Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (PSP) Ecole d’éducation et de formation (EDEF) Master en sciences de l’éducation (FOPA) Adaptations ou modifications des pratiques pédagogiques des enseignants de l’ordinaire primaire face aux élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe Mémoire réalisé par Christelle POUSSIERE Promoteur(s) Anne BRAGARD Accompagnateur(s) Stéphane COLOGNESI Fina MORAL Année académique 2016-2017 Master en sciences de l’éducation et finalité spécialisée 2 3 Remerciements Ce mémoire s’est concrétisé grâce à la participation de nombreuses personnes auxquelles je désire exprimer ma profonde reconnaissance. Tout d’abord, un remerciement spécial à ma promotrice Anne Bragard pour sa patience, sa grande compréhension, son expertise et ses judicieux conseils tout au long de la rédaction de ce travail. Je remercie également les membres de ma commission mémoire pour leurs recommandations constructives permettant ainsi l’amélioration de cet ouvrage. Je leur adjoins respectivement un remerciement personnalisé d’une part, à Fina Moral pour sa propension à croire en moi et en mes capacités mais aussi pour ses nombreux encouragements et d’autre part, à Stéphane Colognesi pour sa participation exceptionnelle à cette commission et son analyse pointue et détaillée. Je tiens aussi à témoigner ma profonde gratitude à toutes les enseignantes et tous les enseignants mais également aux accompagnatrices pédagogiques qui ont accepté de participer aux entretiens. Je n’oublie pas Laurence Famelart pour son soutien indéfectible, son aide, ses conseils et sa généreuse disponibilité tout au long de ce parcours universitaire. Je lui en suis infiniment reconnaissante. Je souhaite également exprimer mes remerciements à Nancy de Norre pour sa présence réconfortante ainsi que le temps et l’énergie consacrés à m’accompagner. J’y adjoins d’autres amies, qui se reconnaitront. Je leur suis reconnaissante pour leur soutien moral et leur aide précieuse. Enfin, je voudrais remercier tout spécialement mon mari et mes filles pour leur patience, leurs encouragements et leur soutien inconditionnel. J’ai également une pensée pour mon papa. Ensemble, ils m’ont toujours encouragée dans la poursuite de mes études. 4 Table des matières Introduction 7 Partie I - Approche théorique 9 Chapitre 1 – Intégration ou inclusion ? 10 1.1 Intégration, inclusion : deux notions distinctes 10 1.2 L’éducation inclusive 13 1.3 L’intégration scolaire 15 1.3.1 Cadre légal 18 1.3.2 Richesses et limites de l’intégration 19 1.3.3 L’intégration d’enfants déficients auditifs 22 Chapitre 2 – La déficience auditive 23 2.1 Contextualisation du terme 24 2.2 Les types de surdité 25 2.3 Les degrés de surdité 26 2.4 La réhabilitation de l’audition 27 2.5 La communication 27 Chapitre 3 - Les pratiques pédagogiques 3.1 Pratiques pédagogiques : différenciation et adaptation 28 30 3.1.1 Différenciation pédagogique 32 3.1.2 Adaptations pédagogiques 33 3.2 Réponses pédagogiques adaptives 37 3.2.1 La transmission des informations 37 3.2.2 Le soutien pédagogique 39 3.2.3 L’évaluation 39 Chapitre 4 – Synthèse des apports théoriques 40 5 Partie II - Approche empirique Chapitre 5 – Fondements de notre méthodologie 41 42 5.1 Question de recherche et hypothèses 42 5.2 La méthodologie : l’approche qualitative 44 5.3 La population, l’échantillon 45 5.4 Les participants 46 5.5 Les instruments de récolte de données 49 5.6 Les modalités de traitement des données 53 Chapitre 6 – Analyse des résultats 6.1 Thèmes définis par les indicateurs de pratiques pédagogiques 57 58 6.1.1 Les pratiques pédagogique usuelles 58 6.1.2 La différenciation 58 6.1.3 Les adaptations spécifiques 60 6.2 Thèmes émergents 68 6.2.1 Le contexte de l’intégration 68 6.2.2 Le profil de l’élève déficient auditif 70 6.2.3 La perception de la différence 72 6.2.4 Les ressources disponibles 73 6.2.5 Les sources d’apprentissage 76 6.2.6 L’engagement 78 6.2.7 L’expérience 79 6.2.8 Le développement professionnel 79 Chapitre 7 – Discussion des résultats 81 7.1 Discussion des résultats 82 7.2 Limites 89 Conclusion 91 Bibliographie 93 Index des tableaux et figures 101 Annexes 102 6 Résumé L’objet de cette étude porte sur les pratiques pédagogiques mises en œuvre dans le cadre de l’intégration des enfants déficients auditifs dans l’enseignement ordinaire primaire. Explorer le champ des pratiques pédagogiques des enseignants suppose donc d’examiner si des changements dans les pratiques s’opèrent mais aussi de considérer ce qui fonde ces modifications. Le cadre théorique sollicite, d’une part, une approche de la législation sur la question de l’intégration (concept, évolution, application dans les écoles ordinaires), et plus particulièrement pour les élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7 mais également des connaissances liées à la déficience auditive afin d’en éclaircir le contexte et, d’autre part, des apports propres aux pratiques pédagogiques et aux dispositifs mis en place parallèlement à l’accompagnement pédagogique dont disposent ces enfants. L’analyse repose sur une approche qualitative dont la récolte d’informations s’est effectuée à l’aide d’entretiens semidirectifs. Les résultats montrent comment une série de facteurs influencent la mise en œuvre d’adaptations pédagogiques lorsque les enseignants de l’ordinaire primaire sont amenés à accueillir des élèves déficients auditifs en intégration dans leur classe. Abstract The purpose of this study focuses on teaching practices implemented as part of the integration of hearing impaired children in regular primary education. To explore the scope of teachers’ practices, it is required to examine whether changes in their practices occur but also to consider and understand the basis for these changes. Firstly, the theoretical framework implies an approach to legislation on the issue of integration (concept, evolution, application in regular schools), and more particularly for students from Type 7 special education but also implies to have the knowledge related to hearing impairment to clarify the context; On the other hand, the theoretical framework also requires own contributions to teaching practices and systems implemented in parallel to the educational support in place. The analysis is based on a qualitative approach, from which information has been collected using semistructured interviews. The results show how a series of factors influence the implementation of educational adaptation when teachers in ordinary primary are expected to welcome and integrate hearing impaired students in their classrooms. 7 Introduction Directrice d’une école fondamentale ordinaire inscrivant dans son projet d’établissement une certaine ouverture à l’intégration d’enfants issus de l’enseignement spécialisé, notre choix de thématique s’est naturellement orienté vers la scolarité d’élèves déficients auditifs intégrés dans des classes d’enseignement fondamental ordinaire. L’intégration d’élèves déficients auditifs dans les écoles ordinaires n’est pas une pratique nouvelle. En Belgique francophone, elle s’est intensifiée depuis plusieurs années. Celle-ci nécessite l’intervention de l’enseignement spécialisé en partenariat avec l’établissement ordinaire qui accueille l’enfant. Avec les importants progrès réalisés dans le domaine technologique (implants cochléaires, appareils auditifs et système FM), les enfants déficients auditifs perçoivent mieux les sons du langage et de l’environnement sonore néanmoins leur intégration scolaire implique des aménagements pour favoriser l’épanouissement et la réussite scolaire de ces enfants. Notre étude qualitative interroge le processus de changements qui s’opèrent dans les pratiques mais aussi ce qui fonde ces modifications. La question de recherche est la suivante : dans quelle mesure les enseignants de l’ordinaire primaire adaptent-ils ou modifient-ils leur enseignement face aux élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe afin que ceux-ci progressent au meilleur de leurs potentialités ? Le cadre théorique sollicite, d’une part, une approche de la législation sur la question de l’intégration et plus particulièrement pour les élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7 (enfants souffrant de déficiences auditives) mais également des connaissances liées à la surdité et, d’autre part, des apports propres aux pratiques pédagogiques. Ainsi, le premier chapitre définit le concept, l’évolution et l’application dans les écoles ordinaires du processus d’intégration. Dans cette perspective, le concept d’intégration est différencié de celui de l’inclusion. Considérant uniquement l’intégration de ces élèves déficients, le travail se poursuit par un chapitre portant sur la déficience auditive dont nous tentons d’éclaircir le contexte sur bases de recherches existantes. Dans le chapitre trois, nous proposons un focus 8 sur les pratiques pédagogiques et les dispositifs mis en place parallèlement à l’accompagnement pédagogique dont disposent ces enfants. Le chapitre quatre clôture nos investigations théoriques par une synthèse des apports. S’en suit le chapitre cinq qui introduit la partie empirique du travail en explicitant son cadre méthodologique. Les résultats obtenus à la suite des analyses réalisées seront présentés dans le chapitre six. Enfin, une discussion sera développée avant de présenter nos conclusions. Nos conclusions devraient permettre aux chercheurs et aux professionnels du monde de l’éducation d’appréhender les dynamiques qui se cachent dans la mise en œuvre d’adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés et de ce fait, de progresser dans leurs réflexions portant sur les apports de la pratique de l’intégration d’élèves relevant du type 7 dans le développement professionnel des enseignants ordinaires. 9 Partie I - Approche théorique Une investigation riche d’éléments théoriques nous permet de recueillir des données que nous jugeons pertinentes pour traiter des pratiques pédagogiques des enseignants de l’ordinaire face aux élèves déficients auditifs ingérés dans leur classe (Glaser et Strauss, 1967 cités par Anadón et Guillemette, 2006). Il nous importe de chercher à construire notre propre interprétation des données que nous pouvons recueillir sachant que ces données sont déjà chargées conceptuellement d’un univers théorique dont il nous faut tenir compte (Anadón et Guillemette, 2006). Nous engageant au sein de notre démarche de compréhension, nous souhaitons, dans un premier temps, chercher à connaître le positionnement de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur la question de l’intégration, et plus particulièrement pour les élèves issus de l’enseignement spécialisé pour les élèves présentant des déficiences auditives. Cette approche de la législation nous permet de définir le concept, son évolution mais également d’en mesurer l’application dans les écoles ordinaires. Il nous importe également, afin de situer clairement le cadre de notre action, de différencier ce concept de celui de l’inclusion pour lequel le cadre légal reste actuellement peu formalisé. Dans un second temps, notre recherche portant spécifiquement sur les élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7, nous tentons d’éclaircir le contexte de la déficience auditive sur la base de recherches existantes, notamment Jacaud (2009), Virole (2006) et Tagger (2011). La visée étant de permettre de percevoir les diverses implications des actions portées par l’enseignant de l’ordinaire. De là, dans un troisième temps, nous déterminons ce qui est du ressort de l’enseignant. Dans ce cadre, nous envisagerons un focus sur les pratiques pédagogiques et les dispositifs mis en place parallèlement à l’accompagnement pédagogique dont disposent ces enfants. De nombreuses études, principalement étrangères, dispensent déjà des conseils aux enseignants qui accueillent un élève présentant une déficience auditive. Mais qu’en est-il en Belgique francophone ? 10 Chapitre 1 – Intégration ou inclusion ? Actuellement tous les enfants sont soumis à l’obligation scolaire quelque soit l’enseignement, ordinaire ou spécialisé1. Seule une dérogation dispensant l’inscription dans une école existe mais elle est généralement limitée. L’enfant à besoins spécifiques peut dès lors fréquenter l’enseignement ordinaire, l’enseignement spécialisé et être intégré sous diverses formes. Il peut aussi suivre des cours à domicile. Le contexte professionnel de notre recherche se situant au cœur du processus d’intégration scolaire, ce chapitre permet de mettre en exergue la distinction entre celui-ci et l’école inclusive. Benoit (2003) associe « le développement de l’intégration scolaire et la construction de l’école inclusive » (p.119). Pour l’auteur, elles « sont les deux facettes d’un même objectif : restaurer l’égalité des chances et promouvoir une véritable équité de traitement pour des jeunes que leurs caractéristiques personnelles pourraient marginaliser dans le contexte d’un environnement scolaire et social normatif » (p.119). Si ces deux modalités paraissent complémentaires dans leur action, elles semblent plus souvent opposées sur le terrain. Dès lors, ce premier chapitre développe dans un premier temps la différence entre les notions d’intégration et d’inclusion. Nous évoquons ensuite les processus d’éducation inclusive et d’intégration scolaire. Ce dernier point présente le cadre légal ainsi que les richesses et limites de l’intégration scolaire. Un focus sur l’intégration d’enfants déficients auditifs clôture ce sujet. 1.1 Intégration, inclusion : deux notions distinctes Pour des raisons historiques, de nombreux systèmes éducatifs européens ont mis en place deux cursus parallèles, l’un ordinaire et l’autre spécialisé. Ce dernier a pour mission de prendre en charge les jeunes à besoins spécifiques qui ne trouvent pas leur place dans le premier. Notons que l’enseignement spécialisé poursuit des objectifs et des missions La Loi du 29 juin 1983 concernant l’obligation scolaire, article 1er, § 1er, al. 1 er prévoit que « Le mineur est soumis à l’obligation scolaire pendant une période de douze années commençant avec l’année scolaire qui prend cours dans l’année où il atteint l’âge de six ans et se terminant à la fin de l’année scolaire, dans l’année au cours de laquelle il atteint l’âge de dix-huit ans ». 1 11 similaires à ceux de l’enseignement ordinaire tout en tenant compte des besoins et des capacités des enfants à besoins spécifiques. Benoit (2003) explique que c’est « à partir de ce contexte global de dualisme éducatif que se sont simultanément développées deux types de réponses » (p.119). D’une part, se situe le processus d’intégration scolaire et d’autre part la politique d’inclusion. Il ajoute que « les réponses du premier type sont tournées vers les élèves, qui devront apporter la preuve qu’ils sont capables de s’adapter, celles du second type mettent en question le fonctionnement du système dans sa capacité à prendre en compte la diversité des besoins individuels des élèves » (p.119). Dans certains pays, une certaine synonymie entre les notions d’inclusion et d’intégration peut être constatée. Il convient pourtant, comme l’indique Thomazet (2006) de différencier ces deux termes. Selon lui, l’intégration scolaire implique la mise en place de soutiens pour que l’élève s’adapte à l’enseignement ordinaire alors que l’inclusion envisage, quant à elle, un changement de paradigme. En effet, l’établissement scolaire doit, dans ce deuxième cas, s’organiser pour que les besoins spécifiques de chaque apprenant puissent être comblés. La figure 1 illustre de manière significative la distinction entre les deux notions. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO, 2009), « l’inclusion dans l’éducation est liée à la participation véritable d’un individu à la société et à sa capacité de réaliser la plénitude de son potentiel » (p.8). Figure 1 : Extrait du schéma de Afhnelt (2014), titré « Historische Stufen zur schulischen Inklusion » 2 2 Dans De Backer, B. (2014). Projet de Décret relatif à l’inclusion de la personne handicapée en Région de Bruxelles-Capitale. Origines, philosophie, méthode, calendrier et implications. Conseil bruxellois de coordination sociopolitique asbl. 12 De nombreux travaux (Ainscow, 1996 ; Armstrong, 2001 ; Clark et al., 1999 ; Harvey, 1995 ; McLeskey et Waldron, 1996 ; Sailor, 1991 ; Skrtic et al., 1981 ; Vienneau, 2002, cités par Thomazet, 2006) ont mis à jour les caractéristiques d’un enseignement inclusif. De ceux-ci a émergé le principe fondamental selon lequel « l’école ordinaire doit accueillir tous les jeunes en s’occupant des besoins de chacun tout en apportant ses réponses d’une façon qui soit la plus ordinaire possible » (Thomazet, 2006, p.20). Comprenons que tous les enfants, y compris ceux présentant un handicap, doivent être traités de manière égale. Qu’en est-il aujourd’hui en Belgique ? Thomazet (2008) parle d’une « évolution commune à de nombreux pays » qu’il regroupe en trois périodes : « ségrégative, intégrative et inclusive » (p.5). Dans la première, les enfants ne répondant pas à la norme sont traités à la marge du système scolaire dans des structures spéciales. Durant la deuxième, contrairement à d’autres pays, en Belgique, la mise en place de l’intégration scolaire n’a pas modifié l’organisation du système éducatif. « Les établissement spécialisés ont continué à assurer l’accueil des élèves pour lesquels on jugeait l’intégration peu pertinente » (Thomazet, 2008, p.5). Cette phase a permis la scolarisation d’un nombre important d’élèves à besoins spécifiques. Elle a également conduit à l’exclusion d’autres présentant des troubles trop différents de la norme attendue aux niveaux cognitif et comportemental. Selon Thomazet (2008, p.7), depuis une dizaine d’années, un troisième stade s’amorce : une période inclusive. Celle-ci attend de l’école ordinaire qu’elle s’engage plus en avant dans l’accueil des élèves à besoins spécifiques. Il est attendu de l’école ordinaire « de se modifier structurellement et pédagogiquement pour remplir sa mission auprès des enfants qui n’ont pas toutes les habilités nécessaires pour recevoir les enseignements comme on les dispense actuellement » (Thomazet, 2008, p.8). Figure 2 : Continuum vers une école inclusive (Trépanier et Paré, 2010) 13 La figure 2 présente, d’après Trépanier et Paré (2010) le continuum entre l’intégration partielle de quelques élèves ayant des besoins éducatifs particuliers (BEP) et l’inclusion de tous les élèves ayant ou non des besoins éducatifs particuliers. Selon le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (2013, p.7), en Belgique, de part l’absence de changements, nos écoles ordinaires ne semblent cependant pas (encore) prêtes à accueillir tous les élèves à besoins spécifiques. Cet immobilisme représente une difficulté pour la mise en œuvre actuelle d’une école inclusive que nous développons à présent. 1.2 L’éducation inclusive En Belgique, les élèves à besoins spécifiques fréquentent généralement l’enseignement spécialisé. Depuis quelques années, ils peuvent également être « en intégration » dans l’enseignement ordinaire. Comme nous l’avons stipulé précédemment, il s’agit d’un premier pas vers l’inclusion. Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme3 (2013) indique qu’ on parle d’un enseignement inclusif lorsque les élèves en situation de handicap sont accueillis naturellement dans les écoles ordinaires et que les infrastructures des écoles, les méthodes et le matériel pédagogiques, les équipes éducatives sont adaptés à tous les élèves […]. Un enseignement inclusif conduit l’école et les classes à s’organiser de telle façon à pouvoir accueillir tout élève, quel que soit ses particularités et à offrir un enseignement adapté aux besoins de chacun (p.7). Comprenons que les élèves à besoins spécifiques peuvent donc également fréquenter une école d’enseignement ordinaire en y recevant tout le soutien adapté et dans certains cas, sans visée certificative mais plutôt dans un objectif de socialisation et/ou d’évolution de l’élève en fonction de ses compétences et de son rythme. Afin de répondre à ces objectifs, des aménagements seront organisés tout au long de leur parcours scolaire. Unia, Centre interfédéral pour l’égalité des chances, est une institution publique belge indépendante qui lutte contre la discrimination et défend l’égalité des chances. 3 14 Selon Ebersold (2009), l’inclusion apparaît dans le cadre de la déclaration de Salamanque4 et des règles pour l’égalité des chances votées par l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1994. Ebersold (2009) fait également référence à la Charte de Luxembourg de l’Union européenne en 1996. Selon lui, le principe d’inclusion est à l’origine d’un mouvement composé de chercheurs et de personnes issues du milieu associatif désirant développer un projet social autour du handicap luttant contre l’exclusion et favorisant l’acceptation des différences. C’est le Traité d’Amsterdam, en 1997, qui « institue le principe juridique de nondiscrimination au fondement de toute politique envers les personnes handicapées » (Beaucher, 2012, p.5). L’UNESCO (2009) précise que « l’inclusion dans l’éducation est liée à la participation véritable d’un individu à la société et à sa capacité de réaliser la plénitude de son potentiel » (p.8). La Convention des Nations Unies relative aux droits de la personne handicapée adoptée en 2006 et ratifiée par la Belgique en 2009 indique, dans son article 24 sur l’éducation, que les États parties veillent à ce que […] les personnes handicapées puissent, sur la base de l'égalité avec les autres, avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l'enseignement secondaire (paragr. 2b) et précise qu’ « il soit procédé à des aménagements raisonnables en fonction des besoins de chacun » (paragr. 2c). Nous n’avons trouvé dans nos explorations qu’une source unique orientant les politiques d’éducation inclusive, à savoir le Décret relatif à l'inclusion de la personne handicapée. Il s’agit d’un décret de la Commission de la communauté française de la région de BruxellesCapitale du 17 janvier 2014 (publié le 3 octobre 2014). Dans son article 42, sont précisées les missions d’un « service d’aide à l’inclusion scolaire et extrascolaire ». Nous notons toutefois la présence des textes légaux contre l’exclusion dont le décret du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination. Les élèves déficients auditifs sont particulièrement concernés par cette problématique. Les En 1994, 92 gouvernements et 25 organisations internationales se sont réunis à Salamanque (Espagne), à l’occasion de la Conférence mondiale sur les besoins éducatifs spéciaux. La Déclaration de Salamanque et le Cadre d’action pour les besoins éducatifs spéciaux ont alors été adoptés à l’unanimité́ . Ils soutiennent le principe d’inclusion qui veut que les écoles ordinaires accueillent tous les enfants, indépendamment de leurs conditions physiques, intellectuelles, affectives, sociales, linguistiques ou autres. 4 15 conditions requises pour leur scolarisation en enseignement ordinaire paraissent si spécifiques et si éloignées des pratiques habituelles d’enseignement que l’on atteindrait les limites de l’école inclusive. Comme nous l’avons explicité précédemment, le processus d’intégration prend alors tout son sens. Celui-ci se veut centrer sur les caractéristiques de ces élèves et suppose une bonne connaissance des types d’obstacles auxquels ils risquent de se heurter du fait de leur déficience. Mais que recouvre le concept d’intégration scolaire ? 1.3 L’intégration scolaire L’évolution dont parle Thomazet (2008) et développée dans le premier point de ce chapitre explicite la position de la Belgique au niveau de la période intégrative. Nous évoquions, dans le cadre de l’éducation inclusive, l’article 24 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de la personne handicapée (adoptée en 2006 et ratifiée par la Belgique en 2009). Cette article précise également, dans les missions des Etats signataires, que les personnes handicapées ne soient pas exclues, sur le fondement de leur handicap, du système d’enseignement général et à ce que les enfants handicapés ne soient pas exclus, sur le fondement de leur handicap, de l’enseignement primaire gratuit et obligatoire ou de l’enseignement secondaire;[…]; que les mesures d’accompagnement individualisé efficaces soient prises dans des environnements qui optimisent le progrès scolaire et la socialisation, conformément à l’objectif de pleine intégration (paragr. 2a et 2e). Suivre une scolarité dans l’enseignement ordinaire n’est pas aisé pour tous les enfants. De par leur situation de handicap, certains ont des besoins particuliers auxquels l’enseignement ordinaire ne peut répondre. Une majorité d’enfants à besoins spécifiques sont scolarisés dans l’enseignement spécialisé. L’accompagnement mis en place leur permet alors d’acquérir les apprentissages scolaires de base (et pour certains, une qualification professionnelle). La loi de 1970 organise l’enseignement spécialisé, son objectif étant de permettre à tout enfant à besoins spécifiques de suivre une scolarité lui offrant d’une part, des réponses à ses besoins et d’autre part, lui permettant de s’insérer au mieux au sein de la société. 16 Certains besoins spécifiques requièrent des réponses adaptées. Le choix d’un enseignement ainsi que le type doit répondre prioritairement à cet impératif. Nous avons précédemment souligné les propos de l’UNESCO (2009) en terme d’inclusion. Toujours selon l’UNESCO, « l’intégration est un processus sans fin dans lequel les enfants et les adultes handicapés ou malades ont la possibilité de participer pleinement à toutes les activités de la communauté mises à la disposition de ceux qui n’ont pas de handicap ». L'intégration scolaire devrait permettre à certains enfants de recevoir une partie ou la totalité de leur enseignement dans des classes d’enseignement ordinaire. Rachel Sermier, collaboratrice à l’Institut de Pédagogie Curative de l’Université de Fribourg, citée dans une analyse de l’UFAPEC (2012), la définit comme l’enseignement en commun d’enfants en situation de handicap et d’enfants dits normaux dans le cadre de classes ordinaires tout en leur apportant le soutien nécessaire (pédagogique et thérapeutique) pour faire face aux besoins spécifiques, dans leur environnement, sans avoir recours à la séparation scolaire. L’intégration est une mesure pédagogique qui est appliquée en garantissant une prise en charge adéquate et individualisée de tous les enfants. Elle a pour but une intégration optimale dans notre société (p.18). Dans une vision collaborative, l’expérience de l’enseignement spécialisé est mise au service de l’enseignement ordinaire afin de répondre aux besoins spécifiques des élèves bénéficiant de ce processus. Ils poursuivent dès lors leur scolarité dans l’enseignement ordinaire tout en bénéficiant, en fonction de leurs besoins, d’un accompagnement de l’école spécialisée. En effet, lorsqu’un élève est intégré, des périodes d’accompagnement par du personnel de l’enseignement spécialisé sont octroyées à raison de maximum 4 périodes par semaine dans l’enseignement fondamental. Le personnel accompagnant l’élève intégré relève du personnel de l’enseignement spécialisé. Il est sélectionné en fonction des besoins spécifiques de l’élève. Il peut s’agir d’un membre de l’équipe éducative : enseignant(e), éducateur (trice), paramédical(e). Il travaille en collaboration avec l’école d’enseignement ordinaire. Dès lors et afin de garantir cette prise en charge adéquate et individualisée, en Belgique, l’intégration se veut un travail de collaboration entre les directions et les équipes pédagogiques de deux 17 écoles, l’une spécialisée et l’autre ordinaire. Les CPMS5 (Centres Psycho-Médico-Sociaux) respectifs sont eux aussi associés à la procédure, au projet d’intégration défini par les partenaires. Cette collaboration nécessite la mise en place d’un protocole d’intégration dans lequel notamment les modalités d’accompagnement et le choix du personnel sont définis. Detraux (2000) souligne les exigences de l’intégration et précise que « celles-ci touchent tant l’enfant handicapé que ses pairs, ses parents, ses enseignants et ses thérapeutes » (p.30). Selon l’auteur, l’intégration invite ces différents acteurs au partenariat. Chacun d’entre eux ayant sa propre vision de l’enfant et de son évolution, ils sont enclins à partager celle-ci avec les autres, au service d’un objectif commun centré sur le bien-être et le développement de l’enfant. L’importance de la collaboration avec les parents est dès lors avancée. Ceux-ci sont porteurs du projet, étant seuls à détenir le choix de fréquentation de leur enfant dans l’enseignement ordinaire. Ils doivent avoir connaissance des moyens mis en place au sein de l’établissement scolaire pour permettre à leur enfant d’acquérir des compétences tout en tenant compte de ses besoins mais aussi de ses potentialités. S’appuyant sur la reconnaissance de l’expertise propre de chaque acteur, ce partenariat demande l’instauration d’un cadre de référence mais aussi d’un climat de confiance réciproque. Au cœur de ce partenariat se situe le projet qui relie et crée du sens. A la lecture de ce dernier paragraphe, nous percevons l’importance du cadre légal légiférant l’intégration des élèves issus de l’enseignement spécialisé dans l’enseignement ordinaire en terme d’organisation et de collaboration. Celui-ci vous est présenté à présent. 