Séance 1 : Le personnage de roman (HISTOIRE LITTERAIRE)
Introduction :
C’est le plus souvent autour d’un ou plusieurs personnages que s’organise un roman. Au cours de l’histoire du
roman, la conception du personnage a évolué à l’image des interrogations des auteurs sur l’homme et le
monde.
I. Aux origines du personnage de roman
1) Les premiers héros
L’épopée grec essentiellement l’Iliade, et l’Odyssée d’Homère fournis le modèle de nombreux héros et
contribue à concevoir le personnage avant tout comme un être doté de qualités exceptionnelles.
2) Le modèle du chevalier
Dans les premiers romans comme Lancelot de Chrétien de Troyes, les personnages évoluent dans un monde
peu réaliste et souvent idéalisé, or à la différence des héros antiques, ils évoluent amorçant ainsi ce que va
devenir le personnage.
3) Des personnages pour rire et réfléchir
Le Roman de Renart composé par des clercs anonymes, propose des personnages qui ne sont plus des héros
idéalisés, mais il s’agit d’un monde animal qui rappelle le monde humain au XVIème siècle français. Rabelais
dans Pantagruel en 1532 et Gargantua en 1534 met en scène des personnages de géant proposant à travers
leurs aventures un regard à la fois satirique et philosophique sur l’homme et la société.
II. Le 17ème siècle : les personnages se diversifient
1) Détournement
Au XVIIème siècle le genre romanesque se diversifie, on trouve encore une importante veine satirique qui
parodie les héros et les valeurs chevaleresques en les confrontant à la réalité comme dans Don Quichotte en
1605 de Cervantès et Paul Scarron dans Le Roman comique 1651-1655 qui choisis également la parodie.
2) L’analyse des sentiments
Le déclin des valeurs féodales au profit d’un nouvel idéal d’honnêtes hommes fondé sur le goût et le
raffinement, la place accordée à la vie mondaine et à ses codes conduisent les auteurs à construire des
personnages plus nuancés dont les sentiments contradictoires sont analysés. C’est la naissance du « roman
psychologique » avec la Princesse de Clèves en 1678 de Madame de La Fayette.
III. Le 18ème siècle : le personnage est un « individu »
Au XVIIIème siècle l’individu s’impose peu à peu dans sa particularité et non plus seulement en tant que
membre d’un ordre social. Le personnage de roman n’est plus le représentant d’un type littéraire, mais devient
un être au caractère propre et au destin unique. C’est le cas dans Manon Lescaut, de l’Abbé Prévost. C’est un
roman éponyme (lorsque le personnage principal donne son nom au titre du roman). On retrouve une
narration à la 1ère personne mais aussi la forme épistolaire (par lettres) qui suggère l’autonomie des
personnages. C’est le cas dans les Liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos en 1782.
IV. Le 19ème siècle : le personnage « réaliste »
1) L’observation attentive de la réalité
Le XIXème siècle connait une histoire mouvementée au rythme des révolutions et de la succession des régimes
ainsi que des mutations techniques et sociologiques. Les romanciers cherchent alors à rendre compte de ce
monde qui échappe dont les repères sont brouillés. Leur travail s’appuie sur une observation attentive,
presque scientifique de la réalité tant sociale que psychologique. Honoré de Balzac, dans la Comédie Humaine
en 1830-1850 (date de fin et début de l’œuvre, cycle romanesque de 90 romans.) puis Emile Zola dans les
Rougons-Maquart en 1871-1893, conçoivent chacun un univers incluant toutes les classes sociales et dont la
cohérence repose en partie sur le retour des personnages. Le souci du réalisme conduit à représenter les
personnages dans les moments les plus quotidiens de la réalité comme les scènes de repas.
2) Des personnages complets
Les personnages sont placés au sein de la société dont ils sont chargés de rendre compte.
Leurs ambitions, leurs contradictions sont ainsi notées et analysées. Le roman d’apprentissage permet de
raconter ses parcours, comme celui de Julien Sorel chez Stendhal et celui de Frédérique Moreau chez Flaubert
(l’éducation sentimentale).
V. Le 20ème siècle : la déconstruction du personnage
1) Le temps des doutes
Le XXème siècle connait à son tour de nombreux bouleversements qui conduisent à une progressive remise
en cause de la conception du personnage romanesque. Tout d’abord la psychanalyse née à Vienne à la fin du
siècle précédent dans le cabinet du Dr Freud et la notion d’inconscient invite à analyser autrement l’être
humain. C’est ce que l’on retrouvera dans A la recherche du temps perdu, de Marcel Proust.
2) La fin du personnage ?
Les fondements et les valeurs de la société sont à leur tour mis à mal par les traumatismes des 2 guerres
mondiales. Les parcours et les attitudes des personnages rendent compte des désarrois et des
questionnements face au monde mais les auteurs n’en donnent plus les clefs et ils renoncent à caractériser et
analyser leurs personnages Comme Meursault dans l’Etranger de Camus en 1942, qui désarçonne le lecteur
en ne livrant jamais vraiment ces sentiments. Les auteurs du Nouveau Roman radicalise encore cette
déconstruction du personnage qui perd parfois jusqu'à son identité. Aucun portrait physique ou moral des
personnages de Nathalie Sarraute ne sont livrés explicitement au lecteur dans Enfance.
3) Des personnages pluriels
La conception du personnage romanesque qu’elle se veuille exhaustive ou lacunaire, reste toujours le miroir
des interrogations que l’auteur veut transmettre sur l’homme et le monde.
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