Telechargé par pierrealberthayen

LES SAGES, LES SAINTS, LES MAÎTRES DE TOUTES LES TRADITIONS ET LA MEDITATION

LES SAGES,
LES SAINTS,
LES MAÎTRES
DE TOUTES
LES TRADITIONS
ET
LA MÉDITATION
PIERRE-ALBERT HAYEN
A moins que vous ne tombiez amoureux de la méditation, et que vous ne
l’approchiez avec un total enthousiasme, de l’attachement et un désir ardent, vous ne
pourrez pas entrer dans le royaume de l’attention.
Swami Lakshman Joo
La question est (…) non plus poursuivre un but précis dans le monde, mais de
nouveau être en harmonie avec nous-mêmes, rester en contact avec notre profondeur
intérieure où l’Essentiel se manifeste.
Karlfried Graf Dürckheim
Chacun trouve la méthode qui lui convient et qui lui est dictée par les pulsions de
son inconscient.
Ramana Maharshi
Que personne n’agisse à l’encontre de sa propre conscience, car elle est la voie juste.
Sathya Sai Baba
2
Aux Pieds de lotus
De
Bhagavan Sri Sathya Sai Baba
Et de
Mata Amritanandamayi Devi,
Avec amour et dévotion.
3
Celui qui propagera la philosophie suprême secrète parmi Mes dévots accomplira
pour Moi le plus haut service dévotionnel et Me viendra avec certitude.
Nulle autre personne ne Me rend un service plus agréable que lui, et personne
d’autre ne Me sera plus cher sur cette terre.
Bhagavad Gita 18 : 68 - 69
A celui qui transmet cet enseignement qui confère à Mes dévots la plus haute
connaissance, à celui-là, Je me donne entièrement.
Uddhava Gita 24 : 26
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SOMMAIRE
Avant-propos
Pré-méditation
La méditation
Bibliographie
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7
10
132
5
AVANT-PROPOS
Ce recueil s’est constitué tout seul, au fil des années1.
Au cours de mes lectures, j’avais pris la (bonne !) habitude de remplir des fiches avec
les enseignements qui me parlaient, mais dont je sentais que je ne percevais pas
encore toute la substantifique moelle. Il m’était venu l’idée de les classer par thèmes
(logique !) pour pouvoir plus facilement y revenir.
Un beau jour, en relisant ce paquet de fiches qui avait maintenant atteint une belle
épaisseur, j’ai été surpris de la cohérence et de l’homogénéité qui émanaient de
l’ensemble, je vais presque dire du ‘’message’’ qu’il semblait véhiculer. Ce qui m’a le
plus séduit, c’est l’unité qui s’en dégage, et de pouvoir constater sans équivoque que
toutes les religions se rejoignent au sein de leur mysticisme, au sein du mysticisme
universel.
J’ai pensé qu’il serait bien égoïste de garder pour moi seul le fruit de ‘’mon’’ travail,
et il m’a semblé tout naturel de le partager avec d’autres chercheurs sincères et
dépourvus de préjugés.
Je voudrais seulement ajouter que la sagesse par procuration ne vaut pas un clou et
qu’il revient à chacun de faire l’expérience de ce dont il est question dans ce travail,
compte tenu de ses propres prédispositions mentales, bien entendu.
Un chercheur de Vérité.
1
Dans les années 90, après avoir pris la résolution en octobre 1992 de consacrer le reste de cette vie terrestre à la
recherche spirituelle et à la réalisation du Soi.
6
PRÉ-MÉDITATION
Faire preuve de compassion envers l’humanité souffrante est notre obligation envers
Dieu. Notre démarche spirituelle doit commencer avec le service désintéressé du
monde. Les gens seront déçus s’ils s’assoient en méditation en s’attendant à ce qu’un
troisième œil s’ouvre une fois qu’ils auront fermé les deux autres. Cela ne se
produira pas. Nous ne pouvons pas fermer nos yeux au monde au nom de la
spiritualité et espérer progresser. La réalisation spirituelle, c’est prendre conscience
de l’unité en regardant le monde avec les yeux bien ouverts.
Amma
Mes enfants chéris, pour obtenir la concentration dans cet âge sombre du
matérialisme, le chant est meilleur que la méditation. En chantant haut et fort, les
autres sons qui nous distraient seront submergés et nous atteindrons la
concentration.
Bhajan, concentration, méditation…telle est la ligne de progression.
Enfants, le souvenir constant du Seigneur est méditation.
Le bhajan ou chant dévotionnel est une discipline spirituelle destinée à concentrer
l’esprit sur sa déité favorite. Ainsi unifié, il pourra se fondre dans l’Etre divin et faire
l’expérience de la béatitude du vrai Soi.
Amma
Vous pourriez me demander :
‘’Swamiji, la méditation n’est-elle pas la pratique la plus élevée ?’’
C’est vrai, mais pourquoi sommes-nous tellement vaniteux de croire que nous
sommes déjà prêts pour ce qui est le plus élevé ?
L’adoration de Dieu dans une de Ses formes est une pratique glorieuse et
extrêmement bienfaisante qui conduit directement à la méditation naturelle sur la
forme de Dieu, et par la suite à l’inexprimable, à l’ineffable et au sans-limites.
Si l’on se borne à rester assis et à essayer de méditer dès qu’on commence le sentier
spirituel, nos pensées se dirigent constamment vers l’extérieur.
Swami Premananda
Il nous faut changer la structure de notre société, son injustice, sa moralité
épouvantable, les divisions qu’elle a créées entre les hommes, les guerres, le manque
total d’affection et d’amour qui est en train de détruire le monde. Si votre méditation
n’est qu’une affaire personnelle, une chose dont vous jouissez de manière
personnelle, alors ce n’est pas la méditation. La méditation implique un changement
radical et complet du mental et du cœur. Ceci n’est possible que lorsqu’il existe ce
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sentiment extraordinaire de silence intérieur, et cela seul provoque l’esprit religieux.
Cet esprit connaît ce qui est sacré.
Krishnamurti
Chacun de vous pense : ‘’Laissez-moi prier tranquillement dans l’isolement de ma
pièce de méditation, laissez-moi devenir un reclus, laissez-moi rester avec moi-même
et ne pas me mêler aux autres. C’est alors seulement que je peux trouver la paix
mentale.’’
Mais je dis NON, définitivement NON, ce n’est pas du tout la bonne attitude. Soyez
un reclus, oui, un reclus de la vie sociale, mais vous n’avez pas d’excuse d’être un
reclus du service social. Vivez retirés, gardez-vous pour vous-mêmes et ne vous
joignez pas à des réunions folâtres, frivoles, des ébats insignifiants et des choses
semblables. Mais où est le but, la cible de votre vie si vous ne servez pas l’humanité ?
Dans l’élévation de l’humanité, vous devriez trouver votre satisfaction. Vous
souhaitez faire du Sai Seva, alors faites du Sangham Seva, du service communautaire,
faites du Narayana Seva qui consiste à nourrir les pauvres, faites du service spirituel.
Que réalisez-vous, assis durant des heures dans votre pièce de méditation ? Vous
gagnez de la paix mentale pour vous-mêmes, c’est vrai, mais n’est-ce pas là une
attitude égoïste ? Ne voulez pas aider les autres à gagner une certaine paix mentale
aussi ? Joie, paix et amour sont de précieux trésors à distribuer librement parmi tous,
ils ne sont pas à garder jalousement pour une seule personne. Sortez et allez voir. Il y
a tellement de frères et sœurs, d’amis et de collègues face à des problèmes
insondables et ayant beaucoup de chagrin. Ne pensez-vous pas que c’est votre devoir
de les délivrer un peu de leurs peines et de les aider à trouver la paix mentale ? Etesvous tellement égoïstes que vous souhaitez la libération seulement pour vous ? Ne
voulez-vous pas que les autres soient aussi libérés ? Eh bien, sortez et servez, servez
où que vous trouviez quelqu’un en détresse, servez à quelque moment que vous en
sentiez le besoin.
Sortez et servez, Mes chers, et Je serai avec vous, vous aidant et vous guidant.
Sathya Sai Baba
Actuellement, les gens se mettent à aider les autres sur le sentier spirituel sans l’avoir
eux-mêmes parcouru avec comme conséquence qu’aussi bien le guide que la
personne guidée se perdent corps et biens.
Servez-vous vous-même pour commencer, c’est-à-dire, comprenez qui vous êtes, où
vous allez, d’où vous venez, pourquoi, etc. Après avoir découvert les réponses à ces
questions de la bouche des sages, des Ecritures et de sa propre expérience
incontestable, alors l’homme peut enfin guider autrui.
Sathya Sai Baba
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La simple compassion et la passion de rendre service ne sont pas suffisantes ; elles
peuvent même être dangereuses si aucune enquête n’est faite quant aux causes de la
souffrance et quant aux moyens les plus sûrs et les plus efficaces d’alléger cette
souffrance. Il faut comprendre que la cause principale de la souffrance se situe dans
l’absence de la sagesse vous permettant de réaliser l’unité inhérente au sein de
l’apparente diversité et que le moyen le plus sûr et le plus efficace pour vous
débarrasser de cette souffrance est d’écarter l’ignorance, ce qui résulte dans la
Réalisation du Réel.
Sathya Sai Baba
C’est seulement quand l’approche analytique est unie à la contemplation méditative
que nous savons ce qui est vrai, car la Vérité est ce que nous connaissons dans notre
expérience de la conscience profonde.
Lama Gyatso
Ceci a été observé maintes fois au cours des siècles : si dans un village d’une centaine
d’habitants, une seule personne commence à méditer, toute la qualité de conscience
du village change—un pour cent seulement—car cette seule personne entre en
contact avec les cent personnes du petit village. Elle est reliée à chacun : l’un est son
oncle, l’autre est quelque chose d’autre ; l’un est son frère, l’autre lui est relié par sa
femme. Elle est reliée, elle fait partie d’un réseau. Elle commence à vibrer d’une
énergie différente, l’énergie méditative. Toute la qualité de conscience du village
change grâce à la méditation d’une seule personne.
Mâ Ananda Moyî
Observer la conscience, c’est méditer.
Nisargadatta Maharaj
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LA MÉDITATION
Accumuler les instructions sans connaître la méditation sur la nature de l’esprit, est
comme mourir de faim devant le garde-manger plein.
Drukpa Kunley
Sans se déplacer, on peut connaître le monde entier.
Sans regarder par la fenêtre, on peut trouver le chemin du Ciel.
Plus on va loin, moins on en sait.
Lao Tseu
Voilà mes chevaliers de la Table ronde : les frères qui se cachent dans les lieux
déserts et retirés pour se livrer avec plus de ferveur à la prière et à la méditation,
pour pleurer leurs péchés et ceux d’autrui. Leur sainteté est connue de Dieu, mais le
plus souvent ignorée des frères et des hommes.
Saint François d’Assise
Entrons en nous-mêmes ; n’allons pas plus loin car cela fatigue l’esprit, distrait l’âme
et porte moins de fruit.
Sainte Thérèse d’Avila
Nie-le si tu veux, mais qui demeure en soi entend la Parole de Dieu, même hors du
temps et de l’espace.
Angelus Silesius
La méditation est donc un travail sur soi-même, par lequel l’homme se met dans un
certain état où il ne FAIT pas quelque chose, mais où quelque chose lui ARRIVE.
Karlfried Graf Dûrckheim
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La méditation, qui vient du latin meditari, et non meditare, signifie effectivement ‘’être
transporté’’ au centre de soi-même, non pas ‘’se transporter’’ soi-même au centre.
Karlfried Graf Dürckheim
Si VOUS méditez, il n’y a pas de méditation.
Eric Baret
Rentre en toi,
Au lien où il n’y a rien
Et prends garde que rien n’y vienne !
Rentre en toi,
Au lieu sans pensée
Et prends garde qu’aucune pensée ne s’y lève !
Là où est rien, le Plein !
Là où rien n’est vu : vision de l’Etre !
Là où rien n’apparaît : apparition du Soi !
Dhyana c’est cela !
Swami Gnanananda
Tout effort pour méditer est déni de la méditation.
Krishnamurti
La méditation est la brise qui entre quand vous laissez la fenêtre ouverte, mais si
vous la maintenez délibérément ouverte, si vous l’invitez délibérément à venir,
jamais elle n’apparaîtra.
Krishnamurti
La méditation n’est pas spécifiquement orientale et c’est bien autre chose qu’une
technique. Nul ne peut l’apprendre : c’est une croissance intime. En vivant
pleinement, vous permettez à l’existence de s’épanouir en vous. La méditation n’est
pas un aspect que vous pouvez ajouter à la personnalité que vous possédez pour le
moment. Vous devez subir une transformation fondamentale, une transfiguration,
une mutation. Grandir est toujours global, ce n’est jamais un ajout. L’amour non plus
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n’est pas un volet que vous accolez à votre personnage. Il émane de votre être tout
entier. Il s’agit donc de grandir jusqu’à la dimension méditative.
Osho
L’état de prière est nécessaire, mais pas les prières. Personne ne vous écoute, aucun
dialogue n’est possible entre vous et Dieu. Pour converser, il faut être deux. Or, Dieu
n’est pas ‘’quelqu’un’’, c’est une présence comme la beauté ou comme la joie. Dieu
veut dire l’essence divine.
Osho
La gloire de la méditation n’est pas le fait d’une méthode particulière, mais
l’expérience continuellement renouvelée de présence à soi-même dans la félicité, la
clarté, la paix et, par-dessus tout, dans l’absence totale de saisie. Lorsque la saisie
diminue en vous, cela montre que vous êtes moins prisonnier de vous-même. Plus
vous ferez l’expérience de cette liberté, plus il deviendra manifeste que l’ego est en
train de disparaître et avec lui les espoirs et les peurs qui le maintenaient en vie ; et
plus vous vous rapprocherez de la ‘’sagesse de l’état sans ego’’ d’une générosité
infinie. Quand vous vivez dans cette ‘’demeure de sagesse’’, vous ne percevez plus
de frontière entre le ‘’je’’ et le ‘’vous’’, entre ‘’ceci’’ et ‘’cela’’, l’ ’’intérieur’’ et l’
‘’extérieur’’. Vous avez finalement atteint votre vraie demeure, l’état de non dualité.
Sogyal Rinpoché
La raison d’être, l’intérêt et le but tout entier de la méditation sont d’intégrer celle-ci
dans l’action…Comment donc parvenir à cette intégration, que faire pour imprégner
notre vie quotidienne de l’humour tranquille et du détachement spacieux de la
méditation ? Rien ne peut remplacer la pratique régulière. En effet, c’est seulement
par une pratique véritable que nous pourrons sans interruption savourer le calme de
la nature de notre esprit et en prolonger l’expérience dans notre vie de tous les jours.
Sogyal Rinpoché
Il s’agit d’ETRE dans un certain état, au repos comme en mouvement, dans l’inaction
comme dans l’activité, dans le silence comme dans le bruit. Cela semble une exigence
contradictoire : faire silence au milieu du bruit, être en repos dans le mouvement.
Mais c’est précisément le but recherché.
Karlfried Graf Dürckheim
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L’exercice ne consiste pas seulement dans la méditation mais aussi dans l’action. Le
méditatif n’a pas pour critère l’assise elle-même, mais ce contact permanent avec la
transcendance. C’est dans ce contact avec notre centre essentiel que le moment
méditatif se différencie du non méditatif. Rester assis à ne rien faire n’a vraiment rien
à voir avec la méditation. L’arc, le javelot, l’épée, pour citer des formes extrêmes
d’activité, même la course de fond, peuvent avoir un caractère méditatif, quand on
les accomplit au service d’un état de transparence au Tout Autre, qui à travers nous
entre dans le monde. L’exercice actif sous-entend l’acquisition d’une technique qui
demeure à notre disposition sans participation du moi, de sorte que cette technique
pure puisse être mise au service de la profondeur. Elle agit alors en nous,
indépendamment de nous, et laisse pour ainsi dire s’épanouir ce que nous
entreprenons, comme la nature le fait d’une fleur. Nous devenons alors non
seulement TEMOIN mais MEDIUM SENSIBLE d’une dimension plus profonde, qui
s’exprime dans le monde à travers nous.
La vie, la transcendance, tente de prendre conscience d’elle-même à travers notre
humanité, mais elle rencontre un obstacle. ‘’Nous sommes la cause de tous nos
empêchements,’’ lisons-nous chez Maître Eckhart. Ce n’est que lorsque nous
acquérons une transparence que cette prise de conscience peut s’accomplir. Nous
l’éprouvons alors en accédant à une manière spécifique d’être présent, d’être en
contact avec cet Etre, qui n’est pas seulement notre Etre, mais l’Etre de toute chose,
avec lequel fondamentalement nous ne faisons qu’un.
Karlfried Graf Dürckheim
La méditation n’est pas un moyen pour arriver à un but : il n’y a pas de but, pas
d’arrivée ; c’est un mouvement dans le temps et en dehors du temps. Chaque
système, chaque méthode lie la pensée au temps, mais être simplement conscient de
manière neutre de chaque pensée et sentiment, comprendre leurs mécanismes et ce
qui les motive, leur permettre de s’épanouir, c’est le début de la méditation. Lorsque
pensée et sentiment fleurissent et meurent, la méditation est le mouvement par delà
le temps. Dans ce mouvement, il y a l’extase, dans le vide complet, il y a l’amour et
avec l’amour il y a destruction et création.
Krishnamurti
En résumé, voici les conditions nécessaires à la méditation :
—une détresse ;
—l’expérience d’une dimension où quelque chose transparaît, même fugitivement,
qui pourrait permettre de sortir de cette détresse ;
—la possibilité de percevoir en cette expérience un appel et un possible changement ;
—la disposition à assumer cet engagement ;
—et enfin l’obéissance fidèle envers la voie sur laquelle nous nous sommes engagés.
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Telles sont les conditions qu’un homme doit remplir s’il veut réaliser pleinement ce
qui s’appelle méditer. En soumettant sa propre liberté à un engagement, on accède
déjà au surnaturel, car l’obéissance échappe au niveau ordinaire de l’humanité. Cet
engagement, par son contenu même fait apparaître une qualité numineuse, car se
dérober à son devoir envers la divinité signifierait se dérober au sens même de sa vie.
Karlfried Graf Dürckheim
Au début, la méditation se fait mécaniquement, à heure fixe, comme une période
destinée à la dévotion ou à la concentration. L’étape suivante, c’est d’amener cette
idée de méditation à d’autres périodes de la journée. Et la troisième étape est de
poursuivre la méditation jour et nuit. Alors on parvient à la méditation juste. Si une
personne ne pratique la méditation qu’un quart d’heure le soir pour tout oublier
ensuite pendant le restant de la journée, elle est comparable à celle qui se rend à
l’église le dimanche et qui oublie tout ensuite pendant le reste de la semaine.
L’entraînement intellectuel est sans aucun doute utile dans l’accomplissement de la
vie intérieure, mais le principal, c’est la méditation. C’est cela, le véritable
entraînement. Etudier pendant un an et méditer pendant un jour sont de valeur
égale, à condition bien sûr de méditer correctement. Si une personne ferme les yeux
et reste assise à ne rien faire, elle peut tout aussi bien aller se coucher. La méditation
n’est pas qu’un exercice à pratiquer. Par la méditation, l’âme est infusée d’une vie et
d’une lumière nouvelle, d’inspiration et de vigueur ; dans la méditation, toutes les
bénédictions sont présentes. Certains se lassent de la méditation. Cela ne signifie pas
qu’ils méditent : ils se lassent avant d’être parvenus à l’état où on expérimente
réellement les effets de la méditation. C’est comme ceux qui se lassent de jouer d’un
instrument de musique : ils se lassent parce qu’ils n’ont pas encore réellement joué de
leur instrument. S’ils en étaient capables, jamais ils ne s’en lasseraient. La difficulté
est présente dans le fait de savoir jouer d’un instrument et la difficulté est d’avoir la
patience pour maîtriser son propre jeu…
Pour ceux qui ont fait l’expérience de la joie de la méditation, il n’y a rien dans le
monde qui ne soit plus intéressant ou profitable. Ils expérimentent la paix intérieure
et la joie que des mots ne peuvent traduire, ils touchent la perfection, le cœur de la
lumière, de la vie, de l’amour, tout y est.
Hazrat Inayat Khan
La méditation n’est pas un moyen pour atteindre un but.
Elle est à la fois le moyen et le but.
Krishnamurti
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Pour programmer le mental, quelques règles doivent être observées :
—fuir la mauvaise compagnie
—souhaiter la fréquentation de bonnes personnes
—accomplir en permanence des actes méritoires
—se rappeler ce qui est transitoire et ce qui est permanent
—être avec Dieu, penser avec Dieu, voir avec Dieu et dédier toutes ses actions à Dieu
—nous considérer tous comme des membres d’une famille divine
—vous regarder comme un administrateur et utiliser votre richesse et vos talents
pour le bien d’autrui
—utiliser chaque opportunité pour aider les autres
—être compatissant en permanence.
Sathya Sai Baba
La qualité de la nourriture exerce une influence capitale sur le mental.
La structure de celui-ci est conditionnée par la nourriture absorbée.
Ramana Maharshi
Tout ce qu’on absorbe doit toujours être pur et irréprochable : les sons, les spectacles,
les impressions, les idées, les leçons, les relations, tout doit favoriser le respect,
l’humilité, l’équilibre, l’équanimité et la simplicité.
Sathya Sai Baba
Certains pratiquent la concentration sans avoir d’abord cultivé de bonnes habitudes
et une conduite juste. Ceci est le signe d’une connaissance partielle. La concentration
doit avoir comme base l’équilibre. On doit purifier le mental par de bonnes
habitudes. La concentration doit SUIVRE ce processus de purification et non le
précéder. TOUT EFFORT POUR SE CONCENTRER SANS AVOIR AUPARAVANT
PURIFIE LE MENTAL N’EST QUE PERTE DE TEMPS. Bien des grands hommes ont
ruiné leur évolution spirituelle en aspirant trop tôt à la concentration, sans avoir
discipliné leurs habitudes.
Sathya Sai Baba
Pour parvenir à la contemplation parfaite, l’esprit a besoin de purification. La raison
est purifiée quand elle se dégage de toutes les représentations sensibles, elle est
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encore purifiée quand elle est complètement libérée des productions de
l’imagination, elle est parfaitement purifiée quand elle est libre des raisonnements
philosophiques.
Saint Bonaventure
Le créateur, la création et les créatures sont essentiellement un. Ils ont un
dénominateur commun : la Conscience divine absolue. Lorsque vous découvrez la
Conscience absolue, lorsque vous réveillez en vous votre divinité, vous ressentez
instantanément votre unité avec le créateur, la création et toutes les créatures.
Qu’est-ce qui vous empêche de découvrir votre divinité ?
Si vous regardez profondément en vous-même, vous verrez qu’il y a d’abord toutes
les impuretés de votre mental (c’est-à-dire le désir, la colère, l’attachement, la peur, la
cupidité, etc.), puis l’instabilité et les fluctuations constantes de vos pensées, et
ensuite le voile de l’ignorance. Pour être face à face avec votre nature essentielle et
divine, il vous faut enlever ces obstacles.
Chandra Swami
La purification du mental transforme la foi en connaissance puis,…la connaissance
opère sur le mental la destruction du pouvoir imaginatif et fantaisiste (sankalpa et
vikalpa) et par là dévitalise le mental, autrement dit, la purification du mental au
cours de la méditation discursive détruit la faculté de projection et d’imagination.
Swami Siddheswarananda
L’idée du serpent qui représente Maya se développe à partir de l’ignorance de la
nature réelle de la corde ; elle croît et s’approfondit, au plus on oublie la corde qui est
à la base. L’ignorance qui empêche et retarde l’investigation sur la nature de l’Atma
fait se développer Maya. Maya véritablement nourrie par cette attitude devient
comme des ténèbres épaisses. Quand la flamme de Jnana brille, l’obscurité est
dispersée avec l’illusion du Jiva, de Jagath et d’Eswara.
L’investigation fait disparaître le serpent ; après celle-ci, seule demeure la corde. De
la même façon, Maya et tout son florilège perçu dans le mental comme Jiva, Jagath,
etc., disparaîtra totalement dès que Vichara sera menée à propos de la réalité du
phénomène. On réalise alors qu’il n’y a rien d’autre que Brahman. Brahman seul
subsiste.
Sathya Sai Baba
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Toutes les choses composées sont semblables à un rêve, à une illusion, à une bulle de
savon, à une ombre,
Elles sont pareilles à une goutte de rosée, à un éclair.
C’est ainsi qu’il faut les considérer.
Bouddha
De l’irréel, conduis-nous au Réel.
Brihadaranyaka Upanishad
Ô mon Dieu, montre-moi les choses telles qu’elles sont
Mohammed
Faites que je vois les choses telles qu’elles sont, que rien ne me jette de la poudre aux
yeux.
Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus
L’erreur généralement commise par la plupart des chercheurs est de croire qu’ils
vivent dans le réel, mais qu’il existe une réalité d’un autre ordre, divine, surnaturelle,
à laquelle ils pourront accéder un jour. Le chercheur ignore qu’il ne voit même pas la
réalité quotidienne, qu’il vit dans un monde irréel entièrement constitué de ses
projections. Tout son effort doit porter avant tout sur la destruction de ce monde
imaginaire. La réalité métaphysique se révélera alors tout naturellement à lui et il
s’apercevra qu’elle était là de tout temps, mais qu’il ne l’avait jamais vue parce que
ses projections obstruaient sa vision.
Pourquoi les enseignements spirituels et notamment les voies de la connaissance
nous parlent-ils de la Réalité comme d’une chose extraordinaire, transcendante ?
Elle est extraordinaire et transcendante par rapport à notre perception habituelle qui
est entièrement déformée et fausse. Mais la réalité est en fait extrêmement simple.
Elle est constituée par les choses telles qu’elles sont.
‘’Fais-moi voir les choses telles qu’elles sont,’’ cela veut avant tout dire : ‘’Je ne vois
pas les choses telles qu’elles sont’’. C’est la prise de conscience du fait que nous
vivons sans cesse dans l’irréel. Le moindre événement, le plus petit fait qui survient
dans nos vies est immédiatement déformé dès qu’il est perçu. Nous interprétons la
réalité. Sur tout, nous projetons nos opinions, nos préférences, nos refus, nos craintes.
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Véronique Loiseleur
Les transformations qui ont lieu dans un monde de reflet nous apparaissent comme
des réalités à cause de l’ignorance : n’essayez pas de chercher le vrai, cessez
seulement de chérir des opinions.
Seng t’san
L’homme est lié aux choses par des liens purement subjectifs, en sorte qu’il n’est pas
capable de les reconnaître telles qu’elles sont et de les laisser parler par ellesmêmes…
La première vertu spirituelle est une objectivité incorruptible. Le jugement d’un
homme mûr n’est plus soumis à sa subjectivité ; il parle des choses telles qu’elles
sont. Il est libéré de son petit moi, de ses angoisses et de ses désirs qui lui cachent la
vérité des choses.
Une des tâches les plus difficiles données à l’homme est de renoncer à lui-même, au
désir de se mettre en avant, à vouloir que le monde corresponde à l’idée qu’il s’en
fait.
Karlfried Graf Dürckheim
Qu’est-ce qui reste quand vous ne prétendez pas, quand vous ne maintenez pas le
monde phénoménal ? Quand vous arrêtez de vous prendre pour quelque chose,
qu’est-ce qui reste ? Quand vous arrêtez de vous dire ‘’je suis une femme’’, ‘’je suis
un homme’’, ‘’je suis jeune’’, ‘’je suis vieux’’, ‘’je suis riche’’, ‘’je suis ‘’pauvre’’, ‘’je
pense ceci’’, ‘’je pense cela’’, ‘’je vais faire ceci’’, ‘’je vais faire cela’’…Que reste-t-il ?
Il reste cette écoute. C’est cette écoute qui est à l’origine des choses. C’est de cette
écoute que les mondes jaillissent et se résorbent.
Eric Baret
Le Dieu Très Haut est astucieux, il montre de belles apparences : mais sous ces
apparences bonnes, il y en a de mauvaises, afin que l’homme ne devienne pas
vaniteux et ne se dise : je pense bien, j’agis bien, et tout ce qui m’arrive est bien. Si
tout ce qui arrive était conforme aux apparences, le Prophète n’aurait pas dit : ‘’O
mon Dieu, montre-moi les choses telles qu’elles sont’’. Tu montres le beau, et en
réalité, c’est laid ; tu montres les choses comme laides, et en réalité elles sont belles.
Montre-nous toutes les choses telles qu’elles sont afin que nous ne tombions pas dans
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le piège et que nous ne soyons pas perpétuellement égarés. Votre jugement, même
s’il est juste, ne sera pas meilleur que celui du Prophète. Il parlait ainsi. Par
conséquent, toi non plus, tu ne dois pas te fier à tes idées ou à tes pensées.
Rumi
Engendrés par les rayons du soleil, les nuages forment un écran opaque derrière
lequel le soleil est caché ; d’une extrémité à l’autre de l’horizon, l’œil ne distingue
plus rien d’autre que des nuages.
Engendré par le Soi, le sens du moi masque la réalité du Soi ; il apparaît, tout seul,
dans le champ de la conscience, comme s’il ne devait son existence qu’à lui-même.
Lorsque souffle la tempête, le soleil disparaît sous l’amoncellement de sombres nuées
que d’âpres rafales glacées charrient de-ci de-là.
Lorsque l’ignorance tend sur l’Atman son voile épais, le pouvoir de projection inflige
à l’insensé des tourments sans fin !
Ces pouvoirs sont, à eux deux (le pouvoir de projection et le pouvoir d’obnubilation),
la cause de l’asservissement de l’homme, car ce dernier, victime de sa confusion, en
arrive à prendre le corps grossier pour le Soi, et c’est ainsi qu’il erre sans trêve de
corps en corps.
De l’arbre du samsara, l’ignorance est la graine ;
L’attachement aux sens, les feuilles vertes ;
L’action, l’eau dont on l’arrose ;
Le corps grossier, le tronc ;
Les différentes énergies vitales (prana) en sont les branches ;
Les organes, les rameaux ;
Les objets des sens, les fleurs ;
Les multiples souffrances dues aux actions, les fruits ;
Et l’âme particularisée (jiva), c’est l’oiseau qui y demeure.
Sankarâchârya
C’est le mental qui est la cause de l’esclavage et celle de la libération. Le mental qui
demeure attaché aux objets sensibles, mène à l’asservissement. Dès qu’il se détourne
d’eux, c’est à l’émancipation qu’il nous conduit.
Amrtabindupanishad
C’est le vent qui accumule les nuages au-dessus de nos têtes, et c’est aussi le vent qui
les emporte au loin. Le mental est, tout à la fois, la cause de notre servitude et la
cause de notre libération.
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Tout d’abord, le mental crée en chaque homme un attachement pour le corps et les
objets des sens ;
Par-là, il le réduit à l’impuissance comme un animal dont tous les membres sont
ligotés.
Plus tard, ce même mental, en certaines individualités, suscite à l’égard des objets des
sens une aversion aussi profonde qu’à l’égard de substances vénéneuses, et du coup,
il les émancipe à jamais. Le mental est donc la cause unique qui produit aussi bien
notre esclavage que notre affranchissement. Teinté d’un reflet de rajas (le dynamisme
passionnel), il nous mène à la servitude ;
Purifié et exempt de toute trace de rajas et de tamas (ténèbres, torpeur, inertie), il nous
guide vers la délivrance. Le mental devient pur lorsque prédominent la
discrimination et le renoncement. Il travaille alors à sa propre émancipation.
L’homme réfléchi qui aspire à l’indépendance, doit, en premier lieu, cultiver en lui
ces deux vertus fondamentales.
Sankarâchârya
Il était un jeune homme, dit la légende, qui recherchait la connaissance par
l’expérience. Résolu à découvrir ce qui est accessible à l’homme au-delà des limites
de la vie ordinaire, il se fit le disciple d’un maître après l’autre, pratiqua tout ce qu’il
put.
Il arriva un jour à l’entrée d’une grotte où vivait un très vieux sage. Le vieillard se
tenait devant une boule de cristal. Le jeune homme s’assit face au sage, fixa la sphère
étincelante.
Dans le cristal, il vit mille et une choses inouïes et inimaginables. Au bout d’un
moment, il dit au sage :
‘’Je ne peux me satisfaire d’être le spectateur de ces événements prodigieux. Il faut
que je trouve moyen de les vivre.’’
Le sage l’invita à pénétrer dans le cristal. Le jeune homme, dès qu’il eut essayé,
s’aperçut qu’il pouvait, effectivement, se laisser entraîner dans chacune des scènes
dont il venait d’être témoin.
Il ressortit bientôt de la sphère. Sans dire un mot, le sage lui tendit un marteau. Le
jeune homme le prit, fracassa la boule de cristal et partit.
Idries Shah
Pour ma part, depuis mes jeunes années, j’ai accumulé les connaissances, j’ai étudié
les textes et leurs commentaires ainsi que les sutras. J’ai réfléchi sur les noms et les
formes, mais je n’ai pas connu le repos dans ces études ; car c’est sûrement aussi vain
que de vouloir entrer dans l’océan pour en compter les grains de sable. Le Bouddha
me le reprocha, à juste titre, car enfin, quelle utilité y a-t-il à compter le trésor des
autres ?
20
Yoka Daishi
Rendu au milieu de ma vie,
J’ai cherché à savoir ‘’A quoi ça sert la vie ?’’
J’ai cherché dans les sports et les voyages,
J’ai cherché dans la politique et les performances,
J’ai cherché dans les religions et les livres,
J’ai cherché dans le travail acharné et le luxe,
J’ai cherché de toutes les façons,
J’ai même cherché des façons de chercher.
Un beau jour, j’ai trouvé sans chercher.
J’avais cherché trop loin, à l’extérieur, dans les autres.
J’avais cherché l’impossible pour m’apercevoir qu’il n’y avait rien à trouver :
On le possède tous à l’intérieur de nous.
Maintenant que je sais que la vie est faite de petits et de grands moments présents ;
Maintenant que je sais qu’il faut se détacher pour aimer plus fort ;
Maintenant que je sais que le passé ne m’apporte rien ;
Maintenant que je sais que le futur me fait parfois souffrir d’angoisse et d’insécurité ;
Maintenant que je sais qu’on n’a pas besoin de voyager dans l’astral pour être
heureux sur cette terre ;
Maintenant que je sais que la bonté et la simplicité sont essentielles et que pour
rendre les autres heureux, je dois l’être d’abord ;
Maintenant que je sais qu’on peut aider les autres surtout par l’exemple et le
rayonnement ;
Maintenant que je sais que l’acceptation est un gage de bonheur et que la nature est
mon meilleur ‘’Maître’’ ;
Maintenant que je sais,
La réponse vient du même endroit que la question.
Maintenant que je sais que je vis,
Alors maintenant, je vis…tout simplement…
Marcel Gagnon
Quand vous vous rendez compte que ce que vous cherchez, vous ne pouvez jamais le
trouver, parce que vous allez constamment le projeter, vous réalisez que ce que vous
avez toujours cherché devant vous et derrière vous, c’est cela qui vous cherche,
quand vous arrêtez d’avoir la prétention de vouloir le trouver.
Eric Baret
21
L’examen de la nature éphémère des phénomènes extérieurs conduit à vairagya
(détachement). Aussi la recherche (vichara) est-elle le premier pas et le plus important
qu’il faille faire. Lorsque vichara se déroule automatiquement, il en résulte un mépris
pour la fortune, la renommée, le confort, les plaisirs, etc.
Ramana Maharshi
Le mental disparaîtra dès le début de l’investigation, car il est semblable à un tissu de
fils. Chaque fil est un désir, un souhait, un attachement. Si vous les ôtez, le tissu
disparaîtra. L’illusion est le coton, le désir est le fil et le mental est le tissu. Par
vairagya, il peut être détricoté. Le sadhaka doit avoir viveka (le discernement) et
vairagya (le détachement) comme gardes du corps. Alors il pourra circuler dans le
monde sans péril.
Sathya Sai Baba
A mesure que vous pelez un oignon, vous trouvez toujours d’autres pelures, mais
vous n’arrivez jamais à un noyau.
Ainsi quand vous analyser l’ego, celui-ci disparaît complètement.
Ce qui reste en dernier lieu, c’est l’Atman.
Ramana Maharshi
L’obstacle, c’est l’agitation et l’instabilité du mental.
Qu’est-ce qui agite le mental ?
La peur, l’attachement, le désir, la jalousie, la colère, l’avidité, etc.
Il faut se débarrasser de ces émotions négatives.
Moins vous avez de tendances négatives, plus il vous est facile de vous absorber en
méditation.
Lorsque le mental est pur et stable, la révélation survient.
Chandra Swami
Vous n’avez nul besoin de vous soucier d’atteindre ou d’obtenir un nouvel état de
conscience. Il suffit que vous vous débarrassiez de toute pensée. C’est tout.
Ramana Maharshi
22
Quand la conscience est là, la force vitale l’est aussi, les pensées surgissent, de même
que les mots. Telle est la nature du mental. Comprenez que vous êtes étranger à la
conscience. Elle continuera d’exister, elle se perpétuera, mais vous ne vous
identifierez plus à elle, disant : ‘’je suis ceci ou cela’’.
Il ne devrait y avoir aucune difficulté, étant donné que le fait évident en soi est que
vous ETES.
Pourquoi ne pas vous arrêtez sur ce point et le découvrir ?
Voyez ce qu’est cet état.
Nisargadatta Maharaj
Tant que je suis ceci ou cela ou que j’ai ceci ou cela, je ne suis pas toutes choses et je
n’ai pas toutes choses.
Devenez purs, jusqu’à ce que vous ne soyez ni n’ayez ni ceci ni cela, vous serez alors
omniprésents, et n’étant ni ceci ni cela, vous serez toutes choses.
Maître Eckhart
De la perspective dont je vous parle, je ne sais pas moi-même que je suis. Je
n’appartiens pas au royaume de la veille et du sommeil. Comment supposerais-je
que je suis comme ceci ou comme cela ? C’est vous qui supposez que je suis quelque
chose ou quelqu’un.
Nisargadatta Maharaj
La Conscience ne nous abandonne jamais. Chacun de nous sait : ‘’Je suis’’. Personne
ne peut nier le fait qu’il est. Dans les profondeurs du sommeil, l’homme n’en a pas
conscience ; quand il est éveillé, il semble en avoir conscience. C’est pourtant la
même personne. Il n’y a aucun changement dans celui qui dormait et dans celui qui
est éveillé. En sommeil profond, il n’était pas conscient de l’existence de son corps. Il
n’avait pas de conscience corporelle. Au réveil, il prend conscience de son corps, il y
a pour lui conscience corporelle. La différence réside donc en fait dans l’émergence
de la conscience corporelle, et non dans une altération de la Conscience réelle. Le
corps et la conscience corporelle apparaissent et disparaissent ensemble. Tout ceci
revient à dire qu’aucune limitation n’existe au cours du sommeil profond, alors qu’il
y en a à l’état de veille. Ce sont ces limitations qui constituent l’esclavage. Le
sentiment ‘’Je suis mon corps’’ est l’erreur. Ce faux sentiment du Moi doit
disparaître. Le vrai sentiment du Moi est toujours là. Il est présent ici et maintenant.
Il n’apparaît jamais ni ne disparaît. Ce qui ‘’est’’ doit être toujours. Ce qui réapparaît
est voué à disparaître. La Conscience qui est préexistante au corps survivra à celui-ci.
23
En fait, il n’est personne qui ne dise : ‘’Je suis’’. La cause de tout le malheur de
l’homme, c’est la fausse croyance: ‘’Je suis mon corps’’. Cette fausse connaissance
doit disparaître. C’est cela la réalisation. La réalisation ne consiste pas à acquérir
quelque chose de nouveau, et ce n’est pas non plus une faculté nouvelle. C’est tout
simplement se débarrasser de tout camouflage.
Ramana Maharshi
La Vérité suprême est si simple.
Ce n’est rien d’autre qu’être en état originel.
Il n’y a rien d’autre à dire.
N’est-il pas alors étonnant que pour enseigner une Vérité aussi simple il faille
recourir à tant de différentes religions, croyances, sectes, méthodes et qu’elles soient
en conflit les unes avec les autres ?
Ramana Maharshi
Le monde surgit en même temps que le mental et disparaît avec lui. Ce qui apparaît
et disparaît n’est pas le Soi. Le Soi est autre chose ; c’est Lui qui fait naître le mental,
le soutient et le résorbe.
Donc le Soi est le principe sous-jacent.
Ramana Maharshi
Il n’y a qu’une seule Conscience qui subsiste dans les trois états de veille, de sommeil
profond et de rêve. Dans le sommeil profond, il n’y a pas de ‘’moi’’. La pensée ‘’moi’’
s’élève au moment de l’éveil et alors le monde apparaît. Où était donc ce ‘’moi’’
lorsque vous dormiez ? Existait-il ou n’existait-il pas ? Il faut bien qu’il ait existé,
mais pas de la façon dont vous le ressentez maintenant. Le ‘’moi’’ de l’état de veille
n’est que la pensée ‘’je’’ ; le ‘’moi’’ qui existait durant le sommeil est le vrai Moi qui
ne cesse pas d’exister. C’est la Conscience. Si vous la connaissez, vous verrez qu’elle
est au-delà de toute pensée.
Ramana Maharshi
Votre existence précède vos pensées. Vous ne pouvez pas penser, si au préalable,
vous n’existez pas. Vous pouvez pensez ceci ou cela. Vos pensées changent sans
cesse, mais vous, vous ne changez jamais. Laissez passer vos pensées et fixez votre
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attention sur le Soi qui est inaltérable. Ce sont vos pensées qui vous maintiennent en
servitude. Si vous les abandonnez, vous vous libérerez. Votre esclavage n’est pas
extérieur. Par conséquent, aucun remède extérieur n’est utile pour vous libérer. Votre
esclavage est intérieur. Vous avez la liberté du choix : soit de penser et être esclave,
soit de ne pas penser et être libre… Vous n’avez pas besoin de cesser de penser. Vous
n’avez qu’à penser seulement à la racine, à la source de vos pensées. Cherchez-la et
trouvez-la. Le Soi resplendit de lui-même. Quand vous vous en serez rendu compte,
vos pensées s’arrêteront d’elles-mêmes. Ce sera la libération de votre servitude.
