INTOXICATIONS ALIMENTAIRES intoxications alimentaires d’origine microbienne intoxications alimentaires d’origine non microbienne intoxications par les champignons 1 INTOXICATIONS D’ORIGINE MICROBIENNE Caractéristiques des intoxications alimentaires • • • • • intoxications pratiquement toujours collectives principalement toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) grande fréquence (0,1 à 1 par personne et par an) avec en France, 8.000 malades/an déclarés (600 foyers) mais nombre réel beaucoup plus élevé (2.000.000/an ?) incidence sociale et économique agents infectieux responsables peu nombreux – – – – – – salmonelles staphylocoques clostridium perf. listériose botulisme camphylobacter 50% des cas de TIAC en France 10 – 20% 10 – 20% 300 cas/an 20 cas/an majeur aux USA (50% des TIAC) mais pas en France 2 Caractéristiques des intoxications alimentaires • • • • • • problème d’hygiène fréquent (aliments souillés, cuisson insuffisante, conservation incorrecte, rupture de la chaine du froid…) signes gastro-intestinaux prédominants mais pas forcément uniques (symptomatologie neurologie du botulisme) tableau clinique souvent aigu avec des signes digestifs très marqués (douleurs gastriques, vomissements, diarrhées) mais généralement rapidement régressifs délai d’apparition des symptômes relativement bref (quelques heures) évolution le plus souvent favorable, sans séquelle 500 décès/an probables en France 3 Conduite à tenir devant une TIAC (généralités) • prise en charge thérapeutique – – – – – • • • réhydratation hydro-électrolytique mesures diététiques (éliminer les produits stimulant le péristaltisme intestinal) anti diarrhéiques (lopéramide) traitement anti-infectieux (antibiothérapie) assistance médicale si besoin (détresse respiratoire, syncope cardiaque…) conserver soigneusement les restes alimentaires pour aider à l’identification de l’agent causal questionner la victime et/ou l’entourage (nature de l’aliment suspecté ? quantité ingérée ? mode de cuisson et/ou de conservation ? heure d’ingestion ? nature et évolution des symptômes ?...) différencier les genres de TIAC – intoxication par une toxine bactérienne (exotoxine) présente dans les aliments, la bactérie pouvant être tuée (intoxination) (ex. botulisme, staphylocoques) – intoxication par ingestion de bactéries qui se multiplient in vivo en libérant une toxine (endotoxine) (ex. salmonelles, streptocoques) – ingestion massive de bactéries et de toxines présentes dans l’aliment 4 Salmonelles • • toxi-infection typique nécessitant l’ingestion d’un aliment contenant un grand nombre de bactéries vivantes cause de TIAC les plus fréquentes : 4.000 cas/an déclarés en France (50% des TIAC) mais probablement 10 à 100 fois plus réellement Agent causal • • bactéries du genre Salmonella entérobactéries G-, non sporulées, très virulentes, sécrétant des toxines (endotoxines) thermostables (difficilement détruites par la cuisson) – S. enteridis (volaille, œufs) – S. typhimurium (viande bovine, volaille) • en cause également, bactéries du genre Shigella 5 Origine de l’intoxication • • • • • • œufs et produits à base d’œuf cru (mayonnaise, mousse au chocolat…) viandes hachées (contamination lors de la préparation) viandes de volaille contaminées (cuisson insuffisante) poissons et fruits de mer fromages crus et laitages eau contaminée NB - Il s’agit en général d’aliments mal conservés (t>6°C) et crus (ou mal cuits), souvent contaminés par les manipulateurs (contamination fécale) surtout fréquente en période estivale 6 Symptômes • • • • • • • incubation de durée variable, assez longue, en moyenne 6 à 24 h après l’ingestion (durée correspondant à la multiplication bactérienne qui rend parfois difficile l’identification de l’aliment responsable) incubation parfois réduite à quelques heures en cas d’ingestion massive troubles gastro-intestinaux d’apparition brutale : douleurs abdominales, vomissements abondants, diarrhée à odeur fétide (non sanglante) risque de déshydratation (personnes âgées, nourrissons) céphalées fièvre élevée (39 – 40°C) identification possible du germe par coproculture (délai) ou recherche d’anticorps dans le sang 7 Traitement • • • • • • • pronostic généralement favorable avec guérison en 3 à 5 jours (parfois 8) traitement symptomatique essentiel : réhydratation et compensation des pertes hydro-électrolytiques antibiothérapie discutée (antibio-résistances fréquentes, affaiblissement des barrières intestinales) mais donnant néanmoins de bons résultats dans des cas compliqués (fluoroquinolones) corticoïdes en cas d’état de choc risque de complications (septicémie, endocardite, méningite) chez les personnes affaiblies convalescence avec diététique adaptée (diminution du bol intestinal) prophylaxie indispensable : contrôle vétérinaire, inspection des denrées alimentaires, bonne cuisson des aliments, hygiène dans la préparation des repas collectifs 8 Clostridium perfringens • 2ème cause de TIAC en France (1.500 cas/an déclarés) lié essentiellement à la restauration collective Agent causal • • • • bactérie G+ immobile, anaérobie, sulfito-réductrice spores résistantes à la cuisson (100°C 1h) entérotoxine protéique libérée lors de la sporulation bactérie normalement présente dans l’intestin et dans les sols Origine de l’intoxication • • viandes en sauce de collectivité (langue, pot-au feu…) les spores viennent de l’intestin de l’animal, passent dans la viande et la cuisson active la spore qui, si le refroidissement est lent, se multiplie très vite (problème des viandes préparée à l’avance, mal refroidies et consommées tardivement) 9 Symptômes • • • • • • incubation assez courte, en général 10 à 12 h après ingestion (8 à 16 h maximum) douleurs abdominales diarrhée violente, parfois sanglante parfois signe alarmant d’ileus paralytique (paralysie du péristaltisme) pas de fièvre, ni de vomissement identification