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DOCSI 442 0176

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NOTES DE LECTURE
A.D.B.S. | « Documentaliste-Sciences de l'Information »
2007/2 Vol. 44 | pages 176 à 186
ISSN 0012-4508
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ÉDITION
LES NOUVEAUTÉS
NOTES DE LECTURE. AU SOMMAIRE
Pour une documentation
créative : l’apport de la
philosophie de Raymond
Ruyer
Sylvie Leclerc-Reynaud ;
préface de PaulDominique Pomart
Préparer le CAPES externe de documentation
/ Brigitte Bacconnier, Jacqueline Dussolin, Isabelle
Fructus, Robert Martin, Gilles Perrin, Anna Vicente
P.178
Les professeurs documentalistes
/ coord. par Sylvie Devis-Duclos
P.178
Paris : ADBS Éditions, 2006. – 193 p.
– (Sciences et techniques de l’information,
ISSN 1762-8288). – ISBN 10 : 2-84365-085-2,
ISBN 13 : 978-2-84365-085-7 : 25 €
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Un livre rare,
précieux, étonnant
RAYMOND RUYER, PHILOSOPHE DISPARU EN
1987, joue « un rôle important dans l’éclaircissement de
la notion d’information », note Paul-Dominique Pomart
dans la préface de cet ouvrage. C’est pourquoi, a priori,
ce dernier devrait intéresser tous les professionnels de
l’information quels que soient leurs statuts, niveaux
ou spécialisations. La lecture du livre confirme largement cet a priori car l’auteure prend appui sur la pensée profonde de R. Ruyer pour « décortiquer le travail
documentaire sous l’angle de la relation entre le documentaliste et l’usager », c’est-à-dire celui de l’humain.
Pour cela, Sylvie Leclerc-Reynaud découpe son analyse en deux parties qu’elle présente dans l’introduction : la première s’attachera à poser « La distinction
radicale de l’information physique et de l’information
psychologique » (p. 15-69) quand la seconde analysera
« Les retombées sur le métier de documentaliste ». L’in-
176 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
La redocumentarisation du monde
/ Roger T. Pédauque
P.182
Les savoirs scolaires en informationdocumentation : sept notions organisatrices
/ FADBEN
P.178
troduction est également l’occasion d’indiquer les circonstances dans lesquelles est né l’intérêt de Raymond
Ruyer pour la complexe notion d’information : Wiener et Shannon ont publié des ouvrages à l’origine
de la célèbre théorie de l’information. Mais ils ne donnent, dans cette théorie, qu’une définition physique
de l’information. R. Ruyer y ajoute très vite un sens
psychologique. « L’information est soit physique (structure inerte) soit psychologique (sens). La première n’est
qu’une "information mutilée" tandis que la seconde est
l’"information authentique" ». C’est dans ce sens-là qu’il
pose cette triple interrogation : Qu’est-ce que l’information ? d’où vient-elle ? où va-t-elle ? Sa réponse
concerne l’homme et interpelle en ce sens le documentaliste, professionnel de l’information face à ses
utilisateurs.
Chacune des deux parties qui composent ce livre
est synthétisée dans un bref et pertinent résumé. Par
ailleurs, tous les chapitres sont introduits par une série
d’interrogations à laquelle l’auteure entend répondre,
donnant ainsi une claire idée de son contenu. De plus,
Sylvie Leclerc-Reynaud met en scène deux personnages qui, tout au long de l’ouvrage, dialoguent et s’opposent tout en se complétant : l’un, nommé Elmer, est
un documentaliste « traditionnel », plus dans son élément avec l’information physique et son traitement
informatique, quand celui qui lui fait face, baptisé
Elliot, s’intéresse essentiellement aux utilisateurs. « Il
affectionne les usagers indécis et incertains car il voit
chez eux l’occasion donnée aux documentalistes de
créer. » C’est ce que l’auteure s’efforce de démontrer
en s’appuyant sur la pensée de Raymond Ruyer. C’est
ce qui explique aussi le titre donné à son ouvrage, qui
affiche ce concept rarement associé à la documentation: la créativité.
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Le document à la lumière du numérique
/ Roger T. Pédauque
P.182
Droit de l'information et de la communication
/ Bruno Ravaz et Stéphane Retterer
P.181
Pour une documentation créative :
l’apport de la philosophie de Raymond Ruyer
/ Sylvie Leclerc-Reynaud
P.176
LES NOUVEAUTÉS
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Information physique et information
psychologique
La première partie est composée de trois chapitres
écrits pour entraîner le lecteur à comprendre le cheminement de la pensée de R. Ruyer, partant de l’information physique pour arriver à l’information psychologique.
« L’information physique » (ch. 1, p. 19-29) est
décrite comme structure improbable qui ne doit pas
être confondue avec signification. Mesurable et
visible, elle possède des propriétés claires. « Je vois le
livre, écrit l’auteure. Je ne vois pas l’information psychologique comme, par exemple, le besoin de ce livre. »
On comprend, dès lors, « La critique ruyérienne
de l’information physique » (ch. 2, p. 31-41) qui porte
sur trois points. C’est d’abord sa nature qui l’entraîne
à écrire que les informations physiques n’ont pas de
sens : « Qu’est-ce qu’un livre, un article s’ils ne sont pas
lus ? » La deuxième critique porte sur l’origine de
cette information physique. Est-ce la machine ? Beaucoup répondent par l’affirmative, ce qui explique, dit
Elliot, qu’« on commence à investir lourdement dans la
machine en négligeant le contenu ». Enfin, l’information physique a une destination absurde : « Si les
informations physiques ne sont pas vues ou écoutées,
elles ne sont que des "cadavres" ou "lettres mortes" »,
ne cesse de répéter Ruyer en illustrant son propos de
schémas très significatifs.
Le lecteur est alors prêt à comprendre le message
que lui livre le troisième chapitre : « L’information
psychologique ou "quasi-information" » (p. 43-69).
