous libérer d’un attachement à vouloir qu’une personne soit différente peut
être très difficile, spécialement si vous croyez que votre perception de la
personne est comme elle est réellement plutôt que d’être un miroir de vousmême. C’est beaucoup plus facile, si vous êtes prêt à envisager que la
personne que vous pensez voir n’est pas une perception prétendument
objective, mais en fait une création de vos propres pensées. Une fois que vous
reconnaissez que vous avez été pris dans l’illusion que vos pensées ont créé,
vous pouvez plus facilement adopter la perspective que l’autre personne est
un reflet de vous et découvrir comment. Par exemple, les gens que vous
évitez et rejetez habituellement reflèteront des aspects de vous-même
auxquels vous avez fermé votre cœur. Ce n’est pas toujours facile à voir,
même quand vous êtes ouvert à l’idée, ainsi chaque fois que vous fermez
votre cœur à une certaine caractéristique d’une autre personne, groupe ou
race, cherchez à découvrir comment vous vous traitez vous-même peu
aimablement d’une manière semblable. Ce ne sera peut-être pas exactement
la même chose, mais ce sera essentiellement la même chose. ‘’Les défauts que
vous voyez chez les autres ne sont que les projections de vos propres défauts’’ (Sai
Baba, 1976, p.85). Disons que vous réagissez par de l’agacement vis-à-vis de
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quelqu’un qui vous demande de faire un travail, en pensant qu’il manque de
considération, parce que vous êtes déjà surchargé. Voyez si vous vous êtes
poussé à faire des choses que vous ne vouliez pas réellement faire et si vous
vous êtes traité pareillement en manquant de considération sans en être
conscient. Si vous vous êtes fermé votre cœur à vous-même d’une certaine
manière, il est très probable que vous réagissiez vis-à-vis d’autres personnes
qui semblent faire de même avec vous.
Supposons que vous circuliez et que vous tombiez sur un sans-abri qui
mendie et que vous vous sentiez poussé à l’éviter. Reconnaissez d’abord que
votre évitement est un signe d’attachement et découvrez quel est votre
attachement en ne vous détournant pas. Disons que vous voyez quelqu’un qui
semble être irresponsable, fainéant, bon à rien, une charge pour la société.
Découvrez comment votre perception du mendiant reflète une partie de vous
que vous rejetez ou que vous désavouez, comme un aspect de vous que vous
jugez paresseux et qui voudrait fuir des responsabilités pesantes et être libre.
Pratiquez le détachement envers le dénigrement de votre paresse et de votre
désir d’être libre en cessant de les nier ou de les refouler. Laissez-les
simplement être. Lorsque vous sentez que vous avez cessé de les rejeter et que
votre cœur s’ouvre à eux, voyez si pouvez maintenant être présent avec le
mendiant sans le juger ni fermer votre cœur. Si oui, l’attachement est parti ;
si non, il reste un certain attachement ou il y a un autre attachement, comme
l’attachement à éviter la peur de devenir vous-même un sans-abri. Il est
possible que vous ayez détourné le regard du mendiant, parce qu’avec le
contact visuel, éviter cette peur aurait été plus difficile. Pratiquez le
détachement envers la peur d’être sans abri en ne l’éludant pas et en la
regardant bien en face. Permettez à cette peur d’être totalement présente et
accueillez-là sans aucune réserve.
Avec votre cœur qui s’ouvre à cette peur, les pensées qui ont suscité la peur
peuvent passer au premier plan. Celles-ci pourraient être : ‘’Si je suis
incapable de m’occuper de moi-même, personne d’autre ne le fera et je finirai
dans la rue, comme ce type’’ ou ‘’Si je perds mon emploi, je ne pourrai plus
payer les factures et je serai expulsé de mon appartement.’’ Pratiquez le
détachement envers ces pensées. Lorsque vous sentez que vous vous êtes
désidentifié de ces pensées, voyez si votre cœur s’ouvre maintenant au
mendiant. Se libérer de tels attachements peut prendre un instant ou peut se
faire graduellement sur une longue période de temps. L’essentiel du
processus, c’est d’apprendre à ouvrir votre cœur à la partie de vous qui est
reflétée dans un autre et que vous rejetez ou que vous niez chez vous.
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Tout comme notre expérience des autres est un miroir de nous-mêmes, la
relation que nous avons avec les autres reflète la relation que nous avons avec
nous-mêmes. Donc, plus nous réagissons en fermant notre cœur à un autre,
plus il est certain que nous nous relions à nous-mêmes de la même façon.
Comment notre relation avec une autre personne est un miroir de notre
relation intérieure peut être difficile à discerner, à première vue. Nous
pouvons croire que nous ne nous traiterions jamais de la manière dont une
personne ‘’répugnante’’ nous traite et c’est peut-être vrai. Néanmoins, même
si nous ne traitons pas les autres ainsi, ce qui est généralement vrai, c’est que
nous nous traitons nous-mêmes inconsciemment de la même manière peu
aimable dont les autres semblent nous traiter. Et l’inverse est également vrai
– ce que nous nous faisons à nous-mêmes, nous le faisons à autrui. Les détails
peuvent se ressembler ou différer totalement, mais l’essentiel sera identique.
Comme nous le faisons généralement inconsciemment, notre relation avec
nous-mêmes se révèlera dans notre expérience avec les autres pour que nous
puissions en prendre conscience et pour que nous puissions apprendre à
ouvrir nos cœurs là où ce n’est pas le cas. Ainsi, appliquez-vous à découvrir la
relation avec vous qui se reflète dans votre expérience extérieure.
Nous pouvons voir comment les relations extérieures reflètent la relation que
nous avons avec nous-mêmes dans cette histoire. Pour une infraction au code
de la route contestable, un homme fut arrêté par un policier et il expérimenta
le policier comme étant hostile, autoritaire et déraisonnable. L’homme réagit
avec une extrême colère, mais il réprima sa colère par crainte d’être molesté et
puni. Il m’a dit combien le policier avait été critique et hostile à son égard et à
quel point il avait été traité injustement. Jamais il ne traiterait ainsi
quelqu’un. Nous avons ensuite examiné comment il se traitait lui-même. Il
était autoritaire, critique et il avait peu de compréhension et de compassion
vis-à-vis de ses propres ‘’lacunes’’. Il est alors devenu clair pour lui que son
expérience du policier et que sa réaction vis-à-vis de lui reflétaient
parfaitement son rapport critique et implacable vis-à-vis de lui-même. Sa
souffrance n’avait pas été causée par le policier, qui peut avoir été hostile ou
non, mais elle avait été causée par la fermeture de son cœur au policier et à
lui-même. Il a ensuite pu se concentrer sur le détachement envers ses
jugements personnels peu aimables et les sentiments qu’ils causaient.
Si vous confiez quelque chose à un ami et si vous découvrez ultérieurement
que votre ami a violé votre confiance et a parlé à quelqu’un, il est possible que
vous vous sentiez trahi et en colère et que vous vouliez punir votre ami.
L’attachement qui provoque cette réaction est évident – vous êtes tout
naturellement attaché à ce que votre ami honore votre demande de
confidentialité. Commencez par pratiquer le détachement vis-à-vis de votre
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colère et vis-à-vis des pensées de trahison qui l’alimentent. Une fois que votre
colère s’est suffisamment calmée, découvrez alors comment votre ami reflète
une façon dont vous vous trahissez vous-même. Vous ne révéleriez jamais
une confidence, mais peut-être vous forcez-vous à travailler avec des gens
dont vous ne respectez pas les valeurs éthiques, parce que vous avez besoin de
leur affaire pour garder votre travail. Cette trahison de vous-même vous rend
susceptible de réagir à la trahison des autres envers vous. Avant de pouvoir
ouvrir votre cœur à votre ami, il vous faudra ouvrir votre cœur à vous-même
en honorant vos propres valeurs au lieu de les compromettre. Pour cela, il
vous faudra vous détacher de toutes les pensées génératrices de peur qui vous
poussent à vous trahir vous-même, comme ‘’Je ne pourrai pas avoir une vie
décente sans leur business’’. Apprenez à vous libérer de cette trahison peu
aimante de vous-même et des rationalisations qui la soutiennent. Lorsque
vous vous serez libéré de votre attachement à vos pensées qui bloquent le
cœur et aux actions qu’elles ont causées, concentrez-vous à nouveau sur votre
ami et voyez si votre cœur se ferme encore. Si c’est le cas, il y a sans doute
encore un autre attachement qu’il vous faudra découvrir. Les personnes à qui
nous avons fermé nos cœurs nous enseignent l’Amour, parce qu’elles reflètent
le manque d’amour de nos propres cœurs pour que nous puissions le voir et le
guérir.
Une femme s’était arrêtée à un feu de signalisation. A gauche, un homme
était juché sur un îlot avec une pancarte et réclamait de l’argent. Elle ne
voulait rien lui donner et son regard la mettait mal à l’aise. Dans la file de
droite, un homme sortit de son camion, passa devant elle et donna quelque
chose à l’homme en disant : ‘’Que Dieu vous bénisse !’’ L’homme répondit :
‘’Dieu vous bénisse ! Je vois que vous êtes chrétien !’’ La femme fut émue par
la générosité franche de l’homme. Les feux changèrent et alors qu’elle
s’éloignait, la femme examina pourquoi elle n’avait pas voulu donner d’argent
au mendiant. Elle réalisa que son sentiment était qu’il devrait gagner de
l’argent et non pas mendier. Elle savait qu’elle ne pourrait jamais se permettre
de faire ce qu’il faisait. Puis elle rechercha la partie d’elle-même qui reflétait
le mendiant et elle découvrit un moi qui exigeait qu’elle prenne ses
responsabilités sans jamais réclamer d’aide, peu importe combien elle était
débordée. Elle n’avait aucune compassion pour son moi ‘’mendiant’’. La
fermeture de son cœur au mendiant reflétait comment elle avait fermé son
cœur à ses propres besoins d’assistance. Elle entreprit alors de se détacher de
sa conviction bloquante qu’elle ne devrait jamais avoir besoin d’une main
secourable ou de demander de l’aide.
Il y a quelques années, ma fille est rentrée de l’école et m’a parlé d’un chien
qui l’avait mordue. Sa robe était déchirée et elle avait des marques de
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morsure. Fort heureusement, la peau n’avait pas été perforée. Elle m’a dit que
le chien avait aussi mordu d’autres enfants. Elle ne paraissait pas du tout
perturbée par l’incident. Néanmoins, mon instinct protecteur fut titillé et
j’entrepris de retrouver le chien et son propriétaire. Je racontai ensuite au
propriétaire ce qui s’était passé en attendant des excuses et un
dédommagement de sa part pour les dommages causés. En vain. Il n’avait pas
l’air concerné et il dit : ‘’Qu’attendez-vous de moi ?’’ La colère me montant au
nez, je lui dis que j’attendais de lui qu’il s’occupe de son chien et qu’il me
dédommage. Il se contenta de rester planté là sans prendre l’attaque au
sérieux. J’étais maintenant très en colère et dans mon désir de le punir pour
ses ‘’crimes’’, je lui dis que j’avais le droit de le poursuivre pénalement. C’est
alors que je m’éveillai à la souffrance que je m’infligeais à moi-même pour
avoir fermé mon cœur et je savais que tout ce que je pouvais faire pour le
moment, c’était quitter les lieux, ce que je fis.
En réfléchissant, je vis comment cet homme indifférent et insensible reflétait
une part de moi-même qui s’était récemment montrée similairement
indifférente et insensible à l’égard de ma propre souffrance et qui ne l’avait
pas prise au sérieux. Je m’étais ‘’coupé en quatre’’ et je m’étais montré
indifférent envers le stress occasionné. Je m’étais fermé mon cœur à moimême, comme je l’avais expérimenté avec lui. J’ai donc cessé d’ignorer ma
propre douleur et ma propre peine et je me suis désidentifié des pensées qui
soutenaient ce comportement. Mon cœur commença alors à s’ouvrir aussi au
propriétaire du chien. Je me rappelai que quelques heures avant l’incident,
j’avais demandé conseil à Sai Baba concernant la souffrance que je ressentais.
Je ne m’étais pas attendu à recevoir ses conseils sous cette forme. Le
lendemain, je suis retourné m’excuser pour ma colère et je me suis aperçu que
miraculeusement, le propriétaire du chien s’était mué en une personne
raisonnable qui comprenait mes inquiétudes. Le détachement ouvre nos
cœurs et engendre toujours une transformation.
Une femme à qui j’enseignais le détachement avait fermé son cœur à une
autre femme qui pleurait, parce qu’elle la jugeait ‘’faible’’. En essayant de se
détacher du rejet de cette femme, il est devenu clair pour elle qu’elle
condamnait fermement toute manifestation d’émotions et particulièrement
les larmes. Le miroir, c’était qu’elle ne s’autorisait pas elle-même à pleurer,
parce que pleurer rendrait visible sa douleur et elle craignait d’être ridiculisée
et rabaissée sans merci, comme durant son enfance. Pour se protéger, elle
avait appris à fermer son cœur à ses propres larmes et elle était encline à faire
la même chose vis-à-vis de celles d’autrui. Sa pratique consista d’abord à
apprendre à cesser de rejeter sa propre tristesse, puis à se départir de ses
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jugements concernant l’expression des émotions, ce qui permit à son cœur de
commencer à s’ouvrir à elle-même.
Nos enfants comme miroirs
Nos enfants reflètent souvent des aspects peu affectueux – ainsi que des
aspects affectueux – de nous-mêmes, parce que nous avons généralement
manqué d’amour à l’égard de nos enfants, comme nous en avons manqué à
l’égard de nous-mêmes. Nos enfants nous imitent. Un moyen puissant pour
en prendre conscience, c’est de voir quels aspects ou quels comportements de
nos enfants nous rejetons. Cela nécessite de prendre conscience que nous
n’aimons pas inconditionnellement et de voir au-delà des rationalisations qui
justifient nos actions qui manquent d’amour ou qui les excusent comme
‘’nécessaires pour le propre bien de l’enfant.’’ Une situation courante, c’est
d’être attaché à ce que nos enfants soient ou agissent comme nous le voulons.
Quand nos enfants ne se conforment pas à cela, nous pouvons réagir en
essayant de provoquer, de manipuler ou de forcer le résultat souhaité, ce qui
nous causera souvent de la souffrance, ainsi qu’aux enfants. Pour nous
détacher de ce que nos enfants soient autres que ce qu’ils sont, il est utile de
voir nos enfants comme ceux qui nous enseignent comment ouvrir nos cœurs
plus inconditionnellement. Nous pouvons saisir la spécificité de cet
enseignement en découvrant comment la relation avec nos enfants reflète la
relation que nous avons avec nous-mêmes. Puis, nous entreprenons de nous
détacher des pensées qui ferment nos cœurs à nos enfants et à nous-mêmes et
aux réactions produites par ces pensées.
Supposez que votre fils ne veuille pas garder sa chambre propre et que vous
réagissiez par de la colère, que vous ressentiez le désir de le priver de quelque
chose ou de le punir. Premièrement, dissociez-vous suffisamment de la
réaction pour commencer à l’observer. Puis, pratiquez le détachement vis-àvis de la colère et du désir de punir. Une fois que vous serez suffisamment
détaché, cherchez les pensées ou les convictions qui provoquent votre colère.
Peut-être y a-t-il une règle ou un jugement auquel vous êtes attaché. Par
exemple : ‘’Je suis une mauvaise mère/père (ou les gens le penseront), si la
chambre de mon fils est bordélique’’, ‘’Mon fils doit apprendre l’ordre,
autrement il ne s’entendra pas avec les autres’’, ou ‘’Je me sens nerveux, si les
choses ne sont pas à leur place, car j’ai l’impression de ne pas les contrôler’’.
Puis, voyez si vous vous appliquez à vous-même ces contraintes et s’il n’y a
pas une part de vous-même qui souhaiterait être moins concernée par l’ordre
et s’amuser plus.
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Il est probable que ce que vous exigez de votre fils est ce que vous exigez de
vous-même, indépendamment de vos sentiments ou de savoir si c’est une
manière affectueuse de vous traiter vous-même. Pratiquez le détachement
vis-à-vis de ces convictions. Si vous pouvez vous départir de votre
attachement, vous pourrez répondre aimablement à votre fils, peut-être en le
laissant garder sa chambre, comme il l’entend. Ou il est possible que même
sans y être attaché, vous aimeriez quand même qu’il range sa chambre. Si
c’est le cas, alors ce sera une demande qui pourra être faite le cœur ouvert et
sans attachement à ce qu’il s’y conforme. Si vous n’arrivez pas à vous départir
de votre attachement, vous pouvez partager avec lui la nature de votre
attachement et demander sa compréhension, pendant que vous apprenez à
vous en libérer. Nos enfants et nos parents peuvent être de puissants
instructeurs d’amour, si nous cessons de les juger et de les blâmer et si nous
leur accordons plutôt le statut d’enseignants de la manière d’ouvrir nos cœurs.
Nos partenaires comme miroirs
Les partenaires d’un couple s’attirent souvent mutuellement, parce que leurs
relations intérieures avec eux-mêmes sont similaires. Les manières
affectueuses ou peu affectueuses de votre partenaire reflèteront généralement
les vôtres en donnant un sentiment de familiarité et même de confort à la
relation. Les carences en affection seront d’un niveau à peu près équivalent,
bien qu’elles puissent se situer dans des zones différentes et puissent ainsi ne
pas être évidentes. Fort heureusement, le degré d’affection des partenaires du
couple est aussi à peu près similaire. Il n’y a pas de relation engagée entre des
personnes qui ont des niveaux d’affectivité significativement différents.
Nous ne tolérerons pas de la part d’un(e) autre un manque d’affection
supérieur à celui que nous nous infligeons à nous-mêmes et nous nous
sentirions sans doute dépassés par un amour qui surpasse le nôtre.
Nous sommes attirés dans des relations, parce que nous recherchons l’Amour
inconditionnel qui est l’Un et parce que nous espérons L’obtenir chez le/la
bien-aimé(e). Ce que nous réclamons de nos amoureux/amoureuses (ou de
Dieu ou de nos maîtres), c’est précisément ce que nous avons refusé de nous
donner à nous-mêmes ou ce que nous ne sommes pas prêts à nous donner à
nous-mêmes, ce qui est toujours l’Amour, en fin de compte. Nous pensons
aussi que nous obtiendrons les qualités que nous croyons absentes chez nous
en nous unissant à une autre personne qui semble les incarner. Nous espérons
inconsciemment que nos partenaires règleront ce qui ne va pas et qu’ils
fassent preuve d’affection là où nous n’en sommes pas capables, à la place de
découvrir que nous sommes déjà l’Amour que nous voyons reflété en eux.
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Ultérieurement, quand nous nous apercevons que nous n’avons pas obtenu ce
que nous désirons, c’est la désillusion et nous nous mettrons alors parfois en
quête d’un(e) remplaçant(e) qui sera tout ce que nous voulons. Dans la
mesure où nos relations se fondent sur le faux moi dualiste et son amour
conditionnel, nous resterons insatisfaits.
Pouvoir englober nos partenaires dans l’Amour nécessite de dénouer les
attachements qui ont bloqué nos cœurs à leur égard. Le moyen le plus efficace
pour dénouer un attachement qui bloque nos cœurs, c’est de reconnaître que
ce que nous voyons comme un manque d’amour chez nos partenaires n’est
qu’un reflet de nous-mêmes dont l’essence est toujours que nous ne sommes
pas aussi inconditionnellement aimants que nous voudrions le prétendre. Si
nous l’étions, alors nous ne leur fermerions pas nos cœurs pour leurs
prétendues offenses. Je ne dis pas que nos partenaires ne font pas preuve d’un
manque d’amour, mais que notre souffrance est uniquement due à la
fermeture de notre cœur à leur égard et qu’elle ne pourra se guérir qu’en
ouvrant nos propres cœurs.
Le tout premier moyen par lequel nous fermons nos cœurs à ceux que nous
aimons, c’est en leur reprochant tous les problèmes que nous expérimentons
avec eux. Nous nous installons dans le fait de voir l’autre comme le
problème, puisque nous nous attachons à nier en nous-mêmes tout ce à quoi
nous fermons nos cœurs chez nos partenaires. Une telle tromperie nous
permet de les juger et de les rejeter de plein droit sans prendre conscience que
nous avons ces mêmes qualités que nous rejetons. L’accusé est jugé fautif et
doit donc changer pour que tout aille bien. Ces accusations sont une manière
d’éluder et de nier notre propre manque d’amour, qui est le problème réel et
tous les reproches ne font que prolonger et exacerber notre souffrance.
Puisque le problème réel n’est jamais comment sont nos partenaires, mais
plutôt que nous leur avons fermé nos cœurs, toute tentative pour les changer
pour qu’ils soient comme nous le voudrions échouera toujours.
Nos exigences que nos partenaires changent avant que nous ne les aimions
sont intrinsèquement un manque d’amour. Celui ou celle à qui l’on impose
l’exigence de changer sera immanquablement plein(e) de ressentiment et
résistera, tout en essayant peut-être très fort de se conformer. Ces exigences
que nous changions pour être aimés par d’autres consolident l’idée du faux
moi que nous ne sommes pas inconditionnellement dignes d’êtres aimés,
comme nous sommes. Si nous rejetons en nous-mêmes ces mêmes choses que
nos partenaires rejettent en nous, alors nous pouvons croire que nous sommes
en faute et penser que nous devons changer. Essayer de changer pour être
comme nos partenaires le désirent, c’est approuver notre jugement et leur
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jugement que nous ne sommes pas dignes d’être aimés, comme nous sommes.
Inévitablement, à un niveau profond, nous résistons, même si
extérieurement, nous semblons suivre. Si la guérison doit s’opérer, il est
indispensable que les deux partenaires se ciblent eux-mêmes comme cause de
leur souffrance et qu’ils cessent de s’accuser mutuellement. Lorsque nous
deviendrons plus aimants, nos partenaires nous sembleront miraculeusement
plus aimants et plus aimables aussi. Mais les gens qui ont des problèmes
relationnels sont rarement conscients du fait que leurs difficultés émanent de
leur propre manque d’amour. S’ils l’étaient, la guérison serait beaucoup plus
rapide et moins douloureuse.
