Service d’Oncologie Médicale CHU de Béni-Messous Dr. S. GOUAMI Les urgences en cancérologie 1/ Introduction: Cancer : N’est pas forcément synonyme de mort rapide Il y’a des possibilités de guérison Longues survies fréquentes Urgences: Vitales (passer un cap) Fonctionnelles (maintien de la qualité de vie, soulagement) On appelle urgence oncologique, un événement aigu, pouvant rapidement menacer la vie du malade, que cet événement soit en rapport direct ou indirect avec le cancer dont le patient est atteint ou éventuellement être en rapport avec ses traitements. Objectifs pédagogiques Connaître les principales urgences en cancérologie Savoir distinguer urgences réelles et complications de fin de vie Comprendre l’intention de réanimation et de non- réanimation 2/ Les différentes urgences : Métaboliques Vasculaires Osseuses Respiratoires Infectieuses Psychiatrique 3/ Les urgences métaboliques : Hypercalcémie Hyponatrémie Syndrome de lyse 3.1/ Hypercalcémie : Le chapitre est déjà fait dans un cours 3.2/ Hyponatrémie : Symptomatologie: - Proportionnelle à la profondeur, à la rapidité d’installation. Somnolence, fatigue, confusion, convulsion. Mécanismes les plus fréquents: - - - SIADH: Secrétion inappropriée d’hormone antidiurétique - Ex: cancer broncho-pulmonaire - Traitement : restriction hydrique Etat préterminal des maladies graves: - Excrétion exagérée de sel - Pas de traitement Dilution: - Œdèmes, ascites, épanchements pleuraux abondants - Traitements symptomatiques (ponctions et diurétiques) et/ou étiologiques 3.3/ Syndrome de lyse tumorale : On appelle ainsi le relargage rapide dans le sang de produits intracellulaires à la suite de la mort d'une grande quantité de cellules cancéreuses en rapport avec l'efficacité du traitement. Ce syndrome s'observe dans les cancers ayant une croissance tumorale rapide avec un turn-over cellulaire important, une importante charge tumorale et une grande sensibilité à la thérapeutique (essentiellement la chimiothérapie) : leucémies, lymphomes de haut grade, cancer à petites cellules du poumon, myélomes, etc Mécanisme : L'acide urique est le produit de dégradation finale des acides nucléiques puriniques dans l'urine, l'acidité du milieu transforme le sel sodique en acide urique, qui est peu soluble à ce pH. Les cristaux provoquent une néphropathie par obstruction et secondairement une insuffisance rénale. En cas de nécrose cellulaire massive, on peut également observer une hyperkaliémie, une hyperphosphatémie avec hypocalcémie ce qui fait craindre une arythmie cardiaque et la mort subite. Le syndrome urologique apparaît en général deux jours après le traitement cytotoxique Facteurs de risque: Grosse masse tumorale IR préexistante, oligurie LDH très élevés Hyperuricémie préexistante Grande chimiosensibilité Traitement : - - Hyperhydratation: - 2 à 3 L/m2 - 25% G5 et 75% de SSI - Pas de K+, ni Phosphore, ni Ca - +/- Diurétiques Alcalinisation: non recommandée actuellement Hypouricémiants: Rasburicase (Fasturtec®) > Allopurinol Rasburicase efficace sur cristaux déjà formés, action plus rapide Mesures adjuvantes: - Hyperkaliémie: Apport nul, chélateur, gluconate de calcium, insuline, alcalinisation, EER - Hyperphosphatémie : Apport nul, chélateur (hydroxyde d’aluminium), EER si P> 3,2mmol/L - Hypocalcémie : A supplémenter seulement si symptomatique - Insuffisance rénale : si besoin EER 4/ Urgences vasculaires : - Hémorragies Thromboses CIVD Syndrome cave supérieur 4.1/ Hémorragies : Les hémorragies constituent la troisième cause de décès par cancer (après les conséquences de l'invasion tumorale sur la fonction des organes, et l'infection), la seconde cause chez les malades ayant une hémopathie maligne. Les causes des hémorragies au cours du cancer sont multiples : - Atteinte des vaisseaux sanguins (capillaires ou plus gros vaisseaux) - Saignements en nappe ou petits vaisseaux favorisés par une thrombopénie (iatrogène ou non), surtout en cas d'infection associée, - Saignements favorisés par un taux anormalement bas des facteurs de coagulation (coagulation intravasculaire). 