Chapitre 17 : Les actionnaires de la SA Les actionnaires sont surnommés les « citoyens » de la SA, ils ont un pouvoir politique fort qui leur permet de mieux contrôler les dirigeants et ainsi éviter les dérives. La loi leur donne des prérogatives majeures. Ce chapitre vise les actionnaires de SA moniste et dualiste I) Droits politiques des actionnaires de la SA A) Le droit à l’information 1) Information permanente Les actionnaires de SA peuvent à tout moment, dans le respect de l’intérêt social, accéder aux documents suivants dans le siège social de la SA : - Comptes annuels des 3 derniers exercices et comptes consolidés - La liste des administrateurs, MCS, MDD, DG, DGD… - Les rapports de gestion - Les PV et feuilles de présence des assemblés de la période - Le montant global des rémunérations versées aux 5 ou 10 personnes les mieux rémunérées dans la société Le refus de la SA de communiquer des informations à un associé peut engager sa RC et donner droit à des DI à celui-ci. En outre, il peut exiger la nomination d’un mandataire ad hoc qui peut demander les informations 2) Information occasionnelle et questions écrites Voir annexe 1 B) Le principe du droit de vote 1) Tout actionnaire peut participer aux AG et voter En principe, tout actionnaire peut participer aux AG et voter. Aucun nombre minimal d’actions ni aucune restriction ne peut être imposé dans les statuts. Par exception, peuvent être privés de leur droit de vote les actionnaires qui ont refusé de libérer leurs apports en numéraire. Les statuts sociaux peuvent également prévoir l’émission d’actions sans droit de vote. Si les actions sont démembrées (usufruit et nue-propriété), le droit de vote appartient à l’usufruitier en AGO tandis que le nu-propriétaire l’a en AGE. Attention : les actionnaires ne sont pas les seuls à participer aux AG. Doivent être également convoqués le CAC, les représentants du CSE (ceux présents peuvent s’exprimer devant l’AG et proposer des projets de résolution), les représentants de la masse des obligataires (qui ont une voix de nature consultative) 2) Le droit de vote est libre Le droit de vote est en principe libre, les cessions de droit de vote sont nulles (aucun actionnaire ne peut acheter, vendre ou donner son droit de vote). Ces dernières font l’objet d’un délit particulier dans les SA, celui de trafic de droit de vote. Toutefois, la jurisprudence a reconnu la validité de certains accords entre actionnaires qui visent à renoncer à un droit de vote libre. Ces accords portent en général le nom de pactes d’actionnaires. Ces pactes sont valides à trois conditions : - Ils doivent être temporaires - Ils doivent respecter l’intérêt social de la SA - Le pacte ne peut avoir un droit financier comme seule contrepartie En principe, la violation d’un tel pacte donne lieu seulement au versement de dommages et int aux autres membres de l’accord. Toutefois, la jurisprudence a aussi reconnu la possibilité d’obtenir la nullité des décisions prises dans le cadre du pacte. Attention : la liberté de droit de vote ne doit pas conduire à des abus : majorité, minorité 3) Le droit de vote est proportionnel au nb d’actions détenues Toute clause contraire des statuts est réputée non écrite. Exceptions : - Les SS peuvent limiter le nb de titres possédés par une seule personne - Des actions peuvent être crées sans droit de vote - Des actions peuvent être crées avec un droit de vote double. Elles ne sont valables que sous certaines conditions : o Action nominative o Détenue par la même personne depuis plus de 2 ans o Intégralement libérée C) L’exercice du droit de vote en assemblée 1) Organes compétents pour convoquer les AG Une AG est en principe convoquée par le CA/directoire. Par exception, peuvent également convoquer l’AG - Le CS - Le CAC - Un mandataire ad hoc désigné en justice par la voie des référés à la demande de tout intéressé en cas d’urgence ou à la demande de tout actionnaire (ou groupe) détenant au moins 5% du capital social, du CSE - Un administrateur provisoire - Un liquidateur 2) Modalités de convocation des AG Dans les SA qui n’offrent pas leurs titres au public, la convocation se fait par courrier simple ou courrier électronique. Dans les SA qui offrent leur titre au public, un avis de convocation est publié au BALO au moins 35 jours avant l’AG ainsi que dans des journaux spécialisés. Des courriers simples ou électroniques peuvent être adressés aux détenteurs d’actions nominatives. Un délai de 15 jours doit être respecté entre l’avis de convocation et la tenue de l’AG, 6 jours pour une 2nde convocation. La convocation doit obligatoirement comporter l’identification de la société (forme, appellation, capital) ainsi que le lieu, jour et heure de l’AG. L’ordre du jour approximatif doit être mentionné. 3) Ordre du jour de la SA Ce dernier est défini par l’organe qui convoque l’AG. Les actionnaires peuvent aussi demander l’inscription de questions à l’ordre du jour, sous réserve de détenir au moins 5% du capital social (seuil progressivement abaissé pour les SA dont le capital social est supérieur à 750 000 euros). Le CSE peut également requérir l’inscription de questions à l’ordre du jour. En tout état de cause, les projets de résolution doivent parvenir à la SA au moins 25 jours à l’avance. Attention : une convocation à l’AG irrégulière peut conduire à la nullité de l’assemblée, facultative si l’irrégularité porte sur les modalités de convocation, obligatoire si elle porte sur l’ordre du jour. 4) Lieu de réunion des AG En principe, l’AG se tient au siège social de la SA. Les statuts peuvent permettre une dérogation quant au lieu de l’AG 5) Tenue de l’AG a) Présence des actionnaires En principe, un actionnaire