Reconnaître comment nos partenaires reflètent notre propre manque d’amour
peut être ardu, spécialement si la façon peu aimante dont nous nous traitons
est bien rationalisée et bien ‘’justifiée’’. Un moyen de découvrir comment
vous vous fermez votre cœur à vous-même, comme vous le fermez à votre
partenaire, c’est d’établir la liste des choses vis-à-vis desquelles vous réagissez
chez votre partenaire. Puis dites, ‘’c’est ainsi que je suis’’ ou ‘’c’est ainsi que
j’agis’’ par rapport à chacun de ces éléments et découvrez comment vous êtes
ou comment vous faites ce que vous percevez chez votre partenaire. Si vous
vous sentez malmené par votre amoureux/amoureuse ou bien traité(e) avec
un manque de considération, découvrez comment vous vous malmenez vousmême (et les autres) d’une façon similaire ou identique. Par exemple,
supposez que vous critiquiez votre partenaire pour être dépensier tout en vous
vantant d’être économe. Partez de l’idée qu’il y a une part de vous qui
aimerait dépenser plus d’argent, mais que vous décriez cette impulsion
comme du gaspillage ou un manque de spiritualité. Pratiquez le détachement
envers cette impulsion, envers votre fierté d’être économe et vis-à-vis de vos
pensées critiques qui vous rejettent vous et votre partenaire. Si vous vous
détachez de vos pensées de rejet et de toutes les peurs qui les sous-tendent,
comme celle d’être sans le sou ou spirituellement déficient, votre cœur
s’ouvrira non seulement à votre partenaire, mais également à vous-même.
Lorsque vous pourrez aimer plus, que votre partenaire dépense moins ou non,
dans tous les cas, votre cœur ne se fermera plus.
Une femme à qui j’enseignais le détachement voulait que son partenaire
s’engage totalement dans leur relation et elle imputait sa souffrance au fait
qu’il ne voulait pas le faire. Son cœur ne put s’ouvrir tant qu’elle lui reprocha
sa souffrance. Ses reproches lui permettaient d’éviter sa propre réticence à
s’engager totalement à s’ouvrir son cœur à elle-même. Elle avait fermé son
cœur à la souffrance et au chagrin qu’elle ressentait, quand elle se dépréciait
et quand elle se sentait aussi émotionnellement abandonnée par elle-même
que par lui. La guérison de leur relation ne pourrait pas survenir en exigeant
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de sa part ce qu’elle ne voulait pas faire pour elle-même, mais en apprenant à
ouvrir son cœur à elle-même, comme elle voulait qu’il le fasse. Elle s’appliqua
donc à se défaire de son attachement à ignorer ses propres sentiments
d’abandon et à se désidentifier des pensées critiques vis-à-vis d’elle-même via
lesquelles elle s’abandonnait émotionnellement. Lorsqu’elle fut capable
d’ouvrir son cœur à elle-même, elle put faire de même avec lui.
Si l’amour fait défaut ou s’il y a un blocage dans une relation, les partenaires
utiliseront généralement toutes les techniques qu’ils ont apprises durant
l’enfance pour soutirer cet amour. Donc, si vous avez tenté d’obtenir l’amour
en étant ce que désiraient vos parents, alors un tel schéma se perpétuera
probablement avec votre partenaire, quand vous vous efforcerez de faire tout
ce que vous pouvez pour obtenir et pour retenir l’amour que vous désirez.
Réussir requiert de sentir et d’essayer de fournir ce que l’autre désire. Cela
signifie se conformer au schéma d’amour conditionnel de l’autre qui ne
promet l’amour que si vous pouvez y arriver. Etant donné que la capacité
d’un autre à vous aimer n’a rien à voir avec votre manière d’être, changer
votre manière d’être ne permettra jamais à cette personne de vous aimer. Et si
vous manipulez l’amour en vous efforçant d’être ce que désire votre
partenaire, l’amour qui est offert est suspect dans tous les cas. Tenter
d’obtenir ainsi l’amour ne fait que perpétuer la conviction que nous ne
sommes pas dignes d’être aimés tels que nous sommes et empoisonne les
relations. Même si l’amour nous est offert, nous ne pouvons le recevoir que
dans la mesure où nos cœurs sont ouverts à nous-mêmes. La guérison requiert
de nous affranchir de l’attachement à obtenir l’approbation et l’amour de nos
partenaires et d’apprendre à ouvrir nos cœurs à nous-mêmes, comme nous
voudrions que nos partenaires le fassent.
Une femme croyait que son mari la traitait comme une personne sans
importance et indigne d’être aimée. Nous avons cherché comment elle se
traitait similairement. En parlant de sa vie, il devint clair pour moi qu’elle
mettait toujours les besoins de son mari (et ceux des autres) en premier en
négligeant souvent les siens. Elle s’était attachée à éviter d’être rejetée et
s’occuper des autres était sa façon d’essayer de s’assurer que cela ne soit pas le
cas. Ce qu’elle ne voyait pas, c’est qu’à cause de la peur, elle se traitait ellemême comme une personne sans importance ou sans valeur, comme elle le
percevait chez son mari. Lorsqu’elle a reconnu ce qu’elle faisait, elle craignit
que si elle cessait de toujours s’occuper des autres, il ne la rejette pour son
égocentrisme. La désapprobation qu’elle craignait ne faisait que refléter son
propre jugement d’être égoïste et indigne, si elle ne plaçait pas ses propres
besoins en dernier et si elle ne s’occupait pas d’abord des autres. Elle
72
commença à comprendre qu’elle était la cause de sa souffrance et qu’elle
pourrait la soulager en apprenant à cesser de se fermer son cœur à elle-même.
Une évolution majeure dans notre capacité à ouvrir nos cœurs à nos
partenaires se produit, lorsque nous réalisons que les reproches et la
fermeture de nos cœurs nous fait immanquablement souffrir et que cette
souffrance pèse plus que s’accrocher à l’attachement d’être la victime et de se
sentir justifié et supérieur. L’évolution, c’est savoir que si nous manquons
d’amour à l’égard d’un autre, cela nous causera toujours de la souffrance à
nous-mêmes. Nous avons mal au cœur, si nous le fermons et nous nous
sentons blessés par la division que nous avons causée. Ce que nous faisons à
un autre, nous le faisons à notre Soi. Comme l’a dit Jésus : ‘’…dans la mesure
où vous avez fait ceci au plus petit de ceux-ci, c’est à moi que vous l’avez fait’’ (Mt
25.40). La souffrance d’un autre est notre souffrance, car l’autre est notre Soi.
Dans la mesure où nous ouvrons nos cœurs à nous-mêmes, nos cœurs
s’ouvriront aux autres au même degré. Le sentiment d’être digne d’être aimé
n’émane que de l’ouverture de notre cœur à nous-mêmes. Il n’est pas la
conséquence d’être aimé par un autre, même si cet amour fournit
l’environnement le plus fertile et le plus nourrissant où nous pouvons
apprendre à ouvrir nos cœurs. Ouvrir nos cœurs à nous-mêmes est la chose la
plus importante que nous puissions faire les uns pour les autres, car alors,
nous pouvons offrir ce que nous recherchons tous – l’amour inconditionnel,
la compassion, la compréhension et le pardon.
Les ‘’mauvaises’’ gens comme miroirs
Croire au mal est un reflet du faux moi dualiste et c’est le résultat de diviser
ce qui est Un en ‘’bien’’ et en ‘’mal’’. L’idée du mal persistera tant que nous
nous identifions au faux moi. Les mauvaises gens que nous pensons percevoir
sont en fait la création de nos propres pensées et de nos propres convictions.
‘’L’homme entretient l’idée erronée que les démons existent et qu’ils sont responsables
de sa souffrance. Ceux-ci ne sont rien d’autre que la création de son imagination et de
ses peurs psychologiques’’ (Sai Baba, 1999a, p. 58). Il n’y a ni diables, ni
mauvaises gens. ‘’Tout ce que vous voyez à l’extérieur est un reflet de l’être
intérieur. Le bien et le mal n’existent pas à l’extérieur, ils ne sont que les reflets de ce
qu’il y a en vous. Nul n’a le droit de juger les autres. Renoncez à tout ce qui est
mauvais en vous et vous trouverez la bonté partout’’ (Sai Baba, 1999f, p. 374).
Quand nos cœurs s’ouvrent à ce qui semble être le mal, l’illusion du mal
disparaît en ne laissant que de la compassion.
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Tenter d’éliminer ce que vous percevez comme le mal ne sert qu’à le
perpétuer, puisque ce rejet renforce l’illusion dualiste du bien et du mal et
prolonge l’amour conditionnel qui a fait en sorte que vous perceviez le mal
initialement. Ainsi, si vous avez un aspect diabolique en vous-même, les
diables ne cesseront de se manifester à l’extérieur jusqu’à ce que vous
reconnaissiez le diable en vous et que vous appreniez à lui ouvrir votre cœur
en provoquant ainsi sa transformation. ‘’Donc, l’homme devrait devenir une
véritable incarnation de l’amour. Quand il sera rempli d’amour, le monde entier se
transformera en un monde rempli d’amour…Ce n’est qu’en développant l’amour que
l’on peut transcender le dualisme du bien et du mal et que l’on peut expérimenter la
joie de l’unité avec le divin’’ (Sai Baba, 1998d, p. 279).
Croire en l’existence du mal ou de mauvaises gens est particulièrement
pernicieux. Cela nous amène à fermer nos cœurs et à attaquer ceux que nous
percevons comme mauvais pour les changer ou pour les éliminer. Nous nous
attachons souvent à rejeter des gens que nous percevons comme mauvais,
violents, cruels ou vicieux en croyant que ces jugements sont éminemment
justifiés. Nous défaire de nos attachements à ces convictions et aux réactions
qu’elles suscitent peut être très difficile. Elles semblent si ‘’justes’’. Il est
tellement plus simple de rejeter les gens, quand nous n’avons pas conscience
que nos pensées provoquent à la fois nos expériences des gens peu aimables
que nous voyons et nos réactions à leur égard. Le déficit d’amour que nous
percevons sera directement proportionnel au degré de fermeture de nos cœurs
à notre Soi, c’est-à-dire à nous-mêmes, aux autres et au monde naturel.
Pour vous détacher du rejet de quelqu’un qui semble mauvais, commencez
par reconnaître que vous créez l’expérience à laquelle votre cœur se ferme et
découvrez comment la personne à laquelle vous réagissez reflète une
tendance peu aimable en vous que vous rejetez, que vous niez ou que vous
évitez. Puis, défaites-vous de l’attachement à nier ou à rejeter la part de vous
à laquelle vous avez fermé votre cœur. Soyez totalement présent et ouvert
pour recevoir et accueillir cette part de vous. Découvrir comment l’autre est
un miroir de vous peut être ardu, parce que la croyance au dualisme est si
forte, mais reconnaître que fermer votre cœur vous cause de la souffrance
fournit la motivation.
Apprendre à dénouer les attachements fermant nos cœurs à des gens peu
aimables n’ignore ni ne réfute nullement les choses horribles que les gens font
parfois. Nous savons ce qu’ils ont fait et nous avons peut-être agi pour les
stopper, mais si nous sommes détachés, nos cœurs ne se ferment plus à eux.
Nous percevons plutôt leurs actions qui manquent d’amour à la lumière d’un
cœur inconditionnellement compatissant. C’est cette évolution que Jésus
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enseigne, lorsqu’il dit : ‘’Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent et
faites du bien à ceux qui vous font du mal…’’(Mt. 5.44). Cet enseignement de
Jésus est généralement ignoré, car il est incompréhensible pour le faux moi et
car, même si nous le voulons, comment aimons-nous ‘’nos ennemis’’ ?
L’entretien hypothétique qui suit illustre comment c’est possible :
Questionneuse (Q) : Le mari d’une de mes amies l’a battue dans un accès de
rage. J’ai réagi avec outrage et avec le désir de le punir. Ce qu’a fait cet
homme me répugne. Mon cœur est manifestement fermé. Comment devraisje m’y prendre pour l’ouvrir ?
John Goldthwait (JG) : Maintenant, l’homme n’est pas ici, à l’inverse de vos
pensées qui le condamnent et qui le punissent, donc, appliquez-vous d’abord à
vous détacher de ces pensées.
Q : Je n’y arrive pas ! Il mérite d’être enfermé pour toujours ! Il est
dangereux ! Je ne peux pas feindre qu’il ne l’est pas ou de me sentir
différemment.
JG : Voyons donc d’abord si nous pouvons entreprendre de dénouer votre
attachement. Supposez que quelque part, votre expérience de cet homme est
un reflet de vous-même. Cela peut sembler improbable au départ, mais
examinons cela. Qu’est-ce qui vous répugne précisément chez cet homme ?
Q : C’est le fait qu’il a brutalement agressé sa femme. Il est insensible, enragé
et incontrôlable.
JG : A présent, voyez s’il y a une partie de vous-même qui se met parfois en
colère.
Q : Eh bien, bien entendu que je me mets parfois en colère de temps en
temps, comme tout le monde !
JG : Qu’est-ce qui vous met en colère ?
Q : Les gens qui sont cruels et insensibles, comme cet homme. Je me sens
impuissante contre eux.
JG : Et que faites-vous, quand vous vous mettez en colère ?
Q : Rien ! Je ne veux pas être comme eux.
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JG : Que faites-vous avec l’énergie de votre colère ?
Q : Je me dis qu’il n’est pas bien de me sentir ainsi, j’agis comme si elle n’est
pas là et après un moment, elle part.
JG : Donc, vous jugez que votre colère est mauvaise et vous maintenez le
couvercle dessus.
Q : C’est cela !
JG : Vous rejetez votre propre colère et vous l’étouffez pour qu’elle ne
devienne pas incontrôlable.
Q : Cela m’effraie.
JG : Cela vous effraie qu’elle puisse devenir incontrôlable ?
Q : Cela ne se produira pas ! J’y veille.
JG : Voilà le miroir : vous vous fermez votre cœur à vous-même, comme
vous le fermez à l’homme qui bat sa femme.
Q : Je fais cela ?
JG : Oui ! Vous jugez sa colère répugnante et vous le rejetez pour cela. Vous
faites la même chose avec votre propre colère, en la rejetant comme mauvaise.
Vous considérez que vos propres sentiments de colère sont répugnants et je
subodore que vous aimeriez ‘’les enfermer pour toujours’’.
Q : Mais la colère est mauvaise !
JG : Exprimer sa colère peut être destructeur et faire preuve d’un manque
d’amour, mais fermer votre cœur à vos propres sentiments, c’est aussi faire la
preuve d’un manque d’amour. Nous pourrions même parler d’insensibilité ou
de cruauté. Si vous fermez votre cœur à la violence que vous commettez à
votre égard, vous fermerez aussi votre cœur à la perception de la violence que
vous voyez dans le monde que vos pensées ont créé.
Q : Je n’avais jamais envisagé cela ainsi, mais je peux voir ce que vous voulez
dire. Néanmoins, je ne souhaite pas manifester ma colère.
JG : Ce n’est pas nécessaire et je ne suggère pas que vous le fassiez. Je vous
dis juste d’apprendre à ne pas fermer votre cœur à votre propre colère.
76
Lorsque votre cœur s’ouvrira à la part de vous-même que vous voyez reflétée
chez cet homme, vous découvrirez que vous ne pourrez plus le condamner à
cause de sa colère, ce qui ne signifie pas que vous fermez les yeux sur ses
actions ni que vous lez approuvez, mais que votre cœur de compassion et que
votre compréhension peuvent s’ouvrir à lui, comme il est.
Les figures spirituelles comme miroirs
Comme toujours, ce que vous expérimentez est un miroir de vous-même. Par
conséquent, au lieu de vous attacher à recevoir l’Amour divin ou les
bénédictions spéciales de figures spirituelles, considérez que ce que vous
expérimentez chez elles est un reflet de votre Soi, en réalité. Oui, vous êtes la
Conscience christique que vous pressentez chez Jésus, la Compassion que
vous ressentez chez le Bouddha et l’Amour inconditionnel que vous
expérimentez chez Sai Baba. ‘’Rien n’est plus élevé dans le monde que vous-même.
Mais croire en cette puissance est la création de votre esprit’’ (Sai Baba, 1998c,
p.144). C’est le faux moi qui croit que l’Un est quelque part ailleurs à
l’extérieur, qui pense ‘’Je ne suis pas Cela’’. Reconnaissez que le déni d’être
l’Un n’est qu’un reflet du faux moi, pas qui vous êtes réellement. Sachez donc
que vous êtes le Soi que vous percevez. Reconnaître que les figures
spirituelles que vous percevez sont des reflets de votre Soi est une pratique
extrêmement puissante qui peut vous amener à transcender l’identité du faux
moi et l’illusion de séparation qu’il crée. Donc, présumez toujours que la
figure spirituelle que vous expérimentez comme différente de vous est en
réalité un miroir de votre vrai Soi.
LES SITUATIONS COMME MIROIRS
Cette partie décrit comment se libérer de l’attachement du faux moi à avoir
besoin que les choses soient autres que ce qu’elles sont. Si vous êtes attaché à
ce que des situations soient différentes, il est important de reconnaître que
vos pensées ont créé votre expérience de ces événements et les sentiments
avec lesquels vous réagissez par rapport à eux. Avant que vous ne puissiez
pratiquer le détachement vis-à-vis de ces pensées, vous devez être
suffisamment détaché vis-à-vis de vos réactions émotionnelles pour pouvoir
vous concentrer au niveau de la pensée. Dans cette optique, cela aide
beaucoup de reconnaître que la situation est survenue pour vous enseigner
comment vous libérer d’un attachement envers votre faux moi et ouvrir votre
cœur plus inconditionnellement. Votre souffrance provient de votre
attachement à vouloir que la situation que vous avez créée soit différente de
77
ce qu’elle est. L’unique manière pour que ceci se produise, c’est de vous
désidentifier des pensées qui créent la situation pour qu’elles cessent de le
faire. Par exemple, si vous étiez la victime d’un ‘’accident’’ de la route et si
vous étiez en train de critiquer vertement un autre conducteur, vous
commenceriez par pratiquer le détachement vis-à-vis de votre colère et des
pensées qui l’ont déclenchée, comme blâmer l’autre conducteur, parce que
vous vous retrouvez dans cette situation et pour les problèmes et les dépenses
qui vont s’ensuivre, selon vous. Votre attachement à ces pensées évite
l’acceptation de la situation, telle qu’elle est. Pratiquez donc le détachement
vis-à-vis des pensées de colère et de toute pulsion de réaction qu’elles
pourraient susciter jusqu’à ce que vous vous sentiez détendu dans
l’acceptation de ce qui est. Alors, votre cœur sera libre de s’ouvrir.
Un homme donnait la première séance d’un cours d’aïkido et à son insu, un
photographe avait été envoyé pour prendre des photos de lui et de sa classe
pour la couverture d’un magazine. Après avoir interrompu le cours, le
photographe informa l’instructeur de son intention et lui demanda la
permission de prendre des photos. L’instructeur se sentit flatté et bien que
son intuition lui disait que la prise de photographies serait importune et
déstabilisante, il permit au photographe d’agir. Le cours se passa bien, même
si l’instructeur eut son attention fréquemment distraite par le photographe.
Après son cours, l’instructeur qui baignait dans des images de célébrité se
dirigea vers le parking pour aller chercher sa voiture. Sans regarder, il fit
marche arrière et percuta une voiture qui passait. Il réalisa immédiatement ce
qui s’était passé et l’enseignement à en tirer. Son ego, qui avait gonflé avait
pris les rênes et accaparé par ses rêves de se retrouver sur la couverture d’un
magazine, il avait perdu le lien avec ce qu’il faisait dans l’instant présent. Il
géra calmement l’accident. Comme il savait que son attachement à être
encensé par le grand public avait provoqué l’accident, il pratiqua le
détachement vis-à-vis de ce désir. Avec le recul, il sut que sans son
attachement à la renommée, il n’aurait pas eu cet ‘’accident’’. Il a conservé la
couverture du magazine pour se souvenir de cette précieuse leçon !
Vous ramenez votre voiture chez le mécanicien, parce que le problème à
cause duquel vous l’aviez amenée initialement n’a pas été réglé. Vous êtes
frustré et en colère. Commencez par vous concentrer sur les pensées qui
provoquent votre perception de la situation et vos sentiments. Si vous n’y
parvenez pas encore, pratiquez le détachement vis-à-vis de votre frustration
et de votre colère jusqu’à ce que vous vous en désidentifiiez suffisamment
que pour passer au niveau de la pensée. Ces pensées pourraient être : ‘’Plus
personne ne travaille correctement, de nos jours !’’, ‘’Les enfoirés !’’, ‘’Cela va
me gâcher toute ma journée !’’ ou ‘’Je parierais qu’ils vont essayer de me
78
facturer une journée de travail supplémentaire !’’ Pratiquez le détachement
vis-à-vis de telles pensées génératrices de colère jusqu’à ce que vous puissiez
découvrir comment le mécanicien reflète un aspect de vous-même. Il est
possible que vous n’ayez aucune patience envers vous-même, si vous n’êtes
pas parfait, et que vous n’ayez aucune tolérance pour vos erreurs. Vous
enguirlandez le mécanicien, comme vous vous enguirlanderiez vous-même, si
vous aviez commis la moindre erreur. Voir le miroir permet plus facilement
de renoncer à avoir des exigences stressantes par rapport à vous-même et de
vous défaire des pensées par lesquelles vous rationalisez ce comportement peu
aimable. Si vous vous détachez de la prétention à être vous-même parfait,
vous serez en mesure de parler au mécano, le cœur ouvert, à moins qu’un
autre attachement ne soit en cause.