4.2/ Thromboses : Le chapitre est déjà fait dans un cours 4.3/ CIVD : Plusieurs causes impliquées : - Invasion tumorale vasculaire - Relargage de facteurs tissulaires tumoraux - Activation des leucocytes et des plaquettes /emboles néoplasiques - Activation directe de la prothrombinase - Facteurs procoagulants propres ( ?). 4.3.1/ Signes cliniques : Syndrome hémorragique : - Purpura cutanéo-muqueux. - Ecchymoses, épistaxis. - Métrorragies, hématurie. - Saignements en nappe (plaies opératoires). Manifestations thrombotiques microcirculatoires : - Ischémie périphérique, acrocyanose voire gangrène des extrémités. - Manifestations neurologiques déficitaires, coma. - Insuffisance rénale aiguë. - Détresse respiratoire aiguë, œdème pulmonaire lésionnel. Formes chroniques : - Symptomatologie limitée à des ecchymoses ou des manifestations thrombo-emboliques. 4.3.2/ Diagnostic biologique : Hypoplaquettose majeure Diminution du taux de prothrombine Allongement du temps de coagulation Diminution du taux de fibrinogène Place des D-Dimères 4.3.3/ Traitement : Pas de traitement codifié Dans la mesure du possible, traitement étiologique Traitements symptomatiques : - Choc, hypovolémie, insuffisance respiratoire aiguë, déséquilibre acido-basique, les différentes défaillances viscérales associées. Transfusions plaquettaires et du plasma frais congelé si une intervention chirurgicale est indispensable et si le syndrome hémorragique est au premier plan. 4.4/ Syndrome cave supérieur : Résulte de l’obstruction à la circulation sanguine au niveau de la veine cave supérieure, d’origine extrinsèque ou intrinsèque 4.4.1/ Etiologies : Compression extrinsèque: - Cancers broncho-pulmonaires · 60 à 89% selon les auteurs, avec une prédominance pour les cancers à petites cellules LMNH, cancers du sein, tumeurs germinales médiastinales, thymomes… Métastases médiastinales d’un carcinome (rare) Envahissement tumorale de la VCS Cause intrinsèque : - Thrombose de la VCS+++ : sur Voie centrale, ou par compression partielle. 4.4.2/ Signes cliniques : Suspicion d’un syndrome cave supérieur devant: - Œdème en pèlerine - Cyanose - Circulation collatérale thoracique - Turgescence jugulaire - Autres: myosis, hypotrophie de l’éminence hypothénar - Congestion - Gêne respiratoire: toux, dyspnée, oppression thoracique - Signes neurologiques: céphalées, vertiges Les signes sont accrus lors d’une antéflexion et d’un décubitus 4.4.3/ Traitement : 5/ Urgences osseuses : - Syndrome de menace Fracture Compression médullaire 5.1/ Syndrome de menace : Fracture souvent précédées de douleurs osseuses : crescendo Douleurs à l’effort : station debout, marche, port d'un objet, etc. Indication de clichés : Précise l'état des corticales Indications chirurgicales habituelles (préventives): - Atteinte de la corticale > 2 à 3 cm - Fût osseux atteint sur plus de 50% de sa largeur - Ou lorsque la radiothérapie n'apporte aucun soulagement 5.2/ Fracture : La chirurgie: si pronostic vital > un mois ou deux et si pas de contre indications absolues à l'acte opératoire But: améliorer la qualité de vie et restaurer la fonction L'acte orthopédique: permet un soulagement rapide Peut être complété, secondairement, par une radiothérapie à visée antalgique. Effet psychologique important (famille, patient) : pas d’abandon Gestes le plus souvent proposés: - Prothèse totale de hanche - Enclouage centro-médullaire d'un os long - Remplacement d'un corps vertébral par cimentoplastie - Résection d'une lame vertébrale - Libération d'une racine médullaire - Décompression de la moelle épinière. 