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Socio-économie et innovations sociales

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SOCIO-ÉCONOMIE ET
INNOVATIONS SOCIALES
Marie Fare
Introduction
La socio-économie consiste en l’analyse d’objets économiques à partir d’un cas théorique disciplinaire
ouvert (éco, socio, histoire, anthropologie), d’une méthodologie principalement inductive (=/
déductive qui part d’un certain nombre d’hypothèses pour l’appliquer à des observations; inductive
= part des observations et construit et formule un ensemble de théories par généralisation), relevant
d’un individualisme institutionnel (la façon dont les chercheurs observent , micro : individu / holisme
méthodologique : primer le groupe, la structure, sur l’individu / individualisme institutionnel :
dépasse ces deux approches, actions des individus évoluant dans un cadre institutionnel, influence
entre actions individuelles et collectives et les institutions*) et sans postulat quant à la nature du
comportement individuel (on ne suppose pas que l’individu agit de manière rationnelle, on sort de
l’homo economicus, il existe d’autre formes de rationalité, il existe une pluralité de raisons et poussent
les individus à agir, l’action économique peut résulter de plusieurs raisons : ostentatoire, logique
intéressée ou désintéressée, on ne postule pas qu’ils sont rationnels : on observe et déduit).
*Exemple de la monnaie : à la fois une institution sociale qui émerge de collectif mais en retour la
façon dont les individus vont gérer la monnaie est influencée par leurs pratiques. Mêle des facteurs
liés à l’individu et d’autre liés aux institutions.
1. Point de départ
Dynamique récente, fin 1970, résurgence de la socio-économie.
Premier facteur : une réaction au regard de l’impérialisme de l’économie néo-classique (volonté
d’appliquer cette approche à l’ensemble des phénomènes sociaux, empiècement des économistes sur
un certain nombre de domaines qui cherchent à expliquer à l’ensemble des événements avec la
rationalité).
Deuxième facteur : mutations socio-économiques à cette période qui s’inscrivent dans un contexte de
dérégulation du marché.
Cela s’inscrit parfois dans une dynamique de critique et l’idée de reconnaissance de la pluralité des
pratiques économiques et remettre en question une définition de l’économie qui repose quasiment
tout le temps que sur le marché : élargissement de ce qu’est considéré comme étant économie.
-
On intègre des dimensions politiques, culturelles, institutionnelles…
Observer les relations sociales, le rôle des pouvoirs publics, comment l’économie qui est une
représentation culturelle va influencer les pratiques.
1
-
Ne faut-il pas refonder l’économie pour en faire une science sociale ?
-
Sortir de la vision marchande de l’économie et l’enrichir d’autres sciences.
-
Reconnaitre la complexité et la pluralité des pratiques économiques concrètes. Dire que le
marché s’autorégule c’est nier le rôle de ses acteurs.
-
On va considérer qu’il y a d’autres façons pour les individus de transmettre les ressources qui
ne soient pas marchandes (toutes formes de dons).
2. Contre les fondements de la science économique standard
Postulat 1- Autonomie de l’économie
Remise en cause d’un postulat qui est celui de l’autonomie de la sphère économique où il y a eu
progressivement une assimilation entre l’économie et le marché. Il y a eu fin 18e début 19e un
tournant économiciste : séparation de l’économie et des phénomènes de la société. L’économie
marginaliste va s’éloigner d’un certain nombre de questions traitées par les classiques, elle va exclure
les institutions, l’économie va s’autonomiser.
Cette autonomisation est contestée par les théories de l’encastrement.
Postulat 2 - Naturalité de l’économie
Volonté d’un certain nombre d’auteurs d’établir des lois naturelles. Des orthodoxes défendent à la
naturalité des lois qui ne correspondent pas forcément à la réalité que l’on peut observer. Cela renvoie
au fait que le marché se soit créé tout seul, qu’il s’autorégule, la rationalité supposée des individus. Or
le marché est un construit historique que l’on peut dater.
Conséquence de ce caractère naturel : la neutralité. A partir du moment où on considère les lois
comme naturelles alors il n’y a pas de débat et de conflit. Elles effacent le poids des représentations
sociales et culturelles. Les choix économiques sont forcément idéologiques et politiques. Cette
neutralité est dénoncée par les hétérodoxes. A partir du moment où on souhaite que l’économie soir
une science dure et non une science sociale alors on ne prend pas en compte le contexte institutionnel,
social, etc. On ne plus discuter des choix de politiques économiques.
Postulat 3 - L’homo economicus
C’est l’idée que l’individu agit systématiquement pour chercher son utilité individuelle, cherche à
satisfaire ses besoins et maximiser son utilité. Les socio-économistes pensent qu’il n’existe pas une
seule forme de rationalité, la recherche de satisfaire ses besoins ne peut pas être l’unique raison.
Critiques :
•
Vers une rationalité limitée (Simon 1955) : pour lui les individus disposent d’un certain
nombre d’informations et de capacités cognitives limitées ce qui empêche d’optimiser leurs
choix. Il met en avant trois dimensions qui caractérisent cette rationalité limitée : les individus
ne disposent pas d’un accès illimité à l’information car cela demande des ressources (temps
et argent) ; les individus disposent de capacités cognitives qui ne leur permettent pas de
2
disposer d’une vue synthétique de toutes les options et choix ; l’individu n’a pas toujours une
vision claire de ses préférences qui vont évoluer à travers le temps. — Il faut observer
l’environnement dans lequel l’individu prend sa décision.
•
L’économie comportementale (Kahneman 2012 ; Thaler, etc.) : prend en compte les facteurs
psychologiques et l’influence des émotions dans le processus de prise de décision. L’individu
n’agit pas systématiquement de façon rationnelle. Invalidation de la rationalité avec le
mimétisme des individus etc. Le jeu de l’ultimatum : un individu peut refuser de maximiser
ses besoins pour cause d’inégalité, il y a ici d’autres motifs qui doivent être appréhendés.
•
Un « Grand Partage » disciplinaire entre sociologie et économie qui sont des « mondes
hostiles » (Zelizer), c’est penser qu’introduire de la sociologie dans l’économie c’est venir
dénaturer la science et vice versa. C’est le « consensus Robbins/Parsons ». La critique socioéconomique cherche à dépasser cette limite et montrer qu’il existe des imbrications. Limiter
ce réductionnisme économique et montrer que l’économie est intensément sociale.
•
Le problème de l’impérialisme économique (cf la directions prise par Becker, 1976) : il est
possible de mobiliser la boite à outils des économistes pour l’appliquer à l’ensemble des
comportements sociaux.
3. Approches socioéconomiques
3.1 Caractéristiques communes des travaux socio-économiques
Refus des postulats économiques standard, intégrer d’autres logiques pour comprendre l’économie
pour enrichir et complexifier l’approche traditionnelle. Le pouvoir, les conflits, les rôles des groupes
sociaux, les émotions doivent être pris en compte. Pour forger des théories les socio-économistes
s’appuient sur l’observation et un travail de terrain : induction. Chercher le sens de l’action pour
ensuite interpréter, c’est une approche compréhensive, donc l’action économique est constamment
située dans un contexte, le sens de l’action est interprétée.
Le chercheur doit prendre conscience de sa propre subjectivité et ses propres valeurs. La subjectivité
doit être reconnue par le chercheur car elle met en cause la rationalité. Max Weber dit qu’il existe
plusieurs rationalités : - en finalité (instrumentale) c’est l’action intéressée de l’homo economicus ; en valeur qui s’appuie sur des convictions, des causes, des devoirs, des valeurs, c'est un ensemble de
valeurs auxquels l’acteur va adhérer, ces actions ne sont pas jugées comme non-rationnelles.
Max Weber considère aussi les actions reposant sur la passion, les sentiments, celles tournées vers
l’ethos, le groupe social et la tradition. Toutes ses actions ne sont pas non plus considérées comme
non-rationnelles.
Le cadre d’analyse n’est ni individuel, ni méthodologique, ni holiste. Prise en compte des interactions
entre les individus et les institutions. Les individus impactent les institutions et les institutions
assurent le fonctionnement global.
Les socio économistes, n’ont pas d’approches unifiées, elles se rapprochent. On retrouve les courants :
•
Les institutionnalises, mettent en avant le rôle des institutions et de son contexte, liens entre
déroulement. Polanyi, Lordon…
3
•
•
•
•
Les conventionnalistes, mettent avant le rôle des conventions, des institutions qui
coordonnent les échangent au niveau individuel. Une partie de leurs travaux portent sur les
marchés financiers et le mimétisme. Orléan, Favro
Les nouvelles socio économies : renouveau dans les années 80.
Les historiens.
Anthropologie économique.
Ces courants s’inscrivent ou se reconnaissent dans la socio-économie, mais elle n’est pas reconnue
formellement comme en sociologie.
Le pluralisme qui existe en économie est une vraie richesse.
Conclusion :
On peut se demander si la socio économie vise :
• Une pluridisciplinarité (plusieurs regards sur un même objet),
• Une interdisciplinarité (un travail de dialogue entre disciplines conduisant à la construction
de concepts communs),
• Ou une unidisciplinarité (revendication d’Orléans 2005 : les faits économiques sont des faits
sociaux … comme les autres ; la seule discipline valable est la science sociale). Ils refusent le
partage en sciences économiques et science sociales et qu’il y ait une refondions entre
économie et sociologie afin de faire émerger un dialogue entre ces deux disciplines et donc
d’affirmer que l’économie appartient au champ des sciences sociales.
4
Chapitre 1. Le problème de l’encastrement des activités
et des pratiques économiques
L’encastrement originel (Polanyi), institutionnel, politique et culturel (formes plus récentes).
1. La
question
originale
désencastrement
de
l’encastrement
/
C’est la question à partir de laquelle il y a eu un renouveau de la socio-économie.
1.1 L’encastrement maussien (Essai sur le don, 1923-24)
Marcel Mauss publie un ouvrage sur le don et il montre que l’échange est un phénomène que l’on
retrouve dans tout un tas d’activité et qu’il en existe différentes formes.
Le point de départ c’est que le marché n’est pas le seul mode d’échange au sein des pratiques
économiques et qu’il faut reconnaître ses pluralités.
Il s’appuie dans ses travaux sur des réalités observables dans différentes sociétés autour du potlatch
(F.Boas) :
Une forme de don sur le mécanisme de lutte et de rivalité, opposition entre clan lors de fêtes
hivernales, donner aux autres une abondance de biens pour que l’autre clan ne soit pas en mesure de
rendre en conséquence : asseoir une position hiérarchique, question d’honneur et de pouvoir, lutte
de générosité.
Et la kula (B.Malinowski) en Océanie :
Ce sont des cycles d’échanges entre des partenaires situées sur les îles différentes, les acteurs se
rendent dans des îles où ils ont des partenaires et obtiennent des biens précieux (bracelets, colliers)
et quand leurs partenaires se rendent sur leurs îles devront la rendre la pareille, les cycles n’ont pas
de fin, ils marquent les liens qui sont noués. Ces liens vont dépendre du nombre de partenaires que
les individus ont et de la valeur des biens qu’ils ont reçus. Il y a des enjeux de proportionnalité, c’est
une obligation morale. Liens de coopération.
Selon Mauss, ce sont des formes de dons qui reposent sur une liberté sans obligation. Donc il existe
bien des pratiques d’échanges non-marchand. Ces formes de dons ne sont pas limitées aux sociétés
anciennes car on les retrouve dans nos sociétés modernes aussi.
Pratiques de dons au sein de la Silicon Valley : dans un contexte d’incertitude ils vont collecter tout
un tas d’informations. Triple obligation du don : accepter de donner quelque chose, contre-don, et
rendre.
Chez Mauss, il n’existe pas de don désintéressé. L’individu qui veut recevoir est obligé de donner au
préalable, celui reçoit devra rendre.
5
Le don est à la fois obligatoire et libre. L’individu peut refuser de s’inscrire dans ce cycle de don et
contre-don. Le don relève des liens sociaux (les créé, les entretient ou manifeste le lien). Il faut
considérer que le don peut être intéressé.
Il y a une incertitude sur le retour. Il n’y a pas de définition des termes de l’échange de dons.
1.2 L’encastrement polanyien
Polanyi, The Great Transformation, 1944.
Polanyi et Arensberg, Trade and Market in the Early Empire, 1957.
Chez Polanyi, l’encastrement est pluridisciplinaire. 1886-1964. Il a beaucoup étudié les
transformations liées à la Révolution industrielle. Il met en avant les limites des appréhensions
économiques de l’époque : assimilation de l’économie et du marché. Il est le premier à avoir parlé de
l’encastrement.
Deux hypothèses fondatrices, la définition de l’économie, il distingue deux sens :
•
•
L’économie formelle qui découle du caractère logique de l’action rationnelle et met en
adéquation les moyens et les fins.
L’économie substantive qui s’appuie sur son observation des sociétés anciennes, il
définit l’économie dans cette perspective comme l’ensemble des interactions entre les
êtres humains en vue de satisfaire leurs besoins matériels.
Si les économistes résonnent à partir de l’économie formelle, cela occulte un pan entier de la réalité :
le sophisme
Le marché est une réalité relativement récente et donc il faut partir de l’économie substantive pour
appréhender comment l’individu satisfait ses besoins. Il ne faut pas confondre marché et économie
car cela conduit à analyser l’économie seulement sous l’angle de la maximisation de leur utilité
individuelle.
Il existe dans toute société trois principes d’intégration qui sont des logiques qui vont organiser des
transferts de ressources, de productions et de financement. On observe les formes de l’échange et
surtout les institutions sur lesquelles reposent ces échanges. Chaque principe s’inscrit dans une
logique d’interdépendance.