Supposez que vous vouliez que votre adolescente de fille cesse de sortir avec
une certaine personne et qu’elle ne veuille pas. Votre cœur se ferme, ce qui
vous fait souffrir. Pour supprimer cette souffrance, vous pouvez tenter de
faire en sorte que votre fille fasse comme vous voulez, mais il est probable
que cette option conduise à des peines supplémentaires. Découvrez plutôt
quelle est l’origine de votre attachement, comme la crainte qu’elle ne s’engage
avec une ‘’mauvaise’’ personne. Quand vous pourrez vous détacher des
pensées qui créent la situation imaginaire à laquelle vous réagissez,
recherchez la part de vous-même que votre fille reflète, comme peut-être un
penchant caché à être plus aventureux ou non conventionnel. Puis, voyez si
vous pouvez vous détacher du refus et du rejet de cette part de vous-même.
En acceptant la part de vous-même que vous voyez reflétée chez votre fille,
vous pourrez approcher la situation avec amour plutôt qu’avec appréhension.
Reconnaissez que votre fille vous enseigne comment ouvrir votre cœur plus
inconditionnellement, en apprenant à vous défaire d’un attachement à ce que
les choses soient différentes de ce qu’elles sont.
Si un incendie ou si un tremblement de terre détruit votre maison, vous serez
quelqu’un de rare, si vous bénissez tout de suite l’événement comme une
opportunité de défaire un attachement qui bloque le cœur. Aussi, commencez
par vous défaire de votre attachement à ce que la situation soit différente de
ce qu’elle est. Pour ce faire, voyez quelles pensées créent votre tableau de la
situation et soutiennent votre réaction négative. Celles-ci peuvent inclure des
pensées alarmantes ou déprimantes qui concernent l’avenir. Désidentifiezvous d’elles. Si la concentration au niveau de la pensée n’est pas encore
possible, pratiquez alors le détachement vis-à-vis des sentiments que vos
pensées ont causés, comme la colère, le désespoir et la tristesse. Accueillir
votre chagrin dans votre cœur peut révéler que vous vous attachiez à acquérir
et à vous cramponner à des biens matériels pour vous fournir un sentiment de
79
sécurité et que ces possessions limitaient en fait votre vie, vos options et
votre dynamisme. Vous détacher d’eux et de leur perte sera alors beaucoup
plus facile.
Il faut parfois une pratique considérable avant que nous ne commencions à
considérer des situations auxquelles nous avions fermé nos cœurs comme des
opportunités pour défaire notre attachement au faux moi et pour connaître
l’Amour. Mais chaque situation à laquelle nous réagissons avec de
l’attachement nous offre un enseignement d’amour que nous pouvons
recevoir en pratiquant le détachement.
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CHAPITRE 8 : LES RÊVES ET LES IMAGES MENTALES
LES RÊVES
‘’Dans le rêve, bien que l’on expérimente une multiplicité, on sait que celle-ci est la
création irréelle de son propre mental, c’est clair pour le témoin du rêve.
Similairement, l’expérience du stade de veille est également une image mentale, tout
au plus’’ (Sai Baba, 1984a, p.54).
Dans Purifie ton Cœur !, notre objectif est d’apprendre comment nous libérer
de notre attachement au faux moi et de libérer ainsi notre vraie nature qui est
l’Amour. Les rêves peuvent nous aider dans cette optique, car les rêves sont
créés par nos pensées et sont des reflets du faux moi. Donc, en nous
détachant des images et des événements des rêves, nous pourrons nous libérer
des attachements au faux moi qu’ils reflètent.
Les rêves nous paraissent tout aussi réels que la vie ordinaire, mais au réveil,
nous pouvons penser qu’ils sont une illusion, en ne réalisant pas que la vie
courante est précisément une illusion du même ordre. Que seul le mental crée
la réalité du rêve, qui semble aussi réelle que la réalité de veille, quand nous
sommes dedans, permet de comprendre plus facilement comment le mental
crée également la réalité de veille. ‘’Le mental est responsable des expériences de
l’état de veille et des expériences des rêves’’ (Sai Baba, 1998c, p.147). En fait, il n’y a
pas de différence essentielle entre les rêves et le rêve de la vie courante.
Nous pratiquons le détachement envers les images des rêves comme avec
n’importe quoi d’autre et il est important de pratiquer avec toutes les images
d’un rêve – animées et inanimées – car elles reflètent toutes le rêveur. ‘’Les
choses vues dans les rêves ne sont pas distinctes du rêveur, n’est-ce pas ? Elles peuvent
paraître différentes et se situer à l’extérieur du rêveur, mais elles font vraiment partie
du rêveur, émanant de sa propre conscience’’ (Sai Baba, 1970, p.31). Les rêves
manifestent nos vies sous une forme symbolique et nous reflètent, comme le
fait notre réalité de veille. Ainsi, quand nous pratiquons le détachement
envers nos rêves, nous pratiquons en fait avec les aspects de nous-mêmes que
nos rêves reflètent symboliquement.
Quand nous pratiquons le détachement vis-à-vis d’un rêve, il ne se produit
pas, nous nous le remémorons. Par conséquent, nous devons d’abord nous
appliquer à rendre le rêve aussi présent que possible en rentrant dans l’état de
rêve autant que possible et en revivant le rêve. Permettez au rêve de devenir
complètement vivant et permettez-lui de se dérouler, comme s’il se passait
maintenant. Puis, présumez que tout dans le rêve vous reflète, que vous avez
81
les mêmes qualités, les mêmes caractéristiques que les images du rêve, même
si cela semble improbable. Par exemple, une personne avait une créature
effrayante, qui ressemblait à un dragon dans son rêve. Au début, elle avait
peur du dragon et voulait lui échapper. Elle ne voulait pas considérer qu’elle
ressemblait un tant soit peu au dragon et elle rejetait l’idée. Lorsqu’elle se
défit de son attachement à fuir le dragon et lorsqu’elle put être présente et
ouverte à lui, elle découvrit que le dragon semblait triste, solitaire et affamé
d’amour, qu’il était peiné que son apparence effraye les gens. En réfléchissant,
elle découvrit qu’elle partageait ces caractéristiques. Elle s’appliqua donc à
cesser de nier ces parties d’elle-même pour que son cœur puisse s’y ouvrir.
Vous pourriez aussi vous attacher à vous délecter d’une image de rêve et à la
perpétuer, comme être flatté que la personne merveilleuse de votre rêve, c’est
vous ! Pour vous détacher, cessez de vous identifier à la personne et laissez
partir vos pensées égocentriques.
Apprendre à voir des formes de rêve inanimées, comme des miroirs de vousmême réclame de la pratique, mais une fois que vous laissez tomber l’idée que
des formes de rêve inanimées ne pourraient pas être des reflets de vous, cela
devient simple. Disons que l’objet du rêve est l’océan. Décrivez les
caractéristiques que l’océan possède dans le rêve, pas celles que vous pouvez
associer à votre expérience de veille de l’océan, mais les attributs de l’océan
du rêve, qui peut être très différent par rapport à l’océan de la réalité de veille.
Présumez que cet océan représente une part de vous et vous décrit comme
ayant les mêmes caractéristiques que l’océan du rêve. Par exemple, l’océan du
rêve pourrait sembler joyeux et accueillant ou mystérieux et profond. Voyez
si vous aussi, vous possédez ces qualités.
Nous pouvons découvrir des aspects de nos faux mois que nous nous
attachons peut-être à éviter ou à refuser en examinant ce qui est évité ou omis
dans un rêve, comme quand le rêve est inachevé, interrompu ou quand des
scènes sont ‘’oubliées’’. En revivant un tel rêve, permettez au rêve de se
poursuivre au-delà du point où il s’est interrompu en imaginant que c’est un
film qui continue au-delà du point où on l’avait coupé auparavant. Si nous
sommes totalement présents et si nous n’interférons pas, le rêve continuera
spontanément et ce qui avait été évité parviendra à la conscience via
l’achèvement du rêve ou avec les scènes manquantes. Par exemple, une
femme rêva qu’elle se trouvait sur une île, que les vagues ne cessaient de
monter et qu’elles étaient sur le point de l’engloutir et toute l’île avec et
brusquement, elle se retrouva dans une toute autre scène, après avoir
interrompu la scène de l’île avant la fin. Après être ‘’rentrée’’ dans son rêve et
après être retournée sur la scène de l’île, elle s’affranchit de son attachement à
éviter ce qui se passerait et permit au rêve de continuer. Au lieu de se noyer,
82
elle découvrit qu’elle pouvait laisser les vagues l’emporter loin au large et se
rendit compte avec surprise qu’elle était soutenue par l’océan. En ouvrant
plus profondément son cœur à l’océan, il devint l’énergie créative universelle,
un reflet de son Soi.
Une personne rêva qu’elle se trouvait dans une maison qui disposait de
nombreuses pièces. Des gens se réunissaient dans certaines pièces, mais
d’autres pièces n’avaient jamais été ouvertes et étaient sombres. La maison
était robuste et construite sur de solides fondations. Pour voir comment la
maison était un reflet d’elle-même, elle imagina qu’elle était la maison : elle
sentit qu’elle aimait recevoir des gens dans les pièces bien meublées et
confortables, mais les autres pièces étaient interdites. Dans le rêve, elle avait
peur de ce qu’elle pourrait trouver dans ces pièces et donc, elle n’ouvrit jamais
leurs portes. Elle réalisa que son rêve reflétait sa vie de l’état de veille, car elle
avait des bases solides, mais craintivement, elle se limitait à ce qui était
familier et confortable. Elle évitait de s’aventurer loin au-delà de ce qu’elle
connaissait déjà, même si ce n’était plus très intéressant. Je lui demandai si
elle pourrait permettre au rêve de se poursuivre comme une fantaisie
spontanée au-delà de l’endroit où il s’était arrêté et de permettre à tout ce qui
se passerait de s’y déployer. Elle accepta et se décida à ouvrir une porte, pour
voir. Celle-ci s’ouvrit facilement et révéla un point de vue par la fenêtre
qu’elle n’avait encore jamais vu auparavant. Tout paraissait plus vivant à
partir de cette nouvelle perspective et bien défini. Elle souhaita explorer ce
nouveau terrain. Le rêve était un reflet de sa vie et lui montrait qu’il y avait
beaucoup de nouvelles pièces (d’aspects d’elle-même) dans sa ‘’maison’’
qu’elle s’était attachée à éviter, mais où elle pouvait désormais entrer.
Une femme que je guidais dans la pratique du détachement eut un rêve où un
géant de plus de trois mètres qu’elle appela ‘’Goliath’’ l’amène sur une plage
dans une jeep décapotable. Il y a un autre homme sur le siège arrière. Sur la
plage, ils se mettent à la recherche d’un trésor qui n’est pas matériel, selon
elle. Ensuite, Goliath attaque et tue l’autre homme, car Goliath se sent trahi
par lui. Elle sait qu’il va la tuer pour la même raison, même si elle ignore
comment elle l’a trahi. Terrifiée, elle se jette dans l’eau et tente de s’enfuir à
la nage, mais les vagues ne cessent de la ramener vers le rivage. Pour une
raison ou l’autre, Goliath ne peut pas la suivre dans l’eau. Elle finit toutefois
par se fatiguer et vient s’échouer sur la plage, tout en sachant qu’il va la tuer,
mais que paradoxalement, elle ne mourra pas. Alors qu’il s’apprête à la saisir,
elle lui embrasse la main spontanément et audacieusement et
immédiatement, il se transforme en un homme doux et inoffensif. Elle se
sent paisible et grandie. Nous voyons ici comment la transformation s’opère,
83
quand nous nous détachons et quand nos cœur s’ouvrent. Si la conscience
change, la réalité qu’elle crée se transforme aussi.
Lorsqu’elle renonça à son attachement à échapper à Goliath et qu’elle put être
présente et ouverte pour l’accueillir, il devint clair que la part d’elle qu’il
reflétait était sa propre colère pour s’être trahie en niant son pouvoir (que
Goliath reflétait) et s’être maintenue petite et insignifiante, parce qu’elle
craignait d’être rejetée. Lorsqu’elle cessa d’être attachée à fuir son pouvoir et
sa colère pour les regarder bien en face chez Goliath, sa peur disparut, son
cœur s’ouvrit et Goliath et son petit moi craintif furent transformés. Le trésor
qu’ils cherchaient devint alors manifeste, puisqu’elle l’avait trouvé : c’était
l’amour qu’elle avait perdu, quand elle s’était trahie.
Un rêve ultérieur de la même femme reflète une évolution encore plus
profonde vers l’Amour. Elle est assise sur une surface blanche et lisse devant
une étendue d’eau. C’est la nuit et en raison d’un genre de brume, elle ne peut
voir qu’à une dizaine de mètres. Il fait froid et elle s’est enveloppée dans un
duvet. Un dauphin surgit hors de la brume, nage puis rampe jusqu’à l’endroit
où elle est assise avant de retourner dans l’eau et de s’éloigner. Elle est
fascinée et veut voir si ceci va se reproduire. Bientôt, un autre dauphin surgit,
quitte l’eau et rampe jusqu’à elle, mais avant qu’elle ne puisse le toucher, il
retourne dans l’eau. Elle est intriguée et elle attend pour voir ce qui va se
passer ensuite. Une grande ombre noire apparaît alors sous l’eau. Elle est
terrifiée. Elle sent qu’elle l’attend et qu’elle mourra si elle entre dans l’eau,
comme les dauphins semblent l’inviter à le faire. Elle est tétanisée. Elle
s’applique alors à se détacher de l’esquive de son moi ‘’ombre’’ et affranchie
de sa peur, elle permet au rêve de continuer et découvre que l’ombre est paix
et silence. Elle prend peur une nouvelle foi, parce qu’elle les associe à la mort.
Poussée à mettre sa main dans l’eau, elle découvre qu’il ne s’agit pas d’eau,
mais d’un Amour incroyable ! Elle glisse dans l’eau et se dissout dans
l’Amour. Son moi physique a disparu, mais elle n’a plus peur. Ce qui était
reflété, c’était la paix et le silence de l’Amour divin. Elle avait eu peur, parce
qu’être cet Amour signifiait la mort de son faux moi.
LES IMAGES MENTALES
Les images mentales sont des créations de l’esprit qui apparaissent dans l’état
de veille, comme des souvenirs, des rêveries, des fantasmes, des images qui
semblent provenir de vies antérieures et des images liées aux sensations
physiques. Nous pratiquons le détachement vis-à-vis de celles-ci, comme
nous le faisons avec les images des rêves.
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Une image apparut spontanément à une personne à qui j’enseignais le
détachement, alors qu’elle se concentrait sur autre chose. C’était la nuit.
Enfant, il se trouvait dans le vestibule à l’extérieur de sa chambre, apeuré,
incapable d’appeler ses parents, car ils seraient fâchés, se moqueraient de sa
peur et l’obligeraient à retourner dans sa chambre où l’attendait un
‘’monstre’’. Cette scène apparut plusieurs fois, avec de légères variantes. Il
s’appliqua à se défaire de son attachement à être en colère contre ses parents.
Quand son cœur s’ouvrit et quand il put être présent avec ses parents, il vit
qu’ils ne faisaient que réagir à partir de leurs propres peurs et il commença à
les voir avec compassion. Ils reflétaient la façon dont il s’était fermé son cœur
à lui-même, par peur.
Ensuite, il osa renoncer à éviter le ‘’monstre’’. Alors qu’il était présentement
capable de faire face au ‘’monstre’’ et de s’ouvrir à lui sans peur ni fuite, il se
transforma en un petit enfant qui se sentait abandonné, craintif, avec un
besoin d’amour désespéré. Il le vit ‘’dégoûtant, répugnant, sans abri et sale, les
yeux maculés de vieilles larmes’’. Il se sentait tout à fait incapable de faire
quoi que ce soit pour cet enfant qui le rebutait. Etre complètement présent,
ouvert pour accueillir l’enfant semblait impensable. Ses besoins et sa
souffrance l’effrayaient, tout comme ils effrayaient ses parents et il voulut
s’éloigner de l’enfant. Il travailla à renoncer à son attachement à fuir l’enfant
et à nier que l’enfant, c’était lui. Ce faisant, il réalisa que l’enfant était le moi
profond en manque d’affection qu’il avait toujours évité. Il lui avait fermé
son cœur, provoquant ainsi sa transformation en ‘’monstre’’.
Pour se défaire de son attachement à nier et à fuir son moi-enfant, il se
permit d’approcher pas à pas son image de l’enfant à un degré supportable
pour lui jusqu’à être totalement présent, le cœur ouvert. Quand il put
vraiment être avec l’enfant qu’il avait abandonné en fermant son cœur, il
découvrit que tout ce que l’enfant voulait, c’était être porté. Au départ, cette
pensée lui souleva le cœur et il se détourna. Puis, en continuant à pratiquer, sa
peur s’estompa graduellement et son cœur commença à s’ouvrir. Il tendit les
bras vers l’enfant et il lui permit de le toucher. Le contact semblait froid et
pourtant plein d’amour. Il savait que cet enfant l’aimait, malgré le fait qu’il
l’avait rejeté et abandonné. Le contact de l’enfant l’envahit et la profondeur
de son amour l’effraya. Il pouvait voir que le cœur de l’enfant était ouvert et
que l’enfant avait maintenant l’air heureux et fort. Il n’arrivait pas à le croire
et pourtant, c’était vrai. Ce moi caché, décrié, dont il avait toujours essayé de
se débarrasser était rempli de l’amour qu’il recherchait. Il avait toujours pensé
que s’il pouvait juste être libre de ce moi-enfant, tout irait bien alors.
L’inverse était vrai ! L’enfant était la clé de la guérison de son cœur et la scène
ne réapparut plus.
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Il y a vingt ans, quand je pratiquais encore la psychothérapie, je me rappelle
être entré en contact avec une image intérieure d’un ‘’monstre’’ qui ne
semblait pas être moi, même si quelque part, je savais que c’était moi. J’avais
une image mentale de ce monstre très effrayante et grotesque. Je tentai de
lutter contre et de la faire disparaître et plus je mettais de l’énergie à lutter
contre et plus grosse et plus féroce l’image devenait dans mon esprit. Elle
grandissait proportionnellement à l’énergie de mon opposition, signe clair que
c’était un reflet de mon mental, même si je n’en étais pas conscient alors. La
personne avec qui je travaillais suggéra que je me défasse de mon attachement
à lutter contre et que je m’ouvre à elle. C’était répugnant et effrayant. Je
reculai devant l’idée, tout en sachant que c’était la bonne option. Aussitôt que
je cessai d’essayer de venir à bout du ‘’monstre’’ et que je m’autorisai à être
simplement présent, le cœur ouvert, il se mit à rapetisser ou c’est moi qui
grandit et il devint de moins en moins menaçant. Petit à petit, je pus
accueillir le ‘’monstre’’, le cœur ouvert, pour m’apercevoir qu’il se transforma
en un gnome affectueux et compatissant, qui était là pour me guider et pour
m’apprendre. Je compris que le monstre était un reflet de moi, quand j’étais
émotionnellement épuisé de m’occuper des autres et pas de moi-même.
Lorsque j’étais vidé, je me distançais par rapport à ma famille, car j’avais
l’impression qu’ils en voulaient toujours plus et que je n’avais plus rien à leur
offrir. Je supportais difficilement toutes leurs exigences. Le ‘’monstre’’
m’apprit que si j’ouvrais mon cœur à mon moi épuisé, lui aussi deviendrait un
guide et un enseignant affectueux et inoffensif.
Une femme occupée à se défaire de son idée d’elle-même actuelle avait
l’image de s’accrocher du bout des doigts au bord d’une falaise qui s’écroulait.
Elle était terrifiée. Au-dessus d’elle, elle vit ses parents et ses grands-parents
qui la critiquaient, comme d’habitude, en disant : ‘’Ressaisis-toi !’’, ‘’Cesse
d’être irresponsable !’’, ‘’Tu n’arriveras jamais à rien !’’, ‘’Personne ne t’aimera
jamais !’’ Elle reconnut s’agripper toujours à un ancien schéma de conviction
suivant lequel elle était inadaptée et indigne d’être aimée et l’image de ses
parents et de ses grands-parents reflétait cette conviction. Elle croyait que
perdre son attachement à cette pierre angulaire de son identité signifierait la
mort de la personne qu’elle avait été et elle s’imaginait que toutes ses
relations actuelles avec sa famille et ses amis disparaîtraient. Elle réagissait
avec effroi face à cette pensée. Je lui suggérai qu’elle s’applique à s’affranchir
de l’évitement de l’image de son moi effrayé. Quand elle put réellement être
présente avec l’image de son moi effrayé suspendu au bord de la falaise, elle
devint ce moi, lâcha prise spontanément, tomba et survécut miraculeusement.
Elle entra dans un état d’être dilaté, libre, joyeux, infini. Son ancien moi
craintif avait disparu. Elle était grisée, mais l’absence de son sens familier du
moi l’effrayait. La pensée de renoncer à son ancienne identité et devenir le
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Soi dépourvu d’entraves et joyeux qu’elle expérimentait l’attirait et
l’effrayait, simultanément. En raison de sa peur, elle fut alors incapable
d’embrasser son Soi libre et joyeux, mais la graine de la transformation avait
été plantée et continua de pousser.