Sa nature, c’est le sens. Cette information est agissante dans ce que le philosophe nomme « la double
transition », c’est-à-dire le passage de l’information
physique à l’information psychologique et vice versa
et la nature de la relation de ces deux types d’information. Au contraire de l’information physique, l’information psychologique, qui se caractérise par le mot
clé de sens, ne se mesure pas, ne s’observe pas. Le
sens est amorphe et néanmoins dynamique et, au
contraire de l’information physique, il échappe à l’entropie.
Un tableau récapitulatif permet de bien mesurer
les différences entre ces deux types d’information et
des schémas répondent clairement à la question :
« Qu’est-ce qu’augmenter l’information ? » « C’est ordonner, compléter, multiplier selon un sens » (information
psychologique). « Ce n’est pas dupliquer, transporter,
interpoler ou extrapoler » (information physique).
La portée de cette distinction sur le métier
de documentaliste
À la suite de cette partie théorique et savante mais
exposée de façon très claire et lisible, l’auteure se préoccupe des retombées que la découverte de l’information psychologique a sur le métier de documentaliste.
Ce sont d’abord des retombées sur « L’accueil de
l’usager et le climat de confiance » (ch. 4, p. 75-88).
« Ruyer nous donne quelques pistes pour réussir cette
première prestation, véritable valeur ajoutée de notre
métier. » Les informations de présence et la politesse
sont au premier plan, explicitées par l’auteur avec des
témoignages étonnants et forts. « Les livres peuvent
être effrayants », rapporte Claude Duneton qui
explique pourquoi de façon passionnante (« Le livre,
c’est la Bible à l’origine. C’est un objet sacré. Il reste
quelque chose de magique dans le livre ») avant de
conclure sur l’importance du climat de confiance et
d’empathie à créer avec certains usagers intimidés ou
peu familiers des lieux d’information. Et, comme l’affirme Elliot, l’accueil n’est pas une perte de temps.
Par ailleurs, attirer les non-usagers nécessite d’inventer des moyens pour le faire et donc de créer !
« La compréhension du besoin » fait l’objet du
chapitre 5 (p. 89-121). Il faut tout d’abord prendre
conscience de la question qui préoccupe l’usager et,
en particulier, de « la difficulté à poser une question ».
De façon très pédagogique, l’auteure expose une étude
de cas, mettant en scène deux nouveaux personnages,
« Pierre le précis » et « Jacques le créatif », aux
besoins et aux comportements contrastés. Nous les
suivons dans le contexte de leurs demandes, à travers
leurs questions et leurs attentes très différentes et
opposées, magistralement explicitées en contrepoint
par Elmer et Elliott.
« La satisfaction de l’usager ou les réponses créatives » (ch. 6, p. 123-151) constitue le dernier chapitre de ce document étonnant. « Le documentaliste
est un "mind reader" puisqu’il devine le besoin de l’usager. Or deviner, c’est créer ». Les réponses adaptées aux
besoins de l’utilisateur (réponses fonctionnement ou
réponses inventives) permettent de mettre en valeur
le rôle du documentaliste dans des situations diverses,
que commentent avec beaucoup de sel et d’originalité Elmer et Elliot à qui l’auteur redonne la parole au
moment de conclure : « Documentaliste, un métier d’influence… La documentation est un métier captivant
grâce auquel nous apprenons sans cesse car nous sommes
toujours dans l’obligation de nous informer nous-mêmes
pour mieux informer l’autre. D’autre part, c’est une activité de service et il est fort agréable de voir les gens
repartir contents de la prestation qui leur a été proposée. »
Un mélange de savoirs, d’écoute,
d’observations et d’optimisme
En annexe, Sylvie Leclerc-Reynaud invite son lecteur à découvrir ce philosophe, Raymond Ruyer, sur
lequel elle s’appuie tout au long de son étude. Elle
livre aussi des entretiens tenus avec le cinéaste Yves
Robert : « La [sic] documentaliste doit savoir ouvrir les
questions fermées », et avec Claude Imbert, fondateur
et éditorialiste de l’hebdomadaire Le Point, qui prend
Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2 • 177
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ÉDITION
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la parole pour affirmer : « Je crois beaucoup aux qualités actives de la documentation ; je crois à l’influence
du documentaliste. »
« Voici un livre utile. Voici un livre important. Voici
un livre indispensable », déclare le préfacier. Nous
ajoutons : voici un livre rare. Voici un livre précieux.
Voici un livre étonnant. Nous pensons, en effet, que
tous les professionnels et futurs professionnels de l’information-documentation doivent lire, relire, garder
à portée de main ce document qui ne ressemble à
aucun autre car il est un mélange : mélange de savoirs,
d’écoute, d’observations – et d’optimisme aussi pour
ce métier si souvent défiguré et au déficit d’image si
souvent évoqué. L’auteure étonne et on devine qu’elle
est, en ce sens, profondément philosophe. Mais elle
analyse avec beaucoup d’acuité l’environnement documentaire et on devine qu’elle est, en ce sens, profondément documentaliste.
La première partie appelle à la réflexion. Elle permet d’éclaircir, à travers la pensée de Raymond Ruyer,
le concept polysémique d’information et de lever l’erreur ou la confusion entre des types d’information
complémentaires, certes, mais opposés. On ne peut
qu’adhérer à l’humanisme que révèle la distinction de
l’information physique et de l’information psychologique. La deuxième partie appelle à l’action. Certains
jugeront en accord avec Elmer que la mission du
documentaliste ne passe pas par l’analyse des besoins,
l’accueil personnalisé… D’autres, comme les enseignants documentalistes, trouveront au contraire ces
missions essentielles, qui placent l’usager au cœur de
leur action.
Tous les Elmer – et ils sont nombreux – se reconnaîtront. Puisse cet ouvrage profond et de qualité leur
permettre de comprendre Elliott et d’adhérer à ses
idées !