doit se présenter personnellement à l’AG. Des exceptions sont possibles : - L’actionnaire peut être représenté par son conjoint, par un autre actionnaire - L’actionnaire peut envoyer un « pouvoir en blanc » à la SA, qui donne au président de l’AG l’autorisation de prendre toute décision dans l’intérêt de la SA - La visioconférence est envisageable. Elle doit être autorisée dans les statuts. Les modalités techniques doivent garantir l’identification de l’actionnaire ainsi qu’une retransmission en simultané des débats. b) Déroulement de l’assemblée Au début de l’AG, les actionnaires doivent signer la feuille de présence. Celle-ci est obligatoire sous peine de nullité. L’AG constitue ensuite un bureau qui comporte le président de l’AG, au moins deux scrutateurs (qui surveillent le président) ainsi qu’un secrétaire. L’ordre du jour est ensuite étudié point par point. Une session de questions diverses est réservée pour la fin de l’AG. L’assemblée se termine alors, et un PV doit être établi et déposé au greffe du tribunal de commerce, accompagnés d’autres documents tel que les comptes annuels approuvés préalablement. D) L’exercice du droit de vote en AG : règles spécifiques aux AGO E) L’exercice du droit de vote en AG : règles spécifiques aux AGE Voir annexe 2 F) L’exercice du droit de vote en AG : règles spécifiques aux assemblées générales constitutives (AGC) L’AGC a pour rôle de constater que le capital social est entièrement souscrit et que les apports sont libérés selon le minimum légal et statutaire. Elle va alors approuver les statuts de la SA nouvellement créer, et nommer les premiers dirigeants et CAC. L’AGC est convoquée par les fondateurs de la SA 8 jours au moins après délivrance du certificat de dépôt des fonds. Elle se prononce selon les modalités de majorité et quorum d’une AGE. Suite à l’AGC, les formalités d’immatriculation peuvent se poursuivre. G) L’exercice du droit de vote en AG : règles spécifiques aux assemblées générales spéciales (AGS) Une AGS réunit les titulaires de droits spécifiques (ex : détenteurs de droit de vote double, d’obligations de la SA,…). Une AGS est convoquée pour ratifier les décisions d’AGO ou AGE qui modifient les droits des titulaires de ces titres spéciaux. Ex : une AGS peut être convoquée pour confirmer la décision de supprimer toute action à droit de vote double dans la SA Les règles de majorité applicables en AGS sont celles des AGE. Le quorum est renforcé : il est de 1/3 des titres spéciaux sur 1ère convocation, 1/5 sur 2ème convocation. II) Droits financiers et patrimoniaux des actionnaires de la SA A) Droits financiers Voir annexe 3 B) Droits patrimoniaux 1) Le principe : les actions sont librement cessibles En principe, les actions peuvent être librement cédées ou transmises à cause de mort. Réciproquement, un actionnaire peut librement refuser de céder ses actions. 2) Les exceptions : clauses d’agrément, clauses de préemption ou clauses de rachat forcé Voir annexe 4 3) Le formalisme des cessions d’actions Une cession d’action est un contrat soumis aux conditions habituelles de formation des contrats (consentement, contenu licite et certain,…). En principe c’est un contrat qui relève du droit civil. Par exception, il relèvera du droit commercial s’il s’agit de céder à une personne le contrôle de la SA (ex : rendre une personne majoritaire en lui cédant ses actions). Une cession d’actions est beaucoup moins formelle qu’une cession de parts sociales. Ainsi, aucun écrit n’est exigé. En pratique un ordre de mouvement sera établi mais n’est pas impératif. Celui-ci indique la date de cession, la nature des actions cédées… Par ailleurs, aucune publicité n’est en principe imposée 4) Les garanties liées à la cession Il peut s’agir de garanties ordinaires applicables à tout contrat de vente : garantie contre l’éviction, contre les vices cachés, lésion (ex : dans le cadre d’une curatelle)… Une garantie optionnelle peut également être insérée : la clause de garantie de passif. Par cette clause, le cédant garantit l’exactitude du bilan comptable à partir duquel le prix des actions a été fixé. Il prend l’engagement de payer sa part des dettes qui ne figurent pas dans le bilan mais dont l’origine est antérieure à la cession. Le bénéficiaire de la clause peut être soit le cessionnaire soit directement la SA. 5) Le droit de nantir les actions L’actionnaire d’une SA peut nantir ses actions, pour garantir un emprunt par exemple. Il doit alors remplir une déclaration signée et virer les titres nantis sur un compte spécial bloqué. Pendant la durée du nantissement, le constituant demeure actionnaire et propriétaire des titres. Son créancier peut s’opposer au transfert des titres sur un autre compte que le compte bloqué. A défaut du paiement de la ou des dettes garanties, le créancier peut réaliser le nantissement. Si les titres sont cotés, ils doivent être vendus en bourse. Dans le cas contraire, le créancier peut soit les vendre soit se les approprier. 6) Le droit de louer les actions a) Conditions de validité Il existe des conditions de fond : - La mise en location n’est possible que pour les actions qui ne sont pas côtés en Bourse. - Seules les personnes physiques peuvent louer des titres - Les statuts de la SA doivent autoriser la possibilité de louer Sur la forme, le contrat de location est écrit et doit comprendre certains mentions : identification des titres loués, identification des parties, durée de location… L’acte de location doit être signifié par acte d’huissier ou accepté par la SA dans un acte authentique. b) Régime juridique de location En principe, le locataire vote en AGO et le bailleur en AGE. Par ailleurs, le dividende éventuel revient au locataire.