Réciprocité
Structure
institutionnelle
Logique d’action
Type
d’interdépendanc
e
Exemples
Redistribution
Échange marchand
Horizontale
Centralisée
Système de marchés à prix
fluctuants
Action entre pairs
(obligation
communautaire,
engagement citoyen, etc)
Obligation dans un
système centralisé
Marchandage
Complémentarité instituée
Solidarité entre pairs
(économie solidaire)
Centralité instituée
Prélèvements fiscaux,
prestations sociale
Interdépendances
automatiques (fonction des
prix et quantités de
marchandises)
Échanges marchands
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Ces trois principes d’intégration sont retrouvés dans toutes les sociétés qui sont définies par une
certaine combinaison des principes qui sont plus ou moins hiérarchisés. Le marché est forcément un
principe d’intégration secondaire, les normes sociales prévalent sur les échanges marchands.
Il montre que seules les sociétés contemporaines connaissent une domination du marché qui a une
prétention autorégulatrice. Ceci est lié à l’adoption formelle de l’économie.
Il y a une tendance au désencastrement des relations économiques vis-à-vis des relations sociales.
Polanyi relativise la place du marché dans l’histoire des sociétés contemporaines il met en avant deux
autres principes d’intégration.
La construction de ce marché n’est pas naturelle au XIXe, il y a un ensemble de changements qui vont
aboutir à créer et construire cette société de marché désencastrés. Pour lui, l’état ultime de cette
société c’est la transformation de la terre, de la monnaie et du travail en marchandises qui est une
fiction car elles n’ont pas été produites pour être commercialisé. C’est un travail politique qui vient
d’acteurs collectifs.
L’utopie du « One Big market » dans laquelle il va y avoir un contre-mouvement de protection de la
société civile qui prend différentes formes : Etat providence, système soviétique et nazi : tentatives
de ré-encastrement anti-démocratiques. Ces réactions sont inévitables puisque chez Polanyi il n’est
pas possible que l’utopie s’installe.
Crises et réactions d’autoprotection de la société : système soviétique, système nazi, Etat providence
dans les démocraties libérales. Le processus de ré-encastrement peut prendre une forme antidémocratique selon lui.
Le désencastrement de l’économie n’est donc qu’une tendance, il ne peut aboutir sans détruire la
société.
Si tel est le cas, il n’y aura plus de liens entre les individus. Il y aurait des famines et autres guerres,
les individus ne pourraient plus satisfaire leurs besoins à travers la logique marchande.
Il étudie la construction progressive de ce marché autorégulateur. Il s’intéresse particulièrement à
trois marchandises fictives : la terre, le travail et la monnaie. Elles ne sont pas produites pour être
consommer.
L’économie est donc historiquement encastrée. « L’économie humaine est donc encastrée et englobée
dans des institutions économiques et non-économiques ».
1.3 Application moderne : l’économie plurielle comme observation et
comme norme.
Le manifeste d’Aznar et Alii, mettre en lumière la pluralité de l’économie au regard des principes mis
en lumière par Polanyi, nécessité de développer des associations pour favoriser l’encastrement de
l’économie. L’association sous toutes ces formes pour donner un cadre collectif aux actions. C’est une
approche qui met en avant la pluralité des sources de la protection des individus, elle n’est pas
exclusivement liée à une forme étatique de redistribution, il faut aussi prendre en compte les formes
de solidarité informelles comme la réciprocité.
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Il y a des approches qui favorisent une interprétation du triangle de Evers. Économie marchande,
économie non monétaire, économie non marchande. Les sommets du triangle inspirés des Fi de
Polanyi.
Donner des bases conceptuelles à l’économie plurielle qui vont montrer que l’analyse de Polanyi a
une actualité contemporaine et que ces trois principes de base permettent d’avoir une représentation
contemporaine et plus complexe que l’économie marchande. Il faut mettre en avant la mixité et la
pluralité des économies. Les rapports entre l’économie et la société sont repensés. L’une de ces formes
ne peut pas exister sans les autres formes. Ils cherchent à montrer que l’économie ne résulte pas que
de l’échange marchand et qu’il faut combiner les différentes économies et arriver à un nouvel
équilibrage.
Selon eux, les échanges marchands ne sont pas le problème du moment que le marché est encastré
dans les rapports sociaux, le problème c’est la prédominance de ce modèle.
Il existe dans les associations une égalité des membres.
Cette approche donne naissance à l’économie solidaire, au croisement d’économie marchande et nonmonétaire. Les associations délivrent des services, recevoir des subventions et mobilisent des
principes de réciprocité.
Il est nécessaire de rendre visibles la pluralité des richesses, monétarisées ou non.
Résumé :
•
•
L’encastrement maussien : une pérennité du don dans les sociétés modernes.
L’encastrement polanyien : l’économique est immergé dans des institutions économiques et
des institutions non économiques.
-
Mouvement contemporain de désencastrement avec la dérégulation initiée dans les années
80. Comment l’économie vise à s’émanciper d’un certain nombre de régulation politique et
sociale à travers un système de marché autorégulateur.
Déplacement des frontières de marché : marchandisation de ressources naturelles mais on
peut aussi analyser le rôle de l’économie solidaire, collaborative qui visent à satisfaire les
besoins des individus en évitant la logique marchande
-
Deux directions :
-
Encastrement de l’économique : la société dans son ensemble contraint/ oriente l’économie
Encastrement par l’économique : comment l’économique influence, performe la société
(influence de toutes les théories économiques qui influencent les pratiques des acteurs. La
théorie va orienter véritablement les pratiques des acteurs)
8
2. Quatre grands modes d’encastrement de l’économique.
Ici on est dans une approche qui met en avant l’importance de facteurs liés aux réseaux, institut, poli,
culture dans les échanges marchands. Les différences reposent sur les institutions à l’œuvre ou sur la
forme de coordination des différents auteurs.
2.1 L’encastrement structural : le travail fondateur de Mark
Granovetter sur les réseaux sociaux
S’oppose au grand partage entre l’économie et la sociologie, et va chercher à observer des objets
qualifiés de purement économique avec le regard d’un sociologue. C’est le chef de file de la nouvelle
sociologie économique avec une réflexion autour de l’encastrement des acteurs économiques autour
des réseaux sociaux.
1. Getting a Job : l’étude fondatrice.
Le point de départ de sa réflexion est de savoir comment les individus ont-ils donc trouvé leur travail.
Réalisé auprès de 256 cadres :
• 30% des individus occupent un emploi qu’ils n’ont pas cherché.
• 35% occupent à emploi qui n’était pas à pourvoir.
⇢ ce n’est pas sur le marché du travail que ces individus ont trouvé un travail.
Il suggère d’étudier la façon dont les individus trouvent leurs emplois :
• 19% des individus trouvent à partir de démarche directe et médiations formelles
• 56% contacts personnels
• 6% autre
⇢ 56% grâce à leurs contacts personnels, ils ont un indice de satisfaction au travail plus élevé que les
autres.
9
Cette mise en avant de la logique des réseaux dans la recherche d’emploi et tout l’apport de
Granovetter.
On peut élargir cette approche : tous les individus ne disposent pas d’un réseau social, de bons
contacts.
Encastrement structural : tenir compte de l’identité de la personne que l’individu connait et aussi
l’ensemble des personnes qu’il connaît : on étudie la structure plus globale du réseau.
Il identifie différents types de liens entre les individus : les liens forts et les liens faibles.
Sur cette base, Granovetter donne une définition l’encastrement : il repose sur le soubassement social
des relations marchande, comment les relations vont permettre une coordination entre les individus
sur un marché. Il va également refuser un certain nombre d’approches car pour lui ces approches
substantivistes considèrent que l’économie moderne est désencastrée. Il pense que le
désencastrement est impossible compte tenu des réseaux sociaux. Pour lui toutes les actions
économiques sont intégrées dans les réseaux sociaux.
Chez Polanyi on est sur une tendance au désencastrement. On peut dire que Granovetter a une lecture
déformée de Polanyi. C’est car il a utilisé le terme désencastré sans connaître les travaux de Polanyi.
Il refuse également les approches reposant sur une vision sous et sur socialisée de l’individu. Il essaie
de trouver un intermédiaire entre ces 2 approches. Dans la version sous socialisée, l’individu est
égoïste et individualiste, à l’inverse dans les approches sur-socialisé, les individus auraient un
comportement trop peu subjectif.
Les actions sont socialement situées, encastrées dans des réseaux de relations :
-
-
-
Il y a des finalités diverses aux activités économiques (déjà vu dans les séances précédentes)
et elles sont inscrites dans un contexte social car les individus vont être inséré dans des
réseaux permanents de relation personnelle qui font que les individus sont constamment en
contact.
Les marchés fonctionnent sur la base de structure sociale basées sur des réseaux d’acteurs. Il
ne faut pas tenir compte seulement de la relation entre 2 acteurs, il faut sortir des relations
bilatérales pour analyser la place des individus dans la structure.
Les réseaux traversent les organisations et les marchés, travaux qui portent sur les relations
sociales en entreprise intégrant la notion d’efficacité
Les réseaux façonnent l’efficacité des marchés et des organisations, l’efficacité des acteurs à
mobiliser des ressources techniques, scientifiques etc.
Pour lui il y a différents chemins possibles, c’est bien l’imbrication des réseaux sociaux qui vont
orienter les organisations ou marchés dans un sens. Cela va influencer les ressources politiques,
matérielles etc. employées dans l’organisation ou marché.
2.2 L’encastrement institutionnel
Il met en avant le fait que l’encastrement n’est pas seulement un encastrement des réseaux sociaux
mais que de façon plus large, un ensemble d’institutions jouent un rôle dans le fonctionnement des
marchés. Institutions : construction collective capable d’influencer de manière durable le
10
comportement individuel, elles peuvent être formelles ou informelles. Elles peuvent prendre
différentes formes :
- Institutions règles dans le cadre de norme, conventions, coutumes
- Institutions acteurs ou l’on observe le rôle des collectifs d’individus qui sont en capacité
d’influencer leur environnement : organisations officielles, groupes informels stabilisés.
Encastrement pensé autour d’un ensemble de règles et notamment des institutions règles.
Encastrement institutionnel prend une forme juridique en appliquant des règles, des lois pour
encadrer les marchés. Il s’agit d’encastrement juridique des relations marchandes. Influence
fortement le déroulement des activités économiques ainsi que la stabilité des activités économiques.
Le droit favorise l’émergence de marché, il le règlement limite certaines pratiques. Toutes les activités
économiques reposent sur des règles de droits permettant leur développement et contraignant les
acteurs économiques.
2.3 L’encastrement politique
On met l’accent sur le rôle de l’Etat et du personnel politique et administratif dans l’organisation et
l’orientation des activités économiques. Comment l’Etat oriente le déroulement des activités
économiques à travers le panel de ses moyens d’actions ?
Fligstein (2001) :
- L’Etat détermine les relations entre les firmes car l’Etat construit le droit, il favorise les
phénomènes de concentration mais peut aussi les limiter.
- Favorise ou non l’innovation technologique.
- L’auteur met en évidence les facteurs politiques et économique qui sont liés à l’Etat qui va
impulser, dès la WWII, le développement de ce secteur d’activité (Silicon Valley).
Impulsion par le Secrétariat d’Etat, à différentes formes de soutien de la part des pouvoirs
publics (soutien financier, notamment auprès des universités afin d’encourager la recherche
autour de la technologie, et aussi des incitations fiscales fléchées vers le développement de ce
secteur d’activité qui ont permis, in fine, la réussite de ce secteur). Volonté politique oriente
tels ou tels secteurs d’activité. Les USA revendiquent le fait que l’Etat n’intervient pas dans le
cadre des relations économiques alors que l’Etat peut intervenir puissamment pour soutenir
ou favoriser l’émergence de certains secteurs.
On est dans le cadre de l’économie plurielle avec l’imbrication du secteur privé et du secteur public à
travers l’interventionnisme de l’Etat.
11
Pourquoi les Etats construisent aussi les conditions de leurs inactions ? Par exemple avec les BC
indépendantes et la BCE ⇢ on en revient au caractère performatif de la théorie économique et du rôle
de l’expert et de son influence auprès du pouvoir politique. Outre l’influence de la théorie économique,
On peut étendre la formation des choix de politiques publiques en ajoutant le rôle joué par les lobbies,
les réseaux ou encore la corruption.
2.4 L’encastrement culturel
Met en avant comment les dimensions culturelles fondent les pratiques économiques. Dimensions
culturelles est tout ce qui est relatif au processus de socialisation (primaire ou secondaire), éléments
cognitifs liés à la subjectivité et à la catégorisation opérée par les individus ou encore toutes les
normes qui influencent les pratiques des individus.
Influence des facteurs religieux intégrés dans les dimensions culturelles, comment les mentalités et
les croyances influencent le comportement des individus (Weber et l’éthique protestante) :
-
Les croyances influencent le développement de tels ou tels pratiques économiques,
notamment des pratiques capitalistes dans le protestantisme où l’accumulation est valorisée.