5.3/ Compression médullaire : Il s’agit d’une urgence absolue, une moelle comprimée depuis plusieurs semaines pouvant se sectionner subitement par compression médullaire 5.3.1/ Epidémiologie : Relativement fréquente - 2,5% des patients atteints de cancer présenteront au moins un épisode de compression médullaire Causes les plus prévalentes de compression médullaire - Cancer du sein - Cancer du poumon - Myélome multiple Causes les plus incidentes de compression médullaire - Myélome multiple - Lymphome non-hodgkinien - Cancer de la prostate Localisations - Environ 60% au niveau de la colonne dorsale - 30% lombosacré - 10% cervical 5.3.2/ Mécanisme : Métastases vertébrales: - Compression moelle épinière par tassement vertébral [fragments osseux] - Envahissement canal médullaire par la tumeur - Parfois diagnostic du cancer fait sur métastases osseuses compressives. Métastases épidurales Pas toujours néoplasiques: Abcès, hémorragie, canal lombaire étroit… 5.3.3/ Signes cliniques : Syndrome lésionnel : - Atteinte d’une ou plusieurs racines r au niveau de la lésion : indique le niveau de la compression - Douleur+++ - Topographie radiculaire uni ou bilatérale Syndrome sous-lésionnel : - Syndrome pyramidal (Paraparésie avec hyperréflexivité hyperréflexi ostéotendineuse ostéotendineuse, signe de Babinski bilatéral) - Trouble sensitif : hypoesthésie - Trouble sphinctérien : queue de cheval. Syndrome rachidien inconstant Absence de signe neurologique au dessus du niveau lésionnel 5.3.4/ Traitement : DEUX buts du traitement tement initial: - Diminuer l’œdème:: corticostéroïdes - Enlever l’effet de compression sur la moelle épinière Chirurgie? Radiothérapie? Hormonothérapie? Chimiothérapie? Buts corollaires: - Obtenir rapidement un diagnostic (si nécessaire) - Traiter la néoplasie de façon optimale (si nécessaire) - Soulagement de la douleur - Récupération fonctionnelle la plus complète possible Traitement médical d’urgence: - Immobilisation. - Corticothérapie ticothérapie forte dose : Méthylprédnisolone 120 mg / j , Déxaméthasone 20 mg. Radiothérapie: - Atteintes étendue - Métastases épidurale - Tumeur radiosensible (Lymphomes, myélome..) - Complémentaire à la chirurgie 6/ Urgences respiratoires : Pneumopathie • • • • Syndrome obstructif infectieuse Radique Médicamenteuse inhalation Lymphangite carcinomateuse Atteinte centrale Epanchement pleural, pneumothorax Surdosage opiacés DYSPNEE Dyspnée terminale 6.1/ Obstruction des voies aériennes : Détresse respiratoire par compression/obstruction - Infiltration tumorale endoluminale: larynx, trachée, grosse bronche - Compression extrinsèque des voies respiratoires par une tumeur ou une hémorragie - Epanchement pleural massif ou pneumothorax suffocant 6.2/ Surdosage aux opiacés : Somnolence et FR <10/min Score de sédation de Rudkin +++ - S1: patient complètement éveillé et orienté - S2: patient somnolent - S3: patient avec yeux fermés mais répondant à l’appel - S4: patients avec yeux fermés mais répondant à une stimulation tactile légère (tractation de l’oreille) - S5: patients avec yeux fermés, ne répondant pas à une stimulation tactile légère 6.3/ Dyspnée terminale : Vérifier que l’on a répondu à un certains nombre de questions avant de débuter la sédation. En accord avec la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie (loi Leonetti). Il n’y a plus lieu de traiter la cause de la dyspnée mais de calmer la sensation asphyxique. Compétence et organisation de l’équipe - Décision collégiale et traçabilité - Les discussions en vue des prises de décision sont-elles organisées avec tous les intervenants? Ces échanges sont-ils réalisés de façon régulière? Les décisions et la façon dont elles sont prises sont-elles écrites dans le dossier? S’est-on assuré que chaque membre de l’équipe est informé des objectifs visés par les thérapeutiques mises en œuvre? Information du patient - Quelles connaissances à l’équipe des médicaments à utiliser, de leur pharmacocinétique, de leurs effets secondaires? L’équipe connaît-elle les indications, le contexte, l’intention de la démarche? Le consentement éclairé (objectif, risque de la sédation) du patient a-t-il été recherché? S’il est hors d’état d’exprimer sa volonté: existe-t-il des directives anticipées? A-t-il désigné une personne de confiance? A défaut, les proches ont-ils été consultés? Information des proches - Les proches ont-ils été informés de l’objectif de la sédation, de ses risques? 7/ Urgences infectieuses : Le chapitre est déjà fait dans un cours