Ramana Maharshi
Si la liberté, la sagesse, la conscience parfaite n’étaient pas déjà là, elles relèveraient
du monde des phénomènes, de ce qui est créé, causé et resteraient à l’intérieur du
relatif. Puisqu’elles auraient une naissance, elles auraient une fin ; puisqu’elles
seraient produites par certaines causes, elles pourraient être détruites par d’autres
causes.
Arnaud Desjardins
L’essentiel à saisir, c’est que tout se passe pour nous non pas à l’extérieur, mais audedans de nous, parce que nous intériorisons l’événement dont nous sommes
témoins.
Donc, notre existence n’est pas une affaire entre moi et le monde extérieur, mais entre
moi et moi ou plus précisément, entre moi et mes pensées, mes émotions, mes
sensations. Ce n’est pas à cause des événements que je suis heureux ou que je souffre,
c’est à cause de mes pensées relatives à ces événements, de mes émotions relatives à
ces événements.
Pouvez-vous admettre que nous sommes, avant tout, juste conscience ? Imaginons
une conscience ou, si vous préférez, un esprit vide comme le ciel sans un nuage, sans
un oiseau qui le traverse. L’infini de la voûte céleste a toujours été utilisé comme
image de cette immensité. Et dans cette immensité de l’esprit apparaissent et
disparaissent des formes—les sensations, les perceptions, les conceptions, les
émotions, les idées, les pensées, les peurs, les désirs—mais tout cela se passe audedans de nous. Notre réalité essentielle, c’est juste la conscience, une conscience que
rien ne limite, au-delà de l’espace, du temps, de la mesure, infinie, vide, lumineuse,
et qui plus est, absolument heureuse.
Arnaud Desjardins
Souviens-toi,
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Ne te confonds pas avec cette jouissance,
Ne te confonds pas avec cette tristesse,
Ne te confonds pas avec cette joie,
Ne te confonds pas avec cette angoisse,
Tu es la Conscience bienheureuse,
Tu es l’écran intouché de la Réalité sur lequel se projette le film toujours changeant
des apparences.
Arnaud Desjardins
La nature du mental humain est d’hésiter. Comme le pendule d’une horloge, le
mental oscille sans cesse d’une chose à l’autre. Son mouvement est continuel. Le
mental est toujours dans un état fluctuant ; à un moment il aime, le moment suivant
il hait. Le mental sera attiré par une chose à un certain moment et l’instant d’après il
la rejettera avec mépris. Le pendule du mental se déplace parfois vers la colère et
galope ensuite vers le désir. Il ne peut pas s’arrêter. Il ne peut pas rester immobile. A
cause du mouvement perpétuel du mental, le fondement stable immuable qui soustend l’existence et qui est la véritable nature de toute chose, n’est pas perceptible. Le
mouvement du mental crée des vagues incessantes et ces vagues, ces ondulations de
la pensée, occultent tout. Chaque pensée, chaque débordement émotionnel et chaque
désir est comme un caillou jeté dans le lac du mental. Les pensées ininterrompues
sont comparables aux rides à la surface de l’eau. La surface ondulante vous empêche
de voir clairement à travers l’eau. Vous n’accordez jamais un instant de repos à votre
mental. Soit il veut à tout prix satisfaire un désir, soit il est en colère ou jaloux, soit il
aime ou il déteste. Et si rien ne se passe dans le présent, les souvenirs du passé
s’imposent insidieusement. Des plaisirs agréables, des expériences douloureuses, des
moments joyeux, des regrets, des ressentiments…toujours quelque chose surgira. Dès
que le passé se retire, le futur apparaît avec ses belles promesses et ses rêves. Le
mental est ainsi continuellement accaparé. Il est toujours occupé et jamais libre.
Ce que vous voyez n’est que la surface. Vous ne faites que percevoir les vagues. A
partir de la perception de cette surface agitée, vous faites l’erreur de penser que la
profondeur bouge également. Mais le fond est immobile. Il ne peut pas se mouvoir.
Vous superposez le mouvement de la surface—les ondulations des pensées et des
émotions—sur la profondeur immuable, le fondement originel. Le mouvement dû
aux vagues des pensées n’appartient qu’à la surface ; il appartient au mental. Mais
pour permettre la vision du substrat immobile, la surface doit devenir calme et
silencieuse. Les ondulations doivent cesser. Le pendule oscillant du mental doit
s’immobiliser. Atteindre cet état de silence et de paix est le but ultime de la religion.
Une fois que cette immobilité est atteinte, vous pouvez voir clairement à travers la
surface. Vous cessez de voir des objets déformés. Vous contemplez le réel fondement
de l’existence—la Vérité. Tous vos doutes disparaissent. Vous réalisez alors que vous
n’aviez perçu que des ombres et des nuages. Le but de la religion est de vous aider à
découvrir la véritable nature de toute chose, tout en étant en permanence établi dans
les profondeurs de votre Etre véritable. Dans cet état de Réalisation, toutes les
26
différences disparaissent et vous voyez votre propre Soi resplendir dans et à travers
chaque objet.
Amma
Le degré d’absence de pensée est la mesure du progrès vers la Réalisation. Mais la
Réalisation elle-même n’admet aucune progression. Elle est toujours la même. Le Soi
reste toujours en état de pleine Réalisation. Les obstacles à la Réalisation, ce sont les
pensées. Le progrès spirituel est dès lors déterminé par le degré de déblaiement des
obstacles qui s’opposent à la compréhension fondamentale que le Soi est depuis
toujours réalisé. Les pensées doivent être contrôlées en cherchant à connaître qui en
est l’auteur. Vous plongez à leur source, où elles ne surgissent plus.
Ramana Maharshi
La Réalisation n’est pas quelque chose d’extérieur, elle est la prise de conscience du
Soi. Vous ne pouvez pas vivre sans le Soi. Le Soi est toujours réalisé. Mais vous vous
obstinez à ne pas vouloir le reconnaître. Votre Réalisation est actuellement obscurcie
par l’idée que vous vous faites du monde et que vous projetez sur l’écran de votre
conscience. Vous croyez apercevoir le monde en dehors de vous, et cette idée vient
assombrir l’éclat de votre nature essentielle. Tout ce dont vous avez besoin, c’est de
vaincre cette ignorance, et d’emblée le Soi resplendira. Aucun effort particulier n’est
nécessaire pour réaliser le Soi. Tous les efforts visent à éliminer l’obscurcissement qui
voile actuellement la Vérité.
Ramana Maharshi
Vous n’êtes ni le corps physique, ni le mental, ni l’intellect, ni l’ego, ni quoi que ce
soit d’autre auquel vous puissiez penser…
Découvrez cependant ce que vous êtes réellement.
Le silence indique que le questionneur est lui-même le Soi qu’il recherche.
Ramana Maharshi
La purification du corps-mental est un lent processus. Cela peut prendre des années,
car le désir, la colère, la peur, etc., sont profondément enracinés dans le subconscient.
Cette purification totale de votre corps-mental est un travail de longue haleine qui
exige à la fois un effort continu et déterminé de votre part et la grâce divine pour
27
défaire les imprégnations et les conditionnements passés. Lorsque l’expérience de
l’Unité s’établit en vous et ne vous quitte plus, lorsqu’elle devient permanente, c’est
l’Accomplissement.
Chandra Swami
L’esprit ne ressemble pas à une feuille vierge sur laquelle rien n’est écrit. Les
tendances et les expériences dérivées de quantité de naissances y ont été imprimées.
Les fruits de nombreuses actions accomplies par le corps sont également imprimés
sur l’esprit. C’est la raison pour laquelle l’esprit peut se décrire comme une entité
pleine de pensées et de désirs.
Sathya Sai Baba
En fait, la pensée nous présente surtout un tableau de nos préférences et de nos
aversions personnelles qui sont fonction des leurres grâce auxquels nos sens ont
trompé notre esprit de singe et l’ont amené à s’attacher à certains objets, certaines
idées, certaines opinions, croyances, superstitions, et à toute la vaste gamme des
pensées humaines. Les pensées ne sont pas toujours fondées sur la vérité, mais
généralement sur nos propres concoctions—qui sont souvent un mélange mental des
idées des autres, de nos propres fantasmes, de nos conceptions erronées, de nos
peurs et de nombreux autres ingrédients. Les pensées ne sont donc pas des guides
fiables pour nous amener à vivre une vie plus heureuse, plus épanouie et plus
productive.
Phyllis Krystal
La pensée n’a pas de place dans la compréhension. Comme on le dit en Orient, la
compréhension, c’est être Compréhension ; rien n’est compris, personne ne
comprend. Etre compréhension n’est pas lié à la pensée, c’est une émotion
fondamentale…
Tout ce qu’il y a de très profond dans la vie naît d’une émotion ; la pensée n’est
qu’un outil : quand la pensée est fonctionnelle, elle a sa propre beauté ; mais quand
elle sort de son contexte fonctionnel, elle devient une entrave.
Eric Baret
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Nous passons sans cesse à côté de la vie parce que nous avons considéré le mental
comme apte à entrer en contact avec l’existence. C’est l’inverse qui est vrai. Le
mental, l’intellect discursif, analytique, logique, est le moyen par excellence de nous
couper de l’existence. Il ne nous ouvre pas la porte de la vie, il nous la claque au nez.
PENSER EST LA BARRIERE. Les pensées vous emmurent, vous enferment entre de
hautes murailles. Vous tournez en rond dans vos pensées, vous tâtonnez dans le noir,
vous ne trouverez jamais rien de réel de cette façon. La réalité est là, toute proche.
‘’Dieu’’ est à la portée de la main. C’est vous qui vous détournez en réfléchissant, en
ruminant, en analysant, en disséquant, en interprétant, en cherchant le divin dans les
livres de philosophie ou de théologie…Vous vous enfoncez un peu plus chaque jour,
car plus vos pensées sont nombreuses, moins il vous sera facile de regarder à travers
elles. Le brouillard s’épaissit. Pour finir, vous ne voyez plus rien du tout.
C’est un des enseignements fondamentaux du tantra : l’esprit qui pense est un esprit
qui s’égare, qui perd le contact avec le réel. Quel est le langage adéquat pour entrer
en relation avec la réalité ? La non-pensée. Les mots sont creux, dénués de sens pour
ce qui est de rendre le réel. Le silence est éloquent et lourd de sens. Il est gonflé de vie
et fécond. Les mots sont inertes. Il s’agit donc d’apprendre le langage du silence.
Alors se passe exactement ce qui se passait dans le ventre de votre mère. Vous l’avez
oublié, mais pendant neuf mois, vous étiez dans ce ventre sans échanger la moindre
parole avec la femme qui vous portait. Et dans ce profond silence, vous étiez
ensemble. Vous étiez UN. Rien ne vous séparait. L’existence de votre mère et la vôtre
n’étaient pas distinctes. Ce n’était pas une union mais une unité. Ce n’était pas
l’addition ou la rencontre de deux êtres différents, c’était une fusion.
Lorsque vous aurez retrouvé le silence, la même chose se produira. Vous retrouverez
le ventre de l’existence, vous rentrerez dans le sein de la vie. Le contact qui s’établira
vous semblera totalement nouveau, parce que tout souvenir de votre séjour intrautérin s’est effacé. C’est à cela que je pense en disant : l’homme a oublié le langage de
la relation avec la vie. Ce langage est celui que vous aviez avant votre naissance.
Vous partagiez chaque vibration de votre mère, la compréhension était simple et
directe. Les interprétations et les malentendus s’installent en même temps que
surgissent les pensées.
Osho
Il semble, d’après les observations, que les pensées naissent de plusieurs sources
différentes. Nous apportons avec nous de nombreux schémas de pensée de nos vies
antérieures. Nous absorbons les pensées de nos parents, particulièrement celles de
notre mère, même celles qu’elle avait quand nous étions encore dans son sein. A
partir de la naissance et pendant toute notre enfance, nous puisons dans les champs
d’énergie formés par les pensées des divers membres de notre famille ; tout cela nous
donne les indispensables leçons qu’il nous faut apprendre dans notre vie présente.
Puis, plus tard dans la vie, ce sont les professeurs des écoles que nous fréquentons
qui nous fournissent des pensées, les livres que nous lisons, les disciplines religieuses
auxquelles nous sommes exposés et les affiliations politiques de nos parents. A la
longue, d’autres idées s’ajoutent que nous épousons nous-mêmes, ainsi que les
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pensées de nombreuses autres sources tout au long de notre vie, et nous finissons par
avoir accumulé des couches et des couches de fausses croyances ou de pensées
empruntées à d’autres. Ceci nous empêche d’exprimer, et même de découvrir, notre
propre vérité qui se cache en nous jusqu’à ce que nous consentions à faire l’effort
conscient de la chercher en nous détournant de toute la connaissance acquise et en
devenant réceptifs à la sagesse inspirée qui se trouve maintenant à notre portée. Mais
pour être capables d’ouvrir notre esprit à cette connaissance véritable, nous devons
nous débarrasser des épaisses couches de demi vérités acquises, accumulées autour
de nous et qui nous empêchent de voir qui nous sommes vraiment. Ceci implique un
dépouillement spirituel.
Phyllis Krystal
La croissance de l’homme, de l’enfance à l’âge adulte, conduit au développement
d’une ‘’structure de conscience’’ et d’une manière d’être de l’homme tout entier par
laquelle il se coupe de la participation à l’ETRE DIVIN. Le fait de se constituer un
‘’moi’’ qui fixe et discerne lui permet de ‘’reconnaître’’ et de maîtriser le monde,
‘’objectivement’’. Le ‘’moi’’, en voie de développement conduit à une conception de
la vie où tout gravite autour de ‘’quelque-chose-de-fermement-établi’’. Chaque fois
que l’homme s’oriente pratiquement, théoriquement et éthiquement d’après ‘’ce-quiest-objectivement-et-fermement-établi’’, l’ETRE est voilé, parce qu’Il est Vie et, qu’en
conséquence, Il s’oppose à toute fixité. Le voile s’épaissit et se concrétise dans le
rapport qu’établit l’homme avec le monde. Dans ce rapport, l’homme développe
uniquement les facultés lui permettant de le ‘’reconnaître objectivement’’ et de le
maîtriser. Lorsque l’homme s’illusionne sur son autonomie, son aptitude à maîtriser
la vie par ses propres moyens, son aptitude à en reconnaître le sens, l’obstacle dressé
devant l’ETRE atteint un point culminant. Cette illusion représente le mur qui sépare
l’homme du Divin. Elle le rejette dans une souffrance spécifiquement humaine.
Cependant, la souffrance causée par l’aliénation de l’ETRE peut devenir un moyen
par lequel l’ETRE se détache, lumineux, à l’arrière-plan du mur de l’illusion. Lorsque
cette souffrance atteindra un degré tel qu’elle deviendra peur de vivre et désespoir
pour l’homme coupé de sa racine (qui est son Etre authentique), alors cet homme
consentira à s’ouvrir à l’ETRE. Alors il consentira à se détourner de sa condition et à
écouter l’Etre authentique qui résonne en lui.
Karlfried Graf Dürckheim
Faute de posséder en l’ETRE, l’abri inviolable, l’individu se met sous la dépendance
d’autrui afin d’être accepté, accueilli et aimé. Le maintien d’attaches enfantines, la
prison que constitue la fréquentation de compagnons médiocres, le conformisme
d’un monde ressenti intérieurement comme faux et les besoins de sécurité du ‘’moi’’
produisent des préjugés, des formules, quant à la façon de se donner et de se
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comporter, ainsi que des projections d’une certaine apparence jugée désirable,
projections qu’il est nécessaire de reconnaître dans leurs formes cristallisées afin de
les dissoudre. Si la pétrification est trop avancée, c’est-à-dire si elle entraîne un état
névrotique, l’aide d’un spécialiste averti doit être recherchée. Mais plus l’homme
devient réceptif aux requêtes de son Etre authentique, plus il accepte de s’ouvrir à la
Vérité. Celui qui ‘’se’’ cherche sérieusement devient plus vite apte à reconnaître de
quelle manière sa vision rétrécie et son comportement s’opposent à l’expression de
son Etre essentiel. Il acquiert ainsi les moyens de transformer lui-même ce
comportement tout en continuant sa route. C’est en cela que le ‘’quotidien’’ devient
une ‘’pratique’’.
Karlfried Graf Dürckheim
Il est exact que le mental ordinaire conditionné ne peut pas réaliser Dieu. Mais Dieu
peut être réalisé par un mental pur qui est la même chose que la raison pure, qui est
la même chose que l’âme pure et non conditionnée. Il ne peut être atteint par la
raison bornée, ni par le mental borné, relatif, conditionné, qui a une nature
sensorielle…
Mais le mental peut se débarrasser de sa nature sensorielle, être purifié par une
culture appropriée et redevenir libre de tout désir, attachement, et tendances à ce
monde, ne plus faire qu’un avec l’âme non conditionnée.
Shri Ramakrishna
Les chasseurs de singes préparent des jarres au col étroit et les remplissent de
friandises. Le singe qui veut la nourriture plonge la main dans la jarre et en prend
une pleine poignée. Après, il n’est plus capable de retirer sa main. Pour la retirer, le
singe doit lâcher prise. Son désir de friandises lui a lié la main. Le singe est piégé
parce que, pour satisfaire son désir, il a pris des friandises avec la main. Ce vaste
monde est pareil à la jarre, les circonstances de la vie ou les situations familiales sont
comme le col étroit. Puisque le monde est la jarre qui contient les désirs, comme des
friandises, l’homme y plonge la main. Quand l’homme se dépouille de ses désirs, il
est capable de vivre librement dans le monde. Pour retrouver la liberté, il faut
d’abord le sacrifice. En termes philosophiques, ceci s’appelle le renoncement. Nous
pensons que le monde nous lie mais le monde est inanimé. C’est le désir qui nous lie.
Sathya Sai Baba
Si vous désirez atteindre la voie de l’unité, ne soyez pas opposés aux objets des six
sens (l’esprit est le sixième sens). Cela ne signifie pas que vous devez vous laisser
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aller aux objets des six sens, cela veut dire que vous devez conserver une pleine
conscience continue, sans saisir ni rejeter les objets des six sens dans le cours de la vie
quotidienne, comme un canard plongeant dans l’eau sans que ses plumes soient
mouillées.
Si, en revanche, vous méprisez les objets des six sens et tentez de les éviter, vous
tomberez dans l’évitement et n’atteindrez jamais la voie de la bouddhéité.
Si vous voyez clairement l’essence, alors les objets des six sens eux-mêmes sont
méditation, les désirs sensuels eux-mêmes sont la voie de l’Unité, et toute chose
devient manifestation de la Réalité.
Entrant dans la grande stabilité zen indivise dans le mouvement et la tranquillité, le
corps et l’esprit sont tous deux libérés et à l’aise.
Quant à ceux qui cultivent les pratiques spirituelles avec aversion pour les objets et
les désirs des sens, même si leurs esprits et leurs pensées sont vides et calmes et leur
visualisation parfaitement limpide, dès qu’ils sortent de la quiétude et rencontrent
une situation active, ils sont comme des poissons hors de l’eau, comme des singes
sans arbres.
Seng tsan
Sans faire l’expérience des objets des sens, on ne peut réaliser leur amertume. C’est
pourquoi l’aversion doit venir naturellement. Personne ne peut acquérir cette
aversion du monde par les paroles d’un autre.
Bhagavata Purana
On dit de l’esprit qu’il est à la fois l’instrument de l’asservissement et l’instrument de
la libération.
Permettez aux sens de diriger l’esprit vers l’extérieur : l’esprit lie.
Permettez à l’intelligence de prédominer pour que l’esprit cherche en soi la
béatitude : l’esprit libère.
Sathya Sai Baba
L’esprit s’échappe par les ouvertures que sont les sens. Il a la caractéristique de
papillonner et de voltiger deçà delà dans le monde extérieur de la couleur, des sons,
du goût, de l’odorat et du toucher. Il a tendance à permettre aux sens de l’amener à
s’attacher aux objets extérieurs, et c’est ainsi que naît le désir de ces objets. Mais tous
les désirs originent de la forme corporelle ou physique dans laquelle le véritable Soi
ne fait que résider. Cependant, il est possible de maîtriser l’esprit et de l’orienter vers
le Soi Supérieur qui sera son maître et son guide.
32
Sathya Sai Baba
Il est donc clair que, pour arriver ici-bas à s’unir parfaitement à Lui par la grâce et
l’amour, l’âme doit être dans l’obscurité par rapport à tout ce que l’œil voit, l’ouïe
entend, l’imagination représente et le cœur perçoit.
St Jean de la Croix
Il ne faut pas fixer l’esprit sur la forme, ni sur le son, ni sur le goût, ni sur le toucher,
ni sur la pensée. Quand l’esprit n’est fixé nulle part, le véritable esprit apparaît.
Bouddha
Dans l’enseignement métaphysique de l’Advaita, l’annihilation des vagues mentales
a un but déterminé, c’est un moyen qui permet d’arriver à appréhender la Réalité.
Nous ne connaissons habituellement qu’un aspect de la Réalité, l’aspect manifesté,
exprimé dans la conscience par une série de perceptions ; ces perceptions,
enregistrées par le mental dès qu’elles y pénètrent sous forme de vagues, sont
interprétées comme actions. Mais cela n’est que la moitié de la Réalité, nous ignorons
l’autre aspect du Réel : le SILENCE. Le silence apparaît dès que cessent les
perceptions. Le phénomène de la perception n’est possible—suivant l’épistémologie
indienne—que par rapport à son opposé, la non perception, dont nous avons
l’expérience dans le sommeil profond. C’est par les contrastes et les oppositions que
la vie est sentie et vécue comme une expérience vivante. Ce qui contredit le
mouvement des vagues du mental est le SILENCE. La métaphysique indienne ne
témoigne d’aucune préférence pour un aspect ou pour l’autre, mais notre réalité
mentale nous présente une vision faussée de la Réalité. Pour le Védanta comme pour
le zen, ‘’chérir des opinions’’ est le plus grand obstacle à la réalisation de la Doctrine
Suprême. Nous devons à tout prix nous détacher de la vie, sans pour cela nous
attacher au SILENCE, au SAMADHI, l’aspect non-manifesté appelé dans la
Brihadaryanaka Upanishad la MORT. Nos préférences ne doivent aller ni à la VIE ni à
la MORT, c’est alors seulement que la Réalité nous dévoilera son secret dans la
réalisation de la conscience de Turiya…
Swami Siddeshwarananda
Les tenants de différentes croyances ou de différentes idées se sont livré de
nombreuses guerres où chaque camp montrait une égale détermination à prouver
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que sa croyance était la bonne. En conséquence, ceux qui pensaient autrement étaient
dans l’erreur et devaient être soit punis, soit exterminés. Bien sûr, de telles impasses
ne sont pas le seul fait de groupes ou de nations. Elles existent aussi entre les
individus à tous les niveaux de la société. Elles naissent du besoin stupide et borné
de vouloir prouver que nous avons raison et de conclure que tous ceux qui ne
pensent pas comme nous ont nécessairement tort, en oubliant qu’il y a place pour
plusieurs points de vue différents. De telles situations se sont produites
d’innombrables fois au cours de la longue histoire du monde, avec ceci de tragique
que l’un des deux camps a rarement tout à fait tort ou tout à fait raison, puisque tout
est relatif. L’entière vérité de quelque chose, à un moment spécifique du temps, n’est
accessible à personne. Nous possédons tous une petite part de vérité et croyons
stupidement et égoïstement posséder toute la vérité ; et quand il appert qu’elle
diffère du petit bout de vérité de quelqu’un d’autre, nous sommes tellement certains
de la posséder toute que nous sommes également certains que l’autre doit avoir tort.
L’anecdote des trois aveugles à qui l’on demande de décrire un éléphant illustre très
bien ce propos. Ils s’approchent de l’animal et tendent la main pour le palper et en
déterminer la forme. La main du premier touche la trompe et, comme il s’imagine
avoir touché la bête tout entière, il affirme que l’éléphant est long et cylindrique
comme un serpent. Le second touche l’une des oreilles et dit que l’éléphant est un
animal plat et élastique. Le troisième touche la patte et déclare que l’animal est gros,
rond, massif, pareil à un tronc d’arbre. En fait, selon ce qu’ils en avaient chacun
perçu, les trois aveugles ont raison. Là où ils se trompent, c’est qu’ils ne décrivent
chacun qu’une partie de l’éléphant, qui est beaucoup plus grand que la somme de ces
trois parties. Les convictions profondes tombent dans cette même catégorie. Nous
sommes absolument sûrs de certaines choses et n’essayons même pas de vérifier si
nous croyons vraiment qu’elles sont vraies ou même utiles, dans le contexte actuel.
De nombreux concepts ont été valables à une époque donnée. Ils venaient à propos et
avaient leur utilité, mais ils n’ont plus de pertinence aujourd’hui, et pourtant nous
continuons de nous y accrocher, comme s’ils nous garantissaient une sorte de
sécurité, comme s’ils étaient des radeaux sur une mer agitée.
Nous devons sans cesse nous demander : ‘’Est-ce que je crois vraiment telle ou telle
chose et peut-elle encore s’appliquer maintenant ? Entrave-t-elle mon progrès ou me
libère-t-elle pour me permettre d’agir ?’’ Il faut se débarrasser de toutes les
convictions qui ne sont plus valides. A mesure que nous gagnons en maturité,
plusieurs de nos convictions les plus chères deviennent caduques et nous gênent plus
qu’elles ne nous aident.
Phyllis Krystal
L’homme doit quitter toutes les images et lui-même s’éloigner et devenir
dissemblable à tout, s’il veut et doit vraiment accueillir le Fils et devenir fils dans le
sein et le cœur du Père. Sois un afin que tu puisses trouver Dieu.
Maître Eckhart
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Quand vous avez complètement oublié tout ce qui concerne l’Esprit, où comptezvous encore le chercher ?
Houang-po
Renoncez à l’erreur de vous attacher aux processus de la pensée conceptuelle, et
votre nature montrera sa pureté première.
Houang-po
Un esprit paisible réalise qu’il a la capacité de tout saisir dans l’instantanéité. Il n'a
plus à stocker les matériaux de la réalité pour les traiter ultérieurement. Il voit les
choses directement, sans projections et sans jugements, dans leur évidence, dans leur
réalité nue.
Daniel Odier
Tout est opinion, et l’opinion dépend de toi.
Fais disparaître, quand il te plaît, l’opinion, et, comme si tu venais de doubler un
promontoire, tu trouveras une mer tranquille, la sérénité partout, un port sans
tempête.
Marc-Aurèle
Nous trouver, c’est nous oublier ; nous oublier, c’est trouver la Nature de Bouddha,
notre nature originelle.
Dogen
Votre devoir est l’abandon.
Abandonnez tous vos projets, même les meilleurs.
Abandonnez toutes les théories auxquelles vous tenez, les doctrines qui vous sont
chères, les systèmes de connaissance qui vous ont encombré le cerveau, les
préférences que vous avez accumulées, la poursuite de la gloire, de la richesse, de
l’instruction, de la supériorité.
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Tout cela est matériel, objectal ; entrez dans le monde objectal après avoir pris
conscience de l’Atma. Alors, vous vous rendrez compte que tout n’est que jeu de
l’Atma.
Sathya Sai Baba
L’intellect finit par réaliser de lui-même, après une pratique assidue et continue, que
sa propre activité dépend de l’existence d’un Pouvoir Supérieur. Il comprend qu’il ne
peut pas lui-même atteindre ce Pouvoir. Si bien qu’arrivé à un certain stade, il
s’arrête de fonctionner. Quand l’intellect a suspendu ainsi toute activité, seul reste
alors le Pouvoir Supérieur qui demeure toujours présent en lui. Telle est la
réalisation, le but final. Il est clair que le but de l’intellect est de comprendre qu’il est
complètement dépendant d’un Pouvoir Supérieur mais qu’il reste incapable de
l’atteindre. Il doit, en conséquence, disparaître entièrement pour que ce Pouvoir
Supérieur soit libéré.
Ramana Maharshi
Mon Dieu, comment est-ce possible ?
Mon esprit, ce néant, aspire à T’absorber, Toi, Espace d’Eternité.
Angelus Silesius
Je vis que Tu es l’infinité parce que Tu es inaccessible, incompréhensible,
innommable, inmultipliable et invisible. Et pour s’approcher de Toi, il faut donc
s’élever au-dessus de toute limite, de toute fin et de tout être fini.
Mais comment parvenir jusqu’à Toi qui est la fin vers laquelle on tend, si l’on doit
s’élever au-dessus de la fin ? Celui qui s’élève au-dessus de la fin ne pénètre-t-il pas
ici dans l’indéterminé et le confus au point que l’intellect devient ignorance et
obscurité—signes de la confusion ?
Il faut donc que l’intellect devienne ignorant et qu’il se tienne dans l’ombre s’il veut
Te voir. Mais, mon Dieu, que sont ensemble l’intellect et l’ignorance sinon la docte
ignorance ? Tu n’es donc accessible, Seigneur, Toi qui es l’infinité qu’à celui dont
l’intellect est dans l’ignorance, c’est-à-dire qu’à celui qui sait qu’il T’ignore. Comment
l’intellect peut-il Te saisir, Toi qui es l’infinité ?
L’intellect se sait ignorant et il sait qu’il lui est impossible de Te saisir, Toi qui es
l’infinité, et saisir intellectuellement l’infinité, c’est comprendre l’incompréhensible.
L’intellect sait qu’il T’ignore car il sait que Tu ne peux être un objet de savoir, à
moins que l’inconnaissable ne soit connaissable, l’invisible visible et l’inaccessible
accessible.
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Nicolas de Cues
Dans CELA, en vérité, il n’y a place ni pour des mots, ni pour un langage, ni pour
une discrimination d’aucune sorte. ‘’Il n’y a pas’’, ‘’il y a’’, ne sont que des mots, des
mots qui flottent à la surface. Il est donc dit que là, les mots, la langue, les propos de
toutes sortes n’ont aucune place. C’est la vérité. Comprenez-vous ?
Mâ Ananda Moyî
Le Cinquième Patriarche de l’école bouddhique chinoise Chan, à qui son disciple
Hui-Neng avait demandé s’il avait un enseignement ésotérique répondit :
‘’Si tu tournes ton regard vers l’intérieur, tu découvriras ce qui dans ton mental est
ésotérique.’’
Lama Anagarika Govinda
Deux moines zen, un jeune et un patriarche, se promènent sur un plateau désert. Le
jeune nommé demande :
‘’Maître, qu’est-ce que le secret, qu’est-ce que le silence ?’’
Le patriarche ne répond pas et continue la promenade.
Le plus jeune :
‘’Maître, maître, il y a paraît-il un secret dans le zen, Bodhidharma ne parle-t-il pas
d’un secret, de la pratique de la sagesse pure, dont la substance serait le silence et la
vacuité ? Maître, je veux savoir, qu’est-ce que le secret, qu’est-ce que le silence ?’’
Le patriarche reste muet et poursuit son chemin, suivi du jeune disciple qui répète :
‘’Maître, maître, qu’est-ce que le secret, qu’est-ce que le silence ?’’
Ils parviennent en bordure d’une falaise. Un arbre surplombe le vide, presque à
l’horizontale.
Le vieux moine ordonne à son jeune ami :
‘’Marche en équilibre le long de cette branche.’’
Le jeune moine, avec prudence, avance au-dessus du vide.
‘’Maintenant, dit le patriarche, arrête-toi, baisse-toi, mords très vite la branche entre
tes dents et suspends-toi dans le vent comme un fruit vert que tu es !’’
Le jeune moine, très inquiet mais très discipliné, obéit à son maître, et bientôt il est
pendu au-dessus du vide, retenu par ses seules mâchoires.
‘’Maintenant’’, lui dit le maître, ‘’dis-moi, qu’est-ce que le secret, qu’est-ce que le
silence ?’’
Cité par Marc de Smedt
37
Il vous faut vous y prendre très progressivement pour amener votre mental sous
votre contrôle. Il ne faut jamais vous hâter ni utiliser la force pour le contrôler. S’il y a
une vache dans l’étable qui veut en sortir et aller manger la récolte dans le champ,
que faisons-nous pour la ramener ? Nous tâchons de découvrir le genre de nourriture
qu’elle recherche et nous en proposons dans son étable. Après cela, elle perdra
graduellement sa tendance à vouloir quitter l’étable. De manière semblable, notre
mental divague et se pose sur quantités de choses. Il se laisse aller à de multiples
pensées. Dans le but de contrôler l’esprit qui recherche la satisfaction de désirs
sensuels et mondains, nous substituons l’idée plus noble de Dieu à la place de ces
désirs. Nous tournons l’esprit vers Dieu et progressivement, nous le détournons des
désirs du monde. Actuellement, l’homme s’efforce de sevrer son mental des désirs
du monde mais il n’y parvient pas. Il est vaincu et humilié. Vraiment, ces désirs et
attachements que l’esprit développe sont caractéristiques des temps présents. Même
notre intelligence est incapable d’exercer un contrôle suffisant sur le mental. Dans
pareilles circonstances, il nous faut ou bien essayer de cultiver l’habitude de la
solitude ou bien nous associer à des gens saints pour penser à de bonnes choses et
sevrer notre mental. Il faut se résoudre à une de ces choses si vous souhaitez
contrôler votre mental.
Sathya Sai Baba
Il y a de nombreuses idées fausses concernant la méditation. Certains la considèrent
comme un état d’esprit semblable à une transe. D’autres y pensent comme à une
sorte d’entraînement, une sorte de gymnastique mentale, mais la méditation n’est ni
l’un ni l’autre—bien qu’elle implique de faire face à des états d’esprit névrotiques.
L’état d’esprit névrotique n’est pas difficile ou impossible à traiter. Il possède une
certaine énergie, une certaine vitesse et un certain mode. La pratique de la méditation
implique de ‘’laisser être’’, essayer d’accompagner le mode en question, son énergie
et sa vitesse. Ainsi nous apprenons à faire face à ces facteurs, à nous relier à eux, pas
dans le sens de vouloir qu’ils se développent de la manière que nous aimerions, mais
dans le sens de les connaître pour ce qu’ils sont et de travailler avec leur mode.
Il y a une histoire du Bouddha qui raconte l’enseignement qu’il donna une fois à un
célèbre joueur de sitar qui voulait apprendre la méditation. Le musicien demanda :
‘’Est-ce que je devrais contrôler mon esprit ou est-ce que je devrais complètement
laisser aller ?’’ Le Bouddha répondit : ‘’Puisque vous êtes un grand musicien, ditesmoi comment vous accordez les cordes de votre instrument.’’ Le musicien répondit :
‘’Pas trop tendues ni trop lâches.’’ ‘’La même chose’’ dit le Bouddha. ‘’Lorsque vous
méditez, vous ne devriez pas forcer votre esprit trop brutalement ni le laisser
divaguer.’’
Voilà l’enseignement : Laisser l’esprit ETRE, d’une manière très ouverte, sentir le flot
de l’énergie sans tenter de la contenir mais sans en perdre le contrôle, accompagner
le mode d’énergie de l’esprit. Ceci est pratiquer la méditation.
Une telle pratique est généralement nécessaire parce que notre mode de pensée,
notre façon conceptualisée de mener notre vie dans le monde est soit trop
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manipulatrice—elle cherche à s’imposer au monde—ou soit, elle devient
complètement débridée et incontrôlable. Ainsi, notre pratique de méditation doit
débuter avec la couche la plus extérieure de l’ego, les pensées discursives qui
traversent continuellement notre esprit, notre bavardage mental.
Chögyam Trungpa
Pour méditer, pour demeurer le témoin de ce qui se passe en vous, pour découvrir
quelle est la source de la pensée, pour appliquer l’enseignement au plus haut niveau,
le préalable est de gagner une certaine maîtrise de vos fonctionnements mentaux. Si
vous n’avez pouvoir sur rien, si vos pensées vagabondent dans un sens et dans
l’autre, vous devez utiliser des supports même si ce ne sont jamais que des béquilles.
Il est beaucoup plus facile de tuer un animal qui n’a qu’une seule tête que de vaincre
l’hydre aux mille têtes. Vous connaissez lez douze travaux d’Hercule. Vous coupez
une tête au mental, mais il lui en reste 999 autres. Si votre mental est plus unifié, plus
cohérent, si ce ‘’je’’ apparaît au milieu de cette foire d’empoigne, viendra un jour où
le mental sera enfin un animal monocéphale. Et si vous tranchez alors cette tête
unique, le mental a complètement disparu. Tant que ce mental sera
multiple, éparpillé, dispersé, vous n’arriverez pas à lui échapper. Il faut d’abord que
vous établissiez une certaine hiérarchie en vous, que vous ne soyez plus une
démocratie à la veille de la guerre civile mais un ‘’royaume’’. Et que le ‘’you yourself’’
de Swamiji, ‘’vous, vous-même’’ soit le souverain légitimement rétabli sur le trône
dans ce royaume, jamais plus emporté à gauche ni à droite, échappant aux émotions,
un ‘’je’’ stable, libre, unifié. Nous ne sommes pas encore au cœur de la métaphysique,
mais toujours au niveau du plan à deux dimensions. Par toutes les pratiques qu’une
voie ou une autre vous propose, par l’exercice, par la compréhension, par la vision,
vous développez une conscience de soi autonome comme un centre de gravité
durable, une conscience qui ne se laisse plus complètement identifier. Une conscience
qui demeure sereine à travers toutes les vicissitudes de l’existence ou, en tout cas, qui
subsiste à travers les vicissitudes de votre monde intérieur, à l’intérieur des joies et
des peines, même si vous n’êtes pas encore en mesure de recevoir d’un même front
les bonnes et les mauvaises nouvelles. Me voilà tout heureux, tout joyeux, mais je
vois bien que c’est un bonheur dépendant et je suis là au centre. Me voilà peiné,
inquiet, mais je reconnais que ce n’est qu’une émotion et je suis là, capable de me
souvenir de l’enseignement et capable de le mettre en pratique. C’est encore un ‘’je’’
individualisé, c’est ‘’vous’’, c’est ‘’moi’’ au sens le plus accessible, mais c’est la
première partie du chemin.
Je me permets donc de dire que l’enseignement de Ramana Maharshi ou de
Nisargadatta Maharaj nécessite un préalable. Il s’adresse à des candidats directement
mûrs pour entrer en faculté alors que la plupart des chercheurs spirituels, non
seulement occidentaux mais même indiens, doivent d’abord passer par l’école
primaire et le secondaire. Je vois en vous un personnage ou un autre, un état d’âme
ou un autre, un désir auquel succède le désir contraire, une décision puis l’opposé de
cette décision huit jours plus tard, mais VOUS, vous n’êtes pas là. Et si cette première
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étape est claire pour vous, si elle est bien vécue—cela vous demandera six mois, deux
ans, trois ans, dix ans— le deuxième aspect du chemin vous devient non pas
intellectuellement compréhensible, mais accessible. Vous savez alors que vous
pourrez dépasser ce ‘’je’’, ce ‘’je suis’’ unifié. Quelqu’un vous traite durement,
méchamment, vous ne réagissez pas, vous percevez la profondeur sous la surface,
parce que vous voyez d’abord la surface au lieu d’être aveuglés par vos émotions. Le
travail sur les émotions a été accompli, vous êtes vigilants, calmes, détendus, vous
répondez à la situation mais encore avec le sens que c’est ‘’moi’’ l’agissant. Je suis un
homme, je rencontre une femme belle et attirante et la manière dont elle me regarde
montre que j’ai toutes mes chances. Au lieu d’être emporté par le personnage du Don
Juan qui s’élève en moi, je suis capable de prendre en considération l’ensemble de la
situation et sans sacrifice, sans frustration, de dire non, non en toute sérénité,
simplement parce que cela trahirait ce qui est non pas ‘’bien’’ mais ‘’juste’’. J’ai un
sentiment de moi auquel je peux revenir, une liberté par rapport à mes idées noires,
mes idées roses, mes moments d’enthousiasme, mes moments dépressifs, une
stabilité intérieure, une permanence comme un fil passant à travers les différentes
perles d’un collier. Je ne monte plus sur mes grands chevaux, je ne suis plus emporté,
je ne suis plus déprimé, je ne suis plus excité. Et cependant, ce ‘’je suis’’ paisible est
encore insatisfaisant. Je ressens encore toute l’existence par rapport à moi. Il y a
toujours un mode de penser qui s’organise entièrement autour de cette première
pensée : ‘’je suis’’. Pas le ‘’aham asmi’’ de Ramana Maharshi, mais le ahamkar, ‘’je suis
moi’’. Même débarrassés de toutes les émotions qui m’aveuglaient, les pensées
fonctionnent toujours selon la dualité et dans le temps. Mais quelle en est la source
encore plus profonde ? N’y a-t-il pas en effet une conscience suprême dans laquelle
toute limitation a disparu, dans laquelle ce ‘’je’’, ce ‘’moi’’ qui est le support de tous
les drames, de toutes les tristesses, s’est dissout ? Conscience infinie, parfaite,
totalement non conditionnée, supra intellectuelle, mais parfaitement vigilante.
De cette conscience, il est dit qu’elle se révèle dans le ‘’cœur’’, et non dans la tête avec
tout le mécanisme du penser habituel. Mais ce ‘’lieu du cœur’’ est difficile d’accès à
cause des émotions. Vous ne parviendrez pas à quitter la tête pour découvrir la
source même de l’être, la nature originelle de l’esprit, sans un long travail
préparatoire. Aujourd’hui le cœur est encombré par toutes sortes de désirs et de
refus, par les vasanas et samskaras. Et tant que le cœur ne sera pas purifié, les émotions
vont faire barrage. Même si vous arriviez à une grande maîtrise de votre mental, à
faire vraiment silence, à ce que toute pensée disparaisse, vous ne pourriez pas
demeurer dans cet état. Une expérience de samadhi vous tomberait du ciel mais les
vasanas dans l’inconscient remonteraient à la surface. Vous vous trouveriez de
nouveau soumis à la conscience limitée qui perçoit le monde dans la dualité et ne
peut pas émerger du plan horizontal.