Le salut est obtenu par un arbitrage de Dieu et le seul moyen pour les individus de parvenir à
capter ses signes d’élections divines est de développer des formes de réussite économique qui
s’inscrive dans le cadre de la valorisation du travail et de la non utilisation du profit, les
individus sont incités à réussir mais ne sont pas incités à utiliser les profits générés
-
Codification culturelle des échanges marchands façonne l’espace légitime des comportements
marchands. Des espaces seraient légitimes pour le déroulement des échanges marchands et
d’autres non. Conditions dans lesquelles les échanges marchands peuvent se dérouler
importent : - les personnes importent, on ne commerce pas entre proche (famille et amis)
mais cela dépend nécessairement du contexte ou des codes culturels / les lieux importent, on
ne commerce pas dans des lieux de culte / les produits importent, pas de marchandage
possible dans le cadre des prestations funéraires. Marché de l’assurance vie s’est développé
autour d’un processus de changement de mentalités autour des perceptions de la mort, une
bonne mort est lorsque l’on laisse quelque chose à ses héritiers / les circonstances importent.
Le marché est donc contraint par ces normes culturelles, aujourd’hui la marchandisation de
l’environnement avec l’évaluation du prix de la nature.
Culture permet aussi de développer un certain nombre d’activités économiques.
-
Zelizer, l’encastrement culturel comme entremêlement (mingling). Elle refuse la notion de
Grand Partage disciplinaire. Elle considère qu’il y a des interrations entre différents facteurs,
difficile de déterminer la nature des facteurs qui sont des préconceptions et catégories
attribuées à certains objets. Difficile de distinguer les phénomènes économiques,
sociologiques, politiques etc. car tout est très imbriqué. Il faut étudier l’ensemble des
causalités, c’est en mélangeant tout que l’on peut étudier au plus proche de la réalité. Elle s’est
penchée sur les questions monétaires et sur les pratiques monétaires. Elle pense que la
monnaie n’est pas un pur instrument quantitatif, interchangeable et impersonnel. La diversité
des usages de l’argent montre le rôle des marqueurs socioéconomiques. Les individus vont
systématiquement s’approprier la monnaie et l’orienter en fonction des marqueurs
socioéconomiques.
12
Par exemple dans les sphères intimes : à une époque où les femmes ne travaillaient pas, la
monnaie intégrait une sphère de l’intime et ce n’est pas pour autant qu’on observait une
perversion cependant il y avait une relation de pouvoir. Ce mettait en place un système de
versements hebdomadaires pour qu’il n’y ait plus cette situation de domination.
Autre exemple : l’origine des revenus, dans un certain nombre de cas, les ménages opèrent
des affectations des revenus. Ils mettaient dans une boite les dépenses quotidiennes et dans
une autre les dépenses de loisirs : un fléchage et orientation de l’argent.
On retrouve également que quand des personnes héritent d’une somme d’argent, ils
n’utilisent pas cet argent à des dépenses courantes mais vont la placer pour une dépense
extraordinaire.
Elle veut montrer que l’argent prend des formes multiples en fonction de l’origine du revenu,
l’individu s’approprie la monnaie et l’oriente en fonction de l’usage, la monnaie n’est pas
seulement quantitative.
Les prostituées distinguent les revenus de leur métier et les revenus des aides sociales.
Opérations de cloisonnement.
Conclusion :
Il y a une diversité des formes d’encastrement, chacune va mettre l’accent sur un mode de
coordination et des facteurs qui vont façonner et orienter les pratiques économiques. L’encas culturel,
l’imbrication est telle que l’économie tend à se dissoudre dans les autres facteurs explicatifs. Chaque
auteur insiste sur des modalités d’encas spécifiques. L’ensemble de ces facteurs constituent un point
important pour enrichir plus globalement l’approche économique standard. Il faut observer les
pratiques économiques des acteurs, l’éco n’est pas une sphère autonome.
L’imbrication peut parfois produire plus d’efficacité, surtout le processus par lequel des institutions
vont être impulsées par les différents acteurs pour mieux comprendre et construire la nature des faits
économiques. Le désencastrement est utopique, l’éco ne peut pas s’échapper des relations sociales,
politiques, etc. selon Polanyi. L’appréhension de ses facteurs permet de souligner que tout ce qui est
analysé d’un point de vue économique repose sur un processus de construction par les acteurs.
Chapitre 2 L’innovation sociale
Parvenir à distinguer l’innovation sociale d’autres formes d’innovations (technologique par exemple).
Introduction
On assiste à une prise en compte de l’innovation sociale progressive dans un contexte de crise qui va
permettre de mettre en avant une conception prédominante de l’innovation qui reposant sur la
technologie. Un regard de plus en plus fort sur l’innovation sociale avec l’émergence de nouvelles
questions sur le développement durable, la soutenabilité de la croissance. L’usage du terme
d’innovation sociale séduit de plus en plus acteurs et est considéré comme une nouvelle façon de
répondre aux besoins sociaux face au désengagement de l’Etat. Dans une société post-industrielle où
il y a une transformation et une mise en avant de l’économie de services et de la connaissance et qui
prône une innovation permanente et continuelle. Le rôle des pouvoirs publics depuis la stratégie de
13
Lisbonne s’oriente vers des financements fléchés vers l’innovation sociale dans le cadre de fonds
européen ou de fonds régionaux.
Il y a la fois un processus vertical et aussi plus horizontal avec les acteurs de la société civile qui
montre leur capacité à innover.
« Un déplacement du regard de la technologie ou de l’entreprise vers la société » Richez-Battesti. Cela
signifie que l’entreprise n’est pas la seule à pouvoir innover mais aussi les membres de la société.
Ce nouveau système de croissance s’inscrit dans l’économie inclusive, de partage.
L’innovation sociale c’est très flou, cela regroupe les concepts de besoins sociaux. Elle permet d’élargir
une conception de l’innovation, et répond à des besoins sociaux, et sera caractérisée par son
processus d’innovation.
Il existe différentes formes d’innovations sociales qui relèvent d’une approche disciplinaire,
historique, chronologique.
I.
De l’innovation technologique à l’IS
Shumpeter : théoricien de l’innovation. L’entrepreneur est la personne qui dispose de plusieurs
qualités et qui sera en mesure de prendre des risques. Il a une bonne capacité d’anticipation. Cette
figure correspond souvent à des groupes / grappes d’entrepreneurs.
Phases dans l’émergence du concept d’IS :
-
Jusqu’en dans les années 90 : la notion d’innovation est limitée à celle technologique
-
Années 1990-2000 : le terme émerge et commence à structurer des politiques publiques et
recommandations internationales. Le rôle de la recherche est souligné. En 1995 : Le Livre Vert
qui étend les innovations au secteur des services mais toujours fortement relié à l’innovation.
-
Depuis 2005-2010 : reconnaissance et diffusion large du concept, qui devient un « mot-valise
» facilement adaptable, et qui entre en résonnance avec les dynamiques d’entrepreneuriat
social. L’innovation s’inscrit dans les enjeux sociétaux du 21e siècle. La mise en place d’une
stratégie au niveau européen : l’inclusion dans la stratégie de Lisbonne de l’IS. Des réponses
nouvelles aux défis sociétaux.
L’ensemble de ces phénomènes se cantonne aux politiques publiques mais fait l’objet de beaucoup de
développement au sein de la société civile par l’ESS. Les acteurs veulent montrer leur capacité à
innover.
1. Continuités et ruptures
Phases
Émergence
Processus
Continuités
Résolution
de
problème
Ressources liées à la
recherche scientifique
Interventions
d’une
pluralité d’acteurs
Ruptures IT
Pression du marché
Recherche
Processus descendant
Ruptures IS
Pressions sociales et
politiques
Recherche davantage
issue des SHS
Processus ascendant
où
l’appropriation
constitue
une
14
Résultats
Diffusion
Articulations possibles
entre des éléments
matériels
et
immatériels
Diffusion
comme
élément majeur de la
définition
Davantage matériel
Diffusion
par
la
commercialisation, le
marché
est
une
procédure
d’évaluation de la
diffusion
condition de réussite :
idée de mêler une
pluralité
d’acteurs
pour résoudre un
problème commun
Davantage immatériel
Traduction par les
acteurs, recours à une
économie
plurielle
composée
des
différentes
formes
d’intégrations
(échanges marchands,
réciprocité,
redistribution). Pas de
reproduction exacte
de l’IS mais une
adaptation
après
appropriation.
Une forme d’innovation qui emprunte à d’autres, tout en allant au-delà :
-
Organisationnel : (du travail, de l’activité) Blablacar, Uber …
-
Technologique : développement d’internet dans le cadre du développement des personnes
sourdes, application pour les malentendants.
-
Institutionnel : SIC qui visent à créer une nouvelle institution avec des parties prenantes
multiples normes, règles : AMAP, orienter au regard de valeurs, mobiliser de nouvelles règles.
Si l’innovation sociale peut emprunter à d’autres formes d’innovations, elle va aussi au-delà dans un
cadre novateur et normatif.
II.
Les différentes conceptions de l’IS
3 conceptions de l’IS (Richez-Battesti et al., 2012 ; Besançon et al., 2013)
- L’IS comme outil de modernisation des politiques publiques
- L’IS dans l’entrepreneuriat social
o École de l’IS
o École des recettes marchandes
- L’IS comme système d’innovations territorialisé, inclusif et participatif.
15
2.1L’IS comme outil de modernisation des politiques publiques
-
Transformer les organisations publiques afin de les rendre plus performantes ou efficaces
L’IS comme fondement de la rénovation des politiques publiques notamment sociales
Enjeux : faire face à la réduction de budget, s’inspirer des méthode et processus issus du
secteur privé, être réactif à la demande et aux besoins des usagers
Inscription dans les règles du nouveau management public et les impératifs d’efficience et de
compétitivité de services publics
Exemple : projet de Pic Society par Cameron G-B, mettre en avant la capacité de la collectivité civile à
s’organiser pour s’auto-délivrer des services, aussi pour réduire le budget de fournir un service public.
Processus de co-construction entre usagers et pouvoir public.
Au niveau européen c’est l’idée de l’IS s’inscrit dans la stratégie de Lisbonne qui souhaite une
croissance plus durable et inclusive. Il y a des liens étroits à faire entre les théorie et l’impulsion de
certaines politiques : cela montre que le secteur privé peut être plus performant que le public pour
fournir certains services, processus de sous-traitance ou de partenariat avec les acteurs privés.
La deuxième direction qui est prise c’est de viser des transformations autour de la gestion des
organismes publics et autour de l’intégration des usagers. Enjeux budgétaires et de satisfaction des
usagers.
Exemples :
-
-
Valorisation des ressources humaines des personnes âgées au japon : politiques publiques et
sociales, fournir un emploi aux personnes retraitées, répond à un besoin social, rémunération
inférieure que le salariat classique. Maintenir les liens sociaux et professionnels, amener des
ressources financières aux personnes âgées.
Bulgarie : salarier les grands-parents de s’occuper des petits-enfants, favoriser la natalité très
faible.
Des écoles « fenêtres » ou « ouvertes » : temps périscolaire n’est pas géré par l’école mais par
les habitants et les parents de façon bénévole.
La télémédecine : plateforme de services ne ligne, pallier les déserts médicaux.
Les budgets participatifs : citoyens qui déterminent l’affectation des budgets.
2.2. La dimension entrepreneuriale
« Chevalier des temps modernes qui identifie des besoins sociaux et développe une réponse,
dynamique d’innovation et de changement » (Schumpeter). Cette dimension est née dans les années
80-90, dans des milieux gestionnaires et universitaires et va se décliner en deux écoles de pensée :
écoles des recettes marchandes et école de l’is.
16
École des recettes marchandes : is s’appuie sur des organisations non-lucratives qui vont développer
des catégories économiques qui vont générer des revenus ou des entreprises dont la finalité 1ere
n’est pas nécessairement sociale et ils vont réinvestir des bénéfices. Une entreprise sociale et toute
organisation lucrative ou non qui développent une activité économique et des recettes au profit d’une
thématique sociale.
École de l’is : entrepreneurs sociaux aux caractéristiques déterminantes dans la réalisation de son
activité. Personnalisation de l’individu qui est en capacité de développement des besoins sociaux et
poursuivre une finalité sociale. L’is reste relativement floue car tout besoin identifié c’est de l’is dès
qu’on y répond.
Ces deux écoles vont à la fois porter sur les caractéristiques de l’entrepreneur ainsi que ses
motivations philanthropiques.
On va mettre l’accent non seulement sur la finalité sociale et le besoin mais aussi l’impact social :
comment peut-on mesurer l’impact social d’une finalité ?
Mouves : 2010, page dédiée aux portraits d’entrepreneurs sociaux.
On est sur une évolution des finalités économiques mais il n’y a pas de précision sur la nature du
changement.
2.3. L’IS comme système d’innovation territorialisé, participatif
et inclusif.
Les normes qui sont capables de changer la société. On met l’accent sur le contexte. C’est le processus
collectif qui émerge qui est important et non la finalité. Vision plus politique, l’is génère de
changements institutionnels et transforme des pratiques et des connaissances vers un nouveau
paradigme sociétal.
III. Focus sur la perspective institutionnaliste
Il y cinq dimensions clé de l’IS :
-
Des réponses par le bas à des besoins et aspirations sociales :
L’aspiration sociale c’est un idéal social, c’est une coordination sur un futur souhaitable. Dépasser les
volontés individuelles. Comment construire une vision différente. Ce sont des solutions inédites qui
répondent à des attentes sociales émergentes. Menées par les acteurs eux-mêmes, qui peuvent saisir
des signaux faibles.
L’IS dans ce cas née hors Etat et organisations lucratives. Dans le processus de la réponse il se peut
que de nombreux acteurs se mobilisent. Corrélation forte entre besoin et aspirations sociales.
17
CAE ont deux objectifs : accompagner les individus et développer une forme de salariat : aspiration
sociale et construire une nouvelle vision du travail.