Marie-France Blanquet
[email protected]
LES NOUVEAUTÉS
Les professeurs
documentalistes
Coordonné par Sylvie DevisDuclos ; préface de Jean-Louis
Durpaire
Préparer le CAPES externe
de documentation
Brigitte Bacconnier,
Jacqueline Dussolin, Isabelle
Fructus, Robert Martin, Gilles
Perrin, Anna Vicente ; préface
de Ghislaine Chartron
Les savoirs scolaires en
information-documentation :
7 notions organisatrices
Orléans : CRDP de l’académie d’OrléansTours, 2006. – 264 p. – (Livre bleu, ISSN
1279-7553). – ISBN 2-86630-189-7 : 27 €
Paris : ADBS Éditions : FADBEN, 2006.
– 203 p. – (Sciences et techniques de
l’information, ISSN 1762-8288).
– ISBN 978-2-84365-086-4 : 23 €
Numéro de : Médiadoc, ISSN 1260-7649,
mars 2007. – 36 p. – 9,50 €
Fédération des enseignants
documentalistes de
l’Éducation nationale
Préparer le CAPES
de documentation pour
devenir professeur
documentaliste et
former à l’information
DEUX OUVRAGES S’ADRESSANT DIRECTEMENT
aux enseignants documentalistes de l’enseignement secondaire ont été publiés fin 2006. Le premier s’inscrit délibérément dans le champ de la documentation scolaire, dont il envisage tous les aspects
et le contexte particulier. Destiné aux professeurs
documentalistes en poste et à leurs partenaires de
l’établissement, il sera fort utile aux candidats préparant les concours externe et interne du CAPES de
documentation, instauré en 1989 et modifié par une
nouvelle loi en 2005. Le deuxième ouvrage est un
manuel pratique d’aide à la préparation aux quatre
épreuves du CAPES externe.
Nous présentons enfin un troisième document,
récemment paru, consacré par la FADBEN aux
savoirs en information-documentation que le système scolaire doit faire acquérir aux élèves et à la
didactique de l’information.
178 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
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ÉDITION
LES NOUVEAUTÉS
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Un panorama complet du métier de professeur
documentaliste
Cette édition 2006 du « Livre bleu » destiné aux
professeurs documentalistes confirme, s’il est nécessaire, la qualité et le sérieux de la première édition
parue en 2003. Œuvre collective, elle ne pâtit pas,
comme souvent, de différences de style dans ses
contributions : un véritable travail de coordination
a été effectué, qui rend l’ensemble très cohérent et
pertinent. Ce « Livre bleu » a incontestablement sa
place dans les CDI et autres structures documentaires pédagogiques. Refondue, repensée, l’édition
2006 prend véritablement en compte le monde
actuel de la documentation scolaire, ce qui n’est
pas la moindre de ses qualités.
Organisé en cinq chapitres, cet ouvrage examine
tour à tour le cadre institutionnel et la fonction
(recrutement, carrière, missions) (ch. 1), le système d’information pédagogique (ressources informationnelles, humaines, matérielles ; politique
d’acquisition ; traitement, valorisation et communication de l’information ; informatique et réseaux)
(ch. 2), la formation à la maîtrise de l’information
(document, documentation, apprentissages, référentiels) (ch. 3).
C’est à ce niveau-là que la fonction de professeur
documentaliste se différencie de celle du documentaliste traditionnel : avec, entre autres, les itinéraires découvertes en collège, l’ECIS (éducation
civique, juridique et sociale) et les TPE (travaux
personnels encadrés), l’Éducation nationale a véritablement mis en place des dispositifs de formation à l’information pour chaque âge et engagé une
collaboration étroite entre le corps enseignant et
les documentalistes. La fonction et son utilité sont
ainsi institutionnalisées, officialisées, alors que le
documentaliste traditionnel doit encore trop souvent se faire reconnaître par son institution.
Le chapitre 4, « Éduquer et ouvrir sur le monde »,
approfondit le rôle du professeur documentaliste vu
comme un éducateur « comme les autres » et un
médiateur culturel. Enfin, le chapitre 5 détaille la
politique documentaire d’établissement avec quatre
exemples. Cet ouvrage ne serait pas complet sans
de nombreuses fiches explicatives proposées à la
fin de chaque chapitre, des encadrés, des schémas
et tableaux, des renvois constants à son impressionnante bibliographie et, bien sûr, différents
index.
On l’aura compris, ce « Livre bleu » sera très
utile aux candidats potentiels au CAPES de documentation en ce qu’il leur présente de façon très
complète les facettes, les objectifs et les conditions
d’exercice du métier de professeur documentaliste.
On pourra cependant regretter un certain manque
d’ouverture à ce qui se situe en dehors du champ
scolaire pur et prend de plus en plus de place dans
le monde documentaire : par exemple la numérisation, l’économie, la gestion, l’international sont
des dimensions quelque peu absentes. C’est probablement un oubli à réparer dans une prochaine
édition.
Les épreuves du CAPES externe
de documentation
Co-édité par l’ADBS et la Fédération des enseignants documentalistes de l’Éducation nationale
(FADBEN), cet ouvrage sur le CAPES externe de
documentation est sensiblement différent du précédent. Il s’adresse cependant pour partie au même
public que constituent les candidats potentiels au
CAPES ; il est rédigé par des formateurs en IUFM,
assurément aussi compétents que les auteurs du
premier ouvrage ; il propose aussi nombre de
conseils et de méthodes utiles. Ce qui les différencie, c’est que celui-ci est exclusivement centré sur
le concours lui-même, dont une présentation générale est proposée en introduction et dont il adopte
la subdivision en deux parties : épreuves écrites et
épreuves orales.
Les épreuves écrites sont au nombre de deux :
la première, dite de « sciences et techniques documentaires », a pour objectif « d’évaluer des connaissances et des compétences dans les domaines des
sciences de l’information, de la communication, de la
documentation et de l’éducation », ce qui est assez
ambitieux et peut effrayer les candidats potentiels.
Qu’ils se rassurent, même si elle est difficile, cette
épreuve repose essentiellement sur une bonne préparation (on ne le conseillera jamais assez) et
quelques lectures judicieuses. Sont donc demandés, à partir de documents distribués lors du
concours, un commentaire critique, une analyse de
situation et un exposé relatif aux applications
pédagogiques. La seconde épreuve écrite a été
modifiée et devait se dérouler selon sa nouvelle
définition à partir de la session 2007. Elle repose
sur l’élaboration d’un dossier documentaire, également fondé sur des documents fournis : il est
demandé de proposer un plan cohérent avec une
répartition des documents sélectionnés, une synthèse et un résumé l’ensemble.