5 Un CPMS (Centre Psycho-Médico-Social) est lieu d'accueil, d'écoute et de dialogue où le jeune et/ou sa famille peuvent aborder les questions qui les préoccupent en matière de scolarité, d'éducation, de vie familiale et sociale, de santé, d'orientation scolaire et professionnelle, etc. Il est à la disposition des élèves et de leurs parents, dès l'entrée dans l'enseignement maternel et jusqu'à la fin de l'enseignement secondaire. Son équipe est composée de psychologues, d'assistants sociaux, d'infirmiers. Un médecin est également attaché à chaque Centre PMS. 18 1.3.1 Cadre légal A la lecture de ce qui précède, nous pouvons constater que l’intégration des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire a bénéficié d’une évolution juridique favorable. Si le décret organisant l’enseignement spécialisé, du 3 mars 2004, accorde des moyens à l’enseignement spécialisé pour accompagner l’intégration des élèves relevant notamment du type 7 (pour les élèves atteints de déficience auditive) dans l’enseignement ordinaire, le décret portant des dispositions en matière d'enseignement spécialisé et d'accueil de l'enfant et de l'adolescent à besoins spécifiques dans l'enseignement obligatoire, du 5 février 2009, apporte une perspective élargie à tous les élèves des huit types de l’enseignement spécialisé. Ce décret fixe non seulement un cadre légal mais offre également des moyens à l’enseignement spécialisé permettant l’organisation de l’intégration des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire. Lesdits moyens sont notamment l’octroi de périodes complémentaires, la mise en œuvre de conseils de classe, l’organisation élargie et modifiée de l’intégration, les modalités d’élaboration d’un protocole d’intégration et de son évaluation. Ce décret prévoit au travers de ses différentes mesures de reconnaitre, d’aider, de soutenir et d’organiser l’intégration scolaire. Ainsi, il impose à tous les établissements scolaires ordinaires la notification dans leur projet d’école des mesures mises en place afin d’intégrer les enfants à besoins spécifiques. Dans le décret définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre (2008), il est signifié en l’article 67 que le projet d’établissement « fixe les choix pédagogiques et les actions prioritaires mises en œuvre pour favoriser l'intégration des élèves issus de l’enseignement spécialisé ». Le projet d’intégration se veut propre à chaque enfant, en fonction de ses besoins. Le législateur a donc prévu quatre types d’intégration. Le tableau 1 résume les quatre types d’intégration prévus par le législateur tant pour les écoles fondamentales que secondaires. 19 Tableau 1: Types d’intégration prévus par le législateur Intégration temporaire Intégration permanente L’enfant fréquente l’enseignement ordinaire pour y suivre tous les totale cours tout en bénéficiant d’un accompagnement assuré par l’enseignement spécialisé. L’enfant est inscrit dans l’enseignement spécialisé. Il suit certains cours partielle dans l’enseignement ordinaire pendant toute l’année scolaire. Il peut aussi bénéficier d’un accompagnement assuré par l’enseignement spécialisé. L’enfant est inscrit dans l’enseignement spécialisé. Il fréquente tous les totale cours de l’enseignement ordinaire durant une partie de l’année scolaire. Des prolongations sont possibles. L’élève est inscrit dans l’enseignement spécialisé. Il fréquente une partielle partie des cours dans l’enseignement ordinaire, le reste en enseignement spécialisé et cela durant une partie de l’année scolaire. Ce nouveau cadre légal engendre l’expansion de l’intégration des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire, augmentant dès lors le nombre d’écoles collaborant mais aussi le nombre d’élèves intégrés. Force est aujourd’hui de constater que l’intégration prend de plus en plus d’ampleur dans le milieu scolaire. Afin de favoriser ce processus d’intégration, les établissements scolaires ordinaires et spécialisés se voient rapprochés. Une réelle évolution s’opère pour aller à la rencontre de l’autre avec ses richesses mais également ses limites. 1.3.2 Richesses et limites de l’intégration Houssonlonge, Lontie et Pierard (2011) voient l’intégration comme une chance pour l’élève à besoins spécifiques. Ils émettent cependant une réserve en précisant qu’elle ne peut s’organiser « n’importe comment ni à n’importe quel prix » (p.21). Les auteurs précisent qu’ « il ne suffit pas d’accueillir l’élève et encore moins de gommer sa différence » (p.21). Avant le décret organisant l’enseignement spécialisé, certains élèves faisaient l’objet d’intégration qu’ils qualifient de « sauvage ». En effet, ces intégrations s’organisaient, non 20 seulement sans moyen supplémentaire nécessaire à l’encadrement de ces élèves, mais également sans réflexion approfondie et concertée des besoins pédagogiques. « Si ces jeunes étaient intégrés socialement, les résultats en termes d’apprentissages cognitifs n’étaient pas toujours à la hauteur des attentes » (Houssonlonge, Lontie et Pierard, 2011, p.21). L’intégration se veut un projet personnalisé pour chaque élève nécessitant la libre adhésion des divers partenaires. Cette chance, les recherches menées dans le domaine de l’intégration en milieu scolaire la situent dans les bienfaits qu’en retirerait l’élève à besoins spécifiques. De plus, Detraux (2012) expose dans un article traitant des enjeux de l’intégration scolaire d’enfants déficients en milieu non spécialisé que cette intégration profiterait aussi aux élèves de l’enseignement ordinaire tout comme aux enseignants de l’enseignement spécialisé et à ceux de l’enseignement ordinaire mais également à la société de manière générale. D’après l’auteur, l’intégration serait profitable pour l’élève ayant des besoins spécifiques lui apportant une meilleure image et estime de soi. Il apprendrait également à développer son autonomie. A travers la rencontre des autres élèves, il pourrait construire et/ou élargir son réseau social. Des améliorations au niveau du langage, du développement social et de la motricité seraient observées chez les enfants bénéficiant de ce processus d’intégration. La stimulation au contact des autres élèves constituerait aussi un apport. Pour les enfants relevant de l’ordinaire, ils développeraient une tolérance plus importante face aux différences ainsi que des attitudes positives face au handicap de leur camarade de classe. Dans ce sens, ce processus permettrait d’endiguer les stéréotypes permettant une meilleure compréhension visant l’acceptation de l’autre ainsi que la démystification du handicap et de la maladie. Ces enfants pourraient également bénéficier des aides pédagogiques mises en place pour l’enfant à besoins spécifiques. Ce processus d’intégration serait aussi vécu positivement par la famille. Houssonlonge, Lontie et Pierard (2011) précisent que le principal souhait des familles gravite autour du projet de vie de leur enfant. Elles sont en attente d’une véritable intégration sociale présente et future espérant ainsi éviter certains effets négatifs éventuellement liés à la fréquentation de l’enseignement spécialisé tel que le stigmate ou la ségrégation scolaire. Les auteurs ajoutent 21 que si le but de l’intégration n’est pas que tous les enfants maitrisent des compétences similaires au terme de leur scolarité, il importe néanmoins qu’ils aient progressé au meilleur de leurs potentialités. En effet, comme le soulignent les auteurs de l’Avis 127 du Conseil supérieur de l’enseignement spécialisé (2007) sur l’intégration des élèves à besoins spécifiques, « l’élève à besoins spécifiques a droit à une École […] qui privilégie le regard sur l’élève plutôt que sur […], les matières à enseigner, les techniques à acquérir » (p.1). Dans ce sens, la législation en vigueur prévoit que le projet d’intégration reprenne notamment les objectifs visés pour l’élève ainsi que les éventuelles dispenses au programme de l’enseignement ordinaire. Partenaires essentiels de l’équipe éducative dans la démarche d’intégration scolaire de leur enfant au sein de l’enseignement ordinaire, les parents sont indispensables afin de mener à bien ce projet. En tant que premiers éducateurs de l’enfant, ils perçoivent ses besoins tout comme le potentiel de leur enfant. Toujours selon Detraux (2012), notons qu’un projet d’intégration serait également enrichissant pour les enseignants. D’une part, les enseignants de l’enseignement ordinaire découvriraient et développeraient des méthodes inédites, d’autre part, l’expérience pour de ceux de l’enseignement spécialisé en serait valorisée. Si nous évoquons principalement le point de vues des capacités scolaires et des compétences à maitriser, il ne faut cependant pas négliger l’importance de l’aspect social nécessaire à la réussite de l’intégration. Différentes études analysées par Doumont et Rose (2007) démontrent que des enfants avec différents types de handicaps trouvent difficile l’intégration en classe ordinaire. Parmi les difficultés relevées, les auteurs relèvent celle de se faire des amis ou la non intégration dans les jeux spontanés. La recherche-action menée par Desmet, Schmitz, Van Reybroeck, Nader, Frenay et Bragard (2016, p.63), ayant pour objectif de mettre en avant les facteurs facilitateurs et les obstacles à la réussite des projets d’intégration d’élèves à besoins spécifiques, prouve le faible sentiment d’affiliation aux autres élèves en dehors de la classe. L’intégration représente une réponse possible parmi d’autres pour les élèves ayant des besoins spécifiques. Elle n’incarne pas la solution idéale pour tous les élèves compte tenu de 22 la disparité des capacités. Ces dernières représentent un baromètre non négligeable au moment du choix de l’orientation scolaire. De part leur situation de handicap, certains enfants présentent des besoins tellement spécifiques qu’ils ne peuvent fréquenter l’enseignement ordinaire, celui-ci ne pouvant répondre à leurs besoins. Dès lors, l’intégration ne peut être généralisée à tous ou planifiée sur l’intégralité d’une scolarité. Il s’agit d’un projet individuel, construit pour l’élève et uniquement si ce processus parait réalisable et bénéfique. Enseignement spécialisé ou intégration scolaire dans l’enseignement ordinaire, l’unique priorité est de choisir le type d’enseignement qui répondra au mieux aux besoins de l’enfant. Cette approche du concept d’intégration implique que les enfants atteints de déficience auditive intégrés soient aptes à répondre aux exigences d'un enseignement qui ne leur est pas spécifiquement adapté. Un soutien pédagogique approprié demeurerait cependant nécessaire (Le Capitaine, 2004, p.111). 1.3.3 L’intégration d’enfants déficients auditifs Avant d’entrer plus en avant dans le domaine spécifique de l’intégration des enfants déficients auditifs sur lequel porte notre recherche, nous nous attardons sur quelques chiffres donnés par le cabinet de la ministre de l’enseignement obligatoire6. Ceux-ci donnent à voir la mise en place et le suivi de 1626 élèves issus de l’enseignement primaire en intégration en 2016-2017. Le tableau 2 illustre la répartition de ces élèves selon le type d’intégration. Parmi ceux-ci, 111 élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7 (présentant une déficience auditive) sont intégrés dans l’enseignement ordinaire. Ces chiffres sont en augmentation constante depuis plusieurs années. Tableau 2 : Répartition des élèves intégrés dans l’enseignement primaire ordinaire selon le type d’intégration Types d’intégration Intégration Intégration Intégration Intégration permanente temporaire permanente temporaire totale totale partielle partielle 1004 594 27 1 Nombre d’élèves de primaire suivis en intégration 6 Chiffres issus de Pierard (2017) 23 Le Bureau International d’Audiophonologie7 (BIAP) dans sa recommandation 15/1 (1985) explicite divers paramètres à envisager lors d’une éventuelle intégration scolaire d’un enfant atteint de déficience auditive dans une classe d’entendants. Ceux-ci vont des caractéristiques audiologiques de l’enfant - avec et sans aide prothétique auditive - aux conditions d’accueil en milieu scolaire et parascolaire pour entendants en passant par le moment de la prise en charge de l’enfant atteint de déficience auditive par une équipe audiophonologique spécialisée, le profil médico-psycho-pédagogique de l’enfant et son environnement (familial, social). La nécessité de textes officiels s’est dégagée de la mise en exergue de l’étude de ces paramètres. Ils apparaissaient comme indispensables à la mise en place, la poursuite et la réussite de l'intégration. Ainsi, la recommandation 15/2 du BIAP (1995) liste les dispositions légales nécessaires en vue de l’intégration. De plus, « pour que l’intégration se poursuive efficacement », les dispositions proposées prévoient : - l’aménagement d’un soutien pédagogique spécialisé répondant aux besoins particuliers de l’élève ; - le suivi par l'équipe audiophonologique spécialisée ; - l'aide éventuelle d'un interprète, d'un codeur et/ou d'un preneur de notes ; - la participation des familles au processus d'intégration scolaire de leur enfant ; - l'utilisation de toutes les aides techniques jugées nécessaires ; - la possibilité d'adapter le cursus scolaire. Enfin, une attention particulière est apportée aux conditions de l'évaluation des acquisitions scolaires de l'enfant déficient auditif en prévoyant des moyens adaptés à sa situation de handicap. Lesdits moyens et aides techniques seront explicitées dans le chapitre 3 consacré aux pratiques pédagogiques. 7 Le BIAP (Bureau International d'AudioPhonologie) est un bureau formé de professionnels internationaux dans les disciplines reprises dans la définition de l'Audiophonologie. Sa mission est de faire appel à des experts internationaux pour donner leur avis, participer à l'élaboration et à la rédaction de recommandations qui seront ensuite largement diffusées par le secrétariat du BIAP. Ces recommandations constituent des documents de grande valeur auxquels les intéressés pourront se référer pour faire adapter dans leurs pays respectifs, lois, arrêtés ou règlements. 24 Chapitre 2 – La déficience auditive Il nous importe dans ce chapitre de nous approprier le monde et les spécificités de la surdité. En effet, nous intéressant au contexte de l’intégration des enfants déficients auditifs dans l’enseignement ordinaire et avant d’entamer le chapitre destiné aux pratiques pédagogiques, il nous faut avant tout appréhender la diversité des contextes de la surdité. Chaque enfant déficient auditif possède des caractéristiques propres dont il est indispensable de tenir compte afin, d’une part, d’analyser ses besoins et d’autre part de lui apporter la meilleure solution d’enseignement possible. La généralisation ne nous semble dès lors pas envisageable dans ce domaine. La prise en compte de divers paramètres s’impose. Après la contextualisation du terme « déficience auditive », nous développerons les différents types et degrés de surdité. Nous évoquerons ensuite diverses techniques de réhabilitation de l’audition pour terminer par la communication. Ce chapitre se veut basique, la surdité ne se limitant pas au fonctionnement de l’organe auditif et aux moyens de communication. En effet, elle se caractérise également par l’histoire des sourds, leur culture, etc. Nous ne pouvons cependant aborder tous ces points dans le cadre de ce travail. 2.1 Contextualisation du terme Pour Jaccaud (2009), la déficience auditive est un terme qui regroupe une infinité de situations particulières selon le type de surdité. En effet, différents types existent selon l’étiologie, la localisation (définies comme surdité de transmission, de perception ou mixte) et le degré de perte auditive (légère, moyenne, sévère ou profonde). C’est notamment pour cette raison que la littérature traite de surdités ou de déficiences auditives au pluriel. Virole (2006) définit la surdité comme « la conséquence d’une atteinte pathologique de la fonction auditive » (p.69). En plus des caractéristiques précitées, les enfants sourds se différencient selon l’âge d’apparition de leur déficience, le type d’appareillage (appareils auditifs, implants cochléaires, etc.) mais également l’âge auquel ils ont été appareillés. Les conséquences de la surdité sont donc variables d’un enfant à l’autre (Jaccaud, 2009). Nous vous invitons dès lors 25 à découvrir la diversité et les paramètres sous-jacents en abordant les types et degrés de surdité, la réhabilitation de l’audition pour terminer par la communication. 2.2 Les types de surdité Trois types de surdité sont répertoriées (cf. Tableau 3): la surdité de transmission, la surdité de perception et la surdité mixte. Tableau 3 : Types de surdité, leur(s) origine (s) et leur conséquence Type de Origine(s) surdité Perte auditive transmission Surdité de Atteinte des organes de transmission : La perte auditive varie de 20 dB à conduit auditif externe et oreille moyenne. L’oreille interne est intacte et perçoit une n’occasionne pas de distorsions et vibration sonore transmise par voie peut être traitée par médication ou osseuse. chirurgie. Surdité de perception Secondaire à une mauvaise perception du son au niveau de l’oreille interne (cochlée) ou du système nerveux auditif (surdité neurosensorielle). L’oreille externe et l’oreille moyenne sont intactes et transmettent bien la vibration sonore de l’extérieur vers le liquide de l’oreille interne. Surdité mixte 50 dB. Le plus souvent, cette surdité Associe difficulté de transmission et de perception. Chez l’enfant, une surdité de transmission aggrave souvent une surdité de perception. La perte auditive peut varier de 20 dB à 100 dB et au-delà. Elle ne peut actuellement être traitée par médication ou chirurgie. Elle peut être compensée partiellement par le port d’une prothèse auditive ou largement par un implant cochléaire. 26 2.3 Les degrés de surdité Selon le Bureau International d’Audiophonologie (1997), « les déficiences auditives sont dans la très grande généralité liées à une perte de la perception des sons ». Le BIAP propose une classification audiométrique des déficiences auditives (différents degrés de surdité) que nous reprenons dans le tableau 4. Tableau 4 : Classification audiométrique des déficiences auditives dans la Recommandations 02/1 du BIAP (1997) Degré de surdité Perte tonale moyenne Normale Légère < 20 dB Perception de la parole et/ou du bruit Aucune difficulté de perception. La parole est perçue à voix normale, elle est 21 à 40 dB difficilement perçue à voix basse ou lointaine. Moyenne Sévère Profonde 1er degré 41 à 55 dB 2ème degré 56 à 70 dB (cophose) La parole est perçue si on élève la voix. Le sujet comprend mieux en regardant parler. Quelques bruits familiers sont encore perçus. 1er degré 71 à 80 dB La parole est perçue à voix forte près de l’oreille. 2ème degré 81 à 90 dB Les bruits forts sont perçus. 1er degré 91 à 100 dB 2ème degré 3ème degré Totale La plupart des bruits familiaux sont perçus. 101 à 110 dB 111 et 119 dB > 120 dB Aucune perception de la parole. Seuls les bruits très puissants sont perçus. Rien n’est perçu. 27 2.4 La réhabilitation de l’audition Plusieurs techniques (Virole, 2006), prothétiques ou chirurgicales, offrent la possibilité d’améliorer l’audition des personnes sourdes. Tagger (2011) souligne cependant que même « une réhabilitation de qualité ne peut restituer une audition normale à une personne qui a une surdité sévère ou profonde » (p.9). Celles-ci diffèrent selon le type de surdité et le profil de la personne. Notons, entre autres : - la prothèse auditive qui se porte derrière (le contour) ou dans l'oreille (l’intra). Dans ce cas, les sons sont amplifiés et filtrés sur les fréquences importantes de la voix humaine. Ils sont transmis via le tympan dans l'oreille moyenne. - l’implant cochléaire nécessite une intervention chirurgicale. Celle-ci consiste à introduire dans l'oreille interne des électrodes recevant leurs impulsions d'un microprocesseur porté en externe. Cet appareil réagit directement sur le nerf auditif. Pour ne pas être gêné par le bruit environnant, un système FM peut être utilisé, permettant alors de recevoir la parole d'un interlocuteur privilégié directement dans la prothèse auditive ou l’implant cochléaire. 2.5 La communication De nombreuses améliorations ont été apportées au cours des dernières décennies dans les divers domaines de prise en charge des jeunes sourds. De ces avancées découle un regard nouveau porté sur leurs capacités communicationnelles. Il n’en demeure pas moins que l’apprentissage de la langue orale mais aussi écrite reste peu aisé pour un jeune sourd (Tagger, 2011). Le verbe communiquer revêt différentes significations. Communiquer, c’est faire passer quelque chose, transmettre, faire partager, faire savoir (Larousse, 2017). Communiquer, c’est également parler, rire, dessiner, écrire, faire des gestes pour exprimer quelque chose, etc. Communiquer, c’est aussi utiliser un langage. Tous les hommes ont un langage mais tous ne parlent pas la même langue pour autant. 28 Quand l’audition est efficiente, l’enfant apprend une langue orale inconsciemment. Pour un enfant sourd, cet apprentissage est compromis. Néanmoins d’autres outils lui permettent de communiquer avec son entourage. Il peut lire sur les lèvres en étant attentif aux mouvements des lèvres de son interlocuteur. On parle de lecture labiale. Cette technique reste difficile car certains sons se ressemblent tandis que d’autres sont imperceptibles pour les yeux. Dès lors, pour mieux se faire comprendre, l’interlocuteur peut soutenir le message à l’aide du Langage Parlé Complété8 (LPC) ou de l’Alphabet des Kinèmes Assistés9 (AKA). Il s’agit de codes manuels près du visage qui permettent de désambiguïser les sosies labiaux. Ces deux techniques permettent à la personne sourde de comprendre beaucoup plus de mots (les plus courts, les plus compliqués ou ceux qui se ressemblent). Il y a aussi la Langue des Signes. Cette langue a la particularité de se dire avec les mains, l’expression du visage mais aussi le corps. Comme toutes les autres langues, elle permet d’exprimer entre autres des idées, des désirs, des refus mais aussi des sentiments. L’alphabet en Langue des Signes est la dactylologie. Celle-ci sert à épeler les mots. 8 La LPC utilise 5 positions de mains pour les voyelles et 8 configurations de doigts pour les consonnes. L’AKA se compose de 5 configurations pour les voyelles et les semi-voyelles ainsi que de 8 configurations pour les consonnes. Leur combinaison constitue 32 signes différents. 9 29 Chapitre 3 - Les pratiques pédagogiques La recherche menée par Rey, Kahn, Coché, Puissant Baeyens et Robin (2006) fait état de la difficulté à décrire d’une manière exhaustive et très précise les pratiques des enseignants car : - elles ne se limitent pas aux activités devant la classe ; - elles sont confrontées à de nombreux dilemmes ; - elles sont l’objet d’une régulation difficile ; - elles ne sont pas toujours conscientes ; - elles reposent souvent sur un savoir d’expérience ; - elles sont dépendantes du contexte ; - elles se situent entre contrainte et autonomie. Par ailleurs, elles sont aussi instables et évolutives. (p.16) Altet (2000,) explique la pratique comme la manière de faire singulière d'une personne, sa façon réelle, propre d'exécuter une activité. La pratique, ce n'est pas seulement l'ensemble des actes observables mais cela comporte les procédés de mise en œuvre de l'activité dans une situation donnée par une personne, les choix, les prises de décision. (p.32) Le Capitaine (2004), dans le cadre qui est le sien et en lien avec ses recherches sur la scolarisation des enfants sourds, ajoute que, par pratiques pédagogiques, on entend « l’ensemble des dispositifs techniques mis en place par les enseignants pour que les enfants sourds et malentendants fassent leurs apprentissages dans le domaine des compétences scolaires prescrites (transversales ou disciplinaires) » (p.112). Dans la littérature scientifique, nous répertorions de nombreux facteurs facilitateurs de l’intégration dont certains liés aux approches pédagogiques. Si la préparation à l’accueil de l’enfant intégré à laquelle fait référence Mingrone (1994) semble indispensable, Tamm et Prellwitz (2001) soulignent quant à eux la nécessité de prise en compte du développement global de l’élève au sein des activités pédagogiques. A la lecture de Le Capitaine (2004), Mingrone (1994), Odom, Vitztum, Wolery, Lieber, Sandall, Hanson & Horn (2004) et Tremblay (2012), nous percevons que l’intégration scolaire d’élèves issus de l’enseignement 30 spécialisé et notamment du type 7 implique des changements au niveau des pratiques pédagogiques mais également au niveau de l’attitude de l’enseignant. Ainsi, d’une part, plusieurs approches pédagogiques paraissent à privilégier telles que notamment la différenciation et l’adaptation pédagogique que nous définirons au point 2 de ce chapitre. D’autre part, une série de stratégies relevées par Lesain-Delabarre (2000) semblent profitables au développement professionnel des enseignants ordinaires en charge de ces élèves. Notons, entre autres, la coopération, la mobilisation des ressources, la formation du personnel. La mise en œuvre de pratiques pédagogiques adaptives, telle que le soulignent Gombert, Feuilladieu, Gilles et Roussey (2008), bouscule l’enseignant dans sa manière de concevoir la prise en charge des élèves présentant des difficultés d’apprentissages au sein de sa classe. Ils ajoutent que « la prise en charge scolaire d’un élève en situation de handicap n’interroge donc pas seulement le métier d’enseignant en termes de connaissances et de compétences […], elle interroge aussi l’identité professionnelle de l’enseignant (sa conception du métier, ses représentations de l’élève et des savoirs) ». Dans un premier temps, nous distinguons la différenciation des adaptations. Nous ciblons ensuite des réponses pédagogiques adaptives au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés dans les classes ordinaires. 3.1 Pratiques pédagogiques : différenciation et adaptation Tout enseignant doit, si on se réfère au décret définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre du 24 juillet 2015 permettre « à chaque élève de progresser à son rythme en pratiquant l'évaluation formative et la pédagogie différenciée ». L’article 5 de ce même décret fournit une définition de la pédagogie différenciée. Il s’agit d’ « une démarche d'enseignement qui consiste à varier les méthodes pour tenir compte de l'hétérogénéité des classes ainsi que de la diversité des modes et des besoins d'apprentissage » (paragr. 12). La pratique de la différenciation est donc particulièrement adaptée pour accueillir au mieux les 31 enfants issus de l’enseignement spécialisé dans les classes ordinaires car elle permet de prendre en compte les particularités d'un élève ou d'un groupe d'élèves dans le but d’un apprentissage optimal. Dans cette partie, nous nous attachons à distinguer la différenciation des adaptations. Alors que l’enseignant de la classe ordinaire est au centre du système, l’enfant représente l’acteur du changement potentiel. Lantier (1994) explique que la présence d’un enfant handicapé produit des changements dans la perception des enfants et dans l’attitude pédagogique à l’égard de tous les élèves, en particulier de ceux qui ont le plus de difficultés, allant dans le sens d’une meilleure reconnaissance et prise en compte des enfants dans leur individualité (p.233). Nootens et Debeurne (2010) distinguent les adaptations générales et les adaptations spécifiques. Ils considèrent ces deux aspects comme « essentiels et complémentaires à l’adaptation de l’enseignement » (p.10). Les adaptations générales, qu’ils apparentent à la différenciation: - sont à l’intention du groupe classe hétérogène ; - s’adressent potentiellement à tous les élèves ; - demandent une souplesse / une flexibilité des modalités pédagogiques ; - offrent des objectifs d’apprentissage et / ou des critères d’évaluation identiques pour tous les élèves. Les adaptations spécifiques, qui rejoignent la notion d’individualisation : - sont à l’intention d’un élève en difficulté ; - demandent des aménagements pédagogiques ; - offrent des objectifs d’apprentissage et des critères d’évaluation modifiés ou non selon les caractéristiques et les besoins de l’élève. Au-delà de la différenciation et de l’adaptation que nous développons dans les points suivants, l’élève à besoins spécifiques peut également avoir besoin d’un soutien individualisé et personnalisé prodigué par des spécialistes. Selon ses besoins, ce soutien est plus ou moins intense et fréquent. Nous ne développerons pas ce type de soutien dans le cadre de ce travail. 32 3.1.1 Différenciation pédagogique Le concept de différenciation pédagogique parait une idée surannée tant dans le domaine des politiques éducatives que des pratiques pédagogiques. Nous avons parcouru plusieurs approches de la différenciation pédagogique, partant de Burns à Przesmycki, en passant par Caron, Meirieu et Perrenoud. Très présente dans la littérature scientifique des années 19801990, la théorie de la pédagogie différenciée se précise au fil du temps. Elle est présentée comme réponse à une hétérogénéité bousculant les pratiques d’enseignement, pour pallier les inégalités entre élèves. Nous découvrons également qu’originellement, elle était prônée pour répondre à une volonté de centration sur l’élève plutôt que sur les savoirs (Feyfant, 2016). Pour Perrenoud (1997), différencier « c’est organiser les interactions et les activités d’enseignement de façon telle que chaque élève se trouve, aussi souvent que possible, dans des situations d’apprentissage fécondes pour lui » (p.9-10). Plus tard, Perrenoud (2005) ajoute que « différencier, c'est combattre l’indifférence aux différences ». Il précise ce qu’il entend par une situation féconde […]. C'est-à-dire une situation : - qui ne menace pas son identité, sa sécurité, sa disponibilité mentale ; - qui a du sens, le mobilise, lui lance un défi ; - qui se situe dans sa zone de proche développement, autrement dit est maîtrisable au prix d'un apprentissage accessible, avec un étayage didactique. (p.7). Désormais, la différenciation pédagogique s’impose comme réponse à la volonté d’amener tous les élèves à l’acquisition d’un socle commun de connaissances et de compétences. La pédagogie différenciée nécessite donc une façon spécifique d’entrevoir ou de penser l’enseignement. Concrètement, elle ne relève pas d’une technique à appliquer. Il ne s’agit pas non plus d’une méthode. Elle s’apparente plutôt à une démarche. Pour l’enseignant, celle-ci l’amène à affiner ses conceptions de l’enseignement, à réguler ses interventions avant, pendant et après tout apprentissage. L’évaluation formative étant un moyen au service de cette régulation. La différenciation pédagogique remet en question son attitude face à l’hétérogénéité. Elle invite l’enseignant non seulement à analyser mais également à ajuster sa pratique pédagogique tout comme l’environnement d’apprentissage. Il est ainsi enclin à tester 33 sa capacité à mobiliser l’ensemble des ressources à sa disposition dans l’objectif de favoriser l’acquisition ou le développement de compétences chez les élèves tout en tenant compte de leurs prédispositions et de leurs caractéristiques singulières. Si cette approche pédagogique est à l’opposé de la standardisation, elle est aussi à l’antipode des approches uniques applicables à tous de la même façon et au même moment. La différenciation est donc une réponse possible à certains besoins des élèves à besoins spécifiques. Néanmoins, d’autres besoins nécessitent d’autres stratégies telles que l’apport d’adaptations spécifiques. En effet, selon Allal et Mottier Lopez (2005, p.245), l'intégration de différentes formes de régulation interactive au sein d'une activité pédagogique permet d'adapter continuellement l'apprentissage au fur et à mesure de manière à contribuer à la progression de l'apprentissage des élèves à travers la fourniture de commentaires, de conseils qui stimulent leur participation à chaque étape de l'enseignement. 