Cet éveil intérieur doit être longuement préparé. Il se peut que vous soyez dans le
védantisme comme un poisson dans l’eau, mais il faut que le vedanta devienne vécu
pour vous. Comment échapper à la conscience de soi habituelle, au ‘’je’’, au ‘’moi’’ ?
Toute la question est là et c’est à cette question que tous les chemins dualistes ou non
dualistes ont cherché à répondre : comment trouver cette dimension verticale qui
existe en vous et en laquelle tous les problèmes disparaissent ? Comment accéder à la
révélation de la Conscience Pure par rapport à laquelle le monde en effet ne revêt
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plus qu’un aspect tout à fait relatif ? Ce qui domine alors, c’est l’éternité et
l’indestructibilité de la conscience sans forme, parce que la limitation individuelle a
disparu. Les mystiques vous diront : quand l’homme s’est entièrement vidé de luimême, Dieu se révèle. Non pas moi, mais Toi. Ils témoignent aussi pour cet
effacement de l’égocentrisme et cette découverte en soi d’une autre conscience. Que
l’on s’exprime en langage chrétien, comme Jean de la Croix et Thérèse d’Avila, ou en
langage bouddhiste comme Nagarjuna et Milarepa ou en langage upanishadique
comme Sankarâchârya, l’essentiel réside dans la découverte de cette conscience supra
individuelle que vous pouvez appeler ‘’Dieu en moi’’ ou ‘’le Saint-Esprit en moi’’, ou
‘’la Trinité en moi’’—et que vous pouvez aussi appeler la réalisation du Soi suprême,
puisque c’est au plus profond de moi que celui-ci se découvre.
Arnaud Desjardins
On peut résister à la notion de rituel au nom de la spontanéité mais l’un n’exclut pas
l’autre. La mise en scène de la vie est importante. En dehors de toutes convictions
religieuses, chaque personne devrait pouvoir disposer d’un lieu, d’un coin, qui
représente son soi, le cœur silencieux de son être. Dans une maison, il est important
de réserver une place où il ne se passe rien, où l’on se recueille paisiblement,
quelques minutes par jour.
La méditation n’est pas une pratique orientale. Vous pouvez vous asseoir en demi
lotus sur un coussin, si cela vous est agréable, mais vous pouvez aussi adopter une
chaise ou un fauteuil. L’essentiel est dans cette compréhension de l’intériorité. Je
ferme les volets, entendez : je ferme les yeux et je rentre en contact avec un moi plus
profond. Au début, vous aurez toutes sortes de pensées. Vous apprendrez à les
regarder passer. Et puis, peu à peu, vous vous servirez plus spontanément de la
respiration pour rafraîchir votre être et modifier votre niveau de conscience.
Paule Salomon
Nous voici arrivés à l’exercice pratique, qui n’a rien à voir—vous le devinez déjà—
avec une simple disposition intérieure, la pieuse contemplation de nobles et sublimes
sagesses, la confrontation abstraite de soi-même avec de saints modèles, mais qui
consiste au contraire en un travail très dur, très concret, sur le corps et l’esprit.
J’emploie ici le mot ‘’corps’’ dans ce sens tout à fait nouveau et surprenant au
premier abord pour des Européens : il ne s’agit pas du tout du corps ‘’que l’on a’’, et
qui doit avant tout être sain et en bonne forme, mais du corps ‘’que l’on est’’, et dont
le premier devoir est de devenir transparent à la réalité supérieure.
Karlfried Graf Dürckheim
41
La meilleure posture est udasina (position de relaxation totale et de complet
détachement). L’asana la plus efficace est celle qui est la moins affectée par le monde
extérieur (udasina = non affecté).
Sathya Sai Baba
En fait que l’on soit debout ou assis ou que l’on marche, toute attitude du corps est
un asana. Elle correspond au rythme et à la vibration du corps et de l’esprit à un
moment donné. Certains débutants ne peuvent méditer qu’assis dans la posture
prescrite par leur guru ou indiquée dans les Ecritures, et pas autrement. C’est ainsi
que l’on devient capable de bien méditer. Mais il y en a qui peuvent commencer leurs
pratiques assis dans n’importe quelle position normale ; pourtant dès que le japa sera
devenu naturel ou que l’état de dhyana aura été atteint, le corps prendra
spontanément la position la plus appropriée.
Mâ Ananda Moyî
Au fur et à mesure que la méditation sera plus intense, les postures gagneront
d’elles-mêmes en perfection. Quand un pneu est très peu gonflé, il est flasque, mais
s’il est gonflé à bloc, il conservera sa forme naturelle. De même lorsque la vraie
méditation a été atteinte, le corps se sent léger et libre, et lorsqu’on se lève après la
méditation, l’on ne ressent aucune fatigue que ce soit, ni douleur, ni courbature, ni
engourdissement des membres.
Mâ Ananda Moyî
Lorsqu’on parvient à la vraie méditation, la posture que l’on a choisie ne peut plus
présenter ni un obstacle ni une source de plaisir ; en d’autres termes, peu importe la
posture particulière que l’on prend. Que l’on soit assis droit ou tordu, la bonne
posture viendra d’elle-même et le corps prendra la position voulue. Mais de
nouveau, il y a des cas où l’on devient complètement indépendant de la position
physique ; quelle que soit cette position, la méditation vient sans effort. Cependant, il
ne fait aucun doute qu’il y a un état où, si l’on prend une posture spéciale, par
exemple padmasana (la pose du lotus) ou siddhasana (la pose parfaite) —rien ne peut
jamais venir interrompre l’union avec l’Etre suprême.
Mâ Ananda Moyî
42
Si, en prenant des asanas, vous avez accédé au propre rythme de la nature, vous
verrez que tout se déroulera sans heurts et spontanément.
A quels signes peut-on le reconnaître ?
A ce qu’on éprouve un profond contentement, le sentiment de jouer, et à ce que le
souvenir de l’Un est constamment présent.
Mâ Ananda Moyî
Des échecs reflètent toujours une disposition fausse, même si l’on domine la
technique.
Karlfried Graf Dürckheim
Il est bien regrettable que les Occidentaux ne voient plus dans la RESPIRATION que
la prise et la restitution de l’air, et non le mouvement fondamental de l’être humain,
cet accueil et ce don de soi qui vont bien au-delà d’une simple inspiration et
expiration physiques. Ce processus physiologique n’est que l’aspect corporel de la
respiration. En inspirant nous sommes emportés par un souffle venu d’un espace
silencieux, secret, invisible, et où nous réalisons une forme qu’ensuite nous devons
de nouveau abandonner en expirant. C’est le mouvement du yin et du yang, l’éternel
mouvement de la transformation. Voilà ce que signifie la respiration dans notre
travail.
Ce phénomène d’interaction entre l’expiration et l’inspiration se retrouve dans la
‘’tenue’’ de l’homme, dans sa manière d’être là. Dans sa façon de se tenir debout,
d’être assis, de marcher, il se peut qu’il témoigne essentiellement de son moi : il
oscille, du point de vue de la tension, entre la crispation et le relâchement, au lieu
d’être dans une unité harmonieuse de tension et de relâche. Cette tension n’est pas
uniquement affaire de contraction musculaire, même si elle l’est AUSSI du point de
vue physique. Elle dépend autant de la manière dont les muscles sont tendus, que de
celle dont VOUS êtes tendus dans vos muscles. Si, par exemple, votre cage
thoracique est contractée vers le haut, c’est que VOUS êtes contractés. C’est toute la
différence entre un regard classique et un regard personnel sur ces phénomènes.
Karlfried Graf Dürckheim
La respiration est le médiateur privilégié entre l’esprit et le corps. C’est par la
respiration que nous accédons à des états de conscience modifiés.
Plus la respiration devient consciente, plus le corps se détend, plus l’intérieur devient
comme frais et repassé, plus les idées s’éloignent pour laisser place au ressentir d’un
vide plein. L’être accède à ce nouveau plaisir au bout d’un certain temps de pratique
43
mais, quand on sait retrouver en soi à tout moment cet espace intérieur privilégié, la
sagesse en nous commence à tracer un sillon de joie permanente et inspiratrice.
Paul Salomon
Si l’on a compris que le physique et le psychique ne sont que deux aspects à travers
lesquels le sujet s’extériorise en même temps qu’il s’intériorise, on sait alors que, de
même qu’une modification intérieure entraîne une modification de l’attitude
corporelle, de même, la modification des attitudes corporelles entraîne une
transformation intérieure.
Deux attitudes fausses empêchent une réalisation du ‘’soi’’ en fonction de l’Etre
essentiel. Ce sont : la crispation et la dissolution.
La crispation exprime l’emprisonnement dans un ‘’moi’’ éloigné des forces du
‘’fond’’ et ne recherchant que sa propre sécurité. La dissolution signifie le manque
d’un sens de sa responsabilité quant à l’attitude permettant à l’Etre de s’exprimer et
de se réaliser dans la forme qui lui correspond. Au même titre que l’action contractée,
l’attitude dissolue (‘’se laisser aller’’), gêne toute guérison : elle barre aussi la route de
la réalisation personnelle en tant que ‘’soi’’.
Chacun doit, un jour, se rendre compte dans quelle mesure l’alternance continuelle
de ces deux états empêche le développement du centre créateur. Celui qui s’est
vraiment engagé sur le chemin doit tenter de vaincre ces pires adversaires de
l’attitude juste. Dans toute action contractée, un égocentrisme démesuré et un ‘’moi’’
qui ne ‘’lâche jamais les commandes’’, qui ne cesse d’observer, perpétuellement sur le
qui-vive, bloquent les forces essentielles qui agissent, en fonction de leur propre loi,
dans l’obscurité. Pour pouvoir agir sans être dérangées, ces forces exigent une
confiance fondamentale, au sein de laquelle l’homme s’abandonne à l’ETRE
libérateur, présent en lui dans son Etre authentique. Toute contraction est
l’expression d’une méfiance envers la Vie et l’ETRE DIVIN.
Dans la dissolution, l’homme se laisse aller et déborde hors de sa ‘’forme’’. L’homme
‘’juste’’ possède toujours une ‘’conscience de la forme’’ (Gestaltgewissen) qui exclut
la dissolution. C’est pourquoi la façon juste ‘’d’être là’’ implique, en même temps
qu’un ‘’laisser-faire’’, une sorte de ‘’collaboration’’ dans la profondeur de nousmêmes.
Ces deux qualités font défaut à la majeure partie des hommes ; il leur manque les
deux conditions essentielles d’une vraie disponibilité : la perméabilité sereine et
l’attitude reflétant l’image essentielle.
L’homme en tant que Personne, c’est-à-dire englobant l’âme et le corps, s’épanouit et
se réalise à travers chacune de ses formes d’expression, mais également et surtout à
travers ses attitudes, son tonus et sa respiration. Ceux-ci ne doivent jamais être
envisagés sous un angle exclusivement corporel. Des attitudes erronées, un tonus
erroné, une respiration erronée, sont autant de manifestations de l’imperméabilité et
du manque de ‘’forme’’ de l’homme tout entier. C’est uniquement pour cette raison
que la pratique de l’attitude juste, du tonus juste, de la respiration juste, peut
entraîner une mise en ordre de l’homme tout entier. C’est cette reconnaissance qui
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ouvre à chacun le champ d’action le plus vaste : c’est là que le quotidien sera utilisé
comme exercice.
Karlfried Graf Dürckheim
Les méthodes de méditation, les techniques et les objectifs varient largement parmi
les aspirants et les disciples. Certains s’y adonnent avec intensité, d’autres ont une
attitude plus détendue. Certains aspirants préfèrent une heure et un endroit précis
pour méditer, alors que d’autres trouvent tout autant de profit à pratiquer à
n’importe quelle heure de la journée, même dans un endroit bruyant et peuplé.
Aucune manière de méditer n’est meilleure que les autres. Chacun doit trouver sa
propre méthode.
‘’Peut-on enseigner à quelqu’un la méditation ou prétendre le faire ? Peut-on avoir
cette prétention ? On peut, à la rigueur, indiquer la bonne posture, la manière de se
tenir, la position des jambes, des pieds, des mains, du cou, de la tête et du dos, on
peut encore donner des conseils sur la respiration, sur son rythme. Mais la
méditation est une fonction intérieure, subjective, calme et profonde ; le mental se tait
et l’étincelle divine jaillit du fond de l’être et l’emplit tout entier. C’est une discipline
qu’aucun livre ne peut enseigner et qui n’est l’apanage d’aucune classe.’’
Sathya Sai Baba
Il existe cent douze techniques méditatives. Je les ai toutes appliquées, cela m’a pris
des années, mais je voulais savoir en quoi elles consistaient. J’ai découvert avec
surprise qu’en dépit de leurs différences apparentes, elles reposaient toutes sur un
seul point essentiel : l’observation neutre et silencieuse. Je puis donc vous dire qu’il
n’existe qu’une seule façon de méditer, qui est de rester le témoin. Cela vous
transfigurera et vous ouvrira les portes de Sathyam, Sivam, Sundaram, la Vérité, la
Divinité, la Beauté du Tout.
Osho
Quasiment tous les méditatifs sont un jour ou l’autre tombés sur le fait qu’en gardant
les yeux mi-clos, on échappe aux pièges que sont l’investissement excessif dans le
monde extérieur et l’obnubilation par des rêveries intérieures. Le point est de se tenir
exactement à la frontière entre les deux.
Osho
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Au début, les pensées se précipitent les unes après les autres, sans interruption,
comme une cascade dévalant la pente escarpée d’une montagne.
A mesure que vous progressez dans la pratique de la méditation, les pensées
deviennent semblables à un torrent coulant dans une gorge profonde et étroite, puis
à un fleuve déroulant lentement ses méandres jusqu’à la mer.
Enfin, l’esprit ressemble à un océan calme et serein que trouble seulement de temps à
autre une ride ou une vague.
Sogyal Rinpoché
Si un homme s’engage dans la voie du japa ou de dhyana ou de la bhakti, une petite
dose de contrôle respiratoire lui suffira pour contrôler son mental.
Ramana Maharshi
Pour que dhyana devienne stable, l’aspirant devrait cultiver le contrôle des sens et des
passions ainsi que l’attitude d’agir sans aucun désir pour le fruit de l’action.
Sathya Sai Baba
Est-ce que vous aimez davantage, est-ce que vous parlez moins, est-ce que vous
aidez mieux autrui ?
Voilà quels sont les critères de réussite dans la méditation !
Vos progrès doivent être authentifiés par la transformation de votre caractère et de
votre conduite.
Sathya Sai Baba
L’un des malentendus les plus fréquents dans l’enseignement de la méditation
consiste à croire que l’on peut devenir autre simplement en se tournant vers des
sphères plus élevées. On peut s’identifier à des valeurs religieuses ou spirituelles
élevées, mais tant que l’on reste le même petit moi naturel, qui n’a d’autre ambition
que la paix chez soi—comme un homme qui rêve de cimes vertigineuses de
montagnes mais ne les a jamais vues que d’en bas et n’a jamais fait d’ascension—on
ne fera que projeter ses vœux et ses angoisses, mais on ne se transformera pas.
Il s’agit donc, au contraire, pour l’homme de NE PAS essayer de s’identifier à des
sphères supérieures à la sienne, mais de tenter avec lenteur et humilité de progresser
peu à peu sur la voie du progrès INTERIEUR. C’est l’un des points fondamentaux
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d’après lequel on reconnaît une méditation réussie : on en sort avec un sentiment de
progrès, d’élargissement intérieur, qui est le signe que l’on s’est rapproché de sa
nature spirituelle, en un mot que l’on est plus naturel. Quand on sort d’une
méditation authentique, on ne plane pas au-dessus des nuages. On se sent davantage
SOI-MEME : un peu plus fort, plus lumineux, plus chaud—non pas plus loin du
monde mais plus ouvert au monde. Etrangement on sent que la chaleur, la lumière et
la force n’appartiennent pas à ce monde, mais viennent d’ailleurs nous vivifier.
Karlfried Graf Dürckheim
Ne faites pas l’erreur que j’ai commise pendant des années, croire que ‘’la pratique’’
consiste à s’asseoir bien droit et à réciter des mantras tout en pensant : ‘’Je serai
content quand ce sera fini !’’ La pratique est beaucoup plus vaste que cela. La
pratique, c’est chaque personne que vous rencontrez, chaque remarque désagréable
que vous entendez, où même qui vous est directement adressée. C’est seulement
lorsque vous vous levez de votre coussin que la pratique commence réellement…Il
faut que vous preniez des situations de la vie réelle et que vous en fassiez votre
pratique. Sinon, votre croyance sera creuse ; elle ne vous procurera ni force, ni
réconfort lorsque les difficultés surviendront. Elle sera seulement une croyance du
type :’’Oh, un jour, j’irai au ciel ; un jour je deviendrai un bouddha.’’ Non, vous ne
serez pas un bouddha un jour ; vous êtes un bouddha aujourd’hui même. Quand
vous pratiquez, votre pratique est d’être ce que vous êtes…
Rick
Quand dhyana est bien établi, on ne peut plus s’en passer. Il se déroule
automatiquement, même quand on travaille ou que l’on s’amuse ou que l’on éprouve
du plaisir et même durant le sommeil. Dhyana doit avoir tellement imprégné les
couches inconscientes de l’être, qu’il devient naturel.
Ramana Maharshi
Rien ne peut être obtenu sans une pratique constante, c’est pourquoi, à chaque
instant, vous devriez vous souvenir de Dieu et être heureux dans cette pensée. C’est
alors seulement que vous pouvez obtenir la paix. Ne sommes-nous pas en paix
quand une pensée s’arrête et qu’une autre ne surgit pas ? Il vous faut attendre cet
instant de vide, être en symbiose avec cette paix. Alors cette paix deviendra
continuelle et durable.
Toujours les pensées s’élèvent puis se retirent comme des rides à la surface de l’eau.
Il vous faut regarder la masse aquatique et pas seulement les rides. D’une manière
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semblable, l’Atman demeure toujours en paix mais l’homme ne peut le réaliser et
reste perpétuellement absorbé dans les fluctuations du mental. Nityavadhan (la
vigilance constante) est nécessaire pour ignorer les vagues et observer
l’eau…L’agitation n’est que l’élévation puis la retombée de la vague au sein de
l’océan que vous êtes.
Sathya Sai Baba
De même que l’océan a des vagues et le soleil des rayons, ainsi les pensées et les
émotions sont-elles le propre rayonnement de l’esprit. L’océan a des vagues ;
pourtant, il n’est pas particulièrement dérangé par elles : les vagues sont la nature
même de l‘océan. Les vagues se dressent, mais où vont-elles ? Elles s’en retournent à
l’océan. D’où ces vagues viennent–elles ? De l’océan. De même, les pensées et les
émotions sont le rayonnement et la manifestation de la nature même de l’esprit. Elles
s’élèvent de l’esprit, mais où se dissolvent-elles ? Dans l’esprit. Quelle que soit la
pensée ou l’émotion qui surgit, ne la percevez pas comme un problème particulier. Si
vous n’y réagissez pas de façon impulsive mais demeurez simplement patient, elle se
déposera à nouveau dans sa nature essentielle.
Sogyal Rinpoché
Bien sûr, les vagues de l’océan ne sont pas toujours paisibles ; elles peuvent aussi être
déchaînées. De même s’élèveront des émotions violentes telles que la colère, le désir,
la jalousie. Un vrai pratiquant ne les considèrera pas comme une perturbation ou un
obstacle, mais les reconnaîtra au contraire comme une grande opportunité. Le fait
que vous réagissiez à de telles émotions selon vos tendances habituelles d’attirance et
de répulsion montre non seulement que vous êtes distrait, mais que vous ne savez
pas les reconnaître et que vous vous êtes éloigné de la base de Rigpa. Réagir ainsi leur
donne du pouvoir et resserre autour de vous les chaînes de l’illusion. Le grand secret
du Dzogchen est de voir directement les émotions pour ce qu’elles sont à l’instant
précis où elles s’élèvent : la manifestation vibrante et saisissante de l’énergie même
de Rigpa. Au fur et à mesure que vous y parvenez, même les émotions les plus
violentes n’ont plus la moindre prise sur vous et elles s’évanouissent, telles de
grandes vagues qui se creusent, se dressent avec furie, puis retombent dans le calme
de l’océan. Le pratiquant découvre alors—et c’est là une vue révolutionnaire dont la
finesse et la puissance ne peuvent être surestimées—que non seulement ses émotions
violentes ne l’emportent plus inexorablement, ne l’entraînent plus dans le tourbillon
de ses névroses, mais qu’il peut même les utiliser réellement pour approfondir,
enhardir, vivifier et renforcer Rigpa. L’énergie tumultueuse devient le matériau brut
de l’énergie éveillée de Rigpa. Plus l’émotion est forte et ardente, plus Rigpa est
renforcé. A mon sens, cette méthode spécifique au Dzogchen a le pouvoir
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extraordinaire de dénouer les blocages émotionnels et psychologiques les plus
profondément enracinés et les plus opiniâtres.
Sogyal Rinpoché
Le subconscient est bien plus puissant que le conscient et peut être amené au niveau
conscient. Quand vous méditez, le subconscient commence à remonter à la surface et
tend à se révéler. Les samskaras ne sont pas suspendus en l’air ; ils ont pour support le
subconscient qui est une force bien plus puissante que le conscient.
Chandra Swami
La plupart de vos rêves résultent des émotions et des désirs que vous réprimez. Les
rêves agissent comme une soupape de sécurité.
Chandra Swami
Dans l’inconscient, il n’y a pas de logique, il n’y a pas le sens du temps ni de l’espace,
pas de jugements de valeur.
Swami Prajnanpad
L’inconscient ne connaît ni la causalité, ni le temps.
Ce ne sont que des séquences non connectées provoquant des associations.
Swami Prajnanpad
L’inconscient préserve intacts ses contenus : cela devient inconscient sans perdre son
identité et s’exprimera subrepticement car cela ne pourra se montrer ouvertement au
mental.
Swami Prajnanpad
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L’inconscient, décrit par Freud comme un processus dynamique caractérisé par un
conflit permanent : conflit entre des forces contraires (tendances, désirs), conflit avec
les exigences morales et religieuses, conflit avec le monde extérieur, se caractérise
essentiellement par le camouflage et le refoulement.
Daniel Roumanoff
Tant que l’émotion refoulée est présente, elle cherchera à s’exprimer. Quelle que soit
la manière dont on souhaite la refouler, elle trouvera le moyen de s’exprimer, en
prenant n’importe quel déguisement : malaise etc…
Une émotion est une énergie et toute énergie doit s’exprimer jusqu’à ce qu’elle soit
épuisée.
Swami Prajnanpad
Les émotions, les émotions refoulées doivent être libérées.
Alors et alors seulement la division, la séparation et, à leur suite, les conflits internes
disparaîtront.
Swami Prajnanpad
Qu’est-ce qui bloque l’expression des émotions ?
C’est le conflit entre le désir et la réalité extérieure ou encore entre le désir et l’idéal.
‘’La totalité des êtres vivants ne sont que désir.’’ Le désir détruit la paix de l’esprit. Le
désir cherche une gratification qui dépend des objets extérieurs. Aucun problème ne
peut rester dans le psychisme de manière permanente, parce que le psychisme, de
par sa nature même, cherche à rejeter toutes les causes de troubles. Sans cette
tendance naturelle, l’individu ne pourrait survivre car les sources de troubles venant
du monde extérieur sont innombrables.
L’homme vient au monde pour se révolter contre la nature du monde. Le psychisme
cherche ainsi des moyens pour préserver son équilibre. Le moyen le plus simple est
d’isoler et de séparer ces tendances opposées. Quand deux enfants d’une même
famille se querellent, le père cherche à les séparer en les envoyant chacun dans une
chambre séparée tout en les gardant sous le même toit. De la même façon, le
psychisme cherche à isoler deux idées contradictoires qui peuvent ainsi être
énergétisées à des moments différents ou encore envoyées dans des compartiments
différents du psychisme.
Cependant, même dans ce cas, il n’est pas possible de mettre fin pour toujours à la
bataille qui se livre dans le psychisme et ceci pour deux raisons :
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—Il est impossible d’isoler complètement les unes des autres les pulsions
antagonistes. C’est pourquoi, d’après le Yogasûtra : ‘’Le trouble psychique est une
agitation de l’esprit provenant d’un désir contrarié.’’
—Chacun est capable de distinguer les sensations et les émotions les plus délicates et
les plus subtiles et possède un pouvoir de critique et de connaissance qui le rend
conscient de la présence d’idées contradictoires qui se trouvent en lui et de l’agitation
qu’elles provoquent.
On est toujours à la recherche de solutions alternatives : d’abord séparer les
tendances mutuellement contradictoires les unes des autres. Puis on essaye de rejeter
hors de sa conscience (awareness) l’émotion et l’idée qui s’y trouve attachée. Cette
dernière se trouve alors renvoyée dans l’inconscient. C’est ce qu’on appelle
refoulement. L’attitude contraire consiste à prendre connaissance de ces idées
conflictuelles. C’est la voie de la discrimination (vichara).
Le conflit peut alors être résolu par la compréhension de ce qui est en cause. Mais
cela demande une grande connaissance et une tolérance dont l’individu n’est pas
toujours capable.
C’est pourquoi l’individu cherche à utiliser toute son énergie à refouler une tendance
ou une émotion. Le refoulement est omniprésent. Le refoulement est exercé par la
société, les maîtres, les aînés et les parents. Et surtout par les conventions sociales et
les codes de comportement. La société est construite sur le refoulement…
Par la résistance ou le refoulement, les désirs sont réprimés et s’alliant aux émotions
correspondantes forment un complexe. Ces complexes ne peuvent être connus
directement. C’est le moi qui les empêche de s’exprimer ouvertement.
Venkateshvar
Le refoulement s’exprime de deux manières : le refoulement du désir proprement dit
et le refoulement du désir refoulé qui cherche à s’exprimer (retour du refoulé). C’est
ce qu’on appelle la résistance…
Le névrosé manifeste différents symptômes pour échapper à ses idées et oublier ses
souvenirs pénibles :
—Il reste absorbé toute la journée dans une activité ou une autre de façon à ne pas
s’en souvenir.
—Ceux qui éprouvent une grande peine s’efforcent de la recouvrir par l’humour et
par les jeux de mots.
—Nous ne voulons pas voir généralement chez les autres les choses que nous
voulons oublier ou refouler ou que nous avons refoulées avec succès ; ainsi nous
accordons une importance exagérée aux choses opposées à celles qui nous sont
intolérables.
Venkateshvar
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Après le refoulement, les émotions refoulées se transforment en rêves, imaginations
et fantasmes, erreurs de la vie quotidienne, symptômes…
Parmi toutes ces activités mentales et physiques, la place la plus importante est prise
par la perte de mémoire, dont on trouve deux variétés : amnésie et simple oubli. C’est
ainsi qu’on ne se souvient pas des événements de son enfance. Ce qui montre bien la
présence de la censure.
On ne peut échapper aux idées et aux impulsions que nous voulons refouler.
L’interdit accroît l’importance accordée aux choses interdites.
Venkateshvar
Le terme sanscrit ‘’alaya vigyan’’ désigne la maison dont la cave est le dépotoir de tout
ce que vous auriez aimé faire, mais que vous vous refusez à cause des interdits
sociaux, de la culture, de la civilisation. Rien n’est supprimé. Les choses refoulées
s’accumulent et influencent secrètement tous les aspects de votre vie. Elles ne
peuvent agir franchement, ouvertement, puisque vous les avez condamnées aux
oubliettes. Mais du fond de leur cachot, elles tirent les ficelles de votre
comportement. Elles sont dangereuses comme le sont toutes les forces comprimées.
On pourrait dire que la folie est le franchissement du seuil au-delà duquel les
contenus psychiques refoulés ne peuvent plus être jugulés et se libèrent sans retenue.
Curieusement, la société tolère la folie et dédaigne la méditation, alors que méditer
est la seule manière d’être vraiment sain.
Osho
L’homme à l’esprit superficiel mène une vie superficielle. C’est pourquoi les pulsions
spontanées qui viennent des profondeurs du psychisme lui font peur. En d’autres
termes, il veut cacher le feu sous la cendre. Mais cette tentative est futile. Les pulsions
venant de l’inconscient cherchent à s’exprimer par toutes les issues possibles. Même
si cet homme ne s’exprime pas consciemment avec des mots, toutes ses pulsions—
venant de chacun de ses organes et de chaque pore de sa peau et aussi du
mouvement constant de ses yeux, oreilles, nez, mains, pieds, etc…s’expriment sous
forme déguisée. De plus, les tendances présentes dans son psychisme abandonnent la
logique du conscient et entreprennent de mettre en œuvre des fantaisies sans queue
ni tête. Les émotions refoulées insatisfaites cherchent à obtenir satisfaction d’une
manière ou d’une autre par l’activité de l’esprit, de la parole et du corps.
Si nous voulons complètement nous connaître, toutes nos activités devront être
mises, sans réserve aucune, sous la pleine lumière de la conscience, nous devrons
accepter hardiment notre nature essentielle et rejeter les impressions fixes et
superficielles de notre conscient insignifiant.
Swami Prajnanpad
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L’homme n’est pas ce qu’il semble être, il est beaucoup plus vaste. Nous ne
connaissons l’homme que de manière très partielle.
Il vous faudra comprendre ces cinq catégories : la première est l’esprit conscient.
L’esprit conscient est tout petit, c’est une petite partie de vous qui peut raisonner,
penser, rationaliser, procéder logiquement et qui est un tant soit peu vivante. C’est
une toute petite partie de vous et nous ne connaissons l’homme qu’au moyen de
cette petite partie.
Nous avons examiné le palais de la conscience humaine à partir d’un petit trou, peutêtre le trou d’une serrure. Et tout ce que nous avons pu voir à travers le trou de la
serrure n’est pas la réalité totale. L’homme est vaste. Tapi derrière l’esprit conscient,
il y a l’esprit inconscient. Sa découverte est la grande contribution de Sigmund Freud
à l’humanité. L’esprit inconscient est neuf fois plus vaste que l’esprit conscient. Il
contient tous vos instincts, il contient tous vos fonctionnements internes, vos
mécanismes corporels, vos émotions et vos sentiments. Excepté la logique, il contient
tout de vous.
Mais ceci est caché dans l’obscurité. Freud a défini la psychanalyse comme un effort
pour rendre l’inconscient conscient, pour que votre conscience devienne un peu plus
vaste. Plus de lumière doit pénétrer dans les ténèbres de l’inconscient, parce que
l’inconscient est neuf fois plus puissant. Tout ce que vous pouvez décider par le
conscient ne pourra se matérialiser à moins d’atteindre l’inconscient.
C’est pourquoi l’hypnose va plus en profondeur que toute autre méthodologie.
L’hypnose travaille directement sur l’inconscient. Pendant des années, vous pouvez
essayer de laisser tomber une certaine habitude et vous n’y parviendrez pas, parce
que vous essayez seulement à partir de l’esprit conscient. Et le conscient est très
limité, il n’a aucun pouvoir face à l’inconscient. Et l’inconscient n’a aucun moyen de
savoir ce que pense le conscient.
Mais l’hypnotiseur peut vous aider à laisser tomber cette habitude en quelques
secondes ou tout au plus en quelques séances, parce qu’il endormira le conscient et
qu’il se mettra à communiquer directement avec l’inconscient. Et si l’inconscient est
d’accord d’abandonner l’habitude, alors elle est abandonnée. Alors, il n’y a plus
moyen pour le conscient de la conserver.
Toutes les réalités changent à partir de l’inconscient. Mais l’inconscient lui-même
n’est qu’une partie. Caché derrière celui-ci, il y a un inconscient collectif qui contient
tout votre passé. Et ce n’est pas peu de chose. Parce qu’autrefois, vous avez été un
lion, vous avez été un serpent et vous avez été un arbre.
Le concept oriental de passer par 84 millions de naissances est important. Il peut ne
pas être tout à fait précis, mais il est important. Quatre-vingt-quatre millions de
naissances avant de devenir un homme et toutes ces naissances et leurs expériences
sont contenues dans l’inconscient collectif. C’est presque toute l’histoire, depuis son
tout début—si jamais il y eut un début.
Il revient à Karl Gustav Jung d’avoir apporté l’idée de l’inconscient collectif et de
l’avoir introduite dans le monde de la psychologie. Mais ce ne sont que des parties,
même l’inconscient collectif n’est qu’une partie. Et la psychologie occidentale n’a pas
encore commencé à monter. Elle descend : le conscient, en dessous l’inconscient, et
encore en dessous l’inconscient collectif.
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Au-dessus du conscient, il y a le supraconscient, neuf fois plus vaste que le conscient.
Au-dessus du conscient, parallèlement à l’inconscient, il y a le supraconscient. Et audessus du supraconscient, il y a l’Esprit Cosmique que vous pouvez appeler Esprit
Divin ou Esprit de Dieu ou Tao. C’est l’ultime de la conscience : tout est devenu
conscient et vous êtes aussi vaste que le cosmos.
Si vous allez plus bas que le conscient, vous entrerez dans les ténèbres. Si vous allez
au-delà du conscient, vous entrerez dans la lumière. Donc, en vous il y a cinq
consciences. Et vous n’êtes conscient que d’une toute petite partie, l’esprit
conscient…
Osho
Monter vers la supraconscience et l’Esprit cosmique est aller vers l’inconnu. Si vous
devenez capable de retourner en arrière, vous aurez appris comment pénétrer dans
les domaines dangereux de votre être. Et alors, l’étape suivante peut être franchie :
vous pourrez passer du conscient au supraconscient.
C’est dans le supraconscient que se produisent toutes les expériences avec les anges,
les devatas, les dieux, la kundalini, et l’ouverture des chakras et des lotus ; elles sont
toutes contenues dans le supraconscient. C’est un monde magnifique, psychédélique.
Au-delà, c’est le monde de l’Esprit Cosmique où toutes les expériences
disparaissent—laides ou belles, où l’expérimentateur est laissé seul. Une solitude
totale et absolue. Et c’est le but ultime de la conscience, ce vers quoi l’évolution se
dirige.
Mais avant de pouvoir faire ce saut quantique dans le monde qui est au-dessus de
vous, vous devez aller au plus profond dans vos racines, dans les racines ténébreuses
de votre inconscient et de vos expériences passées.
Bouddha et Mahavira ont essayé ; ils ont fait de grandes expériences. Ces expériences
s’appellent jati smaran : se souvenir du passé. Et le passé est vaste—si vous continuez
à vous en souvenir, il continue à révéler ses secrets.
L’homme qui a investigué tout son passé en reviendra absolument sain et entier,
psychologiquement. Il n’aura aucune perversion. Sa vie entière sera transformée juste
par cela et par son retour. Maintenant, tout ce qu’il peut jamais imaginer faire, il l’a
déjà fait de nombreuses fois et tout fut futile et en vain.
Avec cette compréhension, tout commence à changer. Et lorsque vous êtes libre du
passé, vous êtes capable d’entrer dans le présent : vous pouvez plonger
profondément dans le ici et maintenant.
Osho
L’inconscient de la vie actuelle est la résultante de tout le passé, aussi bien de la vie
actuelle que des vies passées. Il suffit d’être libéré de l’inconscient de la vie actuelle
pour être libéré dans le même temps de l’inconscient de la vie passée car
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l’inconscient des vies passées est présent dans l’inconscient de cette vie-ci, il en forme
le noyau. Le travail sur l’inconscient actuel dissout aussi bien l’inconscient venant de
cette vie que des vies précédentes car l’inconscient est indifférent au temps et à la
chronologie.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser à première vue, l’inconscient venant de
vies précédentes peut souvent apparaître plus facilement et avant l’inconscient
généré dans la vie actuelle. Cela peut être le signe d’une résistance, le contenu de
l’inconscient venant de la vie actuelle peut être plus douloureux à affronter, si bien
que la souffrance de la vie actuelle se trouverait comme recouverte des
représentations inconscientes ‘’venant de vies précédentes’’. Celles-ci serviraient en
quelque sorte de paravent à la vraie souffrance. A ce stade, les représentations venant
de vies antérieures seraient, somme toute, assez proches des fantasmes. Mais cela
n’enlèverait rien à leur réalité vécue par le sujet. En effet, comme le disait Swami
Prajnanpad : ‘’Le mental ne fait pas de différence entre le fantasme et la réalité.’’
C’est même cela sa caractéristique essentielle. La délivrance, c’est la délivrance du
mental, c’est-à-dire des fantasmes qu’il ne cesse de créer. Font partie de ces fantasmes
et donc du mental, tout ce qui relève des représentations inconscientes qu’elles
viennent de cette vie ou de vies antérieures.
Daniel Roumanoff
Pourquoi le passé existe-t-il ? Il existe sous forme de frustration (unfulfilment). Le
passé n’a pas été accompli (fulfilled) Ce qui est accompli, disparaît. La satisfaction ne
subsiste jamais sous forme de passé. Vous oubliez ce que vous avez obtenu, ce qui a
été satisfait. Seul ce qui est douloureux reste en mémoire et non ce qui est
agréable…La mémoire demeure seulement sous forme d’expérience douloureuse.
Swami Prajnanpad
S’il est nécessaire d’aller chercher dans le passé des sensations ou des images
douloureuses et de les revivre dans le présent, la ‘’cause’’ n’est qu’apparemment
dans le passé. La ‘’cause’’ est dans le présent. Tout ce qui vient du passé se trouve
dans le présent qui en est la résultante. Rechercher les causes dans le passé est le
signe de notre difficulté à les percevoir dans le présent. Mais elles s’y trouvent et
peuvent y être découvertes à condition d’avoir ‘’l’esprit vif, acéré et lucide’’. Pour un
tel esprit, aller dans le passé et à fortiori dans des vies antérieures est tout à fait
inutile.
Daniel Roumanoff
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Tout ce qui est dans le subconscient doit faire surface. Tout ce que vous supprimez
va dans le subconscient, sans disparaître, même si vous croyez vous en être
débarrassé. Il importe de réfléchir et de comprendre de manière juste tout ce dont on
ne veut plus, afin de pouvoir le surmonter.
Chandra Swami
Dans la méditation, le subconscient vient à la surface. Lorsque le conscient est passif
ou soumis, le subconscient resurgit ; les rêves et tous les éléments subconscients qui
se révèlent peu à peu constituent en quelque sorte une soupape de sécurité qui libère
les désirs réprimés. Laissez partir la vapeur. Soyez simplement le témoin de ce qui se
passe. Si vous ne vous mêlez pas des désirs/pensées qui surgissent, ils se calmeront.
Ne les choyez pas, ne les supprimez pas. Ils disparaîtront. Contentez-vous de les
observer tout en restant détaché.
Chandra Swami
Tout est dans la relation, tout est dans la progression, l’ouverture de la conscience du
disciple qui découvre peu à peu ses blocages, ses fixations, ses défenses qui
l’empêchent de voir, d’accepter et de réaliser ce-qui-est (tattva) ou la Vérité.
Daniel Roumanoff
Il est très salutaire que vos impulsions mauvaises remontent à la surface. Il faut
qu’elles sortent. Alors seulement vous pourrez vous en débarrasser. Mais je ne peux
pas vous voir mauvais. Je n’aperçois que votre Soi divin.
Mâ Ananda Moyî
Chaque condition, chaque circonstance, chaque expérience qui influencent votre vie
ne sont pas autre chose que l’objectivation, l’expression d’impulsions, d’opinions et
de convictions de votre subconscient.
Il faut comprendre que désordres, maladies, échecs, accidents et infortunes ne sont
que les manifestations des idées négatives ou des peurs que vous avez emmagasinées
dans votre subconscient.
Dr Joseph Murphy
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Il faut bien imaginer que la quête globale de l’être reconnecte en douceur des circuits
émotionnels et physiques laissés à l’abandon ou qui n’ont pas eu l’occasion de se
développer.
Daniel Odier
La seule possibilité de se libérer d’une perturbation émotive est de la ressentir. En
général, les êtres humains pensent leur émotivité ; à ce niveau, aucune liberté n’est
possible. C’est dans le ressenti de la peur, de la colère, de l’anxiété, de la jalousie ou
de la culpabilité que l’émotivité se libère. L’émotivité est corporelle.
Eric Baret
Aujourd’hui, l’attention accordée à l’inconscient et à l’écoute des profondeurs se
révèle parfois désastreuse et destructrice. Beaucoup de gens sont persuadés que s’ils
accordent à leur négatif la place de s’exprimer, ils seront plus près d’eux-mêmes et
deviendront plus authentiques. C’est vrai et c’est faux. Il y a deux formes d’attention,
l’une qui nettoie et libère, l’autre qui grossit les choses et qui ‘’plombe’’. La mise en
lumière du négatif permet de le transformer, le muter, l’alléger. La mise en culture de
ce même négatif lui fait prendre des proportions démesurées.
Paule Salomon
Quand quelqu’un s’ouvre à ses émotions, celles-ci quittent leurs prolongations
pathologiques, elles deviennent poétiques. Au lieu d’avoir peur de sa peur, on écrira
sur la peur, on peindra sur la peur, on fera de la musique sur la peur.
Eric Baret
Chaque fois que nous souffrons, cela signifie que nous sommes en conflit avec la
réalité. La souffrance indique, en conséquence, que la situation dans laquelle nous
nous trouvons impliqués est idéale pour nous faire changer intérieurement. Puisque
c’est cette situation précise qui nous affecte, c’est précisément sur elle que nous
devons travailler. Si nous n’y faisons pas face aujourd’hui, nous souffrirons à
nouveau quand nous serons confrontés à une situation de même type. Par contre, en
y faisant face, nous pouvons la dépasser et accéder à une plus grande capacité de vie,
nous pouvons à chaque fois assumer un plus grand nombre de situations et notre
adaptation au réel va en s’élargissant.