La première épreuve orale est une épreuve
« pré-professionnelle sur dossier » : quatre textes
sont proposés, que le candidat devra analyser et
présenter avant un entretien avec le jury. La
seconde est une épreuve pratique de techniques
documentaires : le candidat doit analyser le sujet
qui lui a été remis, puis procéder à une recherche
documentaire, à la sélection de documents pertinents, à leur traitement, tout en en proposant une
exploitation pédagogique. Un exposé devant le
jury suit cette préparation.
Chaque partie de cet ouvrage est agrémentée
Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2 • 179
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ÉDITION
LES NOUVEAUTÉS
d’exemples concrets, avec des explications claires
sur ce qui est attendu des candidats, des fiches
explicatives, des exemples. Des annexes conséquentes et une bonne bibliographie enrichissent
l’ensemble. Des exemples de sujets proposés ainsi
que des séquences vidéo relatives aux épreuves
orales complètent sur le site de la FADBEN le document imprimé.
Les deux ouvrages présentés ici sont très complémentaires, leur qualité est égale, avec des avantages
pour l’un et pour l’autre. Leur lecture est donc à
conseiller en vue de préparer le concours, ce qui ne
dispensera pas les candidats de suivre une formation
spécifique pour augmenter leurs chances.
Jean-Philippe Accart
[email protected]
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Quelles compétences informationnelles
inculquer aux élèves et comment ?
Certes les savoirs scolaires n’intéressent pas ou
pas directement les documentalistes engagés sur
les terrains des entreprises, des administrations ou
des associations. A priori ce document issu de la
réflexion d’un groupe de chercheurs et d’enseignants documentalistes ne devrait donc intéresser
que le monde scolaire et ses acteurs.
Nous pensons pourtant que ce travail mérite
d’être connu par l’ensemble des professionnels de
l’information-documentation car, malgré quelques
lacunes, cette production peut permettre à chacun
de faire le point sur certains concepts particulièrement polysémiques, à commencer par le terme
même d’information.
Mais Les savoirs scolaires en information-documentation peut aussi permettre de rencontrer et de
mieux comprendre les priorités et les préoccupations pédagogiques de nos « cousins germains »
que sont les enseignants documentalistes. Par
ailleurs, il ne faut pas oublier que les élèves d’aujourd’hui seront demain – du moins faut-il l’espérer – les usagers de nos services de documentation,
cellules de veille et autres centres de ressources…
Françoise Albertini, actuelle présidente de la
Fédération des enseignants documentalistes de l’Éducation nationale (FADBEN), explicite en introduction le chemin qui a mené cette association
« Du référentiel de compétences informationnelles
des élèves (1997) aux savoirs scolaires en information-documentation (2007) » et qui conduit
Pascal Duplessis et Alexandre Serres, dans une
deuxième contribution, à s’interroger sur « Une
nouvelle étape vers la didactique de l’information ? » Les enjeux sont multiples : éducatif, professionnel, pédagogique, scientifique et didactique.
Il importe aussi d’articuler les savoirs en informa-
180 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
tion-documentation avec les champs disciplinaires,
scolaires puis universitaires, rencontrés par les
élèves puis les étudiants au cours de leurs études.
C’est pourquoi le choix des auteurs engagés dans la
rédaction de ce numéro de Médiadoc a été de délimiter
d’abord un corpus de notions organisatrices, au nombre
de sept comme l’indique le titre. On trouve d’abord la
notion d’information, puis celles de document, de
source, d’indexation, d’espace informationnel, de
recherche d’information et d’exploitation de l’information. L’explicitation de ces notions organisatrices, à
destination du débutant ou non, permet d’en extraire
les notions essentielles (au nombre de 64). Et l’ensemble
de ce corpus est présenté de façon originale, explicitée
par Ivana Ballarini-Santonocito dans « Un cadre théorique de référence ou la didactique de l’information à
l’œuvre ».
Comment transformer des savoirs savants en
savoirs à enseigner ? Cette nécessaire transposition didactique conduit le groupe de réflexion de
la FADBEN à adopter une fiche type structurée
autour de chaque notion organisatrice et comportant une entrée qui récapitule les notions essentielles lui étant attachées, le niveau de formulation
ainsi que des exemples et des contre-exemples.
La lecture de l’ensemble de ce corpus proposé
dans un ordre alphabétique puis regroupé par
notion organisatrice laisse apparaître des manques
importants. Ainsi, on trouve le terme de blog ou de
prise de notes, quand les termes de collection, de
fonds ou de mémoire documentaire sont absents. Ce
sont pourtant des concepts de base, à l’origine de
la fonction de documentaliste et absolument nécessaires à maîtriser pour comprendre l’impérative et
méthodique organisation des informations qu’il a
mission de rechercher et de trouver. Bizarrement,
les termes de communication et de diffusion sont
absents quand figure celui de discours (rhétorique,
intention), rattaché à la notion organisatrice source.
Et il manque aussi le terme de normalisation.
Malgré ces manques, l’enchaînement des
notions essentielles autour des notions organisatrices, sortes de micro-thésaurus ou définitions
dynamiques, participe à un effort de clarification
toujours fructueux, d’autant plus que, dans une
dernière contribution, « L’exploitation pédagogique
des fiches » est expliquée par Isabelle Fructus :
elle présente sous une autre forme synthétique la
piste pédagogique à suivre et qui permettra aux
enseignants de travailler au mieux avec leurs
élèves.
Toutes ces explications débouchent sur la présentation des notions organisatrices, chacune
accompagnée de sa piste pédagogique. Le lecteur
peut travailler !
Marie-France Blanquet
[email protected]
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ÉDITION
Droit de l'information
et de la communication
LES NOUVEAUTÉS
Paris : Ellipses, 2006. – 176 p. – (Infocom).