Une femme avait une image mentale, où le devant de son corps était ouvert
dans une blessure béante et saignante. Puis une scène apparut spontanément,
qui remontait à plusieurs siècles, selon elle. Des gens vêtus comme à une
époque révolue l’injurient, lui jettent des choses, mais elle ne comprend pas
pourquoi. Ils ne veulent pas cesser, malgré ses suppliques. A ce moment-là,
une image antérieure apparaît : il lui avait été demandé de guérir l’un d’eux,
mais elle avait échoué. C’était un genre de coup monté et à présent, on s’en
prenait à elle comme si c’était une sorcière. Cette scène qui lui paraissait
provenir d’une vie antérieure était difficile à contempler pour elle et tout ce
qu’elle voulait faire, c’était la fuir. Il lui était particulièrement difficile de
pratiquer le détachement envers son impuissance et les gens qui l’accusaient
et qui l’attaquaient injustement. Alors qu’elle travaillait à s’affranchir de
l’évitement de ces images pour que son cœur puisse s’ouvrir à elles, elle vit
comment la situation de sa vie actuelle se reflétait dans les images qui avaient
surgi, même si c’était d’une manière plus modérée. Sa famille l’accusait d’être
la cause de leurs problèmes. Ce n’était pas le cas, mais ses protestations
restaient vaines. Elle était un miroir de la partie critique d’elle-même qui la
condamnait perpétuellement. Elle se sentait incapable d’endiguer ce rejet
d’elle-même. Elle s’appliqua à se désidentifier de la partie d’elle-même qui la
critiquait, tout en s’ouvrant pour accueillir les sentiments qui étaient causés
par ce rejet d’elle-même et qui étaient symbolisés par sa blessure à la poitrine
(le centre du cœur). Son cœur s’ouvrit graduellement et elle devint capable
de cesser de se trahir avec cette autocritique qui l’avait rendue impuissante.
Les images mentales peuvent aussi être associées à un sentiment ou à une
sensation physique. Un homme à qui j’enseignais le détachement sentait un
nœud dans son estomac. En l’investiguant, celui-ci ressemblait à une boule
d’acier impénétrable. Cette boule semblait fort dense et tout garder à
l’extérieur. Il ‘’essaya’’ ces caractéristiques et il découvrit que lui aussi se
sentait dense et impénétrable. Je lui demandai d’être simplement le Témoin
de cette boule, sans jugement ni attachement à ce que cela soit différent. En
pratiquant, la boule se transforma pour ne laisser qu’un vide à sa place. Je lui
suggérai de s’ouvrir au vide et de l’accueillir. Ce qu’il fit. Il eut une image de
lui-même, seul, tombant dans l’espace et observant divers objets qui
passaient. Il se sentait à l’aise avec cette scène jusqu’à ce que son sentiment
habituel du moi commence à disparaître. Il appréhenda de se perdre et son
attachement à son faux moi interrompit ce qui se passait. La crispation qui
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l’éloignait de la conscience élargie qu’il avait expérimentée lui causa un peu
de tristesse et même s’il voulait la retrouver, il savait qu’il n’était pas prêt à
renoncer à son sentiment d’identité actuel, son faux moi. La pratique se
focalisa alors sur sa peur et sur sa tristesse.
J’ai opté de décrire la pratique du détachement vis-à-vis du type d’images
mentales que nous pourrions être tentés d’éluder, car ce sont souvent ces
images qui nous offrent les enseignements les plus profonds. Si nous évitons
ou si nous ignorons les enseignements indispensables pour la libération de
notre Amour que nous offrent nos images mentales, ces images s’intensifient
souvent jusqu’à ce que nous ne puissions plus les rejeter. C’est comme si elles
disaient : ‘’Fais attention ! Voici un enseignement d’Amour qu’il te faut
recevoir.’’
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CHAPITRE 9 : LA MALADIE
‘’Le corps humain est le foyer d’innombrables microbes et autres êtres parasites.
Personne ne peut être exempt de ces causes qui provoquent les maladies. Mais on peut
facilement surmonter cette souffrance en développant des sentiments de compassion
envers tous les êtres et des pensées qui se nourrissent d’Amour et qui diffusent
l’Amour. La maladie, physique et mentale, est une réaction du corps qui est causée par
des poisons dans le mental. Seul un esprit pur peut garantir une santé continue’’ (Sai
Baba, 1985, p. 31).
‘’Les maladies sont les produits du mental, pas du corps’’ (Sai Baba, 1999b, p.10.).
Nous pouvons surmonter la maladie en ‘’développant des sentiments de
compassion envers tous les êtres et des pensées qui se nourrissent d’Amour et
qui diffusent l’Amour’’. Donc, toute guérison s’opère via la compassion et via
l’amour, comme Sai Baba me l’a révélé dans l’expérience d’éveil qui est
décrite dans le premier chapitre. Donc, ‘’remplissez vos cœurs d’Amour. Vous
serez alors délivrés de toutes les afflictions’’ (Sai Baba, 1999h, p. 283). Pour remplir
nos cœurs d’amour, nous devons nous détacher des pensées qui bloquent le
cœur, puisque ‘’la maladie, physique et mentale, est une réaction du corps qui
est causée par des poisons dans le mental.’’
‘’Pour toutes les maladies émanant de l’esprit, il y a essentiellement deux causes : raga
et dvesha (l’attachement et l’aversion)’’ (Sai Baba, 1999h, p. 221). L’aversion est
identique à ce que j’appelle l’attachement à éviter ou à refuser. Lorsque nous
nous dépouillons de notre attachement à des pensées, à des croyances et à des
actions qui bloquent le cœur, nos cœurs s’ouvrent, guérissant le manque
d’amour dont la maladie était un reflet. ‘’Seul un esprit pur peut garantir une
santé continue.’’ Ce que nous guérissons en pratiquant le détachement envers
la maladie, c’est la fermeture de nos cœurs à l’Amour, qui est la cause de toute
notre souffrance, pas la maladie en elle-même.
PRATIQUER LE DÉTACHEMENT ENVERS LA MALADIE
Nous ne nous concentrerons que sur la pratique du détachement qui concerne
la maladie physique, car nous avons déjà décrit comment pratiquer le
détachement vis-à-vis de troubles mentaux, comme l’angoisse et la
dépression. Nous allons examiner quelques cas représentatifs de pratique du
détachement envers la maladie pour illustrer comment pratiquer avec toutes
les maladies.
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Nous pratiquons le détachement envers la maladie, non pour la faire partir,
mais pour dénouer les attachements qui ont bloqué nos cœurs. Pour entamer
la pratique, déterminez quels attachements vous avez par rapport à la
maladie. L’attachement qui est presque toujours présent, lorsqu’on commence
la pratique, c’est l’attachement à se débarrasser de la maladie. Vous défaire de
l’attachement à éliminer la maladie requiert que vous cessiez de considérer la
maladie comme un problème ou comme un ennemi et que vous lui permettiez
simplement d’être, sans aucun besoin qu’elle ne soit différente de ce qu’elle
est. Donc, le but de la pratique du détachement envers une maladie, ce n’est
pas de la faire disparaître ni de faire disparaître ses symptômes, mais de
changer votre rapport à la maladie, de l’attachement au détachement, du rejet
à l’acceptation franche. En bref, défaire l’attachement à se débarrasser de la
maladie, c’est l’évolution de fermer votre cœur à la maladie à lui ouvrir votre
cœur.
Il est peu probable que le faux moi soutienne l’ouverture du cœur à la
maladie. Généralement, il voit plutôt la maladie comme un ennemi à
attaquer, à vaincre et à éradiquer. Le faux moi ne croit pas que nous créons
nos réalités ou que la maladie ait quoi que ce soit à voir avec nos pensées,
donc il essaye de se débarrasser de la maladie tout en continuant les pensées
et les actions qui bloquent le cœur et dont la maladie est un reflet. C’est
comme essayer de changer les images de l’écran (la maladie) sans changer le
film (les pensées, les croyances et les actions) qui en est la cause.
Que la maladie soit un reflet de nos pensées et de nos actions qui ferment le
cœur de cette vie ou de vies antérieures ne veut pas dire pas que nous
devrions nous reprocher d’être malades. Que du contraire ! La maladie est
venue pour nous offrir un enseignement d’Amour envers lequel nous
pourrions nous sentir très reconnaissants. De plus, aucun d’entre nous n’a
sciemment cherché à provoquer la maladie et le reproche n’est qu’une autre
pensée qui bloque le cœur dont nous devons nous désidentifier. Le reproche
reflète l’attachement au faux moi et c’est l’antithèse du détachement. En
pratiquant le détachement envers les reproches et toutes les autres pensées
qui bloquent le cœur, nous permettons à nos cœurs de s’ouvrir à l’Amour.
Recevoir l’enseignement de la maladie
La forme particulière que prend la maladie n’est pas un accident, mais reflète
la manière spécifique dont vous avez fermé votre cœur, ce dont la maladie
essaie de vous apprendre à devenir conscient. Par exemple, les symptômes du
rhume peuvent inclure un mal de gorge, des yeux larmoyants, un nez bouché
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et de la pression dans les sinus. Voyez comment ces symptômes sont un
miroir. Il se peut que vous soyez irrité à propos de quelque chose, que vous
vous sentiez triste, bloqué dans la vie ou que vous vous mettiez la pression.
Lorsque vous aurez reconnu comment les symptômes du rhume sont un
reflet de vous, pratiquez le détachement envers les pensées qui ferment le
cœur et qui font que vous vous sentiez irrité, triste, bloqué et mis sous
pression. Quand vous comprendrez leur cause, les symptômes de la maladie
auront immanquablement du sens et vous apparaîtront comme un reflet
approprié de la façon dont vous vous êtes fermé votre cœur. Néanmoins, un
même symptôme chez différentes personnes peut être le reflet d’avoir fermé
leurs cœurs différemment, aussi ne présumez jamais qu’un symptôme
particulier ou qu’une maladie particulière reflète le même enseignement.
Ma propre expérience illustre comment recevoir l’enseignement de la
maladie. Mon docteur avait constaté que ma tension était un peu élevée et
voulait traiter cela par un régime, de l’exercice et un médicament. J’ai essayé
son traitement et j’ai commencé à contrôler ma tension à la maison pour voir
s’il marchait et j’ai trouvé que son approche était peu efficace. Bien que ma
tension était toujours plus basse que dans son cabinet, elle était quand même
parfois élevée. J’ai alors décidé d’arrêter de traiter le symptôme et de
rechercher sa cause en découvrant comment le symptôme était un miroir de
moi. La réponse était évidente, après avoir cherché. J’avais l’habitude de me
mettre la pression pour être productif et pour tout faire rapidement,
efficacement et bien. Je me mettais même la pression pour bien ‘’performer’’
dans le cabinet de la doctoresse. Mon mental stressait mon corps.
Progressivement, j’ai appris à me détacher de mes pensées oppressantes et à
me traiter avec plus d’attention et d’amour. En cessant de me mettre autant la
pression, ma tension est également descendue.
Détachement et traitement médical
La pratique du détachement vise à ouvrir nos cœurs à la maladie, alors que le
traitement médical s’applique à attaquer et à éliminer la maladie. Il pourrait
sembler que cette différence soit un problème. Ce n’est pas le cas. Ceux
d’entre nous qui sont encore attachés et identifiés au corps se focaliseront
sans doute d’abord sur le traitement médical ou le traitement alternatif d’une
maladie ou d’une blessure. Quand nos craintes et quand nos inquiétudes
auront suffisamment diminué, nous pourrons alors passer à la pratique du
détachement. Peu importe le traitement médical ou le traitement alternatif
que nous pouvons d’abord choisir, nous pouvons toujours passer plus tard à
la pratique du détachement ou faire les deux en parallèle. L’unique problème
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pourrait être que les symptômes de la maladie soient supprimés par le
traitement avant que nous ne puissions recevoir leur enseignement, mais
même alors, nous pouvons recevoir l’enseignement en nous souvenant des
symptômes et de leurs effets et pratiquer avec ce souvenir.
La douleur
Un symptôme qui accompagne souvent la maladie ou la blessure, c’est la
douleur. Ne plus s’attacher à supprimer la douleur peut être un processus très
ardu, parce que d’habitude, notre réaction instinctive est de faire disparaître la
douleur. Cependant, réprimer ou éviter la douleur non seulement ne guérit
pas sa cause, mais tend souvent à la perpétuer, voire même à l’intensifier.
Par exemple, supposez que vous avez un mal de tête ordinaire qui ne requiert
aucune attention médicale. Pratiquez le détachement en cessant d’éviter la
douleur, en vous décrispant par rapport à celle-ci et en devenant totalement
présent à la douleur, telle que vous l’expérimentez exactement. Permettez à
votre conscience de s’ouvrir à la douleur et de l’accueillir juste comme elle est.
Connaissez toute la douleur en découvrant ses caractéristiques et ses nuances.
Considérez la douleur comme étant venue vous offrir un enseignement
d’Amour. Quand vous pourrez être présent à la douleur, il est possible que
vous puissiez prendre conscience de sentiments qui lui sont associés, comme
la frustration, la tension, la colère ou la tristesse et d’images, comme le feu,
une explosion, de l’impuissance… Pratiquez le détachement envers ces
sentiments et ces images et recherchez les pensées dont ils sont un reflet.
Aussitôt que les pensées qui sont à l’origine du mal de tête sont claires, passez
au niveau de la pensée. Continuez de pratiquer tant que la douleur occupe le
premier plan. Une fois que vous cesserez d’éviter et de refuser la douleur,
votre expérience de celle-ci changera, parce que vous aurez diminué votre
attachement et parce que vous lui aurez ouvert votre cœur. Ne plus vous
attacher à soulager la douleur provoque la transformation de la douleur et
vous expérimenterez différemment la douleur ou plus du tout. C’est difficile
à croire jusqu’à ce que cela se produise. Une fois que c’est le cas, la pratique
est plus facile.
Nous pouvons découvrir les pensées et les convictions qui ferment le cœur
spécifiques qui se reflètent dans la maladie en pratiquant le détachement vis à
vis de la maladie elle-même. Pour illustrer, une femme souffrait d’un abcès
dentaire douloureux. Un traitement dentaire n’avait pas réussi à la soulager
de sa douleur, aussi plutôt que de s’attacher à éliminer la douleur, elle
commença à s’ouvrir pour accueillir la douleur sans l’éviter ni la diminuer. Ce
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faisant, elle reçut une image de la dent écrabouillée et endolorie. Elle examina
alors comment la dent pouvait être un reflet d’elle-même et elle éprouva une
tristesse écrasante. Quand elle essaya d’éviter cette tristesse en la repoussant,
celle-ci se transforma en une énergie explosive. Elle craignait de s’ouvrir et
d’accueillir ce surplus d’énergie, car elle serait ‘’trop grande’’, au-delà d’ellemême et elle se sentirait gênée. Elle se souvint que son père lui avait maintes
fois répété qu’elle était démesurée et bruyante et qu’il la rejetait pour cela.
Elle réalisa qu’elle avait incorporé cette croyance bloquante et minimaliste et
qu’elle se l’était imposée à elle-même. Cette croyance était la cause de son
symptôme. Elle put voir comment la ‘’compression et la constriction’’ qu’elle
ressentait dans sa dent reflétaient la façon dont elle écrasait sa vivacité, parce
qu’elle craignait d’être ‘’trop grande’’. Elle avait rejeté sa tristesse et
l’expansion de son être et les effets de la fermeture de son cœur s’étaient
reflétés dans son abcès dentaire. Elle s’appliqua à s’ouvrir à sa tristesse et à
l’accepter en se dégageant ainsi de son attachement à la réprimer et elle
explora graduellement la vivacité accrue qui s’ensuivit. Parallèlement, elle
travailla au niveau de la pensée en se désidentifiant du flot de pensées
dénigrantes qui fermaient son cœur, qui la diminuaient et qui minaient sa
confiance. Avec l’ouverture de son cœur, les symptômes de l’abcès dentaire
commencèrent à s’estomper, puisqu’ ils n’étaient plus nécessaires pour
l’encourager à se défaire de son attachement à limiter son être.
Quand une femme qui souffrait d’une douleur bloquante dans le bas du dos
commença à s’ouvrir à la douleur plutôt que de s’efforcer de l’éliminer, celuici lui ‘’parla’’ et lui dit : ‘’J’ai mal ; je veux que l’on s’occupe de moi, je veux de
l‘attention et de l’amour ; touche-moi et caresse-moi.’’ Elle reçut une image de
son dos sous la forme d’un petit enfant qui ne ressentait ni compréhension, ni
compassion, ni aucun soutien de sa part. Cet ‘’enfant’’ se sentait abandonné et
pleurait douloureusement, parce que la femme considérait sa douleur dorsale
avec ‘’dégoût’’ et parce qu’elle la rejetait comme étant ‘’une faiblesse
honteuse’’, si elle la contraignait à avoir besoin de quoi que ce soit de la part
de qui que ce soit. Quand elle examina comment son moi-enfant était un
miroir d’elle-même, elle reconnut qu’elle partageait les sentiments de cet
enfant. Elle se rappela que sa mère la privait d’amour, chaque fois qu’elle
demandait quelque chose ou chaque fois qu’elle était malade et c’est ainsi
qu’elle avait appris à ignorer et à refuser toute maladie, toute blessure ou
toute souffrance pour éviter que sa mère ne lui ferme son cœur. Elle avait
décidé de ne plus jamais être une charge pour qui que ce soit pour éviter le
rejet pénible qu’elle appréhendait. Elle s’était désensibilisée à l’égard de la
privation d’amour exercée par sa mère, de sorte que lorsqu’elle agissait
similairement vis-à-vis d’elle-même, elle n’en ressentait ni la douleur ni la
peine qui en résultait. Son moi-enfant ne lui faisait pas confiance, parce qu’ il
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avait peur d’être trahi et abandonné par elle, s’il exprimait sa douleur et son
besoin, un reflet de ce que sa mère lui avait fait.
Elle s’appliqua à s’ouvrir et à répondre aux besoins de son moi-enfant, se
défaisant ainsi de son attachement à se détourner de sa douleur et de sa peur.
Elle réalisa comment elle avait fermé son cœur à ses propres besoins en
pensant qu’elle ne serait pas aimée, si elle avait besoin de soins et d’attention.
Cette conviction était la source de sa souffrance. Néanmoins, maintenant,
son immobilité l’avait forcée à s’appuyer sur les autres et à devenir ce qu’elle
craignait le plus – devenir une ‘’charge’’ pour les autres et être abandonnée et
mal aimée à cause de cela. C’est un miracle si les gens ne la rejetaient pas. Elle
vit combien elle avait été cruelle vis-à-vis d’elle-même en croyant qu’elle était
indigne d’être aimée, si elle avait besoin de quoi que ce soit de la part de qui
que ce soit, puis en fermant son cœur à la douleur et à la peine que cette
conviction causait. Son cœur s’attendrit pour le moi souffrant que reflétait sa
douleur dorsale. Elle s’engagea à prendre soin d’elle-même, comme son dos
lui enseignait à le faire. Pour pouvoir entretenir la compassion qu’elle s’était
découverte, elle s’appliqua à se désidentifier de la pensée bloquante
fondamentale qui s’était manifestée sous la forme de sa douleur et qui était :
‘’Si j’ai besoin de quoi que ce soit de la part d’autrui, alors ils penseront que je
suis une charge et ils me rejetteront, donc je ne demanderai jamais rien.’’
Cette conviction était profondément ancrée et il était donc difficile de s’en
défaire. Avec la pratique, les symptômes dorsaux qui l’empêchaient même de
marcher disparurent progressivement. Elle retrouva son emploi et elle a pu
vivre d’une manière plus confiante et plus aimante. A présent, si elle
commence à se fermer son cœur à elle-même, les symptômes réapparaissent,
comme pour lui rappeler de mettre en pratique l’amour.
La peur
Lorsque nous craignons une maladie, il peut être difficile, voire impossible de
ne pas nous attacher à l’attaquer et à l’éliminer. Néanmoins, ce n’est pas un
problème, car la pratique du détachement se fait toujours avec ce qui est dans
l’instant. Ainsi, si la peur envahit notre conscience, c’est sur elle que nous
nous focalisons. Pour commencer à pratiquer avec la peur, ouvrez-vous à
l’expérience de la peur. Honorez le moi inquiet et soyez complètement
présent avec la peur. Ouvrez-vous à elle et ne vous attachez pas à la faire
partir. Découvrez l’origine de la peur qui sera des pensées qui concernent
l’avenir qui vous effraient actuellement, comme l’invalidité ou la mort. Par
exemple, supposez que vous soyez blessé à la jambe et que vous craigniez de
ne plus jamais pouvoir marcher et les pertes que cela entraînerait. Ces
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pensées flippantes peuvent inclure la dépendance vis-à-vis d’autrui, la perte
d’un travail, l’impossibilité de pratiquer des activités auxquelles vous tenez,
comme la danse ou un sport ou le dégoût de penser qu’on est soi-même un
‘’impotent’’. Dégagez-vous de l’identification avec ces pensées angoissantes et
de votre réaction inquiète à leur égard en pratiquant le détachement. Puis,
appliquez-vous à recevoir l’enseignement de la blessure en découvrant
comment la blessure est un reflet d’une partie de vous-même. Peut-être vous
êtes-vous jugé incapable de sortir dans le monde ou peut-être vous êtes-vous
paralysé avec des pensées débilitantes qui vous ont empêché d’agir d’une
manière qui vous serait utile. Une fois que vous avez trouvé les pensées que
la blessure à la jambe reflète, pratiquez le détachement vis-à-vis de celles-ci.
Les pensées craintives ferment votre cœur et une diminution de la peur
signifie toujours une plus grande capacité à aimer et donc à guérir.
La maladie qui peut être mortelle
La peur de ne pas exister est inhérente au faux moi, parce qu’il s’identifie au
corps qui périt et donc, une maladie potentiellement mortelle provoquera
inévitablement cette peur. En raison de notre identification au corps, nous
pourrons trouver extrêmement difficile de ne pas nous attacher à combattre
une maladie potentiellement mortelle. A cet égard, il est bien utile de
reconnaître qu’une maladie potentiellement mortelle est un reflet de nos
propres pensées et de nos propres actions qui ferment le cœur de cette vie ou
de vies passées et qu’elle est venue pour nous offrir un enseignement sur la
manière d’ouvrir nos cœurs. L’évolution capitale, c’est ne plus considérer la
maladie potentiellement mortelle comme une ennemie, mais l’accueillir
comme une enseignante d’Amour. C’est la même évolution que Jésus nous
demande, quand il dit : ‘’Aimez vos ennemis.’’