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Tant que l’on n’a pas perçu le caractère totalement illusoire de la souffrance, c’est-àdire tant que l’on n’a pas découvert en soi une sérénité inaltérable, il existe deux
façons de vivre la souffrance : soit tenter de la supprimer de sa vie, soit la porter
lucidement. La première solution est celle qu’adopte la majorité des êtres sans jamais
parvenir à leurs fins, recherchant une moitié de l’existence et fuyant l’autre. L’autre
solution concerne ceux pour qui la vie a un sens et qui savent que ce sens n’est jamais
perdu, même s’ils doivent faire face à des situations apparemment très difficiles. Ils
décident de vivre les deux moitiés de l’existence et à force de les vivre pleinement, les
notions d’agréable et de désagréable se nivellent et finissent par disparaître
puisqu’elles ne sont rien d’autre que nos projections sur la réalité. Seules demeurent
la paix et la joie inaltérables.
Véronique Loiseleur
Les leitmotivs propres à chacun sont, au départ, entièrement subjectifs. Un être
ressent qu’il manque totalement de confiance en lui ou qu’il n’est pas aimé ou qu’il
échoue dans tout ce qu’il entreprend. Tout le problème provient uniquement de ce
qu’il en est intimement convaincu. Et à cause de cette conviction qu’il projette
partout, à cause de sa façon d’interpréter tout ce qui lui arrive, les situations dans
lesquelles il se trouve finissent par ressembler à son leitmotiv : elles correspondent
objectivement à ce qu’il ressent subjectivement. Mais s’il pouvait soudainement
cesser de se voir et de voir la vie à travers son leitmotiv, du même coup tout serait
changé.
Il est très difficile de se libérer d’un schéma intérieur : bien qu’étant entièrement
fabriqué par son auteur, il trouve sa justification dans le fait que les situations de la
vie lui donnent raison. C’est un cercle vicieux dans lequel se débat l’individu.
Il faut comprendre en profondeur la loi d’attraction pour que puisse s’amorcer une
conversion. L’être doit réaliser que c’est précisément son leitmotiv qui l’amène à
subir des événements correspondants. Dès lors, son obsession doit être de s’en libérer
coûte que coûte.
Quelles sont les solutions qui s’offrent à lui pour s’en débarrasser ? Un travail sur
l’inconscient peut s’avérer nécessaire pour retrouver l’origine de ce mécanisme,
l’événement du passé qui a marqué l’être de façon tellement indélébile qu’il ne peut
que penser d’une certaine manière face à une situation donnée. Mais parallèlement à
ce travail, il existe une autre possibilité : CELLE DE CESSER DE PENSER SA VIE EN
TERME DE CONTINUITE INDEFINIE.
Habituellement l’être donne corps et vie à son leitmotiv en se disant : ‘’Cela a
toujours été ainsi, cela sera toujours ainsi et la situation dans laquelle je me trouve ne
fait que de me le confirmer.’’ Une attitude radicalement différente doit intervenir :
toute situation de l’existence qui réveille une douleur ancienne doit être perçue en
elle-même, sans aucune référence au passé ni au futur. L’être doit prendre conscience
de sa souffrance présente, détachée de tout contexte. Il coupe ainsi le continuum de
son leitmotiv. IL SE TROUVE SIMPLEMENT CONFRONTE A UNE SITUATION
QUI LE FAIT SOUFFRIR MAIS IL CONSIDERE CETTE SITUATION COMME
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UNIQUE—CE QU’ELLE EST EN REALITE. Il cesse de lui donner un impact exagéré
en l’alourdissant de toutes les expériences du passé et de toutes les éventuelles
expériences à venir de type similaire. Cette attitude est loin d’être facile à réaliser : le
leitmotiv a régné en maître pendant des années et le poids du passé pèse plus dans la
balance qu’un raisonnement juste. La conviction devra avec le temps s’approfondir
jusqu’à imprégner tout l’être et devenir ainsi plus forte que les mécanismes habituels.
Chaque instant sera alors perçu en lui-même, dans une perpétuelle nouveauté
Véronique Loiseleur
Le mot souffrance, je le prends dans le sens psychologique. La douleur, c’est autre
chose. Quand, à huit ans, votre grand-père vous a violée, il y a eu une douleur
physique qui a duré quatre minutes et demi. Les cinquante ans qui ont suivi, les
cinquante ans qui vous ont empêchée de vivre, c’est la douleur psychologique. C’est
de cela dont il faut se libérer.
On peut avoir un traumatisme physiologique, mais le corps intègre le traumatisme.
S’il ne peut pas l’intégrer, le corps meurt.
Ce qui empêche de vivre, ce n’est pas l’événement qui s’est passé quand on avait huit
ans, c’est les cinquante ans d’imaginaire, de critique, de refus, de jugement, de
culpabilité, etc.
C’est cela qui détruit le psychisme, ce n’est pas l’événement.
Jacques Lusseyran, à Auschwitz, n’a pas été détruit après un an et demi. Il raconte
comment des gens, après quinze jours, étaient affectés, jamais plus ils ne pourraient
vivre autrement. Voilà un témoignage ultime, à lire, à relire, à comprendre et vivre
avec cette compréhension.
Et la Lumière Fut : voilà l’un des grands livres de ce siècle.
L’événement ne compte pas, c’est la façon dont on y fait face. Le traumatisme est
dans l’image, c’est ce que l’on crée chaque instant. On croit avoir besoin de souffrir.
Comment puis-je vivre alors que ma femme m’a quitté ? Comment puis-je vivre alors
que j’ai un cancer ? Comment puis-je vivre alors que ceci, cela ?…C’est une histoire.
L’événement ne compte pas. C’est très difficile à admettre. On base sa vie sur cette
image qui justifie la dépression : mais quand même, j’ai bien le droit d’être déprimée,
quand on voit mon père, ma grand-mère, quand on voit ma vie. On essaie toujours
de justifier la souffrance, on lutte pour le droit à la souffrance ; c’est cela l’existence
humaine.
Si l’on vous dit : ‘‘Vous n’avez aucune raison d’être déprimé, il n’y a aucune
justification de souffrir, c’est totalement une création’’, bien sûr, c’est difficile à
entendre. Mais c’est encore plus difficile de vivre dans cette image. Alors tôt ou tard,
il faut l’entendre et se rendre compte que lorsque l’on ne prétend plus souffrir, à
l’instant on est libre. En un instant, il n’y a plus de psychologie, il n’y a plus
d’histoire. Il n’y a plus rien à accomplir dans sa vie, il n’y a plus rien à devenir, il n’y
a plus rien à éviter. Mais il faut accepter que toute notre vie, toute notre histoire est
uniquement une fabrication fantasmagorique. Cela n’a aucune réalité. C’est
uniquement une prétention.
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Eric Baret
On se rend compte (…) qu’une situation qui nous touche est exactement ce qui nous
est nécessaire pour trouver en nous les fractions incomplètes, qui se réfèrent à une
histoire. A un moment donné, tout ce qui nous fait peur, on se le souhaite. Si j’ai peur
que mon enfant meure, alors je me le souhaite, parce que cela va me faire découvrir
en moi ce que je n’ai toujours pas vu, sinon je n’aurais pas peur. Cela ne concerne
nullement l’enfant car, en fait, je ne connais pas mon enfant. Je ne connais que ma
projection sur l’enfant.
J’ai peur que mon mari me quitte : je souhaite que mon mari me quitte. Avec cette
peur en moi, je ne peux pas vivre de manière libre. De toute manière, mon mari me
quitte à chaque instant dans mon psychisme, autant le souhaiter. Alors on peut faire
face à ce qui n’est pas encore intégré en nous. Finalement, on se souhaite tout ce que
l’on craint. En suivant cette démarche vient la question : ‘’Qu’est-ce que je ne
supporte pas dans la vie ?
Tant qu’il y a un millimètre de la création qui n’est pas intégré, rien n’est intégré.
Tant qu’il y a quelque chose qu’on ne supporte pas, rien n’est supporté. Tant qu’il y a
un événement dramatique pour nous, tout est dramatique. C’est tout ou rien, on ne
peut se cantonner dans une partie. On intègre ces éléments que l’on ne supportait
pas : ‘’Je ne supporterais pas que mon fils meure’’. Cette restriction est toujours là.
Elle m’empêche de vivre. Alors je me souhaite d’actualiser cette restriction. En
procédant de la sorte, vous épuiserez rapidement le matériel à vous souhaiter, parce
qu’il n’y a plus rien que vous ne voudriez pas. A ce moment-là, il n’y a plus
d’histoire.
Eric Baret
La peur est une expérience de l’instant. Si vous avez été violée jeune et que, trente
ans plus tard, cette peur vous revient, ce n’est pas une peur d’il y a trente ans. C’est
maintenant que vous la sentez. C’est maintenant que vous avez le ventre et la gorge
serrés, que vous avez l’émotion, que les larmes viennent. C’est maintenant que vous
l’écoutez. C’est maintenant que vous vous libérez. Il ne s’agit pas de retourner dans
le passé, ni d’attendre non plus de vous libérer demain. C’est uniquement dans
l’instant, dans le ressenti. Ce ressenti a sa propre vie, son propre rythme. Laissez ce
ressenti vivre en vous, laissez la peur et l’émotion vivre en vous. Laissez l’expérience
sensorielle vivre en vous. Vous n’êtes pas dans l’expérience, c’est l’expérience qui est
en vous. Vous êtes dans cette ouverture. L’expérience pointe vers cette ouverture.
N’essayez pas d’en tirer quelque chose, ni de vous libérer de la peur. Dire : ‘’C’est
épouvantable, il y a encore cette peur qui m’habite’’ ne vous libère pas. Pas de
justification ni de condamnation. Donnez-vous au ressenti de l’instant.
Toute expérience pointe vers cette écoute. Vous ne pouvez pas décider d’écouter.
L’abdication non volontaire de tout sentiment de vouloir rejeter, de se libérer, de
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déplacer un conflit vous rend disponible à ce qui s’est fixé en vous. Vous ne visitez
pas le passé, c’est le passé qui vous visite. Ce n’est pas vous qui allez vers une
révolution. Dans cette ouverture, la peur peut vraiment commencer à respirer.
Quand on entreprend une thérapie, quand on commence la pratique du Yoga pour se
libérer de la peur, c’est un ajournement. On va trouver des concepts de plus en plus
fins, on va déplacer certaines peurs, mais cela se soldera par un déplacement. Si vous
avez peur des canards, vous pouvez arriver à ne plus avoir peur des canards, mais
une autre peur la remplacera inévitablement.
Tôt ou tard, vous en aurez assez de vous libérer de telle ou telle limitation. Vous
savez que la mémoire, le manque va toujours vous ramener au manque. Dans cet
arrêt, vous abdiquez sciemment toute compétence pour faire face au conflit. Vous
devenez disponible. A ce moment-là, c’est la vie qui, spontanément, va réveiller en
vous tel ou tel obscurcissement. Dans cette ouverture, la résolution de conflit a toute
la liberté pour s’exprimer. Quand vous voulez résoudre un problème, trouver sa
solution, vous ne faites qu’ajourner votre liberté profonde. Penser que l’on va y
arriver demain, dans quelques instants, dans vingt ans, après trente ans de
méditation et de Yoga, c’est une mascarade. Donnez-vous à l’évidence de l’instant ;
c’est dans ce moment seul que toute résolution trouve sa possibilité.
Eric Baret
Pour travailler sur ses émotions, il faut apprendre à les connaître, à les étudier et faire
preuve de neutralité à leur égard. Le travail sur les émotions passe donc par
l’acceptation inconditionnelle de nous-mêmes, de tous les phénomènes qui se
déroulent en nous. Il faut dépasser tout jugement dualiste de bien et de mal quand
on s’étudie et se contenter d’observer ce qui a lieu.
Véronique Loiseleur
Il faut vous accepter tel que vous êtes. Ne vous condamnez pas, ne condamnez pas
les autres. La condamnation est futile, elle ne transforme pas les énergies.
Le premier pas en avant est d’accepter. Collez au fait. Collez au fait de votre colère,
de votre cupidité, de votre luxure. Et explorez le fait dans sa ‘’facticité’’. Ne restez
pas à l’extérieur, à la surface. Explorez le fait dans sa totalité, suivez-le jusqu’à ses
racines les plus profondes. Parce qu’alors vous pourrez le transcender. Si vous
connaissez votre colère jusqu’à ses racines les plus profondes, vous en deviendrez le
maître. La colère devient alors un simple instrument, et vous pouvez l’utiliser.
Quel que soit ce que vous considérez comme votre ennemi—l’avarice, la colère, le
sexe, etc—c’est parce que vous les considérez comme tels qu’ils sont vos ennemis.
Acceptez-les plutôt comme des dons divins. Soyez reconnaissants de les éprouver.
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Acceptez-vous tels que vous êtes. Voilà le principe de base—l’acceptation totale. Et
ce n’est qu’en vous acceptant totalement que vous pourrez croître. En utilisant toutes
les énergies que vous possédez. Comment ? En les acceptant. Puis en découvrant leur
nature.
Vous êtes un grand mystère, un mystère composé d’énergies multiples,
multidimensionnelles. Acceptez-le et acceptez chaque énergie avec sensibilité, avec
conscience, avec amour, avec compréhension. Vivez avec elles ! Soyez un ! C’est par
l’acceptation que vous deviendrez un et non pas par le combat. Acceptez le monde,
acceptez votre corps, acceptez tout ce qui lui est inhérent…
Soyez simplement conscient de ce que vous êtes.
Osho
Je veux que vous connaissiez la colère, la lubricité…Mais pas pour les combattre ou
pour vous y adonner. Je vous demande d’être vigilants, d’observer ces émotions avec
une attention totale afin de vous familiariser avec leurs démarches, leurs astuces,
leurs déguisements, leur force.
Savez-vous que la colère s’éteint lorsqu’on la dévisage ? Vous avez l’habitude de la
refouler, plus rarement de la laisser éclater. Quoi qu’il vous arrive, vous ne regardez
pas et les choses vont et viennent en vous à votre insu. Dans cette ignorance réside
tout votre malheur et la violence comme la mollesse vous aveuglent de plus en plus.
Je vous propose une troisième solution, la seule qui en soit vraiment une. Elle
consiste à débusquer et à observer vos tendances, sans intervenir ni dans un sens ni
dans l’autre. Ne les justifiez pas, ne les condamnez pas, ne les magnifiez pas. Sous le
phare constant de votre lucidité, elles pâliront puis s’effaceront. Elles ne supportent
pas le regard franc. Elles ne vivent et ne survivent que sous le couvert des illusions.
Elles se nourrissent de votre distraction, de votre inconscience. Sous les feux de la
conscience, elles s’étiolent et disparaissent.
Osho
Au commencement, lorsque ‘’l’intellect fait la guerre contre les passions, il ressemble
à celui qui combat dans la nuit’’. Plus se développe sa science, plus les moyens
s’affinent et mieux se déjouent les pièges des pensées. Et quand ‘’il aura acquis
l’impassibilité, il reconnaîtra facilement les manœuvres des ennemis’’, sans plus se
laisser prendre au jeu.
Denise Desjardins, citant Evagre le Pontique
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Lorsque vous méditez, vos pensées galopent. Laissez-les galoper. Contentez-vous de
regarder. Prenez plaisir à voir cette ronde effrénée, amusez-vous à observer le jeu de
votre esprit.
Le terme sanscrit ‘’chidvilas’’ signifie : le jeu de la conscience. Quel mal y a-t-il à ce
que votre mental se rue vers les étoiles, se précipite d’un bout à l’autre de
l’existence ? C’est une danse magnifique, acceptez-la.
Personne ne peut arrêter le mental ! Un jour, il s’arrêtera—mais ce ne sera pas le
résultat d’efforts de votre part. Le mental s’arrête sous l’effet de la compréhension, de
la connaissance.
Regardez, sans plus. Essayez de découvrir pourquoi votre cerveau s’agite ainsi. Il ne
le fait pas gratuitement. Appliquez-vous, acharnez-vous pour voir ce qui le pousse
ainsi. S’il pense à l’argent, cherchez pourquoi. Votre mental n’est pas en cause. C’est
vous qui rêvez d’argent, de gagner à la loterie, de faire un tas d’achats…C’est vous
qui rêvez de devenir président, de parcourir le monde, d’être reçu avec les honneurs
dus à votre rang. Observez ! Regardez dans quelle direction va votre mental. Il
contient une semence profondément enfouie. Il ne pourra s’arrêter que lorsque cette
semence aura disparu.
Votre mental exécute tout simplement les ordres donnés par la semence qu’il abrite.
Penser au sexe révèle la présence d’une répression sexuelle. Regardez profondément
en vous-mêmes, déterrez les semences !
Osho
Regardez de plus près et vous verrez que n’importe quel péché répertorié
correspond toujours à une émotion et, en fin de compte, à une souffrance. Souvenezvous : tout agissement humain qui nous paraît coupable s’explique par une
souffrance profonde dans laquelle la personne se débat sans habileté. Même les
péchés dits mortels sont la manifestation d’une frustration exacerbée qui ne trouve
pas d’autre manière de s’exprimer. Prenons un exemple simple : il est bien connu des
psychologues qu’une personne qui mange immodérément compense par-là une
frustration profonde. Pourquoi la gourmandise fait-elle partie des péchés ?
Simplement parce qu’elle est une erreur par rapport à notre but. Chacun sait que les
excès alimentaires nuisent à la vigilance et ne sont pas bénéfiques à la progression
sur le chemin spirituel. De même, l’adultère n’est pas le ‘’mal’’ en soi mais peut
souvent être préjudiciable à votre progression. Quelle souffrance, quel déchirement,
quelle demande affective intense conduit un conjoint à chercher l’amour chez un ou
une autre. Dieu seul le sait. La compassion ne juge pas. Certes, si vous pouviez
vraiment être libres, libres intérieurement, il vous serait peut être évident de ne pas
commettre l’adultère mais à partir d’une autre manière de sentir, de comprendre, de
se situer qui ne vous obligerait plus à vous brimer. Vous vous préparez peu à peu,
par une transformation qui doit être bien menée, à pouvoir aisément dépasser
l’envie, la jalousie, la gourmandise, la paresse, l’avarice, la luxure.
Souvenez-vous, péché a un sens technique précis : erreur, faux pas, manquer la cible.
Le Christ propose un but à l’existence : la mort à un certain niveau afin de renaître à
un autre niveau. ‘’Il vous faut naître d’en haut’’ (Jn 3.7) ou ‘’Il vous faut naître à
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nouveau’’ (le mot anôthen peut signifier aussi à nouveau). Et le péché originel c’est
notre conception personnelle du bien et du mal et notre maladie du jugement qui
peuvent être dépassées, transcendées par cette nouvelle naissance et par la
découverte des réalités invisibles. Si un enseignement spirituel ne vous conduit pas
au-delà de cette opposition originelle, vous passez votre vie ballottés entre le bon et
le mauvais, le favorable et le défavorable et inévitablement les émotions heureuses et
les émotions malheureuses, sans aucun pouvoir sur vous-mêmes, sans jamais
atteindre l’apatheia, l’équanimité, l’égalité d’humeur et la constance d’âme.
Arnaud Desjardins
Observez votre esprit. Ne laissez pas une seule pensée vous échapper, quelle que soit
sa laideur, sa brutalité. Observez sans choisir, sans calculer, sans juger, sans orienter
les pensées et sans vous y accrocher. Observez inlassablement.
Krishnamurti
Si vous vous contentez d’observer le mental sans intervenir, sans essayer de
l’attraper ou de le soumettre, vous constaterez qu’il a disparu.
Osho
Observez simplement les pensées qui viennent et ne vous y attachez pas. Elles
commenceront à disparaître car elles sont uniquement maintenues par votre
identification.
Chandra Swami
La colère, le ressentiment, l’envie, la jalousie et toute une gamme d’émotions du
même genre peuvent donc nous dominer si nous leur permettons, avant de nous en
défaire de se développer au-delà du point où elles deviennent trop violentes pour
que ce soit encore possible de le faire. Toute émotion destructrice a son origine dans
un désir contrarié. Il nous faut remonter jusqu’à ce désir et nous rappeler que si nous
sommes capables de nous en défaire et de garder à l’esprit l’adage : ’’Que Ta volonté
soit faite, et non la mienne’’, alors nous serons libérés du contrôle qu’exerce ce désir
sur nos émotions.
Phyllis Krystal
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Le désir indique que vous n’êtes pas satisfait de ce qui est, que vous voulez autre
chose. Vous ne vivez pas dans l’état de ce qui est…Vous désirez ; vous souhaitez que
les choses soient différentes de ce qu’elles sont, vous voulez imposer vos idées, vos
rêves personnels à la réalité, vous ne vous contentez pas de ce qu’elle est mais
cherchez à la modifier suivant le vœu de votre cœur. Le mental continue alors de
fonctionner, car il existe uniquement à cause de votre insatisfaction.
Osho
L’émotion n’apparaît que lorsque vous avez ‘’vu’’ autre chose que ce qui est. C’est
cela le mental.
Swami Prajnanpad
L’émotion est la preuve d’une perte de contact avec le réel. Elle est une inadéquation
de notre être à la réalité. Si nous étions parfaitement adaptés à la réalité, il n’y aurait
que constat pur et simple de ce qui se passe dans le monde. L’émotion témoigne d’un
choc ressenti face à la réalité. L’essentiel est de voir qu’il y a décalage en nous par
rapport au déroulement de la vie. C’est donc par le travail sur les émotions qu’il est
possible de retrouver le contact avec le réel.
Véronique Loiseleur
La vigilance de l’homme en chemin et celle de celui qui est parvenu au terme de sa
quête ne peut pas être la même. La vigilance de l’être réalisé, entièrement spontanée,
est simple vision de ce qui est, la vigilance du débutant est aussi vision de ce qui est,
mais celle-ci englobe nécessairement les émotions, les associations d’idées, les
humeurs diverses auxquelles il est encore soumis.
En effet, être ici et maintenant, ce n’est pas seulement être présent au monde
extérieur mais aussi être présent à notre monde intérieur. Cette présence inclut tout
ce qui est dans notre champ de perception dont nous faisons partie intégrante.
Viendra un moment où cette distinction dedans-dehors disparaîtra d’elle-même et où
tout sera perçu comme une unité insécable. Mais en attendant, il ne sert à rien de
chercher coûte que coûte à être présent au monde si c’est pour être en conflit avec
nous-mêmes. Quand il y a émotion, être présent signifie prendre conscience de cette
émotion puisqu’elle est bien réelle pour celui qui la ressent. Plus on est présent à
l’émotion, plus il est possible d’être en même temps présent au monde extérieur. Si
on lutte contre l’émotion pour tâcher d’être présent au monde extérieur, on n’est
présent ni au monde ni à soi-même et le seul résultat est d’avoir instauré une dualité.
Il peut paraître incompatible d’associer vigilance et émotion puisque celle-ci naît
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précisément d’une coupure avec le réel, autrement dit d’un manque de vigilance. Il
n’y a pourtant pas incompatibilité mais au contraire nécessité absolue d’associer les
deux : si l’on dissocie sans arrêt les moments d’émotions non conscients et les
moments de vigilance sans émotion, aucun progrès n’est possible. Il faut au contraire
S’ENTRAINER A RESTER CONSCIENT AU SEIN MEME DE SES EMOTIONS, A
EN PRENDRE CONSCIENCE, DANS L’INSTANT, SANS AUCUN REFUS.
Véronique Loiseleur
Il y a l’expérience ordinaire, expérience toujours dualiste, jamais complète parce
qu’elle est imprégnée de crainte ; et il y a l’expérience réelle de tout, instant après
instant, qui est libre de la crainte. Vous pouvez être certain (…) qu’au niveau
ordinaire (…) on est toujours déçu, parce que, à l’arrière-plan et dans le fond, dans
l’inconscient, la crainte est là. On vit sur un fond de crainte, parce qu’on est marqué
par cette dualité : il y a ce qui est favorable, il y a ce qui est défavorable. Il y a ce que
j’aime, que je veux, dont je me réjouis, il y a ce que je n’aime pas, que ne veux pas,
dont je ne peux pas me réjouir et qui me menace. Et cette menace, elle sera toujours
là. Ce qui fait que non seulement, on ne goûte pas, on n’apprécie pas les expériences
dites douloureuses, puisqu’on les refuse de tout son être, mais on n’apprécie pas et
on ne goûte pas non plus les expériences dites heureuses, parce qu’on n’est pas
complètement—tête, cœur, corps, conscient, inconscient—unifié dans l’expérience.
Le fait de refuser l’aspect négatif, cruel de l’existence, parce qu’on le sent trop comme
insupportable, nous frustre aussi de l’aspect heureux. Voilà la grande découverte qui
peut être faite et le grand Enseignement.(…) Quand nous refusons l’autre moitié, la
moitié que nous acceptons ne peut pas être là non plus, du fait que nous la vivons
émotionnellement, dans cet état d’esprit d’attachement : pourvu que ça ne
m’échappe pas, pourvu que ça dure, pourvu que ça ne se transforme pas en son
contraire, pourvu que les souffrances ne reviennent pas.
Arnaud Desjardins
La béatitude n’est pas dans le refus de la douleur, dans le repli sur soi ni dans le fait
de s’en détourner, mais dans une attention totale à celle-ci. Tout bonheur vient de la
conscience. Plus nous sommes conscients, plus profonde est la joie. L’acceptation de
la douleur, la non-résistance, le courage et l’endurance font naître des sources
profondes et inépuisables de bonheur réel, de véritable béatitude. (…)
Il est facile d’amener la douleur (physique) au centre de la conscience. En ce qui
concerne la souffrance (morale), ce n’est pas aussi simple. Il ne suffit pas de se
concentrer sur la souffrance car la vie mentale telle que nous la connaissons est un
flot continu de souffrance. Il faut parvenir à ses racines et mettre à nu le vaste réseau
souterrain où la peur et le désir sont étroitement mêlés, où s’opposent, s’entravent et
se détruisent l’un l’autre les courants d’énergie de la vie.
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Nisargadatta Maharaj
Lorsqu’une information nous parvient par l’intermédiaire des cinq sens, elle est
véhiculée par les nerfs sous forme de courants jusqu’au cerveau. L’esprit prend alors
conscience de l’information, mais, jusque là, il n’y a aucune implication émotionnelle.
Toutefois, dès que l’esprit conscient perçoit l’information, il envoie un signal pour la
stocker dans la mémoire qui est située dans le subconscient. Lorsque celui-ci reçoit
un signal de l’esprit conscient, il le compare automatiquement avec des impressions
passées sur le même sujet. Si le subconscient découvre des associations négatives
concernant le sujet, il envoie alors une réponse émotionnelle à l’esprit conscient. Si
l’esprit conscient n’est pas sous contrôle, il commence alors à réagir par de la colère,
de la haine, de la peur, de l’envie, de l’avidité ou de la dépression. Si le subconscient
découvre des associations anciennes positives, la réponse émotionnelle envoyée à
l’esprit conscient provoquera bonheur, excitation, joie, appréciation et attachement.
Cette réaction émotionnelle au niveau de l’esprit conscient aura pour conséquence
l’envoi de signaux supplémentaires en direction du subconscient et continuera ainsi à
renforcer le contenu émotionnel des impressions passées. A chaque fois que nous
sommes sous l’emprise de l’émotion, cela entraîne une réaction émotionnelle encore
plus forte dans le futur. Donc, nous pouvons voir qu’il est absolument nécessaire
d’apprendre à contrôler l’esprit conscient de manière à ce qu’il ne réagisse pas à la
moindre réponse émotionnelle subconsciente et qu’il ne renforce pas ainsi les
impressions émotionnelles du passé. Il est maintenant clair que toutes les émotions
telles que la colère, l’avidité, la haine, la peur, l’envie, etc, existent en nous en tous
temps. Elles font partie de notre passé…
Tout le temps, il nous faut être vigilant, garder l’esprit conscient discipliné et être
toujours conscient qu’il y a des émotions tapies au fond de notre esprit dans le
subconscient. Elles sont toujours prêtes à surgir dès que notre lumière intérieure
faiblit et lorsque nous perdons notre self-contrôle.
Les émotions ressemblent à une bascule. Un moment, le mental est excité et l’instant
suivant il déprime. Ainsi bonheur et souffrance alternent à chaque instant. Le secret
est de réduire ces hauts et ces bas et de devenir égal ; ainsi, nous obtiendrons la paix.
La manière de maîtriser ses émotions ne consiste pas à supprimer colère, jalousie,
avidité, etc., car, si nous supprimons nos émotions, celles-ci exerceront une pression
plus grande encore, et elles exploseront…Ne supprimez jamais vos émotions, mais,
lorsque le subconscient envoie une réponse émotionnelle, prenez-en bonne note et
réalisez qu’elle provient d’au-dedans de vous, et, tout en restant calme, voyez quelle
action appropriée est nécessaire dans la situation qui vous occupe.
Carole Alderman
Je devenais sensible aux vibrations de mes muscles, à la naissance d’une émotion et
la mémoire associée à cette réaction me délivrait son message : ‘’Cela ressemble
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à…Cela me rappelle…Mon père m’a dit cela’’. Et je devenais capable de voir naître
l’émotion, de la laisser grandir, de la voir se développer et disparaître. J’étais le
témoin neutre d’une manifestation interne.
Je pris conscience également que bien peu de ce que je croyais être mes pensées
m’appartenait : je répondais à la provocation de la pensée de l’autre, lui aux miennes.
Je pouvais provoquer son irritation en étant irritée. Je percevais directement ses
vibrations émotionnelles. Mon corps réagissait aux ambiances, comme un buvard, y
répondait sans aucune intervention de ma volonté. Est-ce ainsi que nous
fonctionnons : par images se répondant d’inconscient à inconscient, par corps
réagissant comme une plaque photographique aux ambiances, par échange
d’énergie ? J’en suis aujourd’hui persuadée : le contact s’établit par communication
antérieure à toute formulation. C’est nous qui surchargeons de sens ces messages qui
nous mettent en alerte, en vigilance et qui éveillent les mouvements de notre
conscience.
Parallèlement, mon désir de tout comprendre, de tout analyser, de tout fixer
s’émoussait. J’étais de plus en plus dans le constat, intéressée et vigilante à ces
mouvements internes, suivant comme un témoin, ces manifestations mentales,
comme on suit des nuages qui passent dans le ciel : nul ne songerait à les retenir. Et
soudain, quelque chose a dit : ‘’La Vérité, c’est cela’’. Je le savais, bien sûr, moi qui
cherchais la Vérité partout. Nous savons tout. Tout est là, tout parle, tout nous
délivre des messages. Nous sommes accordés sur l’univers. L’univers est en nous,
mais nous ne voulons pas savoir, nous ne nous écoutons jamais, c’est tout. La voix
intérieure parle, nous la faisons taire. La vérité doit être à l’extérieur, dans la voix du
père, de la mère, de l’autre, du patron, du gourou…
Faites silence, écoutez-vous avec passion, avec amour, avec attention : que dites-vous
quand quelque chose arrive, que dit votre corps et non pas votre tête ? Lui seul sait ce
dont vous avez besoin. Alors seulement, vous pouvez agir, selon la situation bien
objectivée, de façon juste, pour vous-même, pour l’autre si c’est nécessaire.
Action juste. C’est l’action accordée sur le contact avec soi-même, dans le
mouvement mercurien de l’instant : action en accord avec le réel, la Vérité de
l’instant.
Irène Andrieu
Il n’y a rien à faire. La vie se charge de dispenser le questionnement nécessaire. Ce
sont les choses qui vont vous solliciter, c’est la vie qui vous appelle, vous demande,
vous suggère, vous supplie de regarder, d’écouter. Le corps, la sensation s’imposent
naturellement !
La structure des os, des nerfs, tout élément physiologique prend naissance et est
construit de ressenti. Vous n’avez absolument rien à faire pour sentir, uniquement
vous rendre compte que l’on camoufle, que l’on bâillonne, que l’on réfrène ce
ressenti. On vit dans une projection. Ce ressenti se réfère à l’instant. Dans l’instant, il
n’y a pas de direction. C’est dans la non direction que ce ressenti peut vraiment
s’exprimer. Quand on va quelque part ou que l’on vit dans la pensée, le ressenti est
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limité. Toute démarche, toute direction fixe automatiquement le senti, le rend
objectif, le réduit à une expression des plus caricaturales. Il s’agit uniquement
d’attendre sans attendre, d’être disponible, cela permet au ressenti de continuer à
questionner la vie. Quand vous abdiquez le questionnement, c’est la vie qui vous
questionne.
Eric Baret
Beaucoup de gens ne réalisent pas pleinement qu’être inconscient de quelque chose
signifie littéralement n’en avoir absolument aucune connaissance et ne pas le
percevoir du tout. Tout se passe comme si nous étions aveugles et ne pouvions nous
voir nous-mêmes avec clarté. C’est la raison pour laquelle il est tellement plus facile
d’entrevoir nos propres traits de caractère chez les autres et dans leurs actes ou dans
les personnages qui apparaissent dans nos rêves.
Il existe une autre façon d’observer l’effet que nous avons sur les autres. Il suffit de
consentir à un effort délibéré pour être plus conscient et pour remarquer l’effet de
nos paroles, de notre comportement, de notre manière de nous exprimer et de notre
attitude générale sur tous ceux avec qui nous sommes en contact. Le meilleur moyen
de détecter comment ils réagissent à nous est de regarder leurs yeux et d’observer
leur langage corporel.
Phyllis Krystal
Un geste n’est jamais isolé, un geste est l’aboutissement de toute une histoire qui
montre comment on s’est développé, comment on a vécu, senti, agi. Oui, un simple
geste. Pour celui qui sait le situer, un geste est le reflet de tout un monde, la
conséquence de tout un enchaînement de pensées, de sentiments, d’actes préalables.
Tant qu’ils ne sont pas habitués à faire ce genre d’observations, les humains qui
voient un phénomène isolément, ne peuvent comprendre le sens profond, caché, de
toutes les manifestations : formes, mouvements, couleurs, sons, paroles, regards…
Ils doivent apprendre cette science de l’unité qui leur révélera le lien entre toutes les
choses.
Omraam Mikhaël Aïvanhov
Observer suffit, c’est la seule chose que vous ayez à faire.
Osho
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La constitution corporelle d’un homme, les gestes qui la manifestent, expriment
l’homme de façon certaine et fort nuancée : on sait ainsi dans quelle mesure ‘’il est
là’’, comment ‘’il est là’’ et ‘’s’il est là’’ en conformité avec son Etre authentique, ou
non.
Karlfried Graf Dürckheim
A chaque instant la vie de l’homme, de l’homme en tant que sujet, se trouve placée
sous le signe de sa loi personnelle, fondamentale, qui est cette métamorphose
progressive dans le sens de sa vocation d’homme. C’est en fonction de cette loi que
nous devons comprendre et évaluer la ‘’forme corporelle’’. Elle révèle sa façon
‘’d’être là’’, elle dit s’il s’est écarté de la Voie, s’il progresse ou bien s’il s’est arrêté.
Les attitudes erronées du corps, les tensions, les crampes expriment toujours, sur le
plan existentiel, face à l’Etre essentiel, des fixations, des formes durcies, l’arrêt sur le
chemin, tout cela représentant un empêchement à la manifestation de l’ETRE.
Karlfried Graf Dürckheim
Le point atteint par l’homme dans sa maturation sur la voie de l’intégration avec son
Etre essentiel s’exprime dans sa façon ‘’d’être là’’. Ainsi, un homme qui du point de
vue corporel est malade, peut ‘’être là’’ de façon juste, c’est-à-dire qu’il est perméable
à son Etre essentiel. Inversement, un sportif en parfait état physique peut ‘’être là’’ de
façon erronée, par exemple par une attitude arrogante et pleine d’illusions sur soi.
Cet homme-là est coupé de son Etre et bloqué sur la voie du devenir intérieur. Cet
état ‘’juste’’ de l’homme n’est jamais une structure définitive mais une formule de
mouvement, donc de vie, de l’homme tout entier. Il reste, en elle, ouvert à son Etre
authentique, même dans cette forme conditionnée, temporelle. Cela signifie qu’il est
capable de suivre la poussée de son Etre qui cherche à se manifester. Cela signifie
qu’il est capable de se garder dans un état de disponibilité permanente qui rend
possible la métamorphose, afin d’être de plus en plus perméable à l’ETRE. Cette
disposition se révèle et se développe dans l’unité du geste. De même qu’on peut
parler d’un ‘’état juste’’, on peut parler d’un ‘’geste pur’’ par lequel se manifeste
l’ ’’état juste’’.
Karlfried Graf Dürckheim
En regardant le corps de quelqu’un, on connaît la personne, ses capacités, ses peurs,
son anxiété, sa générosité, sa subtilité, sa vulgarité. Bien sûr tout est marqué.
Eric Baret
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Il y a des corps malades qui, profondément, sont en bonne santé et des corps qui
semblent en pleine santé alors que leur structure interne n’est que maladie.
Eric Baret
Votre corps est un reflet.
Si vous regardez une main, un ongle, un dos, une silhouette, si vous écoutez une
respiration, bien sûr vous trouverez un psychisme.
Eric Baret
Il est possible d’avoir un corps tactile, complètement vibrant, sans image sensuelle.
L’image sensuelle et la sensualité, c’est très différent. Quand vous partagez un
contact physique avec un autre être humain et que survient une image, la sensation
est coupée. Les gens qui ont très peu de sensation compensent par la création
d’images. Si l’on a le goût de ce genre de célébration, on reste complètement sans
image, uniquement dans la sensation, dans l’instant. L’image se révèle très fade
comparativement à la sensation.
Ce qui vous rend joyeux, qui vous équilibre profondément, c’est la sensation.
Eric Baret
Etre libre, c’est être libre de toutes les formes physiques ou supraphysiques et cette
liberté vient en vivant et en voyant, non en pensant, parce que seule l’expérience de
la vie fournit une base ou des données solides pour voir les faits comme des faits et
non sous l’éclairage incertain des pensées, des hypothèses, des imaginations ou des
idées.
Swami Prajnanpad
Dans le Tantra, l’homme s’assied nu en face de sa compagne nue. Il la regarde avec
une telle intensité que son regard la perce de part en part, jusqu’à ce que tout désir de
voir une femme dévêtue s’évapore. L’homme tantrique est libéré de la forme. C’est
une grande technique secrète. Sans cette perception totale, vous continuez de voir la
nudité de l’autre dans votre tête et le désir de réaliser votre fantasme vous obsède…
Le tantrika regarde sa compagne, il médite sur son corps, il regarde et examine tout
ce qu’il veut. Si ses seins l’intéressent, il les regarde et s’absorbe dans cette
contemplation. Il doit s’en libérer. Or, la seule façon de se dégager de la forme est de
la connaître si totalement qu’elle perd tout attrait.
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Osho
Maintenant, venons-en plus précisément à la sexualité. Voilà donc l’homme et la
femme face à face avec leurs ‘’koshas’’, leurs ‘’vasanas’’, leurs ‘’samskaras’’, leurs peurs,
leurs désirs, leur inconscient et en chacun le double mouvement de se protéger et de
se dépasser en tant qu’ego ; le mouvement de prendre, de posséder et le mouvement
de donner et de se donner ; le mouvement qui demande : ‘’Je veux que l’autre soit
moi’’ et le mouvement qui affirme : ‘’Je suis l’autre’’—physiquement, mentalement,
émotionnellement, à tous égards. Vous entrevoyez bien que l’acte sexuel va
infiniment plus loin que des sensations génitales.
Arnaud Desjardins
Unis dans la passion, l’homme et la femme parviennent au dépassement de soi pour
atteindre le calme mouvant qui dépasse le moi. Les contraires se dissolvent.
L’homme et la femme ne sont rien de plus. Au cœur de l’absence de pensée
originelle, un et deux ne sont rien et sont tout à la fois. Les amants trouvent ce que
recherchent les sages. Le corps et l’esprit disparaissent. La division et la séparation
cessent. Et cet état qui est le tout triomphe de la pensée qui elle n’est qu’un fragment
de ce tout. Ceux qui parviennent à atteindre le tout ne reviennent pas à ce fragment
comme ils en sont partis.
Ray Grigg
Si vous pouvez faire l’amour pleinement alerte, cet amour vous aidera à devenir de
plus en plus conscient, de plus en plus centré.
Osho
Il faut savoir méditer pour bien faire l’amour parce qu’il faut savoir sortir de la
conscience mentale, sortir de la dualité personnelle. Le feu du désir nous précipite
dans le présent mais il est nécessaire de savoir garder ce feu et de ne pas se précipiter
dans une course à l’orgasme.
L’acte sexuel est rapide quand l’amour n’ose pas être présent. Chacun exploite l’autre
et s’en sert comme d’un instrument pour atteindre le plaisir. C’est l’apprentissage de
la lenteur, de la présence en soi au corps et à l’âme qui permet d’entrer dans le
royaume charnel et subtil de l’amour.
Paule Salomon
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Quelle merveille d’être un dans l’écoute, le regard, le senti, avec deux corps comme
apparence ; cela amène une très grande purification. C’est un art, or, pour apprendre
un art, les éléments de base se fondent sur l’humilité.
Pour cela, quittez toute prétention à savoir quoi que ce soit, parce que l’on ne peut
rien savoir sur un corps humain, on ne peut qu’y être ouvert. Abandonnez toute
prétention à faire quoi que ce soit, à sentir et même rechercher quoi que ce soit. Cela
transforme cette rencontre en pure découverte, qui vous libère de vos références : de
comparer, de chercher ce qui convient ou ne convient pas, d’utiliser la mémoire
schématique. Dans cette non-connaissance, la magie peut s’imposer. Quand vous
voulez arriver à quelque chose ou faire arriver votre partenaire à quelque chose, cela
correspond toujours à un schéma.