– ISBN 978-2-7298-2885-1 : 13,50 €
Bruno Ravaz
et Stéphane Retterer
Une présentation du droit
de la communication utile
mais un peu déséquilibrée
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LA COMMUNICATION SUPPOSE L’EXISTENCE
d’un émetteur et d’un récepteur d’informations, un
dispositif où les médias jouent souvent le rôle d’intermédiaire. Voilà les trois éléments qui ont servi à
structurer cet ouvrage. Si l’approche est sans surprise, elle a le mérite d’être claire et d’aborder les
questions essentielles.
L’émission d’informations met effectivement en
jeu des questions liées à la liberté d’expression, au
droit d’auteur et aux droits voisins, à la responsabilité contractuelle et délictuelle. Cet aspect
conduit naturellement à détailler aussi les droits et
les devoirs du journaliste. Puis, se plaçant du côté
du récepteur, les auteurs ont choisi d’examiner les
questions liées à la protection du consommateur et
à celle du mineur, au droit à l’information et à la
réception (du consommateur), mais aussi au secret
de l’information, à l’anonymat, ainsi qu’au droit
de réponse.
Consacrée aux médias, la partie centrale présente successivement les aspects juridiques de la
presse écrite, de la communication audiovisuelle
et, dans un dernier chapitre, du multimédia, de
l’internet et de l’informatique. C’est là que l’on
trouvera des explications sur les règles applicables
aux bases de données, aux logiciels, aux fournisseurs de contenu et d’accès ou sur la protection des
données personnelles.
Si tous les éléments importants, et ils sont particulièrement nombreux et variés, sont cités à un
moment ou à un autre dans ce livre, on ne peut
manquer d’être d’emblée frappé par la place inégale
accordée à chaque partie. La première, consacrée à
l’émetteur d’information, est particulièrement
détaillée ; elle représente d’ailleurs plus de la moitié de l’ouvrage. La troisième partie est traitée beaucoup plus rapidement et, pour parler du récepteur,
les auteurs n’ont souligné que les aspects liés à la
consommation (contrat et signature électroniques,
prospection, publicité en ligne, téléachat, autopromotion, parrainage… mais aussi protection des
mineurs contre la cybercriminalité).
L’accent mis sur le consommateur est parfois
un peu étonnant. C’est le cas, par exemple, pour le
droit à l’information, dont la présentation est limitée ici à l’obligation d’obtenir des informations sur
le produit fourni. Sans doute ! Mais c’est peut-être
un peu réducteur à l’heure où l’on se bat pour l’accès à la connaissance et où le droit à l’information
est un concept qui donne lieu à une polémique
qu’il eût été intéressant de développer.
Il n’en reste pas moins que cet ouvrage propose
une approche intéressante pour nombre d’entre
nous et à bien des égards. Les textes de loi sont
détaillés, accompagnés souvent de commentaires
sur leurs origines, sur les difficultés (la qualification de l’œuvre multimédia, par exemple) et les
évolutions successives de certains aspects (comme
le droit de réponse).
Dommage que certaines parties, le troisième
chapitre tout particulièrement, n’aient pas été
approfondies et que d’autres (les compétences du
CSA ou la liste des sociétés du secteur public « du
paysage audiovisuel », par exemple) soient inutilement détaillées dans le corps du texte. Elles
auraient eu leur place en annexe. Si la loi DADVSI
n’était pas connue dans sa version définitive en
juin 2006, date de publication de l’ouvrage, la loi
sur la réutilisation des données publiques, en
revanche, aurait pu être présentée dans le chapitre
sur les médias en ligne, ainsi que la loi antiterroriste de janvier 2006 dans le paragraphe consacré
aux fournisseurs d’accès. On a pu noter aussi
quelques légères inexactitudes – même si elles n’ont
naturellement aucune incidence sur l’appréhension
globale que l’on peut avoir du droit appliqué à la
communication.
Michèle Battisti
michè[email protected]
Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2 • 181
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ÉDITION
Le document à la lumière
du numérique
LES NOUVEAUTÉS
Caen : C&F éditions, 2006. – 218 p.
– ISBN 2-915825-04-1 : 18 €
Roger T. Pédauque ; présenté
par Jean-Michel Salaün ;
préface de Michel Melot
La redocumentarisation
du monde
Roger T. Pédauque
Toulouse : Cépaduès éditions, 2007. - 213 p.
– ISBN 978-2-85428-728-8 : 23,50 €
Des réflexions
riches et innovantes
sur le document numérique
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ROGER T. PEDAUQUE EST LE NOM COLLECTIF
d’un réseau de scientifiques venus de tous les horizons du savoir pour réfléchir aux bouleversements
que le numérique entraîne dans nos sociétés : le
réseau thématique pluridisciplinaire « Documents
et contenus : création, indexation, navigation »
(RTP-DOC) du CNRS. Sous ce pseudonyme dont
Jean-Michel Salaün, à la fin du premier ouvrage,
explicite l’histoire et la signification, les auteurs
publient deux manifestes extrêmement savants et
parfois très abstraits, témoignages de la réussite d’un
travail collaboratif et coopératif. Un effort est nécessaire pour lire et assimiler les trois textes, toujours
précédés d’un clair résumé, qui composent le premier document, et les onze chapitres, également
mais brièvement résumés, qui composent le second.
Le chercheur sera sans doute plus à son aise dans la
lecture de ces textes, alors que le praticien sur le terrain pourra ça et là s’interroger sur le lien entre ces
réflexions et ses pratiques quotidiennes.
Forme, texte, médium : comprendre le rôle
du document numérique dans l’émergence
d’une nouvelle modernité
Michel Melot ouvre le premier livre par une préface écrite dans un style très imagé (p. 11-15).
Le document « classique », explique-t-il, se concrétise dans sa matérialité. C’est un objet solidaire de
son contenu. « En pulvérisant les contenus et en tra-
182 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
versant les supports, l’information numérique a fait
valser cette croyance […] Le document n’est plus un
objet enclos dans une enveloppe cachetée, pas plus que
l’âme humaine ne s’enferme dans un tonneau. ».