Les accorderies, ces sont des banques de temps avec une unité de calcul qui est le temps donné pour
rendre service. L’objectif est de lutter contre l’exclusion sociale et la pauvreté. Mais il y a également
l’idée de valoriser les compétences sur un même pied d’égalité.
-
L’ancrage local et l’importance des finalités :
Il y a l’enjeu d’identification des besoins et aspirations. L’IS est généralement liée et ancrée à un
territoire, cela émerge du faut que la réponse se construit localement et dans le cadre de la
construction de la réponse il y a implication de différentes formes de localité. Proximité
socioéconomique qui permet aux individus de se rapprocher : les conventions, les valeurs, la nécessité
de coordination des acteurs. Le territoire fournit l’ensemble des ressources mais en échange la
dynamique d’IS permet la construction du territoire : double relation. Cela renforce le capital social
du territoire qui relie les individus.
-
Des logiques partenariales autour d’un projet fédérateur :
Dans ce cadre, ce qui est mis en avant c’est que l’is est un processus qui s’appuie sur une dynamique
territoriale, collective et une gouvernance partenariale. Mobiliser des ressources et des acteurs
autour du projet et que la réponse même est la coordination et la coopération d’acteurs diversifiés.
Ce processus émerge parfois d’un groupe de militants qui mobilise son capital social pour faire passer
l’information etc. Cela renvoie à la capacité de mobiliser des réseaux de différente nature avec l’idée
que ce processus qui se veut multi partenarial va permettre un modèle économique sur l’hybridation
des ressources. L’hétérogénéité des acteurs autour de la place permet de faire émerge un modèle
économique hybride. C’est la notion d’économie plurielle. Créer des espaces de co-construction,
espaces des dialogues pour identifier les besoins et la forme de l’IS. Cela sous-entend la mise en place
de gouvernances spécifiques plus inclusives et participatives pour prendre en compte l’ensemble des
parties prenantes et fédérer les acteurs.
-
Une critique du modèle dominant :
L’IS consiste en une critique du modèle dominant sous différentes formes : opposition frontale,
opposition vis-à-vis du modèle de production, lutte contre les inégalités ou institutions … L’IS s’inscrit
dans la ligne des nouveaux mouvements sociaux qui vont chercher à répondre à un nouveau modèle
sociétal. C’est théorisé par Gendron : appropriation d’outils économiques à des fins de
transformations (sociale voire politique).
-
Émergence de règles et de normes novatrices :
Ici ça souligne que l’is contient des règles qui vont mettre en place un nouveau cadre de valeurs
différentes et qui veulent remettre en question le modèle dominant. On peut identifier des règles de
modèles de gouvernance, des règles qui cherchent à réorienter les échanges (ex : commerce
équitable). On est sur l’idée d’un processus de construction.
Différentes étapes :
1. Identification par le bas des besoins et aspirations non satisfaits.
2. Une réponse par des associations ou des groupes enracinés localement.
3. La mise en œuvre : mobilisation des acteurs et des ressources.
18
4. Problème de la pérennisation.
5. Essaimages par multiplication / différenciation.
Approche
institutionnelle
Critères de définition « De
nouvelles
de l’IS
réponses à des besoins
sociaux pressants, qui
affectent le processus
des
interactions
sociales et qui ont
pour
objectif
d’améliorer le bienêtre des personnes »
(Bepa 2010)
-faire face aux défis
sociétaux
-réduire la dépense
publique
-renouveler
l’action
publique
(organisationnel et/ou
associer usagers aux
services publics)
Rapport / nature du Logique de marché
changement
Nouveauté
Besoins sociaux
Approche
entrepreneuriale
-L’entrepreneur
social : accent sur un
individu qui a la
volonté de répondre à
des besoins sociaux
- la relativité de la non
lucrativité : utiliser les
bénéfices issus des
activités marchandes
pour fiancer d’autres
projets non rentables à
finalité sociale
un
aspect
philanthropique, avec
l’altruisme
comme
mobile d’action
-impacts sociaux
Approche
institutionnaliste
- des réponses par le
bas à des besoins ou à
des
aspirations
sociales
- l’importance des
finalités et de l’ancrage
territorial
des
logiques
partenariales autour
d’un projet fédérateur
- une critique du
« modèle dominant »
- l’émergence de règles
et
de
formes
novatrices
Logique de marché
Nouveauté
Besoins sociaux
Changement social
Accent sur la finalité
sociale
Économie plurielle
Nouveauté/rupture
(changement
institutionnel)
Transformation
sociale
Accent
sur
la
dimension sociale de
l’innovation
(aspirations sociales
et
processus
de
construction de l’is)
IV. Facteurs
et
processus
d’institutionnalisation de l’IS
de
diffusion
et
On peut s’interroger sur la capacité de l’is de se diffuser plus largement. Les is une fois crée et mis en
œuvre sur le territoire peut essaimer et être appropriée. On ne peut répliquer complètement l’is.
Les processus de diffusion sont donc différenciés.
On peut s’appuyer sur les théories de l’acteur-réseaux ou sociologie de la traduction : la mise en place
de processus innovants.
19
-
La première phase du processus de traduction, problématisation : formuler des problèmes et
convaincre et solliciter les acteurs qui peuvent apporter des éléments de réponse, les
convaincre qu’ils font partie du processus et qu’on peut trouver une réponse commune.
-
Phase d’intéressement : chercher à faire rentrer les acteurs dans le jeu et devenir des parties
prenantes.
-
Phase d’enrôlement : la nécessité de mettre en place des processus de médiation. Phase de
négociation, chercher à ce que chaque acteur trouve une place et un rôle.
-
Phase de mobilisation : construire un collectif, suppose un engagement clair de l’ensemble des
acteurs avec des rôles précis pour chacun. Certains peuvent sortir du jeu mais au final il faut
stabiliser.
On peut mobiliser ce cadre d’analyse dès qu’on veut analyser le processus de mise en place de l’is. La
notion d’acteur est très large (humain ou non). Ce ne sont pas des processus linéaires.
-
Processus informel : forme de bricolage, logique des réseaux sociaux, bouche à oreille sans
mise ne place de norme ou guide. L’adaptation au territoire et d’autant plus forte car pas de
guide (FabLab).
-
Processus de diffusion territorial : les collectivités territoriales sont importantes, processus
plus vertical et institutionnel, progressive normalisation de l’is (les pouvoirs publics repèrent
les bonnes pratiques et cherchent à les diffuser). Parfois c’est la volonté de certains acteurs
de gagner plus de légitimité.
-
Processus de diffusion réticulaire : verticalité au sein des réseaux, échelle méso-économique.
Les fédérations ou les réseaux connus qui vont diffuser l’is. Enjeu de normalisation, mise en
place de charte, label.
Le processus de diffusion est conditionné par le rôle des réseaux sociaux, des médiations (guides,
capacité des individus à solliciter leur réseau) et aussi l’accès aux ressources. Cet accès a des enjeux
de marché et d’hybridation des ressources, il y a une certaine frilosité des institutions bancaires à
prêter à ces organisations qui testent.
L’impact social de l’is conduit à interroger les effets attendus de l’is et à les évaluer. Ce développe les
contrats à impact sociaux : nécessite de prédéterminer les objectifs à atteindre et évaluer la réussite
ou non du dispositif.
Cette modalité innovante ce financement n’est pas sans poser de question au regard du fait que les
indicateurs étudiés sont quantitatifs. De plus l’évaluation qui est proposée et souvent par groupe
aléatoire, comparer les effets avec un groupe contrôle (impact éthique et biais de résultat).
Les structures d’accompagnement sont des incubateurs, des agences régionales et des instituts plus
ou moins spécialisés. Cela questionne la création d’un écosystème de l’is. Un des enjeux est de repérer
des écosystèmes territoriaux, des territoires innovants. Ils évoluent de plus en plus vite et se
structurent pour se professionnaliser. Cela croise la dynamique qu’il y a autour de l’entrepreneuriat
social.
20
La question de l’institutionnalisation. La capacité des is, si elles ne sont pas essaimées et porteuses de
changement social à s’institutionnaliser. Il y a une jonction entre la micro échelle et la macro, la
diffusion est l’enjeu qui passe à un moment par le processus d’institutionnalisation qui mène à
interpeler des institutions. Cela ne signifie pas forcément un processus de récupération par l’Etat mais
influencer les cadres dans lesquels elle se développe. Cela signifie que c’est une innovation qui a du
succès car reproduite.
Il existe dans le cadre de ces processus d’institutionnalisation : une institutionnalisation positive
forme de négociation avec les pouvoirs publics tout en laissant des marges de manœuvre et prend en
compte la spécificité de ces is sur le territoire. Les reconnaitre et leur laisser de l’autonomie. Cela
sous-tend une dimension plus politique. Cela sous entend de la part des pouvoirs publics une capacité
d’incitation, le principe de subsidiarité : partout où il est possible d’agir il faut laisser les acteurs
s’organiser en favorisant l’émergence d’is, soutien par le bas mais pas d’intervention.
V.
L’évaluation de l’IS
Le processus de l’is conduit à un certain nombre d’impacts qui conduit à un changement des
institutions. Il faut prendre en compte l’ensemble du processus et pas seulement la finalité. On
observe les impacts directs, les changements de pratiques et de représentations, changements
institutionnels et transformations sociales.
Le résultat c’est de savoir à quelles problématiques sociales répond cette is, avec quels impacts.
On observe 4 types d’indice qui oriente le processus d’évaluation :
-
Besoins sociaux
Développement des « capabilités », développer les capacités d’agir des individus, gagner de
l’autonomie.
Empowerment, forme collective, capacité d’une société à contester des règles et normes.
Service – économique de la fonctionnalité, remet en cause la production à la consommation
de masse, ce n’est pas la possession d’un bien qui importe mais son usage.
Pourquoi évaluer ? Objectifs politiques, analytiques, stratégique.
Comment ? Interne, externe, combinée.
Quelle légitimité ? Territoriale, institutionnelle, de l’entrepreneur.
VI. EDC : les nouveaux
territorialisés (NIR)
indicateurs
de
richesses
Ils se veulent complémentaires face aux limites que le PIB peut contenir. Il ne se s’agit pas d’un
indicateur de bien-être, ne prend en compte que les richesses monétaires, ne prend pas en compte la
destruction de l’environnement. Plusieurs ont cherché d’autres indicateurs dans la volonté de mettre
ne avant de nouvelles façons de comptabiliser, montrer les limites de PIB et compter de nouvelles
formes de richesses.
3 enjeux :
21
-
La pluralité des richesses, il est possible son appréhension, les richesses non marchandes.
Faut-il tout mesurer ?
Développer les évaluations à l’échelle territoriale.
Quelle expertise ? L’idée que la création d’indicateurs doit être réservée à des experts,
nécessité d’inclure les parties prenantes civiles pour une nouvelle définition des richesses.
L’exemple des NIR en Pays de la Loire :
Déterminer des indicateurs qui permettent de mesurer des formes de richesses sur les territoires du
PaysdlL. Démarche participative, 164 débats, 1848 participants. Des parties prenantes très
diversifiées. Lancé en 2011.
-
Trois phases : débats, traitement comptes rendus, co-construction des indicateurs.
Résultats : Qu’est-ce qui est important ?
- 1. La nature, la famille, le lien social et l’emploi apparaissent comme les piliers fondamentaux
- 2. Au-delà de ces piliers, certains plébiscitent le bonheur et la qualité de vie au quotidien
- 3. Pour d’autres, les droits, les libertés, les valeurs, l’éducation. Puis acquis soc /ou/ dvl
économique
Toutes ces richesses sont-elles toutes mesurables ? Cela peut-il faire évoluer les prises de conscience
et les institutions ?
Pour la question de l’environnement : ils ont décidé que les 4 indicateurs les plus importants sont la
part des énergies renouvelables, la consommation d’énergie par habitant et intensité énergétique de
la production, production de déchets par personnes/type d’émetteur, part du temps libre des
ligériens consacrés à la nature.
Et après ?
- Usage symbolique, sous-entend que les individus se questionnent sur la définition des
richesses.
- Usage politique.
- Usage instrumental, mise en œuvre ou suivi des politiques publiques.
Ce type de réflexion, de par le processus et le résultat mène à des changements des représentations
et aussi des pratiques. Donc mènera à un changement institutionnel. Montre l’importance du débat
démocratique.
22
Chapitre 3
Damien Sauze
I - Quelles définitions ?
Innovation
L’innovation répond à un nouveau besoin ou propose un nouveau produit, méthode de production
pour répondre à ce besoin. Cela peut aussi être apporter une nouvelle réponse à une question sociale,
une discontinuité dans les solutions apportées à la question sociale.
Innovation et changement : la rupture, discontinuité peut être le produit intentionnel ou le résultat
de quelque chose qui n’était pas stratégique. Tout changement n’est pas innovation. Le changement
n’est pas forcément réfléchi, c’est une constatation neutre. L’innovation est un processus conscient
avec une finalité de progrès, d’amélioration. Le changement peut être subi.
Innovation et dynamique économique : l’innovation est souvent considérée comme une source de la
croissance économique. L’innovation est la source du progrès technique. A partir de la fin des 30G il
y a moins d’innovations techniques et on n’a jamais retrouvé ce taux de croissance exceptionnel. Les
spécialistes disent qu’on ne peut pas retrouver ce taux de croissance grâce à l’innovation technique
mais il y a beaucoup d’espoir sur le fait que l’innovation sociale prenne ce rôle.