Sur ce plan-là, un rituel tantrique est encore présent cinq jours après, vous ne
ressentez pas le besoin de refaire l’amour le lendemain matin, parce que vous êtes
encore complètement dans cette vibration. Si effectivement ce besoin se représente,
c’est que le rapport était très superficiel. Cela n’excluant pas des prolongations, mais
sans besoin.
Eric Baret
Au cours de l’existence, l’important est toujours de vivre strictement dans l’instant,
dans le présent. C’est très difficile. Ce l’est un peu moins dans l’union physique.
Généralement lors d’un accouplement ordinaire, l’attitude des deux partenaires est
faussée par le souvenir inconscient d’expériences anciennes et le souvenir conscient
d’actes sexuels antérieurs qui viennent prédéterminer l’acte en cours. Cette attitude
est viciée aussi, de moment en moment, par l’attente et la représentation des minutes
qui vont suivre. Chaque geste, au lieu d’être parfaitement effectué et ressenti pour
lui-même et en lui-même, est exécuté comme la promesse et la préparation du geste
suivant, un peu plus intime.
Il n’est donc pas vécu parfaitement et tout ce qu’il pouvait apporter est perdu. Les
deux partenaires essayent improprement de faire, faire ce qui pourra satisfaire
l’autre, faire ce qui pourra amener l’autre à le satisfaire. Enfin chacun tente de
‘’perdre la tête’’, c’est-à-dire être délivré de l’étroitesse du mental, en sombrant dans
une infraconscience au lieu de vivre consciemment une merveilleuse révélation de
liberté.
Tout ce comportement est faux. La sagesse est toujours l’expérience de la pure
instantanéité. Celle-ci est possible dans l’amour en vivant l’acte d’union et ses
préliminaires dans la plénitude de chaque instant, sans référence à aucune notion de
temps. L’amant ne pose pas sa main sur la main de l’amante. La main se pose comme
une évidence et une certitude. Elle se pose sans être considérée comme le prélude à
quoi que ce soit d’autre, sans aucune attente préconçue. Au lieu de rester un acte
mécanique et sans signification, chaque geste simple se revêt d’une grandeur et
d’une profondeur immenses. L’amour devient réellement une participation et une
méditation. Rien n’est cherché. Tout est reçu dans une disponibilité totale à l’inconnu
et à la nouveauté. L’orgasme qui est généralement considéré comme une fin, un
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achèvement, se révèle au contraire un commencement, une ouverture sur un état
intérieur de communion et de contemplation, dans lequel la conscience est dégagée
du fonctionnement psycho-mental. Loin d’apporter aucune ‘’tristesse’’, il libère la
paix et la certitude qui sont en nous, que nous sommes.
Dans cette perspective, il n’est plus question de prendre mais d’accueillir. La
relaxation et l’acceptation sont totales, sans aucune rigidité, anxiété, sans aucun désir
de produire ou d’obtenir un résultat particulier. Le processus sexuel se développe et
s’intensifie de lui-même et les amants s’y soumettent librement. Ils ne font pas
l’amour. L’amour se fait. Dans cette perspective aussi on comprend comment le désir
libidineux et la convoitise sont, en effet, des fautes ou des ‘’péchés’’, à l’opposé de
l’union véritable. L’amour est pour les deux amants ensemble un abandon, une
ouverture, un jaillissement intérieurs dont l’ouverture de la cavité féminine et le
jaillissement de la semence masculine sont les symboles sensibles physiques.
Tant qu’on essaie de faire, on ne peut faire que ce qu’on conçoit. Or il s’agit d’une
réalité infiniment plus grande que nous et que nous sommes incapables de concevoir.
Nous pouvons seulement la recevoir.
Arnaud Desjardins
L’union sexuelle sacrée s’enrichit sans cesse par la fidélité.
La constatation que telle autre femme ou tel homme est attirant peut venir à l’esprit
mais il n’y a aucune propension à lui donner suite. Toute infidélité, même en pensée,
est impossible. Pourquoi changer là où il n’y a ni répétition ni monotonie ?
Chaque union est originale, incomparable, unique. Chaque union est la première,
manifestation spontanée, hors du temps, expression d’une communion sentimentale,
intellectuelle, spirituelle toujours plus riche et plus profonde. L’acte sexuel est une
improvisation spontanée à deux, comme celle de certains musiciens que j’ai entendus
en Orient. La même inspiration paraît naître en même temps chez l’un et chez l’autre.
L’Inde dit que dans l’union l’amant ne sait plus s’il est un homme ou une femme,
l’amante si elle est une femme ou un homme : une seule conscience effaçant la
différence des deux corps.
Arnaud Desjardins
L’essence du tantra est aussi dans cette union des opposés : contraction et
décontraction. Les corps peuvent se rencontrer et se relaxer l’un dans l’autre, le sexe
n’est plus basé sur l’intensité de l’excitation mais sur le fait de se détendre
profondément, de voguer ensemble dans un lâcher-prise très profond qui ressource
l’être, dans un abandon océanique. Le plaisir, au lieu d’être localisé, gagne toutes les
parties du corps, en une succession de vagues de plaisir qui peuvent se prolonger
longtemps. On vit alors un état de conscience modifié ; pendant que l’énergie des
corps se mélange et fusionne, on atteint une expérience d’intimité profonde.
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L’orgasme au niveau du cerveau fait fusionner les deux cerveaux, créant ainsi cette
expérience extatique.
Paule Salomon
Je tiens à souligner et à répéter que cette pulsion qui revient et nous attache au sexe,
est due au bref samadhi, au bref éclair de conscience, que ce dernier nous procure.
Vous n’aurez plus besoin de sexe lorsque vous saurez atteindre le samadhi, la
Conscience divine, sans recourir à l’activité sexuelle. Si l’on vous indiquait l’endroit
où vous pouvez obtenir gratuitement l’objet précieux que l’on vend très cher ailleurs,
vous seriez fou d’opter pour la solution onéreuse. Quand l’homme sait comment
atteindre au centuple, sans rapport sexuel, l’extase qu’il frôle lors du coït, il cesse
automatiquement d’être obsédé par le sexe. Son esprit vole vers d’autres horizons.
L’être humain a connu sa première expérience de samadhi, de Conscience divine, en
faisant l’amour. Mais la félicité sexuelle est grande consommatrice d’énergie et elle
est fugitive. Après un bref sommet, nous retombons dans notre état de manque
antérieur. Pendant un instant, nous atteignons un autre plan d’existence, pendant un
moment, nous éprouvons une joie, une satisfaction indicibles. Tout le mouvement va
vers ce sommet, mais à peine l’avons-nous atteint que nous nous retrouvons sur
l’autre versant, en chute libre. Une vague nous emporte au paradis, mais aussitôt
épanouie, elle retombe. Nous sommes ainsi. Pour éprouver cette extase, cette joie,
pour connaître cette plénitude, nous accumulons de l’énergie et recommençons
inlassablement le même parcours. Nous parvenons presque à toucher le plan subtil,
le royaume supérieur, mais inéluctablement nous redégringolons vers notre position
de départ, avec une considérable dose d’énergie en moins.
Tant que l’être humain piétinera dans le monde de la sexualité, il ne pourra
qu’émerger brièvement puis reglisser. La vie est une poussée sans fin vers l’état de
non ego, vers l’éternité—que nous en soyons conscients ou non. Le désir ardent de
l’être est de se connaître lui-même, de connaître sa nature véritable, de découvrir la
vérité, de trouver la source originelle, éternelle, atemporelle—de fusionner avec ce
qui est hors du temps, de réaliser la pureté bienheureuse dénuée d’ego. C’est ce
besoin fondamental, cette aspiration pure, inconsciente et innée de l’âme, qui
attachent le monde au carrousel du sexe. Comment comprendre et réussir
l’épanouissement, la réalisation du Soi, si nous continuons à nier l’existence de cet
élan naturel omniprésent ? En nous opposant au sexe, nous ne parvenons qu’à en
faire le centre de toute notre attention. Impossible de nous en libérer. Nous nous y
enchaînons. La loi de l’effet inverse entre en jeu. Plus nous essayons de fuir le sexe,
plus nous y sommes attachés.
Osho
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L’amour est inhérent à l’homme. Si la conscience fait sauter les barrages, l’amour
coule, grandit et peut aboutir à ce qu’on pourrait appeler l’état de conscience
suprême ou Dieu. Quels sont ces artifices ? En tout premier lieu, la condamnation du
sexe, la répression de la passion amoureuse. Cela a détruit l’éveil de l’amour en l’être
humain.
En vérité, le sexe est le point de départ de l’amour. Le sexe est le premier pas. La
source du fleuve amour se trouve dans le sexe, dans la passion amoureuse que l’on
traite en ennemie. Les différentes cultures, les religions, les maîtres spirituels, les
saints ont tous attaqué cette source vive et, par conséquent, le fleuve ne s’est pas
formé. Le cri de guerre a retenti partout : ‘’Le sexe est un péché. Le sexe est
antireligieux. Le sexe est un poison mortel.’’ Personne ne semble avoir compris que
c’est l’énergie sexuelle et elle seule qui, en évoluant, débouche vers l’océan amour.
L’amour est la transmutation de l’énergie sexuelle. Le sexe est la graine, l’amour est
la floraison.
En regardant un morceau de charbon, nous ne soupçonnons pas sa parenté avec le
diamant. Ils contiennent tous les deux les mêmes éléments. Il n’y a pas de différence
fondamentale entre eux. Au terme d’un processus qui dure des milliers d’années, le
charbon devient un diamant.
Cependant, le charbon est considéré comme vil. On le remise hors de la vue alors que
les diamants sont exhibés, montés en bijoux. Pourtant, le charbon et le diamant sont
les points extrêmes du parcours d’une seule et même matière. Si vous détruisez le
charbon parce qu’il ne donne en définitive que de la fumée et de la suie, ses chances
de devenir un diamant s’arrêtent là. Toute possibilité d’évolution s’évanouit.
L’énergie sexuelle seule peut se transformer en amour. Pourtant, tous—y compris les
penseurs les plus éminents—lui sont opposés. La croissance est déviée à sa base, le
palais de l’amour est détruit dans ses fondements. A cause de ces erreurs initiales,
personne ne se soucie de parcourir les différentes étapes de la vie sexuelle et de la
développer au fil d’un processus magnifique et inné. Comment pourrions-nous
transformer ce que nous blâmons et combattons en permanence ? L’être humain est
engagé dans une guerre qui l’oppose à sa propre énergie. Il a été contraint de lutter
contre son propre sexe.
Osho
Lorsque le désir se transforme, il devient amour. C’est pourquoi l’amour ne peut être
atteint lorsqu’au départ, l’homme est conditionné à s’opposer au sexe. Il faut d’abord
accepter la forme sexuelle de l’énergie vitale si l’on veut un jour lui voir prendre la
forme de l’amour. Le fleuve amour a été obstrué, empêché de couler. Mais le sexe
continue de bouillonner à l’intérieur de nous. Il en résulte que la conscience humaine
est obscurcie comme un marais boueux.
Osho
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Je suis persuadé que l’être humain a connu son premier éblouissement de samadhi, de
Conscience divine, durant l’accouplement. C’est à ce moment-là que l’homme se
rend compte des sentiments d’amour intense dont il est capable, de la félicité
profonde qu’il peut ressentir. Les êtres qui ont correctement réfléchi à cela, qui ont
observé le phénomène sexuel et le coït, ont remarqué que lors de l’orgasme, l’esprit
se vide de toute pensée. Ce vide, cet apaisement du mental est la source de joie
extatique, de la félicité divine. Après avoir décrypté le début du secret, l’homme
continua de creuser. Si le mental pouvait être libéré des pensées, si les rides que sont
les pensées sur le lac de la conscience pouvaient être effacées par un autre processus,
se dit-il, l’être humain pourrait atteindre la béatitude absolue. De là est issu le
système des yogas, de là viennent la méditation et la prière. Cette approche nouvelle
prouva que même sans coït, la conscience pouvait être apaisée et les pensées se
dissiper. L’homme découvrit que l’extase procurée par le coït pouvait être atteinte
sans relation sexuelle.
Osho
A cette donnée naturelle qu’est la sexualité s’ajoutent toutes sortes d’émotions qui ne
sont pas nécessairement associées à la force sexuelle : des peurs, des désirs encore
infantiles d’être aimé, des compensations de frustration d’enfant, affectives et
sensuelles…On sait que la sexualité se trouve impliquée dans la quasi totalité des
névroses et que le mental, l’inconscient, les projections, corrompent la possibilité
d’une vie sexuelle aisée. Il y a, à cet égard, différents degrés de liberté.
Arnaud Desjardins
Il s’agit d’une première et fondamentale liberté, à savoir la possibilité de demeurer
neutre, non ému, non troublé, non attiré par le sexe opposé.
Si l’on s’est éveillé à sa nature réelle, ces stimulations plus ou moins conscientes et
manifestées disparaissent. Sur ce point, je peux être affirmatif : c’est une immense
liberté que de pouvoir reconnaître qu’une femme est belle, en tout cas selon nos
critères, qu’elle est attirée par nous, qu’une relation sexuelle serait possible, sans qu’il
en soit cependant question si cela n’apparaît pas comme juste eu égard à la situation,
au contexte présent. Soyons clairs : il ne s’agit pas de se contrôler et de faire preuve
de noblesse ou de sagesse : ‘’Nous sommes attirés l’un par l’autre mais puisqu’il ne
serait pas juste que nous cédions à cette attirance, puisque cette femme est mariée, ou
puisque je suis son gourou et que des relations sexuelles perturberaient nos rapports,
je vais, par dignité, faire le sacrifice de cette rencontre.’’ Pas du tout ! La décision de
ne pas donner suite à une possibilité de relation sexuelle se prend en toute liberté,
dans une totale unification, sans le moindre déchirement, puisque, de toute manière,
c’est seulement chez l’autre que l’attirance est à l’œuvre. Etre libre, c’est, entre autres,
être dégagé du jeu de l’attraction et de la répulsion. Il n’y a plus d’attraction qui
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s’impose. La possibilité même du trouble ou de la fascination a été effacée. Par
contre, l’énergie sexuelle en tant que telle, qui, de toute manière, étant l’énergie
fondamentale manifestée, restera toujours présente, est disponible et peut tout à fait
être consciemment utilisée pour une relation sexuelle.
Arnaud Desjardins
On a constaté, en prêtant sérieusement attention au sexe, en réfléchissant aux
multiples expériences de la vie, que lorsque l’accouplement est bref, le désir renaît
aussitôt. Lorsqu’il se prolonge, l’esprit est libéré de toute pensée sexuelle durant une
semaine. Et ainsi de suite. Lorsqu’un coït dure plusieurs heures, l’être humain ne
ressent plus de désir : il est comblé à jamais !
Mais l’accouplement humain est très généralement bref et extrêmement superficiel.
Qui peut imaginer une extase qui dure trois heures ? Pourtant, je le répète : l’être qui
peut rester accouplé en samadhi sexuel—en état de conscience sans ego—pendant
trois heures passera définitivement au-delà du sexe, car un tel accouplement procure
une félicité, un contentement qui ne s’estompent plus jamais. Après l’acte d’amour
parfait, la voie est totalement ouverte vers la chasteté spontanée et authentique.
Comment les choses se passent-elles ? Une vie entière ponctuée d’activités sexuelles
ne nous rapproche pas d’un iota de l’expérience mystique, de l’état divin. Pourquoi ?
Pourquoi l’homme vieillit-il, mûrit-il, s’approche-t-il de la mort, sans être débarrassé
de ses désirs sexuels ? Parce qu’il n’a pas la science du sexe. Parce qu’il n’a jamais
appris l’art du sexe. Il n’y a jamais réfléchi. Il n’a jamais entendu ce que les éveillés
ont à dire à ce sujet.
Vous ne croirez sans doute pas que l’extase habituellement si brève puisse durer
pendant trois heures. Il faut donc que je vous donne quelques éclaircissements, cela
vous aidera à progresser vers la chasteté.
Plus la respiration est rapide, plus l’union est brève. Inversement, plus la respiration
est paisible, plus le coït se prolonge. Et plus l’accouplement est long, plus les chances
sont grandes de faire du sexe une porte vers le samadhi, vers la Conscience divine, un
canal vers la supraconscience.
Je vous l’ai dit, l’état de non ego, l’état hors du temps, est perçu lors du samadhi
sexuel. La respiration doit être légère et lente. Une telle respiration vous aidera à
acquérir des plans de conscience de plus en plus larges.
Durant l’accouplement, il faut aussi que votre attention soit fixée sur le centre qui se
trouve entre les deux yeux, l’agnichakra, le troisième œil. Cette concentration vous
permettra de prolonger l’orgasme et, un jour, de le maintenir pendant trois heures.
Ce coït parfait vous procurera des racines inébranlables, la chasteté s’installera en
vous non seulement pour cette vie-ci, mais aussi pour les suivantes.
Une femme m’écrit que Vinoba est célibataire, qu’il n’a donc jamais connu le samadhi
sexuel. Elle ajoute que je suis probablement dans le même cas, puisque je ne suis pas
marié non plus. Si cette personne se trouve dans l’assemblée, je tiens à lui dire que ni
Vinoba ni moi ni qui que ce soit ne peut atteindre la chasteté véritable s’il n’a pas
connu le sexe. J’ajoute que l’expérience sexuelle parfaite ne fait pas nécessairement
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partie de cette vie-ci. Elle peut avoir eu lieu dans une vie antérieure. Celui ou celle
qui réalise la chasteté dans la vie présente doit cet accomplissement à une union
sexuelle parfaite dans une vie antérieure et à rien d’autre. C’est la seule explication.
L’être qui a profondément connu le sexe durant sa vie antérieure naît exempt de
désir sexuel. Cette personne ne sera pas perturbée par le sexe, même pas en
imagination. Au contraire, le comportement sexuel des hommes dits normaux la
surprendra. L’obsession érotique des gens la laissera abasourdie. Quant à elle, il lui
faudra faire un effort pour distinguer un homme d’une femme !
Pratiquer la chasteté dès son jeune âge sans passer par l’expérience sexuelle conduit
sans exception à la névrose. Ceux qui prônent sans cesse le célibat et osent même
l’imposer à autrui sont responsables de la dégradation de l’être humain. C’est le seul
résultat qu’ils ont obtenu. La chasteté n’est pas une attitude qu’on adopte. Elle est le
fruit d’une expérience intime extatique. Le brahmacharya, la chasteté authentique, est
la conséquence d’un vécu profond et serein—et ce vécu est sexuel. L’être qui obtient,
ne serait-ce qu’une seule fois, la révélation absolue en faisant l’amour, est délivré du
sexe à jamais.
J’ai parlé de deux facteurs qui entrent en jeu pour que survienne l’expérience
mystique : une respiration légère, presque inexistante, et une attention centrée sur
l’agnichakra, le point situé entre les deux yeux. Plus votre conscience est ramassée
dans ce centre, plus le coït sera profond. C’est automatique. Quant à la durée de
l’accouplement, elle est fonction de la lenteur, du calme de votre respiration. Pour la
première fois, vous comprendrez que l’attrait sexuel n’émane pas du sexe : il s’agit de
la fascination magnétique exercée par le samadhi, par la Conscience divine. Si vous
atteignez ces sommets, si vous pouvez entrevoir leur beauté, votre cheminement
futur en sera illuminé.
Pendant de longues années, l’homme est comme immobilisé au fond d’un taudis. Un
jour, il se lève et ouvre la fenêtre. Il voit des oiseaux voler librement dans un ciel
radieux, il est ébloui par le soleil. Celui qui découvre le ciel, le soleil, la lune, celui qui
voit les oiseaux, les arbres caressés par le vent, les fleurs chatoyantes, ne s’attarde
plus un seul instant entre ses quatre murs sinistres—il se précipite dehors.
Une lueur de samadhi lors d’une relation sexuelle, même très fugace, vous fera
immédiatement mesurer la différence qui sépare l’intérieur et l’extérieur, la liberté et
l’incarcération. Nous naissons tous dans des cellules étroites, sombres et sales. Il nous
faut apprendre que le monde extérieur existe. Cette connaissance nous incitera à
rompre nos chaînes. Par contre, la personne qui refuse d’ouvrir la fenêtre, qui
s’obstine à rester accroupie dans un coin, qui ferme les yeux sur les ordures qui
l’entourent est incapable de modifier la situation. Elle restera vouée à son enfer.
La chasteté factice, auto imposée, nous enferme dans une prison sexuelle. La seule
différence entre le prétendu célibataire et vous réside dans la façon de faire l’amour.
Vous le faites physiquement, il le fait mentalement. Or, l’accouplement est naturel ;
les fantasmes sont pervers. Je vous en supplie, ne vous opposez pas au sexe mais
tâchez de le comprendre. Que le sexe soit sacré dans votre vie. Je vous ai donné deux
lignes de conduite. La troisième concerne la façon dont vous abordez le sexe. En
faisant l’amour, l’homme est proche du divin. Dieu est présent dans l’acte créateur
capable de mettre une nouvelle vie au monde. Votre attitude doit être celle d’une
personne qui se rend au temple ou à l’église. Lors de l’orgasme, le Suprême nous
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habite. Nous devenons des instruments : des instruments qui peuvent créer un
nouvel être. En faisant l’amour, nous sommes tellement proches du Créateur que
nous devenons créateurs nous aussi. Si nous abordons le sexe avec un esprit pur et
un sentiment de vénération, nous pourrons facilement percevoir une étincelle du
divin. Ce que nous faisons d’habitude est hélas ! fort différent. Nous abordons le sexe
avec un sentiment de réprobation, de culpabilité, qui nous interdit de percevoir la
proximité du divin. Ne faites jamais l’amour lorsque vous êtes anxieux, soucieux,
jaloux, en colère. Ne faites jamais l’amour lorsque l’atmosphère n’est pas sereine.
D’une façon générale, l’être humain fait exactement ce qu’il devrait éviter. Plus il se
sent agressif, humilié, abattu, anxieux, désespéré, plus il se plonge dans l’activité
sexuelle. L’homme joyeux n’est pas obsédé par le sexe. L’homme malheureux ne
pense qu’à ‘’ça’’ : il croit que ce sera la panacée à tous ses maux. Retenez bien ceci : si
vous abordez le sexe en vous sentant amers, irrités, culpabilisés, déprimés, frustrés,
inquiets, la satisfaction vous sera invariablement refusée, vous ne trouverez en aucun
cas l’apaisement dont vous êtes assoiffés. Je vous en conjure, ne songez au sexe que
lorsque vous êtes joyeux, détendus, pleins de tendresse et surtout recueillis. Il ne faut
songer au coït que lorsque votre cœur déborde de joie, de paix, de gratitude,
d’amour. Si vous abordez le sexe dans de telles dispositions, la sublimation devient
possible et l’épanouissement mystique, même unique, suffit pour vous délivrer
définitivement du sexe. Un seul orgasme parfait renversera les murs de votre prison
et vous projettera dans la sphère du samadhi, de la Conscience divine.
Osho
Dans la quête sexuelle frénétique ou compulsive, le visage n’exprime souvent que la
douleur, la tension, la fermeture. Lorsqu’un homme pénètre une femme en pleine
Conscience, le temps se dilate, le plaisir s’étend, tous les sens s’ouvrent à cette
expérience et soudain les corps prennent réellement place dans l’espace, le jeu, le rire,
la respiration, le frémissement des membres, tout va vers l’ouverture. Les yeux, les
organes intimes, le Cœur, vivent. Toute la chimie du corps se modifie, l’esprit se
détend et le cerveau se met à fourmiller. La peau s’adoucit et exhale son parfum.
C’est à ce moment seulement que deux corps communiquent profondément et qu’il y
a quelque chose de divin dans le rapport sexuel. Lorsque deux corps sont nus et
embrassés, ils découvrent l’espace et peuvent se laisser être. A partir de là, le tantrika
peut aller beaucoup plus loin encore, mais sans cette première présence à l’autre,
parfaitement harmonieuse et détendue, toute ascèse est vouée à l’échec.
Lalita Devi
Quand deux amants s’unissent, ils vivent à un rythme analogue à celui des marées,
des saisons, des générations. Ils s’emplissent l’un de l’autre, s’épanchent l’un dans
l’autre dans le mouvement infini du souffle du Tao.
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Ray Grigg
Ce que l’autre attend, c’est d’être touché profondément dans le respect, le
frémissement, la spontanéité, la non programmation ; avec vous, au contact de votre
corps, il veut simplement goûter à l’illimité. Il désire que vous soyez lui et que la
création de l’acte sexuel soit un émerveillement car toujours neuf, sans référence,
sans passé.
Daniel Odier
Cela prend du temps de s’habituer à la sensation nouvelle de toucher…Le
frémissement du toucher produit des vibrations et des tremblements dans le corps
comme dans l’esprit. Ces vibrations et ces tremblements et leur charge, comme si
elles étaient électriques submergent d’abord le système. Ce n’est que lorsque celles-ci
sont absorbées et assimilées qu’on éprouve leur douceur. Avant que cet état soit
atteint, la nouveauté et l’intensité de l’expérience empêchent d’en être conscient. On
s’y trouve perdu. A mesure que l’on commence à s’habituer à l’intensité de cette
sensation tactile, la capacité d’expérimenter augmente. L’excitation sexuelle et la
tumescence mettent plus de temps à venir qu’au début ; en fait avec la capacité
augmentée d’endurance, la durée augmente. La jouissance est dans la capacité à
supporter l’attaque sans relâcher trop tôt. Que la nature (prakrti), de votre femme
devienne folâtre (frolicsome) et active, mais que le mâle (purusa) jouisse de l’activité.
C’est la nature de Prakrti d’être excitée ; Purusa doit laisser à cette excitation la
possibilité de trouver une sortie. Prakrti reçoit, tremble en fait de recevoir ; Purusa
gratifie en donnant. L’élasticité du vagin est augmentée par la friction produite au
cours de la copulation ; des tremblements de plaisir (thrill) se sont répandus dans
tout le corps et l’esprit, la vie entière est remplie de félicité et de douceur et il y a un
sentiment de gratification et d’accomplissement. Il y a alors un sentiment de
complétude et de totalité de vie. C’est cela qu’on appelle amour (prema), complétude.
Trouver la complétude l’un dans l’autre, avoir un sentiment de plénitude dans son
cœur, sentir : ‘’je suis en fait satisfait’’, c’est cela l’amour (prema). Une certaine dose
d’austérité est nécessaire pour obtenir la félicité de l’amour. La vitalité conservée par
la continence, comme pour la préparation d’une fête, augmentera le sentiment de
félicité. Il vous faut garder à l’esprit que vous vous préparer en fait à une grande fête.
Swami Prajnanpad
L’amour est le renoncement à soi de celui qui sait qu’il ne peut se trouver qu’en se
perdant. Se livrer, c’est se délivrer. L’amour brise la limitation de l’individualité ou
de l’ego, du nom et de la forme (nama et rupa) et nous réintègre dans l’Unité.
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L’union sexuelle est le don total de soi, conscient, inconscient, supraconscient, corps
physique, corps subtil, corps spirituel. Si l’amour, l’acte sexuel n’est que l’union des
corps physiques, il demeure un acte dérisoire, limité, décevant, un échange médiocre
de sensations génitales plus ou moins fortes : se masturber avec le vagin d’une fille
ou avec la verge de son mari.
Faire l’amour, c’est se donner. Mais pour pouvoir se donner, il faut d’abord
s’appartenir, il faut pouvoir faire.
‘’Je t’aime.’’ Qui aime qui ? Un ‘’je’’ total, unifié ou un ‘’je’’ partiel qui n’engage
qu’une petite partie de l’être ?
Un être qui ne peut pas se donner pourra réussir dans de nombreuses entreprises
mais l’échec de sa vie sexuelle demeurera le témoin de son échec intérieur, de ses
conflits et de ses craintes. La sexualité sera une recherche de jouissances physiques
ou une compensation, non l’expression de la liberté ou de l’amour. Un être peut se
donner s’il est sûr de lui, pas si inconsciemment, il se sent inférieur ou s’il a peur.
Cela dit, c’est lorsqu’un des conjoints souffre d’une difficulté d’ordre sexuel que
l’amour conscient de son ou sa partenaire peut faire le plus beau miracle : rendre à
lui-même un être ‘’aliéné’’, devenu un autre. Car, à partir de là et à partir de là
seulement, commencent la progression spirituelle et la croissance intérieure. Aimer
ne signifie pas désirer le corps de l’autre mais comprendre son essence. L’amour
demande tout simplement beaucoup d’intelligence et beaucoup de sympathie.
L’acte sexuel véritable, celui qui a sa place sur la Voie, est celui qui unit
complètement deux êtres dans une offrande de soi sans réserve et non celui qui
accouple deux corps physiques. Ce don de soi, acte libre d’un adulte, est trop
souvent confondu avec un désir régressif et infantile de retour à l’indifférenciation de
la relation mère-enfant. Dans l’un comme dans l’autre cas, le sens de la séparation et
l’emprisonnement dans les limites de l’individualité sont dépassés. Mais la
distinction est celle qui existe entre un sage et un petit enfant. L’un est conscient et
éveillé, l’autre ne l’est pas. L’amour est un sentiment conscient.
Arnaud Desjardins
Malheur aux hommes qui placeraient au-dessus d’eux la toute puissance de la mère
ou la femme aliénée à elle-même car ils se retrouveraient doublement esclaves à
l’extérieur comme à l’intérieur. Tout le paradoxe et la difficulté de l’évolution des uns
et des autres se trouvent là. Comment se placer en antenne entre la terre et le ciel,
l’un avec l’autre, sans s’écraser, se dominer, s’exploiter ?
Paule Salomon
C’est parce que la Déesse-mère écrasait l’homme qu’il a dû la renverser et prendre le
pouvoir.
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C’est parce que la civilisation du père écrasait la mère et la femme que les femmes se
sont révoltées et reprennent le pouvoir.
Mais dans l’un et l’autre cas, les individus se vivent morcelés, tronqués parce que
l’alliance entre le masculin et le féminin ne se construit véritablement ni entre les
hommes et les femmes ni à l’intérieur d’eux. Tout le processus de civilisation cherche
cette alliance.
Paule Salomon
En tout homme, il restera comme en arrière-fond le désir et la tentation d’une
régression dans le sein maternel, d’une régression dans le féminin. Comme tel, le
féminin est une menace et la violence masculine est construite sur la peur du féminin
englobant. La tyrannie masculine est une réponse à la tyrannie féminine.
Paule Salomon
La racine de toute relation est celle que vous avez eue avec votre mère. Pour le petit
enfant, ‘’l’autre’’ signifie la mère. Car la première personne avec laquelle l’enfant
entre en contact, est, bien sûr, la mère. La première chose que l’enfant voit, c’est sa
mère ; le premier son que ses oreilles entendent, c’est le son de la voix de sa mère ;
avec son nez, il respire l’odeur de sa mère et le premier goût qu’il a, c’est celui de sa
mère. Elle est à elle seule, l’univers entier.
C’est pourquoi la réaction qui a commencé ici, le type de personnalité qui s’est formé
à ce moment là, se fixe et devient un stéréotype. Quelle est alors la fondation de la
vie ? Seulement ce que l’on a reçu…Ce que l’on a eu…Ce que l’on a reçu dans le
contexte de la relation avec ceux que l’on aime. C’est cela seul qui révèle quelle sorte
de vie l’on a …Ce que l’on a reçu, aussi bien que ce dont on a été privé : l’aspect
positif et l’aspect négatif. C’est cela qui donne naissance à tous les scénarios de la vie.
Voyez ce que vous avez reçu…et aussi ce dont vous avez été privé…Ce que vous
avez reçu et ce dont vous avez été privé dans votre relation d’amour avec la mère. Ce
que vous avez reçu devient la fondation de votre vie, votre type de scénario, votre
attitude devant le monde, devant la vie.
Swami Prajnanpad
Tant qu’on n’a pas coupé la dernière racine du désir de l’homme pour la femme, on
possède un esprit captif et aussi asservi qu’un veau tétant sa mère.
Bouddha
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La relation à l’autre est toujours accordée sur le désir de plaire inculqué par les
parents dans l’enfance : ‘’Regarde cette petite fille, elle est plus gentille que toi’’. Et la
petite fille, avide d’amour, a entendu ce que pensait vraiment la mère : ‘’je t’aimerais
davantage si tu étais comme elle’’. Elle retiendra que, pour être aimée, il faut se
conduire comme l’autre, au détriment de sa propre expression, de son
développement personnel. Il existe, en chacun de nous, une part de manipulation
égocentrique qui se plie aisément à cette discipline. L’important pour l’ego est
toujours d’être reconnu. S’il ne s’est pas senti accepté par ses parents (et il ne le sera
jamais assez, assez inconditionnellement car les parents ‘’admirables’’ sont rares…),
il se fabriquera n’importe quel personnage plus acceptable pour ses proches et pour
n’importe quel autre : réussite, brio, charme, discipline, dévouement, sacrifice. Tout
lui est bon. Quiconque a pris une fois conscience de l’immense demande d’amour qui
est en lui ne pourra plus douter que chacun de ses actes, chacun de ses choix ait été
orienté jusque-là vers la réalisation de ce désir. Pour se faire aimer, les modèles ne
manquent pas : chacun peut aisément se comparer à son voisin, plus beau, plus
gratifié par la nature, plus intelligent, plus aimé par sa femme ou son mari, doté
d’une plus belle voiture, donc plus séduisant, etc. Chacun s’efforce de jouer, vis-à-vis
des autres, le jeu de séduction qui a plus ou moins bien réussi auprès de ses parents.
Chacun se perd totalement de vue dans cette quête.
Pour fixer une image acceptable de soi pour les autres, le mental se fige dans des
modèles de comportement qui doivent entraîner l’adhésion des autres. Il adopte les
valeurs du milieu, les idéaux qui vont le faire reconnaître, les contre idéaux qui lui
permettront de s’imposer. Il va construire une image de lui qu’il projettera comme le
représentant, au risque de voir à terme cette image s’opposer à son besoin le plus
fondamental : être aimé. Il n’arrête pas de se séparer de lui-même au profit des
autres, dans une quête éperdue du moi à travers les autres, ce moi qui se projette
toujours et qui n’entre, en fait, jamais en véritable relation.
C’est avec ce moi conditionné à plaire, que nous prétendons aimer notre prochain. Il
y a ici confusion entre demande émotionnelle, affectivité et Amour. L’Amour,
principe divin en chacun de nous est non duel et ne connaît nulle répulsion. Il est
attraction universelle. Il est le principe d’alliance qui relie tous les êtres vivants,
toutes les choses créées, la Lumière des objets, le rayonnement naturel du chakra du
cœur. Il est autosuffisant, sans demande, sans désir, et il ne peut se manifester que
lorsque toute demande envers l’autre a cessé, ne serait-ce qu’un instant, lorsque la
personne s’est accordé ce qu’elle demandait désespérément aux autres : la confiance,
la reconnaissance totale.
Pour retrouver l’essence de l’Amour, il faut que tout jugement cesse, tout jugement
sur nous-mêmes. Or nous ne cessons de juger nos sentiments, de les refouler.
Comment peut-on s’aimer assez dans ces conditions pour entendre en soi le chant de
l’Amour ?
Aimer, cela veut dire faire cesser en soi toute dualité. Ne plus opposer ce qui nous
gratifie à ce qui nous déplaît, ne plus favoriser les images positives que nous avons
de nous-même par rapport à nos ombres. Ne plus vouloir être sage au détriment du
démon. Ne plus activer sans cesse le plateau de ce que nous imaginons être une
relation positive au détriment de nos sentiments de revanche, de haine, de
dégoût…Tout cela est en nous. Un véritable chercheur spirituel s’efforce de ne plus
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accepter ce qui lui convient tout en rejetant le reste. Le processus de non dualité va
plus loin : tant qu’il reste en nous un désir de gratification, le Cœur ne peut s’ouvrir.
L’Amour jaillit lorsque les deux plateaux de la balance sont stables, lorsque tous les
sentiments sont devenus égaux dans leur vécu, comme des variations de la
Conscience de Soi que nous n’avons pas à juger ou à préférer. Alors, envers les autres
également, nous n’exerçons plus de préférence. Les jugements qui nous portaient
vers le semblable, le frère, celui qui disait nous aimer, s’arrêtent. Le mouvement de
répulsion que provoquait celui que nous voyions comme différent, s’efface. Il n’y a
plus qu’un vécu intérieur rayonnant, équilibrant en lui-même qui fait de tous les
autres eux-mêmes, sans aucune notion d’appropriation ou de sécurité personnelle.
La compréhension véritable peut alors exister, qui n’a rien à voir avec la tolérance,
impliquant toujours que quelqu’un a raison mais accepte d’entendre l’opinion de
l’autre. Comprendre, c’est être ’’un avec’’, c’est-à-dire reconnaître l’autre comme
étant lui-même et ne pouvant être différent. Comprendre, c’est donc d’abord être
totalement accordé sur soi, sur ses sensations, sur la perception de ses variations de
sentiment et les accepter totalement. En fait, il n’existe jamais que nous-même dans la
relation à l’autre, et lorsque cesse la dualité intérieure, c’est-à-dire le désir de relation,
la demande envers l’autre, nous le savons de façon évidente. Il existe entre l’autre et
nous un espace créé par notre besoin de relation. Cet espace est solitude et nous le
refusons. Et c’est pourtant en acceptant totalement cette solitude que nous pouvons
rentrer en nous-même et prendre conscience que nous étions l’auteur de cette
division. Que c’est nous qui voulions l’autre différent, accordé sur nos désirs, que
nous projetions en lui nos propres jugements, nos reproches de ne pas être
totalement et inconditionnellement à notre service. A chaque rencontre, c’est le
même espoir de la fusion totale, de la reconnaissance infinie. A chaque rencontre,
c’est la déception : l’autre n’est jamais le partenaire de vie, l’ami, le compagnon
attentif rêvé. L’autre est toujours un autre. Il a la même demande, il le dit ou il agit en
conséquence, et c’est insupportable. L’enfant en nous refuse toujours la séparation.
Peut-il jamais exister une relation différente où cette demande est effacée ? Oui, elle
peut exister, mais entre personnes conscientes, parvenues à l’état d’adultes et
capables de reprendre en charge leurs demandes et de vivre en accord avec leurs
sentiments sans exiger la réciprocité de la part de l’autre. La relation, si elle existe,
sera celle des deux partenaires, liés par un contrat de respect mutuel d’écoute,
d’attention, de responsabilité personnelle. Et, par cet engagement envers soi-même et
non pas envers l’autre, l’Amour pourra se manifester si les conditions sont réunies.
Irène Andrieu
Beaucoup de gens sont préoccupés et même dévorés par leur désir de trouver la
relation personnelle parfaite. Constamment, ils sont à la recherche de la perle rare et
tout le temps je suis confrontée au désespoir de ces gens qui n’ont pas réussi à
trouver la personne unique dont ils sont persuadés qu’elle comblera leur vie.
Les relations personnelles sont merveilleuses lorsqu’elles stimulent le
développement spirituel. Une telle relation peut devenir le moyen pour nous pour
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travailler sur un problème psychologique particulier. Dans pareil cas, la relation se
termine souvent dès que nous avons résolu le problème. Il n’y a rien de mal à cela ;
les choses sont comme elles doivent l’être. Nous attirons les gens dans nos vies parce
qu’il y a quelque chose que nous devons apprendre. Cela est vrai pour nos relations
personnelles comme pour tout autre aspect de notre existence. Nous attirons ce dont
nous avons besoin pour apprendre et pour grandir. Quand une leçon est apprise, on
nous présente la suivante. Réfléchissez à cela un instant. Regardez à vos relations du
passé et voyez ce que vous avez appris. Votre objectif devrait être d’éviter de répéter
les erreurs du passé et de travailler à votre liberté spirituelle. Tout cela fait partie de
notre croissance et c’est magnifique si nous le considérons avec la bonne perspective.
Beaucoup de relations personnelles sont vouées à l’échec parce que les gens pensent
trop à ce qu’ils devraient en retirer plutôt qu’à ce qu’ils pourraient faire pour servir
leur partenaire. Ils sont constamment à se demander : ‘’Qu’est-ce que cette relation
m’apporte’’ ? La bonne interrogation est : ‘’Qu’est-ce que j’apporte à cette relation ?’’
Du point de vue universel, une relation personnelle est une occasion de servir un
autre être humain. Il est impossible de vivre une relation heureuse, aimante et
durable si vous pensez à recevoir plutôt qu’à donner. Si vous aimez quelqu’un au
vrai sens spirituel du terme, vous cessez de vous débattre avec vos désirs
personnels—vous aimez simplement cette personne. Vous n’essayez pas
constamment de manipuler cette personne selon une idée fixe du ‘’couple parfait’’ ou
de la famille parfaite mais vous l’acceptez comme elle est. Les gens peuvent
certainement grandir et changer par le biais de leurs relations s’ils le choisissent.
Nous servons de miroir à celui ou celle avec qui nous sommes liés ; ainsi nous nous
aidons mutuellement à nous connaître et nous comprendre nous-mêmes, pour autant
seulement que nous refusions de porter des jugements pendant ces ‘’projections’’.
Mary T. Browne
La relation de couple étant le bastion le plus solide de l’illusion, le lieu où le cœur
mis à vif se dénude, où les conflits s’avèrent les plus ardents, les reproches les plus
virulents, ce même couple peut devenir, s’il en est capable, le moyen privilégié d’une
vraie connaissance de soi, de l’autre et de la façon incroyable et retorse dont
fonctionne le mental.
Denise Desjardins
Les visages humains présents dans notre esprit et les sentiments qu’ils nous inspirent
(amour, haine, jalousie) constituent le plus gros obstacle sur la voie de la Libération.
Ils sont à l’origine des myriades d’idées, de désirs, de sankalpas (résolutions) et de
vikalpas (doutes, incertitudes) dont est formé le mental.