Les questionnements de R. T. Pédauque reposent
donc tous sur le même mot clé : le document numérique qui, dissociant support et contenu, entraîne
une nécessaire réflexion sur l’écrit, sur le texte, sur
l’image…
Dans une introduction intitulée « S’inspirer de
Roger T. Pédauque » (p. 17-23), Jean-Michel Salaün
présente ensuite l’ouvrage, en précisant les objectifs
des trois textes réunis dans ce livre. Il s’agit de
« construire une réflexion transversale aux disciplines
et expertises sur le document numérique afin d’orienter les recherches à venir et d’éclairer les stratégies des
acteurs institutionnels impliqués dans son développement ou sa manipulation ». Il raconte l’aventure de
cette écriture plurielle, ébauche d’une théorie « plus
englobante que celles dont nous disposons aujourd’hui
pour comprendre réellement les phénomènes documentaires… »
• « Document : forme, signe et médium,
les re-formulations du numérique »,
ou « Pédauque 1 » (p. 27-78), ouvre le débat.
Le concept de document fait l’objet de peu de définitions et de discussions dans les textes scientifiques,
mais c’est un concept qui intéresse totalement ou à
travers une appréhension partielle un ensemble de
chercheurs très différenciés. C’est pourquoi ce premier texte est construit de façon identique quand il
considère le document comme forme (objet matériel ou immatériel), comme signe (sens et intentionnalité) et comme médium (statut du document
dans les relations sociales). Pour chacune de ces catégories, R. T. Pédauque repère les disciplines ou professions concernées. Il propose ensuite une interprétation de l’évolution des points de vue dans le
passage du document traditionnel au document
numérique. Ceci permet de construire une définition du document et, enfin, de poser les questions à
approfondir.
Les professionnels de l’information sont présents
à travers la bibliothéconomie et le catalogage dans
la réflexion sur le document comme forme. La documentation et les professions de l’information sont
plus spécialement interpellées dans la réflexion sur
le document comme signe. Les documentalistes peuvent d’ailleurs être heurtés par une erreur manifeste
concernant une de leur spécialisation, qui présente
les références bibliographiques, les index et les résumés comme « langages documentaires » (p. 53).
Ce sont les archivistes et les éditeurs qui occupent
les premières places dans la considération du document comme médium. Dans ces trois aspects,
l’impact du Web, « vaste bazar où l’on trouve une mul-
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ÉDITION
LES NOUVEAUTÉS
titude de documents consultables gratuitement pour le
lecteur et reliés entre eux », est importante.
Les trois entrées abordées font ressortir plusieurs
thématiques fondatrices du document, confortées
ou contestées par sa version numérique. Cela permet de souligner, par exemple, la vanité de l’opposition entre papier et numérique.
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• La deuxième contribution, « Pédauque 2 »,
intitulée « Le texte en jeu, permanence et
transformations du document » (p. 83-155), se
propose d’approfondir la catégorie signe décrite
dans la précédente sans ignorer pour autant les
deux autres.
L’objectif est de « comprendre plus finement les relations entre les choix d’ingénierie documentaire et leurs
présupposés et conséquences sur les objets (ou services)
qu’ils manipulent ». Pour cela, ce chapitre comprend
cinq parties proposant chacune, sur la même problématique, un éclairage différent. Ces éclairages se
rejoignent dans deux directions : la relation du texte
avec la forme, d’une part, dans sa grammatisation
(manipulation de l’expression qui la détourne de son
intention initiale), dans sa matérialité et dans le difficile problème de l’invariance documentaire ; la relation du texte avec le médium, d’autre part, avec l’interrogation du Web sémantique et des ontologies.
R. T Pédauque signale dans le premier argumentaire, « Aux origines des choix d’ingénierie
documentaire », la brutale rupture technico-économique qui rend difficile le recul et l’analyse critique fine et nuancée. Puis il propose trois modèles
documentaires implicites, analysés par la suite, synthétisés dans un tableau et concrétisés dans une
annexe (« Un document médical suivant plusieurs
paradigmes »), tous deux bienvenus pour le lecteur
en lui offrant un répit dans sa progression de lecture.
« L’incertain concept de texte » part de l’hypothèse que le maintien du contenu assimilé au texte
est suffisant pour nous permettre de nous orienter
dans les documents, grâce à l’efficacité nouvelle des
outils informatiques. Cela signifie que le texte luimême est un invariant simple à identifier ; ce qui
paraît fort discutable. Point aveugle de la linguistique, le texte est un objet sémiotique complexe mais
c’est aussi un objet fabriqué. En ce sens, le texte
numérique associe deux dimensions autrefois réservées à deux médias distincts – l’inscription sur un
support (du papier à l’écran) et le flux du signal (de
l’audio-vidéo au multimédia) – à prendre en compte
pour comprendre ce qui le caractérise.
« Invariance et transformation » ouvre sur une
problématique, clairement explicitée par son titre,
analysée d’abord à travers l’incontournable question
de l’intégrité juridique. Par ailleurs, pour élucider
la transformation documentaire d’un point de vue
technique, l’auteur précise la notion d’invariant en
prenant appui sur l’exemple de la photocopie avant
de discerner trois niveaux de validité, inquiétude
récurrente du monde documentaire, et de conclure
sur « la nécessaire "trahison" du traducteur ».
Les quatrième et cinquième argumentaires rompent en partie avec les trois précédents. Le quatrième
s’interroge sur « La tentative de dépassement du
Web sémantique ». Le dernier modèle implicite de
construction des documents numériques relève en
effet du mouvement du Web sémantique et entraîne
vers l’étude du concept d’ontologie informatique
dont l’auteur propose une définition complète. Suit
la présentation illustrée du « cake » de Tim BernersLee, infrastructure commune à l’ensemble des
contributeurs au Web sémantique. Mais ce dernier
est plus qu’une infrastructure. Il représente aussi
tout un ensemble de fonctionnalités : services web,
infrastructures pour les systèmes à base de connaissances et annotation des documents. La relation du
Web sémantique au langage soulève la question du
Global English, un concept qui gagne du terrain.