Si nous sommes envahis par la peur, procéder à cette évolution sera difficile
ou impossible au départ. Pour illustrer comment procéder à cette évolution,
considérons le cancer, puisque le cancer est une maladie potentiellement
mortelle que la majorité des gens connaissent. La majorité des gens réagissent
par de la peur face au cancer. Face à une telle peur, le faux moi veut éradiquer
la menace de la mort – le cancer. Tant que nous nous attachons à combattre
une maladie potentiellement mortelle, nous sommes incapables de procéder à
l’évolution nécessaire pour recevoir son enseignement. Ainsi, nous nous
concentrons d’abord sur tout traitement qui diminuera suffisamment nos
craintes et nos inquiétudes pour pouvoir commencer à pratiquer le
détachement. Comme le traitement contre le cancer prend généralement du
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temps, nous pouvons utiliser ce temps pour nous ouvrir à la perspective que
le cancer peut nous enseigner l’Amour.
Pour envisager cette perspective, vous ne devez plus vous attacher à
combattre le cancer, ce qui nécessitera de vous dégager de votre attachement
au noyau du faux moi – l’identification au corps. Vous vous défaites de
l’attachement au corps en vous départissant de votre attachement à éviter les
pensées qui surgissent, quand vous considérez la mort du corps. Au lieu de
vous détourner de ces pensées et des réactions qu’elles suscitent, ouvrez-vous
à elles et soyez totalement présent jusqu’à ce que vous puissiez vraiment les
accueillir et être avec elles inconditionnellement. Ces pensées peuvent inclure
de la tristesse à l’idée de perdre des relations que vous chérissez avec des
membres de votre famille et des amis ou d’autres aspects de votre vie
auxquels vous êtes attaché. Quand vous vous serez ouvert à toutes les pensées
et à tous les sentiments qui auront surgi concernant la mort et quand vous les
aurez accueillis dans votre cœur, cela diminuera généralement suffisamment
votre attachement au corps pour pouvoir commencer à vous appliquer à
recevoir le message d’Amour du cancer. Si vous trouvez que vous ne pouvez
pas évoluer et considérer le cancer comme votre instructeur, alors c’est qu’il
reste de l’attachement à découvrir et à défaire. Une fois que vous pouvez vous
ouvrir à la possibilité que la maladie est là pour vous assister sur la voie
spirituelle, vous pouvez voir la maladie, non pas comme une catastrophe,
mais plutôt comme celle qui vous enseigne à ouvrir plus
inconditionnellement votre cœur.
Quand vous pourrez passer à la perspective d’après laquelle le cancer est venu
vous offrir un message d’Amour, vous pourrez le recevoir. L’enseignement
apparaîtra, quand vous pourrez vous ouvrir à la découverte de la partie de
vous-même que le cancer reflète. Pour recevoir l’enseignement, ouvrez-vous à
l’énergie létale et destructrice de la maladie et notez tout ce qui décrit
comment vous la ressentez, comment vous l’expérimentez ou comment vous
la visualisez. Puis, découvrez comment vous êtes ou comment vous vous
faites à vous-même toutes les choses de votre liste. Par exemple, supposez
que vous imaginiez le cancer comme une armée maligne de cellules
délinquantes qui vous dévorent insidieusement et qui sont déterminées à
détruire votre corps. Découvrez comment votre expérience du cancer est un
miroir de la façon dont vous vous attaquez vous-même. Pour déterminer
comment, recherchez tout scénario habituel de pensées et de convictions qui
bloquent le cœur et qui vous rongent, comme des pensées qui reflètent la
condamnation, le dégoût de vous-même, la colère qui couve, le refus de
pardonner, le chagrin non résolu, une forte culpabilité ou de la rancune. Il est
possible que ces pensées qui bloquent le cœur ne soient pas tout de suite
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apparentes, car elles sont souvent si familières que vous pouvez être
désensibilisé à l’égard de leur présence et de leur caractère destructeur ou vous
pouvez sous-estimer leur impact létal. Par conséquent, il est important de
détecter et de reconnaître ces ‘’poisons de l’esprit’’ et de comprendre comment
vous les avez accueillis en vous identifiant avec, en les croyant et en agissant
en réaction à ceux-ci.
Pour que votre cœur s’ouvre, vous devrez cesser de vous identifier à ces
pensées et aux actions qu’elles suscitent et les laisser partir. Découvrez ces
pensées en partant du principe que le cancer est un reflet de celles-ci et
déterminez comment. Même si les pensées et si les actions qui ferment le
cœur se sont produites au cours de vies antérieures, il subsistera un reflet de
celles-ci dans cette vie. Quand vous aurez trouvé ces pensées qui ferment le
cœur, libérez-vous de votre attachement à les désavouer en vous ouvrant à
elles et en les accueillant inconditionnellement. Soyez totalement présent
avec ces pensées et leur effet de fermeture du cœur sans les juger ni vous en
détourner. Soyez vraiment avec elles sans vous en séparer jusqu’à ce que vous
puissiez sincèrement les accepter. Quand ce sera possible, votre cœur de
compassion englobera la part de vous-même qui se complaisait dans les
pensées destructrices qui ferment le cœur ainsi que le ‘’vous’’ qui souffrait de
leur impact blessant. Ce glissement dans l’Amour est indubitable. Vous avez
reçu l’enseignement. L’enseignement d’Amour aura ouvert votre cœur non
seulement à vous-même, mais également aux autres, ainsi voyez si votre
cœur a quelque chose à exprimer aux autres, comme le pardon.
La location particulière du cancer ou d’une autre maladie sera aussi un reflet
approprié des pensées et des actions via lesquelles vous avez fermé votre
cœur. L’adéquation sera évidente, quand vous comprendrez l’enseignement de
la maladie. Rappelez-vous que l’enseignement de n’importe quelle maladie est
toujours personnel et qu’aucune généralisation ne devrait jamais être faite. Il
est donc important de découvrir vous-même l’enseignement et de ne laisser
personne d’autre essayer de vous dire ce que c’est. Quand vous aurez reçu
l’enseignement de la maladie et quand vous vous serez libéré de l’attachement
aux pensées, aux convictions et aux actions dont la maladie était un reflet,
votre cœur s’ouvrira plus inconditionnellement en approfondissant l’unité
avec votre Soi. C’est pour permettre ce glissement dans l’Amour que vous
pratiquez le détachement. Gardez aussi à l’esprit que cette description aisée
de la pratique du détachement avec une maladie potentiellement mortelle ne
signifie pas que c’est facile. Ce sera aussi compliqué que votre attachement au
corps est fort.
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L’enseignement d’une maladie qui peut être mortelle nécessite généralement
la perte d’un attachement très conséquent au faux moi et l’intégration d’une
toute nouvelle orientation de vie qui fait de la compassion et de l’amour notre
première priorité. Nous résistons souvent considérablement à lâcher notre
ancien mode de vie et à procéder à la transition de guérison vers l’Amour.
C’est pourquoi il faut parfois une maladie potentiellement mortelle pour
attirer notre attention et pour nous inciter à ouvrir nos cœurs. Si c’était
simple, nous l’aurions déjà fait.
L’EFFET D’OUVRIR NOS CŒURS À LA MALADIE
‘’Quand le cœur sera pur, l’homme sera affranchi de la maladie’’ (Sai Baba, 1997a,
p.126).
Quand nous aurons purifié notre cœur de la façon dont une maladie nous
enseigne à le faire, il est possible que ses symptômes disparaissent, parce
qu’ils ne sont plus nécessaires. Une raison pour laquelle une maladie pourrait
perdurer, une fois que nous lui avons ouvert notre cœur, c’est que cela peut
prendre du temps avant que les symptômes ne disparaissent, après que leur
enseignement ait été reçu, tout comme il est possible que cela ait pris du
temps avant que la maladie ne devienne apparente. Il est peut-être également
nécessaire que les symptômes perdurent jusqu’à ce que l’évolution vers
l’ouverture du cœur qui s’est produite puisse se maintenir sans ceux-ci. Si les
symptômes disparaissent trop vite, il pourrait y avoir une tendance sans la
motivation de la maladie à se refondre dans les anciens schémas de pensée et
de comportement que la maladie reflétait. S’il y a un risque que ceci se
produise, la persistance de ces symptômes peut servir à nous garder sur le
chemin de l’Amour. La maladie peut aussi perdurer, parce que nos cœurs ne
sont pas encore purifiés. De plus, certains symptômes physiques peuvent être
d’origine karmique et refléter des pensées et des actions qui ferment le cœur
de vies passées. Si un corps est né sans mains, par exemple, ce n’est pas un
reflet de pensées et d’actions de cette vie, mais de vies passées. De telles
anomalies congénitales offrent l’opportunité de guérir du passé dans cette vie.
Il est toutefois possible qu’il faille rester détaché de tels symptômes pendant
une longue période et même durant une vie entière avant que leur cause
karmique ne soit annulée. Encore une fois, ouvrir notre cœur à une maladie
ne signifie pas nécessairement que celle-ci disparaît.
Des symptômes peuvent aussi persister après que nous nous soyons détachés
d’eux, si c’est le moment de mourir. Cependant, même si les symptômes de la
maladie restent totalement inchangés, notre rapport à eux sera tout à fait
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différent et nous ne les expérimenterons plus avec crainte ou comme une
souffrance. Notre perception de la maladie, comme tout le reste, se
transforme, quand nous lui avons ouvert notre cœur, parce que, quand la
conscience évolue, la réalité qu’elle crée change aussi. En fait, il se peut que
nous considérions la maladie comme une amie, parce que c’était la seule chose
qui pouvait nous amener à réévaluer notre vie et à nous défaire de notre
attachement aux pensées, aux convictions et aux modèles de comportement
qui ferment le cœur qui étaient reflétés dans la maladie.
Par ailleurs, les symptômes de la maladie peuvent également rester pour
enseigner aux autres comment renoncer à l’attachement au corps et ouvrir
son cœur. Pour illustrer, deux célèbres maîtres spirituels indiens,
Ramakrishna et Ramana Maharshi, avaient tous les deux le cancer. Le cancer
de la gorge de Ramakrishna l’empêchait de manger et ses disciples lui
demandèrent de prier pour être aidé. Lui-même répondit qu’Il mangeait par
l’entremise de milliards de gorges, alors pourquoi regretter que cette gorge
particulière ne puisse avaler de la nourriture ? Ramana Maharshi incarnait
l’unité, quand Il fit observer à ses fidèles qui étaient très inquiets concernant
sa santé : ‘’Oh ! Vous vous affligez, comme si votre Swami partait ! Où puisJe aller et comment y aller ? Les allées et venues ne sont possibles que pour le
corps, mais pourraient-elles l’être pour nous ?’’ (Om, p.24). Ces maîtres
étaient des exemples vivants de détachement par rapport au corps et d’unité
avec l’Un. Il y a des exemples plus ordinaires où des gens apprennent à perdre
leur identité avec leur corps, quand ils sont confrontés à des maladies
potentiellement mortelles et à s’ouvrir à l’Amour. Ils nous servent de maîtres
à tous. ‘’Quand le moi individuel perd ses attachements relatifs au corps et
quand il développe l’amour universel, il surmonte les limites du corps et se
fond dans l’Amour vaste et infini. Cette fusion s’appelle mukthi, moksha ou
Libération’’ (Sai Baba, 1999c, p.63).
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CHAPITRE 10 : LE MAÎTRE
‘’Il n’y a qu’un seul Guru, c’est Dieu et il n’y a pas d’autre Guru’’ (Sai Baba, 1999c,
p.217)
L’unique Maître, c’est l’Un et pas une personne. L’Un est toujours avec nous,
parce qu’Il est nous et jamais plus loin que nos propres cœurs. Néanmoins, se
relier à quelque chose qui est sans forme peut être ardu, et donc au moins au
début, la plupart d’entre nous aurons besoin d’un maître avec lequel nous
pouvons avoir un lien et c’est pourquoi de temps en temps, l’Un s’incarne
sous la forme d’un Avatar. L’Avatar est un reflet de l’Un transcendant et il est
pur Amour. C’est le niveau le plus élevé des Maîtres incarnés. Le niveau
suivant, ce sont les Maîtres autoréalisés, c’est-à-dire ceux qui n’ont plus
aucune identification ni aucun attachement à l’égard du faux moi. Sai Baba
(1999h) nous parle des qualifications d’un tel Maître : ‘’Le vrai Guru, c’est
celui qui a compris son propre Soi’’ (p.164). Le troisième niveau, ce sont des
maîtres qui ont toujours un certain attachement à l’égard du faux moi. Tous
les niveaux des maîtres sont importants pour se défaire du faux moi et pour
réaliser l’Amour, parce que le Maître opère à travers tous, comme une
nécessité. Néanmoins, pour nous affranchir du faux moi, pratiquement tous
auront besoin à un moment donné d’un Avatar ou d’un Maitre autoréalisé qui
est libre, un tel Maitre faisant office de catalyseur de l’Amour, qui éveille
notre conscience de notre véritable nature en étant celle-ci.
A toute époque, il n’y a qu’un Avatar (actuellement Sai Baba) et quelques
Maitres autoréalisés. A cause de cette rareté, nous pourrions supposer que
trouver un Maître pourrait constituer un problème, mais ce n’est pas le cas.
Dans la dualité, l’Un fournit à chacun précisément les expériences dont il a
besoin, ce qui inclut des maîtres des trois niveaux . Comme nous l’avons vu,
toute chose, toute personne à laquelle nous n’avons pas ouvert notre cœur
nous enseigne l’Amour. Si nous avons besoin de l’enseignement d’un Avatar
ou d’un Maître autoréalisé, il y en a un qui nous attirera, comme j’ai moimême été attiré par Sai Baba. Auparavant, j’avais été attiré par d’autres
maîtres qui n’avaient pas réalisé le Soi, mais qui étaient parfaits pour me
fournir exactement les expériences dont j’avais besoin. Sur le chemin de
l’éveil, il est possible que nous rencontrions beaucoup de maîtres toujours un
peu attachés au faux moi, mais qui nous fourniront précisément
l’enseignement dont nous avons besoin. Ces maîtres auront des domaines où
l’enseignement est pur et d’autres où il est contaminé par l’attachement à
l’illusion. Cependant, même ceci n’est pas le problème qui pourrait paraître,
parce que l’Un nous fournit toujours exactement les expériences dont nous
avons besoin pour nous éveiller à l’Amour, même des maîtres ‘’imparfaits’’.
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Un exemple de maître imparfait qui était parfait nous vient d’une histoire
qu’une femme m’a racontée à propos de son guru. Elle m’a décrit comment il
lui ordonnait de déménager d’une ville à une autre, chaque fois qu’il
déménageait et comment il la traitait d’une manière peu aimable. Il lui disait
maintenant d’abandonner son travail et de déménager une fois encore, car il
déménageait. Elle était en colère et sentait qu’il abusait d’elle. En retour de sa
promesse d’ ‘illumination’’ à laquelle elle était attachée, elle avait été prête à
faire tout ce qu’il disait, même si cela sentait la manipulation et si cela
semblait manquer d’amour. En me décrivant les choses qu’il faisait, il était
évident pour moi qu’il agissait sur la base du faux moi. Elle voulait savoir si
je pensais que c’était un maître parfait et si elle devrait rester avec lui ou non.
Je lui ai dit qu’il était clairement identifié à son faux moi, mais que son
expérience de lui offrait un enseignement parfait pour se libérer de la
souffrance causée par son attachement à son concept d’illumination. Il
reflétait la part d’elle-même qui la manipulait et qui l’abusait, lui offrant ainsi
une opportunité parfaite pour ouvrir son cœur à son moi qui manquait
d’amour et découvrir l’Amour qu’elle cherchait.
Un Avatar ou un Maître autoréalisé n’essaie pas de nous changer, mais nous
aide à réaliser qui nous sommes déjà. Un tel Maître ne demande rien ou
n’exige rien de ceux à qui il enseigne – ni argent, ni biens, ni obéissance, ni
relations sexuelles, ni approbation, ni faveurs, ni rien d’autre. Il est possible
que les actions d’un Avatar ou d’un Maître autoréalisé ne soient même pas
comprises par le faux moi, car elles émanent de plus loin que le niveau de la
compréhension dualiste. Les Maîtres autoréalisés n’accréditent jamais le faux
moi ni ne jouent jamais son jeu en aucune manière. Le faux moi recherche la
confirmation dans les réactions d’autrui et l’obtient généralement, vu que la
majorité des gens consolident le point de vue du faux moi en agissant comme
s’il était vrai. Mais si l’illusion du faux moi n’est pas continuellement
renforcée, comme en présence d’un Avatar ou d’un Maître autoréalisé, les
attachements ont tendance à apparaître assez rapidement, ce qui offre la
possibilité de s’en défaire et de libérer l’Amour qui est notre vrai Soi. Un
Maître autoréalisé fournit un miroir parfait de nos attachements au faux moi,
parce qu’un tel Maître n’a aucune identification avec le faux moi qui
contaminerait ce reflet.
Mon expérience de Sai Baba montre comment un Avatar enseigne l’Amour.
J’ai entendu pour la première fois parler de Sai Baba en 1977, quand on m’a
parlé d’un Maître spirituel en Inde qui avait miraculeusement matérialisé des
dizaines d’oranges à partir d’un petit panier pour nourrir une foule. En 1981,
j’ai commencé à me sentir attiré par Sai Baba et j’ai commencé à
L’expérimenter dans ma vision intérieure sous la forme d’un soleil
101
rayonnant, d’une énergie énorme et intense que je ne pouvais supporter que
pendant un instant initialement. Son essence était la Compassion et l’Amour
inconditionnels. Petit à petit, sur une période de deux ou trois ans, j’ai pu être
de plus en plus présent avec cette radiance, jusqu’à pouvoir soutenir son
intensité. Après, j’ai pu m’ouvrir à elle, être en communion avec elle chaque
fois que je ressentais le besoin de cet Amour pur. Je pensais que Sai Baba était
maintenant mon Maître, mais je ne voyais aucune utilité à aller en Inde pour
Le voir, puisqu’Il était toujours instantanément disponible dans mon cœur.
Mais en 1987, ceci a changé et j’ai ressenti un désir d’être avec Lui.
Avant de partir, j’ai eu un rêve où Sai Baba a fait un geste particulier de la
main. Je l’ai tout de suite reconnu, puisqu’il avait la même forme que la
‘’signature énergétique’’ dont j’avais été conscient après la réalisation de ma
nature véritable en tant que l’Un. Sai Baba me disait qu’Il avait causé cette
expérience. Sai Baba a dit que les rêves où Il apparaissait sont des visites
réelles (au sein de l’illusion dualiste, bien sûr) et qu’ils ne sont pas créés par le
moi. En Inde, j’ai découvert que ce geste de la main est le même que celui
qu’Il utilise, quand Il manifeste quelque chose à partir du néant.
Quand je suis arrivé en Inde, Sai Baba était à Ootacamond (ou Ooty). Je
m’attendais à ce que quelque chose de très fort se produise en Le voyant.
Après tout, mon expérience de Lui dans ma vision intérieure était si
extraordinaire qu’être avec Lui devrait sûrement l’être encore plus. Je voulais
que, d’une façon ou d’une autre, Il reconnaisse notre relation et je désirais une
autre expérience profonde. Comme je l’ai écrit dans mon journal intime,
j’espérais ‘’…être délivré de mon ego pour pouvoir aimer toujours’’. Quand
bien même j’étais conscient de ces attachements, je ne pouvais pas m’en
départir. Aussi, la première fois que je me suis rendu au darshan (l’expérience
directe d’un saint), j’espérais que quelque chose de capital se passe qui, d’une
manière ou d’une autre, entérinerait la relation spéciale que j’avais avec Sai
Baba. Soudain, Il apparut. Rien ne se passa. Il a regardé dans ma direction et
toujours rien. Il est passé devant moi, à quelques centimètres en m’ignorant
totalement. En raison de mes attachements, je me suis senti très dépité,
même si je pensais être prêt à tout ce qui pourrait advenir. Sai Baba est un
maître, lorsqu’il s’agit de mettre en relief nos attachements au faux moi pour
que nous puissions en prendre conscience.
Il n’y avait que quelques centaines de personnes dans cette station de
montagne et c’était donc facile de se trouver en première ligne lors du darshan
que Sai Baba donnait deux fois par jour. Pendant le darshan, les gens Lui
tendent des notes, Lui parlent et Lui expriment leurs soucis et leurs désirs ou
demandent des entretiens personnels qui ont lieu après le darshan. L’Indien,
102
tout particulièrement, veut toucher Ses pieds, ce qui est un geste de dévotion,
de vénération et de respect. Après avoir été ignoré le premier jour, un ami me
suggéra que la prochaine fois, je Lui tende une note avec ce que je désirais. Je
n’ai pas voulu, car ceci semblait nier la relation que j’avais avec Lui. Je ne
voulais pas m’appuyer sur des notes, mais sur la communication directe. Mais
je me suis rendu compte que ceci reflétait un attachement à mon sentiment
d’avoir une relation spéciale. J’ai alors décidé de Lui remettre une note
reconnaissant qu’il était un Maître sévère et Le remerciant. Pendant que
j’attendais Son arrivée, j’ai réalisé que cette note n’était qu’un nouveau
moyen de faire en sorte d’être reconnu par Lui. Mon faux moi voulait être
approuvé pour avoir réalisé qu’Il était un Maître sévère. J’ai tout de même
décidé de Lui tendre ma note qu’Il a ignorée. J’ai pris conscience que je
voulais qu’Il me prouve d’une manière tangible qu’Il était réellement Celui
que je pensais qu’Il était. Et je voulais encore être traité comme quelqu’un de
spécial ou de spirituellement avancé. Paradoxalement, j’ai compris que, s’Il
avait pris ma note ou s’Il m’avait traité comme quelqu’un de spécial, Il ne
serait pas Celui que je pensais qu’Il était. Mon faux moi semblait
omniprésent et m’être reflété de toutes les directions. Comme je l’ai noté dans
mon journal intime, c’était ‘’une hydre à mille têtes qui récupérait tout ce que
je pensais ou tout ce que je faisais’’. Je me suis rappelé à moi-même d’être
simplement le témoin de ceci. Je pouvais voir que cela allait être compliqué
de me libérer de mes attachements.