Innovation et inégalités : les innovations augmentent ou diminuent-elles les inégalités ? Les
innovations techniques suppriment souvent des emplois, effet important sur la répartition des
23
richesses. Elles peuvent aussi avoir des effets positifs sur les emplois en réduisant les coûts et
permettre de gagner en pouvoir d’achat déployé vers d’autres produits (destruction créatrice de
Shumpeter, début 20e). Aujourd’hui on a des doutes face à la destruction créatrice car ça peine à créer
des emplois, les chômeurs n’ont pas forcément les qualifications, cela peut être des emplois peu
valorisés qui ne sont pas rentables pour les entreprises qui pourraient les créer (secteur du service à
la personne, moins de gains de productivité potentielle possibles). Les réallocations d’emplois ne sont
pas si évidentes.
Les innovations peuvent aussi être positives dans le cas où la réallocation a bien lieu et de ce fait il y
aurait un accroissement des richesses nationales. C’est les forts gains de productivité pendant les 30G
qui ont permis d’augmenter les salaires et créer une protection sociale. Donc ici l’innovation est un
moyen de réduire les inégalités.
Nous sommes donc bien face à une question socio-économique.
Sociale
Ce terme peut être interprété de multiples façons, là est peut-être la raison de sa popularité car on
peut mettre beaucoup de choses derrière. C’est social par la nature de l’innovation. En opposition à
l’aspect technique.
Ce terme de social peut aussi renvoyer au champ de l’innovation, ferait appel à une réorganisation
sociale. Quand on parle du champ de l’organisation on pourrait aussi inclure les innovations
techniques dans le domaine social. C’est tout ce qui répond à des besoins sociaux. Par exemple les
assurances comme innovation technique peut être sociale car elles couvrent des risques (relatif aux
besoins sociaux).
 Est-ce un changement technique ou un changement des relations sociales ?
La finalité de l’innovation sociale intègre des objectifs sociaux, une volonté de transformer des
objectifs d’une organisation économique pour intégrer l’aspect social. Par exemple, l’entrepreneuriat
social n’a forcément pour objectif de prendre en charge un besoin social, mais volonté d’intégrer des
valeurs sociales au projet (conditions de travail, impact environnemental …). De plus, il y a une
transformation des rapports sociaux (innovation par rapport à un mode d’organisation ou de
coordination dominant), par exemple la coopération ou les réseaux locaux.
Acteurs
Il existe une multiplicité d’acteurs par rapport à l’innovation technique pour laquelle les acteurs se
limitent d’avantage aux professionnels de la R&D.

Doit-on se limiter aux institutions ayant émergé depuis la naissance du concept
d’innovation au début du XXe siècle ?
Les grandes ruptures dans la socio économie sont dans les ruptures des modes de production (féodale
et industrielle).
Perspective historique : innovations sociales et « question sociale ».
24

Si l’innovation sociale est un concept qui a été mis en avant seulement récemment, est
-ce à dire qu’il n’y avait pas d’innovation sociale auparavant ?
Ce qui change depuis l’apparition du concept c’est que des acteurs s’en revendiquant, mais il a pu
exister des innovations sociales dans le passé sans que les acteurs s’en soient revendiqué.
Dans le domaine social, Robert Castel (1995) a étudié et écrit Les métamorphoses de la question
sociale. Toutes ces métamorphoses ne se réduisent pas à des innovations sociales, mais elles
s’appuient en partie sur des innovations sociales. La question sociale pour Robert Castel est une
inquiétude sur la capacité de maintenir la cohésion d’une société. La question est déjà présente sous
l’ancien régime : secours aux pauvres selon qu’il y a ou non incapacité à travailler (bons et mauvais
pauvres).
Quels sont les objectifs des innovations dans le domaine social ? Savoir comment protéger les
individus, comment assurer la cohésion de la société.
Avec quels moyens ? La régulation marchande ou la régulation par des institutions. Apparaissent déjà
différentes options pour répondre à cette question sociale. Est-ce que toutes les ressources
économiques des individus doivent dépendre de régulation marchande ? Chaque revenu doit-il
dépendre de la régulation sur la vente ou le travail ? La régulation dira ce que vaut le travail de chaque
individu.
Les innovations sociales dans le domaine du travail lors de la
Révolution française.
Avant la Révolution, le travail artisanal était très régulé par les corporations. Elles régulaient les
entrées. On entre compagnon et c’est au cours d’une compagnonnage avec un maître que l’on devient
artisan. L’accès aux professions était régulé.
La conception des révolutionnaires est très libérale, face au problème de la pauvreté il faut enlever
les barrières. On décide donc de supprimer tous les obstacles à la libre concurrence et au
développement de la croissance économique. Ce sont les lois d’Allarde et loi du Chapelier qui mettent
fin aux corporations et syndicats. Il faut laisser chacun librement s’installer, empêcher les syndicats
de négocier collectivement, empêcher les coalitions de salariés, car cela entraverait la libre
concurrence.
C’est une innovation sociale on enlève le rôle de certaines innovations, c’est une nouvelle façon de
répondre à la pauvreté. C’est donc un bouleversement, une rupture socio-économique.
On change de paradigme : libéral. Le marché est considéré comme le mécanisme qui permet l’auto
régulation de la société. D’après Polanyi c’est à cette période que l’on constate un désencastrement
de l’économie. On veut la rendre indépendante du reste de la société. Il s’agit de protéger la propriété
privée, favoriser l’épargne, on compte sur les choix rationnels des individus. Finalement le meilleur
moyen pour lutter contre la pauvreté est de responsabiliser chacun pour s’organiser pour que les
problèmes de pauvreté le jour où les travailleurs ne pourront plus travailler, tomberont malades …
25
Dans le domaine du travail, les relations doivent être régies par le contrat, librement conclues entre
le salarié et le patron. Aucune garantie n’est apportée en cas de réduction des revenus, maintien des
prix … L’Etat ne doit pas intervenir pour réguler le marché.
Échec du paradigme libéral à répondre à la question sociale au cours
du XIXe siècle.
Au cours des périodes de crises, on observe des très fortes variations des salaires à la baisse et donc
des travailleurs en situation de pauvreté. L’absence de régulation des relations salariales aboutit à
une dégradation des conditions de travail, y compris pour les femmes (qui doivent assumer le travail
domestique à cette époque) et les enfants.
On doit nuancer la responsabilité de la pauvreté salariale mais la réalité est qu’il n’y avait pas de
régulation des salaires et il était impossible de répondre collectivement.
Dès le milieu du XIXe siècle, on a une idée de la pauvreté des salariés. Le Rapport Villermé 1838
« Tableau sur l’état physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de laine, de soie
et de coton »
L’asymétrie est renforcée par un contrôle patronal sur la mobilité des employés par le livret ouvrier
détenu par l’employeur nécessaire pour trouver du travail ailleurs. La pratique était de faire des
avances sur salaires que les travailleurs devaient travailler pour rembourser. Sans livret les
travailleurs ne pouvaient pas trouver de travail. Dégradation des conditions de travail, de vie des
ouvriers.
Dans la deuxième partie du XIXe siècle on assiste à de nouvelles innovations sociales : interdiction du
travail des enfants, travail la nuit, autorisation du droit de grève (1864). On assiste à un réencastrement, des règles viennent réguler le marché. On voit apparaître dans certaines entreprises
une prise de conscience.
Basculement vers un paradigme solidariste.
L’enchainement de ces différentes innovations nous fait basculer dans le basculement solidariste,
Léon Bourgeois « interdépendance des parties par rapport au tout ».
Toute la première partie du 19ème siècle on avait un désencastrement, ensuite en deuxième partie du
19ème on assiste à un ré-encastrement.
Paradigme solidariste : plus grande interdépendance entre les individus au sein de la société.
Durkheim qualifie la solidarité de fin 19ème d’organique, car basée sur l’interdépendance entre des
individus qui appartiennent à une même société et qui sont reliés par la division du travail, chacun
dépend des autres pour la production. L’appartenance n’est plus basée sur les liens familiaux et
sociétaux. C’est l’appartenance à un processus de production.
On voit aussi apparaître une analogie entre la santé d’une société et la santé d’une population. La
santé de chacun de chaque individu dépend des autres. On peut transposer ce raisonnement au niveau
économique, s’il existe des grandes inégalités dans la population alors la cohésion de la société sera
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remise en cause. Il est donc nécessaire d’appliquer des régulations qui obligent les gens à se vacciner.
Il est donc nécessaire d’assurer un minimum de sécurité sociale pour éviter l’extension de ces
inégalités.
Le développement des statistiques : on observe des problèmes importants dans la possibilité d’établir
des tables de mortalités et prévalence des maladies donc prévoir des risques. Donc l’incertitude
radicale se transforme en risque (capable de donner une proba). Tant qu’on ne sait pas comment
calculer les risques alors on ne peut pas mettre en place des assurances ou couverture sociale. Avec
le développement des statistiques il y a enfin une possibilité de prise en charge des risques par des
assurances qui peuvent calculer les risques.  Innovation technique immatérielle.
Les assurances et assurances sociales sont alors des innovations sociales. En France, le premier
basculement vers les assurances sociales avec la loi 1898 sur les accidents du travail (de la faute à la
responsabilité d’un risque). Il n’est plus nécessaire de prouver la culpabilité de l’employeur pour
obtenir une indemnisation en cas d’accident du travail. À partir du moment où l’accident a lieu sur le
lieu de travail alors c’est un accident du travail, c’est de la responsabilité de l’employeur. Mais si
l’employeur n’est pas coupable, il doit prendre ses responsabilités et indemniser le salarié
(indemnisation forfaitaire, prise en charge des frais de santé). Pour faire face à cette indemnisation,
l’employeur a recours à l’assurance.
Dans le paradigme solidariste ces aides ne viennent pas de la charité mais découlent d’un droit, cela
change les rapports dans la société.
Une innovation sociale majeure : création de systèmes publics de
protection sociale.
On a pu mettre en place des mécanismes d’assurances sociales basées sur les cotisations ponctionnées
sur les salaires. En France, il y a eu plusieurs tentatives de création d’assurances sociales. En 1910
puis 1928-1930 : assurance maladie (mais remboursements limités et ne concerne pas tous les
salariés), assurance vieillesse mais retraite à 65 ans (=espérance de vie, donc retraite pour les morts)
et système par capitalisation qui s’effondre avec la crise de 1929 (le montant de pension que l’on
pouvait obtenir dépendait des cotisations réalisées qui étaient utilisées pour alimenter un capital).
Puis krach boursier et crise économique de 1929, le système par capitalisation s’effondre.
En Allemagne, les assurances sociales sont créées par Bismarck dès la fin du 19ème sociale (1883). Le
pays est en proie aux luttes sociales qui réclament plus de salaires et plus de partage des droits, risque
de révolution communiste. Les assurances sociales sont conçues comme réponse aux soulèvements.
Ces réformes sociales sont fondées sur le travail car les cotisations qui vont permettre de générer des
revenus sociaux sont fondées sur le travail (% salaires), pour permettre à tous les travailleurs
d’obtenir des revenus de remplacement en cas de maladie et vieillesse. Les prestations versées aux
travailleurs sont calculées en % de leur salaire. C’est le statut de travailleur qui confère le droit à une
indemnisation. Plus on est un travailleur en haut de l’échelle, plus on reçoit des indemnités élevées.
Les personnes qui ne travaillent pas ne sont pas couvertes, et celles avec de petits salaires auront de
petites indemnités. Une caisse par profession. C’est un système assurantiel.
Au Royaume-Uni, à la fin de la seconde guerre mondiale, le système de prestations sociales est inspiré
par le rapport Beveridge (1943) qui repose sur trois piliers : universalité, (bénéficie à tous et financé
par l’impôt), unité (gestion par l’Etat), uniformité (prestations identiques pour tout le monde,
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quelque soit le revenu). Le système basé sur l’impôt. A côté de ce système, il existe des assurances
complémentaires car du coup les prestations sont assez faibles. On parle de « filet de sécurité ».
En France, la sécurité sociale est créée en 1944-45 sur la base du programme du Conseil National de
la Résistance. Le système s’inspire d’abord du modèle Bismarckien avec les assurances sociales pour
la maladie, la famille qui vont permettre de maintenir le niveau de vie de la famille constant avec
l’arrivée d’un enfant. On résonne en termes de niveau de vie. Dès 1998 les employeurs sont
responsables des accidents du travail qui doivent donc souscrire à des assurances qui font partie de
la sécurité sociale. Seuls les employeurs cotisent pour le travail. Les employés et employeurs cotisent
pour la maladie, la vieillesse et la famille. Les prestations versées sont proportionnelles au
salaire (moyenne des 25 meilleures années dans le privé / 6 derniers mois dans le public).
Dès les origines du système français c’est des influences britanniques avec une unification de la
sécurité sociale. Unification de la gestion des caisses, une seule pour le privé.
Depuis 1945, on voit qu’on part d’une situation callée sur le système Allemand pour devenir de plus
en plus influencé par les britanniques avec en 1991 la création de la CSG (gouvernement Rocard) qui
est prélevée sur l’ensemble des revenus et pas seulement sur les revenus du travail, donc système
plus universaliste. On assiste à une extension des personnes couvertes avec la notion d’ayant-droit
(toute la famille bénéficie de la sécurité sociale). En 1997, la CMU couvre les foyers où personne ne
cotise.