Le cinquième argumentaire, enfin, « Texte, document, et médiation », analyse la problématique proposée en invitant à réviser les relations entre texte
et document et à reconsidérer la médiation.
• « Pédauque 3 » présente « Document et
modernités » (p. 159-210) et met en avant la
notion de redocumentarisation, objet de l’ouvrage
complémentaire analysé ci-après.
Ce troisième texte approfondit la thématique du
document comme médium et annonce, après l’imprimé considéré comme première modernisation
aux conséquences nombreuses, une seconde modernisation aux retombées tout aussi importantes.
La redocumentarisation est issue d’une transformation sociale dont le numérique n’est qu’un vecteur. Il s’agit donc, dans un premier temps, d’une
« Révision » d’un ordre documentaire antérieur, à
mettre en phase avec une organisation sociale en
évolution rapide. R. T. Pédauque rappelle ici les
quatre fonctions du document – mémorisation,
organisation, création et transmission – à mettre en
inter-relation avec ses trois contextes – privé, collectif et public – de médiation. Il analyse les changements sociaux nés des opportunités numériques
avant de pointer sur les hésitations d’un nouvel
ordre documentaire. Dans un deuxième temps, la
« Recomposition » s’attache à souligner l’hybridation en cours, à mi-chemin de ce qui existe mais
transformation profonde pourtant. Cette recomposition concerne d’abord les médiations et les changements que connaissent les médiations « classiques » : édition, monde scolaire, etc. Elle entraîne
à s’interroger sur le devenir des médiateurs dans
cette redocumentarisation. « Doit-on laisser l’usager
Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2 • 183
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ÉDITION
LES NOUVEAUTÉS
s’autoformer ? », interroge l’auteur avant d’analyser
la « recomposition sémiotique ». Enfin, dans un troisième temps, le « Décadrage » permet de comprendre comment « le privé [est] publicisé », tel le
passage du « je » dans l’espace public de certains
blogs, le « collectif sur-documenté » et « l’espace public
redistribué ».
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Penser le document numérique :
travaux des actions spécifiques
et ateliers du réseau RTP-DOC
L’étude de Roger T. Pédauque sur Le document à
la lumière du numérique et tous les échanges qui l’ont
précédée sur le site du réseau (http://rtp-doc.enssib.fr) entre une soixantaine de chercheurs élaborant collectivement la substance de ce livre ont rencontré un indiscutable succès. Celui-ci tient à ces
regards croisés interdisciplinaires qui l’inspirent,
écrit Niels Winfeld Lund, professeur de l’Université
de Tromso (Norvège) et signataire de la préface de
La redocumentarisation du monde. Ce deuxième
ouvrage signé Roger T. Pédauque contraste cependant fortement avec le premier, purement théorique.
Il se veut essentiellement un témoignage pluriel de
recherche fondamentale et expérimentale, essentiellement française quand le titre promet le monde.
L’introduction, « Comprendre et maîtriser la redocumentarisation » (p. 15-25), reprend un certain
nombre de points analysés dans le premier livre pour
expliquer son titre (ainsi que le terme de redocumentarisation !). La documentarisation concerne le
document papier imprimé et son rôle dans l’émergence des sociétés modernes. La redocumentarisation concerne, quant à elle, le document numérique
et les transformations sociales auxquelles nous assistons. Reprenant les trois catégories explicitées dans
la première étude, l’auteur rappelle les termes de la
principale problématique : « S’il ne peut être "vu" ou
repéré, "lu" ou compris, "su" ou retenu, un document
n’est d’aucune utilité. » C’est pourquoi les chapitres
2 à 5 s’attachent à étudier la redocumentarisation
par rapport au document considéré dans sa forme,
les chapitres 6 à 8 sont consacrés au document texte
quand les derniers chapitres portent sur le document médium.
• Dans la première partie, le document est
étudié comme forme ou signe.
« La numérisation en question » (p. 27-46) s’intéresse à l’avènement du numérique et de la GED
pour définir la numérisation, à l’aide de schémas, et
en préciser les enjeux stratégiques de mémoire collective. S’interroger sur les challenges pour la
recherche conduit à une réponse en termes de
mutualisation, d’interopérabilité et de gestion des
connaissances. Ce texte synthétise les résultats des
réflexions menées dans le cadre de l’action concer-
184 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
tée incitative Masses de données « Madonne » et de
l’atelier Numérisation du programme interdisciplinaire « Société de l’information » du CNRS, confrontés à une numérisation massive du patrimoine historique et culturel.
« La lecture sur supports numériques : des
repères pour une activité complexe qui se diversifie » (p. 47-64) synthétise les recherches françaises
sur la lecture numérique. « Peut-on encore parler
de lecture ? », interrogent de plus en plus les chercheurs analysant la lecture sur écran et les navigations hypertextuelles. Les recherches, en cours de
structuration, pour résoudre cette question s’orientent vers l’étude d’un mode prototypique de lecture,
l’observation scientifique et outillée de l’acte de lecture, l’étude de l’osmose écriture-lecture, l’étude de
la lecture comme activité intentionnelle en cours de
transformation. Les recherches à venir devront s’intéresser aux aides à la lecture, aux lectures fortes
et réussies ainsi qu’aux activités des lecteurs, à leurs
besoins et à leurs attentes.
« Au-delà du Web : les interfaces de visualisation
et d’annotation pour les bibliothèques numériques »
(p. 65-84) constate les limitations des interfaces du
Web dont souffrent les bibliothèques numériques.
Ce texte synthétise les travaux des membres de l’atelier et décrit, en s’appuyant sur des photographies
très concrètes, des expériences menées au Conservatoire national des arts et métiers et à l’Université
technologique de Troyes sur les interfaces de visualisation. Les interfaces d’annotation, quant à elles,
font l’objet de tableaux récapitulatifs et comparatifs
des différentes interfaces des systèmes hypermédias
expérimentées dans diverses universités ou laboratoires de recherche.