3.1.2 Adaptations pédagogiques Dans le premier chapitre, nous faisions référence à Thomazet (2008, p.5) en rapport à l’ « évolution commune de nombreux pays » que l’auteur regroupait en trois périodes successives. Pour rappel, le modèle « ségrégationniste » a fait place au modèle « intégratif » qui lui-même évolue progressivement vers le modèle « inclusif ». Lentement, tous les établissements scolaires sont amenés à accueillir tous les enfants sans discrimination. De plus, ils ont le devoir de s’adapter à leurs besoins éducatifs particuliers 10. Si la notion de besoins éducatifs particuliers (BEP) provient initialement du champ de l’enseignement spécialisé ainsi que tout le lexique associé (aménagement, accessibilité, adaptation), il faut néanmoins reconnaître qu’elle s’étend aujourd’hui à la prise en compte de tous les élèves à besoins spécifiques (Thomazet, 2012). 10 Nous appelons besoins éducatifs particuliers (special educational needs), les besoins d’élèves qui, lorsque les pratiques d’intégration scolaire ne sont pas mises en place, les conduisent vers des dispositifs ségrégatifs (Whitworth, 1999). Ce terme rassemble donc les élèves ayant besoin d’une adaptation de l’enseignement, du fait d’une déficience (motrice, sensorielle), d’un trouble ou d’un retard mental mais aussi, plus généralement, tout élève qui, du fait de ses difficultés, peut se trouver exclu des parcours ordinaires de scolarisation. (Thomazet, 2008, p.124) 34 La législation prévoit que tout élève en situation de handicap a droit à des aménagements raisonnables dans l’enseignement 11 . La notion d’aménagement est souvent associée à la notion d’accommodement raisonnable. Tremblay (2013) reprend la définition de Raymond (2012) qui définit l’accommodement raisonnable comme une « obligation juridique de contrer la discrimination en accordant à un individu un traitement différencié pour lui permettre d’atteindre la pleine participation scolaire [ou sociale] » (p.4). Pour Desmet et al. (2016), « une adaptation consiste à apporter un changement au sein du processus d’enseignement / apprentissage qui ne modifie pas le niveau d’exigence pour la tâche » (p.19). Des gestes pédagogiques plus adaptés constituent dès lors un moyen de compensation supplémentaire. Il s’agit de rendre l’accès aux savoirs et aux connaissances accessible pour tous grâce aux adaptations pédagogiques, l’accessibilité pédagogique étant un objectif et l’adaptation pédagogique un moyen (Gombert et al., 2008). Par exemple, pour l’adaptation d’une consigne écrite de français pour un élève présentant des difficultés en planification, l’objectif se situe dans la remobilisation des savoirs sur les fonctions grammaticales tandis que les moyens sont l’indexation des tâches et la simplification de l’écriture. Gombert et Roussey (2007) ont élaboré une « typologie des gestes d’aide » (onze gestes d’adaptation pédagogique). Celle-ci a été élaborée dans le cadre d’une recherche relative à la nature des gestes d’étayage des enseignants. Le tableau 5 présente chaque catégorie et sa définition. Notons que les auteurs ont également montré que l’adaptation de certaines pratiques enseignantes ne relève pas de l’élaboration de solutions exceptionnelles mais plutôt de gestes élémentaires. 11 Le décret de la Communauté française du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination s’applique en matière d’enseignement (fondamental, secondaire, supérieur, promotion sociale, ...) définit entre autres, les aménagements raisonnables. Il prévoit également que le refus d’aménagement raisonnable est une discrimination. Le décret de la Région wallonne du 6 avril 1995 relatif à l’intégration des personnes handicapées définit entre autres, les mesures d’adaptation et les mesures d’intégration au profit des personnes handicapées. 35 Tableau 5 : Typologie de gestes d’aide selon Gombert et Roussey (2007) dans Gombert et al. (2008). Catégories et définitions 1. Cadre de travail (énoncés mettant l’accent sur une modification des conditions matérielles de travail dans la classe) : • Placement de l’élève ; • Aménagement des conditions matérielles (utilisation d’outils spécifiques et adéquats pour contourner le handicap, aménagements visibles). 2. Adaptation de la prescription (énoncés dont l’idée témoigne d’une réflexion de l’enseignant sur la prescription, c’est-à-dire les consignes de mise au travail) : • Consignes prises en charge par l’enseignant ; • Consignes prises en charge par les élèves. 3. Adaptation des moyens (différenciation pédagogique) : aides propres à compenser le handicap spécifique ou résultant de difficultés associées (lenteur d’exécution, non-autonomie cognitive). Il s’agit ici, à objectif commun, de prendre en compte la particularité de l’élève concerné en aménageant les conditions pour y parvenir. • Adaptations en rapport à l’activité : contournement de l’activité et/ou adaptation des supports; • Adaptation en rapport au temps de travail ; • Modification du style pédagogique de l’enseignant. 4. Adaptation des parcours : regroupe les énoncés qui mettent l’accent sur la mise en place d’une individualisation de l’enseignement, c’est-à-dire, autoriser l’élève à ne pas faire la même chose que ses camarades. • Réduction de la somme des savoirs ou des notions à faire acquérir ; • Choix de matières à enseigner. 5. Aide des pairs de la classe vers l’élève à besoins spécifiques (aide institutionnalisée). • Travail en groupe ; • Mise en place de tutorat. 36 6. Guidance et contrôle individualisé de l’enseignant lors de la réalisation d’une tâche : regroupe les énoncés qui témoignent d’une aide individualisée conduite par l’enseignant pendant son cours ou d’un « regard/contrôle » plus important du travail de l’élève en cours de réalisation. 7. Apports méthodologique et métacognitif : regroupe les énoncés qui témoignent d’un travail effectué dans le domaine des compétences transversales ou métalinguistiques, qui a pour fonction de «signaler les caractéristiques déterminantes » pour la réalisation d’une tâche (Bruner, 1996). Exemple : Verbalisation des étapes du travail à réaliser 8. Adaptation à l’évaluation : regroupe les énoncés qui témoignent d’une modification des gestes propres à évaluer l’élève que ce soit au moment des contrôles ou lors de la notation elle-même. • Dans la réalisation du contrôle ; • Dans la notation. 9. Revalorisation de l’élève : regroupe les énoncés qui témoignent d’un travail effectué propre à revaloriser, motiver l’élève en difficulté. 10. Absence d’adaptation. 11. Réponses inclassables : regroupe les réponses des enseignants déclarant ne pas avoir adapté leurs méthodes d’enseignement ou ne pouvant pas être classées car trop imprécises. Nous venons de distinguer la différenciation des adaptations mais également d’en percevoir leurs caractéristiques propres. Nous posons à présent la question de savoir ce qu’il en est pour l’élève déficient auditif. Quelles réponses pédagogiques adaptives sont mises en œuvre ? 37 3.2 Réponses pédagogiques adaptives Pour les élèves déficients auditifs, la difficulté de la scolarisation en enseignement ordinaire se pose moins en termes d’aménagements techniques qu’en termes de communication. Dans les écoles francophones belges ne pratiquant pas l’immersion linguistique, l’enseignement de toutes les disciplines est véhiculé par une langue, le français. Les efforts d’adaptation sont partagés entre tous les partenaires : l’école, les enseignants, les élèves déficients auditifs et les autres. Différents niveaux d’adaptation peuvent être envisagés. Nous envisageons dans les lignes qui suivent des adaptations au niveau de la transmission des informations, du soutien pédagogique et de l’évaluation. Nous proposons ensuite des pistes d’actions concrètes à l’usage des enseignants. 3.2.1. La transmission des informations L’école spécialisée peut mettre à disposition un accompagnateur pédagogique formé à la langue des signes ou l’AKA. Il sert, en fonction du nombre de périodes d’accompagnement, d’interface ponctuelle entre l’enseignant et l’élève. L’enseignant formé peut soutenir son discours oral à l’aide de la langue des signes ou de l’AKA pour favoriser la compréhension de ses cours. Dans toutes les étapes de ses leçons, pour énoncer une consigne, communiquer une information, donner une explication ou transmettre des connaissances, l’enseignant utilise la voie orale. Si l’élève déficient auditif utilise la lecture labiale, avec ou sans un système FM, son attention est tellement mobilisée pour déchiffrer les informations que ses capacités de concentration s’épuisent rapidement. Des temps de pauses sont nécessaires pour comprendre le flux de données. Si l’élève sourd dispose du soutien d’un accompagnateur pédagogique, un décalage existe entre ce que dit l’enseignant aux autres élèves et ce que l’élève déficient auditif perçoit. Dans les deux cas, le rythme du discours informatif de l’enseignant est ralenti. Il s’agit dès lors pour l’enseignant de gérer cet écart de compréhension entre les élèves. C’est dans ce cadre que se jouent les mises en œuvre d’une pédagogie différenciée et d’adaptations pédagogiques. Parmi celles-ci sont explicitées ciaprès le fait de favoriser les situations de construction des connaissances, l’utilisation de 38 supports visuels, la gestion des échanges entre les élèves ou la conservation des traces d’apprentissages. Favoriser les situations de construction des connaissances Une adaptation possible est de choisir d’introduire les nouvelles notions à partir de situations sur lesquelles les élèves peuvent agir, concrètement ou mentalement. En effet, cette alternative permet de diminuer la part du langage dans les premières phases de l’apprentissage. « Placer les élèves sourds dans des situations qui ont du sens par rapport à la réalité et qui impliquent une démarche active, leur évite de se raccrocher à des indices linguistiques pour chercher à comprendre la notion visée, au risque de passer ainsi à côté de ses caractéristiques conceptuelles » (Duquesne, 2002, p.9). On observe alors chez eux des attitudes de type « imitation » qui s’effondrent lorsqu’on leur demande de transférer cette notion. Cette démarche pédagogique basée sur la construction des connaissances par les élèves plutôt que sur la transmission par l’enseignant a été mise en évidence par des chercheurs comme Tremblay et Charron (1992). Utiliser des supports visuels L’utilisation des supports visuels est une autre stratégie efficace. L’enseignant peut s’appuyer sur des documents écrits, des photos, des schémas, etc. Lorsque la lecture labiale ou la communication par signes est indispensable, la lecture ou l’analyse d’un support visuel en suivant simultanément les explications de l’enseignant sont compromises. L’usage de supports visuels semble donc opportun pour initier des travaux de recherche, susciter l’émission d’hypothèses ou favoriser des échanges. Gérer les échanges entre les élèves Si la communication avec l’enseignant importe, l’interaction avec les pairs est fondamentale également compte tenu de l’apport de celle-ci dans les apprentissages. Il importe de privilégier ces phases socioconstructivistes. Conserver des traces des apprentissages Puisque l’élève déficient auditif prend essentiellement les informations par le canal visuel, il 39 lui est difficile de noter simultanément le contenu du discours oral reçu. D’autres moyens pour garder des traces du travail effectué en classe sont donc indispensables (plan, schéma, organigramme). 3.2.2. Le soutien pédagogique L’originalité du dispositif d’intégration est de permettre également des temps d’intégration individuelle (ou à plusieurs) pour bénéficier de temps d’enseignements spécifiques selon ses besoins. Il peut alors être pris en charge par l’accompagnateur pédagogique afin d’améliorer son niveau de langue et enrichir son vocabulaire. L’accompagnateur pédagogique peut aussi profiter de ces moments pour mettre en place des activités de type méthodologique tels que la synthétisation sous forme de schémas, les apports disciplinaires (enrichissement du vocabulaire), etc. Cependant, Duquesne (2002) insiste sur l’importance des moyens, comme des temps de concertation pour les équipes et plus particulièrement de formation pour les enseignants, indispensables à la mise en œuvre de ces diverses adaptations. Il faut permettre aux enseignants de se professionnaliser afin d’être capables de répondre par des pratiques adaptatives, différenciées et efficaces aux besoins de tous les élèves. 3.2.3. L’évaluation Duquesne (2002) explicite que l’évaluation est reconnue parmi les adaptations les plus contraignantes. Une piste réside dans l’adaptation du temps de passation des épreuves dont, d’après l’auteur, peu d’enseignants s’expriment satisfaits. D’autres modalités d’évaluation devraient être envisagées. Il semble qu’il soit dès lors nécessaire d’engager une réflexion plus approfondie sur le sujet. De même, le panel des formes des productions évaluables devrait s’élargir vers l’utilisation de technologies plus visuelles à l’instar de la langue française, orale mais surtout écrite. 40 Chapitre 4 – Synthèse des apports théoriques La figure 3 présente la mise en lien des différents apports théoriques. La situation pédagogique dont il est question dans le cadre de ce travail se caractérise essentiellement par deux facteurs. D’une part, nous ciblons le contexte de l’intégration en enseignement ordinaire d’élèves issus de l’enseignement spécialisé, celui-ci organisant un accompagnement pédagogique en fonction de leurs besoins. D’autre part, nous visons le profil de l’élève en difficulté, à savoir les élèves déficients auditifs intégrés. Notre intérêt se porte sur les pratiques pédagogiques de classe mais également sur la différenciation et les adaptations spécifiques mises en œuvre à l’intention de l’élève en difficulté d’apprentissage. Divers facteurs tels que la collaboration, les ressources matérielles, les compétences professionnelles peuvent influer favorablement sur la mise en œuvre de ces adaptations. La typologie des gestes d’aide de Gombert & Roussey (2007) offre une perspective de catégorisation des énoncés concernant les pratiques pédagogiques d’aide à destination de l’élève intégré. Figure 3 : Synthèse de la partie théorique 41 Partie II - Approche empirique Comme nous l’avons spécifié dans la première partie, la variété des éléments théoriques investigués nous a permis de sélectionner les situations dans lesquelles nous avons recueilli des données les plus pertinentes. Nous avons mis en évidence le positionnement de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur la question de l’intégration, et plus particulièrement pour les élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7. Nous avons opéré un focus sur les pratiques pédagogiques et les dispositifs mis en place parallèlement à l’accompagnement pédagogique dont disposent ces enfants, à savoir la différenciation pédagogique et des adaptations. Notre attention se porte maintenant plus précisément sur deux types d’acteurs que sont les enseignants de l’ordinaire accueillant des élèves déficients auditifs en intégration dans leur classe et les accompagnateurs pédagogiques venant de l’enseignement spécialisé. Cette partie développe l’approche empirique en lien avec notre mémoire. Elle se subdivise en 3 chapitres. Le chapitre 5 explicite les fondements de notre méthodologie. Le chapitre 6 fait place aux résultats d’analyse des données recueillies dans le cadre de nos investigations. Nous discutons les résultats en lien avec la partie théorique dans le chapitre 7. Nous y abordons également les limites de cette étude. 42 Chapitre 5 – Fondements de notre méthodologie Afin d’étudier la nature des gestes professionnels d’aide des enseignants de l’ordinaire au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe, notre méthodologie se base sur l’approche de la Grounded Theory. Celle-ci se veut essentiellement inductive. En effet, comme l’explique Guillemette (2006), elle offre « la possibilité de développer méthodiquement une théorie ancrée dans des données analysées de façon systématique ». Cette recherche se veut une approche partielle et incomplète de ce qui se joue à travers le processus d’intégration scolaire des enfants déficients auditifs. Elle se définit plutôt comme une photographie de ce qui se joue au sein d’une réalité réduite et locale dans le cadre d’un environnement singulier. Dans ce chapitre, la question de recherche ainsi que les hypothèses sont présentées. Il est également question de l’approche méthodologique dans laquelle s’inscrit ce travail ainsi que de l’échantillonnage. Les critères de sélection des sujets ainsi que le profil des participants sont aussi explicités. En dernier lieu, les instruments de récolte de données ainsi que les modalités et étapes de leur traitement y sont présentées. 5.1 Question de recherche et hypothèses Prenant appui sur le cadre théorique explicité ultérieurement, notre question de recherche peut se libeller comme suit : « Dans quelle mesure les enseignants de l’ordinaire primaire adaptent-ils ou modifient-ils leur enseignement face aux élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe afin que ceux-ci progressent au meilleur de leurs potentialités? ». Explorer le champ des pratiques pédagogiques des enseignants accueillant des enfants déficients auditifs dans leur classe de l’enseignement ordinaire suppose d’examiner si des changements dans les pratiques s’opèrent mais aussi de considérer ce qui fonde ces modifications. 43 Nous cherchons à explorer et à comprendre le phénomène d’adaptabilité pédagogique des enseignants de l’ordinaire au sein du processus d’intégration d’élèves déficients auditifs. La visée de cette recherche est d’entrer plus en avant dans la connaissance de ce que font les enseignants au quotidien pour soutenir les élèves déficients auditifs en intégration dans leur classe. Notre travail a pour but d’aider les actuels ou futurs enseignants primaires dans une situation similaire. Si on se réfère au Larousse (2017), le terme « intégrer » trouve pour définition « faire que quelqu’un, un groupe ne soit plus étranger à une collectivité, qu’il s’y assimile ». Dès lors, que ces élèves feraient l’objet d’une démarche intégrative, ils seraient donc « étrangers », « hors de » l’enseignement ordinaire. Dans les situations d’intégration, leur qualité d’enfants « étrangers » serait assimilée à leur singularité, celle d’enfants souffrant d’une déficience auditive. Le profil de l’élève en difficulté (Postic, 1992) est dès lors associé à l’élève déficient auditif intégré tandis que les ressources humaines se matérialisent, entre autres, dans le soutien apporté par l’accompagnateur pédagogique quelque soit sa formation initiale. Il nous parait opportun de nous intéresser aux pratiques pédagogiques mises en œuvre dans le cadre de l’intégration des enfants déficients auditifs à l’aube de la mise en œuvre progressive du plan de pilotage au sein des établissements scolaires. En effet, la législation prévoit qu’à partir du 1er septembre 2017, chaque établissement scolaire élabore un plan de pilotage pour une période de 5 ans comprenant notamment sa stratégie en matière d’intégration des élèves ainsi que sa stratégie en matière d’aménagements raisonnables pour les élèves à besoins spécifiques reconnus. Dans le cadre du phasage de l’axe stratégique 4 du Pacte12 et afin de répondre aux besoins spécifiques des élèves dans l’enseignement ordinaire mais aussi dans la perspective de décloisonner et de recentrer l’enseignement spécialisé, il est prévu que les établissements se dotent d’une stratégie spécifique dans le cadre de leur plan de pilotage à partir de 2019. Le développement des aménagements raisonnables (inclusion) dans l’enseignement ordinaire sera soutenu. On peut dès lors conjecturer que la spécificité de cette 12 Afin de rendre le système éducatif francophone belge plus efficace et plus équitable, cinq axes stratégiques ont été identifiés autour desquels se regroupent les orientations et initiatives concrètes préconisées. L’axe 4 est libellé comme suit : Afin d’améliorer le rôle de l’enseignement comme source d’émancipation sociale tout en misant sur l’excellence pour tous, favoriser la mixité et l’école inclusive dans l’ensemble du système éducatif tout en développant des stratégies de lutte contre l’échec scolaire, le décrochage et le redoublement. 44 situation pédagogique requerrait des compétences particulières des enseignants confrontés à cette originalité, compétences dont ils n’auraient pas toujours conscience. On peut aussi imaginer que le dispositif d’intégration avec les modalités qu’il véhicule (présence d’enfants déficients auditifs, tenue de conseils de classe, présence d’un tiers « accompagnateur pédagogique », etc.) bouscule à divers égards le fonctionnement pédagogique des enseignants ordinaires. Un premier entretien exploratoire auprès d’un enseignant pratiquant l’intégration d’enfants déficients auditifs depuis près de 12 ans a permis de confirmer la pertinence de la question posée mais aussi l’élaboration des premières hypothèses de notre recherche. D’une part, la présence d’un (ou de plusieurs) enfant(s) déficient(s) auditif(s) demanderait des adaptations pédagogiques. D’autre part, les partenariats avec des intervenants externes seraient sources d’ouverture et de formation. 5.2 La méthodologie : l’approche qualitative Notre mémoire ayant une visée compréhensive, notre choix s’est tout naturellement porté vers la recherche qualitative car, comme le précise Fortin, Côté et Filion (2006), elle « touche des questions concernant l’expérience humaine. Elle fournit un processus par lequel il est possible d’examiner un phénomène au-delà des visions traditionnelles et ainsi de comprendre une réalité contextuelle de personnes dans leur milieu de vie » (p.13). Notre objectif est donc d’inviter les participants « à décrire les phénomènes de la manière la plus riche possible, en cherchant à comprendre leur signification » (Fenneteau, 2007). Nous avons dès lors choisi de procéder à des entretiens semi-directifs individuels. Nous avons sélectionné cette formule mixte qui combine à la fois directivité et non-directivité afin d’orienter les personnes interviewées vers certains sujets pour leur laisser ensuite toute liberté pour s’exprimer. Plus précisément, notre intention est de circonscrire, à travers les discours tenus par des enseignants ordinaires qui pratiquent l’intégration d’enfants déficients auditifs mais aussi via la perception qu’en ont les accompagnateurs pédagogiques issus de l’enseignement spécialisé, les espaces d’adaptations pédagogiques. Nous posons donc la question de chercher à comprendre comment l’enseignant ordinaire s’adapte à cette nouvelle 45 situation ? Pour tenter d’apporter des pistes de réponses à cette interrogation, nous focalisons notre intérêt sur ce qui se vit dans la classe en présence de ces enfants, à travers ce qu’en dit leur enseignant. 5.3. La population, l’échantillon Afin de déterminer le cadre du dispositif dans lequel la recherche est effectuée, il importe d’en décrire le contexte. Il s’agit d’être en mesure de valider ou non les hypothèses posées. Le choix posé est d’interroger des acteurs ayant une expérience de l’intégration d’élèves déficients auditifs au niveau de l’école primaire. Nous trouvons en effet plus judicieux de restreindre nos investigations à un champ duquel nous pouvons dégager des caractéristiques communes. Plusieurs paramètres sont sélectionnés, à savoir : le temps (en terme de type d’intégration), l’école spécialisée partenaire et le niveau d’enseignement. Les modalités de l’intégration sont diverses et parfois éloignées les unes des autres selon les écoles ordinaires et spécialisées partenaires. L’intégration pouvant s’organiser à temps plein (intégration totale) ou à temps partiel (intégration partielle), nous avons circonscrit notre recherche à des enseignants accueillants des élèves inscrits dans un processus d’intégration totale. En effet, le temps partiel peut s’organiser uniquement comme un temps de socialisation et non d’apprentissages. Inspiré par ce premier critère, nous avons ensuite porté notre choix sur une seule école spécialisée partenaire, l’IRSA (Institut Royal pour Sourds et Aveugles) comme école d’enseignement spécialisé partenaire. D’une part, l’IRSA privilégie l’intégration totale. D’autre part, son projet « Un projet pour chacun » apporte une dimension humaine à leur mission et leur vision de l’enseignement. Leur mission se définit autour de deux axes : le développement d’un projet pour et avec la personne accueillie et sa famille ainsi que l’organisation de leur action. Ce dernier point fait référence à une volontaire dynamique d’amélioration continue de leurs pratiques et de leur expertise dans l’approche d’une société inclusive. Leur vision, quant à elle, présente une activité souhaitant s’inscrire dans une dynamique de développement, de formation continuée et de recherche avec la participation de partenaires appropriés. La référence à des équipes compétentes ne nous laisse pas 46 indifférent. Notre intention est donc de mener une sélection d’individus qui reflètent ces compétences. Notre point de départ réside au centre de la question de recherche. Celle-ci clarifie l’objet d’étude ainsi que les acteurs susceptibles de se situer au cœur de notre problématique. Nous avons donc pris contact avec trois écoles ordinaires pratiquant l’intégration d’enfants déficients auditifs en collaboration avec l’IRSA. Les huit participants sont donc issus de ces trois établissements. Ce choix est primordial dans le cadre de l’interprétation des données qui s’en suit. Celle-ci ne peut s’effectuer qu’en fonction des caractéristiques intrinsèques de l’échantillon. Lors de la discussion des résultats, un échantillon homogène permet le dégagement d’une compréhension riche assimilée à un groupe défini d’individus. Enfin, nous avons opté pour une exploration uniquement au sein de l’enseignement primaire. Si les conditions d’intégration sont généralement similaires en maternelle, elles diffèrent avec l’entrée en secondaire. Élargir le champ de notre recherche à l’enseignement fondamental semble peu opportun. Tenant compte du développement de l’enfant déficient auditif et de ces particularités, cette option peut apporter plus de confusions que de richesses. Le choix des personnes à interroger ne s’est donc pas effectué de manière aléatoire. Nous avons sélectionné un échantillon représentatif d’enseignants de l’école primaire ordinaire accueillant ou ayant accueilli des enfants issus de l’enseignement spécialisé de type 7 en intégration. En complément à ce groupe, deux accompagnatrices pédagogiques de l’intégration scolaire issues de l’IRSA constituent un second groupe de participants. Nous avons choisi de les interroger afin de compléter les apports des enseignants interviewés. A travers ces deux entrevues, nous tenions à avoir un autre regard vis-à-vis des pratiques pédagogique déclarées. 