COMPTES RENDUS
dans l'avant-propos de
Difference
et
repetition
(Paris, Presses Universi-
taires de France, 1968. page 3) que les concepts « doivent avoir une
coherence, mais cette coherence ne doit pas venir d'eux. Us doivent
recevoir leur coherence d'ailleurs ».
II y a une pensee et des idees qui n'ont aucune existence logique,
qui ne valent que dans la mesure ou elles sont Ii6es a l'existence de leur
auteur. Des idees qui disparaissent avec lui. Nous croyons qu'ils ont
pensd et nous nous faisons une image de leur pensee. Les concepts
tirent leur cohesion de la rapiditd et de la virtuosit6 avec lesquelles
ils sont enonces et de l'existence anecdotique de l'auteur. Le livre
fuit de toute part et il est n£cessaire de connaitre l'auteur pour en
saisir l'unit£ et la force. Et pour nous le nom de Clement Rosset ne
represente pas un pouvoir ou une histoire.
Nous touchons un point important qui couvre l'entreprise meme
de Rosset. En effet, l'A. tente de faire un traitd, une doctrine philo-
sophique avec des notions hdt^rogenes, faisant des rdferences con-
stantes a des textes de Lucrece, Pascal, Montaigne qui a juste titre
sont toujours connus comme marginaux dans la litterature philo-
sophique. II est impossible d'entreprendre une philosophic du tragique
et du hasard dans la mesure oil ces notions ne peuvent qu'etre mises
en scene et non pas ddmontrdes. Rosset souligne avec raison que les
notions de tragique et de hasard se sont toujours developpees dans
la literature. II tente de formaliser des notions qui sont du domaine
de la circonstance et de l'occasion. Le hasard interdit toute concep-
tualisation et de ce fait il n'apparait essentiel que sur le plan de la
litterature. Rosset n'echappe pas a la volonte de Pinterprdtation qu'il
condamne lui-me'me avec virulence.
L'A. tente de mettre en scene et non de mettre en cause un type
de pensde qui affirme le pire des malheurs et s'interroge sur la
n&-
cessitd de cette affirmation du pire. Cette logique non-paranoiiaque
tend a dissoudre le delire qu'institue la tache hermeneut'ique. Pour
Rosset, la philosophic prend son origine dans un coup de force :
l'exclusion du hasard. La philosophic chasse le hasard de ses pens6es,
mais elle demeure hantee par lui. La tache du philosophe est de
reduire la force et le pouvoir de l'arbitraire. II donne a Phomme
l'image d'un monde ordonne' et intelligible ou le bonheur est toujours
possible. Mfime le philosophe pessimiste qui considere le monde
comme mal fait et la vie comme absurde donne un sens a cette vie
et considere le monde comme deja constitu6 avant Pavenement de
la pensee, et ne fait que constater un ddsordre qui ne peut se penser
que par un ordre possible.
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