de l’agent bactérien dans les selles mais surtout dans l’aliment Traitement • • • évolution spontanée favorable guérison spontanée rapide (12 à 24 h) sans traitement prophylaxie : consommation immédiate de la viande après cuisson, refroidissement rapide ou maintien au chaud 10 Staphylocoques • • • toxi-infection fréquente 1.000 cas/an déclarés en France intoxination due non pas aux staphylocoques mais à l’entérotoxine staphylococcique très active et thermorésistante (30 mn à 100°C) agent causal : Staphylococcus aureus Origine de l’intoxication • • • origine variable avec de nombreuses denrées alimentaires incriminées (crème, glace, pâtisserie, charcuterie, salade composée, viande hachée…) préparées, manipulées et contaminées par le cuisinier porteur d’une staphylococcie cutanée (panaris, furoncles) ou rhinopharyngée fromages au lait cru (brebis, chèvre atteintes de mammite staphylococcique) pic d’incidence en période estivale 11 Symptômes • • • • incubation très brève, en moyenne 2 h (30 mn à 6 h), souvent collective (« maladie des banquets ») vomissements précoces brutaux, violents, incoercibles suivis d’une diarrhée indolore et abondante absence de fièvre état de choc possible par déshydratation Traitement • • • • guérison généralement rapide (12 – 24 h) traitement symptomatique généralement suffisant (réhydratation, reconstitution de l’équilibre hydro-électrolytique) antibiothérapie si personne à risque (jeune enfant, personne âgée) ou contamination massive par aliment non cuit prophylaxie : hygiène en cuisine (propreté des mains, gants, coiffe et masque), cuisson suffisante, réfrigération rapide, absence de recongélation 12 Bacillus cereus • • intoxication dite « du restaurant chinois » fréquence faible en France (quelques cas/an) mais élevée dans certains pays (Hollande, Finlande, Hongrie) Agent causal • • Bacillus cereus bactérie aérobie G+, sporulée thermorésistante produisant 2 toxines différentes – une toxine émétisante très thermostable (plus de 130°C) Bc-vom – une entérotoxine « diarrhéigène » très thermosensible Bc-diar 13 Origine de l’intoxication • • • Bacillus cereus est un germe tellurique dont les spores sont très répandues (végétaux, épices…) Bc-vom : riz du restaurant chinois qui peut contenir la toxine émétisante (la cuisson ne tue pas les spores surtout en cas de grandes quantités) Bc-diar : viandes épicées, riz, céréales, légumes… Symptômes • • Bc-vom : incubation très courte (2 h) et vomissements incoercibles Bc-diar : incubation 8 à 16 h et diarrhée abondante avec douleurs abdominales violentes Traitement • • guérison spontanée rapide (12 – 24 h) prophylaxie : lavage soigneux des denrées, consommation immédiate après 14 cuisson (riz et autres plats) ou refroidissement rapide Botulisme • • • • toxi-infection typique à symptômes nerveux fréquence rare : 20 à 40 cas/an déclarés en France (moins de 5 décès) intoxication toujours potentiellement grave intoxication beaucoup plus fréquente dans certains populations (Inuits) Agent causal • • • • Clostridium botulinum bacille anaérobie G+, à spores très résistantes à la chaleur germe tellurique présents dans les milieux naturels (mares, eaux stagnantes…) et l’intestin de nombreux animaux (porc en particulier) sécrète une neurotoxine thermolabile très active (molécule la plus toxique connue) à effet anticholinestérasique et curarisant (paralysie flasque par blocage de la sécrétion d’acétylcholine pré-synaptique) 15 • existence de plusieurs souches de bacille botulique – souches A et B les plus fréquentes dans les cas de botulisme humain (A très grave) – souches C et D dans les cas de botulisme animal – souche E isolée dans des poissons et crustacés (pays nordiques) – souche F trouvée en Amérique du Nord – souche G • identification de la souche botulinique – identification du germe dans les aliments, selles ou vomissements du malade – diagnostic expérimental (toxinotypie botulinique) : séroprotection de souris auxquelles est administré un extrait d’aliment suspect neutralisé par adjonction de sérums spécifiques antitoxine A, B, C… 16 Origine de l’intoxication • • • • • • • conserves « familiales » mal stérilisées de denrées animales (pâté, gibier, viande de porc…) ou végétales (haricots, asperges…) contaminées (les aliments sont rarement modifiés dans leur aspect mais les conserves présentent une odeur de fermentation butyrique à l’ouverture) conserves industrielles très rarement concernées jambon artisanal cru, salé ou fumé dans 80% des cas déclarés (tâches grismarron à proximité de l’os, odeur butyrique) poissons séchés ou fumés risque potentiel avec tous les produits « sous vide » miel (botulisme infantile très répandu aux USA sloppy baby) NB – Clostridium botulinum est un bacille anaérobie sporulé dont la spore est très thermorésistante (120°C pendant 3 mn) mais la toxine thermosensible d’où des intoxications suite à l’ingestion de denrées crues (jambons salés) ou de conserves artisanales mal préparées 17 Symptômes • • • • • • • • • incubation silencieuse en moyenne de 12 à 24 h mais pouvant aller jusqu’à 2 à 8 jours (plus l’incubation est courte, plus l’atteinte est grave) apparition de vomissements et douleurs abdominales, diarrhée modérée troubles neuroparalytiques d’apparition brutale (paralysies motrices et sécrétoires) troubles de l’accommodation les 1ers à apparaître : paralysie oculaire bilatérale (atteinte des nerfs moteurs avec diplopie, vue trouble, mydriase) troubles des sécrétions : sécheresse de la bouche, de la gorge troubles de la parole et de la déglutition (paralysies œsophagiennes) constipation (paralysie intestinale) dégradation progressive de l’état général du malade (évolution neurologique parfois très rapide) pronostic gravissime : risque mortel par paralysie respiratoire ou fausse route (atteinte motrice du pharynx et paralysie du diaphragme) 18 Traitement • • • • • • traitement symptomatique essentiel (lutte contre la déshydratation, contre l’état de choc, contre les vomissements) ventilation mécanique (assistance respiratoire, oxygénothérapie) indispensable pendant plusieurs semaines en milieu de soins intensifs sérothérapie anti-botulique précoce (au départ sérum polyvalent puis sérum spécifique après identification de la souche en cause) convalescence longue (plusieurs semaines) avec fatigue, essoufflement situation d’urgence sanitaire en cas de dépistage d’un cas de botulisme (maladie à déclaration obligatoire, identification de la cause, traitement des individus potentiellement touchés) prophylaxie : préparation adaptée des aliments (cuisson pour détruire la toxine, conservation au froid pour inhiber la prolifération bactérienne) 19 Listériose • • zoonose rare autrefois (sujets en contact avec les animaux) maladie très médiatisée, assez fréquente (quelques centaines de cas/an en France) parfois grave, liée à une contamination alimentaire Agent causal • • Listeria monocytogenes bacille G+ mobile, non sporulé, résistant bien au chaud et au froid (pasteurisation limite, multiplication au froid) 20 Origine de l’intoxication • • • • • • • germe ubiquiste très présent dans l’environnement (sol, eau, végétaux, animaux…) aliments crus en cause (pas de listéria dans les aliments cuits) fromages à pâte molle, lait cru charcuterie (rillettes, pâtés, foie gras…) crudités (choux) poissons fumés, coquillages crus, surimi origine des contaminations – – – – contamination de l’animal (lait) fabrication du produit (personnel, surfaces) stockage (rupture de la chaîne du froid) chez les consommateurs (réfrigérateurs contaminés) 21 Symptômes • • • • • germe opportuniste qui affecte surtout les individus fragiles incubation variable (quelques jours à quelques semaines) immunodéprimés et personnes âgées (75% des cas) : risque de septicémie, méningite ou encéphalite fébrile (mortalité environ 30%) femmes enceintes (25% des cas) : pseudo-grippe légère, fièvre modérée mais risque d’avortements spontanés et, chez le nouveau-né, d’une septicémie précoce ou d’une méningite tardive diagnostic par hémoculture Traitement • • antibiothérapie (amoxicilline + gentamycine) à forte dose et prolongée prophylaxie : – – – – – prévention des personnes à risque cuisson des aliments d’origine animale lavage des légumes et herbes aromatiques enlever la croute des fromages hygiène, respect de la chaîne du froid 22 Escherichia coli • • • • • • • • • • germe très banal, normalement non pathogène, présent en grand nombre dans l’intestin de tous les animaux (indicateur de contamination fécale) plusieurs souches pathogènes pour l’homme et l’animal E. coli entérotoxigénique (ETEC) cause principale de TIAC « diarrhée du voyageur » (« turista ») dans certains pays infection par l’eau contaminée par des selles, légumes mal lavés, glaces, fromages incubation 10 à 15 h suivie de diarrhées aqueuses aiguës avec douleurs abdominales, nausées, céphalée, vomissements conduisant à une déshydratation (enfant de moins de 3 ans) guérison spontanée et 3 à 4 jours réhydratation orale nécessaire prophylaxie : consommation exclusive d’eau traitée (hydroclonazone), bouillie ou en bouteille scellée, pas de légume cru, pas de glace artisanale23 E. coli O157:H7 • • • • souche de grande actualité responsable de plusieurs épidémies récentes (Ecosse 1997 : 500 cas, 18 morts; USA : environ 70.000 cas/an et 70 morts/an) mais pas de grande épidémie de type TIAC en France contamination essentiellement par steak haché bovin mal cuit , fromage au lait cru, mayonnaise, eau… maladie : syndrome hémolytique urémique (SHU) de type dysenterie ou colite hémorragique compliquée (10% des cas) d’une néphrite aiguë et d’une anémie hémolytique prophylaxie : hygiène (abattoir, préparation, cuisine), cuisson correcte 24 Camphylobacter • • • • • • • germes responsables de la majorité des entérites bactérienne dans le monde (50% des entérites aux USA soit environ 2,5 millions de cas/an) infection rare en France (environ 5% des entérites) incubation 2 à 7 jours puis diarrhée brutale, sanglante et fébrile accompagnée de douleurs abdominales persistance des symptômes en moyenne 2 à 7 jours mais parfois jusqu’à 3 semaines guérison spontanée sauf très jeune enfant et immunodéprimé antibiothérapie par fluoroquinolone (ciprofloxacine) si besoin contamination par les viandes de volaille (pas assez cuites), lait cru, eau 25 INTOXICATIONS D’ORIGINE NON MICROBIENNE intoxication par les produits de dégradation des aliments • • • • • • • distinguer du cas de certains aliments (fromages à pâte molle, vin, gibier…) contenant des amines (tyramine, histamine) pouvant entrainer des migraines et accidents chez certains individus traités par IMAO intoxication par des produits de dégradation (normale ou bactérienne) d’aliments de nature protéique (viande, poisson) conduisant, par décarboxylation des acides aminés, à la formation d’histamine thermostable aliment le plus souvent en cause : le thon et d’un façon générale tous les scombridés (maquereau, sardine, espadon…) même en conserve la chair de thon renferme environ 2% d’histidine libre qui, si le poisson est mal vidé, insuffisamment saigné et non réfrigéré immédiatement, donne de l’histamine incubation très brève (30 mn à 2 h) puis vasodilatation de la face et du cou (« bouffée de chaleur »), vertiges, céphalées, palpitations, parfois hypotension artérielle et choc anaphylactique troubles digestifs bénins (nausées, vomissements, diarrhée) et tardifs (environ 4 h après l’ingestion) 26 administration d’antihistaminiques, guérison rapide intoxication par les moules (mytilisme) • • • • • • • intoxication rare due à une neurotoxine (mytilitoxine) résistante à la chaleur (donc à la cuisson) présente dans l’hépatopancréas de certains flagellés du plancton marin (dinoflagellés) qui ont été