
M.DULAEY, Le bâton du Christ.
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emploi métaphorique du mot bâton,qui peut signifier la force en
général : le pouvoir politique, mais aussi le pain qui donne des forces
(Jer 48,17 ; Ez 7,11 ; Ps 104,16). Plus particulièrement, la virga
désigne la puissance de la parole, capable de blesser autant qu'une
épée (Prov 14,3) ; aussi le prophète Isaïe déclare-t-il que le Messie
frappera la terre «du bâton de sa bouche»(11, 4 : hébreu et Vulgate).
Dieu est le roi d'Israël, son berger et son juge : ce sont là trois
raisons pour l'imaginer muni d'un bâton (Ps 44,7 ; 23,4 ; Is 10,5…),
qu'il confie, comme il se doit, aux anges qui se font ses
ambasssadeurs parmi les hommes, pour accréditer leur mission (Jg
6,21). Si les anges ont en main le bâton de Dieu, «l'Ange du grand
conseil», le Messie, qui de surcroît est roi, porte lui aussi un sceptre :
uirga uirtutis (Ps 110,2 ; 2,9). Vers le début de notre ère, on attend
volontiers un Messie qui doit être un nouveau Moïse (Dt,18,18),
Messie-prêtre issu d'Aaron et Messie-Roi de la lignée de David ; il est
donc logique qu'il porte un bâton : celui qui dans les mains de Moïse
fut l'instrument des interventions de Dieu en faveur de son peuple (Ex
4,17), la baguette d'Aaron,symbole du sacerdoce ((Nb 17), et le
sceptre.
Dans le judaïsme ancien
Cette symbolique du bâton demeure vivante dans le judaïsme vers
le début de notre ère. Le Messie lui-même est parfois appelé bâton ou
sceptre de Dieu9. Le sceptre du Messie est le bâton de
commandement du patriarche Jacob-Israël, la verge d'Aaron, ou
encore le bâton de Moïse, qui servit de sceptre à tous les rois d'Israël
jusqu'à la fin de la royauté, époque où il est désormais “tenu en
réserve” dans un lieu caché (comme l'Arche, comme le chandelier à
sept branches), «car il est destiné à être dans les mains du Roi-
Messie»10.
Ce bâton, signe de l'Alliance avec Moïse, a suscité nombre
d'explications, car on tient à le distinguer d'un bâton magique. Si le
bâton des Madianites porte gravées des formules magiques, sur celui
de Moïse n'est inscrit que «le Nom grand et glorieux», le tétragramme
divin11. La virga de Moïse n'est effectivement rien d'autre que le
sceptre de Dieu : «Quant à mon sceptre, sur lequel est gravé le Nom
ineffable de Dieu, et dont je me suis servi au début pour créer le