B.S. Goel
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On devient conscient seulement hors de la profonde expérience de l’amour, doux et
amer, plaisant et douloureux, élevé et bas, ciel et enfer, hors de l’expérience profonde
de la douleur et du plaisir par l’amour. Ils sont nécessaires pour vous rendre
conscient.
Osho
L’évolution de l’anima et de l’animus n’est pas de tout repos. Tout ce qui n’a pas été
vécu a besoin de l’être et l’avancée vers la sagesse prend des allures de folie au
passage. Plus un être est prévenu du parcours et plus il intègre des transformations
sans trop de perturbations et de souffrances. Pour chacun de nous le visage de
l’homme intérieur ou de la femme intérieure est comme un puzzle mystérieux que
chaque rencontre importante vient un peu compléter. Nous nous projetons
facilement amoureux, mais parfois il n’y a pas de nécessité et pas de bénéfice à
engager une histoire…
Le jeu entre l’intérieur et l’extérieur est ainsi plein de subtilités. Plus un être est
conscient et plus il écoute la demande de son couple intérieur avant de se précipiter
dans des péripéties extérieures.
L’érotisation de l’être consiste dans le fait que nous nous mettions le feu les uns aux
autres, à la fois dans le cœur et dans le sexe, ouvrant ainsi le chemin de l’éveil et de la
sagesse qui dorment en chacun.
Comprendre que dans l’échange ce phénomène subtil se joue à chaque instant, c’est
entrer dans l’émerveillement de la vie.
Paule Salomon
Pourtant cette fascination excessive qui est le fait de la passion, se caractérise souvent
par un si grand manque de clairvoyance, de logique et de raison qui la font retomber
de son haut quelque temps après sa venue, que l’on comprend fort bien la position
de Schopenhauer n’y voyant qu’une immense illusion. La raison n’en est sans doute
pas la production d’un enfant particulier, même si ce qu’on appelle les enfants de
l’amour sont souvent des réussites accomplies.
D’autres motivations s’y ajoutent : l’aspect magnétique, irrésistible de l’attirance
soudaine de deux êtres humains vient souvent de niveaux plus obscurs de l’individu,
ceux enfouis au tréfonds de lui-même, si lointains qu’ils lui sont inconnus. Que
l’inconscient dirige l’être humain de la profondeur sans qu’il s’en rende compte
véritablement, et sans qu’il puisse se l’expliquer ni résister, est chose connue. Ces
couches ignorées de nous-mêmes sont imprégnées de courants de forces, de
souvenirs lointains incrustés en notre mémoire subconsciente, réservoir immense de
ce que les Indiens nomment samskaras et vasanas, impressions douloureuses ou
heureuses demeurées vivantes et latences souterraines dont la force contenue ne
demande qu’à éclater. Réserve bouillonnante de souvenirs latents, de perceptions
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passées, d’impressions traumatisantes, entrelacs compliqués de pulsions qui
s’opposent ou se complètent, voilà l’immense domaine, d’habitude inconnu, que
l’Inde appelle chitta et Freud l’inconscient. Ce qui est ainsi caché, contenu, sous
pression, jugulé, n’est mû que par une seule urgence : s’exprimer, se détendre. De
l’obscurité, surgir au grand jour, de caché se révéler, d’enfoui dans la profondeur
arriver à la surface, d’ignoré devenir conscient, de latent devenir patent. Endiguées
par nos refus de reconnaître ce bouillonnement intérieur, ces vasanas ou latences ne
peuvent venir à la surface, engluées dans un marécage inextricable de tensions, de
conflits, de désirs contradictoires, mais elles essaieront de parvenir par tous les
moyens à se rappeler à notre attention : par des rêves, des cauchemars ou elles ont
libre jeu, par des actions impulsives, incompréhensibles, par des coups de foudre non
moins inexplicables. Il s’agit souvent de souvenirs désolants ou heureux de
l’enfance : on recherche maman, ses yeux, son sourire, ses cheveux. On désire sans le
savoir la retrouver dans les yeux ou l’attitude de celle qui nous attire maintenant. Et
dès qu’un détail semble tout à coup ressusciter l’image tant chérie qui berçait notre
jeunesse, on se précipite tête baissée et yeux clos dans ce gouffre attirant qu’est celle
qui ressemble à maman, ou celui qui rappelle papa. Et voilà ce qu’on appelle le
destin en marche. La Fatalité a nom mémoire. Mémoire inconsciente lointaine sur
laquelle résonne une note actuelle qui fait immédiatement resurgir la note oubliée
par suite de leur ressemblance plus ou moins éclatante. Un processus semblable
encore plus enfoui, encore plus complexe, encore plus puissant se met aussi en
branle, celui du rappel d’impressions ou d’amas d’impressions de vies précédentes.
Ce qu’on appelle en Inde le karma est une relation intime entre une situation actuelle
et une autre plus ancienne et nos expériences ne sont pas déterminées par un Destin
extérieur et mystérieux mais par des conditionnements qui peuvent être découverts à
la suite d’une introspection incisive et continue. Si nous parvenons à les connaître
dans leur origine, leur cheminement, leurs aboutissements, ces conditionnements
apparaissent clairement et du même coup il devient possible d’analyser nos
attractions et répulsions irrésistibles, étranges ou inexplicables,, au prix d’une
vigilance acérée. Les processus habituels dont nous sommes esclaves, une fois
connus, peuvent alors être dissous lentement ou abruptement. Alors cette Fatalité
toute puissante, mystérieuse ou divine qui nous conduit à des situations et des
émotions irrépressibles, cette clef de voûte de la passion ne serait nullement un
phénomène extérieur mais bel et bien un jeu très intérieur qu’habituellement nous
subissons sans y rien comprendre et qui nous mène en effet comme un implacable et
inexplicable fonctionnement mais dont nous pouvons, par un travail approprié,
démonter le mécanisme.
L’attirance magnétique, magique, inexorable, qui nous précipite vers un être humain
proviendrait alors d’un des courants dynamiques qui animent continuellement nos
structures mentales, pensées, émotions, désirs et bien sûr la plus intense des
émotions, l’amour à son apogée : la passion.
Le souvenir lointain d’une femme merveilleuse que nous avons aimée ou qui nous
adora, une situation vécue dans une vie antérieure que nous avons ressentie avec
acuité et que nous voulons obscurément mais absolument revivre, et ce désir de
retrouver le goût du bonheur passé, l’intensité de l’expérience vécue vivent en nous,
forts, impérieux, dominateurs, tout puissants—les mêmes qualificatifs que nous
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attribuions au destin. Voilà ce qui nous pousse irrésistiblement à recréer autour de
nous les mêmes conditions, une expérience semblable, un amour aussi fort.
Fondement de notre caractère, ce courant perpétuel venant de l’immense réservoir
d’impressions anciennes inconscientes, mais ayant gardé leur entier dynamisme,
essaie de toutes ses forces, par tous les moyens, de les faire venir au grand jour, de les
actualiser. Dès qu’il en trouve l’opportunité, c’est-à-dire dès qu’un élément, un détail
lui paraît semblable à la situation connue, il s’y déverse. Encore plus violemment si
plusieurs éléments se rassemblent pour rappeler l’expérience passée ou la personne
support de cette expérience.
Irrésistible, aveugle, frénétique élan, incroyable pulsion venue du fond de notre
mémoire inconsciente pour retrouver ce même goût, ce même genre de situation—un
réflexe conditionné à la Pavlov. La liberté effrénée de la passion se réduit à un
automatisme dont nous sommes esclaves. Fascination poussée à son plus haut point
à laquelle il est impossible de résister, magnétisme à son zénith qui emporte
résistances, volonté, raison, la passion-fatalité devient activité dynamique de la
mémoire, processus mental du désir de répétition d’expériences passées—même si
elles sont désagréables.
Hypothèse peut-être, mais plus enracinée en notre être que le lointain Génie
schopenhauérien et qui se fonde sur la théorie indienne des samskaras et des vasanas,
sur celle de Freud et sur les expériences faites sous mes yeux de plus de sept mille
heures de lyings.
Soumission et obéissance aux commandements, au code moral de notre tradition et
de notre éducation ou leur infraction, nous sommes de toute façon menés. De
l’extérieur par ces lois ou de l’intérieur par nos automatismes inconscients. Au sein
de lois strictes que l’on suit extérieurement, il demeure possible, à la fois de trouver
une plénitude par une adhésion parfaite comme l’artiste égyptien qui, tout en se
conformant aux règles artistiques de son époque, trouvait la liberté de s’exprimer, et
d’essayer de se libérer des conditionnements psychiques venus de l’enfance ou de
plus loin (le karma) qui pèsent sur nous et nous entravent dans notre évolution
comme le boulet au pied des prisonniers.
Denise Desjardins
Voilà donc connu par une longue introspection ce mécanisme inconscient. Et du
coup voilà que la passion est démystifiée, démunie de son aspect de magie, de
Fatalité ou d’envoûtement démoniaque. Ce qui ne retire pas pour autant le caractère
instructif que présente le processus. Comme n’importe quelle expérience, celle de la
passion à son plus haut degré ne nous apporte pas seulement déboires, illusions
détrônées, asservissement aveugle à un autre être humain. C’est aussi une étape
prodigieusement intéressante, révélatrice de notre être inconnu, de notre inconscient,
de la force des phénomènes sous pression qui s’y agitent, nous conduisent et nous
dépassent. Elle offre une possibilité de nous connaître dans un aspect excessif,
démesuré de nous-mêmes et, si par la réflexion, l’analyse nous en tirons la leçon, elle
peut servir de chemin de connaissance. Venant du goût de connaître sa limite, de
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s’éprouver dans une situation clef par son danger, son intensité, la passion nous met
en question dans nos fibres intimes, nous hausse à la pointe ultime de nos
possibilités…
Cette même passion, source de tant de difficultés et de maux, peut susciter une
catharsis puissante par la souffrance qu’elle provoque irrésistiblement, une
souffrance purificatrice, si on parvient, sur le moment ou plus tard, à la replacer dans
le contexte d’une voie intérieure et à en comprendre la signification d’expérience
cruciale pour l’évolution de l’être. Est-ce l’éloge de la passion ? Pas exactement.
Plutôt la reconnaissance d’une remarquable possibilité qui s’y trouve incluse bien
que difficile à reconnaître lorsque nous sommes au coeur des bouleversements
passionnels…
Etant totalement entraîné par cette énergie passionnelle, on devient totalement UN
avec elle, même si on ne s’en rend pas compte sur l’instant. Ne résistant plus et lui
disant en quelque sorte OUI, on se retrouve soudain unifié, libre de cette épuisante
scission en deux parties, l’une qui veut s’abandonner à ce flot d’énergie, l’autre qui y
résiste. Et du fait d’aller avec cette énergie bouillonnante, de s’y sentir uni de façon
nouvelle, une plénitude se crée, étonnante, joyeuse qui suscite un état d’être exaltant.
Du coup se produit une sorte de bonheur inconnu. Bien plus, puisqu’on peut goûter
cette émotion à laquelle on adhère, il devient alors possible d’en avoir une véritable
connaissance. C’est une occasion unique. Rares sont ceux capables de la saisir
directement, sur l’instant, faute d’entraînement à la vigilance. Pour quelques-uns, il
est possible de le faire rétroactivement. La passion a laissé un goût inoubliable et, une
fois l’exaltation retombée, terminée, une tentative de connaissance peut être
entreprise comme une sorte d’anamnèse. La compréhension de ce qu’est l’émotion
s’élabore par une réflexion sur ce qui s’est produit dans le passé. A ce moment, la
passion perd son caractère à la fois de ‘’bien’’, parce qu’on y a été follement heureux,
et de ‘’mal’’ parce qu’on y a ‘’souffert à en crever’’ pour ne devenir qu’un instrument
de connaissance, une compréhension intime des couches profondes de soi-même
remuées par cet extraordinaire chambardement amoureux. Elle demeure alors telle
qu’elle est, neutre. Le défavorable peut se métamorphoser en favorable selon la façon
dont est perçu chaque événement extérieur ou intérieur qui, lui, n’est ni favorable ni
défavorable, ni bien ni mal, mais bel et bien neutre. Si, aveuglés par l’émotion
passionnelle, nous n’avons pu sur l’instant discerner cette neutralité, le temps nous
permettra avec notre intelligence discriminatoire retrouvée d’assimiler cette
expérience, d’en voir le côté positif, même si les ravages ont provoqué sur le coup,
souffrance, désespoir et emportement. L’amour-passion nous aura permis de nous
connaître. Bien plus il aura suscité un élargissement de notre être encore mieux
perceptible que dans le cas d’un amour-amitié. Comme étonnés par la force de son
élan spontané, nous avons oublié notre ‘’moi’’.
Nous sommes allés de façon totale vers l’objet aimé. Nous nous sommes dénudés de
toute individualité close sur elle-même pour nous ouvrir à l’autre et devenir UN avec
lui. Un point capital sur la voie. Alors l’amour-passion, l’amour de la chair pourra se
transformer en un amour plus désintéressé jusqu’à parvenir à l’amour de Dieu…
Denise Desjardins
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Le besoin d’amour est inné chez l’individu, celui-ci cherche à le satisfaire tout au
long de sa vie. Le moi individuel ou jiva est un reflet de Dieu. C’est lui qui cherche
l’amour, car il a oublié sa véritable identité. L’amour s’obtient au contact de Dieu, car
Dieu est amour et se trouve au-dedans de nous. Quand le jiva trouve Dieu en lui, non
seulement il obtient l’amour, mais il devient l’amour. Mais au départ, le jiva
s’identifie à l’ego et au corps physique. Dès l’enfance, il apprend à recevoir l’amour
de l’extérieur, en premier lieu de sa mère, et ensuite d’autres personnes. Toutefois,
cette soif d’amour ne sera jamais véritablement étanchée, puisque l’amour reçu
dépend d’une source extérieure plus ou moins instable. Cette source peut trahir,
rejeter, mettre des conditions ; elle peut aussi disparaître.
Dans la méditation, quand le jiva entre en contact avec Dieu au-dedans de lui, il est
tout à fait comblé. Il se fond dans la source même de l’amour.
B.S. Goel
Vous vous sentez seul, seulement en fonction des autres. Vous restez encore attaché à
tous les autres…
Suivez-vous ? Et pourquoi restez-vous encore attaché ?
Parce que vous attendez encore. Vous gardez encore l’espoir. Voilà ce que cela
signifie…Vous n’avez pas encore compris que ce n’était pas possible d’avoir…que les
choses sont ce qu’elles sont.
Chacun se sent solitaire, bien sûr. Chacun se sent seul…Chacun est seul. Alors ? Qui
peut prendre soin des intérêts de quelqu’un d’autre ? Qui fera quelque chose pour
quelqu’un d’autre ? Qui fera en réalité quelque chose pour les autres ? Qui peut faire
quelque chose pour quelqu’un d’autre ? Personne ne peut rien faire pour quelqu’un
d’autre. Personne ne peut faire quelque chose pour quelqu’un d’autre.
Alors ? …Alors ? …Alors que peut-on faire ? Rien…rien…rien du tout. Et voilà où
vous en arrivez…C’est seulement ainsi que vous pouvez en arriver là…Etre séparé
de tous et cependant connaître l’unité avec tous. Comment et pourquoi ? Parce que
c’est un fait. Ce n’est que cela. Tous sont seuls, tous sont solitaires. Chacun est
solitaire. Et cependant tout le monde éprouve cette souffrance et les tourments de ce
désir…tout le monde cherche ce qu’il n’est pas possible d’avoir. Mais, moi j’ai vu et
j’ai réalisé que ce désir et cette recherche étaient vains…qu’ils n’avaient aucun sens.
Car c’est impossible d’avoir.
Chacun se sent seul, justement à cause de son attente sous-jacente. Oh ! C’est ainsi
qu’est la réalité. C’est un fait. C’est ainsi que le monde est. Cela c’est maya. On
continue à espérer, bien qu’on ne puisse pas avoir. Comment m’en sortir alors ? N’aije pas découvert par ma propre expérience qu’on ne pouvait pas avoir ? Ce n’est pas
possible d’avoir. On ne peut pas réagir autrement si on a compris ceci
complètement…La souffrance ou le désespoir est suivi par une réaction, simplement
quand ils ne sont pas ressentis pleinement et complètement, quand ils ne sont pas
expérimentés dans leur totalité et sans aucune réticence.
Quand cependant, vous ressentez et vous expérimentez complètement et totalement
le désespoir, aucune réaction ne suit. Rien d’autre n’est créé. Vous obtenez la
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réalisation complète, vous avez jnana…L’illumination. Car vous n’avez aucune autre
alternative…Vous n’avez rien d’autre à obtenir ou à accomplir. Rien…nulle part…
rien du tout…Alors ?
Il n’y a que ceci. Il n’y a que ceci qui soit là. Comment peut-on le savoir ? Seulement
après avoir assimilé le fait que vous ne pouvez rien obtenir, seulement après avoir
accepté et réalisé que c’était inévitable, après avoir vu l’impossibilité d’établir aucune
relation d’aucune sorte…Ceci est d’une certaine façon la mort, la mort à l’intérieur de
vous-même…Quand on réalise que oui, cette solitude est le fait…que ceci, bien sûr,
est un fait, on ne peut plus se sentir le moins du monde, seul. Ce sentiment ne peut
plus jamais revenir. Je ne suis que le Soi. Je ne peux avoir aucune relation envers
personne. ‘’Ceci’’ devient le fait réel. Et alors vous devenez stable en vous-même.
Swami Prajnanpad
Il est possible, comme l’ont affirmé toutes les Traditions spirituelles, d’être à la fois
dans le monde et hors du monde, et que le détachement, loin de nous couper des
autres et de notre environnement, ne nous rend que plus présents. C’est une absenceprésence…Si vous voulez.
Arnaud Desjardins
Si un chercheur de vérité sincère vient vers moi, le contact sera immédiat. La seule
relation possible passe par le divin, désormais, toute autre approche est exclue. Il doit
trouver ce que j’ai trouvé. On me demandait l’autre jour : ‘’Pourquoi vos amis de
jeunesse ne viennent-ils jamais vous voir ?’’ La réponse est simple. D’abord, je n’ai
jamais eu beaucoup d’amis. Je n’avais d’affinités qu’avec d’autres chercheurs de
vérité et de tels êtres ne courent pas les rues. Les quelques-uns avec lesquels j’étais en
contact ont également disparu parce que pour se rencontrer, il faut se trouver dans
une même sphère. Soit que je devais descendre, ce qui est impossible. Soit qu’ils
devaient monter, ce qui était difficile. Peu à peu, le vide s’est fait autour de moi. Mes
anciennes connaissances continuent de penser à moi dans les termes de l’homme
que je ne suis plus. L’ami qu’ils ont connu est mort. Comment peut-on converser
avec un mort ? S’ils venaient, ce serait très embarrassant. Ils ne sauraient pas quoi
dire. Parler du passé est devenu absurde. Je pourrais les écouter, mais n’aurais
absolument rien à répondre. Ce serait une situation très gênante. Ils sont venus au
début, puis ont cessé leurs visites. Seule ma famille a persévéré ; elle a fait tout ce qui
était en son pouvoir pour percevoir ma nouvelle réalité. C’est un événement rare.
Osho
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La compréhension de soi-même ne peut survenir que par le biais de la relation, en
vous observant vous-même en relation avec des gens, des idées, des choses, avec les
arbres, avec la terre, avec le monde qui vous entoure, avec votre propre monde
intérieur.
La relation est le miroir dans lequel se reflète votre soi.
Sans la connaissance de soi-même, il ne peut y avoir de base pour la pensée juste et
l’action juste.
Krishnamurti
Sans une connexion profonde avec les choses, le Cœur ne s’ouvre pas.
Tout ce que nous excluons de notre expérience, par principe, par croyance, par peur,
par idéal, par ignorance ou par manque d’attention nourrit nos systèmes de
protection qui se transforment lentement en prison.
Lalita Devi
Ce qui importe, ce n’est pas d’adopter une philosophie de la vie, mais d’observer ce
qui a lieu, en toute vérité, dans notre vie quotidienne, intérieurement et
extérieurement.
Krishnamurti
Surveille tes paroles.
Surveille tes actes.
Surveille tes pensées.
Surveille ton caractère.
Surveille ton cœur.
Sathya Sai Baba
Vous devez avoir un regard sur l’extérieur et sur vous-même afin qu’aucune de vos
réactions ne vous échappe.
C’est le cœur du chemin, véritable présence à soi-même.
Arnaud Desjardins
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Si vous prenez appui sur le courant de l’existence lui-même et que vous vouliez
simplement vivre cette existence telle qu’elle est, consciemment, vous y arriverez.
Vous arriverez à voir comment vous réagissez aux événements et c’est la vision de
vos réactions qui fera grandir en vous la conscience de soi.
Arnaud Desjardins
A chaque instant, l’occasion se présente d’être absolument attentif. Quoi que vous
fassiez, absorbez-vous totalement, de sorte que votre mental ne pense rien et ne soit
plus qu’une présence. Vous serez de plus en plus intégré. Et l’expérience de la totalité
vous stimulera à être de plus en plus entier. Essayez aussi de découvrir en quelles
circonstances vous êtes distrait. Guérissez-vous progressivement de ce morcellement
intérieur. Vous n’êtes pas total quand vous résidez dans votre tête, quand vous
pensez, ruminez, calculez, échafaudez des plans…Peu à peu, supprimez ces
égarements. Ce ne sont que des habitudes. Les habitudes sont difficiles à extirper,
sans aucun doute, mais vous réussirez si vous persistez.
Osho
Un grand nombre d’obstacles vont nous détourner de notre objectif :
- La distraction due à l’activité automatique de la pensée
- Les projections
- Les références au passé
- L’inadéquation entre ce que nous désirons et ce que nous vivons
- La contradiction qu’il y a entre notre vie et nos croyances
- Le sentiment de notre culpabilité originelle et de notre indignité
- Le désir de modifier la teneur de la réalité
- Le désir de n’être présent qu’au plaisir et d’occulter toute souffrance, toute
tension, toute angoisse, tout malaise
- Le désir de modifier la durée de certains éléments de la réalité.
Notre difficulté à être présent vient principalement du fait que nous n’acceptons pas
la réalité telle qu’elle est car nous ne voyons ni sa beauté ni sa profondeur. Nous
imaginons à tort que la vie telle que nous la réorchestrons est plus digne d’être vécue.
Nous perdons ainsi une énergie considérable à vouloir transformer la réalité afin
qu’elle corresponde à nos plans, à notre idéal, à nos croyances. Malheureusement, la
réalité n’est pas faite pour se conformer à nos désirs. Aussi perdons-nous beaucoup
de temps à ce travail absurde. C’est là la principale difficulté à vivre une vie plus
fluide, où la réalité n’est plus figée par notre mental. Notre esprit a l’habitude et la
merveilleuse capacité de se mouvoir rapidement et de coïncider avec le flux de la vie,
qui est lui aussi d’une grande mobilité. Chaque fois que nous intervenons pour faire
durer ce qui par nature est transitoire, nous bloquons le flux naturel de la vie.
94
Chaque fois que nous intervenons pour tenter de trancher une sensation ou une
émotion qui ne correspond pas à nos désirs, nous paralysons, nous bloquons le flux
naturel de la vie.
Daniel Odier
Nous cherchons toujours à jeter un pont entre ce qui est et ce qui devrait être ; et parlà, nous donnons naissance à un état de contradiction et de conflit où se perdent
toutes nos énergies.
Notre esprit peut-il cesser de diviser, ne peut-il pas demeurer complètement avec ce
qui est ? Et dans la compréhension de ce qui est, subsiste-t-il un conflit quelconque ?
Krishnamurti
Ce qui EST est illimité, et ne connaît pas de restriction.
Krishnamurti
Dans cet instant précis, ici et maintenant, il y a tout : tout ce qui doit être connu et
réalisé, moksha.
Dieu, la réalité, tout est dans cet instant. Aussi la recherche spirituelle n’est pas la
recherche de quelque chose. Elle n’a pas d’objet. Elle consiste à connaître ce qui est, et
cette connaissance vient quand on est dans l’instant. Etre dans l’instant, c’est la porte
secrète, être dans le présent, c’est le secret ouvert à tous.
Osho
Toute la question est de savoir quelle est la situation et d’ouvrir les yeux au moment
même de son actualité présente ; cela n’a rien d’une expérience mystique plus
spécialement, et ce n’est pas mystérieux du tout ; c’est tout simplement et justement
une perception directe, ouverte et claire de CE QUI EST MAINTENANT. Et lorsque
quelqu’un est capable de voir exactement CE QUI EST MAINTENANT sans être
influencé par le passé ou quelque attente de l’avenir, mais bien de voir et de ne voir
rien d’autre que l’instant juste du moment actuel, alors il n’y a plus, à ce moment, du
tout de barrières. Car c’est uniquement par association avec le passé ou avec une
attente de l’avenir qu’une barrière peut se lever. Donc le moment présent n’a aucune
barrière, l’instant actuel n’a pas de limite du tout.
Chögyam Trungpa
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Tous les jours, avec une lueur malicieuse dans le regard, mon maître, Devi, me
demandait ce que la pratique changeait dans mon quotidien. Ce qu’elle entendait par
là, c’était que je réalise si, depuis la seconde où j’ouvrais les yeux jusqu’à la seconde
où je les refermais, ma manière de marcher, de respirer, d’être présent à chaque
instant de la vie, à l’harmonie de chaque contact, de chaque geste, de chaque
sensation, de chaque émotion et de chaque pensée était présente en moi car pour elle
c’était le champ tout entier de la réalité qu’il s’agissait d’investir en laissant la
conscience le submerger.
Dès le début de mon séjour auprès d’elle, Devi me faisait remarquer chaque instant
d’absence au monde, chaque mouvement brutal, chaque automatisme. Son
enseignement était totalement centré sur la présence détendue mais continue au
monde. Lorsqu’elle me parlait de philosophie, elle ramenait toujours les idées à la
réalité de la vie et à la pratique constante.
Pour Devi, un être qui prétend à la spiritualité est un être qui laisse sans arrêt circuler
librement tous les mouvements qui le relient au monde, autant sur le plan intérieur
des sensations, des émotions et des pensées que sur le plan de l’action. Elle disait
qu’un seul instant de présence totale valait la lecture de tous les traités, de tous les
poètes, de tous les philosophes. Devi était une grande sahajiyâ, un être éveillé
totalement spontané.
Daniel Odier
Se tenir vif, spontané et alerte à l’instant où les choses surgissent est considéré
comme le Mahayoga par les tantrikâ car la réussite de ce petit miracle de présence
dispense de tous les expédients, de toutes les techniques, de toutes les pratiques
spirituelles, de tous les yogas spécifiques. C’est la non pratique suprême puisque
dans l’éclair de l’instant s’annihile tout devenir et toute progression sur la voie
spirituelle. C’est la quintessence du tantrisme, du chan, du dzogchen, le Grand
Sceau, Mahâmûdra, tel que le nomment tibétains et cachemiriens. Saraha le dit en un
vers magnifique de son Dohâkosa : ‘’L’Eveil n’a pas de lieu. Connais ce mystère et
sois non mutilé dans la nature essentielle de ta conscience immaculée.’’ Cette
‘’conscience immaculée’’ est la liberté totale.
Daniel Odier
Vous n’avez pas besoin d’être bouddhiste ou tantrikâ, vous n’avez même pas besoin
de vous intéresser à la spiritualité. Il ne s’agit que d’une réalité, votre désir d’être au
monde, totalement, sans inhibition, sans peur, sans angoisse. Le désir d’être
intégralement disponible à la vie suffit. Vous n’avez ni à vous engager, ni à
pratiquer, ni à croire quoi que ce soit. Les choses ultimes se présentent d’une manière
si simple qu’il suffit d’en faire l’expérience par soi-même.
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Qu’allez-vous découvrir de passionnant ? Vous allez voir que chaque fois que vous
allez réussir à saisir la vie dans son immédiateté, votre respiration va se relâcher
harmonieusement. Cette sensation va vous apporter un plaisir profond que vous
allez ressentir jusqu’à l’intérieur de votre tête. Dix secondes de respiration spontanée,
douce et profonde suffisent à déclencher une sorte de flot tiède et vibrant dans votre
cerveau et parfois dans tout le corps.
Ensuite, vous allez découvrir qu’une vraie présence vous apporte un plaisir sans
commune mesure avec l’événement. La chose la plus banale, un bol de thé, quelques
pas, l’ouverture d’une porte, un regard sur le ciel peut suffire à vous rendre heureux
pendant le temps de votre présence et bien après.
Vous allez découvrir que si vous pouvez trouver un tel plaisir à la présence, votre
joie ne dépend plus de circonstances exceptionnelles attendues dans une tension
névrotique, mais de la simple réalité, telle qu’elle se présente à vous de seconde en
seconde. Vous gagnerez ainsi une autonomie immense par rapport aux plaisirs
intenses que vous attendez de la vie pour être satisfait.
Il en découlera très vite que votre quête et votre attente ne seront plus placées sur des
objets hypothétiques et aléatoires mais sur ce que votre expérience vous révèle de la
banalité quotidienne.
Vous allez découvrir que ce plaisir, rien ni personne ne peut vous l’enlever et, là
encore, votre indépendance va augmenter.
Vous allez découvrir que votre corps et votre esprit aiment cette communication à un
tel point qu’ils vont s’unir pour vous en demander plus et que la scission habituelle
entre le corps et l’esprit va s’atténuer progressivement.
Vous allez découvrir que dans la présence au monde, il n’y a pas d’ego, donc pas de
séparation, pas de dualité. La panique de n’être rien qui vous effleure laissera alors la
place à l’expérience qu’être rien c’est accéder à la totalité et que dans cette attention
nue vous êtes le monde.
Daniel Odier
Votre entourage sera touché beaucoup plus profondément par votre présence que
par votre discours et vos théories spirituelles. La présence est contagieuse ! On vous
demandera si vous êtes amoureux et vous répondrez spontanément ‘’oui’’ à cette
question, sans savoir très bien de qui ou de quoi vous êtes amoureux. C’est cette
sensation continue qui va désormais guider votre vie.
Si vous avez le goût de cette pratique et que vous persévérez quelques semaines ou
quelques mois, vous allez découvrir qu’il n’y a plus de ‘’pratique’’ mais tout
simplement un plaisir, un frémissement de vie incomparable.
A ce moment là, vous toucherez le secret tantrique et vous irez naturellement à un
plaisir de la présence de plus en plus suivi car c’est le sens profond de la vie. Peu à
peu, vous réaliserez que ce qui se cache derrière les traités les plus abrupts, la
philosophie la plus sophistiquée, les pratiques les plus secrètes, c’est simplement
cela.
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Vous toucherez alors à la source de laquelle ont jailli toutes les voies spirituelles,
toutes les voies mystiques et, en approfondissant sans cesse cette présence nue au
monde, vous connaîtrez ce qu’on appelle l’éveil.
Daniel Odier
En tentant aussi souvent que possible d’être présent à la réalité, nous allons toucher
cette réalité certaines fois, la manquer d’autres fois. Peu à peu nous allons goûter les
choses dans la profondeur de la présence et dans le silence mental. A force de vivre
dans cet espace de liberté quelques secondes par-ci quelques secondes par là, tout
notre corps/esprit va se diriger de plus en plus spontanément vers la présence,
simplement parce qu’il va découvrir que rien ne lui apporte une satisfaction et un
plaisir plus profonds.
A mesure que nous goûterons à la réalité, nous découvrirons que notre présence
s’étend à l’ensemble de nos mécanismes mentaux et physiologiques. Nous serons de
plus en plus sensible à la masse incroyable de parasites à la réalité nue que nous
générons. C’est alors que notre attitude va se modifier spontanément et en douceur.
Par la conscience, nous découvrons notre manière de court-circuiter la vie, ainsi nous
n’adoptons jamais une nouvelle conduite, nous ne suivons jamais un nouvel idéal,
car ce serait s’enfermer encore une fois dans des concepts.
Nous observons sans émettre de jugement et c’est cette limpidité qui va éclairer notre
comportement et faire que, tout naturellement, nous allons cesser de bloquer le cours
de la vie. Pour nous libérer, nous allons observer que nous bloquons et comment
nous bloquons.
Celui qui désire être pleinement vivant n’a rien d’autre à faire que d’observer sans
commentaire intérieur les mécanismes automatiques qui l’empêchent de goûter au
frémissement de la vie. Cette observation seule est la clé de notre liberté. Elle
demande une attention nue et silencieuse détachée de tout objectif. Une attention
légère et fluide, ludique et féline, avec cette détente absolue qui précède le
mouvement des fauves. On compare souvent les yoginîs et les yogis à des tigresses et
à des tigres, dont ils utilisent parfois la peau pour méditer, car ils ont cette vivacité.
Peu à peu, nous allons voir que ce jeu modifie totalement notre rapport aux autres.
Nous allons enfin être là, sans attente et sans projet, sans peur, sans besoin de saisir
ou de rejeter. Nous allons alors sentir la paix profonde qui va se distiller dans le
corps sensible, tout de présence et de frémissement à l’autre. Les deux instruments
vont alors pouvoir s’accorder et vibrer à l’unisson.
La sensorialité tout entière va pouvoir se mettre en vibration et capter la vibration de
l’autre dans l’absence d’un commentaire mental. Dans ce silence, rien qui soit
planifié, rien dont on n’accepte pas la durée réelle. Rien que l’on tente d’amplifier ou
de faire durer. Simplement le mouvement, le flux, la plénitude dans sa réalité
intrinsèque que rien ne vient distendre ou réduire. L’éclosion spontanée des gestes
touchera alors à une grâce inconnue, à une magie d’autant plus réelle que mouvante
et libre.
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Lorsque nous aurons goûté à ce type de communication, nous comprendrons à quel
point elle révèle la liberté fondamentale de tous les êtres et nous tendrons
naturellement à la laisser déborder dans toutes nos relations, simplement parce que
nous aurons vécu, dans ces instants d’extase, que nous sommes les êtres et les objets.
Alors, il n’y aura plus de relation à l’autre, c’est ce que les tantrikâ appellent la
présence à la réalité.
Daniel Odier
Le but suprême du voyageur est de ne plus savoir ce qu’il contemple.
Chaque être, chaque chose est occasion de voyage, de contemplation.
Lie t’seu
Une personne pleinement consciente ou qui travaille à l’acquisition de la pleine
conscience n’a pas de direction ou de tendance spécifiques bien définies. Elle est juste
simplement consciente. Totalement et entièrement consciente. Cette conscience
comporte aussi la précision, qualité principale de la conscience dans le premier stade
de la pratique de la méditation.
La conscience conduit à l’état sans ego parce qu’elle est sans objet. Vous êtes
conscient du tout dans son ensemble, conscient de vous, de l’autre, de ce que vous
faites et de ce qu’il fait, en même temps. Ainsi tout est ouvert. Il n’y a pas d’objet
particulier à la conscience.
Chögyam Trungpa
La vigilance sans effort et sans choix est notre vraie nature.
Ramana Maharshi
La méditation se poursuit vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il ne s’agit pas de la
faire une fois par jour et puis terminé. Il faut qu’elle soit votre essence, votre milieu
naturel ambiant, qu’elle vous enveloppe où que vous soyez, quoi que vous fassiez.
Osho
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Voici l’histoire savoureuse d’un yogi Dzogchen qui vivait sans ostentation, entouré
cependant de nombreux disciples. Un certain moine, qui avait une très haute idée de
son savoir et de son érudition, était jaloux du yogi qu’il savait être peu cultivé. Il
pensait :
‘’Comment lui, un simple être ordinaire, ose-t-il enseigner ? Comment peut-il avoir la
prétention d’être un maître ? Je vais mettre son savoir à l’épreuve, dévoiler son
imposture et l’humilier devant ses disciples ; alors, ils le quitteront, et c’est moi qu’ils
suivront.’’
Il alla donc rendre visite au yogi et lui dit d’un ton méprisant :
‘’Vous autres, gens du Dzogchen, que savez-vous faire, A PART méditer ?’’
La réponse du yogi le prit complètement par surprise :
‘’Sur quoi pourrait-on bien méditer ?’’
‘’Alors, vous ne méditez même pas !’’, brailla l’érudit, triomphant.
‘’Mais suis-je jamais distrait ?’’ demanda le yogi.
Sogyal Rinpoché
Quand tu t’en vas en gardant au fond du cœur de mauvaises pensées envers une
personne et que le cercle n’est pas fermé, la chose se répétera plus tard dans ta vie et
tu ne souffriras pas une seule fois mais maintes et maintes fois jusqu’à ce que tu aies
appris la leçon.
Il est bon d’observer ce qui se passe, d’apprendre et de s’assagir.
Il est bon de rendre grâce, comme vous dites, de bénir et de partir en paix.
Femme Guérisseuse
C’est vous-même que vous voyez. Qu’est-ce que vous pouvez voir d’autre ? Il n’y a
rien qui soit à l’extérieur. Toute la peine, toute la beauté, c’est vous-même. Quand on
réagit parce que l’on ne supporte pas telle chose, c’est parce qu’on le porte en soimême. Tous les gens qui hurlent parce qu’il y a tel massacre, parce qu’il y a tel
génocide, parce qu’il y a telle violence—c’est qu’ils le portent encore en eux-mêmes,
c’est qu’ils sont encore très violents. Les gens qui ne supportent pas les pervers, c’est
qu’ils le portent en eux-mêmes, c’est qu’ils sont très pervers. A un moment donné, on
se rend compte de cela. Mais on est tout cela ! On est également le pervers, le violent ;
on est également la victime et le bourreau. Il n’y a pas de différence ; tout cela nous le
portons en nous, c’est notre héritage.
Eric Baret
100
Bien souvent, l’on ne sait que faire de sa négativité ou de certaines émotions
perturbatrices. Dans le vaste espace de la méditation, il est possible d’adopter une
attitude tout à fait impartiale envers pensées et émotions. Quand votre attitude
change, c’est l’atmosphère tout entière de votre esprit qui s’en trouve modifiée, y
compris la nature même de vos pensées et de vos émotions. Lorsque vous devenez
plus conciliant, elles le deviennent aussi. Si vous n’avez pas de difficultés avec elles,
elles n’en auront pas davantage avec vous. Quelles que soient les pensées et les
émotions qui se manifestent, laissez-les donc s’élever puis se retirer, telles les vagues
de l’océan. Permettez-leur d’émerger et de s’apaiser, sans contrainte aucune. Ne vous
attachez pas à elles, ne les alimentez pas, ne vous y complaisez pas, n’essayez pas de
les solidifier. Ne poursuivez pas vos pensées, ne les sollicitez pas non plus. Soyez
semblable à l’océan contemplant ses propres vagues ou au ciel observant les nuages
qui le traversent. Vous vous apercevrez vite que les pensées sont comme le vent :
elles viennent puis s’en vont. Le secret n’est pas de ‘’penser’’ aux pensées, mais de les
laisser traverser votre esprit, tout en gardant celui-ci libre de commentaire mental.
Sogyal Rinpoché
Comme les nuages qui voyagent dans le ciel, les fleurs qui s’ouvrent sur la branche
de l’arbre, la rivière qui coule vers l’océan, des pensées vous traversent l’esprit,
s’épanouissent, poursuivent leur route vers une destination inconnue…N’est-ce pas
magnifique ? Ne soyez pas un lutteur, mais un adorateur. Observez les nuances
subtiles de votre esprit, ses brusques changements de cap, ses bonds et ses pirouettes,
ses jeux mentaux, ses rêves, tout ce dont il est capable en matière d’imagination, de
mémoire, de projections. Observez ! Restez à distance, neutre, non impliqué. Votre
attention s’approfondira graduellement et des espaces vides s’insèreront dans le train
de vos pensées. Une parcelle de ciel bleu se manifestera par-ci par-là entre les
nuages. Pour la première fois, vous pressentirez ce que peut être l’état de non mental.
Appelez cela comme vous voulez : la saveur du zen, le tao, le yoga. Les lézardes du
mur laisseront passer un rayon de soleil et le monde se révèlera nimbé de mystère,
parce que vous aurez enlevé vos œillères. Quand votre regard est pur, clair et
pénétrant, l’existence devient transparente comme un diamant. Ces moments
resteront longtemps rares, exceptionnels. Toutefois, le samadhi ne sera plus une
abstraction pour vous. Votre vie sera jonchée de minuscules lacs de silence. Ils
s’évaporeront aussitôt, mais ces incidents vous encourageront : vous saurez que vous
êtes sur la voie.
Chaque fois que vous en aurez le loisir, contentez-vous de prendre conscience des
phénomènes mentaux : regardez la pensée qui surgit, regardez le vide qui suit…Les
nuages sont beaux, le ciel lumineux aussi. Ne choisissez rien, ne demandez rien. Ne
dites pas : ‘’J’aimerais que cela reste vide’’. Ce serait stupide. En condamnant vos
pensées, vous perdriez aussi les intervalles de sérénité, car ils surviennent
uniquement quand vous ne vous trouvez pas en scène, quand vous êtes distant,
neutre et silencieux. Ce sont des événements spontanés qu’il est impossible de
provoquer. Permettez aux pensées d’aller et de venir librement, ne les chassez pas, ne
101
les développez pas, ne les manipulez pas et ne les orientez pas. Les intervalles se
multiplieront progressivement, vous aurez des mini-satoris, parfois des minutes
entières de quiétude, de félicité, de conscience plénière.
Les vides prolongés apporteront une clarté inattendue qui, cette fois, révèlera le
monde intérieur. Avant cela, lors des petits satoris, c’est le monde extérieur que vous
découvrirez sous un jour nouveau : les arbres seront plus verts, l’atmosphère pleine
d’une suavité musicale (la musique des sphères). La présence du divin sera
perceptible et émouvante, ineffable, mystérieuse, quasiment palpable et pourtant
hors d’atteinte. Les grands silences du mental s’accompagneront d’événements
similaires, mais intérieurs. A votre grande surprise, vous rencontrerez le divin en
vous-même. Dieu ne réside pas uniquement dans les choses perçues, il habite aussi
au cœur de l’observateur. Cependant, il faut absolument éviter de vous complaire à
ce niveau et d’y stagner.