absorbés par les moules intoxication par les moules mais aussi la plupart des coquillages filtreurs (huitres, palourdes…) symptômes très précoces après l’ingestion (quelques heures) le plus souvent, mytilisme digestif bénin avec troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhée) d’évolution spontanée favorable parfois mytilisme neuroparalysant avec paresthésies des extrémités (engourdissement des doigts), céphalées, troubles digestifs intenses, paralysie des membres et des muscles respiratoires (risque mortel) à l’origine, moules provenant de points où abondent germes et matières organiques dans l’eau, d’où moules sauvages le plus souvent différencier le mytilisme des accidents allergiques fréquents et bénins (intolérance digestive, éruption cutanée) rencontrés avec les moules 27 • intoxication par le fugu (tétraodon) renfermant une neurotoxine (tétradotoxine) stockée dans le foie et les gonades – toxine redoutable provoquant une paralysie générale (blocage de la transmission synaptique) – accidents rares au Japon mais non exceptionnels avec une forte mortalité (60 à 70% de décès) – symptômes très rapides (5 à 30 mn) avec paresthésies, anesthésie locale, engourdissement des extrémités, céphalées et paralysie ascendant mortelle par arrêt respiratoire • intoxication par la ciguatera (Antilles, Polynésie) due à l’ingestion de poissons contaminés par une toxine (ciguatoxine) élaborée par certaines algues dinoflagellées – symptômes avec signes digestifs (nausées, vomissements), cutanés (prurit), cardio-vasculaires (hypotension, troubles du rythme) et surtout neurologiques (paresthésies, myalgies, hallucinations) – mortalité rare mais persistance plusieurs mois des paresthésies, prurit, myalgies, asthénie 28 intoxication par l’alcool éthylique • • intoxication fréquente, souvent bénigne mais potentiellement grave, donc toujours à prendre « au sérieux » manifestations variables selon – la quantité d’alcool ingérée • quantité d’alcool (g) = [volume liquide (ml) x degré alcoolique (%)] / (100 x 0,8) • alcoolémie (g/l) = quantité d’alcool (g) / [poids (kg) x facteur individuel] (0,7 homme ; 0,6 femme ; 0,5 enfant) • 1 verre standard de boisson alcoolisée = 10 g d’alcool éthylique • ex. homme de 70 kg absorbant 3 bières (5% vol.) : alcoolémie 0,8 g/l – l’individu (âge, poids, sexe, accoutumance, jeune alimentaire) 29 intoxication par l’alcool éthylique • 3 circonstances particulièrement dangereuses – individu dénutri, sujet à jeun – absorption massive et rapide – enfant • pic sanguin d’alcoolémie atteint en 30 à 45 mn après l’ingestion (plus en cours de repas) et décroissance au rythme moyen de 0,12 à 0,15 g/l par heure 30 Alcoolémie g/l Stade Symptômes Infraclinique Atteinte modérée du contrôle moteur Euphorie Levée des inhibitions Atteinte motrice Troubles de la coordination et vigilance Augmentation des temps de réaction Mésestimation distances - vitesse Ébriété Excitation, perte du jugement critique Surestimation des capacités Troubles de vigilance, mémoire et perception (vision, audition) Incoordination motrice Ivresse Troubles neurosensoriels Augmentation du seuil à la douleur Nette incoordination motrice Début de confusion mentale Stupeur Perte des fonctions motrices, somnolence Vomissements, incontinence Hyperthermie, (hypoglycémie) 3,5 – 5,0 Coma Inconscience, anesthésie Hyporéflexie, hypothermie, Mydriase, (hypoglycémie) 4,0 – 6,0 Mort Dépression respiratoire 0,1 – 0,3 0,3 – 1,0 0,9 – 2,0 1,5 – 3,0 2,5 – 4,0 31 Symptômes de l’intoxication alcoolique aiguë (ivresse) • 3 phases successives – phase d’excitation dans la parole et les gestes, euphorie – phase d’incoordination avec des troubles de l’équilibre, incohérence des propos, troubles visuels, perte de contrôle – phase comateuse avec coma profond, calme, hypotonique avec hypothermie centrale et polyurie (déshydratation intra et extra cellulaire) – chez l’enfant, risque de convulsions précédant le coma et hypoglycémie • points cliniques importants à surveiller – insuffisance respiratoire aiguë fréquente (dépression centrale, encombrement mécanique des voies respiratoires, désaturation oxyhémoglobinée) – acidose métabolique (accumulation d’acide lactique) – collapsus cardio-vasculaire (par dépression centrale et myocardique aggravée par l’acidose et l’hypoxie) – hypothermie fréquente et parfois extrême – hypoglycémie plus ou moins tardive (6 à 12 h) surtout chez l’enfant et l’individu dénutri (coma hypertonique, convulsions, Babinsky bilatéral) • • diagnostic précoce essentiel et facile (alcootest) ne jamais laisser un intoxiqué seul, sans surveillance, même si le tableau clinique semble satisfaisant 32 Traitement • avant tout traitement, nécessité – d’évaluer l’alcoolémie (théorique et réelle) – d’estimer l’état clinique de l’individu (respiratoire, cardio-vasculaire, neurologique) – de rechercher une possible poly-intoxication • traitement strictement symptomatique à entreprendre dans les plus brefs délais selon le tableau (coma) – réanimation respiratoire et cardio-vasculaire – traitement du collapsus (remplissage) avec correction de l’acidose (sérum bicarbonaté), de l’hypoglycémie (glucose) – réchauffage progressif – si agitation, administration prudente de benzodiazépine – antibiothérapie si inhalation bronchique et risque de syndrome pulmonaire infectieux • traitement épurateur par ventilation artificielle (nécessaire en raison du risque respiratoire) et, dans les cas graves, épuration extra-rénale 33 Autres sources d’intoxications alimentaires non microbiennes • thé et café – toxicité liée à la présence de caféine (alcaloïde psychostimulant, diurétique, inotrope) – intoxications accidentelles par surdosage – après ingestion, pic plasmatique en 30 à 60 mn – symptômes • digestifs (nausées, vomissements, parfois hémorragies digestives) • cardio-vasculaires (tachycardie, hypertension avec risques