Sai Baba a continué de m’ignorer, mais je n’ai jamais ressenti qu’Il me
rejetait, parce qu’Il était toujours présent dans ma conscience intérieure.
Extérieurement, Il ne manifestait aucune ‘’reconnaissance’’ et Il ne m’a pas
demandé de venir pour un entretien, comme Il le faisait pour quelques
heureux élus à l’occasion de chaque darshan. Le troisième jour, vers 4 heures
du matin, dans ma chambre, mon tourment résultant de ne recevoir aucune
reconnaissance a atteint un sommet. Je désespérais et j’envisageais même de
partir. Et soudain, j’ai senti le parfum caractéristique de la vibhuti, la cendre
sacrée que Sai Baba matérialise. Il y avait un petit paquet scellé à moins d’un
mètre de moi et j’ai pensé qu’il pouvait s’agir de cela et je l’ai approché de
mon nez, mais je n’ai rien pu sentir. Les larmes aux yeux, j’ai remercié Sai
Baba, mais mon faux moi a soulevé des doutes. C’est alors que le parfum du
jasmin s’est fait sentir. J’ai recommencé à douter et j’ai reniflé le paquet. Puis,
le parfum est revenu et cette fois-ci, j’ai cru. J’ai ressenti de manière palpable
la présence, la compassion et le souci de Sai Baba. J’ai su que Son amour était
toujours avec moi, tout comme aux Etats-Unis. Je me suis senti
immensément encouragé et soulagé et je me suis engagé à rester les trois
semaines complètes que j’avais prévues, quoi qu’il advienne. Le lendemain
matin, j’ai acheté un paquet de vibhuti et quand Il est passé, je le Lui ai offert
103
de tout mon cœur pour qu’Il le bénisse, en reconnaissance de Sa compassion
et de Son amour et Il l’a fait.
Sai Baba a quitté Ooty pour Brindavan où Il est resté pendant deux jours. J’y
ai expérimenté dans mon cœur le sentiment puissant de Sa présence d’amour
en attendant le darshan. J’ai alors su plus profondément qu’auparavant qu’Il
n’est pas la forme physique, mais qu’Il transcende la réalité ordinaire. Il n’y a
pas d’endroit où Il n’est pas. J’ai senti que Baba m’avait donné une pratique à
suivre qui était de Le voir en chacun et en toute chose. J’ai écrit : ‘’Je puis
troquer mon ego pour le tout ou bien m’accrocher à lui et avoir une vie
limitée. Renoncer à mon ego me semble être un faible prix à payer pour le
tout.’’
Le lendemain, Il est retourné à Son ashram de Puttaparthi. Par contraste avec
Ooty, il y avait là-bas des milliers de personnes. Initialement, je n’avais
aucun désir d’entrevue, puisque je L’avais toujours avec moi. Mais par la
suite, j’ai été rattrapé par le désir d’entrevue de tous les autres Occidentaux et
je me suis aussi mis à en vouloir une. Je me suis associé à mon compagnon de
chambre et à une autre personne pour former un groupe. La coutume est que
si un membre du groupe est choisi pour une entrevue, tous peuvent y aller.
Mon esprit était plein de questions à Lui poser, au cas où nous serions choisis.
Je savais que tout ce que Sai Baba voulait de moi ou de qui que ce soit, c’était
que nous apprenions à ouvrir nos cœurs. Il ne demande jamais d’argent ni des
choses matérielles à personne. J’ai donc travaillé à approfondir mon amour en
pensant que si je réussissais, alors Il me reconnaîtrait. Au départ, je n’ai pas
vu que mon faux moi était l’artisan du projet. Ensuite, je me suis appliqué à
me détacher de mon désir d’avoir ce que je considérais comme ma relation
spéciale avec Lui reconnue par Lui et j’ai essayé d’être simplement là, dans
l’amour et dans la dévotion, comme la plupart des Indiens semblaient l’être.
Mais je voulais encore la confirmation qu’Il était bien le Maître que je pensais
qu’Il était. A ce moment-là, il était évident que je ne L’avais jamais vraiment
accepté comme étant mon Maître et que je Le testais, même si la plupart de
mes tests n’étaient pas planifiés. Je Lui tendais une note ou je demandais une
entrevue en comprenant ultérieurement, quand elles étaient ignorées et quand
mon faux moi était meurtri que, s’Il avait agi comme le voulait mon ego, Il
ne serait pas Celui que je croyais qu’Il était. Il n’a jamais raté un seul de mes
‘’tests’’ et chacun d’eux a exacerbé la conscience de mes attachements.
Mon esprit était rempli de questions et lorsqu’elles étaient résolues, de
nouvelles questions venaient prendre leurs places dans une procession
interminable. Mon mental n’était jamais tranquille et ne prétendait pas cesser
104
d’essayer de calculer quoi faire. J’étais à l’évidence attaché à mon mental. Je
me suis demandé si je pourrais renoncer à mon sentiment d’être spécial et à
mon besoin d’être reconnu pour pouvoir être un avec Sai Baba. Tant que je Le
voyais comme une personne séparée, je savais que j’étais pris dans la dualité.
Jusqu’ici, tout ce que je Lui avais offert, c’était diverses manipulations pour
qu’Il fasse ce que voulait mon faux moi. M’accrocher à mes attachements ne
faisait souffrir que moi. Je voulais simplement avoir de la dévotion et de
l’amour pur au lieu d’un mental qui posait des questions. J’ai écrit : ‘’Puis-je
renoncer à ce sentiment d’être spécial pour être un avec Dieu ?’’ Puis, je me
suis tracassé au sujet de ce qui arriverait si je lâchais réellement mon faux
moi pour m’abandonner complètement à l’Un. Il me semblait que je n’étais
qu’une foule de réactions et d’attachements qui toutes reflétaient mon faux
moi. ‘’Mon ego est vif comme l’éclair. Je l’extirpe et il ne disparaît que pour
se reformer.’’ Mon faux moi se sentait menacé et il défendait chèrement sa
peau en soulevant frénétiquement des questions, en essayant de cerner ce qui
se passait et en perpétuant son attachement à être reconnu comme spécial.
Simultanément, je savais que ce que j’expérimentais était un enseignement
parfait, même si je n’appréciais guère cette ‘’perfection’’.
Tout au long du processus, Sai Baba resta comme d’habitude accessible pour
moi dans ma conscience, mais pas dans Sa forme physique. Lorsque j’étais
dans mon cœur, Il était là ; lorsque j’étais dans mon mental, Il était là, mais
plus distant. Il avait été parfait en ne reconnaissant pas mon faux moi et
néanmoins, j’ai toujours ressenti Sa compassion inconditionnelle. Je savais ce
qui était en jeu – renoncer à tout ce à quoi je m’étais identifié comme étant
‘’moi’’. Il n’y avait rien que je puisse faire, hormis cesser d’être attaché à mon
mental et à ses pensées et j’ai donc cessé de saisir mes pensées en ne leur
prêtant aucune attention et en ne m’impliquant pas avec. J’ai demandé Son
aide pour ce faire.
Un changement subtil s’est alors produit et mon esprit est devenu beaucoup
plus calme. Je savais que tout ce que je pouvais faire, c’était m’en remettre à
Son cœur. Mon faux moi avait peur. M’abandonner totalement signifiait
défaire tout attachement à l’égard de mon moi personnel et me dissoudre
dans l’Amour. Il avait amené mes attachements les plus profonds à l’avantplan. Mon faux moi tentait tous les trucs possibles pour empêcher la
dissolution dans l’unité en s’attachant plus particulièrement au fait d’être
spécial, en cherchant la reconnaissance et à obtenir une entrevue. En désirant
ces choses, je restais identifié au faux moi et j’éludais l’Amour. Je réalisai
qu’être dans un groupe pour améliorer mes chances d’avoir une entrevue
n’était qu’une autre combine de mon faux moi pour amener Sai Baba à me
reconnaître et je l’ai donc quitté, à la grande surprise des autres. Je savais que
105
Baba me donnait précisément l’enseignement de détachement dont j’avais
besoin au lieu d’être manipulé par le désir de mon faux moi d’une expérience
canon qui augmenterait mon sentiment d’être spécial, mais qui laisserait mon
faux moi intact. Tout était réellement parfait.
Le lendemain matin, alors qu’un des membres de mon ancien groupe partait,
il a été invité pour une entrevue. Mon compagnon de chambrée l’a suivi, mais
je n’ai pas bougé. Je me suis demandé si je n’étais pas dingue de laisser passer
ce que tout le monde semblait vouloir, mais je savais que c’était juste que je
n’y aille pas. Je ne ressentais aucun attachement quant au fait d’y aller ou pas.
Je continuais de pratiquer le détachement dans mon esprit et j’ai eu une
expérience de Baba posant l’index sur Ses lèvres d’une façon très
compatissante et affectueuse et me disant d’être à l’aise et de laisser mon
esprit se pacifier.
Le lendemain au darshan, j’avais une note qui était dépourvue d’attachement,
selon moi. J’étais au septième rang, trop loin pour pouvoir la donner. Je me
sentais triste en raison du sentiment de séparation que je ressentais par
rapport à Baba. Il m’est aussi apparu que je ressentais une distance par
rapport à mon compagnon de chambrée. Je savais qu’il me critiquait
silencieusement depuis qu’il était arrivé. La peine provoquée par cette
distance est devenue trop forte et quand je l’ai vu, je lui ai demandé s’il était
mécontent de moi et si j’avais fait quelque chose qui l’offensait. Il avait une
liste d’un kilomètre sur la manière dont je n’avais fait preuve d’aucune
considération en voulant que tout soit à ma mode, en ne partageant pas la
chambre comme il fallait, en ne faisant pas ce qu’il estimait que je devrais
faire pendant le darshan, etc., etc., etc. Même si je savais qu’elle le reflétait lui,
je réalisai que l’essentiel était également vrai, en ce qui me concerne. Mon
cœur ne s’était pas complètement ouvert à lui. J’avais réagi, lorsqu’il m’avait
dit la bonne manière d’agir à l’ashram et lorsqu’il m’avait pris en défaut,
quand je n’agissais pas ‘’bien’’. Je m’étais demandé pourquoi il était mon
compagnon de chambrée en sachant que ce n’était pas un accident.
Désormais, je savais que Baba l’avait envoyé pour m’aider à devenir plus
conscient de ma propre nature critique en voyant celle-ci réfléchie dans mon
compagnon de chambrée.
Après avoir reconnu que mon compagnon de chambrée était pour moi un
miroir, mon cœur a voulu guérir de la séparation que je ressentais par rapport
à lui. Je m’étais tellement focalisé sur Baba que je n’avais pas vu que mon
compagnon de chambrée était aussi Baba. Mon cœur n’avait pas été
inconditionnellement ouvert ni à l’un, ni à l’autre. Après l’avoir reconnu, j’ai
senti que mon cœur s’ouvrait à mon compagnon de chambrée et je suis allé lui
106
parler après le darshan. Il était avec quelqu’un d’autre, quand je l’ai trouvé. Je
ne ressentais à son égard que de l’amour. Mon cœur s’était enfin ouvert.
Quand je lui ai dit que je voulais lui parler, j’ai pu sentir son appréhension.
Nous nous sommes vus plus tard et je lui ai dit que je savais à quel point
j’avais été difficile avec lui. Je lui ai dit que tout ce que je ressentais à son
égard, c’était de l’amour ; je lui ai dit que je voyais en lui un instructeur
presque aussi important que Baba et que je pensais que Baba l’avait envoyé
pour m’instruire. Il était plutôt perplexe. J’ai écrit : ‘’Il (mon compagnon de
chambrée) était parfait – toutes les choses que je trouvais difficiles à aimer.’’
Lorsque mon cœur s’est ouvert à mon compagnon de chambrée, qui est l’Un,
comme nous tous, ce fut comme un aboutissement du passage de mon faux
moi dans le cœur. Non seulement mon cœur s’était ouvert à mon compagnon
de chambrée, mais à Sai Baba et à tout le monde, mon faux moi y compris.
Mon esprit était calme à présent. Les questions interminables avaient cessé.
Le désir d’être reconnu avait disparu. J’avais expérimenté puissamment
comment la compassion et l’amour sont réellement tout ce qui compte, ce qui
me reconfirmait l’enseignement que Sai Baba m’avait donné antérieurement
que l’Amour seul est réel. Je savais que je n’étais réellement pas spécial, ni
moi, ni personne d’autre. L’Un compatissant nous englobe tous pareillement.
J’étais assis au premier rang et j’avais une note remerciant Sai Baba pour Son
enseignement, même si en Le voyant, j’ai su que je dirais simplement merci.
Il s’est arrêté juste devant moi et ne m’a pas regardé. Ma note était oubliée.
Tout ce que je voulais faire, c’était toucher Ses pieds et ressentir Son amour,
ce que j’ai fait et j’ai murmuré un merci, tandis qu’Il s’éloignait. Je n’avais
que de l’amour et de la dévotion.
Même après cette expérience, mon faux moi est non seulement resté, mais il
a entrepris de s’attribuer le mérite de ce que mon cœur avait fait avec mon
compagnon de chambrée. Je savais que c’était parce que mon faux moi se
sentait menacé par l’Amour et qu’il tentait de trouver le moyen de réaffirmer
son emprise sur moi et de saboter l’amour et l’unité croissants que je
ressentais. Il n’allait pas capituler aussi facilement.
Cette nuit-là, Sai Baba m’a joué un tour. Mon compagnon de chambrée avait
été inflexible concernant la porte de la salle de bain qui devait être fermée
pendant la nuit, parce que la dernière fois qu’il avait séjourné à l’ashram, des
cafards s’étaient faufilés par la plomberie. Je trouvais cela idiot parce que,
quand la porte était fermée, il restait un espace d’environ un pouce entre le
sol et la porte, largement suffisant pour n’importe quel cafard, et donc cela
m’arrivait d’oublier de fermer la porte pendant la journée et c’était l’une des
107
choses qui le mettaient en rogne. J’ai été réveillé par quelque chose qui courait
et qui m’est passé dessus. J’ai réagi et mon compagnon de chambrée qui était
éveillé a allumé. C’était un énorme cafard, comme ceux que redoutait tant
mon compagnon de chambrée ! J’avais pris sa peur à la légère et j’en récoltais
les conséquences. Je savais que Baba avait envoyé le cafard et qu’Il était le
cafard. Je L’ai expérimenté dans ma vision intérieure qui se réjouissait et qui
riait beaucoup de ce petit enseignement. J’avais souvent expérimenté qu’Il
aimait s’amuser, mais c’était la première fois qu’Il me jouait un tour à mes
dépens !
Je devais partir, le lendemain matin. Au darshan, j’ai laissé passé l’option
d’être placé au premier rang, comme c’était possible le dernier jour et j’ai pris
part au tirage au sort des lignes et je me suis retrouvé au septième rang.
J’avais une note qui demandait Sa bénédiction et qui exprimait mon amour et
ma dévotion. Je voulais qu’Il accepte ce symbole de mon amour. Je savais que
j’étais beaucoup trop loin pour pouvoir Lui transmettre ma note, mais ceci ne
semblait pas être un problème. J’ai soigneusement déterminé une ‘’route’’ et
j’étais prêt à me lever et à avancer, lorsqu’Il passerait. Normalement, Ses
assistants empêchent quiconque de le faire, mais je savais que j’allais essayer.
J’ai senti mes forces se rassembler, tandis qu’Il s’approchait et au bon
moment, je me suis levé et je me suis mis à avancer. Il m’a regardé et Il m’a
fait signe d’avancer et Il a accepté ma note et mon cœur. J’étais rempli
d’amour et je L’ai remercié, tandis qu’Il s’éloignait. Je ne voulais rien de plus.
Tout ce que je voulais m’avait été donné.
Alors que je m’attardais après le darshan, un Indien m’a dit que Baba m’avait
invité pour une entrevue. Soit que cela ne m’avait pas intéressé ou que je ne
m’en étais pas aperçu. Il était beaucoup trop tard pour y aller. Une part de
moi a réagi pour avoir raté quelque chose, alors que l’autre savait que c’était
parfait. Baba me signalait que j’étais toujours quelque peu attaché à mon faux
moi qui Le voyait comme une personne séparée. Une entrevue aurait
consolidé cette illusion. J’ai lu plus tard : ‘’L’entrevue, c’est quelque chose de
petit ; cela fait de vous quelqu’un de séparé’’ (Sai Baba, 1988, p.166). A
nouveau, Baba m’avait donné un enseignement parfait, même s’il est difficile,
l’enseignement qu’il me faut renoncer à tout attachement à Lui en tant que
personne séparée de moi-même. J’ai dit au-revoir, les larmes aux yeux.
Pendant tout ce temps, Baba n’a accepté que ce qui venait du cœur, rien
d’autre. Il a ainsi mis mes attachements en lumière en ne soutenant ou en ne
confirmant pas une seule fois mon faux moi. En réaction, mon faux moi en a
eu le tournis, perpétué par ses attachements jusqu’à ce que je puisse me
défaire de ces attachements et permettre à mon cœur de s’ouvrir. Tout au
108
long du processus, j’ai expérimenté Sai Baba comme un Amour et une
Compassion inébranlable et indéfectible, un miroir du Soi au-delà de
l’illusion de la séparation.
Depuis cette visite, je n’ai plus ressenti aucun besoin de retourner en Inde, car
Sai Baba est toujours là où je me trouve. Sa Conscience continue de
m’enseigner que l’Amour seul est réel, encourageant ainsi l’étiolement de
mon faux moi et le déploiement de ma vraie nature.
109
CHAPITRE 11 : SE LIBÉRER DU FAUX MOI
‘’Amanaskam signifie la réalisation que l’univers entier n’est rien d’autre que
Brahman, qui est la seule Réalité. Quand il y a cette réalisation de Brahman – l’Un
sans second – même le mental cesse d’exister. Ce ne sont que les opérations du mental
qui résultent dans la perception de la diversité dans l’univers. Quand l’unité est
expérimentée, il n’y a plus du tout de mental. Tout est Brahman dans cet état de
conscience. Il n’y a de la place que pour Prema (l’Amour) dans cet état’’ (Sai Baba,
1996a, p.204).
Dans les précédents chapitres, nous avons appris comment nous affranchir de
notre attachement à divers aspects du faux moi pour que nos cœurs puissent
s’ouvrir plus pleinement à l’Amour. Il est maintenant temps de tout intégrer
et de nous concentrer sur la façon de nous défaire globalement de notre
attachement au faux moi. Nous restons identifiés au faux moi par le biais des
pensées. C’est pourquoi Sai Baba dit dans la citation précédente que, lorsque
nous connaissons le Soi qui est l’Amour, ‘’il n’y a plus du tout de mental’’.
Quelle déclaration extraordinaire ! Et néanmoins, elle est vraie. La
compréhension de l’Amour que j’ai reçue ne provenait pas des pensées.
Aucune pensée n’était présente. Comme Sai Baba l’explique : ‘’Votre mental
est la cause de votre incapacité à comprendre la vraie nature du monde’’ (1990, p.147.)
C’est seulement quand les pensées sont parties que nous pouvons nous
affranchir du faux moi, parce que l’illusion du faux moi n’est créée et n’est
maintenue que par les pensées et n’existe nulle part ailleurs que dans notre
mental. L’illusion commence avec la pensée que nous avons (ou que nous
sommes) un corps. ‘’Quand cet Aham s’identifie au corps, Il devient Ahamkara.
C’est le faux je et pas le Je réel. Ce qui cache l’Atma, c’est toujours le mental…Aussi
longtemps que le mental est là, l’homme ne peut pas espérer comprendre quoi que ce
soit au sujet du Soi, sans parler de réaliser ou d’expérimenter la félicité du Soi…Le
‘’Je’’ sans le mental, c’est l’Atma ou le Soi dans sa pureté immaculée. Le ‘’Je’’ plus le
mental, c’est le faux moi ou Mithyatma’’ (Sai Baba, 1990, p.115-116).
Au fil des ans, le mental développe cette fausse identité avec des pensées qui
définissent et qui décrivent ce prétendu moi. Toutes ces pensées supposent
l’existence d’un moi qui les pensent, comme vous pouvez le confirmer en
tentant de découvrir une pensée qui ne suppose pas que vous la pensez. Cette
succession constante des pensées, chacune présumant l’existence du faux moi,
crée l’illusion que ce moi est réel. Les pensées sont comme les images
individuelles d’un film. Si vous projetez une succession de pensées
suffisamment rapidement sur votre écran intérieur, celles-ci donnent
l’illusion que le faux moi existe. Néanmoins, le moi que vous pensez être
n’est que cela – une pensée, et rien de plus. Lorsque vous vous réveillez le
110
matin, vous rappelez à la vie le faux moi en vous identifiant à des pensées
concernant votre identité d’hier et en reprenant cette identité en agissant
comme si elle était vraie. Sans le réaliser, vous vous recréez vous et votre
monde d’instant en instant à partir de l’énorme entrepôt de souvenirs et
d’histoires qui concernent votre passé.
Puisque l’illusion du faux moi n’est maintenue que par des pensées, si ces
pensées devaient stopper, l’illusion s’écroulerait et seul l’Amour existerait.
‘’Quand l’unité est expérimentée, il n’y a plus du tout de mental…Il n’y a de la place
que pour Prema (l’Amour) dans cet état.’’ Alors, pour purifier notre cœur, nous
devons cesser de nous identifier à notre mental. On parle souvent
d’apprendre à contrôler le mental, mais ce n’est pas une question de contrôler
notre mental, mais d’éviter d’être contrôlé par lui. Si nous essayions de
contrôler le mental, qui serait en charge du projet ? Le mental, bien entendu !