Il s’agit d’une nouvelle réponse à la question sociale, les salariés obtiennent des revenus de
remplacement plus conséquents que des prestations d’assistance. A partir de 1945, il s’agit
d’assurance sociales et publiques : les prestations qu’on reçoit dépendent des revenus et pas de ce
qu’on a cotisé. Dans une assurance privée, on ne peut pas recevoir plus que ce qu’on a cotisé. On
permet aux personnes soumises à des risques sociaux d’avoir droit à des revenus connectés à sa place
dans la société. Déconnection partielle entre les revenus et l’activité du travail. Une forme de revenu
est possible, déconnectés de l’utilisation de son capital  ici est l’innovation. Car jusqu’à présent les
revenus que l’on obtient sont régulés par le marché, l’innovation est d’obtenir des revenus
relativement déconnectés du marché. Obtenir un revenu sans passer par le marché, une troisième
forme de revenu indépendante du marché. Mais passage indirect car il faut avoir cotisé, mais à
l’instant T pas besoin d’avoir passé de contrat avec le marché.  Preuve de ré-encastrement de la
société, instaurer des règles qui limites le rôle du marché dans les règles sociétales et sociales.
En 1958, création de l’assurance chômage, plus nécessaire de travailler pour toucher un revenu. Droit
limité dans le temps (2 ans), après en est dans le régime d’assistance basé sur la solidarité nationale.
Des innovations dans le contrat de travail ?
Au 19ème siècle jusqu’en 1890, le Code Civil n’autorise que les contrats à durée limitée pour éviter un
retour au servage ou à l’esclavage. On ne peut pas s’engager de manière illimitée.
Néanmoins, les mêmes salariés peuvent être embauchés plusieurs fois. Il se créé entre l’employeur et
le salarié une relation durable qui commence à poser problème quand les employeurs développent
des politiques paternalistes qui consistent par exemple à développer des caisses d’assurances
retraites. Donc quand le contrat n’est pas reconduit, les salariés qui avaient cotisé à ces caisses
perdent tous les droits qu’ils avaient accumulés. Ce sont des politiques d’attachement des salariés,
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pour les fidéliser. Mais parfois, c’est l’employeur qui ne reconduit pas le contrat alors les travailleurs
victimes (le licenciement n’existait pas) vont réagir en demandant des dommages et intérêts pour la
rupture de relation dont ils étaient victimes. On a assisté à des procès aux Prud’hommes qui ont
amené à des changements législatifs. En 1890, une loi autorise des contrats à durée indéterminée à la
seule condition que la relation puisse cesser de manière unilatérale à tout moment.
À sa naissance le CDI est le contrat le plus flexible qui puisse exister car on peut rompre le contrat à
tout moment. Au cours du 20ème siècle on a observé un renversement de cette hiérarchie entre CDD
et CDI. Car on a instauré des limitations au droit du licenciement. Ce sont des innovations sociales qui
ont consisté à accorder plus de droits aux employés. C’est un problème de sécurité de revenu encore
une fois.
Le CDD est plus rigide car ne peut être rompu mais durée moyenne des CDD plus faibles que pour les
CDI car les CDD sont limités à 18 mois : tendance à diminuer au cours des années (depuis les années
2000).
Comment on est passé du CDI contrat précaire au CDI d’aujourd’hui
qui est le contrat stable ?
Au cours du 20ème siècle, limitations des possibilités de rompre le contrat par l’employeur  droit du
licenciement :
-
Délais congés : on ne peut pas rompre un contrat du jour au lendemain, un délai doit exister,
avec une durée minimale au départ de 15 jours.
-
Indemnités de licenciement : indemnités liées à la rupture lors de licenciement économique
par exemple. Se généralise dans les années 50-60. Les indemnités sont croissantes avec
l’ancienneté et aussi indexées sur les salaires.
-
Cause réelle et sérieuse : un employeur ne peut pas licencier sans donner de causes réelles et
sérieuses, instauré au cours des années 70 (73 pour le licenciement personnel et 75 pour le
licenciement collectif). L’employeur doit convoquer le salarié à un entretien de licenciement
 formalisme qui s’est développé afin que les salariés puissent savoir pourquoi ils étaient
licenciés.
-
Les relations qui se nouent sur le marché du travail sont compliquées à résilier humainement
(pour le salarié), c’est pourquoi il faut entraver le fonctionnement du marché. Conception
libérale ou le marché se régule de lui-même donc aucune régulation ne doit entraver son
fonctionnement. L’autre conception se positionne humainement en contraignant le
licenciement, qui est quelque chose de grave pour le salarié.
Du côté de l’employeur, inscrire les relations salariales dans la durée est pour lui intéressant. Il a tout
intérêt à fidéliser des salariés. Il est cohérent pour eux d’accepter ces limitations pour crédibiliser
leur stratégie de fidélisation. Si le CDI s’est développé, c’est peut-être parce qu’il était aussi intéressant
pour les employeurs et pas seulement les salariés.
Marché interne : pourquoi vouloir fidéliser les salariés ?
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Dans la production, on a la nécessité de retrouver les mêmes qualifications, des qualifications
spécifiques à l’entreprise sont recherchées, on ne souhaite pas constamment former des individus.
On ne veut pas casser les routines car on perdrait du temps. Il y a des conventions qui émergent dans
les relations salariales, on adopte des solutions connues par tout le monde. On a donc intérêt à garder
nos salariés qui connaissent les routines.
Les coutumes, les règles informelles et les cultures propres à chaque entreprise, permettent de
renforcer l’efficacité de l’équipe de travail.
Pour les entreprises, il est plus intéressant d’avoir recours à des marchés internes, les entreprises
constituent des marchés internes qui ne fonctionnent pas sur un modèle marchand mais qui sont
régulées par des règles internes d’où découlent des processus d’affectation et de rémunérations au
sein de l’entreprise même. Les salaires ne sont pas déterminés uniquement par des organismes
marchands mais aussi par des règles internes à l’entreprise  ancienneté dans l’entreprise.
Chaque fois que l’on a inventé des outils pour fidéliser les salariés ce sont des innovations sociales qui
organisent la solidarité entre les salariés en évitant le marché.
L’instauration du CDI avec un droit du licenciement poussé qui va dans le sens d’un ré-encastrement,
on s’éloigne d’un modèle de régulation purement marchande.
Un retour des régulations marchandes depuis les années 1970 ?
Jusque dans les années 70 : renforcement des protections salariales et fin des années 70 un
durcissement des recours au CDD, permis uniquement lorsque :
-
Salarié absent
-
Accroissement temporaire d’activité
-
Activités saisonnières
-
CDD d’usage secteurs dans lesquels il est d’usage de recourir au CDD.
Depuis les années 80 :
-
Mouvement inverse car certaines lois ont permis d’accroitre le recours au CDD
-
Faciliter l’accès à l’intérim (représente 15% du total des salariés).
-
Depuis le début des années 2000, raccourcissement de la durée moyenne des CDD, donc pour
une partie des travailleurs de moins en moins de garantie leurs sont offertes au travail.
-
Travailleur indépendant mais économiquement dépendant avec zéro sécurité de revenu à
l’inverse du contrat salarié qui propose des contrats avec des revenus mensuels.
30
-
Réformes des dernières années sont plutôt allées dans le sens d’une re-marchandisation des
contrats de travail. La loi El Khomri et les ordonnances Pénicaud (plafond que l’on ne peut
dépasser, création de barèmes pour des dommages et intérêts en cas de licenciement abusif)
montrent une réduction des garanties pour les salariés.
-
Recul des pratiques de constitutions de marché interne. La taille des entreprises dans
beaucoup de secteurs à tendance à diminuer, tendance à sous-traiter, à filialiser.
Malgré tout le CDI reste la norme sur le marché du travail, plus de 85% des salariés sont embauchés
en CDI. On entend souvent que la norme du recrutement deviendrait le CDD, cela peut arriver lorsque
l’on regarde l’ensemble des recrutements au cours d’une période (les flux entrées-sorties), mais pour
autant, si l’on regarde le stock de salariés employés sur le marché du travail, 85% sont en CDI.
Propositions actuelles de réforme du travail : Quelles solutions pour
les salariés qui ne sont pas inclus dans ces marchés internes ?
Pour innover, certains économistes proposent de créer un nouveau contrat, le contrat unique, qui
ferait disparaitre ces clivages entre CDD et CDI. Avec les insiders qui sont dans l’entreprise et qui
surprotègent leurs emplois et en face les outsiders qui ne seront pas intégrés dans l’entreprise
ruinerait la marge de manœuvre du chef d’entreprises, les salariés en CDD permettraient d’être cette
variable d’ajustement.
Les innovations sociales dans le domaine de la flexi-sécurité : contrat unique
-
Pas de détermination de durée ;
-
Protection contre les licenciements seraient progressives dans la durée : pendant les 2
premières années l’employeur n’a plus à donner de cause réelle et sérieuse en cas de
licenciement, au bout de 2 ans, les protections contre le licenciement apparaissent.
(Contrat première embauche en France  contrat à durée indéterminée mais dans les 2 premières
années, pas de besoin de justifier le licenciement pour l’employeur (-26 ans) en 2006, loi qui a été
promulgué puis abroger très rapidement devant la contestation populaire / Contrat nouvelle
embauche du même type et qui a été utilisé en France).
On garde cette dualité entre les salariés sous contrat unique inférieur à 2 ans et ceux qui ont un contrat
unique supérieur à 2 ans dans ce genre de contrat donc l’argument de dualité entre CDI et CDD n’est
pas recevable. Pour autant le contrat unique ne résout rien, les employeurs peuvent rompre les
contrats avant les 2 ans et ne vont pas être incités à embaucher les salariés en CDI, les employeurs ne
changeront probablement pas leurs pratiques, même avec ce nouveau contrat. Cette dualité entre
salariés en CDI et ceux en CDD permet de faire fonctionner la concurrence entre les salariés, les
salariés en CDD sont souvent sous pression.
Les innovations sociales dans le domaine de la flexi-sécurité :
Proposition de flexi-sécurité :
Accepter la flexibilité du marché du travail mais la compenser par des avances en matières
sociales, des droits aux indemnités chômages généreux, des sécurités en termes de formation (plus
31
difficile sans accès au marché interne de notre entreprise). Centré sur l’individu, on ne compte plus
sur l’entreprise et son marché interne mais chaque salarié doit s’équiper, doit développer des
parcours de formation etc. pour retrouver un emploi. On attache des droits sociaux à la personne :
-
Compte personnel d’activité (CPA) : regroupe le compte personnel de prévention modifié par
la loi El Khomri (anciennement compte personnel de prévention de la pénibilité) : sert à
identifier des salariés touchés par la pénibilité et donner des droits en contrepartie de cette
pénibilité, droit à la formation pour pouvoir changer d’emplois lorsque usure au travail se fait
sentir, droit de partir plus tôt à la retraite, cessation progressive d’activité (temps partiel pour
les dernières années)
-
Compte personnel de formation : on accumule des droits que l’on peut convertir en heures de
formation, aujourd’hui convertibles en euros de formation.
Groupement d’employeurs (GE) : quels objectifs ?
Mobilisation du travail par les entreprises ne garantissent plus la construction des carrières  report
des risques sur les salariés. Pour autant, les entreprises veulent toujours inscrire les relations
salariales dans la durée (CDI toujours prépondérant malgré le besoin de flexibilité des entreprises).
Les GE apportent une réponse locale à cette question d’érosion des marchés internes qui peut être
considéré comme une IS. On part du principe qu’il existe des emplois qui sont à durée déterminée ou
temps partiel donc qui s’écarte de la norme du CDI à temps plein parce que les entreprises n’ont pas
besoin de quelqu’un à temps plein mais il serait possible de garantir des emplois à temps plein si l’on
résonne dans un environnement plus global que celui de l’entreprise  construction de marché
interne en dehors de l’entreprise. Faire travailler des salariés dans plusieurs entreprises, CDI avec un
groupement d’employeurs et on sera affecté en fonction des besoins à telles ou telles entreprises.
Juridiquement les GE sont des associations dont les membres sont les entreprises adhérentes du
groupement. On a donc le salarié qui signera son contrat auprès de l’association ou du groupement
qui jouera le rôle de tiers employeurs et les entreprises derrière. Cette forme juridique a été autorisée
par la loi en 1985. Ils sont d’abord apparus dans le secteur agricole, on profite de la complémentarité
des besoins entre différents agriculteurs pour embaucher un salarié agricole (répond aux besoins
fractionnés des différents agriculteurs).
GE répond à différents besoins : besoins saisonniers complémentaires, besoins à temps partiel d’un
salarié qualifié, besoins ponctuels…
Finalité sociale :
C’est une innovation sociale car projet associé à ces GE. On a justifié la création de ces GE par une
finalité sociale, on garantit des emplois de qualité. GE sont des associations donc à but non lucratif,
afin que le recours au GE soit moins couteux pour l’entreprise que le recours à l’intérim. Pour les GEIQ
(groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification) qui s’adressent aux publics les plus
éloignés de l’emploi ont une mission d’insertion vis-à-vis de ces publics en plus de l’objectif d’emploi.
Dimension territoriale :
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Les GE sont ancrés localement, département voire une partie de département. Un bassin d’emploi le
plus souvent. Organisé la mobilité des salariés sur le territoire et fournit des outils de GRH, pour les
petites entreprises notamment.
On observe également de la coopération entre acteurs locaux, notamment au démarrage : branches
professionnelles, chambres de métiers, collectivités locales… cela peut générer des innovations avec
la mutualisation des connaissances, apparition de relations de coopération plutôt que de relation de
compétitivité : dimension d’innovation sociale car cela vient contourner la régulation marchande.
Réponse au niveau local de la gestion des carrières.