d’extrasystoles, fibrillation ventriculaire, arythmie) • respiratoires (tachypnée puis bradypnée, bronchodilatation) • neurologiques (excitation, insomnie, délire, céphalées, convulsions) • hématologiques (hyperleucocytose) • métaboliques (hyperkaliémie, hyponatrémie, déshydratation) – traitement symptomatique – dose létale adulte : 5 à 10 g de caféine mais des intoxications sévères ont été signalées dès 1 g (absence de relation dose-effet) – 1 tasse de café = 40 à 200 mg caféine ; 33 cl coca = 50 mg caféine 34 • boissons contenant de la glycyrrhizine – principe actif de la réglisse connu comme édulcorant – agit par inhibition de la 11 beta hydroxystéroïde déshydrogénase au niveau rénal entrainant un syndrome d’hyperaldostéronisme (syndrome de Conn) avec hypertension artérielle, hypokaliémie – risque principalement chez des personnes souffrant d’hypertension – glycyrrhizine (exhausteur de goût) présente dans des gommes à mâcher à base de réglisse et dans certaines boissons (apéritifs anisés sans alcool) – traitement : arrêt immédiat de l’agent causal et, si besoin, administration de sels de potassium et de calcium • lait – syndrome des buveurs de lait (syndrome de Burnett) par ingestion prolongée massive – insuffisance rénale hyperazotémique et hypercalcémie potentiellement responsable d’une lithiase rénale (néphrocalcinose) – arrêt immédiat de tout apport lacté 35 • plantes à hétérosides cyanogénétiques – cas des graines de certaines plantes (amandes amères, amandes des noyaux de fruits charnus – pêche, abricot) renfermant des hétérosides cyanogénétiques – intoxication cyanhydrique potentielle mais exceptionnelle (nécessité d’une ingestion d’une dose importante d’amandes) – effet anoxiant (liaison de l’ion cyanure au fer ferrique de la cytochrome oxydase et blocage de la chaîne respiratoire mitochondriale) – signes cliniques : céphalées, vertiges, vertiges, confusion, dyspnée ample et profonde, perte de connaissance – traitement d’urgence • surveillance médicale, oxygénothérapie • traitement de l’acidose métabolique (acidose lactique) • traitement antidotique : hydroxocobalamine (Cyanokit®) • plantes renfermant de l’acide oxalique – accident par consommation exagérée de plantes contenant de l’acide oxalique tels que oseille ou rhubarbe (1 à 10 g/kg plante) – intoxication exceptionnelle (dose toxique de l’ordre de 20 à 30 g) – risque chez les jeunes enfants et les insuffisants rénaux – signes toxiques nerveux (convulsions, tétanie, paralysie), sanguins (troubles de la coagulation), rénaux (dépôts d’oxalate de calcium) 36 – traitement évacuateur précoce et perfusion IV de gluconate de calcium • plantes renfermant des substances irritantes – plantes utilisées pour stimuler l’appétit ou aromates – noix de muscade • épice et aromate utilisé dans l’alimentation • renferme plusieurs alcaloïdes dont la myristicine très toxique (dose toxique 5 à 20 g) • irritation précoce des voies digestives (nausées, vomissements, diarrhées) puis dans les 24 h qui suivent • mydriase, angoisse, tachycardie (risque de collapsus cardio-vasculaire) • effets psychotropes (sédation ou délire hallucinatoire) – épices (poivre, ail…) irritants digestifs à forte dose • plantes renfermant de la solanine – intoxication due à un problème de maturation de plantes solanacées (tomates pas mûres, pommes de terre germées) – solanine : alcaloïde parasympatholytique – intoxication atropinique • • • • sécheresse de la bouche et des muqueuses, troubles de la parole, rougeur mydriase hyperthermie troubles psychiques 37 • mycotoxines – contaminants naturels sécrétés par des moisissures se développant au cours d’un stockage défectueux de fruits ou légumes – problème alimentaire majeur (contamination de 25% de la production végétale mondiale, surtout dans les pays en voie de développement) – très grande diversité des molécules et des activités toxiques – toxines neurotropes : patuline dans les céréales, fromages, fruits (pommes), responsable en chronique de troubles nerveux (effet anti-cholinestérase), lymphopénie, effet cancérogène chez l’animal – toxines hématotropes : trichotécènes omniprésents dans les aliments céréaliers, donnant des intoxications aiguës dans les troupeaux mais potentiellement mutagènes, cancérogènes et immunosuppresseurs – toxines néphrotropes : ochratoxines responsables de la néphropathie endémique des Balkans – toxines hépatotropes : aflatoxine (synthétisées par Aspergillus flavus) dans les arachides mal conservées, hépatotoxique, immunotoxique, cancérogène reconnu chez l’homme (cancer du foie en Afrique) 38 • glutamate – glutamate monosodique utilisé comme condiment dans la restauration asiatique (sauce, soupe) – neuromédiateur à effet acétylcholine like chez des individus à jeun et présentant une susceptibilité individuelle – « syndrome du restaurant chinois » – incubation très courte (15 à 30 mn) puis apparition de signes plus ou moins marqués • • • • • • paresthésies, sensations de fourmillements (visage, muscles temporaux…) sensations de brûlures au niveau du tronc bouffées de chaleur, céphalées nausées, vomissements lipothymie parfois crise d’asthme retardé (plus de 10 h après) – traitement symptomatique, anti-cholinergique • métaux lourds – plomb (saturnisme hydrique) – cadmium et mercure (poissons) – etc… 39 • nitrates, nitrites et nitrosamines – pollution par les engrais agricoles (limite nitrates 50 mg/l dans l’eau de boisson) – faible toxicité propre des nitrates mais risque lié aux dérivés – nitrites utilisés additifs alimentaires (nitrite de K E249, nitrite de NA E250) pour développer et fixer la couleur rouge des produits carnés (formation de nitrosomyoglobine) – risque de méthémoglobinémie chez le nourrisson – in vivo, formation de nitrosamines cancérogènes (cancer œsophage et estomac) • anabolisants – tous interdits dans l’UE mais autorisés aux USA pour la plupart – diéthylstilbestrol (DES) : œstrogène synthétique, cancer du col de l’utérus – β-agonistes (clembutérol) : activation de production de muscle, cardiotoxique • résidus antiparasitaires – • organochlorés interdits (DDT) résidus de médicaments tranquillisants – acépromazine (porcs) • résidus d’antibiotiques (additifs à l’alimentation animale) – sélection possible de bactéries antibiorésistantes 40 INTOXICATIONS PAR LES CHAMPIGNONS • • • • • • source d’intoxications relativement fréquentes (200 à 300 cas/an en France) mais surtout nombre important d’appels aux CAP intoxications parfois mortelles (quelques cas/an presque tous dus à l’amanite phalloïde) cause : confusion avec des espèces comestibles et/ou utilisation de notions empiriques ou traditionnelles de reconnaissance intoxications souvent collectives, saisonnières (juillet à novembre) et dont le pronostic est fonction du champignon responsable (importance de l’identification) en France, 20 à 30 espèces de champignons réellement dangereux 41 Recommandations générales • • • • • • • • • ne consommer que des champignons parfaitement connus et identifiés (rôle d’éducateur du pharmacien) ne jamais faire une identification sur un champignon incomplet se méfier des identifications sur photo faire l’identification sur l’ensemble de la cueillette (et non pas quelques spécimens) jeter les champignons douteux ou dangereux éviter les champignons âgés ne pas consommer de champignons crus laver soigneusement les champignons et faire une double cuisson en cas de suspicion d’intoxication fongique, poser les bonnes questions : – – – – nature et délai d’apparition des symptômes ? quantité consommée ? mode de cuisson ? prise unique ou répétée ? identification du champignon vénéneux ? reste du plat ou déchets ? antécédents du patient ? prise d’alcool ? 42 Recommandations générales • importance de la durée d’incubation entre l’ingestion des champignons et l’apparition des premiers troubles pour différencier 2 grandes catégories d’intoxications fongiques : – intoxications à durée d’incubation longue (supérieure à 6 heures) potentiellement graves (risque d’atteinte organique) et nécessitant une prise en charge hospitalière – intoxications à durée d’incubation courte (1/2 à 3 heures) de pronostic généralement favorable (atteintes fonctionnelles le plus souvent) • attention, cette règle peut ne pas être respectée dans 2 cas : – consommation de champignons à plusieurs repas successifs – consommation de mélange d’espèces de champignons 43 Syndromes à durée d’incubation longue Syndrome phalloïdien • intoxication phalloïdienne de loin la plus fréquente et la plus grave en France (70 à 80% des intoxications graves et 90% des décès) Responsables • • • • • amanite phalloïde (Amanita phalloides) responsable de 90% des intoxications phalloïdiennes amanite vireuse (Amanita virosa) amanite printanière (Amanita verna) certaines lépiotes rosissantes (Lepiota helveola, L. brunneoincarnata, L. josserandii…) certaines galères (Galerina marginata, G. autumnalis, G. venenata…) 44 Toxines • existence de diverses toxines encore assez mal connues mais très actives (dose mortelle = 0,1 mg/kg contenue dans environ 30 à 50 g d’amanite, 100 g de lépiote ou 150 g de galère) • toxines identifiées de 3 types – phallolysine thermolabile, hémolytique – phallotoxines non absorbées par la barrière digestive, responsable de troubles gastro-intestinaux – amatoxines (alpha-amanitine) responsables de l’hépatite toxique, non détruites par la chaleur ou la dessiccation, rapidement absorbées (1 h), excrétées par la bile mais subissant un cycle entéro-hépatique, exerçant une action cytotoxique par inhibition de l’ARN polymérase (d’où blocage de la synthèse d’ARN messager de de la synthèse protéique) des cellules digestives, rénales et hépatiques Symptômes • gravité de l’intoxication phalloïdienne réelle mais variable en fonction de – – – – – quantité de champignon ingérée âge du champignon âge de la victime (enfants, personnes âgées) rapidité du diagnostic et du traitement sensibilité individuelle 45 Symptômes • • phase de latence silencieuse de 6 à 48 h (en moyenne 10 à 12 h mais jamais inférieure à 6 h) phase gastro-intestinale intense (agression digestive brutale) – – – – • douleurs abdominales intenses diarrhées profuses (diarrhées cholériformes) vomissement violents et persistants sans traitement rapide, risque de déshydratation avec hypovolémie, insuffisance rénale aigüe (oligurie) et parfois état de choc phase de rémission – diminution des vomissements puis de la diarrhée (accalmie trompeuse) – apparition d’autres signes d’apparence banale (asthénie, anorexie) traduisant différentes lésions viscérales (parenchyme hépatique) • phase d’atteinte hépatique (en moyenne vers la 36ème heure) – – – – hépatite cytolytique avec insuffisance hépatocellulaire élévation des transaminases (> 10.000 UI/l) avec maximum vers 48 à 72 h chute des facteurs du complexe prothrombinique (prothrombine, facteur V) cytolyse hépatique maximum vers le 3 à 5ème jour 46 Symptômes • dans les cas les plus graves – – – – • • syndrome hémorragique avec hémorragie digestive encéphalopathie hépatique, coma hépatique mortel hypoglycémie (troubles de la glycogénèse) insuffisance rénale aiguë organique (entre le 5ème et le 8ème jour) (tubulonéphrite par fixation des toxines phalloïdiennes au niveau des tubules rénaux) tableau général d’hépato-néphrite gravissime parfois compliquée d’atteintes cardiaques (troubles de la conduction), pulmonaires et neurologiques signes biologiques essentiels (surtout au début de l’intoxication) d’où la nécessité d’examens biologiques répétés – – – – – examens hépatiques (transaminases, bilan de la coagulation, glycémie) bilans hydro-électrolytique et acido-basique examens rénaux (ionogramme urinaire, albuminurie) examens hématologiques (NFS) recherche et dosage des toxines