5.4 Les participants Notre échantillon se compose de huit enseignants accueillant ou ayant accueilli un élève déficient auditif en intégration et de deux accompagnateurs pédagogiques. Le tableau 6 47 présente le profil des participants à la recherche. D’emblée, nous remarquons que tous les participants, enseignants comme accompagnateurs pédagogiques, sont des femmes. Quant à la répartition des âges des enseignants, un se positionne entre 21-30 ans, six ont entre 41-50 ans et enfin un a plus de 50 ans. Pour les accompagnateurs pédagogiques, la moitié se situe en 31-40 ans et l’autre moitié a plus de 50 ans. Une majorité des enseignants (les trois-quarts) tout comme l’ensemble les accompagnateurs pédagogiques ont une charge de travail à temps plein. Tous les participants ont une formation pédagogique (instituteur primaire). Notons cependant que trois enseignants et un accompagnateur pédagogique ont entrepris une formation complémentaire, à savoir un master en sciences de l’éducation (un quart des enseignants et la moitié des accompagnateurs pédagogiques) ou un certificat en accompagnement des pratiques pédagogiques (un enseignant). De plus, un enseignant a entre 6-10 ans d’ancienneté comme instituteur, la moitié d’entre eux a entre 11-20 ans d’ancienneté, le quart d’entre eux a entre 21-30 ans d’ancienneté enfin un seul a plus de 30 ans d’ancienneté. Les huit enseignants participants exercent leur fonction dans trois établissements scolaires situés sur les communes de Wavre (quatre enseignants), Uccle (deux enseignants) et Rhisnes (deux enseignants). Tableau 6 : Profils des participants à la recherche Enseignants Accompagnateurs pégagogiques 8 2 Sexe Homme Femme 1 Tranche d’âge Entre 21 et 30 ans Entre 31 et 40 ans Entre 41 et 50 ans Plus de 50 ans 6 1 1 Temps plein 6 2 Temps partiel 2 Charge horaire cette année scolaire Diplômes 13 Instituteur maternel Instituteur primaire Enseignant secondaire Master en SC Education CAPP13 CAPP : Certificat en accompagnement des pratiques pédagogiques 1 8 2 2 1 1 48 Années d’ancienneté comme instituteur Entre 1 et 5 ans Entre 6 et 10 ans Entre 11 et 20 ans Entre 21 et 30 ans Plus de 30 ans 1 4 2 1 Localisation Wavre Uccle Rhisnes 4 2 2 1 1 Comme nous pouvons l’observer dans le tableau 7 qui reprend les profils des participants à la recherche dans le processus d’intégration, trois enseignants ont entre 1-5 ans d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques, un enseignant a entre 6-10 ans d’expérience contre quatre qui ont plus de 10 ans d’expérience. Au niveau des accompagnateurs pédagogiques, l’un a entre 6-10 ans d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques, l’autre a plus de 10 ans d’expérience. Parmi les huit enseignants qui ont participé aux entretiens, un a l’expérience d’élèves souffrant de troubles du comportement (enfant caractériel), un autre a celle d’élèves souffrant de déficiences physiques (enfant polyhandicapé) et un dernier a celle d’élèves souffrant de troubles des apprentissages (dyslexie). De plus, cinq enseignants possèdent entre 1-5 ans d’expérience avec des enfants issus du type 7 (souffrant de déficiences auditives) contre trois qui possèdent plus de 10 ans d’expérience. Pour les accompagnateurs pédagogiques, l’un possède entre 6-10 ans d’expérience et l’autre plus de 10 ans. Enfin, trois d’entre eux accueillent au moins un élève déficient auditif en intégration dans leur classe cette année scolaire, les cinq autres n’en accueillent pas. Tableau 7 : Profils des participants à la recherche dans le processus d’intégration Enseignants Années d’expérience avec Entre 1 et 5 ans les enfants à besoins Entre 6 et 10 ans spécifiques Plus de 10 ans Type d’enseignement spécialisé dont étaient 3 1 4 Troubles du comportement 1 Déficiences physiques 1 Accompagnateurs pégagogiques 1 1 49 issus ces enfants à besoins spécifiques Troubles des apprentissages 1 Entre 1 et 5 ans Années d’expérience avec Entre 6 et 10 ans les enfants issus du type 7 Plus de 10 ans 5 Présence d’un enfant issus du type 7 en classe cette année scolaire Oui 3 Non 5 3 1 1 5.5 Les instruments de récolte de données Nous utilisons l’entretien d’explicitation en nous inspirant de la méthodologie proposée par Vermersch (2001). Les dix entretiens ont été conduits dans le but de recueillir les données nécessaires sans pour autant viser la saturation. Dans le but de préparer ces entretiens, sur la base des référents théoriques présentés dans la première partie, nous avons construit un questionnaire et son guide d’entretien. L’annexe 1 les présente dans leur intégralité. Le questionnaire présente les hypothèses de recherche prenant la forme de questions principalement ouvertes. Pour les autres, nous avons utilisé une échelle de Likert de fréquence à trois échelons – jamais, parfois, souvent ou une échelle d’accord, pas d’accord. Le guide d’entretien nous permettait, quant à lui, de prévoir des questions de relance. Des questions adaptées sont posées aux accompagnateurs pédagogiques de l’échantillon (annexe 2). Les questions d’ouverture se présentent sous la forme de choix multiples. Elles recueillent des informations d’ordre social. Elle invite l’individu à trouver sa place ainsi que sa posture en tant que participant. Elles fournissent également les indices socio biographiques nécessaires à l’analyse de l’échantillon : sexe, âge, charge de travail professionnelle, niveau de la formation, années d’ancienneté, années d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques, etc. Les participants sont invités à cocher leurs réponses sur le document fourni. 50 L’entretien, dont le questionnaire est présenté dans le tableau 8, débute avec un premier ensemble de questions d’introduction. Elles concernent l’expérience des enseignants de l’ordinaire et des accompagnateurs pédagogiques issus de l’enseignement spécialisé en matière d’intégration d’élèves déficients auditifs. La première offre une entrée dans le sujet tandis que les deux suivantes, de transition, sont destinées à découvrir les ressources exploitées pour mener à bien les projets d’intégration mais aussi leurs éventuels effets sur la conception du métier et/ou la façon de l’exercer des enseignants de l’ordinaire. De nombreux facteurs facilitateurs de l’intégration dont certains liés aux approches pédagogiques mises en œuvre sont soulignés dans la littérature scientifique comme la préparation à l’accueil de l’enfant intégré (Mingrone, 1994), la nécessité de prise en compte du développement global de l’enfant (Tamm & Prellwitz, 2001) ou de la singularité des conséquences de la surdité (Jaccaud, 2009). Dès lors, un second ensemble de questions clés concerne les pratiques pédagogiques en matière de différenciation et d’adaptation dans l’enseignement ordinaire pour accompagner les élèves déficients auditifs, tant celles déclarées par les enseignants que celles observées par les accompagnateurs pédagogiques. Elles invitent le participant à expliciter la pédagogie mise en œuvre au bénéfice des élèves et plus particulièrement de ceux déficients auditifs intégrés. Pour certaines, un choix de propositions est fourni sur base soit de pistes initiées par des professionnels de terrain spécialisés dans l’accompagnement des enfants déficients auditifs (annexes 3 à 6) soit de recommandations du BIAP en matière d’évaluation. Un troisième ensemble de questions concerne le développement professionnel des enseignants en lien avec cette expérience de l’intégration. En effet, une série de stratégies relevées par Lesain-Delabarre (2000) semblent profitables au développement professionnel des enseignants ordinaires en charge de ces élèves. Elles élargissent le champ des trois premières en recherchant les variables personnelles (et contextuelles) ainsi que leur interaction dans la coopération, la mobilisation des ressources, la formation du personnel éventuellement nécessaires au processus de soutien des élèves déficients auditifs intégrés. Enfin, un quatrième et dernier ensemble de questions visent à conclure l’entretien. Elles concernent la vision de l’intégration des enseignants de l’ordinaire mais également des 51 accompagnateurs pédagogiques afin de percevoir en quoi ce processus peut se révéler enrichissant pour chacun d’entre eux (Detraux, 2012). Tableau 8 : Thématiques et questions d’entretien adressées aux enseignants de l’enseignement primaire ordinaire Expérience Thème Question 1. Quelle expérience avez-vous en tant qu’enseignant(e) avec des élèves déficients auditifs ? 2. Comment vous êtes-vous préparé(e) pour mener à bien ces projets d’intégration ? 3. La présence d’élèves déficients auditifs dans votre classe a-t-il modifié votre conception du métier et/ou votre façon de l’exercer ? En quoi ? 4. Quelles sont vos pratiques pédagogiques usuelles ? 5. Voulez-vous raconter une activité significative menée dans votre classe en lien avec l’intégration des élèves déficients auditifs ? Pratiques pédagogiques 6. Dans les gestes précis identifiés, y en-a-t ‘il qui guident toutes vos actions dans les activités de votre classe ? 7. Pratiquez-vous de la différenciation au sein de votre classe ? Si oui, de quelle manière ? 8. Des adaptations peuvent être nécessaires aux élèves déficients auditifs intégrés dans l’enseignement ordinaire. Classez les propositions suivantes selon que vous êtes d’accord avec elle ou non. Expliquez vos choix. (Les propositions sont présentées sous forme de fiches.) a. Je trouve qu’il est normal dans l’enseignement ordinaire de mettre en place des adaptations pour les élèves déficients auditifs. b. Les adaptations à mettre en place demandent des compétences professionnelles spécifiques. c. Les adaptations à mettre en place demandent trop de travail supplémentaire. d. Le travail nécessaire à la mise en place d’adaptations ne me dérange pas. 9. Si vous en mettez en place, quelles adaptations pédagogiques ou méthodes inédites identifiez-vous comme bénéfiques aux élèves déficients auditifs ? 52 10. Parmi les propositions d’adaptations pédagogiques suivantes : a) Lesquelles mettez-vous en œuvre dans votre classe au bénéfice des élèves déficients auditifs ? Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Expliquez vos choix. (Les propositions sont présentées sous forme de fiches.) a. Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel b. Éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations c. Veiller à l’articulation, tout en parlant clairement et naturellement d. Veiller aux conditions ambiantes e. Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension f. Favoriser les informations visuelles g. Limiter les apports magistraux h. Dissocier (j’écris puis je parle en montrant l’écrit, le dessin ou…) i. L’aider à se repérer dans le temps j. Place de l’élève en dans la classe k. Utiliser la langue des signes ou l’AKA l. Utiliser un système FM b) Lesquelles sont importantes, pour vous ? c) Lesquelles sont efficaces ? d) Lesquelles sont faciles à mettre en place ? e) Pour celles qui vous semblent difficiles à mettre en place, vous sentez-vous capables de les mettre en place ? 11. Au sein de votre classe, des moyens adaptés sont-ils prévus dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires des élèves déficients auditifs ? 11 bis. Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Pour les épreuves écrites : - prolongation du temps accordé à chaque épreuve ; - présentation écrite des textes et des consignes ; - adaptation des conditions matérielles ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente. professionnel Développement Pour les épreuves orales, notamment : - présentation dans les conditions optimales (lecture labiale, aides techniques,...) ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente ; - passation des épreuves sous forme écrite. 12. Quelles sont les ressources, les aides, les outils sur lesquels vous vous appuyez pour faciliter l’intégration des élèves déficients auditifs ? 13. Quels peuvent être les apports des accompagnateurs pédagogiques dans le cadre de l’accompagnement des élèves déficients auditifs ? 14. Depuis que vous pratiquez l’intégration, avez-vous actualisez vos connaissances concernant les élèves à besoins spécifiques ? Si oui, comment ? 53 Vision de l’intégration 15. Comment jugez-vous cette actualisation des connaissances ? Expliquez. 16. Aujourd’hui, si l’intégration était une de ces photos, laquelle serait-elle pour vous ? Choisissez parmi celles proposées (sur fiches). Pourquoi avez-vous choisi cette photo ? 17. Souhaitez-vous ajouter quelque chose ? 5.6 Les modalités de traitement des données Dans un premier temps, nous avons mené dix entretiens. Huit enseignants de l’ordinaire ont été interrogés. Avec un accord préalable de leur direction, nous les avons rencontrés sur leur lieu de travail. Deux accompagnateurs pédagogiques ont également été interviewés. L’un dans une école partenaire de l’IRSA, l’autre à son domicile. Au total cinq heures trente-cinq d’entretiens ont été menées. Dans un second temps, chaque entretien a été retranscrit le plus fidèlement possible. Plusieurs écoutes furent nécessaires afin d’en saisir toutes les nuances apportées par les participants et éviter toute transformation ou interprétation des propos. Ensuite, nous avons repéré des verbatims (ensemble de mots et/ou de phrases en lien avec notre question de recherche et employés par notre échantillon lors des entretiens, par exemple, C’est vraiment important pour l’enfant de se sentir bien à sa place et bien en classe et bien soutenu [AP2].) dans le corpus, à savoir les pratiques pédagogiques que les enseignants ont énoncées comme étant, soit usuelles, soit de différenciation, soit relevant d’adaptations au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe. L’attribution des premiers codes s’est établie sur base des verbatims identifiés comme relevant des pratiques pédagogiques. Tel que présenté dans le tableau 9, nous avons attribué un code ainsi qu’un nom de code aux différents extraits identifiés. Nous nous sommes attachés au sens même des mots en vue de tenter de préserver un maximum d’objectivité et de rester le plus proche possible de la réalité perçue par les acteurs interviewés. 54 Tableau 9 : Premières catégories émergentes Nom du code Usuelle Code Définition du code USUEL Pratique pédagogique usuelle Exemples J’utilise assez bien les manuels mais souvent j’adapte… (E2) Je peux donner un texte plus compliqué à un élève. […] Par Différenciation DIFF Différenciation pédagogique contre, ceux qui ont plus difficile, je donne un plus petit texte et ils le font avec moi. (E6) Je demande systématiquement Adaptation ADAPT Adaptation spécifique aux enfants déficients auditifs de répéter la consigne pour voir s’ils ont bien compris. (E3) Nous avons dès lors élaboré notre système de codes au fur et à mesure de l’avancement du traitement des données en construisant des catégories en fonction des éléments qui apparaissaient et que nous mettions en relation avec ceux déjà vus. En parallèle, nous avons construit un lexique de codes. Nous avons répertorié dix codes supplémentaires que nous avons également définis. Cette grille (cf. Tableau 10) conçue de manière inductive s’est ajustée avec l’apparition de nouveaux verbatim. Tableau 10 : Nouvelles catégories émergentes Nom du code Code Définition du code Exemples […] sur les 15 années, à mon avais, Contexte CONT Contexte d’intégration j’ai dû avoir 5 enfants en intégration. (E4) Profil PROF Caractéristique du profil Parce qu’il y a des enfants qu’ils de l’élève déficient auditif veulent vraiment se fondre dans la intégré masse. (E5) 55 C’est l’accompagnatrice Ressource humaine HUM Ressource humaine pédagogique qui m’a guidée. […] disponible Elle était autant une ressource pour moi que pour les enfants. (E1) Ressource matérielle MAT Ressource matérielle J’avais aussi l’appareil : le système disponible FM. (E7) […] il y a tout un travail, je dirais, Perception PERC Perception de la différence de sensibilisation, d’accueil de l’autre, de la différence… (E5) Apprentissage formel Apprentissage informel FORM INFOR Source d’apprentissage formel Source d’apprentissage informel […] on a eu l’occasion […]de suivre une formation d’AKA […](E8) Il y a vraiment un échange dans les deux sens. On se nourrit dans les deux sens. (AP2) […] c’est dans notre métier de Engagement ENG Indice d’engagement professionnel pouvoir adapter, de faire des choses supplémentaires pour les enfants, pour essayer d’y arriver. (E1) Développement DEV Signe de développement professionnel Quand un enfant est en difficulté, on a d’autres moyens, d’autres outils… (E3) […] avec l’expérience, qu’on Expérience EXP Expression de l’expérience devient plus attentif aux besoins de chacun. (E2) Par la suite, une catégorisation numérotée des pratiques pédagogiques adaptées a été opérée sur base de la typologie des gestes d’aide établie par Gombert et Roussey (2007). Cette étape de traitement s’est poursuivie par la formulation factuelle des données recueillies. L’annexe 7 présente un exemple de traitement complet des données tel que réalisé pour chaque acteur 56 interviewé. Enfin, les données recueillies auprès de tous les acteurs ont finalement été catégorisées et rassemblées par thèmes et sous-thèmes en fonction du codage. Le chapitre suivant présente l’analyse des résultats obtenus. 57 Chapitre 6 – Analyse et interprétation des résultats Notre étude vise à explorer et à comprendre le phénomène d’adaptabilité pédagogique des enseignants de l’ordinaire au sein du processus d’intégration d’élèves déficients auditifs. L’analyse des données recueillies auprès de huit enseignants de l’ordinaire et de deux accompagnateurs pédagogiques a généré onze thèmes qui forment les principales sections de ce chapitre. Les pratiques pédagogiques usuelles, la différenciation et les adaptations spécifiques sont les trois premiers thèmes issus des indicateurs de pratiques pédagogiques. Le contexte de l’intégration, le profil de l’élève déficient auditif, la perception de la différence, les ressources humaines et matérielles disponibles, les sources d’apprentissage formel et informel, l’engagement, l’expérience et le développement professionnel des acteurs sont huit autres grandes thématiques qui ont émergées lors de l’analyse des données. Quelques thèmes sont ensuite divisés en sous-thèmes plus circonscrits. Afin de mieux comprendre la structure de ce chapitre, la figure 4 illustre la présentation des résultats. Analyse et interprétation des résultats Thèmes définis par les indicateurs de pratiques pédagogiques Pratiques pédagogiques usuelles Différenciation Adaptations spécifiques Thèmes émergents Contexte de l’intégration Profil de l’élève déficient auditif Perception de la différence Ressources Humaines Matérielles Sources d’apprentissages Formels Informels Engagement Expérience Développement professionnel Figure 4 : Présentation synthétique de la structure du chapitre consacré à l’analyse des résultats 58 6.1 Thèmes définis par les indicateurs de pratiques A travers le discours des enseignants de l’ordinaire interviewés, nous tentons dans ce point de circonscrire leurs pratiques pédagogiques. Des extraits sélectionnés et représentatifs illustrent nos observations. Partant des usuelles, en passant par la différenciation, nous terminons par les adaptations spécifiques dont nous développons celles mises en œuvre au bénéfice des élèves déficients auditifs. 6.1.1 Les pratiques pédagogiques usuelles Lorsque nous demandons aux huit enseignants de l’ordinaire d’expliciter leurs pratiques usuelles, cinq d’entre eux les associent à ce que nous qualifiions une pédagogie active (E4) et participative (E4) empreinte de socioconstructivisme (E5), l’importance de l’interaction sociale dans le développement de la connaissance chez l’enfant étant avancé. Certains parlent de travail par thème (E6) et par projet (E6), de situations mobilisatrices (E6) et problèmes (E6). D’autres disent exploiter les situations pédagogiques amenées par leurs élèves ou issues de sorties culturelles. Les élèves sont au cœur de l’apprentissage dans la mesure du possible (E4). Partant de leurs représentations et de leurs prérequis, ces enseignants expliquent construire leurs apprentissages avec eux. Parmi les enseignants interviewés, la moitié travaille avec des manuels ou s’en inspirent dans leurs productions personnelles. L’un d’eux explicite être ouvert à la mise en œuvre de nouvelles pédagogies (E4), de nouveaux dispositifs (E4) tandis qu’un autre confie apprécier la diversification des approches didactiques (E7). 6.1.2 La différenciation A la question « Pratiquez-vous de la différenciation au sein de votre classe ? », les huit enseignants interrogés répondent affirmativement. L’un d’eux précise qu’il lui importe de reconnaître l’enfant dans sa difficulté (E4) et d’adopter dès lors une posture empathique (E4). La différenciation pratiquée exprime soit de l’aide vraiment pour les enfants qui en ont 59 besoin mais aussi du dépassement pour les autres (E5). Les évaluations sont aussi différenciées certaines fois (E5), d’après un enseignant. Trois d’entre eux confient que les objectifs fixés restent communs. Parmi ceux-ci, un enseignant précise que l’évaluation de ces objectifs communs est pratiquée. On remarque que les pratiques les plus fréquemment explicitées (cinq enseignants sur huit) sont la pratique du travail individualisé et l’allègement de la tâche. Viennent ensuite l’organisation de groupes de besoins, la différenciation des contenus et la pratique du tutorat / l’aide par les pairs (quatre enseignants sur huit) qui sont suivies par la pratique de groupes de niveaux, l’octroi de temps supplémentaire et la mise à disposition de matériel ou d’outils (trois enseignants sur huit). Enfin, un enseignant cite la différenciation des structurations des productions et le climat de bienveillance (E4) tandis qu’un autre parle d’évaluations différenciées. Par groupe de niveaux, les enseignants entendent le fait de répartir les élèves selon leur niveau (par exemple, lecteurs faibles / moyens / forts) et de leur assigner une tâche correspondant à leurs capacités. Un groupe de besoins est un groupement d’élèves rassemblés dans le but de progresser dans une compétence donnée et pour lequel l’enseignant programme des activités adaptées à cet objectif. Travail individualisé ne signifie pas travail individuel, entraide et coopération sont préconisées. L’enseignant, en fonction des besoins de l’enfant, lui propose des activités à réaliser en autonomie ou avec un adulte. La pratique d’ateliers est un dispositif permettant aux élèves de progresser dans leurs apprentissages selon une démarche d’autoformation accompagnée. L’aide des pairs, le tutorat, les dyades d’entre-aides permettent aux élèves de mettre à profit leurs compétences dans l’accompagnement de leurs camarades moins performants dans le domaine ciblé. L’allègement de la tâche ainsi que la pratique d’allongement du temps de travail visent le respect des rythmes des élèves. Pour un même objectif, il s’agit de soit réduire la somme de travail à réaliser (moins d’exercices, par exemple) soit de fournir du temps supplémentaire pour la réalisation de la tâche. Tout comme la mise à disposition de matériels, d’outils permet à l’élève de prolonger ces apprentissages dans sa phase concrète ou semi-concrète. La différenciation des contenus consiste à différencier ce que l’élève apprend et le matériel qui sera utilisé à cette fin (par exemple, la lecture d’un texte plus court pour certains que d’autres) tandis que celle des structurations de productions amène à différencier comment 60 l’élève montre ce qu’il a appris par l’utilisation de véhicules différents (par exemple, l’élaboration d’une synthèse sous forme d’une carte mentale). Agir au niveau du climat pour instaurer la bienveillance permet aux élèves de mobiliser leur potentiel. Enfin, les évaluations différenciées peuvent prendre des formes variées. L’enseignant peut, par exemple, proposer l’utilisation de fiches procédurales pour favoriser la métacognition. 6.1.3 Les adaptations spécifiques Nous avons dans un premier temps cherché à recueillir l’avis des huit enseignants de l’ordinaire de notre échantillon à propos des adaptations pédagogiques à mettre en place au bénéfice des élèves déficients auditifs. Les huit enseignants interrogés trouvent normal de mettre en place des adaptations pour les élèves déficients auditifs. L’un d’eux trouve que ce n’est pas parce que les enfants sont déficients auditifs qu’ils n’ont pas droit à l’encadrement ordinaire (E1) et d’ajouter ils sont tout à fait capables de réussir dans l’enseignement ordinaire donc pourquoi ne pas leur permettre justement d’y arriver en mettant des petites adaptations en route (E1). Face à l’affirmation « Les adaptations à mettre en place demandent des compétences professionnelles spécifiques. », quatre des enseignants sur les huit interrogés marquent leur désaccord. Parmi ceux-ci, un pense ne pas posséder de compétences particulières. Un autre considère que la mise en place de ces adaptations demande une ouverture à la différence (E4) plutôt que des compétences professionnelles spécifiques. Selon lui, une remise en question continuelle (E2) est nécessaire. Un troisième rejoint cet avis en précisant que c’est à la portée de tous pour autant que l’on se pose les bonnes questions et qu’on ait la volonté de changer les choses (E7). Les autres marquent soit leur accord soit un avis mitigé, estiment que certaines adaptations, comme l’utilisation de l’AKA, demandent des compétences professionnelles spécifiques. Dans ce cadre, un enseignant de notre échantillon ajoute que le soutien des pairs ou des professionnels peut se révéler une ressource (E3). Les compétences des accompagnateurs pédagogiques sont relevées par un autre comme une spécificité. Deux d’entre eux ajoutent que ces acteurs représentent des personnes qui peuvent les guider 61 comme personnes ressources (E6). Pour un enseignant, les compétences professionnelles, c’est aussi accepter que quelqu’un vienne dans sa classe quelques heures pour travailler et donc, prévoir dans l’horaire des activités qui sont plus intéressantes pour l’enfant à ce moment-là, que l’aide serve vraiment à quelque chose […] (E8). Comprenons, qu’en terme de compétences professionnelles, cet enseignant y adjoint la capacité à accepter la présence d’un intervenant externe au sein de sa classe ainsi que celle d’organiser les périodes nécessaires à l’accompagnement de l’élève déficient auditif afin qu’elles lui soient profitables. Pour les trois quarts des enseignants de notre échantillon, les adaptations à mettre en place ne demandent pas trop de travail supplémentaire. Deux des enseignants interrogés considèrent que cette tâche relève de leurs fonctions c’est dans notre métier de pouvoir adapter (E7). Un autre ajoute que cette charge est allégée par l’aide fournie par les accompagnateurs pédagogiques. Enfin, la totalité des enseignants interviewés affirment que le travail nécessaire à la mise en place d’adaptations ne les dérange pas. Nous nous sommes dès lors intéressés aux gestes précis spontanément identifiés par les enseignants au sein de leur pratique de classe comme étant des adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés. Ensuite, nous avons répertorié la fréquence de mise en œuvre mais également le niveau d’importance, d’efficacité et de mise en place d’adaptations pédagogiques initiées par des professionnels de terrain spécialisés dans l’accompagnement des enfants déficients auditifs et proposées lors de l’entretien semidirectif mené. Enfin, notre intérêt s’est porté sur les moyens adaptés dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires de ces élèves. Ces différentes analyses vous sont présentées dans les sous-points suivants. Gestes précis spontanément identifiés par les enseignants de l’ordinaire Majoritairement citée, sept enseignants sur huit privilégient l’utilisation de supports visuels. Viennent ensuite la reformulation des consignes pour en vérifier la compréhension et la place de l’élève dans la classe que cinq enseignants sur huit identifient. Parler face à l’élève, utiliser le système FM et la guidance individualisée sont relevés par la moitié des enseignants de notre échantillon. La pratique du tutorat / aide des pairs et l’utilisation de l’AKA sont cités respectivement trois fois tandis que la valorisation de l’élève (E4) (dont la pratique du 62 renforcement positif (E2)) ne l’est que deux fois. Enfin, sont énoncés de manière unique l’articulation, l’attention aux expressions du visage (E7), la limitation des apports magistraux, la fourniture de repères temporels, le maintien de conditions ambiantes optimales, l’organisation du local et la conception de grilles d’évaluation adaptées. L’interview des deux accompagnateurs pédagogiques de notre échantillon renforce ce répertoire. En effet, tous relèvent l’utilisation de supports visuels. Propres à leur missions d’accompagnement, l’utilisation de l’AKA (ou de la langue des signes) et la guidance individualisée sont également identifiées. Fréquence de mise en œuvre d’adaptations pédagogiques Lors des entretiens menés, douze adaptations pédagogiques initiées par des professionnels de terrain spécialisés dans l’accompagnement des enfants déficients auditifs ont été proposées aux participants. Il s’agit dans un premier temps de les classer selon leur fréquence de mise en œuvre : jamais, parfois ou toujours. Le classement établi distinctement par les accompagnateurs pédagogiques renforce celui établi les enseignants de l’ordinaire. D’emblée, nous constatons une plus grande proportion de gestes d’adaptation cités spontanément par les enseignants, certains n’étant pas répertoriés parmi nos propositions. Deux adaptations sont relevées comme toujours mises en œuvre par l’ensemble des huit enseignants interrogés. Il s’agit de favoriser les informations visuelles et la place de l’élève dans la classe. Elles sont d’ailleurs qualifiées par l’ensemble des enseignants comme des pratiques pédagogiques usuelles. On trouve en troisième position le fait d’attirer l’attention de l’élève avant de lui parler et maintenir le contact visuel. Viennent ensuite, à score égal, les items « Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension », « Utiliser un système FM » ainsi que « Veiller aux conditions ambiantes ». Ces résultats corroborent ceux obtenus lors de l’expression spontanée des gestes mis en œuvre excepté le dernier item. Deux facteurs nous semblent intervenir pour expliquer cette dernière disparité. D’une part, les enseignants interrogés considèrent cette adaptation comme indispensable à tous les élèves sans distinction. Notons qu’un accompagnateur pédagogique relève néanmoins la fatigabilité accrue aux bruits de nombreux élèves déficients auditifs appareillés on oublie effectivement 63 que l’élève a un appareil et que le bruit constant fatigue beaucoup l’enfant sourd (AP2). Certains enseignants de notre échantillon précisent que la mise en place de cette adaptation dépend également de la volonté du groupe classe. D’autre part, enseignants comme accompagnateurs pédagogiques interviewés soulèvent la difficulté de veiller aux conditions ambiantes compte tenu du nombre d’élèves parfois important (AP1) dans les classes ordinaires. Poursuivant le classement, les items « Veiller à l’articulation tout en parlant clairement et naturellement », « Dissocier » et « L’aider à se repérer dans le temps » sont chacun relevés par cinq enseignants sur huit comme étant toujours mis en œuvre. Le fait de limiter les apports magistraux se classe ensuite. Enfin, le fait d’éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations ainsi que l’utilisation de la langue des signes ou de l’AKA sont cités respectivement par deux enseignants de notre échantillon. En effet, une majorité d’enseignants expliquent avoir tendance à apposer une grande quantité d’affiches dans leur classe. Deux d’entre eux précisent que cette méthodologie fait partie de la pédagogie pratiquée (E5) au sein de leur classe, les affiches étant construites par les élèves. Deux autres estiment cet affichage, en sa qualité informative, utile pour l’élève déficient auditif (E1). L’utilisation de la langue des signes ou de l’AKA relève, quant à elle et selon une majorité d’enseignants, des compétences spécifiques de l’accompagnateur pédagogique. Niveau d’importance, d’efficacité et de mise en place d’adaptations pédagogiques Dans un deuxième temps, les participants sont invités à établir trois classements distincts. Reprenant chaque item, nous leur demandons de sélectionner les adaptations qui sont importantes pour les élèves déficients auditifs puis celles qui leur semblent efficaces et enfin celles qui paraissent faciles à mettre en place au sein de leur classe. Les réponses fournies par les huit enseignants de notre échantillon laissent apparaître des tendances similaires quant à la leur perception en termes d’importance, d’efficacité