L’attachement est en effet l’énergie qui alimente le mental. L’attention neutre, la
conscience détachée est le seul moyen d’arrêter l’agitation mentale sans violence.
Savourez simplement ce qui arrive, mais ne vous accrochez à rien. Les moments
d’extase seront de plus en plus longs. Un jour, vous aurez retrouvé votre trône, vous
serez de nouveau le maître de céans. Vous pourrez, sans difficultés, penser et parler
quand c’est nécessaire et retrouver le silence quand vous le voudrez. Votre mental
sera toujours là, inchangé, mais il ne s’imposera plus à vous. Vous l’utiliserez comme
un outil dont vous disposez, à l’exemple de vos jambes que vous mettez en
mouvement quand vous voulez marcher.
Le non mental n’est pas en opposition avec le mental, il le transcende. L’état
méditatif ne s’obtient pas en détruisant l’intelligence, mais en élargissant la
conscience au point que la pensée séquentielle n’est plus indispensable. Elle est
remplacée par la compréhension.
Osho
Dans l’esprit ordinaire, nous percevons le flot de nos pensées comme une continuité ;
mais en réalité, tel n’est pas le cas. Vous découvrirez par vous-même qu’un intervalle
sépare chaque pensée de la suivante. Quand la pensée précédente est passée et que la
pensée suivante ne s’est pas encore élevée, vous trouverez toujours un espace dans
lequel Rigpa, la nature de l’esprit est révélé.
La tâche de la méditation est donc de permettre aux pensées de ralentir afin que cet
intervalle devienne de plus en plus manifeste.
Sogyal Rinpoché
La non-pensée, comme son nom l’indique, est un arrêt de la pensée, comme une
voiture s’arrête au feu rouge puis redémarre au feu vert. C’est une pause de la
pensée, une interruption de notre monologue intérieur, une solution de continuité de
102
notre conscience ordinaire. Elle survient en général à l’improviste, nous n’y prêtons
guère attention, et si par hasard ou par chance nous nous en rendons compte après
coup, nous interprétons cet instant fugace comme une distraction, une absence, une
rêverie, une sensation bizarre.
Si parfois nous en prenons conscience, c’est toujours a posteriori. Cependant, des
bouddhistes, et des non bouddhistes peuvent interrompre leur pensée
instantanément et revenir ensuite à la pensée discursive, sans avoir besoin de
préparation ni d’échauffement préalable, c’est véritablement un va-et-vient
instantané entre la conscience ordinaire et la non-pensée, plusieurs fois en une
fraction de seconde, ou une seule fois des minutes entières. La pratique de la
méditation, soit dans la posture assise, soit en position debout ou couchée, soit en
marchant, nous aide à acquérir ces réflexes.
La première prise de conscience a posteriori de la survenance de la non-pensée
provoque une interrogation permanente : ‘’Que s’est-il passé ? Suis-je encore
normal ? Ai-je disjoncté ? Etait-ce l’illumination ? Ai-je eu le satori ? Qui peut savoir
ce que j’ai vécu ? Qui veut me croire ? Et puis, zut, zut, et zut, ce n’est qu’une illusion,
une de plus, rien à cirer.’’ On se pose des tas de questions et on se rassure comme on
peut…
Des mois voire des années après la première fois, sans aucun signe annonciateur on
entre en non-pensée, ou plutôt on se rend compte que l’on émerge une nouvelle fois
hors de la non-pensée. Cette fois-ci, on est mieux armé pour essayer de comprendre,
on dispose de quelques outils pour s’en servir comme point de référence dans notre
pratique de la méditation.
Notre personnalité—notre moi, notre ego—s’est désintégrée dans la non-pensée, puis
tout s’est spontanément reconstitué lors de l’émergence de la non-pensée. Nous
sommes sortis du trou avec toutes les anciennes composantes de notre être, mais
avec un changement drastique—la conversion brutale—ou avec des modifications
minimes—l’évolution presque imperceptible—de notre identité et de notre
représentation mentale de la réalité.
La troisième fois nous pose moins de problèmes existentiels, à la quatrième fois les
doutes s’effacent, la confiance en soi se développe, on s’enhardit peut-être même
trop. Puis, on prend très vite la fâcheuse habitude de penser et d’arrêter de penser, ça
devient aussi simple et aussi naturel que de marcher, manger, dormir, respirer.
Nguyen Huu Khoa
Cela arrive chaque jour dans la méditation.
Quelqu’un parvient à un certain espace intérieur et en est transporté, et vient le désir
que cela se répète.
Le lendemain ce n’est pas là et il se sent très frustré.
Le jour suivant, il est encore plus déprimé, car cela ne revient toujours pas. Et il vient
vers moi et me dit : ‘’C’était mieux auparavant. Au moins je n’avais pas connu cela.
Mais maintenant que je le connais, c’est là et je souffre. Pourquoi ne puis-je pas le
retrouver ?’’
103
Vous ne pouvez le retrouver, car c’est dans la nature même de Dieu de se révéler de
façon inattendue. C’est un hôte qui arrive sans prévenir…
Dieu est un hôte. Lorsqu’Il vient, soyez reconnaissant. Lorsqu’Il ne vient pas, soyez
reconnaissant. Cela doit être pour votre bien qu’Il n’est pas là aujourd’hui, car vous
avez besoin d’espace, vous avez besoin d’un palier…afin que les choses qui sont
arrivées hier puissent se stabiliser…
L’être appartient au présent. Et lorsque vous voulez répéter quelque chose, c’est que
vous désirez simplement répéter le passé. A quoi bon ? Vous l’avez connu. Ne
désirez-vous pas connaître quelque chose de plus élevé, de plus vaste ? Restez
disponible. C’est l’un de mes enseignements fondamentaux : Ne désirez pas, restez
disponible. Comptez sur Dieu et laissez-Le agir.
Osho
N’oublions pas qu’une expérience d’éveil ne donne pas encore un être éveillé. La
porte est ouverte vers le mystère que vous êtes en vous-même, vous êtes sur le
chemin initiatique, c’est un commencement, non une fin.
Karlfried Graf Dürckheim
Il y a aussi les instants de bonheur bouleversant, ce bonheur, qui, par sa qualité
infinie, par la plénitude de l’Etre qui nous touche ainsi, est tout autre chose qu’une
joie naturelle, même ‘’au superlatif’’. Mais, ce n’est pas seulement lors des moments
inoubliables, radieux et bouleversants des purs sommets de l’existence que se révèle
l’Etre, Source qui nous fait vivre. Il y a également des instants et des heures, moins
spectaculaires, qui nous trouvent plongés tout à coup dans un état particulier dans
lequel l’Etre nous touche, même si nous l’ignorons. Nous nous sentons soudain dans
une ambiance étrange. Nous sommes entièrement ‘’présents’’, totalement ‘’là’’, et
malgré tout, nullement orientés vers quoi que ce soit de précis. Nous nous sentons
alors d’une façon toute particulière, comme sans aspérités, lisses et harmonieux à
l’intérieur de nous-mêmes, et tout à la fois, ‘’ouverts’’. Grâce à cette ouverture, une
plénitude profonde émerge. Nous avons l’impression de ‘’planer’’ et pourtant, nous
nous mouvons de façon équilibrée et assurée, sur la terre. Nous sommes à la fois
absents et pleinement présents, débordants de vie. Nous nous reposons en nousmêmes et nous découvrons cependant une affinité tout intérieure avec tout ce qui
nous entoure. Nous sommes liés à tout, mais détachés de tout. Nous nous sentons
incroyablement guidés et pourtant libres et affranchis de toute obligation, pauvres
dans le monde mais comblés de richesse et de puissance intérieures. Dans de tels
moments, nous sommes traversés par quelque chose de précieux et de très fragile.
C’est pour cette raison que nous nous mouvons alors, instinctivement, avec
circonspection, en prenant garde de ne pas nous arrêter pour regarder de trop près ce
qui se passe en nous. Une sagesse du fond des âges nous souffle que le clair-obscur
104
d’une conscience éveillée est bien préférable au froid faisceau lumineux d’une
conscience qui fixe et gèle tout ce qui est vivant. C’est comme si nous entendions une
voix murmurer : ‘’voir comme si on ne voyait pas, écouter comme si on n’écoutait
pas, sentir comme si on ne sentait pas’’. Pourtant le merveilleux se dissout ! D’un seul
coup, il s’est évaporé. Il suffit que nous nous demandions, en pleine perplexité :
qu’est-ce ?, pour que tout disparaisse. Un rien qui nous parvient du dehors ou du
dedans, et qui nous incite à fixer l’attention, change complètement notre conscience.
A l’instant encore, semblable à une coupe largement ouverte recueillant sans
questionner ni définir, elle devient tout à coup un faisceau de froide lumière qui,
pointu comme une flèche, ramène ce qui vient d’être vécu à quelque chose de précis :
et voilà le monde, tout à l’heure enchanteur et curieusement ‘’entre-tissé’’ avec nous,
qui retombe dans l’organisation coutumière. Oh, combien appauvris, une nouvelle
fois contraints de ne nous appuyer que sur nous-mêmes, nous retrouvons-nous, face
au vieux monde…
Ce que nous ressentions se dissipe comme un rêve, et, pourtant, ce n’était pas un
rêve. C’était la preuve de la vraie, de la pure Réalité qui a pu se manifester par
instant à nous, parce que, disponibles, nous étions libres des entraves que notre
conscience habituelle nous dresse. Dans de telles expériences, nous dépassons notre
conscience coutumière et notre entendement réalise ce qui est de nature
transcendante. Quelle que soit la durée de cette expérience—peut-être se passe-t-elle
en une fraction de seconde—elle transforme, avec une évidence indiscutable, la vie
en une prise de conscience qui dépasse et déborde notre conscience existentielle et
habituelle du ‘’moi’’. C’est la Vie à laquelle nous appartenons par notre Etre essentiel,
Vie que nous sommes en tant qu’Etre réel, et que notre plus profonde aspiration tend
continuellement à manifester. Pour reconnaître comme réalité ce qui émerge par cette
prise de conscience de l’être, il n’est pas besoin d’autre chose que de cette ‘’vacuité
sacrée’’, de ce réalisme empirique. Il s’agit d’un ‘’réalisme transcendantal’’ qui ne se
prête guère à l’obscurcissement ou à la dégradation par nos notions et nos concepts
rationnels. C’est lui qui, au contraire, reconnaît, accepte et goûte la ‘’qualité’’ unique
que l’on ne peut insérer nulle part dans ce qui a été vécu, qui maintient précisément
la qualité de l’ ‘’inconcevable’’ et y pressent la seule vérité.
Exercer et saisir ce ‘’réalisme transcendantal’’ avec une grande vigilance et une
disponibilité de tous les instants, être secrètement et en permanence réceptif à l’
Etre qui nous visite à travers tout ce que nous rencontrons, ce qu’Il nous donne, c’est
cela la pratique avec laquelle nous devons commencer et aussi terminer la journée.
‘’Apprendre à vivre le jour jusqu’à son déclin comme un morceau de l’Eternité’’, dit
le poète.
Il nous faut une ‘’culture de l’expérience intérieure’’ qui ne se contente pas
d’exercices particuliers, mais qui rende véridique le vieux dicton : ‘’Chaque instant
est la meilleure des occasions.’’ Tout devient l’occasion de la pratique du chemin
intérieur sur lequel en parfaite résonance avec notre Etre authentique et avec l’Etre,
nous nous transformons progressivement en une Personne qui, par sa perméabilité à
l’Etre, rend possible l’accomplissement de notre vocation.
Karlfried Graf Dürckheim
105
La ‘’Grande Expérience’’ est précédée de toutes les ‘’petites expériences’’ de l’ETRE.
Elles sont autant de lumières sur le chemin. Une lueur de ce que la ‘’Grande
Expérience’’ nous réserve peut être perçue dans chaque exercice du silence, dans
chaque véritable méditation où nous lâchons vraiment le ‘’moi’’ existentiel. Une
étincelle de la lumière qui jaillit dans la ‘’Grande expérience’’ peut-être perçue dans
chaque situation de la vie, lorsque nous nous donnons vraiment, lorsque nous osons
abandonner le ‘’moi’’ et ses préjugés, ses garde-fous, ses réticences, lorsque nous
avons le courage de le laisser s’écrouler, aussi douloureux que ce soit.
Plus la grande formule de la métamorphose se réalise dans l’homme, plus il a appris
à ‘’se lâcher’’, à admettre son ombre, plus il appris à s’abandonner, et plus les lueurs
de la ‘’Grande Expérience’’ deviennent fréquentes, ces lueurs qui réchauffent,
éclairent et dissolvent pour devenir, finalement, la composante fondamentale du
rythme de notre vie. Cela se passe d’autant plus tôt que l’homme possède davantage
le courage d’admettre ‘’les impulsions pures, celles qui ont échappé à l’échafaudage
du ‘’moi’’. Grâce à un nouvel état psychique—à condition qu’il soit durable—une
façon nouvelle ‘’d’être là’’ se développe. Elle n’a pas son centre actif dans le monde,
mais dans l’ETRE ; pas dans le ‘’moi’’, avec tous ses garde-fous mais dans l’Etre
authentique avec sa puissance métamorphosante. Et cela conduit à l’établissement
d’une nouvelle conscience.
La conscience du ‘’moi’’ se forme en fonction de l’objet ; elle se forme dans la
distinction, l’organisation, la pensée par opposition. La conscience supérieure,
centrée dans l’Etre authentique, se développe grâce à une force qui admet l’ombre,
les abîmes, les contradictions de l’existence, grâce à une force dont la croissance
permet la réalisation de la ‘’forme’’ qui corresponde à notre image.
Karlfried Graf Dürckheim
Les premières rencontres avec l’ETRE ébranlent l’échafaudage de notre coquille
existentielle à laquelle nous sommes habitués. Elles ont lieu beaucoup plus tôt qu’on
ne le suppose. Les premières expériences du passage d’un palier de conscience à un
autre (par exemple le moment de la rupture de l’unité originelle et la découverte du
‘’moi’’ et du monde qui est là, devant nous) remontent à la petite enfance. L’enfant
ne comprend pas, certes, le sens de cette extraordinaire expérience. Dès que l’adulte,
en faisant une expérience semblable, éprouve le ‘’besoin de comprendre’’, cela lui est
néfaste.
Tant que règne le ‘’moi’’, tout ce qui se révèle dans une prise de conscience de l’ETRE
est transformé tout aussitôt en ‘’quelque chose’’, et ce ‘’quelque chose’’ est privé de
vie. C’est pourquoi, lorsque l’homme rencontre le Divin, il risque de perdre, au
moment même de la rencontre, ce qu’il cherche depuis longtemps au fond de luimême, et cela, à cause de ce besoin de ‘’classer’’, de ‘’nommer’’. L’homme se prive du
fruit d’une révélation dont il est, par grâce, le bénéficiaire, s’il disperse le contenu—
ce contenu qui lui paraît inquiétant puisque incompréhensible—en voulant
l’expliquer au moyen des images, des concepts dont il a l’habitude. En voulant
‘’classer’’, il dénature ce qu’il vient de saisir, et il perd ce qu’il vient de vivre.
106
Admettre le ‘’fond’’, cela suppose le courage de l’inhabituel, le renoncement au
‘’classement’’, la possibilité de supporter de ne pas ‘’comprendre’’ ; autrement dit,
cela suppose la possibilité de se tenir sous le rayonnement inouï et inaccoutumé, de
l’ETRE, et d’y rester.
Karlfried Graf Dürckheim
On est toujours en chemin, toujours plus ou moins prêt à vivre telle ou telle
expérience, de manière que la vie ne dépende plus du respect d’un système de
croyances et de valeurs transmises de l’extérieur, mais au contraire de l’expérience de
cette autre dimension, en développant notre faculté d’EPROUVER cette réalité
surnaturelle et en trouvant un mode d’être qui même dans le monde soit en accord
avec cette réalité.
Karlfried Graf Dürckheim
Ainsi est-il naturel, lorsque votre esprit commence à s’ouvrir, que toutes sortes
d’expériences puissent s’y produire. Peut-être connaîtrez-vous des états de félicité, de
clarté ou d’absence de pensées. D’une certaine façon, ce sont là d’excellentes
expériences et le signe que votre méditation progresse : quand vous ressentez la
félicité, c’est signe que le désir s’est provisoirement évanoui ; quand vous ressentez
une réelle clarté, c’est signe que l’agressivité a momentanément cessé ; et quand vous
faites l’expérience d’un état sans pensée, c’est signe que votre ignorance a
temporairement disparu. Ce sont de bonnes expériences en soi, mais si l’attachement
s’en mêle, elles se transforment en obstacles. Les expériences ne sont pas en ellesmêmes la réalisation. Cependant, si nous ne nous attachons pas à elles, elles
deviennent ce qu’elles sont en réalité : des matières premières pour la réalisation.
Sogyal Rinpoché
Dans la méditation comme dans la vie, il nous faut apprendre à demeurer libres de
l’attachement aux bonnes expériences, et de l’aversion envers les mauvaises.
Sogyal Rinpoché
Si le démon vient, donnez-lui cent coups de bâton ;
Si le Bouddha vient, cent coups de bâton.
Koan zen
107
Décampez, décampez, séraphins, vous ne pouvez me désaltérer.
Décampez, décampez, saints, et ce qui attire vers vous le regard.
Je ne veux pas ici de vous : seul m’importe de m’abîmer dans l’océan incréé de la nue
Déité.
Angelus Silesius
Nous sentons toujours cet Etre—ou la vie supérieure—selon trois modes
particuliers : tout d’abord, une PLENITUDE, qui ne doit pas être confondue avec la
multiplicité ; ensuite un ORDRE mystérieux, qui confère une forme et un sens
différents du sens rationnel ; enfin une UNITE, englobant et protégeant l’homme qui
en prend conscience.
Ces trois dimensions—la plénitude, l’ordre et l’unité—sont les aspects de l’Etre que
l’homme, longtemps après les avoir perdus, retrouve soudain dans une expérience
bouleversante. Elles apparaissent à la conscience comme une FORCE, un SENS et un
AMOUR, qui correspondent aux attributs qu’il accorde aux dieux. La puissance, la
sagesse, la bonté des dieux, sont dans toutes les religions supérieures le reflet d’une
projection de l’homme sur un Etre surnaturel, dont il peut faire l’expérience en des
instants essentiels après avoir percé les différentes couches de son être adulte pour
retrouver le sentiment de cet Etre, qui l’intégrait et l’abritait pendant son enfance.
Karlfried Graf Dürckheim
Ceux qui recherchent des expériences extraordinaires font eux aussi fausse route.
L’expérience du contact avec l’autre dimension peut être extraordinaire mais aussi
effrayante, car on touche alors à des profondeurs inconnues. Cependant l’important
N’EST PAS L’EXPERIENCE, mais la TRANSFORMATION qui nous permet de
laisser agir en nous de plus en plus librement cette autre dimension.
Karlfried Graf Dürckheim
S’il vous arrive de voir, d’entendre ou d’expérimenter quelque chose d’extraordinaire
quand vous méditez, n’essayez pas d’interpréter, contentez-vous d’observer ce qui se
passe. Les expériences surviennent lorsque votre mental est calme et tranquille. Elles
sont là pour changer quelque chose en vous. Ne faites rien ; elles seront intégrées par
votre être intérieur. N’essayez pas de les interpréter ; ne laissez pas votre mental se
mêler de leur travail.
Chandra Swami
108
Ramakrishna pensait depuis quelque temps d’une manière intense à Jésus, lorsque,
se promenant sous le Panchavati, il vit s’approcher de lui un personnage
extraordinaire et rayonnant de sérénité qui le regardait dans les yeux. Il avait l’air
d’un étranger : ses yeux étaient beaux et grands, son nez un peu long. Sri
Ramakrishna se demandait, tout en le contemplant, qui il pouvait bien être quand, au
plus profond de lui-même, il entendit une voix :
‘’Celui-ci est le Christ qui répandit son sang pour la rédemption du monde et souffrit
l’agonie pour l’humanité. Il est Jésus, l’incarnation de l’Amour.’’
Ramakrishna perdant conscience fondit dans cette forme divine. Comme l’expérience
de Saul, qui n’avait lui aussi ni communié ni accepté aucun credo, ni croyance, ce fut
là un contact réel avec le Seigneur. La grâce de Jésus seule fut suffisante et c’est elle
qui réalisa dans l’âme du futur apôtre cet épanouissement de conscience qui devait le
transformer en disciple fervent de persécuteur qu’il était. Le critère d’objectivité de
ces expériences mystiques réside dans les transformations qu’elles opèrent. Ceux qui
reçoivent la grâce d’entrer en contact avec Jésus, Rama, Krishna ou Bouddha ont,
jusque dans les plus profondes assises de l’âme, leur vie changée.
‘’En vérité, il est béni pour toute son existence celui qui a reçu un regard d’amour du
divin’’, disait Sri Ramakrishna.
Swami Siddheswarananda
Ramakrishna raconte avec humour un incident de la vie de ce grand ascète
védantique qu’était Tota Puri.
Tota Puri méditait un jour lorsqu’un deva se présenta devant lui. Sans accuser le
moindre trouble, Tota Puri poursuivit sa méditation. Un peu froissé par cette attitude
impassible, le nouveau venu demanda : ‘’Ne savez-vous pas qui je suis ?’’, et Tota
Puri de répondre : ‘’Qui êtes-vous ? – Je suis un esprit divin, un deva. – Vous êtes
donc une forme de Mâyâ, conclut calmement Tota Puri. L’Atman est égal en nous.’’
En entendant ces mots l’esprit s’évanouit.
Swami Siddheswarananda
Retirez-vous archanges, vous me faites de l’ombre…
Père Decaussade
Avoir la vision de quelqu’un ou l’entendre s’adresser à vous peut très bien devenir
une source d’autosatisfaction ou de plaisir égoïste. Il n’est pas souhaitable de perdre
le contrôle de soi-même. Celui qui cherche la Vérité ne doit pas se laisser dominer
par quoi que ce soit ; il doit surveiller attentivement tout phénomène qui peut se
produire, rester pleinement conscient, toujours en éveil, en fait rester totalement
109
maître de soi. Une perte de conscience ou de maîtrise de soi n’est jamais une bonne
chose.
Mâ Ananda Moyî
La vision de dieux ou de déesses apparaît conformément aux dispositions que l’on a
héritées (samskaras).
Mâ Ananda Moyî
Miracles ? Prodiges ? Clairvoyance ? Clairaudience ?
Quel intérêt ?
Le plus grand des miracles, c’est de réaliser le Soi.
Toutes ces choses ne sont que des impasses. L’homme réalisé les transcende.
Leadbeater relate des centaines de vies antérieures perçues par clairvoyance. A quoi
cela sert-il ? Cela l’aide-t-il, lui ou d’autres, à connaître le Soi ? Que sont ces vies,
sinon la naissance de corps physiques ? La véritable naissance se fait au sein du Soi.
Vous pourriez être actuellement en Angleterre (sur le plan astral), mais à quoi cela
vous avancerait-il ? Vous n’auriez pas pour autant progressé d’un pouce vers la
Réalisation. Les visions et les sons qui peuvent se manifester au cours de la
méditation doivent être considérés comme des distractions et des tentations.
Jamais l’aspirant ne doit s’y laisser prendre.
Ramana Maharshi
En entendant quelqu’un lui parler de ses expériences yoguiques (visions de lumières,
sons de cloches, etc.), Maharshi dit qu’elles disparaîtraient comme elles sont venues.
‘’Conservez la position de témoin. J’ai eu moi-même des milliers d’expériences
similaires, mais je n’avais personne pour me les expliquer.’’
Ramana Maharshi, cité par Paul Brunton
Il eut des visions du Christ, du Seigneur Rama pendant son exil en forêt, de Swami
Ram Teerth, de Swami Vivekananda, de Mère Durga chevauchant le lion, et du
Seigneur Shiva.
Il eut également la vision de Hermès Trismégiste d’Egypte (dont Swamiji put décrire
l’étonnante coiffe alors qu’il n’avait jamais vu de pharaon égyptien). Il eut des visions
de quelques êtres réalisés qui lui étaient totalement inconnus. Ces visions se
110
produisaient spontanément, et Swamiji ne médita jamais sur l’un ou l’autre de ces
saints ou dieux pendant sa pratique. La nuit, il lui arrivait souvent d’avoir la vision
d’une lumière radieuse qui resplendissait dans sa chambre d’un éclat d’or. Cette
vision ne durait que quelques secondes. Plus tard, il dépassa tous ces plans, et les
visions s’arrêtèrent. Elles furent remplacées par une joie profonde qui ne fit
qu’augmenter avec le temps. Sa conscience s’éleva vers des niveaux de plus en plus
élevés.
Il avait enfin réalisé l’Atman éternel et immuable comme étant sa nature essentielle et
son Etre véritable.
Extrait de la biographie de Chandra Swami
Pour celui qui est plongé dans la méditation, qu’il soit conscient de son corps ou non,
qu’il ait ou non un sentiment d’identification avec son corps physique et quelles que
soient les circonstances, il faut absolument qu’il reste bien éveillé et qu’il évite
rigoureusement de tomber dans l’inconscience. Que l’on contemple le Soi comme tel
ou bien une forme particulière, il faut rester ouvert à des perceptions authentiques.
Quelle est l’issue d’une telle méditation ? Elle ouvre l’être à la Lumière, à ce qui est
éternel. Supposez que le corps ait souffert de quelques douleurs ou courbatures, et
voilà qu’après la méditation, il se sent parfaitement frais et dispos, sans trace de
fatigue ni de faiblesse. C’est comme si un long laps de temps s’était écoulé ou comme
s’il n’avait jamais été question de troubles d’aucune sorte. Ce serait un bon signe. Par
contre, être tenté de se laisser submerger par le premier contact avec la Béatitude et
déclarer ensuite : ‘’Où j’étais, je ne puis le dire, je l’ignore’’, cela n’est pas souhaitable.
Dans la mesure où il entre un contact avec la Réalité, celui qui devient capable de
méditation réelle découvre la joie ineffable que recèlent même tous les objets
extérieurs. En revanche, pour celui qui au cours d’une méditation perd la notion de
ce qu’il est, se laisse glisser dans une sorte d’hébétude et prétend ensuite avoir
plongé dans une béatitude intense, cette sorte de béatitude constitue un obstacle. Si la
force vitale semble être restée à l’état latent—de même que chez celui qui sort d’un
profond sommeil et en éprouve un sentiment de grande joie—cela indique une
stagnation. C’est un signe d’attachement, et cet attachement est un obstacle sur le
chemin de la vraie méditation puisque l’on est susceptible de retomber fréquemment
dans ce même état, bien que, du point de vue du monde, qui est tout autre, cela
semblerait une source de joie intérieure profonde et donc une indication certaine de
progrès spirituel.
Mâ Ananda Moyî
L’ultime obstacle à la méditation, c’est l’extase.
Quand vous éprouvez une grande félicité, vous ne voulez plus sortir de cet état.
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Ne cédez pas à cette tentation, passez au niveau de la paix profonde. Cette paix est
supérieure à l’extase et aboutit au samadhi. Le samadhi produit un état de veille où
vous n’êtes plus que conscience, car la conscience est votre nature véritable.
Ramana Maharshi
L’état naturel est l’état originel.
L’extase implique l’existence d’un mental très subtil.
Qu’éprouvez-vous pendant le sommeil ? Ni extase, ni douleur ; vous êtes au-delà des
deux. L’état naturel (sahaja), c’est précisément cela, avec en plus la conscience d’être.
Ramana Maharshi
On se méprend souvent sur la nature du samadhi. Ramana racontait cette histoire
d’un yogi qui passa des centaines d’années en état de transe au bord du Gange.
Lorsqu’il revint à la conscience normale, il pensa aussitôt au verre d’eau qu’il avait
demandé avant d’entrer dans cet état. Ses pensées avaient repris leur cours habituel.
Cet état de transe n’avait servi à rien.
En réalité, disait le Maharshi, il s’agit de devenir PLEINEMENT CONSCIENT : être
conscient de ce qui nous entoure, vivre au contact des autres, sans toutefois
s’identifier à cet environnement ; il faut conserver vis à vis de lui la position de
témoin. C’est l’état le plus élevé, alors que l’état de transe ne fait que stopper le
mental. Celui-ci doit être totalement annihilé et non pas simplement immobilisé.
Paul Brunton
Qu’aucune activité mentale ne vienne troubler votre méditation. Il faut poursuivre
ces pratiques tant que l’ego ou la possessivité n’ont pas complètement disparu, c’està-dire jusqu’au moment où vous pourrez à volonté et sans effort particulier garder le
mental vide et inactif.
Ramana Maharshi
Ne fais rien avec le mental
Mais demeure dans ton état naturel et authentique.
Ton propre esprit, sans ondoiement, est la Réalité.
La clé est cette présence dépourvue d’ondulation.
Fais l’expérience de cette grande réalité sans extrêmes.
112
Dans un océan transparent,
Les bulles émergent et se dissolvent.
Ainsi, les pensées ne sont pas différentes de l’ultime Réalité.
Il n’y a pas de faute, demeure détendu.
Tout ce qui surgit, tout ce qui arrive
Dans la non saisie se libère sur-le-champ.
Les apparences, les sons et les objets sont ton propre esprit.
Rien que l’esprit.
L’esprit est au-delà de la naissance et de la mort,
La nature de l’esprit est la présence.
Elle utilise les objets des cinq sens
Sans s’aventurer hors de la réalité.
Dans cet état d’équilibre cosmique,
Il n’est rien à abandonner, rien à pratiquer,
Pas de méditation ou de post-méditation
Nigouma
Sois sans distraction et ne médite pas.
Pratiquer ainsi est la chose la plus adroite.
Lorsque les myriades d’expériences ne laissent plus aucune trace, quelle grandeur !
Pratiquer ainsi, c’est la libération.
Kye Ho ! Merveilleux.
La grande fraîcheur de l’attention est la voie suprême.
Nul besoin de se déplacer, c’est le terrain de l’ainsité.
Nul besoin de pratiquer, tout s’accomplit sans effort.
Ah ! Ceux qui pratiquent ce yoga sont fortunés !
La ‘’dakini qui ressuscite les corps’’
Un jour on parla à Ramana d’un grand pratiquant qui passait chaque jour huit à dix
heures à méditer. Le Maharshi remarqua : ‘’Oh ! IL médite ! IL mange. IL dort. QUI
médite ? QUI mange ? QUI dort ? Quel avantage y a-t-il à méditer dix heures par jour
si cela ne sert finalement qu’à vous ancrer un peu plus dans la conviction que VOUS
méditez ?
Ne médite pas : sois.
Ne pense pas que tu es : sois.
Ne t’affaire pas à être : sois.’’
Ramana Maharshi, cité par David Godman
113
Il existe beaucoup de cas où Baba est apparu et a appliqué de la Vibhuthi sur le front
d’une personne endormie ou d’un patient inconscient, la marque étant vue au réveil.
Ou, comme l’écrit Swami Abhedananda (âgé de 75 ans), l’apparition peut
transmettre un message.
‘’Le 28 décembre, aux petites heures, il était environ quatre heures du matin, alors
que j’étais encore au lit en train de ressasser mélancoliquement l’état perturbé de mes
affaires, j’ai senti un coup soudain sur la tête, fort, mais supportable. Je me suis levé
et j’ai allumé la lumière. A ma surprise, j’observai une forme étincelante de Bhagavan
Ramana Maharshi qui se transforma en Bhagavan Sri Sathya Sai Baba—apparaissant
d’abord séparément pendant un instant pour fusionner ensuite dans une colonne de
lumière éblouissante qui se maintint pendant quelques secondes. Je sentis que je
recevais la vision de mes deux bienveillants gurus ! Dans cet état d’esprit
bienheureux, j’entendis une voix (qui m’était alors étrangère mais que j’identifiai
plus tard comme la voix authentique de Bhagavan Sri Sathya Sai Baba) qui me parlait
en télougou : ‘’Ne t’agite pas, ne médite pas ! Observe seulement ton mental, cela le
fera disparaître. Observe ! Et sache que celui qui observe est Pure Conscience. La
Conscience abstraite et absolue est le Soi, Sat-Chit-Ananda. Tu es Cela. C’est la Paix
sans autre condition. C’est ce que tu recherches ardemment. Sois ferme. Tu es toimême béatitude ; tu le sais par intuition. Le coup que je t’ai donné, c’était pour te
révéler ce secret : Observe !’’
N. Kasturi, citant Sathya Sai Baba
Question posée à Osho :
‘’Comment l’observation peut-elle aboutir au non mental ? Je parviens de mieux en
mieux à être attentif à mes vécus corporels, à mes pensées et sentiments, et c’est
magnifique. Mais les intervalles de silence sont très rares. Quand je vous entends dire
que méditer signifie être le témoin, il me semble que je comprends. Par contre, je
saisis mal ce que vous appelez le non mental. Pouvez-vous m’éclairer ?’’
Réponse :
‘’Le voyage intérieur est long. L’état de témoin est le début, le non mental est
l’accomplissement. L’observation est en fait la méthode qui vous guidera vers votre
centre réel. Etre vigilant n’est pas très difficile, mais il ne s’agit encore que des
semailles. Ensuite viendra une période d’attente où il faudra être patient et confiant.
Vous pouvez labourer et semer, la germination et la floraison par contre ne
dépendent pas de vous. Le printemps viendra spontanément à son heure.
Le non mental vous est déjà révélé sporadiquement. Ne vous découragez pas et
retenez ceci. Ce qui peut durer une fraction de seconde peut exister éternellement,
parce que vous ne vivez qu’un moment à la fois. Deux instants ne surviennent jamais
ensemble. Si vous parvenez à vous libérer de l’emprise du mental pendant une seule
seconde, vous avez découvert le secret. Plus rien ne devrait empêcher votre
114
transmutation. L’instant suivant se manifestera, seul lui aussi et riche des mêmes
potentialités. Celui qui a trouvé la clé peut transformer tous les instants successifs en
lumière. Le ciel pur sans nuage est le stade final : les pensées seront définitivement
balayées du centre silencieux de votre conscience. En attendant, les parcelles de
vérité qui vous sont données indiquent que vous vous dirigez vers votre nature
profonde et que vous ne vous trompez pas de route.
Ne soyez pas pressé. L’existence dévoile ses mystères au cœur infiniment patient.
Quand votre conscience sera établie dans l’univers du silence, plus rien ne pourra
l’en exiler, car nul pouvoir ne surpasse celui du non mental.
Vous serez invulnérable, aucune forme n’obscurcira encore votre nature, ni l’avidité
ni la jalousie ni la colère ni l’attachement…Le non mental est absolument pur et sans
ombre.
Vous me demandez comment l’observation peut aboutir au non mental. Il faut
d’abord comprendre certains faits.
Les pensées n’ont aucune existence propre. Ce sont des parasites que vous entretenez
en vous identifiant à eux. Quand vous dites : ‘’’Je suis en colère’’, vous endossez le
phénomène colère et lui insufflez votre propre énergie vitale. Par contre, si vous vous
contentez de regarder ce qui se passe comme un spectacle se déroulant sur l’écran de
votre mental, vous ne fournirez plus aucune énergie. Dès que vous cessez de vous
identifier aux mouvements cérébraux, leur indigence apparaît très nettement. La
colère s’anémie et ne peut ni vous manipuler ni vous affecter. Elle est creuse,
inconsistante. Elle passe comme un nuage dans le ciel et laisse votre conscience
inaltérée, vide.
Continuez d’observer, vous échapperez graduellement à l’emprise de vos pensées,
de vos émotions et sentiments. Gurdjieff parlait de ‘’non identification’’, car le silence
du non mental survient quand vous renoncez à vous assimiler à votre
fonctionnement cérébral. Assistez en spectateur au processus d’idéation, restez à
l’écart, indifférent comme si vos pensées appartenaient à quelqu’un d’autre. Les
connexions seront coupées entre les remous périphériques et votre nature consciente.
C’est cela, être le témoin.
L’identification abolit la distance dont vous avez besoin pour pouvoir observer. Si
vous rapprochez trop le miroir de votre visage, voir votre reflet devient impossible.
Quand vous permettez aux pensées d’envahir votre conscience, elles vous aveuglent,
vous influencent et vous imprègnent. La colère vous met en colère, l’avidité vous
rend avide, la pulsion génitale vous rend lascif parce que vous vous placez au centre
de ces événements et ne ménagez aucune distance. En vous assimilant à ces
fluctuations, vous imaginez qu’elles sont vous.
La vigilance met fin à cette erreur en vous écartant de la périphérie, en vous
réinstallant dans votre centre. Plus vous observerez, plus vous vous éloignerez de
vos pensées. Elles ne pourront plus drainer votre énergie. Comme vous êtes leur seul
moyen de subsistance, elles s’évanouiront et leur extinction sera marquée par
l‘apparition des premières lueurs du non mental, de conscience pure.
‘’Je parviens de mieux en mieux à être attentif à mes vécus corporels, à mes pensées
et sentiments, et c’est magnifique’’.
115
Ce n’est qu’un premier pas et c’est déjà si beau. Découvrir la bonne voie procure une
joie intense et gratuite, avant même que vous ne vous mettiez en marche. Cette
félicité se déploiera, s’enrichira de mille nuances à mesure que vous progresserez.
‘’Mais les intervalles de silence mental sont très rares’’.
Ne vous plaignez pas, la majorité des gens n’ont jamais rien vécu de tel. Les pensées
se succèdent sans arrêt dans leur tête, jour et nuit. Leurs rêves sont encore des idées
exprimées sous forme d’images puisqu’un mental endormi est analphabète.
Ce que vous ressentez montre que vous êtes sur la bonne voie. C’est important, car le
chercheur de vérité ne dispose d’aucune garantie, il se pose nécessairement des
questions sur la légitimité de son choix. Le critère de la bonne méthode est qu’elle
exalte votre joie, votre sensibilité, la vivacité de votre intelligence. Ce qui vous rend
plus triste, terne et hargneux, plus égoïste, envieux et lascif est une impasse.
En gravissant les échelons, vous ferez des expériences dont les senteurs et les
couleurs seront incomparablement plus sublimes que tout ce que le monde ordinaire
peut offrir. Les épisodes de silence se prolongeront. Un jour, vous pourrez demeurer
centré dans le vide extatique de votre nature pendant plus de vingt-quatre heures
d’affilée, vous serez rentré chez vous. Cela ne signifie pas que vous aurez perdu la
faculté de penser. Les sots qui ont prétendu cela ignoraient tout du non mental. Vous
pourrez utiliser votre intellect à volonté, c’est lui qui ne pourra plus vous régenter.
Votre raison ne sera pas détruite, elle aura regagné la place qui est la sienne. Pour le
moment votre mental est le maître, vous êtes le serviteur, les rôles sont inversés. Les
pensées vous occupent jour et nuit, vous vivez dans votre boite crânienne, vous êtes
piégé, vaincu.
Comme maître, le mental est désastreux et absolument destructeur. Comme
instrument de communication avec le monde extérieur, il est précieux. Le repos que
lui vaudront ces intervalles de silence lui procurera une fraîcheur et une sensibilité
dont vous n’avez pas la moindre notion. A partir de trois ou quatre ans, l’immense
majorité des êtres n’appréhendent plus l’existence qu’au travers du mental et cela
continue jusqu’à la mort. Leur intelligence est épaisse et obscure, ils sont épuisés,
écrasés sous un monceau d’inepties, robotisés. Or la liberté et la créativité sont les
expériences les plus merveilleuses que puisse connaître l’être humain.
Le mental de l’homme éveillé est au repos comme un immense réservoir, plein
d’énergie et de sensibilité, prêt à agir quand cela s’avérera nécessaire. Ce n’est pas un
hasard si les paroles d’un tel être exercent un pouvoir magique. Elles ont un
charisme, un magnétisme, une fraîcheur et une spontanéité inégalée. L’intellect
méditatif est l’instrument le plus évolué que la nature ait mis à la disposition de
l’expression de la créativité.
L’homme centré dans le non mental transforme sans effort la prose en poésie et ses
paroles ont une telle autorité qu’aucune argumentation n’est nécessaire. La voix du
maître a le ton de la vérité évidente, il ne recourt ni aux raisonnements ni aux
démonstrations et ne se réfère à aucun texte sacré. Son discours est empreint d’une
certitude intrinsèque. Si vous êtes prêt à écouter et à recevoir, cette vérité résonnera
dans votre cœur.
‘’Quand je vous entends dire que méditer signifie être le témoin, il me semble que je
comprends. Par contre, je saisis mal ce que vous appelez le non mental’’.
116
Cela se clarifiera progressivement. La méditation vous a déjà permis d’appréhender
certaines choses. Continuez, ne vous inquiétez pas, vous aboutirez au non mental
aussi sûrement et naturellement que la rivière coule vers l’océan. A sa source, dans
l’Himalaya, le Gange ignore tout de l’océan. Pourtant, il coule vers lui sans la
moindre hésitation. On peut aussi prendre une autre image, celle du chemin qui
serpente vers le sommet de la montagne. L’océan et le pic sont des symboles du non
mental. Non mental est un terme simple. Je le préfère aux expressions plus sublimes
d’illumination, de libération, d’éveil, de dénouement de tous les liens, d’expérience
de l’immortalité, qui risquent de vous dérouter. Vous savez ce qu’est le mental, vous
pouvez dont entrevoir un état où le mental se tait.
Quand votre esprit ne fonctionne pas, il fusionne avec l’intelligence cosmique, il fond
dans la conscience universelle. Le mental de l’homme qui est centré dans l’Un
devient un serviteur magnifique. Il a reconnu son maître et apporte des nouvelles de
l’intelligence universelle à ceux qui sont toujours enchaînés à leur esprit personnel.
Quand je parle, l’univers m’utilise. Les paroles que je prononce ne m’appartiennent
pas. Elles émanent de la vérité universelle et c’est cela qui leur confère un charisme,
un pouvoir magique.