Des objectifs aux épreuves de la mise en œuvre :
-
Difficulté à trouver des besoins complémentaires, coût de coordination entre les employeurs,
mutualisation des embauches au sein du groupe même, cela reste une contrainte pour les
employeurs et ça ne se fait pas de manière spontanée. Il faut que les employeurs soient
complémentaires.
-
Crainte de perdre des salariés les plus qualifiés quand ils sont mis à disposition d’autres
adhérents du groupement.
-
Difficulté du dialogue social quand les employeurs font partie de différents secteurs d’activité.
Même si les récentes lois du Code du Travail donnent de plus en plus de décisions au niveau
de l’entreprise, encore beaucoup de choix reviennent à la branche. Les conventions collectives
qui résultent du dialogue social vont être différentes pour chaque branche, les salariés ont
différents avantages. Il faut donc trouver un compromis et choisir quelle convention adopter.
-
Fragilité financière : survie du GE dépend souvent de subvention ou du recours à des emplois
aidés. La solidité financière demande de s’assurer de la pérennité des emplois, et de leur utilité.
On va attendre que le poste soit suffisamment équilibré pour l’embauche en CDI.
-
Taille limitée : quand la taille augmente il y a davantage de coûts de coordination. Trouver des
besoins complémentaires devient aussi plus compliqué. Cela limite le développement des GE.
-
La coordination des acteurs au niveau local, ils se connaissent déjà. Il faut passer d’une logique
de concurrence à une logique de coopération. Les terreaux les plus favorables à l’émergence
des GE sont les lieux où existe déjà des liens de coopérations. Nécessité d’un socle de capital
social et de confiance entre les adhérents.
Un nouvel espace de mobilité pour les travailleurs et de coopération pour les entreprises.
Finalement, le GE permet une mutualisation du risque de devoir se séparer d’un salarié pour une
entreprise utilisatrice. Si un autre utilisateur a besoin d’un salarié dont n’a plus besoin cette
entreprise, le salarié peut rester en emploi sans passer par les cases licenciement et chômage. Comme
d’autres intermédiaires du marché du travail, le GE organise pour les travailleurs un espace de
mobilité entre entreprises, mais avec la particularité d’offrir un statut en CDI, même si certaines
embauches se font en CDD.
Le GE permet d’améliorer le sort des salariés, sur le point de vue de la sécurité d’emploi, qui auraient
été embauchés en CDD ou à temps partiel, ou encore qui auraient été licenciés en cas de baisse de
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l’activité d’une des entreprises et qui grâce au GE peuvent être embauchés en CDI, à temps pleins ou
encore en CDI pour une plus longues période.
Cette coopération en matière d’emploi peut renforcer la coopération entre les entreprises d’un
territoire et favoriser le développement local.
Quelle diffusion de cette innovation sociale ?
L’emploi dans les GE reste marginal d’après les statistiques. On compte aujourd’hui 300 GE qui
comptent 12 000 emplois et 10 000 entreprises : c’est relativement très faible au niveau national.
Ce développement limité est expliqué par la tension entre la volonté de diffusion et le respect des
principes. Dans la charte des GE on trouve :
-
Volonté des construire des emplois maillés (complémentaires entre employeurs) et durables.
-
Mettre en œuvre une démarche de développement des compétences.
-
Obtenir une confidentialité et devoir de réserve de la part des salariés.
-
Pratiquer une politique sociale et équitable cohérente.
-
Développer une politique de qualité.
-
Avoir une maîtrise rigoureuse des coûts.
-
Favoriser l’implication des adhérents dans la vie du GE.
Régime des intermittents du spectacle : lorsque la relation salariale
est limitée dans le temps du fait de la nature de l’activité.
Ici c’est le cas des secteurs d’activités dans lesquels on travaille par projet. On peut dire que la relation
salariale est limitée par nature du fait de l’activité. Dans ce cas il est sans doute plus difficile pour les
employeurs de proposer le CDI. Pour chaque projet il y a une nouvelle équipe. Souvent les employeurs
ont recours aux CDD d’usage : ils n’ont pas besoin de justifier le recours au CDD par un remplacement
ou une croissance temporaire.
Cette organisation du travail spécifique est appelée « adhocratie ». Le sociologue Menger (1991)
pense que cette organisation répond à ce double problème d’incertitude :
-
Comment organiser une production de produits uniques ?
Comment assurer la viabilité d’organisations produisant ces biens et services à chaque fois
différents dans un contexte de demande versatile ?
Ce type d’organisation doit avoir le moins possible de personnel permanent car ils ne sont pas sûrs
d’avoir besoin de ce personnel sur les projets suivants. Cela créé pour les employés une forte
incertitude de l’emploi. De plus ils ne dépendent pas d’un seul employeur donc il y a une grande
incertitude sur la carrière.
34
Face à cette situation spécifique, ce sont développés des mécanismes d’assurance et de solidarités
spécifiques.
L’idée est de socialiser le risque de ne pas être embauché et d’utiliser l’assurance chômage à cet
escient afin de permettre un versement d’allocations entre deux emplois. Ce ne sont pas seulement
des mécanismes assurantiels mais aussi de solidarité, d’assurance sociale. Il y a une logique
contributive.
L’innovation dans ce régime est de renforcer cette solidarité. C’est un public qui est particulièrement
exposé au risque de chômage, l’idée est de permettre de bénéficier davantage de la solidarité des
autres cotisants. Dès 1936 on avait assisté à la création d’une protection sociale pour les cadres et
techniciens du cinéma du fait d’avoir plusieurs employeurs. Il est défini dans un premier temps un
seuil de 1000 heures/ an pour bénéficier du régime des intermittents du spectacle. C’est très restrictif.
Avec les conventions de 1979 et 1984, on a réduit le nombre d’heures à 520h puis 507h. On a eu une
explosion du nombre de bénéficiaires mais pas forcément des indemnités versées. Cela a posé la
question de soutenabilité du régime.
Les règles d’indemnisation :
- 507h de travail en 10 mois, condition plus stricte que pour les autres salariés (610h en
28mois).
- Une fois éligible l’intermittent peut cumuler dans le même mois des journées de travail et des
journées non travaillées indemnisées dans la limite d’un plafond de revenus mensuels.
- L’indemnité est indexée sur les salaires et sur le temps de travail (que le salaire ailleurs).
- La durée d’ouverture des droits : être dans le régime ça s’évalue une fois par an. Mais en 2002
a été instauré un nouveau système qui installe un stock de journée d’indemnisation (243
jours), si le stock est dépassé alors plus d’indemnisation. Depuis 2016, ce système est
abandonné suite aux réclamations des intermittents : toute journée non travaillée est
indemnisée.
Un régime qui repose sur la solidarité interprofessionnelle et sur des cotisations plus élevées.
Les employeurs de ce secteur cotisent comme tous les employeurs au régime général à 5% pour les
employeurs et 2,5% pour les salariés mais on applique un taux spécifique depuis 2002. Les
employeurs de ce secteur doivent s’acquitter d’un taux de cotisation supplémentaire qui s’élève au
total à 13,85% (9,05% pour la part patronale et 4,8% pour la part salariale contre 4,05% et 2,4 pour
le régime général). En plus de la sur-cotisation de contrat court (suspendue depuis 2017) il y a une
sur-cotisation du secteur.
Le nombre de bénéficiaires a connu une augmentation très rapide : 19 100 en 1974 et 123 000 en
2002.
Les prestations à versées augmentent essentiellement du fait du nombre de bénéficiaires mais pas du
fait de l’augmentation du montant moyen perçu.
Trois groupes d’intermittents qui ne bénéficient pas tous du régime de la même manière :
-
Les plus précaires : moins de 12 000 euros de revenu par an dont une faible part sous forme
d’allocations (environ 10%).
35
-
De 12 000 à 30 000 euros par an (50-70% d’allocations), c’est ceux qui tirent le plus profit du
régime.
30 000 euros et plus par an (40-60% d’allocations).
Dans certaines professions on peut avoir moins de cotisations que d’indemnités, c’est le cas des
intermittents du spectacle. Comment ce système garde l’équilibre ?
Le financement des prestations provient alors des professions à forte stabilité de l’emploi qui sont
solidaires des professions les moins stables. Mais depuis 2002, le financement relève des surcotisations des salariés qui relèvent des intermittents du spectacle : recul de la solidarité
interprofessionnelle.
Ce recul montre un désencastrement de l’économie (ici l’assurance chômage) /t à la société.
Que peut représenter ce régime comme perspectives à la question
plus générale de l’emploi ? Un modèle généralisable ?
La précarité est aussi générée dans d’autres secteurs. Pourquoi ne pas généraliser ce système à tous
les travailleurs précaires ?
-
Les marchés du travail les plus flexibles qui fonctionnent le mieux sont ceux qui ont
accompagné la flexibilité d’une indemnisation du chômage particulièrement élevée.
-
Pour l’instant on est plutôt dans un système en France où la flexibilité est élevée mais
l’indemnisation est mauvaise (les critères d’éligibilité sont durs /t aux autres pays). Cela
génère un développement de la pauvreté, de contrat zéro heure et des petits boulots. Les pays
qui sont allés plus loin dans la flexibilité (Royaume-Uni) payent le prix fort. Les pays qui s’en
sortent le mieux c’est ceux qui ont accompagnés la flexibilité de garanties importantes pour
l’indemnisation chômage.
-
Deux modèles peuvent se mettre en place de manière relativement harmonieuse :
o Soit flexibilité et dépenses élevés d’indemnisation du chômage
o Soit stabilité de l’emploi et plus faible indemnisation du chômage.
-
Un système qui repose sur une forte solidarité interprofessionnelle entre salariés (ceux en
CDI cotisent au régime et reçoivent peu d’allocations) et entre employeurs (les employeurs
qui embauchent en CDI cotisent plus pour ceux qui embauchent en CDD).
Ce système est financé par la cotisation et non par l’impôt. Les financeurs sont les employeurs
et les salariés, les bénéficiaires sont les salariés. La cotisation est la même, on ne fait pas varier
la cotisation par rapport au risque.
-
Les mécanismes de mutualisation de risques sont complètement opposés pour l’assurance
privée et la solidarité interprofessionnelle.
-
Logique Bismarkienne au contraire du revenu de base qui a une logique Beveridgienne
(financé par l’impôt où les financeurs sont l’ensemble des contribuables et les bénéficiaires
sont des chômeurs ayant épuisé leurs droits à l’assurance chômage). Le clivage est encore
plus fort entre les bénéficiaires et les contributeurs dans la logique du revenu de base.
36
-
Ce système de généralisation suppose des choix politiques de qui assument ce degré de
solidarité entre salariés et entre employeurs. Dans la régulation marchande, il y a une volonté
d’individualiser les cotisations en fonction du risque de l’individu, volonté d’émancipation du
marché par rapport à la société. Ou alors on peut choisir d’encastrer le marché dans la société
et on recherche la coopération et la solidarité.
-
Face à ce refus d’augmentation des cotisations patronales, certains syndicats ont émis l’idée
de moduler les cotisations en fonction de si c’est un emploi à dd ou di. A priori, l’Etat n’a pas à
intervenir dans ce système, cela changerai la philosophie du système qui a vocation d’être
autofinancé par les cotisations.
Le Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée (TZCLD).
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Projet initié par ATD Quart Monde qui défend le droit à l’emploi.
-
Le contexte dans lequel il se met en œuvre s’inscrit dans le cadre de la constitutionnelle de
2003 relative à l’organisation décentralisée de la République et loi du 1er aout 2003 qui
permettent des lois d’expérimentation.
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Le préambule de la constitution de 1946 inscrit le droit à l’emploi.
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Le point de départ c’est le coût de l’exclusion : les dépenses directes d’indemnisations du
chômage (allocations, ASS, RSA) ; et les dépenses indirectes (coût des services sociaux, coût
du mal-être et des problèmes de santé, manque à gagner pour la sécurité sociale).
Le total de ces dépenses pour la collectivité représente 15 000€ par an et par personne.
-
Dans le langage des politiques de l’emploi on distingue politiques actives qui visent à résorber
le déséquilibre sur le marché du travail (service public de l’emploi, dépenses de formation,
aides en faveur des jeunes, aides à l’embauche, mesure en faveur des personnes handicapées)
et politiques passives qui visent à gérer les conséquences de ce déséquilibre : essentiellement
dépenses d’indemnisation au chômage.
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Le but étant de transformer les dépenses passives en dépenses actives. Agir sur le chômage
plutôt qu’en gérer les conséquences.
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Différentes logiques d’activation des dépenses :
o
o
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Logique libérale : logique du workfare : lier l’indemnisation des personnes à une
activité au service de la société, collectivité. Mais l’activité n’est pas un emploi : pas
librement choisie, ne donne pas droit à un statut de salarié et un salaire…
Logique universaliste : utiliser les dépenses passives pour créer un accès à l’emploi
pour tous.
TZCLD relève de la logique universaliste en ayant pour objectif de garantir le droit à l’emploi.
37
Simple activation des dépenses pour l’emploi ?
Comment est réalisée cette activation ?
-
-
Possibilité de transférer dans un fonds les financements qui permettent de créer les nouveaux
emplois. Il existait déjà des initiatives pour créer des emplois en CDI pour les chômeurs de
longue durée (>1 an), mais elles ont fini par échouer faute de trésorerie. Les économies
réalisées par l’Etat et les départements ne pouvaient pas retourner vers ces entreprises pour
contribuer à financer ces emplois.
Un fonds national du financement alimenté par l’Etat et les départements concernés qui sont
les principaux financeurs de la prise en charge du chômage de longue durée (ASS, RSA).