« Les temps du document numérique » (p. 8598) présente les résultats d’une action spécifique
Fant-AS-STIC menée par des chercheurs de différentes disciplines rapprochant le concept de temps
de celui de document numérique. En s’appuyant sur
les archives audiovisuelles dont l’INA a en France
la responsabilité, ils discernent trois dimensions
temporelles : celles de l’informaticien, de l’historien
et du lecteur, et dégagent deux points d’entrée de
leur recherche situés aux pôles de la production et
de la diffusion des documents numériques multimédias.
• La deuxième partie s’intéresse au document
comme texte ou contenu.
« Sur des aspects primordiaux du Web sémantique » (p. 99-116) : le projet du Web sémantique
est de dépasser les limites actuelles du Web. Une de
ses principales propositions passe par des informations complétant la ressource trouvée, c’est-à-dire
les métadonnées ou annotations. Les ontologies ainsi
que les langages du Web sémantique jouent un rôle
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LES NOUVEAUTÉS
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central. L’auteur examine également l’intégration de
sources d’informations hétérogènes, l’adaptation et la
personnalisation, avant de conclure sur les services
Web sémantiques.
« Corpus scientifiques numérisés : savoirs de référence et points de vue des experts » (p. 117-130)
porte sur l’instrumentation de l’usage de corpus documentaires par la communauté scientifique et rend
compte des travaux du réseau transdisciplinaire ARTCADHi (Atelier de recherches transdisciplinaires sur
la construction du sens en archéologie et autres disciplines historiques). En s’appuyant sur d’étranges
illustrations, R. T. Pédauque analyse la notion de
point de vue et celle d’activité éditoriale puis propose
une étude de cas sur les recherches en architecture
antique.
L’étude des liens entre ressources onto-terminologiques et corpus (« Corpus et terminologie », p. 131147) constitue une problématique transdisciplinaire
mais sollicite des histoires et des besoins différents
pour chacune des disciplines concernées : informatique, linguistique, sciences de l’information liées au
thésaurus1 et ingénierie des connaissances liée à
l’ontologie. À travers ces différences disciplinaires, il
est possible de trouver des objectifs et des méthodes
proches pour ouvrir, dans des perspectives communes, une étude sur la notion de genre, pour
prendre en compte les applications et usages, anticiper la maintenance des ressources termino-ontologiques et définir des modes d’évaluation et de
validation.
« Processus d’annotation dans les documents pour
l’action » (p. 149-166) clôture les chapitres consacrés
au texte et au contenu. Ce chapitre traite des documents numériques utilisés comme supports à une
pratique collective. L’auteur pose d’abord un cadre
théorique autour des notions de document pour l’action (DopA) et d’annotation contributive, d’annotation index et d’annotation attentionnelle, pour
présenter brièvement des recherches menées dans les
domaines de la santé, de la conception, des bibliothèques numériques et des pratiques scientifiques.
• Dans la dernière partie, nous retrouvons
le document comme médium ou relation.
À partir de deux études de terrain, « Interactions
document organisation : document enaction »
(p. 167-182) s’efforce de répondre à l’interrogation
suivante : « Que pouvons-nous attendre d’une approche
du document par le biais organisationnel ? ». La première étude concerne des travailleurs sociaux au sein
d’un Centre d’information et d’accueil départemen1 Une fois encore le lecteur documentaliste sera surpris de voir la
Classification décimale universelle considérée comme un
thésaurus (p. 134) et se demandera s’il y avait un professionnel
de l’information dans ce groupe de travail…
186 • Documentaliste - Sciences de l’information 2007, vol. 44, n° 2
tal ; la seconde considère des ingénieurs brevets dans
un cabinet conseil. Les éléments à prendre en compte
sont le processus d’éditorialisation, une distanciation
préparatoire à l’appropriation, la localité d’information. Les propositions de recherche portent sur le
document, objet doté d’un statut social, sur des
focales pour une appropriation du document numérique et ouvrent sur des perspectives « enactives »
pour l’interprétation assistée d’images de documents.
« Auctorialité : production, réception et publication de documents numériques » (p. 182-200) pose
quelques repères à la diversification du champ d’action des auteurs dans leurs relations avec la création
des documents numériques. L’auctorialité est analysée dans son processus de production, de réception
et de liaison permettant de retrouver auteur et document. Les conclusions de cette étude portent sur
l’auctorialité numérique par rapport au papier,
l’interaction entre auteur et lecteur qui voit s’affaiblir
la position de l’auteur et, enfin, les outils qui bouleversent les étapes de production et de diffusion
des textes.
Enfin, « La publication sur le Web, entre filiations
et innovations éditoriales » clôture cette étude en analysant les nouvelles opportunités de publications pour
les contenus informationnels et culturels offerts par
le développement d’Internet. Les potentialités nouvelles du Web ne doivent pas faire oublier la prégnance des modèles antérieurs. Les études permettent d’identifier les idéaux-types de publication sur
le Web, qui sont au nombre de quatre et récapitulés
dans un tableau bien éclairant. Les pistes d’investigation se tournent, en amont, vers des dispositifs
de structuration des contenus et, en aval, vers une
offre agrégée.
Au terme de la lecture de ce second ouvrage, le
lecteur, épuisé, s’interroge sur le sens profond à donner à ce qui peut, parfois, apparaître comme pure spéculation, utile aux chercheurs mais très loin du terrain. Par ailleurs, un manque de coordination entre
équipes invitées à témoigner et à dire leurs expérimentations entraîne des redondances, en particulier
dans le second document. Elles sont parfois lassantes
étant donné la difficulté de lecture de ces textes au
vocabulaire scientifique ardu. Roger T. Pédauque a
plusieurs têtes et le prouve bien dans ces redites.
Certes, ces deux livres sont à lire par tous les chercheurs – y compris et à commencer par les chercheurs
en science de l’information et de la documentation –
car ils ouvrent de nombreuses portes et forcent la
réflexion. Ce qui est toujours très productif. Ils apportent de nombreux éclairages innovants sur la notion
de document. C’est pourquoi le praticien ne doit pas
bouder la lecture de ces textes difficiles.
Marie-France Blanquet
[email protected]
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