Pour maîtriser le mental, nous devons nous détacher de lui. Tant que nous
nous identifions au mental et que nous restons attaché à lui, il nous
contrôlera et perpétuera l’illusion d’être le faux moi en nous séparant ainsi de
l’Amour. Sai Baba explicite :
‘’Il est important de reconnaître que tant que le mental est là, les désirs ne vous
quitteront pas. Tant que vous avez des désirs, la notion fausse du ‘’je’’ et du ‘’mien’’
ne vous quittera pas. Tant que le sentiment du ‘’je’’ et du ‘’mien’’ est là, Ahamkara –
votre identification erronée au corps – ne vous quittera pas. Tant qu’Ahamkara ne
vous quitte pas, Ajnana, l’ignorance, ne vous quittera pas non plus. En pratique, cela
signifie qu’il n’y a pas d’autre moyen que l’anéantissement du mental pour obtenir
Atma-jnana, la connaissance du Soi ou Atma-darshan, la vision du Soi ou
Atmananda, la félicité du Soi, quel que soit le nom que vous choisissiez de lui donner.’’
(1990, p.116-117).
Sai Baba nous dit que pour connaître le Soi qui est l’Amour, nous devons
‘’anéantir le mental’’. Comment anéantit-on le mental ? ‘’C’est uniquement par
l’amour que vous pouvez anéantir le mental…’’ (Sai Baba, 2000c, p.233).
Kabir (1984), un jnani du 15ème siècle, le dit plus poétiquement :
‘’Comme un oiseau volage,
Le mental ne cessera de voleter
Dans la jungle des désirs
Et continuera de se percher
Sur l’arbre des passions,
Tant que le faucon de l’amour
Ne fondra pas sur lui’’ (p.604).
111
Sai Baba (1999h) cite le Bouddha : ‘’Le mental s’interposait entre moi et
l’autoréalisation. Aujourd’hui, je suis délivré de l’emprise de mon mental. C’est la
cause de ma félicité. Si le mental est absent, la félicité est là’’ (p.222). Néanmoins, le
faux moi ne croira jamais que l’autoréalisation, la félicité et l’Amour vont se
produire, si le mental ne contrôle pas et il est donc peu probable que le faux
moi adopte tout bonnement l’idée d’anéantir le mental. Il générera plutôt
toutes sortes de doutes, de craintes et d’inquiétudes pour tenter de vous
convaincre que vous affranchir du mental est une très mauvaise idée, fou, ne
fonctionnera pas ou bien est impossible. Il vous effraiera à l’idée de perdre
l’esprit ou de devenir un légume. Ramesh Balsekar (1992) fait une distinction
utile entre ce qu’il appelle ‘’l’esprit pensant’’ et ‘’l’esprit agissant’’ qui peut
dissiper certaines craintes du faux moi. L’esprit pensant, c’est l’esprit
conceptualisateur qui juge, questionne, compare, doute, redoute, analyse,
étiquette, soupèse, désire, s’inquiète, spécule et imagine, bref qui pense,
essentiellement. L’esprit pensant est la source de toutes les pensées qui
bloquent le cœur. C’est ce que Sai Baba appelle ‘’l’esprit de singe’’. L’esprit
pensant est ce qui maintient l’illusion du faux moi, le sentiment de ‘’je’’ ou de
‘’moi’’. Donc, c’est l’esprit pensant qui vous sépare de l’Amour.
L’esprit agissant, lui, utilise la mémoire, mais il s’absorbe totalement dans ce
qu’il fait dans l’instant présent sans se soucier du passé ni de résultats futurs.
L’esprit agissant n’a pas le sentiment d’un ‘’je’’ ou d’un ‘’moi’’ qui fais
quelque chose. Il y a juste une action qui se produit. Nous avons tous fait
l’expérience de l’esprit agissant, quand il semble que l’action se produit toute
seule, lorsque nous sommes totalement absorbés dans ce qui se passe, sans
séparation. Le temps n’existe pas. Les athlètes disent que leurs meilleures
performances se produisent, lorsqu’ils ne pensent pas à ce qu’ils font, quand
ils sont ‘’dans la zone’’. Quand il y a ce type d’occurrence spontanée sans
l’interférence de l’esprit pensant, il n’y a aucun sentiment d’être
l’auteur/l’acteur jusqu’à ce que l’esprit pensant se coupe du présent et
remarque ce qui se passe. Je me rappelle une fois où je conduisais ma voiture
et la distinction entre moi et tout ce qui est s’est dissoute et il n’y avait plus
de moi, simplement l’unité. Cela a continué jusqu’à ce que mon esprit
pensant me coupe du présent en étant captivé par ce qui arrivait, ressuscitant
par là même mon moi et le dualisme et mettant un terme à l’unité. Quand
j’enseigne le processus de la purification du cœur, je cesse de m’identifier à
mon esprit pensant pour qu’il ne s’immisce pas et l’esprit agissant répond
spontanément sans penser à ce qui se passe, ce qui me surprend parfois.
‘’Mon‘’ meilleur travail se produit ainsi. J’y songe comme à laisser Sai Baba
faire le travail.
112
Même si nous avons certainement utilisé notre esprit pour apprendre
comment faire les choses, nous sommes plus habiles, plus productifs et plus
créatifs en l’absence de l’esprit pensant. Prenons par exemple les réalisations
du mathématicien Henri Poincaré concernant les fonctions fuchsiennes,
l’éveil de Richard Wagner à la musique de l’Or du Rhin, la musique
d’Amadeus Mozart lui venant d’une traite comme une œuvre finie, les
inventions électroniques de Nikola Tesla, la compréhension d’August Kekulé
des structures moléculaires et Longfellow, Shelley et Goethe qui
expérimentent l’écriture qui leur vient. ‘’Créativité Transcendante’’ (Harman
et Rheingold, 1984) explique en détail ces exemples et beaucoup d’autres. Une
compréhension spirituelle plus profonde m’est venue, lorsque je ne pense pas
à ce qui m’est révélé ni ne fais quelque chose qui est même lié. Cela survient,
quand mon esprit pensant n’est pas présent, comme quand je conduis ma
voiture, quand je marche, quand je médite, quand je fais presque tout sauf
rechercher une compréhension à l’aide de mon esprit pensant. Je sais que mon
esprit pensant n’a pas provoqué les expériences qui ont révélé ma vraie
nature. Si vous y repensez, beaucoup de tournants dans votre vie ne se sont
pas produits, parce que vous les avez faits se produire ; ils se sont simplement
produits, souvent d’une manière que vous n’auriez jamais pu imaginer. Si
l’esprit pensant et le faux moi ne sont pas la cause de ce qui survient, qui l’est
alors ? L’Un, bien sûr. Considérez que le faux moi n’a jamais déterminé ce
qui survient.
Pour nous libérer du faux moi, nous devons nous désidentifier de l’esprit
pensant et de ses pensées conceptuelles. Vous pouvez dire si l’esprit pensant
est présent, parce qu’il y aura toujours un sentiment du ‘’je’’ ou du ‘’moi’’,
tandis que celui-ci sera absent dans l’esprit agissant. Les pensées
conceptuelles nous maintiennent dans le dualisme et perpétuent notre
attachement au faux moi en nous séparant de l’Amour. Les pensées
conceptuelles sont un moyen favori par lequel le faux moi protège et assure
son identité, parce que de telles pensées supposent un moi séparé qui
conceptualise au sujet d’une réalité apparente autre que lui-même. La pensée
conceptuelle personnifie le dualisme et bloque l’Amour. Quand nous laissons
libre cours à la pensée conceptuelle, nous ne sommes pas vraiment là, parce
que nous nous sommes coupés de l’unité pour décrire, étiqueter, analyser,
définir, comparer, classer, nous souvenir, imaginer, interpréter, juger ou
comprendre. Ceci nous détourne d’être vraiment ici et maintenant, alors que
ce n’est qu’en étant pleinement présent que l’Amour est possible. Tant que
nous laissons libre cours à la pensée conceptuelle, nous jetons un voile sur
l’Un qui est l’Amour.
113
Peut-être doutez-vous que se libérer du mental soit possible. Il est vrai que le
mental ne va pas ‘’entrer gentiment dans cette bonne nuit’’1, mais il est
possible de vous libérer du mental. Arjuna lui aussi avait des doutes : ‘’En
vérité, le mental est capricieux, puissant, prompt et changeant…Je l’estime aussi
difficile à détruire que le vent, ô Krishna.’’ Krishna répond : ‘’Sans aucun doute, ô
guerrier aux bras puissants, le mental est difficile à maîtriser et remuant, mais par la
pratique et l’indifférence envers les objets matériels, on peut le maîtriser, ô fils de
Kunti’’ (Bhagavad Gita, VI, 34-35). Sai Baba acquiesce: ‘’Par la pratique
systématique (abhyasa), l’investigation (viveka) soutenue et le détachement
(vairagya), le mental peut être maîtrisé’’ (1966, p.91). Il est encourageant de
savoir que deux Avatars nous certifient que nous pouvons maîtriser notre
mental. Pour cela, il nous faut pratiquer le détachement (vairagya) à l’égard
de l’esprit pensant. ‘’Pour réaliser Dieu, des pratiques comme la répétition du Nom
de Dieu sont peu utiles. L’essentiel, c’est amanaska (faire taire le mental)’’ (Sai
Baba, 1999h, p.163). En faisant taire l’esprit pensant, nous nous libérerons du
faux moi.
FAIRE TAIRE L’ESPRIT PENSANT
Nous ne pouvons pas directement faire taire le mental, car qui le ferait ? Le
faux moi, bien sûr. Le faux moi serait responsable d’une telle tentative et
garderait le contrôle. Ainsi, il n’y a rien que nous puissions faire pour nous
libérer du faux moi et du mental. En lieu et place, nous devons cesser de faire
en cessant de nous identifier aux pensées, parce que les pensées maintiennent
l’illusion du faux moi. Les pratiques spirituelles qui requièrent que le faux
moi fasse quoi que ce soit assurent l’identification prolongée avec ce moi.
Quand nous cesserons de nous identifier aux pensées qui soutiennent le faux
moi, elles et le faux moi s’effaceront graduellement. Nous devons aussi nous
désidentifier de toute attente ou de tout résultat que nous espérerions voir se
produire suite à la pratique du détachement, comme l’apparition de l’Amour.
Pour vous désidentifier des pensées, observez-les, comme cela a été décrit
auparavant. Faire taire le mental sera difficile dans la mesure où vous êtes
attaché aux pensées et aux opinions et sera empêché par tout attachement
restant à l’égard de ce que ces pensées et de ce que ces opinions ont créé. Par
conséquent, si vous trouvez que votre attachement continu aux créations de
vos pensées interrompt votre pratique, appliquez-vous de nouveau à vous
défaire de ces attachements jusqu’à ce qu’ils diminuent suffisamment pour
que vous puissiez reprendre la pratique avec les pensées qui sont leur source.
1
Allusion à un poème de Dylan Thomas, ‘’Do not go gentle into that good night’’
114
Au fur et à mesure où votre capacité à être le témoin s’approfondit, l’esprit
pensant et le sentiment d’être un témoin reculent ou s’estompent.
Ultimement, il n’y a plus de témoin distinct, mais juste une contemplation,
comme lorsque vous écoutez de la musique, le sentiment d’écouter disparaît
et il n’y a plus que la musique. L’esprit pensant a disparu.
Le concept du faux moi
Le concept d’être un moi distinct est la base de toutes les autres pensées
conceptuelles, donc nous commençons à nous désidentifier des pensées
conceptuelles en commençant par le concept de soi. Le concept de soi inclut
toutes les moyens que nous avons appris pour décrire et définir le faux moi,
comme sa personnalité, son apparence physique, ses capacités, son histoire,
ses rôles dans la vie, ses occupations, ses relations et ses convictions. Nous
avons construit nos vies autour de ces convictions de base qui concernent qui
nous sommes. Si nous croyons que nos concepts de nous-mêmes sont
vraiment qui nous sommes, cette conviction crée nos mondes à son image,
‘’confirmant’’ ainsi cette conviction et la perpétuant. Nos concepts de nousmêmes n’ont en fait pas d’autre réalité que celle que nos pensées leur
donnent.
Vous détacher de votre idée de vous-même peut être difficile, mais le faire est
essentiel. Une raison pour laquelle vous pouvez rester attaché à votre idée de
vous-même, c’est que vous croyez que celle-ci est vraie et qu’y renoncer
voudrait dire vous perdre. Pour pratiquer le détachement vis-à-vis de cette
idée de vous-même, vous devez d’abord prendre conscience des convictions
qui constituent son essence. Ces convictions sont toujours implicites dans vos
pensées et dans vos actions, mais vous pouvez ne pas en être conscient. Une
façon de les découvrir, c’est d’établir une liste avec les qualités et les
caractéristiques les plus importantes qui constituent votre identité, ce qui fait
que vous êtes vous. La plus fondamentale, c’est la pensée ou la conviction
d’être le corps ou un individu distinct, suivi par tout le reste que vous
identifiez comme moi ou mien. Pratiquez le détachement à l’égard de votre
concept du moi en vous désidentifiant de toute pensée qui le reflète ou qui
l’affirme. Une autre façon dont vos attachements à votre idée de vous-même
sont mis en lumière, c’est quand quelqu’un ou quelque chose les remet en
cause. Si vous réagissez en niant, en étant sur la défensive ou par de la colère,
c’est un signe certain que vous avez un attachement. Par exemple, si le fait de
pouvoir vous entendre avec tout le monde fait partie intégrante de l’idée que
vous avez de vous-même et si quelqu’un signale une contradiction, vous le
rejetterez et vous vous défendrez ou vous vous expliquerez d’une façon ou
115
d’une autre. La conviction que vous êtes spécial est remise en cause, si une
personne dont l’opinion vous importe vous traite autrement.
Une fois que vous reconnaissez être attaché, découvrez quel est votre
investissement dans le fait de continuer à vous attacher à cet aspect
particulier de votre concept de vous. Par exemple, si vous étiez attaché au fait
d’être vu comme quelqu’un d’honnête, cela voudrait sans doute dire qu’être
perçu comme quelqu’un de malhonnête serait inacceptable. Vous pratiqueriez
alors le détachement vis-à-vis de la pensée d’être considéré comme
malhonnête. Découvrez d’abord pourquoi vous devez être vu comme
quelqu’un d’honnête. Cela pourrait être dû à une conviction sous-jacente
comme : ‘’Si on me perçoit comme quelqu’un de malhonnête, personne ne
m’aimera et j’ai besoin qu’on m’aime.’’ Ce besoin est le reflet d’une peur sur
ce qui arriverait si les gens ne vous aiment pas, comme vous retrouver tout
seul. Découvrez cette peur et pratiquez le détachement jusqu’à ce que vous
n’ayez plus aucune appréhension. Une fois que vous vous serez détaché de
cette peur, votre attachement à être vu comme quelqu’un d’honnête se défera
beaucoup plus facilement.
Un homme m’a dit qu’il était son intellect puissant et que sans lui, il ne serait
‘’rien’’. Il ne pouvait rien imaginer de pire que n’être rien. Cela signifiait la
fin de sa vie. Par conséquent, son objectif fut de s’ouvrir et d’accueillir la
pensée de n’être rien et du terme de sa vie. Cela nécessita d’apprendre à être
pleinement présent avec cette pensée sans l’éviter jusqu’à ce qu’il puisse
complètement l’accepter et que son cœur puisse s’ouvrir à elle. Le fait de
réaliser que vous réagissez à une réalité créée par vous-même et qui n’a
aucune existence au-delà de celle que vos pensées lui confèrent facilite le
lâcher-prise et le renoncement à votre attachement.
En pratiquant le détachement vis à vis du concept de vous-même, vous
pourriez commencer à remarquer qu’il y a une conviction fondamentale qui
vous personnifie ou qui vous définit. Vous pourriez même ne pas être
conscient de cette conviction de base, mais celle-ci se reflétera dans tout ce
que vous faites, dans votre comportement, dans vos relations et dans votre
attitude envers la vie. Elle est toujours là, comme l’air que vous respirez, mais
invisible. Par exemple : ‘’Je ne peux jamais faire totalement confiance à
quelqu’un’’, ‘’Je dois toujours plaire aux autres pour qu’ils m’aiment’’, ‘’Le
monde est là pour mon plaisir’’, ‘’Je suis indigne’’, ‘’Je dois m’occuper de moimême, parce que personne d’autre ne le fera’’, ‘’Je suis spécial’’… Découvrez si
vous avez une telle conviction ou une telle attitude de base envers la vie, puis
appliquez-vous à vous désidentifier d’elle et de toutes les actions qui en
découlent. Refusez d’avaliser votre concept de vous en présumant sa validité
116
et en agissant comme s’il était vrai. Présumez plutôt que vous êtes l’Un qui
est l’Amour.
Concepts spirituels
Essayer de comprendre les concepts spirituels est un piège dans lequel tous les
chercheurs spirituels sont tombés. Le piège se déclenche chaque fois que le
mental s’intéresse à une question spirituelle, comme en essayant de
comprendre l’Illumination, Dieu, le Soi, Jésus, l’Amour, Sai Baba ou tout
autre mystère spirituel. Je me souviens m’être fort tracassé à me demander
comment Dieu pouvait permettre les actions cruelles et sans cœur qui se
produisent régulièrement. Une autre fois, j’ai tenté de comprendre comment
me rendre à la ‘’source des pensées’’, comme Ramana Maharshi semblait le
recommander. Quand j’ai su que le faux moi n’était pas réel, mon mental a
essayé de s’imaginer comment induire l’expérience de ne pas être réel. Toute
cette activité mentale empêche la vraie compréhension qui ne peut venir que
quand l’esprit est immobile.
Poursuivre les concepts spirituels nous empêche de connaître l’Amour,
comme Sai Baba me l’a enseigné en Inde. Le mental ne peut pas répondre aux
questions spirituelles essentielles. Le mental ne sait pas et il ne peut pas
savoir. On ne peut connaître les réponses qu’en transcendant le niveau du
mental. Comme le faux moi ne peut pas savoir ce qu’est le Soi, tout ce qu’il
imagine n’est pas ce qu’Il est. L’Amour est au-delà de toutes les pensées
conceptuelles. Nous ne trouverons la Vérité que nous cherchons que si le
faux moi et son mental conceptuel sont absents, aussi devons-nous cesser de
soupeser des concepts spirituels et de nous laisser embarquer par eux. Quand
nous pourrons les lâcher, le problème disparaîtra, parce que ce n’est qu’un
reflet du faux moi. Tous les vrai dilemmes spirituels ne sont résolus que dans
la Conscience qui est l’Amour.
Les vasanas
‘’Que nous travaillions activement dans le monde ou que nous nous soyons retirés du
monde, la considération la plus importante n’est pas le travail que nous faisons ou que
nous ne faisons pas, mais avec quelle efficacité nous avons été capables de déraciner et
de détruire les vasanas (tendances profondément ancrées) qui sont tapies dans nos
cœurs. La suppression de ces impuretés qui se sont incrustées si profondément est le
but principal de toute sadhana ou pratique spirituelle’’ (Sai Baba, 1997c, p.73.)
117
Les vasanas sont des pensées qui prennent la forme d’impulsions, de désirs et
de tendances mentales auxquels nous sommes profondément identifiés et
attachés. Une fois que nous nous identifions à elles, elles nous conduisent à
l’action. ‘’Les vasanas envahissent le royaume du cœur et causent des troubles
interminables. Elles vous rappellent des plaisirs en agitant le souvenir d’expériences
passées et vous vous remettez à avoir soif de ceux-ci’’ (Sai Baba, 1984b, p.57). Une
vasana peut être une propension ou un désir de biens matériels, de pouvoir,
d’argent, de grandeur, de statut, de plaisir sensuel ou d’autres attractions.
‘’Moksha ou la Libération dans le vrai sens du terme, c’est la libération de l’esclavage
à ces vasanas’’ (Sai Baba, 1984b, p.55-56).
Toute tendance avec laquelle vous avez lutté durant la majorité de votre vie
est sans doute une vasana. Quoique que vous puissiez avoir fait des progrès
dans le détachement par rapport à elle, elle surgit encore et toujours et vous
pensez : ‘’Oh non ! Pas cela encore ! Quand en serai-je jamais débarrassé ?’’
‘’Les montagnes peuvent disparaître plus vite que ces vasanas profondément
enracinées. Mais avec de la volonté et de l’enthousiasme soutenus par la foi, elles
peuvent être vaincues rapidement’’ (Sai Baba, 1984b, p.60). Pour triompher d’elles,
vous devez vous détacher et vous désidentifier des pulsions et pensées de
désir. Par exemple, si vous étiez attaché à devenir quelqu’un de riche et
puissant, vous commenceriez à pratiquer en vous désidentifiant de ce désir,
puis en passant ensuite à la conviction sous-jacente qui le soutient et qui
pourrait être : ‘’Si je suis riche et puissant, les gens m’admireront et me
respecteront.’’ Puis, vous pratiqueriez le détachement par rapport au besoin
que les gens vous admirent en reconnaissant le miroir que vous ne vous
admirez pas vous-même, mais que vous vous jugez indigne de respect. Quand
vous pourrez vous défaire de cet auto-jugement qui ferme votre cœur, le désir
de richesse et de pouvoir aura disparu. La découverte et le détachement par
rapport à nos impulsions et à nos tendances profondes est quelque chose de
vital, autrement elles nous maintiennent identifiés au faux moi.