Comment créer ces emplois ?
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S’ils ne sont pas créés c’est qu’ils ne sont pas rentables dans le secteur privé.
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Le principe de TZCLD est que les emplois crées sont en CDI. C’est un objectif mais aussi la
règle, on ne peut y déroger.
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Les emplois sont créés à partir des compétences des chômeurs de longue durée présents sur
le territoire
-
Ces emplois doivent être créés à partir des compétences des chômeurs de longue durée
présents sur le territoire. Ils doivent correspondre à de nouveaux besoins et ne pas entrer en
concurrence avec des entreprises déjà présentes, afin de ne pas introduire une concurrence
déloyale du fait de la subvention reçue par l’entreprise agrée. Ces emplois sont liés à une faible
productivité et ils correspondent à des activités nouvelles ou encore peu solvables.
-
L’entreprise conventionnée qui emploie ces travailleurs doit être polyvalente pour rester
ouverte à toute activité, à tout métier.
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Vont être utilisé une partie des 15 000€ par chômeur pour exploiter des secteurs pas encore
rentables.
Qui va employer ces chômeurs ?
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L’employeur n’a pas une activité déterminée : EBE (Entreprise à But d’Emploi). L’activité va
émerger à partir des besoins du territoire et des compétences des chômeurs.
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Parfaite étanchéité entre ces emplois et les emplois qui relèvent de l’économie de marché. Il
ne faut pas détruire des emplois de l’économie marchande pour créer ces emplois.
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Mais difficulté de délimiter ce qu’est le semi-solvable : proposer des prix plus faibles pour
rendre la demande plus solvable dans détourner la demande qui s’adresse au secteur
marchand. Il y a la nécessité de dialoguer avec les acteurs de l’économie marchande pour
vérifier la non-concurrence.
-
Des emplois construits à partir des compétences : proposer des travaux à la mesure
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TZCLD et insertion par l’activité économique (IAE)
-
TZCLD se distingue de l’IAE :
o
o
o
o
Du fait de l’embauche en CDI, qui inscrit les travailleurs dans la longue durée
contrairement à l’IAE qui se veut un sas vers l’emploi.
Pas d’adaptation des personnes aux emplois comme dans l’IAE, mais adaptation des
emplois au personnes : partir des compétences pour construire des emplois
Activités non concurrentielles
Comités locaux d’expérimentation réunissant les acteurs locaux : collectivités locales,
entreprises classiques, chômeur de longue durée, service public de l’emploi. Beaucoup
plus de parties prenantes que pour l’IAE.
Un pilotage qui privilégie l’échelon territorial pour lutter contre le chômage de longue durée
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Le comité local d’expérimentation réunit tous les acteurs locaux (70 parties prenantes à
Villeurbanne)
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La direction opérationnelle prend les décisions pour mener à bien les actions.
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Les EBE jouent le rôle d’employeur
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Les fonds locaux d’expérimentation : allocation des subventions aux entreprises
conventionnées
Face au chômage faut-il créer des emplois ou seulement assurer une garantie de revenu plus élevée
que les allocations aujourd’hui versées, un revenu qui génère un statut social intégrateur. Le revenu
de base permettrait de sortir de la société à deux vitesses entre les salariés et les chômeurs.
Quelles innovations sociales dans la redistribution des revenus ?
Quand les personnes sont au chômage elles peuvent prétendre à différents types d’allocation (versées
par l’assurance chômage, financée par l’Etat). Chaque allocation a un principe de fonctionnement
différent.
Le revenu universel pourrait être une solution pour assurer un niveau de vie satisfaisant pour les
chômeurs et le faire d’une manière qui permette la cohésion de la société.
L’allocation spécifique de solidarité a été créé en 1984 pour les chômeurs en fin de droits (5 ans
d’activité salarié dans les 10 ans précédant la fin du contrat et qui recherchent activement un emploi).
Il s’agit d’une allocation fixe sous plafond.
Allocation fixe sous plafond (ASS) versus allocation différentielle (RMI).
Différentes manières d’allouer un revenu supplémentaire aux personnes sous un certain seuil de
revenu. Le montant de cette allocation est le même pour l’ASS. Dans ce cas-là, tant que la personne est
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au-dessous du seuil, elle obtiendra l’allocation, dès que le seuil est passé : effet de seuil et le revenu
après transfert chute du montant de l’allocation. Il y a un problème à cette allocation fixe sous plafond.
On peut imaginer d’autres systèmes : l’allocation différentielle. L’objectif de l’allocation est de
maintenir un revenu après transfert minimum puis croissant. Cela sert à éviter l’effet de seuil. Il faut
que le revenu après transfert soit au moins égal à l’allocation maximale, pour que ceux qui dépassent
le seuil soient garantis de ne pas toucher moins. La critique est qu’il n’y a pas d’incitation à travailler
d’avantage car pour une heure de plus travaillée on gagne le même revenu (pour les personnes sous
le seuil), c’est ce qui s’appelle la trappe à chômage, c’est-à-dire une désincitation financière à
reprendre un emploi.
Les études empiriques montrent que les cas dans lesquels la reprise d’emploi se traduit par une
diminution du revenu après transfert se limite à des emplois à temps partiel mal payés.
Même dans ces cas-là, on observe que la plupart des chômeurs préfèrent reprendre un emploi.
L’emploi n’est pas seulement monétaire, il est aussi vecteur de lien social.
Malgré tout, la structure des allocations évolue pour chercher à rendre les revenus après transfert
toujours plus croissants avec l’augmentation d’une activité rémunérée.
Le minimum vieillesse est une allocation différentielle.
Le Revenu de Solidarité Active (RSA)
Crée en 2008 dans le cadre d’une expérimentation puis a été généralisé. C’est une allocation
dégressive. L’objectif est que le montant de l’allocation conduise à un revenu après transfert
strictement croissant en fonction du revenu d’activité. À chaque fois que le revenu d’activité augmente,
le revenu après transfert doit augmenter aussi.
On distinguait le RSA de base ou le RSA activité. Le RSA de base correspond au RMI. Mais en plus de
ce RSA de base, il y a un RSA d’activité.
(Montant forfaitaire + 62% de revenus professionnels du foyer) – (ressources du foyer + forfait d’aide au
logement).
Le montant de RSA positif jusqu’à environ 1660 euros pour une personne seule.
À partir de 2016, le RSA activité a été transformé en prime d’activité afin de fusionner deux dispositifs
qui visaient la même tranche de population. L’autre était la prime pour l’emploi qui était un crédit
d’impôt (en fonction du revenu d’activité une certaine somme était déduite des impôts).
Ceux au niveau du SMIC sont ceux qui touchent le plus de prime d’activité.
En termes d’incitation monétaire, ce système est beaucoup plus satisfaisant mais le risque est que
jouer pour répondre aux revendications sur le pouvoir d’achat en voulant augmenter les allocations
et non les salaires, cela encourage les contrats précaires. La réaction des employeurs sera de ne
surtout pas augmenter les salaires alors que c’est pourtant ce qui est demandé par les travailleurs. Et
à terme, cette hausse des allocations devra être financée par la hausse des impôts ou de la dette (mais
la volonté politique est de réduire la dette).
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L’objectif de ces dispositifs à la base est de cumuler les salaires précaires ou à mi-temps et en même
temps c’est acter le fait que les employeurs préfèreront faire stagner les salaires et ne pas améliorer
les conditions de travail, cela perpétue les contrats précaires.
Le revenu de base : revenu d’émancipation ou subvention aux
employeurs ?
Chaque individu recevrait de la collectivité de sa naissance à sa mort, sans contrepartie ni condition,
une somme régulière, cumulable avec ses autres revenus, dont ceux tirés d’un travail. C’est l’idée
d’une plus grande solidarité au sein de la société.



Universel
Individuel (ne prend pas en compte la situation de la famille)
Inconditionnel (possible de cumuler avec d’autres revenus, rien n’est exigé en échange de ce
revenu, quasi absence de critères à remplir pour percevoir un revenu)
Une multiplicité des dénominations (revenu de base, allocation universelle, inconditionnel,
d’existence, garanti). Cela est car il y a différents projets :



Filet de sécurité : projet libéral. Fixer le revenu de base à un niveau faible (autour de 500€).
Pour résoudre la question sociale on donne un strict minimum de redistribution est après
chacun est responsable de sa situation.
Vision d’émancipation du travail salarié et de l’économie capitaliste, avec un revenu autour
de 1100€. L’idée est que chacun pourra développer ses propres projets sans être dépendant
trouver un travail. C’est donner la possibilité de vraiment pouvoir choisir une alternative au
salariat. Soutenu à la fois par des ultra-libéraux (Friedman a été l’un des premiers à défendre
un impôt négatif, pour un minimum d’intervention de l’Etat), et aussi défendu par les partis
de gauche.
Adaptation de la protection sociale à la précarité de l’emploi et simplification d’accès aux
minimas sociaux.
En quoi le revenu de base se différencie des autres allocations ?
Le revenu de base consiste à procurer un revenu de transfert qui soit plus élevé que le revenu
d’activité et d’un montant égal pour tous. Il n’y a donc plus de problème d’incitation. La pente de la
courbe de revenu d’activité est la même que celle de la courbe du revenu après transfert.
Dans une vision plus encastrée, il faut prendre en compte que l’on travaille aujourd’hui pour des
raisons monétaires et aussi pour être intégrés socialement. Il est difficile de penser qu’à partir du
moment ou un revenu de base est instauré à 800€ tout le monde arrêterai de travailler. La principale
critique est celle de l’incitation au travail. Les questions qui se posent aujourd’hui sont aussi les
questions du niveau et du financement.
Quel niveau ?
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Selon les versions, on peut voir différents montants : 500€ pour les libéraux et 1000€ pour les
émancipateurs.
Serait-il le même pour tous les âges ? Faut-il appliquer une décote pour les plus jeunes ?
Quel financement ?
Faut-il utiliser les cotisations sociales ? Cela voudrait dire qu’il remplacerai toutes les protections
sociales et cela poserait de grands problèmes. Cette variante signifie suppression de toutes les autres
prestations sociales, et seule une petite tranche de la population nécessite de faire des dépenses de
santé, cela serait dangereux et complètement libéral.
Faut-il utiliser les impôts ? Le besoin serait de 336 Mds€ à 675 Mds€ (pour un revenu de base à
1000€). 675Mds€ c’est le budget intégral de la protection sociale (hors ... Donc si on veut le préserver,
il faut financer par l’impôt.
Pour ce faire on pourrait lutter contre l’exode fiscale ou les GAFA, rétablir l’ISF…
Quels effets sur les salaires ?
Faut-il préserver le revenu minimum ? Si on le supprime, cela créerait des emplois en les rendant
enfin rentables. Les économistes libéraux pensent que le salaire minimum est trop élevé en France et
c’est cela qui provoque le chômage en France. Donc le risque dans le scénario libéral c’est une baisse
des salaires. C’est aussi dans ce scénario qu’on évite les risques d’inflation. L’économiste keynésien
part d’une situation de chômage de masse donc le revenu de base serait suffisamment haut avec un
smic, alors cela créerait un choc de demande positif que les entreprises pourraient absorber grâce au
profits encaissés.
Quels effets sur l’ordre du travail et sur la qualité des emplois ?
Plus on va fixer ce revenu de base à un niveau élevé plus on va permettre aux salariés de refuser les
emplois précaires. Et plus on va inciter les employeurs à améliorer les conditions de travail. Au
contraire de ce qu’on a avec le RSA d’activité qui va dans le sens du développement des emplois
précaires.
Les conséquences dépendent en grande partie du niveau du revenu de base. Plus on augmente le
salaire plus on augmente le prix du loisir. Donc le premier effet quand le salaire augmente on a
tendance à vouloir travailler plus pour créer un effet de substitution. Cet effet revenu à un certain
seuil est supérieur à l’effet de substitution donc c’est l’effet revenu positif. Avec un revenu plus élevé
on peut se payer plus de loisirs et de biens de consommations à la fois : et au final réduire le temps de
travail.
Quels effets sur les inégalités ?
Premier effet de réduction des inégalités, cela va réduire l’écart relatif entre les riches et les pauvres.
Dans le cas d’une suppression du smic, à l’inverse les écarts de revenus d’activité risquent de
s’accentuer.
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Quelle dynamique de partage des gains de productivité : risque qu’ils soient conservés par ceux qui
détiennent un emploi au détriment de ceux qui n’ont que le revenu d’activité pour vivre.
Une des principales critiques c’est que à long terme, que se passe-t-il sur le partage de productivité ?
Si une partie de la population vit de ce revenu de base et l’autre cumule avec un travail. Si le revenu
de base est élevé, en dynamique ceux qui travaillent vont capter les gains de productivité par des
hausses de salaires. Mais pour ceux qui ne travaillent pas, le revenu de base sera-t-il indexé sur la
hausse des salaires et l’inflation ?
Ici est le principal enjeu du revenu universel.
Le risque c’est que à terme il y ait un décrochage des revenus de base car les travailleurs ne voudront
pas que ceux qui ne travaillent pas profite des gains de productivité.
La place du travail dans la société et du chômage ?
Qu’est ce qui fait le lien social si ce n’est plus le travail salarié ? Il faut réinventer des vecteurs sociaux.
2 sujets au choix : 1 question de cours et une question transversale
Lire les textes sur intermittents, GE, TZCLD
Lire les toutes dernières diapos sur la mise en perspective d’une analyse socio-économique des
innovation sociales (les 6 dernières diapos).  question transversale
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