et de facilité de mise en place des diverses adaptations proposées. Notons que trois enseignants et un accompagnateur pédagogique pratiquent spontanément des sous-classements. Le premier enseignant distingue les adaptations générales des spécifiques explicitant que les premières relèvent plus de la différenciation. Le second différencie les adaptations selon qu’elles relèvent du contexte (E5) (Veiller aux conditions ambiantes), de la pédagogie (E5) (Limiter les apports magistraux) ou d’un aspect pratico-pratiques (E5) (Place de l’élève en classe, Favoriser les informations 64 visuelles, Attirer son attention). Le dernier les dissocie en fonction qu’elles visent le bienêtre global (E7) de l’élève ou les apprentissages (E7). L’accompagnateur pédagogique, quant à lui, parle de deux registres différents (AP1). L’un concerne la communication directe avec l’enfant (AP1) tandis que l’autre s’articule autour de l’environnement qui doit correspondre (AP1) à ses besoins. Si l’utilisation du système FM (appareil qui permet aux enfants déficients auditifs de recevoir la parole d’un interlocuteur privilégié directement dans la prothèse auditive ou dans l’implant cochléaire) se révèle importante, efficace et aisée à mettre en place, la majorité des participants précise également qu’elle dépend de l’enfant (E2). Fort de son expérience professionnelle, un accompagnateur pédagogique précise que le caractère important et essentiel d’une adaptation dépend du profil et des besoins de l’élève (AP1) déficient auditif. Parmi les autres adaptations relevées comme importantes par une majorité d’enseignants de notre échantillon (la moitié ou plus), nous trouvons les items « Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel », « Veiller à l’articulation tout en parlant clairement et naturellement », « Veiller aux conditions ambiantes », «Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension », « Place de l’élève dans la classe ». Si celles-ci sont considérées comme importantes, elles ne sont pas pour autant toutes répertoriées comme efficaces. En effet, seul « Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension » trouve une adhésion majeure en terme d’efficacité. A contrario, si « Favoriser les informations visuelles » semble moins important, plus de cinq huitièmes des enseignants interrogés considèrent cette adaptation comme efficace. La tendance inverse s’opère pour l’item « Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel » qui semble important sans pour autant être perçu comme efficace. Remarquons enfin que l’item « Eviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations » comptabilise un score nul tant au niveau de son importance que de son efficacité. Cependant sa facilité de mise en œuvre est formulée par trois enseignants de notre échantillon. Dans ce 65 cadre, une remise en questions nécessaire de leurs pratiques est évoquée par une majorité d’entre eux. D’autres adaptations sont également déclarées moins aisées à mettre en place (moins de la moitié) que d’autres : « Veiller aux conditions ambiantes », « Limiter les apports magistraux », « L’aider à se repérer dans le temps » et « Utiliser la langue des signes ou l’AKA ». Différentes explications sont fournies par les enseignants quant aux éventuelles difficultés éprouvées. Comme nous l’avons déjà explicité précédemment, certains enseignants considèrent que les conditions ambiantes ne dépendent pas entièrement d’eux mais également du groupe classe. Quand nous évoquons la limitation des apports magistraux, des observations sont formulées. La première se situe quant au choix du terme « limiter ». Il semble que les enseignants participants soient sensibles à cette adaptation. Ils estiment toutefois que les apports magistraux sont parfois nécessaires. Deux enseignants soulignent que l’utilisation d’un « time timer » facilite (E1) l’aide au repérage dans le temps. L’absence ou le manque de maitrise de la langue des signes ou de l’AKA justifie la difficulté de mise en œuvre de cette adaptation. Plusieurs enseignants soulignent que l’apprentissage de ces outils nécessite une formation (E3). Sur les huit enseignants interrogés, l’un précise que cet apprentissage ne fait pas partie de son projet de développement personnel (E4), un autre dit être en formation, un troisième confie ne pas fixer les notions acquises tandis que les autres considèrent que cette adaptation se situe dans le domaine des compétences des accompagnateurs pédagogiques (E2). Les résultats obtenus auprès des deux accompagnateurs pédagogiques tendent à rencontrer ceux des enseignants. L’unique dissemblance se situe au niveau de l’utilisation de la langue des signes ou de l’AKA. Pour l’un d’eux, cette adaptation représente un outil spécifique (AP1) extraordinaire. Il la qualifie d’essentielle et efficace (AP1). Nécessitant une formation, il reconnait que la maitrise de ces outils demeure essentiellement du ressort des accompagnateurs pédagogiques. Selon un accompagnateur pédagogique, il y a une certaine motivation à avoir (AP1) pour maitriser ces outils. Leur pratique est pourtant préconisée par 66 une majorité d’enseignants de notre échantillon afin de favoriser la prononciation, soutenir la compréhension ou développer le vocabulaire. Moyens adaptés dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires A la question « Au sein de votre classe, des moyens adaptés sont-ils prévus dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires des élèves déficients auditifs ? », cinq des enseignants de notre échantillon répondent spontanément privilégier la présence de l’accompagnateur pédagogique dont ils soulignent l’importance de l’action. Un enseignant décrit les adaptations possibles dans ce contexte : utilisation de la langue des signes ou l’AKA si cela est nécessaire, attirer l’attention de l’élève ou le guider de manière individualisée (E7). La moitié des enseignants interviewés situent les besoins des élèves déficients auditifs au niveau du savoir écouter et de la compréhension du vocabulaire. D’autres adaptations nécessaires sont dès lors planifiées comme la mise en évidence, l’adaptation des consignes et/ou des questionnaires. L’isolement de l’élève pour la passation des épreuves de savoir écouter est également pratiqué par un enseignant. La reformulation en vue de vérifier la compréhension, l’octroi de temps ou d’explications supplémentaires sont également évoqués. Sept moyens adaptés dans le cadre de l’évaluation (proposés par le BIAP) sont ensuite soumis aux participants. Quatre concernent les épreuves écrites, trois les épreuves orales. Il s’agit de les classer selon leur fréquence de mise en œuvre : jamais, parfois ou toujours. Nous constatons une grande propension à mettre en œuvre les adaptations proposées dans le cadre des évaluations écrites. Selon le discours d’un quart des enseignants de notre échantillon, la prolongation du temps accordé à chaque épreuve et la présentation écrite des textes et des consignes font partie de leurs pratiques usuelles. Parmi les items proposés, la présence d’une personne compétente pour les épreuves écrites présente le score le plus faible. Un enseignant précise qu’il s’agit d’un accord avec l’accompagnatrice […] en fonction des difficultés de l’apprentissage (E7). Pour les épreuves orales, des dispositions favorables de mise en œuvre s’observent également excepté pour un item. La passation des épreuves orales sous forme écrite représente un moyen que sept enseignants sur huit témoignent ne jamais pratiquer. Un enseignant explique qu’il insistait vraiment pour que ça passe par de l’oral. 67 Mais l’oral était différent. C’était une différenciation de l’oral mais on faisait quand même sous forme d’épreuve orale. C’était une différenciation du produit. C’est une autre adaptation (E5). Un enseignant avoue être coincé là-dedans (E7). Il a du mal à se dire que ça peut être écrit aussi puisque c’est… (E7) de l’oral tandis qu’un autre relate que ce n’est pas mis sous forme écrite pour les épreuves orales. On le fait en oral (E7). Enfin, un dernier explique qu’il ne fait jamais passer des épreuves sous forme écrite car (E8) il part du principe (E8) qu’il essaie d’avoir les mêmes exigences pour tous (E8). Nous apprenons également que toutes les adaptations mises en œuvre durant les phases d’apprentissage ne sont pas nécessairement mises en œuvre durant les évaluations. Un enseignant de dire : en contrôle, c’est comme si les autres avaient leur synthèse à côté d’eux (E7). Ce classement est renforcé par celui des deux accompagnateurs pédagogiques qui relèvent quant à eux une plus grande présence de l’enseignant ordinaire auprès de l’élève déficient auditif. Ils constatent également que, lors des évaluations écrites, les adaptations sont mises en place avec plus d’aisance car elles peuvent être anticipées. Par contre, lors des évaluations orales, les interactions avec le groupe classe peuvent se révéler au détriment de l’élève déficient auditif. C’est dans l’oral que tout se joue et c’est là où cela blesse. Parfois on oublie que l’enfant est là (AP1). Selon un accompagnateur pédagogique, toutes ces adaptations spécifiques sont primordiales au développement global de l’élève déficient auditif. D’autant qu’il observe dans sa pratique quotidienne qu’un retour dans l’enseignement spécialisé, au terme d’une intégration interrompue, a des conséquences néfastes en terme d’estime de soi. Il a besoin d’être bien en classe, bien au niveau pédagogique, bien avec les autres élèves. Tout cela l’aide à se sentir bien lui-même et bien intégré en classe, de bien comprendre ce qu’on lui demande. Parce qu’une intégration ratée… Une intégration ratée a beaucoup d’impacts sur l’enfant, l’estime de lui-même. C’est quand même un échec. J’en ai qui sont de retour dans ma classe (AP2). 68 Il va s’en dire que de nombreux facteurs externes aux pratiques pédagogiques ont été explicités dans cette première partie d’analyse. Il importe dès lors de chercher à cibler et à comprendre les diverses interactions qui ont émergées des entretiens semi-directifs menés, ce que nous explicitons dans le point suivant. 6.2. Thèmes émergents A travers des extraits choisis et emblématiques du discours des participants, nous présentons à présent les huit autres grandes thématiques qui ont émergées lors de l’analyse des données à savoir le contexte de l’intégration, le profil de l’élève déficient auditif, la perception de la différence, les ressources humaines et matérielles disponibles, les sources d’apprentissages formels et informels, l’engagement, l’expérience et le développement professionnel. 6.2.1 Le contexte de l’intégration Tous les participants rencontrés lors des entretiens se disent engagés dans le processus d’intégration. Toutefois, l’un d’entre eux précise qu’il ne s’agit pas d’un choix personnel : ça fait partie du projet d’établissement […]. Quand on vient dans cette école, on adhère à ça (E4). Dans le cadre de l’intégration, l’action de l’accompagnateur pédagogique, telle que décrite par les intéressés, est de s’assurer que l’élève déficient auditif comprend bien les prescriptions formulées par l’enseignant ordinaire mais également ce qui se vit au sein de la classe. Il s’agit d’un accompagnement visant l’autonomie. Un accompagnateur explique qu’il était donc vraiment là pour faciliter ses apprentissages en classe (AP2) (entendons les apprentissages de l’élève intégré). Si l’intégration est considérée comme très riche parce que justement ce support extérieur (AP1) existe, une forme de sentiment d’injustice anime néanmoins certains enseignants quant au suivi d’autres élèves en difficulté ne bénéficiant pas d’une intégration. 69 Pour ces enfants-là, il y a énormément de temps qui leur est consacré […] ils sont assez individualisés par rapport aux autres. (E8) Ces enfants […], pour moi, scolairement, sont très accompagnés par rapport à l’autre public que j’ai en classe. (E4) Pour autant, les témoignages de tous les participants attestent de l’importance de cet accompagnement et réclament davantage de périodes d’encadrement. […] il faudrait qu’elle soit là tous les jours. (E3) L’aide pédagogique […] devrait être plus présente que quatre heures. (E6) Il leur faudrait donner beaucoup plus. Il leur faut une personne ressource mais pas rien que 4 heures semaine. Ce n’est pas suffisant. (AP1) Le nombre d’élèves dans la classe ordinaire rend parfois l’accompagnement de l’élève intégré plus contraignant pour l’enseignant, réalité également perçue par les deux accompagnateurs pédagogiques. Mais si on en avait qu’un en classe, ce serait facile mais il y en a plusieurs […]. (E6) […]je trouve que la charge de l’enseignant est de plus en plus lourde et qu’ils n’ont pas tous les outils. (AP1) De même, la contrainte temporelle qui empêche parfois la présence d’une personne compétente au moment opportun demande une bonne collaboration avec l’enseignant afin de palier à cette difficulté par la mise en place d’un horaire répondant aux besoins du terrain. […] pas toujours évident d’avoir la personne compétente au bon moment. (AP2) […] je réservais toutes mes découvertes quand elle venait. (E2) […] je sélectionnais vraiment les épreuves principales où il fallait vraiment avoir quelqu’un. (E7) L’absence de périodes de concertations institutionnalisées représente un frein à cette pratique partenariale. 70 […] si on avait des concertations avec ces personnes… (E8) Les enseignants de notre échantillon expriment, en terme de compétences à acquérir, avoir des exigences identiques pour les élèves déficients auditifs que celles des autres élèves de la classe. […] j’essaie d’avoir les mêmes exigences pour tous. (E8) Le but c’est que l’enfant acquiert toutes les compétences comme les autres élèves de la classe. (E7) Cependant l’élève déficient auditif possède un profil spécifique… On va tous dans la même direction mais ces petits loulous, ils ont une marche sur deux. Ils doivent essayer de suivre le train tout en sachant qu’ils n’ont pas toutes les mêmes compétences et qu’ils seront accompagnés davantage. (E5) 6.2.2 Le profil de l’élève déficient auditif Il avait plus de besoins que l’autre élève… (E7) Cette phrase énoncée part un enseignant résume le fil conducteur de ce point : il y a autant de profils que d’élèves déficients auditifs. Pour trois enseignants interrogés sur huit, l’intégration fonctionne pour autant qu’il n’y ait pas de problèmes comportementaux ou de troubles associés (E8) à la surdité. Tous les participants relèvent des besoins spécifiques chez leurs élèves déficients auditifs intégrés. Parmi les difficultés observées, cinq enseignants confient que souvent ces enfants-là ont des difficultés de vocabulaire (E3). D’autres difficultés, situées dans différents domaines, par exemples au niveau de la prononciation ou dans le domaine du savoir écouter, sont également relevées par les participants. 71 Les enfants déficients auditifs ont […] des difficultés d’expression. (E5) Dans la structure des phrases au niveau de la morphosyntaxe, ils éprouvent parfois des problèmes. (AP1) Le second degré c’est tout un registre qu’il ne percevait pas. Donc tout ce qui était de la subtilité ou du langage abstrait […] je devais faire fort attention. (E5) Tout comme ces élèves présentent des aptitudes dans d’autres domaines. Ces enfants intégrés avaient aussi des domaines de compétences dans d’autres domaines. (E4) De même, ils ne présentent pas tous des profils d’apprentissage similaires. Il était très auditif alors qu’il était malentendant. (E7) La langue des signes, il ne prenait pas. (E7) Tous les acteurs interrogés s’accordent sur le fait que le profil de l’élève déficient auditif permet de cibler les adaptations qui lui seraient bénéfiques. Les adaptations…[…] Ça dépendait du profil de l’enfant aussi, de ses besoins. (E1) Si cet enfant est appareillé, c’est encore différent que si cet enfant n’est pas appareillé. (E5) Enfin, nous percevons dans le discours des participants certaines particularités non négligeables liées à la psychologie de l’enfant sourd. Il y a des moments où elle se referme. […] elle cherche à être toute seule et ne pas entendre les informations. (E8) […] ils pensent tout entendre et tout comprendre alors que ce n’est pas le cas. (AP1) 72 Les enfants se posent énormément de questions part rapport à leur surdité. (AP1) Parce qu’il y a des enfants qui veulent vraiment se fondre dans la masse. […] certains veulent vraiment effacer leurs différences et essaient de faire en sorte comme s’ils n’étaient pas appareillés. […] ils en ont besoin… (E5) Un travail lié à la valorisation de l’élève déficient auditif intégré, à la sensibilisation du groupe classe à la surdité apparaît dès lors essentiel. C’est vraiment important pour l’enfant de se sentir bien à sa place et bien en classe et bien soutenu. (AP2) 6.2.3 La perception de la différence D’abord on a fait connaissance. On a essayé de se connaître, d’apprendre à se connaître… (E2) Ces quelques mots formulés par un enseignant attestent la place donnée à la rencontre de l’autre dans sa différence. L’analyse des entretiens des divers acteurs démontre une capacité d’ouverture chez chacun d’eux. […] J’ai déjà une posture d’ouverture face aux différences. (E4) On est tous différents de toutes manières. Que ce soit un problème auditif ou un problème de vue, c’est la même chose. (E7) Cette aptitude de tolérance, ils souhaitent la développer chez tous les élèves. […] il y a tout un travail, je dirais, de sensibilisation, d’accueil de l’autre, de la différence… (E5) Je travaille aussi au niveau de certains sentiments d’injustice. Mes élèves me disent : « Mais madame, c’est pas juste. » Et je leur réponds : « Si tu devais aller en Birmanie ou si tu devais aller en Ukraine, tu serais bien content qu’on te dise que tu ne peux faire que la moitié. » C’est donc essayer qu’ils prennent la place de… Et de se rendre compte des difficultés que certains peuvent éprouver. (E4) 73 Ainsi, à la question « Voulez-vous raconter une activité significative menée dans votre classe en lien avec l’intégration des élèves déficients auditifs ? », six participants racontent une activité soit en lien avec le respect des différences soit de valorisation de l’élève déficient auditif. Cette activité vise l’intégration de l’élève déficient auditif au sein de la classe à travers la sensibilisation du groupe. Selon eux, elle permet également d’acquérir une plus grande tolérance face aux éventuelles adaptations mises en place. Une activité spécifique ? […] C’est vraiment de faire prendre conscience de la surdité aux autres enfants. (E8) Et alors aussi attirer l’attention des autres sur le fait qu’elle est différente et c’est pour cela qu’elle a de l’aide parce que, parfois, les enfants, ils ne comprennent pas que… (E2) Les autres ne se rendaient pas compte de tout ça, qu’il a fallu adapter. (E2) Cette posture d’ouverture favorise la mise en place d’adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs mais également des autres. […] c’est pas parce que les enfants sont déficients auditifs qu’ils n’ont pas droit à l’encadrement ordinaire. Je veux dire… Ils sont tout à fait capables de réussir dans l’enseignement ordinaire donc pourquoi ne pas leur permettre justement d’y arriver en mettant des petites adaptations en route. (E1) […] avec un enfant, par exemple, qui a des problèmes auditifs, il faut vraiment aller voir plus loin […] on est capable de faire plus de choses même pour les autres enfants. (E7) 6.2.4 Les ressources disponibles A la question « Quelles sont les ressources, les aides, les outils sur lesquels vous vous appuyez pour faciliter l’intégration des élèves déficients auditifs ? », diverses réponses sont notamment apportées en terme de ressources humaines et matérielles disponibles par les participants à notre étude. 74 Les ressources humaines disponibles Les enseignants citent diverses ressources humaines intervenant tout au long du processus d’intégration. Un d’entre eux relève l’importance du leadership de la direction (E5) dans la mise en place des projets d’intégration. En plus de la direction, les parents et les collègues jouent un rôle dans le cadre de la préparation des enseignants pour mener à bien ces projets d’intégration. […] la rencontre avec les parents aussi parce que c’était important au départ qu’ils nous expliquent un petit peu comment l’enfant fonctionnait. (E8) […] il y a aussi eu les discussions avec les institutrices maternelles qui avaient eu les élèves. (E8) Il y a des collègues qui ont eu l’enfant. (E7) D’autres intervenants externes participent quant à eux à la sensibilisation des élèves que nous évoquons dans le point précédent tels que des audiologues, des membres du personnel de l’enseignement spécialisé. Des audiologues sont venus en classe expliquer aux autres enfants. (E5) […] des personnes de l’enseignement spécialisé qui viennent expliquer […]. (E5) Dans le cadre de la mise en place des adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs, les collègues (pairs) sont à nouveau cités ainsi que les logopèdes en charge du suivi de ces élèves. Je suis allée voir mes collègues, qui avaient des bonnes idées. (E7) Je dirais que les logopèdes, l’appui logopédique, c’était plus… […] Mais c’est vrai que c’était important d’avoir ce feed-back et ce retour. (E5) Les conseils de classe sont assimilés à des lieux riches d’échanges et de partages, chaque acteur amenant ses propres compétences. Néanmoins, à l’unanimité, les huit enseignants déclarent que la ressource humaine majeure réside en la personne de l’accompagnateur 75 pédagogique. Ils identifient d’abord son action dans le cadre de leur préparation pour mener à bien ces projets d’intégration. On a eu beaucoup d’infos parce que la coordinatrice pédagogique est venue à l’école nous a donné beaucoup de pistes et d’informations […]. (E5) C’est vrai que l’aide pédagogique m’avait donné des petites informations à lire et cela m’a beaucoup aidé aussi. (E2) Dans un second temps, ils soulignent son soutien dans la mise en œuvre d’adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs. […] il y a les accompagnatrices pédagogiques qui m’ont beaucoup aidée justement à pouvoir mettre des choses en place, des adaptations et qui ont été vraiment un appui pour pouvoir mettre un maximum de choses en place pour ces enfants-là. Elles nous ont guidés […] (E7) L’accompagnatrice pédagogique était tellement une grande ressource que c’est elle qui m’apportait vraiment tout… (E1) […] elles sont vraiment là, c’est vraiment important. En tout cas, moi, j’ai trouvé ça plus facile, avec elles, de trouver des solutions. (E7) C’est l’accompagnatrice pédagogique qui m’a guidée dans plein de démarches à suivre pour justement pouvoir aider ces enfants. (E3) Ensuite, il valorise l’accompagnement qu’il prodigue aux élèves dont il a en charge l’encadrement. Ses compétences professionnelles spécifiques permettent l’utilisation de l’AKA et de la langue des signes. Pour les tâches les plus compliquées, c’était bien qu’elle soit là. (E1) J’essayais de faire mes évaluations pour lesquelles je savais qu’ils auraient eu besoin d’un soutien le jour où l’accompagnatrice pédagogique venait. (E4) Utiliser l’AKA… […] Je veux dire si l’accompagnatrice pédagogique n’avait pas été là…(E2) 76 Les accompagnateurs pédagogiques sont donc considérés comme une ressource, une aide, un soutien par les enseignants de notre échantillon. Ces partenaires collaborent : partages et échanges de pratiques, réflexions autour des adaptations à mettre en place pour répondre aux besoins de l’enfant. Les accompagnateurs pédagogiques mettent leurs compétences au service des enseignants mais aussi des élèves déficients auditifs intégrés. Toutefois, quelques enseignants interrogés émettent une réserve : seul un accompagnateur pédagogique compétent, formé et engagé représente une ressource humaine indispensable. Je trouve que la collaboration entre nous est vraiment le support pour que cette intégration se passe bien. (E4) Le dynamisme, je pense. Il faut voir clair, voir le problème, voir comment on peut aider l’enfant. […] Il faut presque leur dire alors que, je trouve, c’est la personne qui justement devrait voir et nous dire : « Tu vois tel élève, ça, ça ne va pas parce que… », nous aider et nous expliquer comment on peut l’aider. (E8) Elles sont formées et donc, je trouve qu’elles devraient nous donner des pistes. (E8) Les ressources matérielles disponibles Parmi les ressources matérielles disponibles citées par les différents acteurs nous retenons le carnet de notes (permettant une transmission optimale entre les acteurs), l’appareillage (appareil auditif ou implant cochléaire) et le système FM, ce dernier remportant un large succès. Le système FM est aussi un appui aussi pour faciliter le travail avec les élèves déficients auditifs en tant que ressources matérielles. (E1) 6.2.5 Les sources d’apprentissages Nous distinguons dans le discours des enseignants de notre échantillon deux sources d’apprentissages distinctes. Celles-ci contribuent à leur préparation pour mener à bien les projets d’intégration tout comme à la mise en œuvre d’une pédagogie adaptée répondant aux 77 besoins des élèves déficients auditifs mais également à l’actualisation de leurs connaissances concernant les élèves à besoins spécifiques. Six enseignants sur huit témoignent de leur volonté à actualiser leurs connaissances par des moyens diversifiés. Les sources d’apprentissages formels Peu d’enseignants font référence à des formations préalables au processus d’intégration ou en cours. Si formations il y a, celles-ci se sont organisées en interne à l’établissement de manière collective et concernent exclusivement l’apprentissage de l’AKA. Les sources d’apprentissages informels Diverses sources d’apprentissages informels sont répertoriées par les enseignants participants : la consultation d’articles scientifiques ou d’ouvrages spécifiques, la documentation via internet, les échanges avec les collègues (pairs) ou avec les accompagnateurs pédagogiques plus ou moins expérimentés ainsi que d’autres professionnels. La participation aux conseils de classe est également relevée comme source d’apprentissage. Nous constatons néanmoins que la principale source d’apprentissages se révèle être les accompagnateurs pédagogiques. D’après les témoignages des huit enseignants, ceux-ci conseillent des ouvrages à consulter, communiquent des informations (sur la surdité entre autres), apportent des idées, fournissent des pistes de réflexion et d’adaptations, prodiguent des conseils, échangent des bonnes pratiques, guident les actions, procurent un feed-back des pratiques observées, etc. La plupart des échanges ont lieu de manière informelle, lors de discussions à bâtons-rompus durant des temps de midi ou des récréations. Ils sont aussi provoqués par des questions posées par les enseignants en recherche de réponses. Les enseignants interviewés disent également apprendre beaucoup en les observant. Ce double regard sur les pratiques, sur les apprentissages est perçu comme un échange, un partage, une collaboration par les deux parties. Chacun dit se nourrir de l’autre. 78 6.2.6 L’engagement A l’analyse des divers entretiens menés, nous avons relevé différents indices d’engagement. D’emblée, différents enseignants de notre échantillon soulignent leur engagement dans le processus d’intégration. « Et vous êtes partante à chaque fois ? » Oui, oui, tout à fait. Et là, je crois que je suis dans celle qui pousse le plus. (E1) Vous avez été porteur du projet avec le reste de l’équipe ? Oui, oui, tout à fait. (E3) On a eu l’occasion, nous aussi, de suivre une formation d’AKA pendant les temps de midi et on était plusieurs à vouloir la suivre… Même si la première année je n’avais pas d’élève, à ce moment-là, dans ma classe. (E8) A plusieurs reprises, lorsque nous évoquons le sujet de la mise en œuvre des pratiques pédagogiques adaptées, les enseignants témoignent de leur engagement professionnel. […] c’est dans notre métier de pouvoir adapter, de faire des choses supplémentaires pour les enfants, pour essayer d’y arriver. (E1) C’est pareil, il faut de toute façon travailler pour les autres aussi. (E6) Ca demande du travail mais pas trop. Il faut le faire quoi. (E7) Selon les deux accompagnateurs pédagogiques interrogés, la mise en œuvre de certaines adaptations spécifiques telles que l’utilisation de la langue des signes ou de l’AKA dépend du niveau d’engagement de l’enseignant. Ce niveau d’engagement serait proportionnel aux besoins de l’élève déficient auditif. De plus, la maitrise de ces outils demande une formation spécifique dans laquelle plusieurs enseignants se sont volontairement investis. Faciles à mettre en place ? Il faut pouvoir… Il y a une certaine motivation à avoir. Oui… Il y a des cours à suivre comme pour la langue des signes ou l’AKA. Ce n’est pas toujours évident […]. (AP2) 79 6.2.7 L’expérience Plusieurs enseignants de notre échantillon déclarent s’être formés ou avoir acquis certains gestes au contact des élèves déficients auditifs intégrés. Un accompagnateur pédagogique remarque qu’en fonction de l’enseignant la pratique de certaines adaptations s’accentue avec le temps. […] je vais dire, peut-être aussi avec l’expérience, qu’on devient plus attentif aux besoins de chacun. (E2) Je me suis formée sur le tas. (E4) Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel ? […] Cela m’a pris du temps mais j’y suis arrivée. (E5) Comme cela se fait de manière progressive… (AP1 parlant des changements de pratiques de certains enseignants) 6.2.8 Le développement professionnel Six enseignant sur huit attestent que la présence d’élèves déficients auditifs dans leur classe a modifié leur conception du métier et/ou leur façon de l’exercer. Oui, ça m’a changée. Dans le sens où, je me dis qu’on a tous besoin de plus. […] Il y a plus de travail sur chacun, sur moi-même. C’est passionnant dans le sens où ça fait vivre, ça fait réfléchir. On ne se met pas dans une routine. On cherche. On essaie d’évoluer, d’évoluer pour soi et d’évoluer pour les autres. Tout ce que j’ai appris, ça m’a grandi. J’ai appris… […] C’est vaste et on ne demande qu’à en savoir plus. […] Je ne serais pas ce que je suis aujourd’hui sans tout ce que j’ai connu. (E7) L’expérience de l’intégration a engrangé chez eux un développement personnel. L’un d’eux décrit ce changement comme une autre philosophie. Si la volonté de chercher une forme 80 d’homogénéité est toujours présente, c’est cependant en tenant compte des différences intrinsèques de chaque enfant. Certains évoquent une remise en question de leurs pratiques. Un autre confie qu’enseigner à des élèves déficients auditifs lui a demandé une introspection plus importante. Celle-ci a permis son développement professionnel au bénéfice de tous les élèves de sa classe. L’approche de l’enseignement lui semble différente. Une envie de s’investir davantage l’anime, d’aller plus en avant dans ses investigations. De manière générale, les enseignants interrogés perçoivent ce développement dans la capacité à être plus attentif aux difficultés, aux besoins de chaque élève. Cette capacité se concrétise dans la mise en œuvre d’une pédagogie différenciée mais aussi d’adaptations spécifiques au bénéfice de tous. Ils parlent du développent de moyens, d’outils à mettre en œuvre pour soutenir les élèves, d’une adaptation de leur enseignement à leurs besoins. Ces différences, les enseignants de notre échantillon précisent qu’il n’est pas concevable de les aborder seul. Le fait de collaborer avec des acteurs issus de l’enseignement spécialisé agit comme levier de développement professionnel. Ils considèrent ce partenariat riche pour chacune des parties. On se remet vraiment en question par rapport aux difficultés de ces enfants-là. On voit leurs difficultés et on s’adapte. […] (E1) on apprend de plus en plus de choses et donc on avance et on progresse avec les enfants. (E1) C’est intéressant de découvrir une autre manière d’enseigner, une autre manière de faire par rapport à certaines enfants et à certaines difficultés. (E1) Je pense que l’on fait plus attention aux difficultés de chacun… Qu’on devient plus attentif aux besoins de chacun. On voit plus les difficultés de l’enfant. Je trouve qu’on a plus de moyens, plus d’idées. (E2) […] on est capable de faire plus de choses même pour les autres enfants. (E7) Seuls deux enseignants interviewés disent ne pas percevoir de modification dans leur conception du métier ou dans leur façon de l’exercer. L’un explique qu’il était déjà emprunt d’une posture d’ouverture aux différences tandis que l’autre considère les élèves déficients auditifs comme les autres. 