Nous détacher des vasanas peut être compliqué, tant que nous considérons le
monde comme réel. Par conséquent, nous libérer des vasanas peut nécessiter
de reconnaître que ce que nous expérimentons n’est qu’un reflet de nos faux
mois et dans ce sens est irréel. ‘’Quand la conviction que toutes les expériences
sensorielles sont irréelles sera belle et bien établie, le mental ne fonctionnera plus
comme un agent perturbateur et sera impuissant comme un membre inopérant’’ (Sai
Baba, 1970, p.29). Tant que nous nous identifions à n’importe quel aspect du
faux moi ou de son monde, comme lorsque nous nous impliquons dans des
drames matériels, nous sommes vulnérables face à toute tendance
profondément ancrée qui subsiste. ‘’…A moins que vous ne renonciez à l’idée que
le monde est réel, votre mental courra toujours après. Si vous prenez l’apparence pour
118
être la réalité, vous ne connaîtrez jamais le Réel, bien que seul le Réel existe’’
(Ramana Maharshi, 1988, p.87).
Pour cesser de traiter le faux moi, ses expériences et le monde comme réels,
vous devez cesser de vous identifier à eux, comme les précédents chapitres
vous l’ont indiqué. La clé, c’est de reconnaître que vos pensées créent le
monde auquel vous réagissez. Le monde n’a aucune existence indépendante et
n’est qu’un miroir de votre faux moi. Si vous commencez à vous identifier au
faux moi ou à son monde, détachez-vous et rappelez-vous qu’ils sont juste des
créations de vos pensées. En faisant taire l’esprit pensant, vous vous libérerez
des vasanas et du faux moi.
LA PRATIQUE
Prenez maintenant le temps de prendre conscience de toutes les pensées qui
sont présentes. Tant qu’il y a un je conscient des pensées, ces pensées sont
l’esprit pensant. Toutes les pensées conceptuelles se basent sur le faux moi et
soutiennent par conséquent l’illusion qui nous sépare de l’Amour, ainsi
pratiquez la désidentification envers chaque pensée qui s’élève. Observez
calmement toutes les pensées sans vous intéresser à elles et sans vous
impliquer avec en aucune manière. Permettez-leur simplement d’être là sans
interférer avec en vous accrochant à elles ou en les rejetant. Vous avez déjà
pratiqué le détachement envers certains types de pensées. Maintenant,
désidentifiez-vous de toutes les pensées. N’en assumez même pas la
propriété, car qui en est le propriétaire présumé ? Le faux moi, bien sûr, et
cette supposition ne fait que perpétuer notre identification erronée avec cette
illusion. Donc, désidentifiez-vous de toutes les pensées, même de la pensée
qu’il y a un ‘’je’’. Ce n’est qu’en nous libérant des pensées qui soutiennent
l’illusion du faux moi que nous pouvons connaître le Soi qui est l’Amour.
COMMENT LE FAUX MOI SABOTE LA PRATIQUE
Vous vous êtes peut-être rendu compte que la pratique du détachement vis-àvis des pensées est plus difficile que vous ne vous y attendiez et vous êtes
peut-être déconcerté par le fait que ce qui semble si simple semble si difficile
à faire. Vous avez sans doute supposé que vous aimeriez ouvrir votre cœur à
l’Amour. Malheureusement, non seulement le faux moi ne partage pas cet
enthousiasme, mais il est franchement contre. La cause de cette opposition
n’est pas difficile à trouver. Être l’Amour, cela implique de renoncer au moi
que vous avez cru être, un moi dans lequel vous avez tellement investi et que
119
vous vous êtes efforcé durement de créer, d’entretenir et de protéger. Le faux
moi ne va pas rester à ne rien faire, si son existence est menacée, donc il s’est
sans doute immiscé avec des pensées qui ont affirmé votre sens habituel du
moi, quand vous vous êtes identifié avec. Pour le faux moi, rien n’est plus
menaçant que d’ouvrir son cœur inconditionnellement, parce que ceci détache
le faux moi de ses amarres et le projette dans l’océan de l’Amour.
Le faux moi peut saboter n’importe quelle technique de transformation et il
s’opposera à la pratique du détachement, chaque fois que son sentiment du
moi se sentira trop menacé. L’ego est passé maître dans l’art de confondre et
d’obscurcir notre conscience pour saboter discrètement la pratique spirituelle
tout en semblant coopérer. Donc, si nous voulons réussir, devenir conscient
des types de pensées que le faux moi utilise pour éluder la pratique du
détachement est impératif. Parmi les favorites, il y a : ‘’Je n’ai pas le temps
maintenant’’, ‘’Je suis trop fatigué’’, ‘’Je ne pense pas que cela marchera’’, ‘’Je
dois d’abord m’organiser’’, ‘’Je n’y arrive pas’’, ‘’Je ferai cela plus tard’’… Un
autre moyen d’éviter la pratique spirituelle, c’est de structurer son temps en le
remplissant de choses à faire, de manière à ce qu’il ne reste que peu ou aucun
temps libre pour pratiquer. Le ‘’faire’’ devient une protection contre l’ ‘’être’’.
Toutes ces manœuvres sont une manière de différer l’Amour en disant : ‘’Pas
maintenant, plus tard.’’ Souvent, nous ne reconnaissons pas consciemment
ces pensées pour ce qu’elles sont, parce que le faux moi dit qu’elles sont
éminemment sensées. Si nous nous trompons nous-mêmes et si nous croyons
le faux moi, nous pratiquerons sans beaucoup de conviction ou pas du tout.
C’est ainsi que le faux moi se protège discrètement sans jamais annoncer que
son programme réel, c’est saboter l’Amour.
Si des expériences transcendantes se produisent, le faux moi peut faire usage
de pensées sceptiques pour remettre en cause la validité de ces expériences et
s’accrocher ainsi à son identité. Il peut suggérer que vous imaginez ces
expériences ou tenter de vous faire peur en vous assurant que si elles sont
réelles, c’est un symptôme que vous perdez la boule, que vous craquez ou que
vous perdez le contrôle. Le faux moi se protège également contre l’Amour en
générant des pensées angoissantes, comme : ‘’Si je deviens l’Amour, tout va
changer : je perdrai mon travail et tout le monde pensera que je suis bizarre
ou fou.’’ Une autre pensée favorite, c’est : ‘’Comment payerai-je les
factures ?’’ Croire en une seule de ces pensées peut suffire pour nous piéger
dans le monde du faux moi et miner la pratique spirituelle. Je me souviens
avoir pensé après mes expériences de réalisation que si je vivais en accord
avec ma nouvelle compréhension de la vie, cela pourrait vouloir dire que
j’aurais peu ou pas de revenus et j’avais une famille à nourrir. La seule
réponse (au sens dualiste), c’était de faire confiance à l’Un. Ce que j’ai fait et
120
il y a toujours eu assez d’argent. Bien entendu, cela aide de savoir que nous ne
sommes pas séparés de la Source.
Quand l’Amour est imminent, le faux moi peut utiliser la peur pour
empêcher sa dissolution dans l’Amour. Une femme avec laquelle je travaillais
avait l’image d’être dans une maison où une lumière brillante entre de
l’extérieur par les fissures de la porte. On frappe à la porte et elle se sent
fortement poussée à ouvrir et à permettre à l’Amour d’entrer, mais réalise que
si elle le fait, elle disparaîtra dans la lumière et cessera d’exister. Malgré toute
son aspiration, elle n’a pas pu s’amener à ouvrir. La pensée de se perdre ellemême à tout jamais a été trop effrayante. Si nous prenons au sérieux ces
pensées, nous choisissons la peur à la place de l’Amour. Nos cœurs se ferment
et nous nous enlisons dans le monde de la séparation du faux moi inquiet. Les
images angoissantes de notre fin que nous évoquons sont toujours inexactes,
car elles ne reflètent que le faux moi. Nous ne pouvons pas comprendre le Soi
ou l’Amour et nous remplissons donc le vide en nous imaginant un avenir
effrayant ou pas d’avenir du tout, puis nous réagissons craintivement en
renforçant ainsi notre attachement au faux moi.
Le faux moi est extraordinairement habile à générer précisément les pensées
qui sont les plus susceptibles de nous piéger, puis de nous inviter à nous
identifier avec. Il produira toute pensée susceptible de nous détourner de
l’Amour, mais ce qu’il imagine n’est qu’un reflet du faux moi, pas le vrai Soi,
donc, ne soyez pas dupe. Une fois que nous reconnaissons les pensées visant à
interrompre ou à empêcher la pratique, nous pouvons plus facilement
pratiquer le détachement à leur égard et ne plus être abusés et les croire. Les
stratégies de peur peuvent marcher au départ, mais une fois que nous avons
pris conscience qu’elles ne sont pas vraies et qu’elles ne reflètent que
l’appréhension du faux moi concernant l’Amour, elles auront de moins en
moins d’impact.
Après avoir reconnu l’expertise du faux moi à éviter l’Amour, vous pourriez
avoir des doutes quant au fait de pouvoir vous affranchir du faux moi. N’ayez
crainte. L’Amour n’est pas une chose que seulement quelques élus réalisent,
comme le dit clairement Sai Baba (Hislop, 1978) :
‘’Vous devez avoir entendu parler de ceux qui recherchent moksha (la libération) et
qui l’obtiennent et beaucoup peuvent avoir l’impression que c’est un honneur rare que
seulement quelques-uns obtiennent ou que c’est un domaine qui ressemble à un paradis
ou une colonie d’élus ou un sommet auquel seules quelques âmes héroïques peuvent
parvenir. Non ! Moksha est quelque chose que tous doivent réaliser, qu’ils soient
héroïques ou pas. Même ceux qui refusent de l’admettre doivent l’atteindre au bout du
compte’’ (p. iv).
121
LES EFFETS DE LA PURIFICATION DU CŒUR
‘’Ceux qui sont détachés ont un amour réel pour tous. Leur amour n’est pas seulement
pur, il est aussi divin. Il est l’incarnation de shanti (paix). On peut sans nul doute
réaliser le Seigneur en se dépouillant de toute passion ou de tout attachement…’’ (Sai
Baba, 1962, p. 36).
Il est peut-être devenu évident pour vous que la purification du cœur, la
libération par rapport au faux moi et la réalisation du Soi qui est l’Amour
sont juste différentes manières de parler de la même chose. Peu importe
comment on le décrit, le processus est le même et l’Amour est son essence. Il
y a trois stades pour réaliser l’Amour qui est divin. Sai Baba (1980) les décrit
en rapport avec Jésus :
‘’Comme la plupart des chercheurs, il a d’abord cherché le divin dans le monde
objectif, mais il s’est vite rendu compte que le monde était une image kaléidoscopique
créée par sa propre imagination. Il a alors cherché à trouver Dieu en lui-même. Ses
séjours dans les monastères himalayens du Cachemire et dans d’autres centres de
l’ascétisme oriental et de recherche philosophique ont accru sa conscience. De
l’attitude d’être un messager de Dieu, il a pu maintenant s’appeler le ‘’Fils de Dieu’’.
Le lien relationnel s’est intensifié : le ‘’Je’’ n’était plus une Lumière ou une Entité
distante ; la Lumière devenait partie du ‘’je’’. Avec la conscience du corps
prédominante, il était un messager. Avec la conscience du cœur qui s’est développée, il
a ressenti une plus grande proximité et une plus grande tendresse, ainsi le lien pèrefils semblait naturel à ce stade. Plus tard, avec l’établissement dans la Conscience
divine, Jésus a pu déclarer : ‘’Moi et mon Père, nous sommes Un.’’ On peut décrire les
trois stades comme : ‘’J’étais dans la Lumière’’, ‘’La Lumière était en moi’ et ‘’Je suis
la Lumière’’ et on peut les comparer aux stades du dvaita (dualisme), du
vishistadvaita (non-dualisme qualifié) et de l’advaita (non-dualisme) qui sont décrits
dans la philosophie hindoue. Le stade ultime, c’est quand toute dualité est éliminée.
C’est l’essence de toutes les disciplines et de tous les enseignements religieux’’ (p.292).
Purifie ton cœur ! s’est focalisé sur la transition du stade un au stade deux –
‘’la Lumière est en moi’’. En reconnaissant que tout ce que nous
expérimentons n’est qu’un reflet de nous-mêmes, la création de nos pensées,
nous avons été en mesure de purifier suffisamment notre cœur pour que la
conscience du cœur se développe. Tout au long de la transition du stade un au
stade deux, nous progressons via une série de ‘’mois’’ toujours plus aimants.
Par exemple, si nous prenons conscience de l’enseignement d’amour d’une
maladie et si nous l’appliquons ou si nous dénouons un attachement qui
bloquait notre cœur, un nouveau sentiment de nous-même plus aimant en
résulte et notre monde reflète ce changement. Certains de ces changements
sont presque imperceptibles, alors que d’autres sont évidents. Chaque
changement implique que le vieux ‘’moi’’ a été transcendé et qu’un nouveau
122
moi plus aimant a pris sa place. Avec chaque évolution, nous diminuons
notre identification avec le faux moi et ainsi, nous augmentons notre
identification avec l’Amour. Chaque changement de conscience crée une
nouvelle ‘’réalité’’ avec laquelle nous pratiquons le détachement, une réalité
parfaite pour réaliser l’Amour, parce que nos réalités sont toujours des
miroirs de nos faux mois.
A un certain moment, nous réalisons que nous ne sommes pas le faux moi,
que nous ne l’avons jamais été et que la Compassion et l’Amour sont notre
vraie nature. Tout le reste n’a aucune réalité véritable. ‘’Ce que vous considérez
comme réel est irréel. Ce que vous pensez irréel est l’unique Réalité. Dieu seul est
l’unique Réalité éternelle’’ (Sai Baba, 1998b, p.233). Nous comprenons que le je et
le monde sont une illusion et que croire et agir comme s’ils sont réels est la
cause de notre souffrance. Nous savons que nous ne sommes pas les rôles que
nous jouons, ni nos relations, notre personnalité, notre histoire personnelle,
nos sentiments, nos croyances, le mental ou le corps physique ou tout ce à
quoi nous avons pensé comme étant je, moi ou à moi. Le passage de la
conviction que le faux moi est réel à la connaissance que c’est une illusion
touche les fondations mêmes sur lesquelles nous avons construit nos vies.
Tout est remis en question – notre compréhension passée de la vie, nos
relations, le sentiment de qui nous sommes – tout. Rien ne demeure tel quel.
Rien n’est comme nous l’avions pensé. C’est renversant !
Si nos cœurs ne sont pas encore purs, comme c’était mon cas, nous
expérimentons être un moi distinct qui sait qu’il est l’Un, mais qui
s’expérimente toujours comme distinct de l’Un. Nous avons toujours une
certaine identification avec le faux moi, c’est pourquoi nos cœurs ne sont pas
encore purs et c’est cet attachement qui cause le sentiment de séparation par
rapport à l’Un. Nous ne sommes identifiés ni avec le faux moi, ni avec l’Un
et ce manque de définition personnelle peut être troublant. Le faux moi craint
de disparaître dans l’Un sans forme et pour supprimer cette angoisse, il peut
recommencer à s’identifier avec certains vieux schémas familiers qui
définissaient précédemment le faux moi.
Notre choix est clair – ou nous retombons dans les griffes du faux moi ou
bien nous travaillons pour nous affranchir complètement du faux moi et pour
embrasser notre vraie nature. Jésus parle de ce choix :
‘’Nul ne peut servir deux maîtres : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il
s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l’Argent. Voilà
pourquoi je vous dis : ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni
pour votre corps de quoi vous le vêtirez. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et
le corps plus que le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne
123
moissonnent, ils n’amassent point dans des greniers ; et votre Père céleste les nourrit !
Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? Et qui d’entre vous peut, par son
inquiétude, prolonger tant soit peu son existence ? Et du vêtement, pourquoi vous
inquiéter ? Observez les lis des champs, comme ils croissent : ils ne peinent ni ne
filent, et je vous le dis, Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’a jamais été vêtu
comme l’un d’eux ! Si Dieu habille ainsi les lis des champs, qui est là aujourd’hui et
qui demain sera jetée au feu, ne fera-t-il pas bien plus pour vous, gens de peu de foi ?
Ne vous inquiétez donc pas, en disant : ‘’Qu’allons-nous manger, qu’allons-nous boire,
de quoi allons-nous nous vêtir ?’’ – tout cela, les païens le recherchent sans répit – Il
sait bien, votre Père céleste, que vous avez besoin de toutes ces choses. Cherchez
d’abord le Royaume et la Justice de Dieu, et tout cela vous sera donné par surcroît.’’
(Matthieu, 6.24-33).
Le choix de l’Amour requiert une foi et une confiance profondes,
particulièrement si nous sommes attachés à des biens ou à la sécurité
personnelle ou financière. Nous acquérons cette foi en pratiquant le
détachement vis à vis de toutes les pensées et des formes et en apprenant à ne
traiter que l’Amour comme réel, à faire confiance à l’Un pour veiller à tous
nos besoins. ‘’Rien d’autre que l’Amour n’existe dans ce monde’’ (Sai Baba,
2001a, p.7). Je ne peux pas insister suffisamment sur l’importance de ne
considérer que l’Amour comme réel et de traiter tout le reste comme
secondaire ou irréel. L’essence du faux moi, c’est qu’il met d’autres choses
avant l’Amour et nous ne devons pas.
Pour être libres du faux moi, nous devons renoncer à notre attachement à
l’égard de tous les maîtres spirituels et des concepts. Les concepts et les
croyances que nous entretenons sur Dieu, le Bouddha, Jésus, Mahomet,
Rama, Krishna, Sai Baba et d’autres ne sont que des miroirs de nos faux mois
qui, si nous nous attachons à eux, nous empêchent de réaliser l’Amour. Nous
devons lâcher tous ces concepts et toutes ces croyances, parce que nous
accrocher à eux nous sépare de l’Un qui est au-delà de toute conception. Le
bouddhisme zen dit : ‘’Si tu rencontres le Bouddha, tue-le !’’ C’est la manière
zen de dire que tous les concepts spirituels doivent partir, même le concept
vénérable du Bouddha. Tout Bouddha que nous pourrions ‘’rencontrer’’ n’est
qu’une apparence dans l’illusion dualiste qui doit ‘’périr’’, si nous voulons
connaître l’Un que nous sommes vraiment, dit Sai Baba. Être attaché à
vénérer ou à diaboliser des personnages spirituels reflète un attachement au
faux moi et fait en sorte que nous restons piégés dans l’illusion du dualisme.
Le Cœur ne fait pas de telles distinctions, mais il embrasse plutôt
inconditionnellement tout ce qui est, sans jugement. Rappelez-vous que vos
expériences de tous les maîtres spirituels, Sai Baba inclus, ne sont que des
reflets de votre faux moi et dans cette optique, Sai Baba nous recommande
vivement de ne pas nous attacher à sa forme physique. Tout attachement à de
124
telles apparences dualistes dans la conscience nous maintient séparés de
l’Amour et de notre vrai Soi. Donc, pratiquez le détachement vis à vis de tous
les concepts spirituels, croyances, expériences, maîtres et avatars jusqu’à ce
que l’esprit pensant se taise.
Au fur et à mesure que nous sommes de moins en moins attachés à l’esprit
pensant, de moins en moins de pensées surgissent et nos cœurs deviennent
plus ouverts. Néanmoins, des pensées continueront de surgir tant que nous
sommes identifiés au faux moi, donc observez toujours les pensées sans vous
impliquer avec aucune d’elles. En cessant de nous attacher aux pensées, elles
ralentissent et un espace s’ouvre entre celles-ci. ‘’Ne sommes-nous pas en paix,
quand une pensée cesse et quand une autre ne surgit pas ? Vous devez guetter ce
moment, être un avec ce moment et vous fixer dedans jusqu’à ce que la paix soit
constante et continue’’ (Sai Baba, 1988a, p.294). Le faux moi n’existe pas dans
l’espace entre les pensées, car le faux moi n’a pas de réalité au-delà de celle
que nos pensées lui confèrent. C’est juste une pensée, un concept qui n’a pas
de réalité à part dans le monde dualiste de l’illusion. Néanmoins, nous ne
croirons pas que le faux moi est une illusion créée par le mental tant que nous
n’expérimentons pas réellement la vérité de sa non-existence.
Au fur et à mesure que nous cessons de nous identifier avec les pensées qui
soutiennent le faux moi, l’identification avec le corps s’amenuise et la
frontière entre moi et l’autre commence à se dissoudre, minant les bases
même du faux moi. La conscience se dilate spontanément au-delà du corps.
L’Amour est expansion, le faux moi est contraction. Le sentiment d’absence
de forme peut alors apparaître : ‘’Puisque Dieu est sans forme, pour devenir un
avec Dieu, nous devons devenir sans forme. Qu’est-ce que cela implique ? Cela
implique que nous devons nous défaire de l’attachement au corps’’ (Sai Baba, 1997,
p.199). Pour nous affranchir de l’attachement au corps, le mental doit être
complètement silencieux. Sai Baba nous dit que quand le mental qui
maintenait l’identification au corps aura disparu, le faux moi disparaîtra en
ne laissant que l’unité : ‘’Quand on expérimente l’unité, il n’y a plus du tout de
mental. Tout est Brahman dans cet état de conscience. Il n’y a de la place que pour
Prema (l’Amour) dans cet état’’ (1996a, p.204).
Kabir (1984) décrit magistralement comment connaître la Conscience qui est
l’Amour :
Plus tu le dégustes,
Plus le vin de l’Amour du Seigneur devient délicieux,
Mais il est difficile de se le procurer,
Car, Kabir, le marchand de vin exige ta tête en échange (p.585).
125
Quand la ‘’tête’’ est partie, seul demeure le Cœur.
Dans Purifie ton cœur !, j’ai décrit comment nous libérer du faux moi pour
que votre cœur puisse s’ouvrir à l’Amour. Néanmoins, l’expérience a
démontré qu’il peut être parfois difficile d’apprendre à pratiquer le
détachement en étudiant simplement ce livre et donc, si vous avez besoin de
conseils sur la manière de pratiquer, je vous invite à m’écrire.
John Goldthwait, Ph.D.
21273 Entrada Rd.
Topanga, Ca 90290
U.S.A.
E-mail : [email protected]
126
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