phalloïdiennes (amatoxines) dans les liquides biologiques (radioimmuno essai, HPLC) 47 Traitement • pronostic lié à la gravité de l’hépatite (10 à 15% de mortalité aujourd’hui) • importance de facteurs péjoratifs (jeune âge, insuffisance rénale…) • hospitalisation d’urgence dans un service de réanimation • traitement symptomatique essentiel : réhydratation précoce, compensation des pertes hydro-électrolytiques, lutte contre l’hypoglycémie et les troubles de la coagulation – la diarrhée (riche en toxines) doit être respectée – évacuation digestive inutile, épuration extra-rénale sans intérêt, sérothérapie abandonnée – interruption du cycle entéro-hépatique des amatoxines par administration de charbon activé (difficile) – maintien de la diurèse (3 à 4 l par 24 h) • existence de nombreux traitements « antitoxiques » (efficacité incertaine) – pénicilline G 300.000 à 1 MU/kg/j en perfusion IV continue (diminution de la fixation des toxines sur l’hépatocyte mais risque d’effets neurologiques centraux) – silymarine (Legalon®) 20 à 30 mg/kg/j – N-acétyl cystéine (neutralisation des radicaux libres) • • dans les cas gravissimes : transplantation hépatique (taux de survie 80%) convalescence longue (réparation hépatique lente, asthénie, troubles 48 digestifs) Syndromes à durée d’incubation longue Syndrome orellanien (paraphalloïdien ou cortinarien) Responsables • • • plusieurs cortinaires jaunes brunissant et rouges (surtout dans le Massif Central) cortinaire des montagnes (Cortinarius orellanus) C. speciosissimus, C. orellanoides, C. splendens Toxine • • orellanine thermostable et résistante à la dessiccation cellule cible : épithélium du tubule proximal (perturbation des réactions de phosphorylation oxydative, baisse de la synthèse protéique et production de radicaux libres) entrainant des néphrites interstitielles sévères 49 Symptômes • incubation silencieuse très longue allant de 36 h jusqu’à 15 à 18 jours (diagnostic difficile, risque de prises répétées) • troubles digestifs variables et inconstants (douleurs abdominales, vomissements, diarrhées) • asthénie, anorexie, frissons, soif, myalgies, douleurs lombaires, paresthésies des extrémités • insuffisance rénale (néphropathie tubulo-interstitielle apparaissant vers le 8 à 10ème jour) pouvant évoluer vers la guérison ou vers l’insuffisance rénale chronique (50% des cas) Traitement • hospitalisation et surveillance dans un service de néphrologie dès la suspicion d’une intoxication • traitement symptomatique • furosémide déconseillé (aggravation des lésions rénales chez l’animal) • épuration extrarénale (hémodialyse) et transplantation rénale si besoin • convalescence lente (asthénie, anorexie), risque d’insuffisance rénale chronique 50 Syndromes à durée d’incubation longue Syndrome gyromitrien (helvellien) Responsables • certaines gyromitres • gyromitre comestible « fausse morille » (Gyromitra esculenta) • G. gigas, G. infula • certains ascomycètes et helvelles Toxine • gyromitrine thermolabile et volatile • entraine une diminution du taux d’acide gamma-aminobutyrique (GABA) intracérébral (à l’origine de convulsions) et une activation métabolique avec production de radicaux libres réactifs (au niveau hépatique) 51 Symptômes • intoxication caractérisée par une grande variabilité de la susceptibilité intra et inter-espèces (toxicité de la gyromitrine mise en évidence dans les années 60, teneur en toxines très variable) • délai d’incubation de 8 à 12 h, parfois jusqu’à 24 h et évolution polyphasique des symptômes sur plusieurs jours (diagnostic difficile) • troubles digestifs (vomissements, douleurs abdominales, diarrhée) • céphalées, asthénie, et fièvre (symptôme évocateur) • hépatite cytolytique généralement modérée, vers le 2 ou 3ème jour, pouvant s’accompagner d’une hémolyse entrainant une insuffisance rénale • en cas d’intoxication sévère, troubles neurologiques (agitation, coma, convulsions) et quelques cas mortels (10% des cas d’intoxications fongiques) Traitement • traitement symptomatique – compensation des pertes hydriques – traitement des convulsions (benzodiazépine) • • hospitalisation et surveillance des paramètres biologiques administration IV de vitamine B6 25 mg/kg (pour corriger les troubles neurologiques) 52 Syndromes à durée d’incubation longue Syndrome proximien (d’insuffisance rénale) • • • • • • • amanite à volve rousse (Amanita proxima) seule espèce du sud de la France responsable d’intoxications ressemblant au syndrome orellanien (mais avec un délai d’apparition plus court et sans évolution vers la chronicité) syndrome individualisé depuis peu toxines non déterminées, mode d’action inconnu incubation de 8 à 24 h troubles digestifs parfois importants cytolyse hépatique modérée et insuffisance rénale (néphropathie tubulointersticielle) dans les 3 à 4 jours évolution toujours favorable avec guérison sans séquelle dans les 3 à 4 semaines 53 Syndromes à durée d’incubation longue Syndrome acromélalgien (acrosyndrome) • • • • • connu depuis longtemps au Japon avec Clitocybe acromelalga incubation d’environ 24 heures sensation de fourmillements puis de brûlures très douloureuses des mains et des pieds évoluant en crises (surtout la nuit, non calmée par les antalgiques majeurs mais seulement par des bains d’eau froide), parfois accompagnées d’un érythème et d’un œdème persistance des signes de 1 à plusieurs mois plusieurs cas observés dans les Alpes françaises Clitocybe amoenolens et Lepista inversa 54 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome résinoïdien (résinien, lividien, gastro-intestinal) Responsables • • • • • • • • • • • nombreux champignons responsables de gastro-entérites plus ou moins graves genre Agaricus (A. xanthodermus…) genre Chlorophyllum (C. molybdites…) genre Entoloma (E. lividum, E. sinuatum…) genre Ramaria (R. formasa, R. pallida…) genre Russula (R. emetica…) genre Tricholoma (T. pardinum…) Boletus satanas Omphalotus olearius Armillaria mellea etc… 55 Toxines • • non identifiées pour la plupart responsabilité de la nature indigeste du champignon Symptômes • • • • • • incubation de 1 à 3 heures (parfois 15 mn en cas d’ingestion massive) gastro-entérite avec nausées, douleurs abdominales, vomissements, diarrhées durant quelques heures et spontanément régressive en 24 à 48 h risque lié à l’intensité des symptômes (risque de déshydratation) et au terrain (enfant, personne âgée, antécédents cardiaque ou rénal) traitement symptomatique (antispasmodique, antiémétique, réhydratation) bolet satan : diarrhées profuses, fièvre, parfois hypertension artérielle transitoire entolome livide : risque de cytolyse hépatique modérée 56 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome muscarinique (muscarinien, sudorien, cholinergique) Responsables • • certaines variétés de clitocybes (C. dealbata, C. rivulosa, C. candidans, C. cerussata, C. phyllophila…) certains inocybes (I. patouillardii, I. fastigiata, I. geophylla…) Toxines • • muscarine et isomères de structure proche de l’acétylcholine activité forte et durable parasympathicomimétique (activation des récepteurs cholinergiques post ganglionnaires) 57 Symptômes • incubation courte (15 mn à 2 h) • troubles digestifs (douleurs abdominales, vomissements, diarrhées) • stimulation parasympathique – – – – • hypersécrétion sudorale, salivaire, lacrymale encombrement bronchique (hypersécrétion bronchique) myosis bradycardie, hypotension courte durée des symptômes (1 à 3 h) avec évolution spontanément favorable Traitement • hospitalisation et surveillance cardio-respiratoire • ventilation assistée, oxygénothérapie si besoin • traitement symptomatique (réhydratation) • traitement antidotique : 0,5 à 1 mg de sulfate d’atropine par voie IV à répéter toutes les 15 mn (pour compenser l’effet parasympathicomimétique) 58 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome panthérinien (muscarien, mycoatropinien) Responsables • • amanite tue mouche ou fausse oronge (Amanita muscaria) amanite panthère (Amanita pantherina) Toxines • acide iboténique, muscinol et muscazone (dérivés de l’isoxazole thermostables agonistes du GABA responsables des effets neurologiques centraux) 59 Symptômes • • • incubation courte (30 mn à 3 heures) troubles digestifs modérés et inconstants (vomissements, diarrhées) troubles nerveux centraux mimant un délire atropinique – – – – • agitation, excitation, désorientation, ébriété mydriase, céphalées tachycardie parfois hallucinations, délire, convulsions et coma effets psychodysleptique utilisé dans certaines civilisations (Asie, Amérique du Sud) et parfois à l’origine d’ingestion volontaire à des fins récréatives Traitement • • évolution généralement spontanément favorable en 12 à 24 h administration de benzodiazépines (sédation) 60 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome coprinien Responsables • • • • coprin noir d’encre (Coprinus atramentarius) clitocybe à pied en massue (Clitocybe clavipes) pholiote écailleuse (Pholiota squarrossa) bolet blafard (Boletus luridus) Toxine • • coprine dont le métabolite (L-aminocyclopropanol) est un inhibiteur puissant de l’aldéhyde déshydrogénase d’où un blocage de la biotransformation de l’éthanol au niveau de l’acétaldéhyde responsable des troubles vasomoteurs (effet antabuse) symptômes n’apparaissant qu’en cas d’ingestion d’alcool pendant ou après (jusqu’à 3 jours) l’ingestion de coprins 61 Symptômes • • • délai d’apparition des symptômes très bref, quelques minutes à quelques dizaines de minutes après l’ingestion d’alcool (dès une alcoolémie 0,05 g/l) absence de troubles digestifs effet antabuse – – – – – – vasodilatation périphérique intense (flush facial) bouffées de chaleur, sueurs nausées, sensation de malaise céphalées tachycardie sinusale, parfois hypotension artérielle parfois angoisse, lipothymie, collapsus, troubles du rythme et ischémie myocardique Traitement • • évolution généralement spontanément réversible en quelques heures suppression de l’alcool pendant au moins 72 heures 62 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome narcotinien (psilocybien) Responsables • • plus de 120 espèces de champignons hallucinogènes en France psilocybes (Psilocyba semilanceata, P. cyanescens, P. bohemica…) et panéoles (Paneolus subalteatus…) Toxines • • • psylocybine, psilocine, psilocystine… dérivés indolés (proches de l’hydroxytryptophane) agissant au niveau des récepteurs sérotoninergiques toxines thermosensibles mais non détruites par la dessiccation 63 Symptômes • • • • • • • délai d’apparition des symptômes bref (quelques dizaines de minutes à 1 h) durant entre 2 et 4 h pour disparaitre en 12 à 48 h troubles de l’humeur (euphorie ou anxiété) ébriété, hallucinations visuelles, troubles de la perception temporospatiale agitation signes sympathomimétiques : mydriase, tachycardie, vasodilatation périphérique, nausées rares complications (coma, infarctus, mort) en cas d’ingestion massive intoxication le plus souvent volontaire (effets psychodysleptiques proches du LSD) Traitement • évolution spontanément favorable en quelques heures • administration de benzodiazépine si besoin • risque principal suicidaire (surveillance constante) Rq. champignons classés comme stupéfiants (cueillette illicite) 64 Syndromes à durée d’incubation courte Syndrome paxillien Responsable • paxille enroulée (Paxillus involutus) Toxines • toxines mal connues (hémolysines) • mécanisme d’action de type immuno-allergique Symptômes • syndrome rare (quelques cas publiés) et encore imparfaitement compris • incubation courte (quelques heures) • troubles digestifs, asthénie puis anémie hémolytique avec ictère et oligoanurie • plusieurs cas de décès en Europe de l’Est mais pas en France Traitement • épuration extra-rénale et exsanguino-transfusion 65