81 Les deux accompagnateurs pédagogiques, quant à eux, perçoivent des changements dans la pratique de certains enseignants ordinaires, changements dont ces derniers n’auraient pas toujours conscience. Ils qualifient cette évolution de progressive. Ils font également part de collaborations avec les enseignants de l’ordinaire permettant la mise en place d’adaptations pédagogiques au service des élèves déficients auditifs intégrés dans les classes. Cela amène la réflexion. Cela amène des questionnements. Cela amène des adaptations, pas seulement pour l’enfant sourd mais pour le reste de la classe et pour les autres enfants en difficultés. Ils posent aussi des questions sur d’autres enfants. (AP1) Les enseignants et enseignantes évoluent. (AP1) 82 Chapitre 7 – Discussion des résultats Dans ce dernier chapitre, nous présentons une discussion des résultats obtenus avant d’exposer les limites du travail. 7.1 Discussion des résultats La figure 5 présente la mise en lien de notre analyse avec les différents apports théoriques. Dans ce point, et sur base de cette figure, nous développons un résumé des données récoltées et leur mise en lien avec les éléments théoriques dans les paragraphes suivants. Figure 5 : Mise en lien de l’analyse des résultats avec les différents apports théoriques. 83 La situation pédagogique Tel que explicité dans la synthèse des apports théoriques, la situation pédagogique dont il est question dans le cadre de cette recherche se caractérise essentiellement par deux facteurs. D’une part, le contexte de l’intégration en enseignement ordinaire d’élèves issus de l’enseignement spécialisé, celui-ci organisant un accompagnement pédagogique en fonction de leurs besoins et d’autre part, le profil de l’élève en difficulté, à savoir les élèves déficients auditifs intégrés. A l’analyse des données recueillies auprès de notre échantillon, nous constatons que le processus d’intégration et les moyens mis à disposition dans ce cadre, tels que l’encadrement de l’élève intégré par un accompagnateur pédagogique et l’organisation de conseils de classe, concourent à la formation informelle des dix enseignants tant de l’ordinaire que du spécialisé, chacun s’enrichissant de l’autre. Les sources d’apprentissages formels s’avèrent, quant à elles, presque inexistantes. Quelques formations à l’AKA sont répertoriées. Les enseignants interrogés expriment peu de besoin à ce niveau. En effet, les personnes possédant des compétences professionnelles spécifiques comme les accompagnateurs pédagogiques, les logopèdes et autres personnes issues de l’enseignement spécialisé représentent des ressources humaines non négligeables. Si la direction de l’école ou les collègues des enseignants de notre échantillon sont également répertoriées comme telles, leurs apports sont moins caractéristiques. Toutefois, des réserves sont formulées quant aux compétences et aux prestations des accompagnateurs pédagogiques. Selon les témoignages récoltés, ces personnes, afin d’être ressources tant pour l’élève déficient auditif intégré que pour l’enseignant de l’ordinaire, doivent nécessairement être formées et engagées dans le processus d’intégration. Ainsi, les stratégies relevées par Lesain-Delabarre (2000) profitables au développement professionnel des enseignants ordinaires en charge de ces élèves rencontrent notre adhésion. Comme nous le stipulons, en plus de la direction, des parents et des collègues, nous avons dégagé de nos analyses que le processus d’intégration et les moyens offerts jouent un rôle majeur en terme de coopération et de mobilisation des ressources. Nos résultats abondent également dans le sens des recherches de Detraux (2000) démontrant que l’intégration invite 84 les différents acteurs au partenariat. La mise à disposition d’un accompagnateur pédagogique tout comme l’organisation de conseils de classe réguliers contribuent également à la formation du personnel. En effet, notre analyse démontre que, selon les enseignants interrogés, certaines adaptations (comme l’utilisation de l’AKA) demandent des compétences professionnelles spécifiques nécessitant une formation. Dans ce cadre, le soutien des professionnels compétents, formés et engagés se révèle une ressource non négligeable au point que des périodes d’encadrement supplémentaires soient réclamées par les enseignants interviewés. Nous avons soulevé que l’absence de périodes de concertations institutionnalisées représente pour certains un frein à cette pratique partenariale. Duquesne (2002) met également en avant cette dimension quand il insiste sur l’importance des moyens tels que des temps de concertation pour les équipes. Outre cette observation, nous relevons également les apports de Duquesne (2002) stipulant que les enseignants doivent disposer de temps de formation, indispensables à la mise en œuvre de diverses adaptations. Or, nous constatons auprès des enseignants interrogés que les principales formations s’avèrent informelles alors qu’une majorité d’entre eux témoignent de l’importance accordée à l’actualisation de leurs connaissances sans pour autant exprimer de besoins particuliers. Nous constatons toutefois que cette pratique s’avère profitable tant pour les enseignants que pour les accompagnateurs pédagogiques de notre échantillon en terme de développement professionnel. Ce constat rencontre les observations de Detraux (2012) démontrant qu’un projet d’intégration serait également enrichissant pour les enseignants tant de l’enseignement ordinaire que du spécialisé. Selon les dix acteurs rencontrés, le profil singulier de l’élève déficient auditif nécessite la mise en œuvre de pratiques adaptives particulières et non statiques. Durant les entretiens menés, les participants explicitent que ces enfants présentent tous des besoins spécifiques variés tout comme des aptitudes dans divers domaines. De même, ils ne présentent pas tous des profils d’apprentissage similaires. Ces observations rencontrent les propos de Jaccaud (2009) quant à la signification du terme déficience auditive qui regroupe une infinité de situations particulières selon le type de surdité. Tant les enseignants que les accompagnateurs pédagogiques de notre échantillon reconnaissent qu’il y a autant de profils que d’élèves 85 déficients auditifs et s’accordent sur le fait que chaque profil singulier permet de cibler les adaptations qui seraient bénéfiques. Néanmoins, les enseignants de l’ordinaire bénéficient d’une ressource matérielle propre aux besoins de certains élèves : le système FM. La majorité des participants à notre étude relève l’importance et l’efficacité de l’utilisation de cet outil, quand cela est adapté aux besoins de l’élève, d’autant que les conditions ambiantes ne s’avèrent pas toujours optimales. Nos constats rejoignent en ce sens les observations de Tagger (2011) quant à l’importance de soutenir l’enfant déficient auditif appareillé dans la perception et la compréhension du langage oral et ceux de Le Capitaine (2011) qui considère qu’un soutien pédagogique approprié est nécessaire afin de répondre aux exigences d’un enseignement qui ne lui est pas spécifiquement adapté. Les pratiques pédagogiques Notre intérêt s’est porté sur les pratiques pédagogiques de classe mais également sur la différenciation et les adaptations spécifiques mises en œuvre à l’intention de l’élève en difficulté d’apprentissage. La typologie des gestes d’aide de Gombert & Roussey (2007) offre une perspective de catégorisation des énoncés formulés par les participants à notre étude concernant les pratiques pédagogiques d’aide à destination de l’élève intégré. Nos observations via les interviews dirigés ont permis d’identifier les pratiques usuelles, de différenciation et les adaptations mises en œuvre par les huit enseignants ordinaires au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe. Nous rejoignons à ce titre Le Capitaine (2004) dans sa définition des pratiques pédagogiques. L’ensemble des dispositifs ici mis en place semble concourir au développement des apprentissages de ces élèves dans le domaine des compétences scolaires prescrites. Alors que Mingrone (1994) insiste sur la préparation à l’accueil de l’enfant intégré, nous retrouvons ce paramètre dans les témoignages de cinq enseignants relatant des activités significatives visant l’intégration de l’élève déficient auditif au sein de la classe à travers la sensibilisation du groupe. Les résultats rejoignent également Tamm et Prellwitz (2001) quant à la nécessité de prise en 86 compte du développement global de l’enfant au sein des activités didactiques relevée par un accompagnateur pédagogique. Les pratiques usuelles déclarées par les enseignants de notre échantillon s’apparentent à une pédagogie que nous qualifions d’active, participative et empreinte de socioconstructivisme ayant pour but de favoriser les situations de construction des connaissances des élèves. Cette démarche rencontre les propositions de Duquesne (2002) lorsqu’il préconise de placer les élèves sourds dans des situations qui impliquent notamment une démarche active de la part de l’élève. Quant à la distinction des gestes énoncés par les huit enseignants au sein des répertoires de pratiques de différenciation et d’adaptations spécifiques, elle rejoint, en terme de critères, celle opérée par Nootens et Debeurne (2010) entre les adaptations générales (assimilables à de la différenciation) et les adaptations spécifiques (rejoignant la notion d’individualisation). La qualification de certaines comme des pratiques pédagogiques usuelles par l’ensemble des enseignants interrogés appuie les propos de Gombert et Roussey (2007) lorsqu’ils explicitent que l’adaptation de certaines pratiques enseignantes ne relève pas de l’élaboration de solutions exceptionnelles mais plutôt de gestes élémentaires. Sur base de la typologie des gestes d’aide élaborée par Gombert et Roussey (2007), nous avons entrepris un classement (cf. annexe 5) des adaptations spécifiques spontanément déclarées par les dix participants ou proposées lors des entretiens semi-directifs. Comme l’indique la littérature scientifique, l’élève déficient auditif peut avoir besoin d’un soutien individualisé et personnalisé. Celui-ci se matérialise dans la catégorie consacrée à la guidance et au contrôle individualisé de l’enseignant lors de la réalisation d’une tâche excepté que, dans notre cas, cette aide est principalement conduite par l’accompagnateur pédagogique dont l’importance de l’action est soulignée par les enseignants interviewés. Si l’adaptation proposée « Favoriser les informations visuelles » semble moins importante que d’autres, une majorité des enseignants interrogés considèrent cette adaptation comme efficace. Les données recueillies rencontrent dès lors les propositions de Duquesne (2002) quant à l’utilisation de supports visuels comme stratégie compensatoire tout comme les conseils prodigués en matière de gestion des échanges entre les élèves puisqu’ils rencontrent l’adhésion majeure des dix acteurs participants à notre étude. En effet, des adaptations 87 variées en lien avec l’aide des pairs de la classe vers l’élève à besoins spécifiques sont largement énoncées (pratique du tutorat, aide des pairs, etc.). Nous observons, dans le classement établi, trois catégories d’adaptations spécifiques non illustrées sur onze dont la dixième qui est « l’absence d’adaptation ». Nous n’avons pas rencontré de propositions inclassables et les huit enseignants ont déclaré avoir adapté leurs méthodes d’enseignement. De même, aucune adaptation des parcours n’apparaît à l’analyse des entretiens menés. La pratique d’une réduction de la somme des savoirs ou des notions à faire acquérir, comme le choix de matières à enseigner, ne font pas partie des adaptations pratiquées par les enseignants de l’ordinaire interviewés. Comme ils le déclarent, les objectifs fixés restent communs. Ce constat s’avère en opposition avec la vision présentée de l’intégration par Houssonlonge, Lontie et Pierard (2011) précisant que son but n’est pas que tous les enfants maitrisent des compétences similaires au terme de leur scolarité. Cette observation est renforcée dans la suite de la discussion. Les témoignages recueillis auprès de notre échantillon se révèlent en contradiction avec les études menées en matière d’intégration par Duquesne (2002) Selon ses recherches, l’évaluation est reconnue parmi les adaptations les plus contraignantes. Pourtant nous en listons plusieurs spontanément répertoriées par les huit enseignants interrogés et constatons, d’après leurs propos mais aussi ceux des deux accompagnateurs pédagogiques, une grande propension à mettre en œuvre celles proposées dans le cadre de nos entretiens. Selon le discours d’un quart des enseignants de notre échantillon, la prolongation du temps accordé à chaque épreuve fait partie de leurs pratiques usuelles alors que cette piste semble peu satisfaisante. Nous notons toutefois qu’une partie des enseignants interrogés privilégie la présence de l’accompagnateur pédagogique dont ils soulignent l’importance de l’action lors des évaluations. Nos constatations rejoignent alors l’auteur quant à la nécessité d’envisager d’autres modalités d’évaluation et d’engager une réflexion plus approfondie sur le sujet d’autant que, selon nos investigations menées auprès des huit enseignants, l’éventuelle passation des épreuves orales sous forme écrite proposée par le BIAP (1995) soit très peu pratiquée au sein de leur classe mais qu’également, les adaptations mises en œuvre durant les phases d’apprentissage ne le soient pas nécessairement durant les évaluations. Selon les 88 témoignages recueillis, la recherche d’une forme d’homogénéité reste présente mais tout essayant de tenir compte des différences intrinsèques de chaque élève qu’il soit déficient auditif ou non. Ce qui permet la mise en œuvre des adaptations spécifiques Notre étude vise à explorer et à comprendre le phénomène d’adaptabilité pédagogique des enseignants de l’ordinaire au sein du processus d’intégration d’élèves déficients auditifs. A l’analyse des résultats, nous constatons que divers facteurs tels que la collaboration, les ressources matérielles, les compétences professionnelles peuvent influer favorablement sur la mise en œuvre de ces adaptations. De plus, nous avons remarqué qu’une majorité d’enseignants de notre échantillon déclare que la présence d’élèves déficients auditifs dans leur classe a modifié leur conception du métier et/ou leur façon de l’exercer. La place donnée à la rencontre de l’autre dans sa différence est prépondérante dans leur discours. Nous avons observé une posture d’ouverture chez chacun d’eux favorisant la mise en place d’adaptations spécifiques au bénéfice des élèves intégrés mais également des autres. Nos analyses sont dès lors en accord avec celles de Lantier (1994) démontrant que la présence d’un enfant à besoins spécifiques induit des changements chez les enseignants tant dans la perception des élèves que dans l’attitude pédagogique à l’égard de tous. Les témoignages recueillis auprès des dix participants montrent en effet une reconnaissance de l’élève dans sa singularité et l’adoption d’une posture empathique favorisant les approches pédagogiques différenciées et adaptées. Alors que le besoin de posséder des compétences professionnelles spécifiques est nuancé par certains enseignants interrogés, qui parlent plutôt d’ouverture à la différence, une remise en question permanente et nécessaire, notamment de leurs pratiques, est évoquée par une majorité d’entre eux. Nous rejoignons dès lors Le Capitaine (2004), Mingrone (1994), Odom & al. (2004) et Tremblay (2012) considérant que l’intégration scolaire d’élèves issus de l’enseignement spécialisé et notamment du type 7 implique des changements au niveau du savoir-faire mais également au niveau du savoir-être de l’enseignant. Le développement d’une capacité à être plus attentif aux difficultés, aux besoins de chaque élève se concrétisant 89 dans la mise en œuvre d’une pédagogie différenciée mais aussi d’adaptations spécifiques au bénéfice de tous a été mis en exergue par les huit enseignants. Nous ne pouvons dès lors ignorer les résultats issus des recherches de Detraux (2012) indiquant que l’intégration profiterait aussi aux élèves de l’enseignement ordinaire. Selon Gombert et al. (2008), la mise en œuvre de pratiques pédagogiques adaptées bouscule l’enseignant dans sa manière de concevoir la prise en charge des élèves présentant des difficultés d’apprentissages au sein de sa classe. Au regard de ces apports, nous pensons que l’expérience de l’intégration a engrangé un développement professionnel d’une majorité des enseignants interrogés au bénéfice de tous les élèves. Enfin, si les huit enseignants interrogés trouvent normal de mettre en place des adaptations pour les élèves déficients auditifs, trois d’entre eux estiment cependant que l’intégration est envisageable pour autant que l’élève ne présente pas de problèmes comportementaux ou de troubles associés à la surdité. Face à ce constat, nous ne pouvons ignorer les propos de Thomazet (2008) quant au fait que la mise en place de l’intégration scolaire n’a pas modifié l’organisation du système éducatif belge. Nous constatons, malgré les signes d’engagement des enseignants de notre échantillon dans le processus d’intégration, une propension à exclure de celui-ci des enfants présentant des troubles trop différents de la norme attendue aux niveaux cognitif et comportemental. Tout comme l’indique Benoit (2003), le processus d’intégration scolaire implique que les élèves apportent la preuve qu’ils sont capables de s’adapter au risque, comme le souligne un accompagnateur pédagogique interrogé, d’un retour dans l’enseignement spécialisé, au terme d’une intégration interrompue avec les conséquences néfastes en terme d’estime de soi qu’il pourrait engranger chez l’enfant. 7.2 Limites Une première limite de nos analyses émane du nombre d’enseignants et d’accompagnateurs pédagogiques que nous avons pu rencontrer. Un nombre plus élevé d’entretiens aurait sans doute affiné plusieurs de nos observations. 90 Nos entretiens ont été effectués auprès d’enseignants et d’accompagnateurs pédagogiques non réfractaires au processus d’intégration. Une analyse auprès d’autres participants aurait vraisemblablement des résultats différents. Une autre limite est liée au fait que notre intérêt s’est porté uniquement sur des situations d’intégrations permanentes totales. Celle-ci peut avoir eu des répercussions sur l’explicitation des attentes des enseignants en terme de compétences à acquérir. Rappelons aussi que le caractère semi-directif de nos entretiens augmente la possibilité d’une explication partielle ou altérée de certains propos. Enfin, une autre se situe dans la fonction des acteurs interrogés. Une recherche similaire menée auprès d’élèves déficients auditifs quant aux adaptations mises en œuvre pour faciliter leurs apprentissages apporterait un angle de vision complémentaire à cette étude. 91 Conclusion Afin d’explorer et comprendre le phénomène d’adaptabilité pédagogique des enseignants de l’ordinaire au sein du processus d’intégration d’élèves déficients auditifs nous avons introduit notre travail par une présentation des apports théoriques s’adossant non seulement à une approche de la législation sur la question de l’intégration et plus particulièrement pour les élèves issus de l’enseignement spécialisé de type 7, mais aussi au concept de déficience auditive tout comme aux apports propres liés aux pratiques pédagogiques. Au départ de ce cadre théorique, nous avons explicité la nécessité d’une compréhension approfondie des dynamiques qui se cachent dans la mise en œuvre d’adaptations spécifiques au bénéfice de ces élèves intégrés. Dans cette optique, les entretiens semi-directifs menés nous ont permis de récolter des données relatives au processus de changements qui s’opèrent dans les pratiques mais aussi ce qui fonde ces modifications. Nous avons formulé la question suivante : dans quelle mesure les enseignants de l’ordinaire primaire adaptent-ils ou modifient-ils leur enseignement face aux élèves déficients auditifs intégrés dans leur classe afin que ceux-ci progressent au meilleur de leurs potentialités ? Nous avons explicité que le contexte de l’intégration et les ressources humaines qu’il offre s’avèrent bénéfiques au développement professionnel des enseignants. Les divers profils des élèves déficients auditifs et les besoins qui y sont associés tout comme la perception de l’élève amènent les huit enseignants interrogés à adapter et/ou à modifier leurs pratiques. Collaboration, partenariat et échanges informels contribuent également à la formation de ces enseignants. L’expérience acquise ajoutée aux différents facteurs explicités permet la mise en œuvre d’adaptations spécifiques au bénéfice des élèves déficients auditifs intégrés mais également profitables aux autres élèves de la classe. Le processus de l’intégration semble dès lors extrêmement favorable en de nombreux points. Cependant, des points faibles demeurent. Les compétences de certains accompagnateurs pédagogiques sont remises en question par des enseignants interrogés. Ceux-ci réclament également des concertations institutionnalisées avec les partenaires de l’enseignement spécialisé mais aussi davantage de périodes d’accompagnement pour encadrer les élèves déficients auditifs intégrés. L’Avis 151 du 92 Conseil supérieur de l’Enseignement spécialisé (2016) prodigue dans ce sens une série de propositions, de recommandations à l’intention des autorités gouvernementales. Ces différentes faiblesses pourraient dès lors être améliorées. Un point négatif majeur est également à souligner : la visée d’objectifs uniques et communs. Le processus d’intégration est dès lors mis en tension par rapport à celui de l’inclusion. Par ailleurs, nous pensons que d’autres études devraient être menées dans le but d’identifier les effets potentiels liés au changement de pratiques pédagogiques induit par le processus d’intégration directement auprès des élèves déficients auditifs intégrés. 93 Bibliographie Allal, L. & Mottier Lopez, L. (2005). Formative assessment of learning : A review of publications in French. In OECF (Ed.) Formative Assessment – Improving Learning in Secondary Classrooms (241-264-. Paris : OECD-CERI Publication Altet, M. (2000). L'analyse de pratiques: une démarche de formation professionnalisante?. Recherche & Formation, 35(1), 25-41. Anadón, M., & Guillemette, F. (2006). La recherche qualitative est-elle nécessairement inductive?. Recherches qualitatives, 26-37. Beaucher, H. (2012). 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(2008) Tableau 6 : Profils des participants à la recherche 47 Tableau 7 : Profils des participants à la recherche dans le processus d’intégration 48 Tableau 8 : Thématiques et questions d’entretien adressées aux enseignants de 51 l’enseignement primaire ordinaire Tableau 9 : Premières catégories émergentes 54 Tableau 10 : Nouvelles catégories émergentes 54 102 Annexes Annexe 1 : Questionnaire adressé aux enseignants de l’enseignement ordinaire Questionnaire adressé aux enseignants de l’enseignement primaire ordinaire Personne de contact : Christelle Poussière – Étudiante Master 2 en Sciences de l’éducation [email protected] - 0477 29 14 12 Votre profil Vous êtes : o Un homme o Une femme Quel âge avez-vous ? o o o o Entre 21 ans et 30 ans Entre 31 ans et 40 ans Entre 41 ans et 50 ans Plus de 50 ans Vous travaillez… o À temps plein o À temps partiel De quel(s) diplôme(s) disposez-vous (cochez si nécessaire plusieurs propositions) ? o o o o o Instituteur (-trice) maternel Instituteur (-trice) primaire Enseignant(e) secondaire Master en Sciences de l’éducation Autre :…………………………… 103 En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est votre ancienneté ? o o o o o Entre 1 an et 5 ans Entre 6 ans et 10 ans Entre 11 ans et 20 ans Entre 21 ans et 30 ans Plus de 30 ans En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est le nombre d’années d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques ? o Entre 1 an et 5 ans o Entre 6 ans et 10 ans o Plus de 10 ans De quel type d’enseignement spécialisé étaient issus ces enfants à besoins spécifiques ? o o o o o o o o Type 1 : retard mental léger Type 2 : retard mental léger modéré ou sévère Type 3 : troubles du comportement Type 4 : déficiences physiques Type 5 : maladies ou sont convalescents Type 6 : déficiences visuelles Type 7 : déficiences auditives Type 8 : troubles des apprentissages En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est le nombre d’années d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques issus de l’enseignement spécialisé de type 7 (déficiences auditives) ? o Entre 1 an et 5 ans o Entre 6 ans et 10 ans o Plus de 10 ans Votre école… Localisation : ……………………………………………… Encadrement différencié : o Oui o Non Nombre d’élèves dans votre classe : …………. Nombre d'enfants sourds accueillis dans votre classe :………………. 104 Expérience Thème Question 1. Quelle expérience avez-vous en tant qu’enseignant(e) avec des élèves déficients auditifs ? Relance éventuelle Porteur du projet ? 2. Comment vous êtes-vous préparé(e) pour mener à bien ces projets d’intégration ? Vous êtes-vous documenté(e) ? Auprès de qui ? 3. La présence d’élèves déficients auditifs dans votre classe a-t-elle modifié votre conception du métier et/ou votre façon de l’exercer ? En quoi ? Avant, après ? 4. Quelles sont vos pratiques pédagogiques usuelles ? Utilisation de manuels ? Vision initiale du projet ? Sur les pratiques (manière de faire, avec les enfants déficients auditifs, avec les autres, domaines de changements) ? Pédagogie active, de projet, … 5. Voulez-vous raconter une activité significative menée dans votre classe en lien avec l’intégration des élèves déficients auditifs ? En individuel / sous-groupes / classe ? Contacts et interactions avec les élèves de la classe ? Pratiques pédagogiques Aide pédagogique ? 6. Dans les gestes précis identifiés, y en a-t-il qui guident toutes vos actions dans les activités de votre classe ? 7. Pratiquez-vous de la différenciation au sein de votre classe ? Si oui, de quelle manière ? 8. Des adaptations peuvent être nécessaires aux élèves déficients auditifs intégrés dans l’enseignement ordinaire. Classez les propositions suivantes selon que vous êtes d’accord avec elle ou non. Expliquez vos choix. (Les propositions sont présentées sous forme de fiches.) a. b. c. d. Je trouve qu’il est normal dans l’enseignement ordinaire de mettre en place des adaptations pour les élèves déficients auditifs. Les adaptations à mettre en place demandent des compétences professionnelles spécifiques. Les adaptations à mettre en place demandent trop de travail supplémentaire. Le travail nécessaire à la mise en place d’adaptations ne me dérange pas. 105 9. Si vous en mettez en place, quelles adaptations pédagogiques ou méthodes inédites identifiez-vous comme bénéfiques aux élèves déficients auditifs ? 10. Parmi les propositions d’adaptations pédagogiques suivantes : a) Lesquelles mettez-vous en œuvre dans votre classe au bénéfice des élèves déficients auditifs ? Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Expliquez vos choix. a. b. c. (Les propositions sont présentées sous forme de fiches.) d. b) Lesquelles sont importantes, pour vous ? c) Lesquelles sont efficaces ? d) Lesquelles sont faciles à mettre en place ? e) Pour celles qui vous semblent difficiles à mettre en place, vous sentez-vous capables de les mettre en place ? e. f. g. h. i. j. k. l. Attirer son attention avant de lui parler (car cela permet à l’élève de se concentrer préalablement sur l’interlocuteur) et maintenir le contact visuel (car les mimiques et les gestes donnent des informations importantes). Éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations Veiller à l’articulation, tout en parlant clairement et naturellement. Un rythme de parole pas trop rapide, un ton pas trop fort (désagréable avec les appareils), une bonne articulation offrent à l’élève les meilleures conditions. Veiller aux conditions ambiantes. Ne pas parler en se déplaçant (lecture labiale entrecoupée, voix non dirigée), ne pas parler en montrant quelque chose (ne saura plus où regarder, lecture labiale entrecoupée), éviter les bruits de fond, parler une personne à la fois. Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension (en lui demandant de reformuler par exemple). Favoriser les informations visuelles. (Donner les consignes par écrit, multiplier les schémas, les croquis, les images.) Limiter les apports magistraux. (Limiter les longues explications.) Dissocier (j’écris puis je parle en montrant l’écrit, le dessin ou…) L’aider à se repérer dans le temps. (L’emploi du temps et l’agenda bien tenu pourront l’aider.) Place de l’élève dans la classe. (Le placer au 2ème rang, entre deux camarades, dos à la lumière, pour qu’il puisse bien voir le tableau, mais aussi les réactions des autres élèves.) Utiliser la langue des signes ou l’AKA. Utiliser un système FM. 106 11. Au sein de votre classe, des moyens adaptés sont-ils prévus dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires des élèves déficients auditifs ? 11 bis. Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Développement professionnel 12. Quelles sont les ressources, les aides, les outils sur lesquels vous vous appuyez pour faciliter l’intégration des élèves déficients auditifs ? Pour les épreuves écrites : - prolongation du temps accordé à chaque épreuve ; - présentation écrite des textes et des consignes ; - adaptation des conditions matérielles ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente. Pour les épreuves orales, notamment : - présentation dans les conditions optimales (lecture labiale, aides techniques,...) ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente ; - passation des épreuves sous forme écrite. Ressources humaines : appuis et soutiens des aides pédagogiques, accompagnement, formations,… Ressources matérielles (matériel pédagogique spécifique) 13. Quels peuvent être les apports des En classe ? accompagnateurs pédagogiques dans le cadre de l’accompagnement des Autres ? (conseil de classe, rencontre élèves déficients auditifs ? informelle,…) 14. Depuis que vous pratiquez l’intégration, avez-vous actualisé vos connaissances concernant les élèves à besoins spécifiques ? Si oui, comment ? Formation continuée ? Formation spécialisée (AKA ? langue des signes,…)? Échanges avec des accompagnateurs pédagogiques ? Échanges entre pairs ? Échanges avec d’autres professionnels (logopèdes,…) ? 15. Comment jugez-vous cette actualisation des connaissances ? Expliquez. - importante utile intéressante chronophage couteuse Vision de l’intégration 107 16. Aujourd’hui, si l’intégration était une de ces photos, laquelle seraitelle pour vous ? Choisissez parmi celles proposées (sur fiches). Pourquoi avez-vous choisi cette photo ? (une montagne - un désert - l’océan sans plage - la forêt - la plage paradisiaque - un pont de bois - un labyrinthe - une cascade - un lac et ses bordures - un terrain de golf des falaises vues d’en haut - l’espace) 17. Souhaitez-vous chose ? ajouter quelque 108 Annexe 2 : Questionnaire adressé aux accompagnateurs pédagogiques issus de l’enseignement spécialisé Questionnaire adressé aux accompagnateurs pédagogiques issus de l’enseignement spécialisé Personne de contact : Christelle Poussière – Étudiante Master 2 en Sciences de l’éducation [email protected] - 0477 29 14 12 Votre profil Vous êtes : o Un homme o Une femme Quel âge avez-vous ? o o o o Entre 21 ans et 30 ans Entre 31 ans et 40 ans Entre 41 ans et 50 ans Plus de 50 ans Vous travaillez… o À temps plein o À temps partiel De quel(s) diplôme(s) disposez-vous (cochez si nécessaire plusieurs propositions) ? o o o o o Instituteur (-trice) maternel Instituteur (-trice) primaire Enseignant(e) secondaire Master en Sciences de l’éducation Autre :…………………………… 109 En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est votre ancienneté ? o o o o o Entre 1 an et 5 ans Entre 6 ans et 10 ans Entre 11 ans et 20 ans Entre 21 ans et 30 ans Plus de 30 ans En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est le nombre d’années d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques ? o Entre 1 an et 5 ans o Entre 6 ans et 10 ans o Plus de 10 ans De quel type d’enseignement spécialisé étaient issus ces enfants à besoins spécifiques ? o o o o o o o o Type 1 : retard mental léger Type 2 : retard mental léger modéré ou sévère Type 3 : troubles du comportement Type 4 : déficiences physiques Type 5 : maladies ou sont convalescents Type 6 : déficiences visuelles Type 7 : déficiences auditives Type 8 : troubles des apprentissages En années (arrondies à l’unité supérieure), quelle est le nombre d’années d’expérience avec des enfants à besoins spécifiques issus de l’enseignement spécialisé de type 7 (déficiences auditives) ? o Entre 1 an et 5 ans o Entre 6 ans et 10 ans o Plus de 10 ans Thème Question 1. Quelle expérience avez-vous en tant qu’aide pédagogique avec des élèves déficients auditifs ? Relance éventuelle Expérience 110 2. Les enseignants qui pratiquent l’intégration vous ont-ils fait part de changements dans la pratique de leur métier, changements qui auraient pour origine la présence des enfants déficients auditifs dans leur classe ? Avant, après ? 3. Voulez-vous raconter une activité significative menée lorsque vous êtes en classe en soutien aux élèves déficients auditifs ? En individuel / sous-groupes / classe ? Contacts et interactions avec les élèves de la classe ? Votre action ? Sur les pratiques (manière de faire, avec les enfants déficients auditifs, avec les autres, domaines de changements) ? 4. Dans les gestes précis identifiés, y en a-t-il qui guident toutes vos actions dans les activités de votre classe ? Pratiques pédagogiques 5. Parmi les propositions d’adaptations pédagogiques suivantes : a) Lesquelles constatez-vous mises en œuvre au bénéfice des élèves déficients auditifs ? Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Expliquez vos choix. a. b. c. (Les propositions sont présentées sous forme de fiches.) b) Lesquelles sont importantes, pour vous ? c) Lesquelles sont efficaces ? d) Lesquelles sont faciles à mettre en place ? e) Pour celles qui vous semblent difficiles à mettre en place, vous sentez-vous capables de les mettre en place ? d. e. f. Attirer son attention avant de lui parler (car cela permet à l’élève de se concentrer préalablement sur l’interlocuteur) et maintenir le contact visuel (car les mimiques et les gestes donnent des informations importantes). Éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations Veiller à l’articulation, tout en parlant clairement et naturellement. Un rythme de parole pas trop rapide, un ton pas trop fort (désagréable avec les appareils), une bonne articulation offrent à l’élève les meilleures conditions. Veiller aux conditions ambiantes. Ne pas parler en se déplaçant (lecture labiale entrecoupée, voix non dirigée), ne pas parler en montrant quelque chose (ne saura plus où regarder, lecture labiale entrecoupée), éviter les bruits de fond, parler une personne à la fois. Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension (en lui demandant de reformuler par exemple). Favoriser les informations visuelles. 111 g. h. i. j. k. l. 6. Des moyens adaptés sont-ils prévus dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires des élèves déficients auditifs ? Développement professionnel 6 bis. Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. 7. Avez-vous le sentiment d’avoir eu une influence dans la mise en place de ces adaptations éventuelles, à travers le rôle que vous jouez et la place que vous tenez dans l’intégration ? (Donner les consignes par écrit, multiplier les schémas, les croquis, les images.) Limiter les apports magistraux. (Limiter les longues explications.) Dissocier (j’écris puis je parle en montrant l’écrit, le dessin ou…) L’aider à se repérer dans le temps. (L’emploi du temps et l’agenda bien tenu pourront l’aider.) Place de l’élève dans la classe. (Le placer au 2ème rang, entre deux camarades, dos à la lumière, pour qu’il puisse bien voir le tableau, mais aussi les réactions des autres élèves.) Utiliser la langue des signes ou l’AKA. Utiliser un système FM. Pour les épreuves écrites : - prolongation du temps accordé à chaque épreuve ; - présentation écrite des textes et des consignes ; - adaptation des conditions matérielles ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente. Pour les épreuves orales, notamment : - présentation dans les conditions optimales (lecture labiale, aides techniques,...) ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente ; - passation des épreuves sous forme écrite. En classe ? Autres ? (conseil de classe, rencontre informelle,…) Vision de l’intégration 112 8. Qu’auriez-vous à ajouter sur les effets éventuels de l’intégration sur les pratiques pédagogiques en classe et à l’école ? Annexe 3 : Liste des gestes pragmatiques élémentaires d’adaptations visant les interactions construite à partir de Moral (2016) et Tagger et Mallet (1994) Adaptations favorisant les interactions Entre élèves L’enfant déficient auditif est un enfant comme les autres avec les mêmes besoins. Il faut veiller à ce qu’il ne soit pas oublié. Ce qui facilite Désigner des enfants répétiteur, interprète en veillant à établir une alternance Se montrer attentif lorsque l’élève cherche la communication Observer l’enfant pour adapter sa communication aux besoins de l’enfant Accompagner l’enfant dans son mode de communication Appuyer la communication par des supports visuels variés et les articuler en évitant la concurrence Échanges et commentaires en suffisance Vérifier régulièrement la compréhension en faisant réexpliquer différemment la perception de l’enfant Rassurer régulièrement par la reformulation que le message de l’enfant est bien perçu Entre élève et professeur La langue utilisée par l’enseignant doit être naturelle mais lors de formulation plus complexe, il faudra veiller à la bonne compréhension de l’enfant. Annexe 4 : Liste des gestes pragmatiques élémentaires d’adaptations d’accessibilité visuelle construite à partir de Moral (2016) et Tagger et Mallet (1994) Adaptations d’accessibilité visuelle La mimogestualité est importante dans la L’élève doit voir communication car elle peut l’enseignant. parfois remplacer, compléter ou accompagner la parole. La mimique a un rôle essentiel dans la communication. Les mimiques expriment des L’élève doit voir le sentiments (joie, tristesse, etc.), visage de l’enseignant. des modalités (étonnement, douleur, etc.) et la syntaxe (refus, question, etc.). Le regard mobilise l’attention. Il a un rôle de prise de contact, d’engagement de la L’élève doit voir les conversation et de maintien de yeux de l’enseignant. la communication. Il a également un rôle désignant. Ce qui facilite Ce qui peut gêner Être toujours dans le champ de vision de l’élève Être toujours visible de face Adopter des mimiques expressives Visage expressif Chevelure envahissante Parler en écrivant au tableau Capter l’attention de l’élève Prolonger le regard jusqu’à la fin de l’échange Lunettes teintées ou trop brillantes Regard indirect L’élève doit lire sur les lèvres de l’enseignant. La lecture labiale fournit des indices pouvant compléter la communication. Arpenter la classe Être caché derrière son bureau, ... Avoir un maintien raide Porter des vêtements longs et larges, trop colorés / décorés Favoriser une bonne articulation, un débit de paroles approprié et un ton de voix naturelle Élever légèrement la voix Expliciter les infos dont la voix ne peut être porteuse : intonation, accentuation, changement de registre Parler avec une main sur la bouche Présence d’une moustache, d’une barbe, d’une écharpe,… Parler avec un objet, quelque chose dans la bouche Un débit trop rapide ou trop lent Des phrases hachées Parler en criant Parler avec une intensité suffisante 115 Annexe 5 : Liste des gestes pragmatiques élémentaires d’adaptations spatiales construite à partir de Moral (2016) et Tagger et Mallet (1994) Adaptations spaciales Ce qui facilite Une classe idéale Pour permettre une concentration propice aux apprentissages, la classe doit être calme et bien éclairée. Porter une attention particulière aux conditions matérielles et acoustiques Prévoir, au sein de l’école, une situation géographique appropriée Veiller à un confort visuel (visibilité directe du tableau,…) Une place idéale Celle qui permet de tout voir, pas trop près, pas trop loin, pas trop isolée Penser la situation de l’enfant : o loin des fenêtres o près de l’enseignant o au deuxième rang o entre deux camarades o dos à la lumière 115 Ce qui peut gêner Bruits parasites (chaises, pieds,…) Sources sonores non pertinentes (musiques de fond,…) Classe proche d’un passage à grande circulation entrainant la distraction Une disposition en U quand les élèves sont trop nombreux demandant un balayage visuel trop important Pour voir le tableau sans reflet et en entier Pour bien voir le professeur et bénéficier de l’entièreté du message gestuel Pour bien entendre le professeur sans être gêné par une voix trop forte Pour voir les réactions des élèves du premier rang Pour bénéficier d’une aide éventuelle Pour bénéficier d’une bonne visibilité dans le cadre d’une lecture labiale 116 Annexe 6 : Liste des gestes pragmatiques élémentaires d’adaptation didactiques construite à partir de Moral (2016) et Tagger et Mallet (1994) Adaptations didactiques Ce qui facilite Écrire le plan du cours, de la journée Écrire autant que possible les messages oraux, les consignes au tableau Séquencer les consignes, les énoncés La modalité écrite doit être la plus visuelle possible (synthèses visuelles, en couleurs, code couleurs, etc.) Utiliser la multi modalité et certainement pour les apprentissages implicites Placer l’enfant face à toutes les échanges ou conversations Vérifier en permanence la compréhension des élèves Démonstrations, expérimentations par d’autres élèves Toutes les situations d’expérimentation doivent être comprises. Faire revivre des expériences similaires et établir les liens. Faire comparer, rechercher les différences, les similitudes. Une lecture accompagnée L’enfant déficient auditif ne peut bénéficier des informations auditives en même temps que des informations visuelles. Texte donné à l’avance Une lecture guidée par un autre élève de la classe. Une prise de note guidée Pour l’enfant déficient auditif, elle est problématique. Recopier les notes d’un élève placé à côté de lui. Désigner une élève entendant responsable répétiteur. Modalités d’évaluation Lors de la vérification de l’acquisition des apprentissages, les obstacles liés à la compréhension des consignes doivent être neutralisés en adaptant les modalités de l’évaluation. Des textes lacunaires plutôt que des textes à rédiger Accorder plus de temps avec un arrêt entre la consigne et la tâche à réaliser Des questions écrites plutôt qu’orales Un enseignement visuel Un enseignement intégré Toutes les situations de transmission d’informations basées sur l’audition doivent être aménagées. 116 Annexe 7 : Transcription, repérage des verbatim, codage et analyse de l’entretien semi-directif de l’enseignant 5 1. Quelle expérience avez-vous en tant qu’enseignant(e) avec des élèves déficients auditifs ? Enseignant 5 exerce dans un Quand j’étais novice, j’ai tout de suite eu des enfants de type 7 dans ma PROF établissement pratique classe. [Enseignant 5 réfléchit.] Parce que voilà… Je travaillais dans une CONT d’élèves école qui fonctionnait déjà comme ça, avec l’IRSA depuis… Ils étaient déficients auditifs depuis de précurseurs dans ce domaine-là et donc voilà… Et donc j’ai commencé en nombreuses années. première primaire. Et là, effectivement, j’ai eu des enfants de type 7 en PROF qui l’intégration première primaire aussi qui étaient intégrés. C’est vrai que cela faisait CONT beaucoup d’une fois, en tant que novice, d’avoir déjà une expérience en première primaire et puis, à côté de cela, d’avoir aussi… Il fallait être fort attentif aux enfants qui étaient intégrés et puis je me suis rendue compte… CONT Donc après, j’ai été en cinquième et sixième pratiquement tout le reste de mes années d’enseignement. Et là j’ai, je dirais pratiquement chaque année, eu des élèves malentendants. PROF Avez-vous participé à la mise en place des projets ? Alors, au tout début, je n’ai pas de souvenirs de ça si ce n’est qu’il y avait toujours une logopède qui venait et qui servait de lien. Il n’y avait pas de HUM coordinatrice de l’IRSA à l’époque donc on n’avait pas de conseils de HUM Enseignant 5 relève l’importance du leadership de classe non plus. Je n’ai pas de souvenirs. Mais ça, je pense que le leadership aussi de la direction joue beaucoup et que au tout début, en tous CONT 118 la direction dans la mise en cas, ça ne se faisait pas comme ça. Et au fur et à mesure du temps, il y a eu place vraiment une participation de plus en plus importante, une information INFOR des projets d’intégration. Il cite divers aussi sur le handicap, de plus en plus importante. Des audiologues sont HUM partenaires : logopède, venus en classe expliquer aux autres enfants, parce qu’il y a l’information INFOR coordinateur, audiologue qui pour l’instit mais aussi l’information pour les autres enfants. Par rapport à INFOR représentent des ressources ça, ils sont venus expliquer avec des maquettes d’oreilles… C’était MAT humaines de vraiment très chouette. L’enfant aussi parfois de temps en temps venait formation. Cette dernière est exprimer lui-même quand il était avec son groupe classe qu’il connaissait à des depuis longtemps et qu’il voulait être mis en valeur. C’était très chouette ADAPT (9) enseignants que des autres qu’il puisse aussi venir exprimer un petit peu ce qu’il entendait, un petit ADAPT (9) élèves de la classe. peu ce qu’il fallait faire pour lui et des choses comme ça. C’était chouette en terme destination tant aussi. Et ou sinon, il y a eu toute une équipe vraiment autour du projet qui HUM s’est mise en place assez rapidement, je pense. Une bonne information, je INFOR pense que l’IRSA pour ça était déjà bien organisée au niveau de CONT l’intégration. CONT 2. Comment vous êtes-vous préparé(e) pour mener à bien ces projets d’intégration ? I Enseignant 5 s’est préparé Et bien d’abord, première chose, ce sont des rencontres avec des personnes NFOR – HUM pour mener à bien ces projets de l’enseignement spécialisé qui viennent expliquer. A ce moment-là… d’intégration essentiellement [Enseignant 5 cherche ses mots.] Les bilans d’audiologie… On nous MAT de manière informelle lors de montre bien la différence entre un sourd profond, etc. Si cet enfant est PROF 118 119 rencontres avec partenaires issus l’enseignement Sur base des appareillé, c’est encore différent que si cet enfant n’est pas appareillé. Il y de a donc aussi toute l’explication du système FM. Et puis il y a des petits INFOR – MAT spécialisé. trucs et astuces qui sont données par ces personnes-là. Je parle d’abord en INFOR - HUM de bilans amont. Donc, en amont, il y a toutes ces infos qui sont prises là. Par INFOR d’audiologie, les types de exemples, parler, s’exprimer devant l’enfant, ne jamais écrire au tableau en ADAPT (2) surdité sont explicités ainsi tournant le dos et parler en même temps, ce sont des petites choses mais ADAPT (2) que les moyens éventuels de que je ne faisais pas spontanément forcément donc j’ai dû… Voilà… EXP réhabilitation. En fonction du L’avoir toujours près de soi, près de l’endroit où tu es le plus en donnant ADAPT (1) profil et des besoins de des cours. Mais alors, moi, la problématique c’est que je suis à la fois à l’enfant, des explications l’avant, à l’arrière parce que j’avais deux tableaux. Généralement, ça quant aux ressources matérielles (système disponibles FM) adaptations mettre ou spécifiques en pour accueillir cet enfant là… Ca dépendait du profil de l’enfant aussi, de PROF des ses besoins… Parce qu’il y avait parfois des enfants qui étaient à premièrement intégrés donc… C’était leur première intégration dans ma sont classe et donc là, il y a tout un travail, je dirais, de sensibilisation, PERC Des d’accueil de l’autre, de la différence… Et puis je voyais aussi fortement la modifications de pratiques se différence avec des enfants qui étaient déjà intégrés depuis plusieurs sont dès lors opérées par années et qui suivaient vraiment leur classe. A ce moment-là, à part une l’enseignant 5. information vraiment précise… Moi, j’avais vraiment besoin d’avoir des PROF prodiguées. place tournait un peu dans tous les sens. Là, j’ai dû faire attention aussi. Et donc EXP informations précises sur ce qu’il entendait, ce qu’il percevait, sur « est-ce qu’il utilisait le système AKA aussi ou la lecture labiale » ou des choses comme ça. Donc, pour moi, c’était important de savoir ça. Et alors toute 119 120 Il est indispensable pour l’organisation autour des compétences de l’enfant aussi. Il y avait cet ADAPT (6) l’enseignant 5 de recevoir aspect-là. J’avais énormément de difficultés, je me souviens, à percevoir PERC toutes les informations sur le ce que l’enfant comprenait. Parce que au niveau du vocabulaire, par profil de l’élève déficient exemple, j’allais utiliser des petits mots pour faire des petites feintes, des auditif intégré dans sa classe. petites blagues… C’est tout un registre, en fait, qu’il ne percevait pas. PROF Ces lui Donc tout ce qui était de la subtilité ou du langage abstrait ou des choses sa comme ça et donc, ça, je devais faire fort attention. Mais parfois il y avait informations permettent d’adapter méthodologie aux besoins de des choses au niveau des consignes… Je devais retravailler mes consignes ADAPT (2) l’enfant en fonction de ses spécifiquement pour l’enfant hormis tout ce que je mettais en place. Il y compétences. avait donc des choses au niveau des compétences qui devaient être bien retravaillées à ce moment-là et au niveau de la délivrance des ADAPT (2) Enseignant 5 relève un déficit informations. au niveau du registre de la Avez-vous lu pour vous documenter ? langue chez certains élèves [Enseignant 5 hésite.] Non. Au niveau des troubles spécifiques et des déficients choses comme ça, pas spécialement. Au niveau de… Je trouvais que auditifs. Des adaptations spécifiques sont l’information était tellement bien ciblée sur l’enfant que j’accueillais dans INFOR donc ma classe que ce n’était pas nécessaire. nécessaires afin de palier à ce déficit telles que l’adaptation des prescriptions. 3. La présence d’élèves déficients auditifs dans votre classe a-t-il modifié votre conception du métier et/ou votre façon de l’exercer ? En quoi ? La présence d’élèves Oui, bien sûr. Je pense qu’accueillir un enfant, ici en l’occurrence plutôt DEV déficients auditifs dans sa du type 7 mais j’en ai eu du type 8 aussi, ça change considérablement ma DEV 120 121 classe a modifié la conception manière de… C’est une autre philosophie. Cela fait moins peur d’abord. du métier de l’enseignant 5. Il Cela lève des barrières et je pense que c’est important de se dire… La décrit ce changement comme différence fait toujours peur parce qu’on cherche, en fait… On recherche DEV une autre philosophie. Si la toujours cette espèce d’homogénéité : il faut pour tout le monde ceci… Et volonté bien ce n’est pas vrai. Je pense qu’il faut tenir compte des différences mais DEV - HUM forme de chercher une d’homogénéité est toujours présente c’est il ne faut pas être seul face à ces différences. Je pense que cela passe vraiment par une espèce de communication super importante. Moi, ça m’a DEV cependant en tenant compte ouverte vraiment pour beaucoup, beaucoup de choses. Le fait de collaborer des différences intrinsèques avec une autre équipe, le fait aussi de pouvoir me rendre compte que ce de que je disais, que ce que je faisais en classe, pouvait être compris d’une chaque différences, précise élève. Ces l’enseignant qu’il n’est 5 certaine manière ou pas du tout compris. Et donc ça vous remet en DEV pas question. D’office, ça implique pleins de choses. C’est très riche. Et pour concevable de les aborder les enfants aussi du groupe d’accueillir la différence de… Parce que ça n’a seul. Le fait de collaborer jamais posé de problèmes au niveau des enfants. Il n’y a jamais eu un avec des acteurs issus de enfant rejeté. Et je pense que sur tous les projets d’intégration qui ont été l’enseignement spécialisé a vécus… [Enseignant 5 réfléchit.] Je ne pense pas - au-delà de ceux qui PROF agi comme un levier de avaient des problèmes comportementaux, d’autres troubles associés – que développement professionnel. cela n’ait jamais posé de difficultés. Jamais d’échec dans le projet L’enseignant d’intégration. C’est donc une richesse pour tout le monde. C’est du « win CONT 5 précise néanmoins que les élèves win ». intégrés dans sa classe ne présentaient pas de troubles 121 122 associés à la surdité. Enfin, il 4. Quelles sont vos pratiques pédagogiques usuelles ? considère partenariat riche ce pour [Enseignant 5 demande des clarifications sur la question.] Moi, j’étais un peu une folle dingo… Évidemment, les projets. Ca part dans tous les sens. USUEL J’aime beaucoup partir de ce qui est construit par les enfants donc USUEL chacune des parties. beaucoup de socioconstructivisme. Ou alors des situations problèmes qui USUEL - USUEL Enseignant 5 décrit ses étaient données puis ils pouvaient venir chercher des indices, des trucs. pédagogiques Donc vraiment essayer de construire des choses, partir de ce qu’ils USUEL usuelles comme relevant du savaient déjà - parce que comme j’arrivais en terme de parcours - partir de USUEL socioconstructivisme. Il parle leur représentation, du déjà-là et puis construire en fonction de ça et venir de projets et de situations présenter aux autres. C’est vrai qu’il y avait pas mal d’expression orale USUEL problèmes. des quand je pense à ça et du fait de venir exprimer. Il y avait aussi le fameux représentations des élèves, du projet « Cap’ten » en fin de sixième où les enfants doivent présenter un déjà-là, il construit avec les chef-d’œuvre. Beaucoup de sorties aussi culturelles, des choses qu’on USUEL élèves. Le savoir parler est un faisait domaine prépondérant. Les accompagnement de la personne. Et donc pas mal de chose autour du HUM sorties projet et à partir de ce que les enfants apportaient. pratiques représentent Partant culturelles des ensemble aussi où je devais prévoir évidemment un ADAPT (6) situations mobilisatrices appréciées par 5. Voulez-vous raconter une activité significative menée dans votre classe en l’enseignant 5. Durant ces lien avec l’intégration des élèves déficients auditifs ? sorties, il ne néglige pas la Moi, ce que je trouve qui m’impressionne toujours c’est justement ces présence présentations de chef-d’œuvre de « Cap’ten ». Je pense que ça, c’est l’accompagnateur de quelque chose qui m’émeut terriblement parce que c’est à la fois toutes les 122 123 pédagogique au bénéfice de compétences réunies mais c’est aussi parce que c’est le plus l’élève emblématique. C’est celui où, par rapport au type d’intégration qu’on a, déficient auditif intégré. arriver à faire exprimer un malentendant sur un thème qu’il aura préparé, qu’il a rédigé évidemment avec l’appui pour faire des phrases, pour faire ADAPT (6) des paragraphes, une cohérence, pour faire un dossier… Moi j’ai vu des enfants qu’on a tiré, - parce qu’il y avait des malentendants comme tous les enfants très très paresseux - qu’on a dû tirer et puis qui se sont vraiment ouverts et épanouis et qui ont exprimé des choses. Rien que de les entendre s’exprimer pendant dix minutes parler, s’exprimer sur leur sujet, c’était pour moi quelque chose d’extraordinaire. C’était vraiment extraordinaire. Mais c’est tout un travail d’un an. C’est tout un travail qui est assez aussi guidé justement par toute une méthodologie bien particulière avec des étapes bien particulières et avec un coaching quelque part du prof mais aussi d’autres professeurs qui interviennent dans le projet et notamment aussi des instits de l’enseignement spécialisé aussi, qui HUM viennent vraiment en classe à côté de l’enfant l’aider, etc. C’était vraiment chouette. 6. Dans les gestes précis identifiés, y en-a-t’ il qui guident toutes vos actions dans les activités de votre classe ? Enseignant 5 a acquis certains Oui. J’ai eu du mal au début parce que je suis très tonique et dynamique EXP gestes par expérience. donc je saute dans tous les sens et je suis très gestuelle. J’ai donc du DEV 123 124 Les adaptations spécifiques apprendre à être plus statique et plus en regard du malentendant, vraiment PROF – ADAPT mises en place au bénéfice parler face à lui, par rapport à lui. Je n’ai jamais, je pense, adapté en (2) des élèves déficients auditifs parlant très lentement, en articulant. Je pense que j’ai, comment dire j’ai… sont sélectionnées selon leur [Enseignant 5 cherche ses mots.] J’ai accentué ça. Par contre, ce que je profil et leurs besoins. faisais systématiquement aussi c’est quand je donnais, par exemples, des feuilles, des consignes, je m’assurais auprès de l’enfant qu’il puisse me le ADAPT (2) Diverses adaptations spécifiques sont citées : réexpliquer ou le reformuler. Au départ, évidemment, comme tout novice, on vient tout près et « tu as compris ? » « Oui.» Oui, oui, oui mais lui, - parler face à l’élève ; voilà… Il n’a rien compris. Et donc ça, j’ai abandonné assez vite aussi - faire réexpliquer ou pour bien ré exprimer : « qu’est-ce que tu dois faire là ? » et des choses reformuler comme ça. Il y avait aussi des enfants parfois qui étaient d’une nature PROF pour vérifier la tellement timide et qui n’osaient pas s’exprimer devant les autres parce compréhension ; que c’était quand même assez problématique à ce moment-là… On avait ADAPT (6) guidance convenu d’un moment où chaque fois il pouvait venir me voir, cet enfant- individualisée ; là - en tous les cas, parce que c’était un élève en particulier - venait - travail en binômes ; systématiquement me parler, vérifier chez moi. Il y avait aussi des ADAPT (6) - valorisation - l’élève. de binômes que je faisais intervenir, un genre de tutorat. Et puis ce qui était ADAPT (5) très chouette aussi, c’est que j’avais… Généralement, j’ai eu souvent des PROF enfants intégrés qui avaient aussi des domaines de compétences dans d’autres domaines et donc eux aussi allaient coacher l’idée… Comme ADAPT (9) j’aime beaucoup travailler en tableau d’enrichissement et avec la clinique et les besoins… C’était valoriser aussi le plus possible. Faire attention ADAPT (9) 124 125 aussi, j’ai du apprendre. Lors des visites justement culturelles, etc. Au début j’oubliais… J’ai oublié certaine fois de prendre le système MAT d’appareillage, le système FM. Comme l’enfant est tout petit et même MAT Enseignant 5 souligne une après… Parce qu’il y a des enfants qui veulent vraiment se fondre dans la PROF caractéristique masse. Ca, c’est le problème de l’intégration aussi. C’est que certains CONT - PROF certains élèves propre à déficients veulent vraiment effacer leurs différences et essaient de faire en sorte auditifs intégrés. Souhaitant comme s’ils n’étaient pas appareillés. Ce qui est très bien aussi mais d’un se fondre dans la masse, autre côté, on ne peut pas le nier. Ils en ont besoin et donc du coup parfois PROF ceux-ci tentent d’effacer leur il y avait des élèves qui ne venaient pas le chercher, qui n’assumaient pas différence en faisant comme en fait ce statut-là. Du coup, parfois, ça m’arrivait aussi de zapper et donc s’ils n’étaient pas appareillés ça après j’en ai bien tenu compte. J’ai été bien drillée de ce côté-là. Je me EXP (oubli du système FM, par suis dit : « Ha ! Là, il ne faut pas que j’oublie. » Les piles aussi… Tout exemple). Le développement d’un coup, il n’y a plus de piles. On a oublié de charger. Il y avait tout de l’appareillage parce qu’on sait que ça coûte énormément d’argent… Il y en PROF son expérience professionnelle a permis à a qui gèrent ça très bien et d’autres enfants pas du tout. Au niveau pratico- l’enseignant 5 de développer pratique, c’était vraiment dans le fait d’être devant, de reformuler, d’aller ADAPT (2) une attention particulière à près de l’enfant, les diades d’entre-aide. ADAPT (5) cet aspect. 