Osho
Après l’éveil on découvre avec émerveillement un nouveau paysage où rien n’est
soumis au temps.
C’est comme de s’éveiller après un mauvais rêve et de constater que cette limite était
artificiellement imposée à la Conscience. On a envie de rire, de crier : ‘’Quelle
supercherie !’’ On a envie de courir à travers villes et villages pour prévenir les êtres
mais celui qui le ferait passerait pour un fou.
C’est la première fraîcheur de l’Eveil, elle redonne une vigueur, une couleur, un éclat
à tout ce qui est vu hors du temps…
Lalita Devi
Le jour où vous vous éveillerez, vous éclaterez de rire, car il n’y a rien à atteindre :
rien à perdre, rien à gagner. Tout est comme cela l’a toujours été du premier au
dernier jour. Croyez-vous que le ciel change lorsque les nuages s’amoncellent à la
saison des pluies ? Pensez-vous qu’il est différent quand vient l’été et qu’ils
disparaissent ? Le ciel reste le même, les nuages passent et s’en vont. Tel est samsara ;
tel est le monde, le mental.
Osho
117
Une fois que vous aurez réalisé la Vision, bien que les perceptions trompeuses du
samsara puissent encore s’élever dans votre esprit, vous serez semblable au ciel :
quand un arc-en-ciel apparaît, le ciel n’est pas particulièrement flatté, et lorsque des
nuages surviennent, il n’est pas particulièrement déçu. Vous éprouverez un profond
sentiment de contentement. Vous exulterez en votre for intérieur en voyant que le
samsara et le nirvana ne sont qu’une façade ; la Vision inspirera constamment gaieté et
humour, et un léger sourire intérieur pétillera toujours en vous.
Dilgo Khyentsé Rinpoché
Qu’est-ce qui me montre aujourd’hui que je n’ai pas atteint le but tel que je me le
représente ? A quoi puis-je voir que je ne suis pas éveillé, établi dans la sagesse et la
liberté intérieure ?
La libération, c’est ce qui reste lorsque tous les symptômes de non libération ont
disparu. Or, quels sont ces symptômes ?
Les ambitions, les attachements, les peurs, l’attraction et la répulsion.
Arnaud Desjardins
L’éveil, c’est l’humilité, c’est arrêter de prétendre être ceci ou cela, arrêter de
prétendre être auteur, arrêter de prétendre diriger sa vie, se rendre compte que le
courant des choses est là et se donner à ce courant sans vouloir diriger.
Eric Baret
Au niveau de l’effet physiologique de l’éveil, mon maître a formulé qu’en effet, à la
suite d’une compréhension totale, la transformation s’immisce dans toutes les
cellules et qu’il y a une harmonisation corporelle et mentale. C’est seulement en Inde
que l’on a porté l’attention là-dessus. Dans la tradition chrétienne, on n’a jamais mis
l’accent sur cette extériorisation ; dans le bouddhisme et dans l’islam, très peu. Pour
la bonne raison que cela n’a aucune importance. Lorsque quelqu’un est libre de luimême, que dans son corps se fasse un certain rééquilibre, que son psychisme se
transforme, cela ne le concerne pas parce qu’il n’y a plus personne.
L’éveil est soudain alors que la transformation du corps, dans l’espace-temps, est
progressive. On n’a même pas besoin d’en parler, dans le sens où la recherche de
l’éveil n’est pas la recherche de ces expressions. En profondeur, elle est le
pressentiment d’être libre. Cela n’a rien à voir avec un effet. On pourrait dire que
c’est presque dommage qu’il y ait ces effets. Ce qui importe, c’est de se sentir libre.
Eric Baret
118
Quand on sait avec certitude que rien n’a, au fond, d’existence, qu’on ne peut rien
trouver et qu’on n’a alors rien sur quoi s’appuyer, se fixer, qu’il n’y a pas de sujet ni
d’objet, plus aucune pensée erronée ne s’agite et l’on atteste l’éveil.
Houang-po
Quand le camphre est brûlé, il ne reste aucun résidu.
Votre mental, c’est le camphre.
Quand il sera entièrement fondu dans le Soi,
sans même laisser le plus petit déchet,
vous réaliserez le Soi.
Ramana Maharshi
Dans cet état transcendant dans lequel le soi individuel se fond dans la conscience
infinie, le monde conceptuel des noms et des formes cesse d’exister.
Amma
Conscience indifférenciée, dépouillée de moi et de mien, ne faisant qu’un avec les
images qu’elle capte avec précision mais sans jamais se les approprier, les aimer ou
les haïr, tel est le suprême degré de toute l’ascèse, la réussite non recherchée d’une
course effrénée,’’ le fruit immaculé de l’éveil’’.
Que celui-ci se révèle subitement ou qu’il soit le produit (tout aussi instantané) d’un
long polissage, d’une lente purification des passions et des émotions, il était là, en
vérité, depuis toujours.
Denise Desjardins
Rien de réel ne correspond aux expressions telles que ‘’atteindre le nirvana’’, ‘’se
libérer’’, ‘’parvenir à la béatitude’’, ‘’trouver son âme’’, ‘’devenir Atman’’. Comment
atteindre ce que vous n’avez jamais quitté, devenir ce que vous avez toujours été ? Ce
qui se passe est ceci : l’illusion que vous prenez pour le monde, c’est-à-dire les
concepts que vous entretenez au sujet du monde, s’efface comme un rêve et vous
vous redécouvrez centrés en vous-mêmes. Comparer cela à un voyage ou à une
quête est très boiteux. Cela ressemble plutôt au dormeur qui rêve de mille et une
péripéties et qui, en s’éveillant, se rend brusquement compte qu’il n’a pas quitté son
lit. Vous ne retournez nulle part, puisque vous n’êtes jamais partis. Vous ne
119
retrouvez rien, dès lors que vous n’avez rien perdu. Vous dormez. La seule chose
nécessaire est de vous éveiller.
La découverte de la Vérité est toujours parfaite, c’est une expérience totale,
immédiate. Non un processus ou une évolution, mais un bond, un renversement, une
explosion, une mutation. Est-ce que vous vous éveillez peu à peu ? Nullement. Vous
dormez ou pas. Vous rêvez ou pas. Il n’y a rien d’intermédiaire. La sadhana peut être
très longue, c’est vrai. Mais la Vérité se manifeste avec la soudaineté de l’éclair. Elle
n’appartient pas au temps. Tout ce qui s’inscrit dans le temps est graduel, progressif.
La sadhana se déroule dans le temps et dans l’espace. L’illumination est hors du
temps. Vous discipliner à la bonté et au renoncement n’a guère d’utilité, ce n’est
qu’aménagement social. La sadhana vous demande de dépasser les notions de bien et
de mal, d’amour et de haine, de charité et de cruauté, de samsara et de moksha (du
monde et de délivrance). Cette transcendance de la dualité est dite veetaragata, l’état
au-delà de l’attachement et du détachement. Veetaraga Chaitanya, la conscience pure
nettoyée de tout désir, est l’état où ne subsiste aucune idée de bien ou de mal, de
vertu ou de péché. C’est la sphère de Chaitanya, la connaissance immaculée et
inaltérable. La Vérité se dévoile uniquement à l’homme en état de chaitanya.
Veillez à ce que votre mental soit alerte et neutre, jour et nuit, quoi qu’il arrive,
comme un acteur qui joue son rôle sans perdre de vue qu’il n’est pas le personnage
de la pièce et qui ne s’identifie donc pas aux heurs et malheurs de ce dernier.
L’homme actif qui reste conscient n’est pas affecté par les événements. C’est une
conséquence naturelle de la vigilance. Lorsque je marche consciemment, je sens que
‘’je’’ marche et, simultanément, que ‘’Je’’ ne marche pas. Mon corps bouge. Mais ma
conscience reste stable. C’est la même chose lorsque je mange, parle, travaille et ainsi
de suite. Un point en vous ne participe pas, c’est le témoin. Il est au-dessus de la
mêlée, serein. Il n’agit pas, ne se réjouit pas, ne souffre pas. Plus cette expérience
s’approfondira, plus les écarts qui vous font balancer entre une émotion et son
opposé se réduiront. Les fluctuations affectives finiront par cesser complètement.
Vous comprendrez alors que vous êtes Atman, la conscience pure et absolue.
Qu’est-ce que le mental ? Un mécanisme qui collecte, conserve et agence en concepts
ce que les sens perçoivent. Si vous croyez être votre cerveau, vous confondez maître
et serviteur. Le serviteur s’informe, rassemble des données ‘’à propos de’’. Le maître,
votre Moi est celui qui connaît.
L’observateur, le témoin est votre identité réelle. Il n’est impliqué ni dans la
naissance ni dans la mort, il n’est ni maya (illusion) ni moksha (délivrance). Il est le
témoin de tout, de la lumière et des ténèbres, de la souffrance et de la béatitude. Il est
au-delà de la dualité.
Celui qui redevient pur témoin est comme un lotus épanoui, tout différent de ses
‘’pieds d’argile’’ et ‘’sauvé des eaux’’ dans lesquelles il vit. Il est extatique dans la
douleur comme dans le plaisir, calme dans la fortune comme dans l’humiliation. Il
reste le témoin de tout. Les événements sont ce qu’ils sont, mais désormais ils
surviennent ‘’devant’’ lui. Le témoin n’est pas immergé en eux. Il les reflète comme le
miroir dans lequel se forment et s’effacent mille images et qui reste immaculé.
Dans l’état de samadhi, il n’y a plus d’objet extérieur. On ne peut donc pas dire qu’il y
ait connaissance. Ce n’est pas une connaissance dans le sens de ‘’savoir’’, mais ce
n’est évidemment pas non plus de l’ignorance. IL N’Y A PLUS RIEN A SAVOIR. Le
120
samadhi est différent du savoir et du non savoir, puisqu’il n’y a plus d’objet à
connaître ou à ignorer. C’est l’état de subjectivité pure. N’existe plus que Celui qui
connaît, la conscience pure sans contenu, CELA.
Osho
L’homme que je suis ne connaît pas l’ennui. Assis là des heures et des heures, je peux
observer le battement de l’horloge sans le moindre ennui et je ne sais vraiment pas de
quoi il s’agit. Le balancier bouge et tout mon être participe à son mouvement. Mais
vous, vous ne sauriez vous intéresser à cela ; vous vous attachez à quelque forme de
méditation. Mon état de ‘’méditation’’ particulier relève de l’étonnement : ‘’Où se
produit ce mouvement ?’’ Il ne s’agit pas d’étonnement au sens ordinaire du mot.
L’individu que je suis vit dans l’étonnement pour le reste de ses jours. Extérieur et
intérieur sont créés par le mental. Quand il n’existe aucun mouvement de pensée,
vous ne savez pas s’il s’agit de l’intérieur ou de l’extérieur. On est comme un
miroir—un miroir vivant reflétant les objets exactement comme ils sont. Et il n’y a ici
personne. Je ne vois rien : mon corps tout entier reflète les objets de mon
environnement tels qu’ils se présentent. Quand le besoin s’en fait sortir, intervient, de
l’arrière-plan le mécanisme qui permet de reconnaître et de nommer. L’absence du
mouvement de pensée qui reconnaît et nomme les choses est l’état de samadhi, sahaja
samadhi.
Vous vous imaginez que le samadhi est un état dans lequel on entre et dont on sort. Il
n’en est rien : l’homme naturel est toujours en samadhi que ses yeux soient ouverts ou
fermés, il ne sait ce qu’il regarde.
Celui qui se trouve en samadhi est à la fois un enfant et un fou. Les écervelés
fonctionnent exactement de la même manière : leurs pensées sont déconnectées,
disjointes, de même que leurs actes et leurs sensations. Mais leurs pensées
s’accompagnent d’hallucinations et d’images mentales—c’est la seule différence.
L’état naturel est perpétuel émerveillement : l’homme ne sait pas ce qu’il regarde, ce
qu’il sent et pourtant ses sens fonctionnent à l’extrême de leurs possibilités et sont
très actifs. Rien ne leur échappe.
U.G.
Une phrase bien souvent répétée, concernant le zen, dit : ‘’Avant l’illumination, les
rivières sont des rivières et les montagnes sont des montagnes, au moment de
l‘illumination les rivières ne sont plus des rivières et les montagnes ne sont plus des
montagnes, après l’illumination les rivières sont de nouveau des rivières et les
montagnes sont de nouveau des montagnes.’’
Qu’est-ce qui a changé ?
Ce qui a changé, ce n’est pas le monde autour de nous, mais celui qui perçoit ce
monde.
121
Au moment de l’illumination, il y a toujours une période de crise, un passage au-delà
de notre forme habituelle, un moment où tout semble vaciller. Cette crise peut
prendre des aspects très divers ; elle peut être intense et rapide ou s’étaler dans le
temps ou bien encore se produire en plusieurs crises successives qui représentent
chaque fois une étape ; elle peut se présenter comme un désarroi intérieur où l’on ne
sait plus en effet ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas, ce qu’on est, ce qu’on n’est pas,
ce qu’on veut, ce qu’on ne veut pas. Nous-même nous ne savons plus si nous
sommes toujours nous-même ou non.
On peut aussi l’entendre comme l’éblouissement d’une illumination qui nous
transporte sur un plan de samadhi dans lequel les montagnes ne sont plus des
montagnes, les rivières ne sont plus des rivières parce qu’il n’y a plus aucune
montagne, aucune rivière, mais simplement la Conscience vide, sans forme, qui laisse
toujours à ceux qui l’ont vécue un souvenir inoubliable.
Mais l’achèvement de la Réalisation, c’est quand le monde manifesté se révèle de
nouveau le monde manifesté.
Mâ Anandamayi ou Ramana Maharshi reconnaissaient les gens et les appelaient par
leur nom, donc étaient bien encore capables d’accéder au monde de la multiplicité et
de la différence. Mais la conscience du sujet, de celui qui perçoit, elle, est libérée des
manques, des désirs dont la non-satisfaction serait souffrance et des peurs dont la
concrétisation serait souffrance.
Arnaud Desjardins
A partir de la mi-1984, j’alterne entre quatre niveaux de conscience différents :
1. Samadhi
2. Samadrishti
3. Monde ordinaire
4. Etat de jnani
Le samadhi se produit quand ma conscience demeure dans le Trikuti (espace
intersourcillier). Dans cet état, je sens que je suis à la fois le sujet conscient, l’objet de
connaissance et l’acte de connaître. Je suis la Conscience absolue, et ce que je perçois
est également Conscience absolue. C’est un état sublime, une Supraconscience où
rien ne se manifeste : aucune trace de pensée, d’émotions ou de sentiments, aucune
forme humaine ! Ce samadhi est l’état de non dualité absolue, dans lequel il n’y a ni
naissance ni mort, ni temps, ni espace, ni direction, un état où les instincts
élémentaires comme la colère et la sexualité n’existent plus. C’est le ‘’quatrième état’’,
turiyavastha, qui réunit et transcende les trois autres (veille, rêve, sommeil profond).
C’est le royaume du Silence et de la Conscience : le soi repose dans le Soi et n’a plus
aucun lien avec les objets du monde. Dans cet état, le ‘’Je’’ est complètement coupé
du monde de maya.
Mon second état de conscience correspond à une légère redescente dans le monde
physique de maya. Toutes sortes d’objets apparaissent et disparaissent devant mon
regard intérieur. Je sais qu’ils sont le résultat d’une transformation de l’énergie en
matière, puis d’un ‘’modelage’’ de cette matière en de multiples formes. Je suis dans
la Conscience-témoin, une conscience où il n’y a pas de jugement ni d’opinion, pas
122
de distinction, de différenciation. Les couples d’opposés—blanc/noir, chaud/froid,
homme/femme, riche/pauvre, etc.—ne sont plus qu’une seule et même Shakti. C’est
l’état de vision égale, samadrishti. Bhagavan Baba a dit quelque part qu’une telle
vision est vraiment établie le jour où l’on ne fait plus de distinction entre un
excrément et un fruit ! Ce n’est plus tout à fait un samadhi, car ici le sujet qui perçoit
et l’objet perçu sont légèrement différenciés.
Mon troisième état de conscience est celui d’un être humain ordinaire. Je ressens
alors les mêmes problèmes, les mêmes angoisses que les autres. Les questions
d’argent et de sécurité matérielle me préoccupent ; j’éprouve pendant quelques
instants de la jalousie, de l’envie. Je connais toutes les émotions et toutes les pensées
qui traversent un être humain ordinaire ! Je crois que la plupart des yogis et des êtres
réalisés œuvrant en ce monde vivent de temps en temps dans cet état de conscience.
Cela m’arrive souvent, mais seulement pour de brèves périodes. Après quoi, je suis
automatiquement entraîné dans un quatrième état, l’état du jnani.
Dans cet état de conscience, je me sens séparé des objets des sens, y compris mon
propre corps et ses activités. Je sens que mon moi véritable ne fait rien, qu’il demeure
en permanence dans la position du témoin. Je suis pure conscience, immuable. Les
objets et les êtres du monde vivent et agissent en moi.
De ce quatrième état, je repasse automatiquement au premier, l’état de samadhi. Le
samadhi, l’état de Shiva, la Supraconscience, est un état dans lequel tous les
problèmes du jiva sont résolus. C’est un état de paix et de félicité absolues. C’est l’état
de libération totale, un état d’existence cosmique dans lequel l’homme obtient la
révélation de tous les mystères de l’univers.
B.S. Goel
Lorsque Mâ (Ananda Moyi) entrait en samadhi, ses yeux s’ouvraient tout grands,
mais son regard devenait fixe et toute expression s’évanouissait peu à peu. Son corps
devenait froid comme de la glace. Toute vie semblait s’être éloignée d’elle mais son
visage et peu à peu son corps tout entier resplendissaient d’un éclat divin. Parfois dix
ou douze heures s’écoulaient ainsi et nul ne parvenait à la faire sortir de son samadhi
tant que le moment n’était pas venu. Progressivement sa respiration devenait plus
profonde et lorsqu’elle revenait à son état normal, son être tout entier semblait
submergé de joie.
J. Herbert
Elle vient enfin cette heure bénie où le disciple qui a maîtrisé ses sens et concentré
son mental, sent son corps se pétrifier ; en suivant les instructions de son guru et en
s’appuyant à la fois sur l’autorité des Ecritures et sur son raisonnement personnel, il
s’établit inébranlablement en l’Atman.
123
Il conserve cette attitude pendant un certain temps, le mental immergé dans le
suprême Brahman, puis, il redescend du plan supraconscient et, encore tout
imprégné de la Félicité infinie, il s’écrie : Mon mental et ses diverses activités se sont
dissous à l’instant où j’ai réalisé l’identité de Brahman et du Soi. Il ne m’est plus
possible de distinguer une chose d’une autre ! Je ne saurais dire en quoi consiste la
Félicité illimitée du samadhi ni en sonder l’abîme ! Je ne peux ni exprimer par des
mots ni concevoir par l‘esprit la majesté de ce suprême Brahman, de cet océan que
pénètre tout entier la Félicité du Soi, plus douce que le nectar ! Comme un grêlon
dans la mer, mon mental s’est fondu en une fraction infinitésimale de cet océan. Et il
est maintenant saturé de l’essence de la félicité ! Où s’en est donc allé cet univers ? –
Qui l’a escamoté ? – En quoi s’est-il résorbé ? Tout à l’heure, je le percevais, et voici
qu’il s’est évanoui. Quelle étrange disparition ! Dans l’océan de Brahman que remplit
jusqu’aux bords la Félicité absolue, que pourrait-on accepter ou rejeter ? Où
trouverait-on quoi que ce fût qui diffère de son propre Atman ? En cet état de
réalisation, je ne vois, je n’entends, je ne connais plus rien. J’existe tout simplement
en tant qu’Atman—la Félicité éternelle—et l’Atman est distinct de toute autre chose
Sankarâchârya
Lorsqu’un adorateur parvient à un certain niveau de pureté mentale, il peut se
comporter comme un enfant ou devenir insensible aux excitations de la vie comme
un bloc de matière inerte ou encore violer tous les canons de la vie sociale et se
conduire comme un fou ou parfois être traversé par des éclairs de pensées ou
d’émotions sublimes et passer pour un saint.
Mais à travers toutes ces apparences, sa pensée reste centrée sur son but essentiel. Si
à ce moment-là il oublie son but final, ses progrès en resteront là. Mais s’il poursuit
intensément ses efforts, toutes ses activités se concentreront sur son objectif suprême.
Vous verrez toujours que s’il a l’air d’une masse inerte, indifférent aux appels
extérieurs, il sera plein de joie et de béatitude dès qu’il regagnera le plan de
conscience physique. Peu à peu cette joie s’installant en lui, ses relations avec les
hommes et les choses en seront toutes imprégnées et il sera aimé de tous. Sa vie
intérieure et extérieure deviendra l’expression de l’unique Béatitude suprême.
A l’étape suivante, l’adorateur verra même fondre aussi le concept de l’existence
universelle. Son mode de vie ne peut plus alors s’expliquer selon les normes
habituelles du raisonnement humain. Là toutes les vibrations du mental sont
suspendues et il semble que l’âme ait quitté son enveloppe mortelle. Toutefois, s’il
existe un résidu suffisamment fort de samskaras pour lui permettre de subsister, il
pourra encore vivre pendant quelque temps. Alors aucune circonstance de la vie ne
peut plus le modifier, même si le fait qu’il conserve son corps donne l’impression
qu’il reste sujet aux changements.
La seule différence entre un tel adorateur et un yogi qui renonce à son corps, c’est
que ce dernier quitte son corps par un effort de sa propre volonté. Même au moment
d’abandonner son enveloppe matérielle, il reste conscient qu’il a un corps et qu’il le
quitte, tandis que l’homme qui renonce à son corps dans un état de samadhi absolu
124
n’est conscient ni d’un corps individuel ni d’un effort pour le quitter. Les samskaras
de la vie et de la mort cessent de fonctionner en lui et le corps se détache tout
naturellement dès que le karma de ses vies antérieures est épuisé.
Mâ Ananda Moyî
Le prarabdha-karman (karman qui vient à maturité, karman auquel nous devons notre
corps physique actuel) est bien trop puissant pour que l’Etre de réalisation en
suspende le cours ; il ne s’épuisera que si, au cours de cette vie, le Sage en subit
toutes les conséquences.
Par contre, les deux autres genres de karman : le premier qui provient d’actions
antérieures et qui est emmagasiné dans le mental (le samcita-karman, karman qui sera
la cause de nos prochaines existences) —le second, dont les effets ne sont pas encore
sensibles et qui viendra plus tard à maturité (l’âgâmi-karman, karman qui est encore
imperceptible et qui ne fera sentir ses effets que dans des existences ultérieures) sont,
tous deux, réduits en cendres par le feu de la connaissance. Mais aucun de ces trois
genres de karman n’est capable d’atteindre le Sage qui a réalisé son identité avec
Brahman et qui vit constamment absorbé en son Idéal, car il est devenu, lui-même, le
transcendant Brahman. Pour le Sage qui vit en son propre Soi en tant que Brahman,
l’Un sans second—et qui ne s’identifie plus avec les conditionnements adventices, la
question de savoir si le prarabdha-karman existe ou non, n’a aucun sens. Est-ce que le
dormeur qui s’éveille, conserve le moindre rapport avec les objets vus dans son
rêve ?
Sankarâchârya
‘’Une fois, Subramania regarda le monde que Brahma avait créé et vit que tous les
gens y étaient en proie à des sentiments tels que la jalousie, la colère et la cupidité. Il
regarda un peu plus longtemps et vit que ces gens étaient presque toujours
malheureux et qu’ils se battaient et se disputaient souvent les uns avec les autres. Il
dit à Brahma que sa création était gravement défectueuse.
‘’Vous auriez dû créer un univers rempli de perfection et non d’imperfection, dit-il.
Pourquoi avez-vous rempli le monde de si mauvaises gens ?’’
Comme Brahma refusait de concéder qu’il avait commis des erreurs, les deux dieux
eurent une chaude dispute qui ne prit fin que lorsque Subramania vainquit Brahma,
l’emprisonna et anéantit sa création tout entière. Pour démontrer la justesse de ses
arguments, Subramania décida alors de créer un nouveau monde qui serait parfait à
tous égards. Il se mit à l’œuvre, mais découvrit bientôt qu’il n’était pas possible
d’insuffler de la vie ou du mouvement à ce monde. Même le soleil et la lune qu’il
avait créés refusaient de se mouvoir dans le ciel. Parce que les seuls habitants de ce
monde étaient des jnanis, une absolue tranquillité prévalait partout.
Quelque temps plus tard, Shiva arriva et demanda :
125
‘’Pourquoi as-tu enfermé Brahma ?’’
Subramania répondit :
‘’Cet homme causait beaucoup de trouble. Il créait toujours des gens qui se
disputaient et semaient la discorde. Regarde ma création ! Tous des nishthas
(personnes qui sont établies dans le Soi).’’
Shiva observa attentivement le monde pendant un moment avant de constater :
‘’Il n’y a pas de mouvement dans ce monde : pas de soleil, pas de lune. Tu as créé un
monde de shunya (vide)’’.
Subramania examina sa création et dut admettre que Shiva avait raison. Il libéra
Brahma de sa prison et lui permit de créer un autre monde imparfait.
Bhagavan disait qu’il n’y aurait jamais de monde parfait parce que le monde est
toujours une création du mental imparfait. On ne peut pas faire un objet parfait avec
un outil aussi imparfait.
Il disait aussi :
‘’Tant que le mental existe, le bien et le mal existent ; mais pour les jnanis, qui n’ont
pas du tout de mental, il n’y a ni bien ni mal, ni monde.
Annamalai Swami, citant Ramana Maharshi
Il y a des hommes qui vivent aujourd’hui dans ce monde et pour qui l’illusion s’est
évanouie à jamais. Est-ce qu’ils meurent aussitôt après être parvenus à cette
réalisation ? Pas aussi rapidement que nous pourrions le penser. Supposons deux
roues reliées par un essieu et qui roulent ensemble. Si je saisis l’une de ces roues et
que je brise l’essieu d’un coup de hache, la roue que je tiens s’arrête, mais l’autre, par
la force de sa vitesse acquise, continue encore à rouler un peu avant de tomber.
L’âme, cet être pur et parfait, est l’une des roues, et l’hallucination extérieure du
corps et de l’esprit est l’autre roue ; les deux roues sont reliées par l’essieu du travail,
du karma. La connaissance est la hache qui brise les liens entre les deux roues. La
roue de l’âme s’arrêtera ; elle s’arrêtera de penser qu’elle va et qu’elle vient, qu’elle
vit et qu’elle meurt, elle s’arrêtera de penser qu’elle est la nature, qu’elle a des désirs
et des besoins, elle s’apercevra qu’elle est parfaite et sans désirs. Mais l’autre roue,
celle du corps et de l’esprit, continuera avec la vitesse résultant de ce qu’elle a fait
dans le passé. Aussi continuera-t-elle à vivre quelque temps jusqu’à ce que cette force
accumulée par les actions passées se soit épuisée, soit complètement usée ; alors
l’esprit et le corps s’écrouleront et l’âme deviendra libre.
Swami Vivekananda
Dans cette réalisation suprême, l’âme libérée jouit d’une extase divine à jamais
sereine malgré les événements et les phases successives de la vie phénoménale.
En effet, dans tout changement et toute activité, cette âme ne voit et n’éprouve plus
que le mouvement de l’ananda éternel. L’activité dénote les mouvements de l’amour
126
pur et de l’ananda, et l’inactivité dénote la paix absolue—l’un est l’expression de
l’autre, comme la lumière est l’expression du soleil.
Swâmi Râmdâs
Regarder tout avec la même indifférence en ce monde plein de qualités et de défauts,
naturellement divers, est un privilège de l’homme libéré. Comme le ciel, je suis audessus de toute contamination ; comme le soleil, je suis différent des choses
illuminées. Je suis immobile comme une montagne. Je suis illimité comme l’océan.
Quelquefois fou, quelquefois sage, quelquefois revêtu de la splendeur d’un roi,
quelquefois doux, quelquefois dangereux comme un serpent, quelquefois honoré,
quelquefois méprisé, quelquefois inconnu, ainsi vit le sage heureux de la félicité
suprême.
Sankarâchârya
Vous ne devenez rien. Ce que vous êtes fait pour accomplir, cela va s’incarner.
Maharaj était un homme très vulgaire, Krishna Menon était un homme très élégant.
Chacun remplit son rôle. Un jour, on a demandé à Maharaj : ‘’Cette vulgarité, cette
agitation qu’on sent en vous…’’Il a dit : ‘’Oui, je suis d’une caste vulgaire, je suis
agité, mais je suis libre de cela. Et vous qui êtes assis en méditation devant moi, vous
êtes noyé dans l’agitation.’’
L’agitation apparaissait chez Maharaj. Je l’ai vu six fois en train de menacer sa bellefille, devenir rouge, presque écumer, l'insulter avec les mots les plus orduriers
qu’aucun brahmane n’osait traduire. Il était libre. Son corps et son psychisme
insultaient sa belle-fille. Il y avait des gens assis devant lui en lotus, très calmes, mais
ce n’est pas là qu’il y avait la liberté. Il n’avait rien à prétendre, il ne prétendait rien.
Dans les livres, cela a été arrangé, amélioré, pas l’essentiel bien sûr, mais la forme.
On veut toujours se libérer de l’agitation : c’est cela l’agitation, c’est cela le manque
de respect. On se rend compte ; on accepte en soi cette tendance de toujours vouloir,
vouloir. Quand vous acceptez profondément, RIEN ne se passe. Là il n’y a pas
d’agitation, sauf quand elle se présente. L’expression de Maharaj a fait beaucoup de
bien. Mon maître était un homme élégant, raffiné, cultivé, riche, beau, tranquille, qui
s’habillait très bien avec des chaussettes en soie, des pull-overs de très haut prix, qui
avait deux Mercedes, un chalet en Suisse, trois appartements à Lausanne, la plus
belle maison de Saint-Paul-de-Vence, qui connaissait admirablement la musique
classique, le théâtre antique. Alors beaucoup de ses élèves se sont mis à se raffiner, à
porter des chemises blanches, à aller au concert, à manger avec subtilité. Et puis
certains ont eu la chance de rencontrer Maharaj : cela leur a fait beaucoup de bien !
Quelque chose s’est passé : ils n’ont plus essayé. Ceux qui étaient naturellement purs,
satviques, le sont restés. Ceux qui étaient naturellement agités le sont restés aussi. A
ce moment là une clarté peut se présenter. Mais quand on veut changer sa nature,
127
changer ses composantes chimiques, être autrement que ce qu’on est, c’est une
insulte à ce qui est au-delà de la nature.
Se rendre compte quand on essaie d’être sage, d’être libre, d’être ouvert, d’être
disponible ; se rendre compte de sa prétention et l’accepter. Cela c’est la porte. Il n’y
a pas de porte.
Eric Baret
En apparence, un jivan-mukta peut donner l’impression d’être ignorant ou de
manquer de sagesse. Son attitude est provoquée par son prarabda. En réalité, son
esprit est pur comme du cristal, tel l’éther (akasha), qui garde toujours sa clarté, qu’il
soit recouvert ou non de sombres nuages. Il se délecte dans le Soi, de même qu’une
épouse aimante éprouve le plaisir de l’étreinte de son seul époux. Bien qu’il demeure
silencieux tel un ignorant, son indifférence provient non pas de son manque de
savoir, mais de la dualité implicite contenue dans le langage ordinaire. Son silence
est donc la plus haute expression de la non dualité réalisée, qui somme toute, est
l’essence de l’enseignement des Védas. Bien qu’il instruise des disciples, il ne se pose
pas en maître, étant pleinement convaincu que le tandem maître-disciple n’est
qu’une convention née de l’illusion (maya). Si par ailleurs, il prononce des mots
incohérents tel un insensé, c’est que son expérience est inexprimable, comme les
paroles des amants durant leur étreinte. Si son langage est, au contraire, orné et fleuri
comme celui d’un orateur, il s’agit du souvenir de ses expériences passées puisqu’il
est l’inaltérable unique Réalité sans dualité, dépourvue de tout désir. S’il apparaît
quelquefois en proie à une profonde douleur, comme n’importe quel homme, en fait
il éprouve à l’égard de ses facultés sensorielles la juste compassion et la juste pitié
qu’il convient d’attribuer à leur jeu illusoire, car il a réalisé que ses sens n’étaient que
de simples instruments assurant la manifestation de l’Etre suprême. Quand il a l’air
vivement intéressé par les merveilles du monde, en fait, il ne fait que ridiculiser
l’ignorance née de la superposition. S’il semble se livrer aux plaisirs sensuels, il faut
comprendre qu’il jouit de la félicité éternelle et inhérente au Soi et que celui-ci, divisé
en deux, le Soi individuel et le Soi universel, ressent les délices de leur étreinte qui les
réintègre dans leur principe originel naturel. S’il apparaît en colère, c’est qu’il veut
du bien à celui qui l’offense. Tous ses actes doivent être interprétés comme étant
seulement la manifestation divine sur le plan humain. On ne doit donc éprouver
aucun doute, à l’égard de sa libération quoi qu’il soit encore vivant. Il ne vit que pour
le bien du monde.
Ramana Maharshi
Le Jivanmuktha est fermement établi dans la connaissance de l’Atma. Il y est arrivé par
la réflexion sur l’illusion (mithya) du monde et par la contemplation de ses défauts.
128
Par ce moyen, il a développé une compréhension réelle de la nature du plaisir et de
la douleur puis l’équanimité envers les deux. Il sait que la richesse et les joies et
plaisirs de ce monde n’ont aucune valeur et sont même toxiques.
Il prend les compliments, le blâme et même les coups avec une calme assurance, sans
être touché ni par l’honneur, ni par le déshonneur.
Bien sûr, le Jivanmuktha n’a atteint cet état qu’après de longues années de discipline
systématique et un enthousiasme inlassable, quand la détresse et le doute
l’assaillaient. La défaite ne le rendait que plus rigoureux dans son auto-examination
et plus désireux de suivre la discipline prescrite.
Le Jivanmuktha n’a pas une trace de ‘’volonté de vivre’’ ; il est tout prêt à embrasser
la mort.
Sathya Sai Baba
La réincarnation implique un moi susceptible de se réincarner. Mais ce moi n’existe
pas. La grappe de souvenirs et d’espoirs définie comme étant le ‘’moi’’ s’imagine
vivre pour toujours et invente le temps pour accueillir sa fausse éternité. Pour être, le
passé et le futur ne me servent pas. Chaque expérience, de la naissance à la mort, est
un produit de l’imagination. Moi, je n’imagine pas, par conséquent, je ne suis pas né,
et je ne mourrai pas. Seuls ceux qui croient qu’ils sont nés peuvent penser à renaître.
Nisargadatta Maharaj
Avant d’être moi en tant que moi, j’étais Dieu en Dieu.
Je peux donc l’être à nouveau, à condition d’être mort à moi-même.
Angelus Silesius
Qui êtes-vous ? Dieu.
D’où venez-vous ? De Dieu.
Où allez-vous ? A Dieu.
Sathya Sai Baba
Quand ils te poseront des questions étranges, cherchant à savoir ce que Cela est,
n’affirme et ne nie rien. Toute affirmation est mensongère et toute négation aussi.
Comment quelqu’un peut-il expliquer vraiment la nature de ce qui est s’il n’en a pas
eu l’entière révélation ? Quand (bien) même cette révélation lui aura été faite, quel
129
mot pourra-t-il envoyer de ce Royaume où le véhicule de la parole n’a de chemin sur
lequel avancer ? Si donc ils t’interrogent, offre-leur le silence, le silence et un doigt
indiquant la Voie.
Bouddha
Dans l’état d’illumination du Soi, il ne peut y avoir rien de tel que réalisation ou non
réalisation.
Cependant, bien que la réalisation existe, elle n’existe pas, et bien qu’elle n’existe pas,
elle existe. C’est comme ça !
Mâ Ananda Moyî
Lorsqu’on ne peut plus différencier ‘’ce qui est’’ de ‘’ce qui n’est pas’’, comment
peut-on exprimer quoi que ce soit en mots—si peu que ce soit ?
Mâ Ananda Moyî
J’ai atteint l’Inatteignable.
Kabir
Je n’ai rien atteint dans mon obtention de l’Illumination.
Bouddha
A quoi peut-on comparer ceci ? Etre tranquillement assis, seul à la fenêtre.
Je regarde les feuilles tomber et les fleurs éclore au fil des saisons.
Seccho (Hsueh-t’ou)
Quand on parvient à ce stade de la réalisation, voir est la même chose que ne pas
voir, entendre la même chose que ne pas entendre, prêcher la même chose que ne pas
prêcher.
Quand on a faim, on mange, quand on est fatigué, on dort.
130
Laissons les feuilles tomber et les fleurs éclore comme elles veulent.
Quand les feuilles tombent, je sais que c’est l’automne ; quand les fleurs éclosent, je
sais que c’est le printemps. Chaque saison a ses caractères particuliers.
Ayant tout nettoyé devant vous, Seccho ouvre maintenant un passage en disant :
‘’Comprenez-vous ou non ?’’
Il a fait tout ce qu’il pouvait pour vous, il est épuisé…
Yengo (Yuan-wu)
Pour un être accompli, ni le monde avec ses paires d’opposés ni le corps n’existe.
Sans monde peut-il y avoir un corps ? Qui dit que le corps existe ? Où est le nom ?
Où est la forme ? Supposer que l’être accompli voie quoi que ce soit hors de lui est
hors sujet. A qui peut-il demander : ‘’Donne…donne’’ ? Le ‘’Je veux’’ est précisément
ce qui nous fait choir dans la réalité du corps. De plus, sans monde, sans corps, il n’y
a forcément aucune action. Soyons clairs, après la réalisation de CELA, il n’y a pas de
corps, pas de monde, pas d’action—pas la moindre amorce de corps, de monde et
d’action—et il n’y a pas de ‘’il n’y a pas’’…
Utiliser les mots ou pas. Garder le silence ou pas, tout revient au même. Tout est
CELA.
Ma Ananda Moyi
131
BIBLIOGRAPHIE
Je n’ai plus de références précises concernant toutes ces citations, étant donné que je
n’avais jamais imaginé les rassembler dans l’optique de les partager ultérieurement
sous la forme d’un travail quelconque, mais voici tout de même quelques titres des
livres desquels elles proviennent (selon mon meilleur souvenir, puisque la mise au
net de ce travail a eu lieu en 2004).
Aïvanhov Omraam Mikhaël : Amour et sexualité
Alderman Carole : Sathya Sai Education in Human Values
Andrieu Irène : L’astrologie, clé des vies antérieures
L’arbre généalogique karmique
Baret Eric : Le sacre du dragon vert
Brosse Jacques : Les maîtres zen
Browne T. Mary : Love in action
Chandra Swami : Le chant du silence
(Collectif) : Le livre du Tao d’aujourd’hui
Desjardins Arnaud : A la recherche du Soi (4 tomes)
La voie du cœur
Pour une vie réussie, un amour réussi
La voie et ses pièges
Approches de la méditation
Desjardins Denise : La stratégie du oui. Peut-être le livre le plus utile pour la
connaissance approfondie du mécanisme des émotions. C’est
aussi une magnifique étude comparative des ascèses des
différentes religions.
Dürckheim Karlfried Graf : Pratique de la voie intérieure – Le quotidien comme exercice
Fr. Philippe de Lignerolles : Florilège de la spiritualité chrétienne
Godman David : Sois ce que tu es – Les enseignements de Ramana Maharshi.
Goel B.S. : Troisième œil et kundalini
Houang-po : Entretiens
Huu Khoa Nguyen : Petite histoire du Tchan
Inayat Khan Hazrat : The inner life
Kasturi N. : Sathyam Sivam Sundaram
Krishnamurti : La révolution du silence
Se libérer du connu
La flamme de l’attention
Krystal Phyllis : Le singe piégé. Ce livre fournit toutes les bases d’une bonne sadhana.
Phyllis Krystal est thérapeute. A plus de 90 ans, elle continue de
donner des conférences et des séminaires dans le monde entier.
Grande dévote de Sathya Sai Baba qu’elle n’a découvert qu’à près de
60 ans !
Kunley Drukpa : Le fou divin
Lama Anagarika Govinda : Les fondements de la mystique tibétaine
Loiseleur Véronique : Anthologie de la non dualité. Un incontournable, selon moi.
Beaucoup de citations proviennent de ce livre. Véronique
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Loiseleur est la seconde épouse d’Arnaud Desjardins.
Mâ Ananda Moyî : L’enseignement de Mâ Ananda Moyî
Maharshi Ramana : L’enseignement de Ramana Maharshi
Immortelle conscience
Maître Eckhart : Les traités
Morgan Marlo : Messages des hommes vrais au monde mutant
Murphy Joseph : L’oracle de votre subconscient – I-Ching : Le livre des
transformations
Nisargadatta Maharaj : Graines de conscience
Odier Daniel : Tantra
Désirs, passions et spiritualité
Osho : Du sexe à la Conscience divine
Tantra – Le chant royal de Saraha
Qu’est-ce que la méditation ?
Techniques de méditation
Méditation, la voie de la perfection
Rinpoché Sogyal : Le livre tibétain de la vie et de la mort
Roumanoff Daniel : Psychanalyse et sagesse orientale
Sankarâchârya : Le plus beau fleuron de la discrimination, Viveka-Cuda-Mani. Un must,
mais il faut du temps pour l’apprivoiser…
Salomon Paule : La femme solaire
La sainte folie du couple
La brûlante lumière de l’amour
Les hommes se transforment
Sathya Sai Baba : Les enseignements de Sathya Sai Baba (Summer Showers in
Brindavan 1990)
Shah Idries : Chercheur de vérité
Silesius Angelus : Le pèlerin chérubinique
Swami Ramdas : Pensées
Swami Siddheswarananda : Le yoga et Saint Jean de la Croix
Swami Vivekananda : Jnana Yoga
U.G. : Rencontres avec un éveillé contestataire
La pensée est votre ennemie
Le mental est un mythe
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