7. Pratiquez-vous de la différenciation au sein de votre classe ? Si oui, de quelle manière ? Enseignant 5 différenciation pratique la pédagogique Ha, oui ! J’ai toujours fait ça le plus possible, c’est-à-dire dans tous les domaines. C’est-à-dire que je donne des devoirs différents, je donne des DIFF 125 126 au sein de sa classe. Elle se situations problématiques différentes, du travail par groupes de besoin, par DIFF – DIFF matérialise dans : groupes de niveau. Les évaluations sont aussi différenciées certaines fois. DIFF – DIFF - des devoirs je faisais du tutorat et des demandes d’aides, besoin d’aides, etc. La DIFF – DIFF différents ; - - des situations - enfants qui en avaient besoin mais aussi du dépassement pour les autres. différentes ; Donc c’était important à ne pas perdre de vue. le travail par groupes 8. Des adaptations peuvent être nécessaires aux élèves déficients auditifs le travail par groupes intégrés dans l’enseignement ordinaire. de niveau ; Classez les propositions suivantes selon que vous êtes d’accord avec elle le panneau d’enrichissement - différenciation, pour moi, exprimait soit de l’aide vraiment pour les DIFF problèmes de besoin ; - Il y avait le panneau d’enrichissement aussi. Chaque semaine, le vendredi, DIFF ou non. Expliquez vos choix. a) Je trouve qu’il est normal dans l’enseignement ordinaire de (demandes / besoins mettre en place des adaptations pour les élèves déficients d’aides) ; auditifs. le tutorat. Bien sûr. Cette différenciation b) Les adaptations à mettre en place demandent des compétences concerne tant la remédiation professionnelles spécifiques. des apprentissages que le [Enseignant 5 réfléchit.] Mais d’un côté, je pense qu’il faut dépassement. effectivement être… Pas formé mais il faut d’abord être ouvert DEV à la différence, je pense, et pouvoir se remettre tout le temps en DEV question effectivement. [Enseignant 5 réfléchit.] Tout le monde 126 127 Enseignant 5 trouve normal n’est peut-être pas formé, je ne dis pas que… C’est une dans l’enseignement ordinaire question de… Oui, de compétences. [Enseignant 5 marque sont de accord quant à l’affirmation.] mettre en place des adaptations pour les élèves déficients auditifs. c) Les adaptations à mettre en place demandent trop de travail Il supplémentaire. considère que la mise en Ça, ce n’est pas vrai. Je ne suis pas d’accord. place Pourquoi ? de ces adaptations demande une ouverture à la Parce que cela se fait naturellement. Si tu différencies pour tous différence plutôt que des tes élèves, c’est la même chose pour un enfant malentendant. compétences professionnelles Enfin, il y a un moment donné où tu fais le travail pour tout le spécifiques. Selon lui, une monde donc... Si ce n’est qu’il y a des petits déclics, des petites remise aides, des attitudes qui sont propres à ce type 7. Mais ou sinon, en question c’est la même chose que pour... continuelle est nécessaire. d) Le travail nécessaire à la mise en place d’adaptations ne me dérange pas. Non, ça ne me dérange pas. Ça, je suis d’accord. 9. Si vous en mettez en place, quelles adaptations pédagogiques ou méthodes inédites identifiez-vous comme bénéfiques aux élèves déficients auditifs ? [Enseignant 5 marque un temps de silence.] Non, je n’ai pas cette prétention de dire que ce soit inédit. Je pense qu’il y a beaucoup de gens 127 128 qui doivent le faire. [Enseignant 5 marque un temps de silence.] Non, je ne crois pas que je sors du lot, de quelqu’un qui ferait si ce n’est qu’appliquer DIFF la différenciation, si ce n’est que de proposer d’autres manières pour ADAPT (6) s’exprimer en expression orale ou des choses comme ça où c’est quand même quelque chose d’assez particulier, si ce n’est… 10. Parmi les propositions d’adaptations pédagogiques suivantes : a) Lesquelles mettez-vous en œuvre dans votre classe au bénéfice des élèves déficients auditifs ? Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. Expliquez vos choix. a. Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel. Alors… Oui. Ca j’ai fait toujours. Cela m’a pris du EXP temps mais j’y suis arrivée. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] b. Éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations. adaptations Alors, non… Ca, non parce que justement… Moi, ce que je spécifiques ont demandé un faisais c’est que, comme les enfants construisent eux-mêmes temps d’acquisition plus long leur panneau que ce soit des travaux de groupes ou des trucs que d’autres. comme ça… Hop, généralement je les remettais… On les Certaines mettait dans un… C’est vrai qu’à la fin, ma classe n’était plus qu’un panneau gigantesque mais de choses qui avaient été USUEL construites par les enfants. Donc effectivement…[Enseignant 5 128 129 place la bandelette dans « jamais ».] c. Veiller à l’articulation, tout en parlant clairement et naturellement. Oui mais pas toujours. Il n’y avait pas du forcing. Je n’ai pas eu la déformation. Par exemple, on a une collègue logopède qui parle tout le temps, systématiquement [Enseignant 5 articule exagérément.] comme ça. Mais non, moi, je n’ai pas ça. Maintenant je vais me dire : « Je vais reformuler… », je vais effectivement faire attention pour parler mais je ne vais pas commencer à… [Enseignant 5 place la bandelette dans « parfois ».] d. Veiller aux conditions ambiantes. Ca, oui… C’est clair. Par exemple, attendre d’avoir le calme pour consignes,… [Enseignant 5 place la donner les ADAPT (2) bandelette dans « toujours ».] e. Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension. Oui, ça je l’ai dit. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] f. Favoriser les informations visuelles. Toujours. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] g. Limiter les apports magistraux. Toujours, bien sûr. Dans ma manière dont je t’ai dit que j’enseignais. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] 129 130 h. Dissocier. Parfois mais pas spécifiquement. [Enseignant 5 place la bandelette dans « parfois ».] Une adaptation proposée fait partie des pédagogiques pratiques usuelles i. L’aider à se repérer dans le temps. Non… Ce n’est pas spécifique à… J’avais l’habitude de faire le menu de la journée USUEL de de toutes façons. Et donc systématiquement, on disait : « Tiens, l’enseignant 5, à savoir l'aider est-ce qu’on est arrivé là ? Etc. ». On planifiait les choses à se repérer dans le temps. ensemble mais c’était pour tout le monde. Ce n’était pas spécifiquement. Je mets « jamais » alors. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] j. Place de l’élève en dans la classe. Oui. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] L’utilisation de la langue des k. Utiliser la langue des signes ou l’AKA. Non… Ce n’est pas moi signes ou de l’AKA relève qui l’utilisais parce que je ne la maitrise pas. Donc, ça, c’est des « jamais » mais je connais la signification de l’AKA et ça, c’est compétences de l’accompagnateur souvent la personne qui venait avec moi en classe qui… L’aide HUM pédagogique. pédagogique. [Enseignant 5 place la bandelette dans « jamais ».] l. Utiliser un système FM. Toujours. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] L’enseignant 5 différencie les adaptations selon b) Lesquelles sont importantes, pour vous ? qu’elles Alors… [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « veiller aux relèvent du contexte, de la conditions ambiantes ».] « Veiller aux conditions ambiantes », je dirais 130 131 pédagogie ou d’un aspect que ça c’est dans la mise en situation. C’est vraiment dans le contexte. pratico-pratiques. Là, on est au niveau du contexte. [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « limiter les apports magistraux ».] Au niveau de « limiter les Parmi des proposées, relève adaptations l’enseignant celles qui 5 une pédagogie adaptée. Il faut quelque chose de constructiviste, pour sont moi. [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « favoriser les importantes : - - informations visuelles ».] « Les informations visuelles », oui, bien veiller aux conditions entendu… Le reste, je dirais… Ca, c’est le contexte ambiant… ambiantes ; [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « veiller aux conditions limiter les apports magistraux ; - - - apports magistraux », c’est évidemment au niveau pédagogique. Il faut favoriser ambiantes ».] Ca, c’est la pédagogie… [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « limiter les apports magistraux ».] « Utiliser un les système FM », cela dépendra de l’enfant aussi. [Enseignant 5 pointe la PROF informations bandelette dans « place de l’élève dans la classe ».] « Place de l’élève visuelles ; en cours », ce sont tous les petits trucs pratico-pratiques, comme je place de l’élève dans dirais. Comme « favoriser les informations visuelles », « attirer son la classe ; attention », ce sont tous les petits trucs et astuces qu’il faut assez utiliser un système FM. rapidement mettre en place pour les enfants, pour le contact. c) Lesquelles sont efficaces ? Pour la dernière, il précise Je dirais que l’apport… Parce que j’ai quand même vu en vingt ans une EXP que son utilisation dépend des évolution dans les aides et les implants cochléaires et les choses besoins de l’élève. comme ça… [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « utiliser un système FM ».] Donc je dirais qu’un système FM maintenant c’est MAT 131 132 Parmi des proposées, relève adaptations l’enseignant celles qui 5 5 pointe la bandelette dans « limiter les apports magistraux ».] Pour sont moi, les apports magistraux, ce n’est pas porteur ! Et les conditions, bien forcément… [Enseignant 5 pointe la bandelette dans « veiller aux efficaces : - utiliser un système limiter les apports d) Lesquelles sont faciles à mettre en place ? Toutes, vraiment ! Mais… magistraux ; - conditions ambiantes ».] Dans les conditions, c’est vraiment tout ce que l’on peut mettre en place. FM ; - vraiment quelque chose d’efficace. Ho, je suis vraiment… [Enseignant veiller aux conditions ambiantes. e) Pour celles qui vous semblent difficiles à mettre en place, vous sentezvous capables de les mettre en place ? La langue des signes ou l’AKA, ça demande une formation FORM Enseignant toutes 5 les proposées sont estime que adaptations faciles à mettre en place. particulière. Vous ne la maitrisez pas parce que vous ne vous en sentiez pas capable ou parce que tout simplement vous n’aviez pas envie de vous investir dedans ? Je pense que c’est parce que c’est un support… Alors, c’est très L’utilisation de la langue des comique parce que… C’est un support que les enseignantes du CONT signes ou de l’AKA demande spécialisé maitrisent pour la plupart d’entre elles ou doivent maitriser cependant comme l’AKA. Mais il n’est pas demandé ou clairement explicite, particulière. une formation clairement demandé explicitement : « Tiens, il faudrait que vous puissiez… ». Mais ceci étant, je trouverais cela très chouette de faire une formation sur l’AKA. La langue des signes, je pense que c’est très FORM 132 133 Ce support est selon l’enseignant 5 du domaine des long. C’est très très long comme apprentissage. Mais l’AKA, je pense que cela pourrait être une alternative. On ne me l’a jamais proposé. accompagnateurs pédagogiques. 11. Au sein de votre classe, des moyens adaptés sont-ils prévus dans le cadre de l’évaluation des acquisitions scolaires des élèves déficients auditifs ? Tout simplement au niveau du savoir écouter. Je pense que, dans la PROF discipline, quand tu évalues… Ou que ce soit de l’expression orale, etc. Je PROF pense que dans mes critères d’évaluation, ils ne sont d’abord pas les ADAPT (8) mêmes que ceux que j’utiliserais. C’est une des choses importantes. Et qu’au niveau, je dirais, de ce qui est maitrisable, de ce qui doit être ADAPT (8) maitrisé, il y aura une différence aussi par rapport à ces deux compétences Au niveau des évaluations, particulières. Au niveau du lire aussi, lire et comprendre, parce que l’enseignant 5 met également souvent, en fait, je me suis… Dans ma petite pratique, je me suis rendue en place des adaptations telles compte… Et ça m’a posé énormément de questions par rapport justement à que l’adaptation des critères cette problématique du type 7 où on se dit : « Oui, intégrer des enfants d’évaluation. malentendants, c’est très facile ». Mais en fait, on ne se rend pas compte c’est justement ce que je disais tout à l’heure – qu’eux perçoivent le niveau PROF 1 du discours en fait. Donc tout ce qui est du sous-entendu, du premier degré… Travailler là-dessus, c’est très difficile. Et donc retravailler des ADAPT (8) questionnaires, spécifiquement par rapport à des choses qui pourraient être demandées à ces enfants-là en particulier ou réexpliquer, donner la consigne différemment,… Oui, c’est vraiment des choses qui sont 133 134 importantes pour moi. En fonction des besoins de l’élève, l’enseignant 5 peut 11 bis. Classez les propositions suivantes : toujours / parfois / jamais. également retravailler les Pour les épreuves écrites : questionnaires ou adapter les a) - prolongation du temps accordé à chaque épreuve ; Oui, ça forcément. Mais ce n’est pas spécifiquement… Je l’accorde prescriptions. aussi à des enfants qui sont dyslexiques, etc. mais cela fait USUEL La pratique de prolonger le partie de mes pratiques. [Enseignant 5 place la bandelette dans temps « toujours ».] accordé épreuve pratiques fait à chaque partie des pédagogiques usuelles de l’enseignant 5. b) - présentation écrite des textes et des consignes ; Oui, toujours. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] c) - adaptation des conditions matérielles ; Oui, bien entendu. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] d) - si nécessaire, présence d'une personne compétente. Oui, bien sûr. Pour les épreuves orales, notamment : e) - présentation dans les conditions optimales (lecture labiale, aides techniques,...) ; Oui, c’est ce que je disais. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] f) - si nécessaire, présence d'une personne compétente ; Oui, ça effectivement. [Enseignant 5 place la bandelette dans « toujours ».] 134 135 g) - passation des épreuves sous forme écrite. Pas toujours. Dans Enseignant 5 pratique la ma classe, quand c’était de l’oral, j’insistais vraiment pour que CONT différenciation de produit lors ça passe par de l’oral. Mais l’oral était différent. C’était une des évaluations orales. différenciation de l’oral mais on faisait quand même sous DIFF forme d’épreuve orale. C’était une différenciation du produit. C’est une autre adaptation. [Enseignant 5 place la bandelette dans « jamais ».] 12. Quelles sont les ressources, les aides, les outils sur lesquels vous vous appuyez pour faciliter l’intégration des élèves déficients auditifs ? En terme de matérielles, l’enseignant répertorie cochléaire ressources ainsi 5 Je dirais que, [Enseignant 5 demande des précisions.] l’implant cochléaire, MAT le système FM et alors la personne ressource qui vient 4 heures. Et je MAT – HUM l’implant dirais effectivement, que tout dépend de la personne, de son CONT que investissement. On en revient toujours… Et du suivi, de la collaboration. INFOR le système FM. Je trouve que la collaboration entre nous est vraiment le support pour que INFOR cette intégration se passe bien. Et donc il faut prévoir des moments avec INFOR L’accompagnateur pédagogique cette personne où on se met d’accord, où on envisage : « tel cours, compétent et engagé représente quant à lui une ressource incontestable. j’aimerais plutôt que tu dois là, etc. ». Et alors, moi, j’adore que cette personne soit en classe avec moi. humaine La collaboration est associée au 135 136 support pour que les 13. Quels peuvent être les apports des accompagnateurs pédagogiques dans le intégrations se passent au cadre de l’accompagnement des élèves déficients auditifs ? mieux. En classe… Parce que d’abord ils restent en classe, ils ne ratent rien de ce Des temps de concertations entre les acteurs qu’il se passe en classe parce qu’il y a donc cette personne tierce à côté de ADAPT (6) semblent lui, qui est vraiment pour lui donner toutes les petites choses, les petites cependant ficelles, les petits trucs et astuces pour formuler, pour bien.... Qu’il connait nécessaires. bien, donc en fait ce sont souvent des personnes qui viennent en L’accompagnateur intégration, qui ne s’occupent que de ces enfants-là dans cette école ou pédagogique joue un rôle non d’autres… Enfin bref, ils les connaissent bien. Et alors c’est très riche de INFOR négligeable dans le cadre de voir cette personne travailler. J’apprends beaucoup aussi en observant. INFOR la guidance et du contrôle C’est d’une richesse... Et puis parce que, pour moi, l’intégration ça veut individualisé. dire qu’on intègre quelqu’un, pas qu’on l’exclut d’une classe à un moment CONT donné. Évidemment l’idéal pour moi, ce serait plus varier sur l’inclusion. L’enseignant 5 évolue au Mon idéal… contact de l’accompagnateur Les conseils de classe ? pédagogique. Son action se Oui, bien sûr. Donc tout ce qui est conseil de classe : les conseils de classe FORM situe principalement dans la inter-équipe donc avec les directions, avec la coordinatrice pédagogique de HUM classe afin de garantir le l’intégration, avec les deux enseignantes qui sont là, avec la logopède et au concept d’intégration (versus moins… Minimum 3 fois par an, minimum ! Plus évidemment tout ce CONT exclusion). qui… Tous les échanges aussi, plus toutes les petites rencontres INFOR informelles et les échanges, les partages… Alors ce qui était aussi INFOR Les conseils de classe important, par exemple, c’est que quand je me rendais compte que… 136 137 rassemblant une multitude de Comme évidemment je travaille beaucoup la différenciation et que je ressources humaines tenais un petit carnet en me disant : « tel enfant il faut que je revois ça avec MAT d’horizon varié lui, il faut que je fasse un groupe… ». Et donc si j’arrivais à détecter… Je (enseignement spécialisé, voyais : « Ca il n’a pas compris. Il faut que je travaille ça ou ceci. Ce n’est enseignement ordinaire, pas maitriser. » Je pouvais par exemple dire : « Écoute. Ici, prend-le ADAPT (6) partenaires extérieurs) sont pendant une demi-heure en dehors de la classe. Tu revois ça avec lui et tu assimilés reviens ici. » Donc voilà… des prises individuelles mais parcimonieuses, ADAPT (6) à des lieux d’échanges et de partages. hyper ciblées en fonction du besoin de l’enfant. Et pas systématiquement, on sort de la classe… L’utilisation de ressources matérielles (carnet de notes) 14. Depuis que vous pratiquez l’intégration, avez-vous actualisez vos permet optimale une transmission connaissances concernant les élèves à besoins spécifiques ? Si oui, des informations comment ? entre les acteurs. [Enseignant 5 marque un temps de réflexion.] Pas de formation particulière ? Au niveau de l’intégration, non. Au niveau de la différenciation, oui, ça c’est tout le temps. AKA, langue des signes, non. On ne me l’a jamais proposé. Est-ce qu’avec vos propres collègues vous aviez des échanges qui pouvaient vous faire progresser ? Les collègues qui l’ont eu précédemment parce que moi je suis arrivée en terme de parcours, oui. Il y a des collègues qui ont eu l’enfant. Oui, oui, HUM 137 138 tout à fait. Mes collègues de cycle, c’est important. Les collègues (pairs) au HUM Avec d’autres ? Vous parliez de logopède… même titre que les logopèdes Oui, oui, la logopède aussi. Je dirais que les logopèdes, l’appui HUM représentent également des logopédique, c’était plus… Tu avais des logopèdes qui étaient plus axées ressources sur le français ou les mathématiques donc c’était plus ciblé. Mais c’est vrai humaines que c’était important d’avoir ce feed-back et ce retour, de dire : « ça, j’ai INFOR importantes. retravaillé avec lui ou ça, j’ai fait » ou alors elle venait en classe en disant : « mais qu’est-ce que je peux faire ? » parce que les logopèdes elles, elles les prenaient pour un suivi plus individualisé. 15. Comment jugez-vous cette actualisation des connaissances ? Expliquez. L’actualisation des [Enseignant 5 demande des précisions sur la question.] C’est mon connaissances est qualifiée développement professionnel. d’essentielle. Elle contribue Il est important, il est utile ? au Oui. Avec toutes les formations que j’ai faites, je pense que c’est essentiel. FORM développement professionnel de l’enseignant DEV Pour moi, c’est essentiel. 5. 16. Aujourd’hui, si l’intégration était une de ces photos, laquelle seraitelle pour vous ? Choisissez parmi celles proposées. (une montagne - un désert - l’océan sans plage - la forêt - la plage paradisiaque - un pont de bois - un labyrinthe - une cascade - un lac et ses bordures - un terrain de golf - des falaises vues d’en haut - l’espace) 138 139 Pourquoi avez-vous choisi cette photo ? Pour moi, c’est quelque chose de très paisible, que j’affectionne particulièrement. Donc, moi, je dirais : « j’ai besoin de vacances ». [Enseignant 5 sélectionne la photo d’une plage paradisiaque.] Pour moi, c’est ça parce que - j’aurais pu choisir la mer calme -, c’est quelque chose pour moi qui n’est pas du tout un obstacle, pas du tout insurmontable. C’est quelque chose qui fait partie d’une… C’est presque du naturel en fait. Quelque chose qui est, pour moi, naturel, qui ne demande pas d’effort Pour l’enseignant 5, les particulier. C’est paisible. Et qui est très riche parce que justement on a un CONT humaines support extérieur et moi je ne rêve que d’une chose c’est d’avoir un co- processus titulariat. Je pense que si on pouvait avoir un co-titulariat tout le temps en d’intégration représentent un classe, ce serait d’une richesse incroyable. Le fait de travailler aussi en support riche de sens. binôme avec cette personne ressource aussi qui peut donner… Apprendre ressources associées au de l’autre… Voilà, ça va dans cette thématique-là. 17. Souhaitez-vous ajouter quelque chose ? J’espère qu’on évoluera vers plus que de l’intégration. Oui, sincèrement, voire de l’inclusion. 139 Annexe 8 : Typologie des gestes d’aide mis en œuvre par les enseignants du primaire pour les élèves déficients auditifs intégrés en classe ordinaire (Gombert & Roussey, 2007) • Adaptations spontanément déclarées • Adaptations proposées Catégories et définitions Illustrations 1. Cadre de travail (énoncés mettant l’accent sur une modification des conditions matérielles de travail dans la classe) : • Placement de l’élève ; • Place de l’élève dans la classe • Disposition des bancs dans la classe (pour favoriser les accès visuels) • Place de l’élève dans la classe • Aménagement des conditions matérielles • Utilisation du système FM (utilisation d’outils spécifiques et adéquats • Affichage de référentiels pour contourner le handicap, aménagements • Utilisation de pictogrammes collés sur le visibles). banc • Utiliser un système FM • Éviter de surcharger la classe d’affiches ou de décorations 2. Adaptation de la prescription (énoncés • Veiller aux conditions ambiantes par la dont l’idée témoigne d’une réflexion de sensibilisation du groupe classe l’enseignant sur la prescription, c’est-à-dire • Attirer l’attention visuellement les consignes de mise au travail) : • Veiller au débit de parole (pas trop rapide • Consignes prises en charge par l’enseignant; pour permettre la lecture labiale) • Consignes prises en charge par les élèves. • Accentuer les expressions du visage pour faciliter l’attention la compréhension et capter 141 • Capter l’attention par un contact physique • Retravailler les consignes pour permettre la compréhension • Faire reformuler pour vérifier la compréhension • Vérifier la compréhension en posant des questions • Écriture des consignes au tableau • Attirer son attention avant de lui parler et maintenir le contact visuel • Veiller à l’articulation, tout en parlant clairement et naturellement • Veiller aux conditions ambiantes • Reformuler les consignes importantes et en vérifier la compréhension 3. Adaptation des moyens (différenciation • Favoriser les manipulations pédagogique) : aides propres à compenser le • Parler face à l’élève handicap spécifique ou résultant de difficultés • Dissocier (j’écris / je parle) associées • Utilisation de référentiels ou de fiches (lenteur d’exécution, non- autonomie cognitive). Il s’agit ici, à objectif procédurales commun, la • Favoriser les informations visuelles en • Favoriser la verbalisation, l’expression de particularité prendre de l’élève en compte concerné aménageant les conditions pour y parvenir. orale • Adaptations en rapport à l’activité : • Adaptation du discours contournement de l’activité et/ou adaptation des supports; • Favoriser les informations visuelles. • Adaptation en rapport au temps de travail ; • Limiter les apports magistraux • Modification du style pédagogique de • Dissocier l’enseignant. 141 142 4. Adaptation (individualisation) : des parcours regroupe les énoncés qui mettent l’accent sur la mise en place d’une individualisation de l’enseignement, c’est-à- dire, autoriser l’élève à ne pas faire la même chose que ses camarades. • Réduction de la somme des savoirs ou des notions à faire acquérir ; • Choix de matières à enseigner. 5. Aide des pairs de la classe vers l’élève à • Travail en sous-groupes (nombre d’élèves besoins spécifiques (aide institutionnalisée). moins important • Travail en groupe ; interactions) • Mise en place de tutorat. • Pratique du tutorat pour favoriser les • Pratique du parrainage • Aide des pairs 6. Guidance et contrôle individualisé de • Utilisation de la langue des signes l’enseignant lors de la réalisation d’une • Utilisation de l’AKA tâche: regroupe les énoncés qui témoignent • Travail individualisé sur les stratégies d’une cognitives propres à l’élève aide individualisée conduite par l’enseignant pendant son cours ou d’un • Pratique de la grammaire textuelle «regard/contrôle » plus important du travail • Accompagnement individualisé autour des de l’élève en cours de réalisation. Il s’agit ici compétences de l’élève de ce que Bruner (1996) nomme le maintien • Programmation de périodes de guidance de l’orientation. individualisée • Favoriser l’autonomie et responsabilisation • Utiliser la langue des signes ou l’AKA 142 la 143 7. Apports méthodologique et • Adaptation du vocabulaire utilisé dans les métacognitif: regroupe les énoncés qui textes de lecture témoignent d’un travail effectué dans le • Adaptations méthodologiques en fonction domaine des compétences transversales ou des difficultés / des besoins de l’élève métalinguistiques, qui a pour fonction de • Exploitation des divers canaux (visuel, «signaler les caractéristiques déterminantes » auditif, pour la réalisation d’une tâche (Bruner, apprentissages à réaliser 1996). • L’aider à se repérer dans le temps 8. Adaptation à l’évaluation : kinesthésique) en fonction des regroupe les Pour les épreuves écrites : énoncés qui témoignent d’une modification • Surligner les consignes pour attirer des gestes propres à évaluer l’élève que ce l’attention soit au moment des contrôles ou lors de la • Faire lire les consignes et reformuler pour notation elle-même. vérifier la compréhension • Dans la réalisation du contrôle ; • Accorder du temps supplémentaire pour la passation des épreuves • Respect du rythme individuel durant les épreuves • Questionnaires adaptés en fonction des besoins Pour les épreuves orales : • Passation des épreuves de manière isolée pour permettre l’accès aux informations Pour toutes les épreuves (écrites ou orales) : • Présence d’une personne compétente pour guider • Utilisation de l’AKA • Utilisation de la langue des signes • Réexpliquer – reformuler les consignes Pour les épreuves écrites : - prolongation du temps accordé à chaque 143 144 épreuve ; - présentation écrite des textes et des consignes ; - adaptation des conditions matérielles ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente. Pour les épreuves orales, notamment : - présentation dans les conditions optimales (lecture labiale, aides techniques,...) ; - si nécessaire, présence d'une personne compétente ; - passation des épreuves sous forme écrite. • Dans la notation. • Grilles (critères) d’évaluation adaptées 9. Revalorisation de l’élève : regroupe les • Accueil de l’élève énoncés qui témoignent d’un travail effectué • Éviter la stigmatisation par la sensibilisation propre à revaloriser, motiver l’élève en des pairs difficulté. • Pratique du renforcement positif • Favoriser l’expression des émotions / des besoins • Valoriser l’élève dans les domaines qu’il affectionne ou dans lesquels il est compétent 10. Absence d’adaptation. 11. Réponses inclassables : regroupe les réponses des enseignants déclarant ne pas avoir adapté leurs méthodes d’enseignement ou ne pouvant pas être classées car trop imprécises. 144