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l’accès à une quantité abondante d'informations, d'opportunités et
de ressources : « [...] les individus avec peu de liens faibles seront
privés d'informations venant de parties lointaines du système
social et seront confinés aux nouvelles provinciales et aux points
de vue des amis proches» (Granovetter, cité par Saucier, 2013 :
68).
3. Séropositivité, vulnérabilité et éclatement des liens forts
Dans les moments de crise ou pendant l’épisode de la maladie les
relations entre le malade et son entourage connaissent des
bouleversements. Elles peuvent être consolidées par empathie ou
par obligation familiale, comme elles peuvent êtres affaiblies, voire
éclatées par peur de stigmatisation ou de discrimination. Mais les
liens forts, comme ils ont été définis, sont avant tout tributaires de
l’histoire familiale, du statut social et du comportement de chacun,
de la place, en particulier, du malade dans le système d’échange.
Un père ou une mère touchée par la maladie ne génèrent pas les
mêmes réactions que lorsqu’il s’agit des fils ou des filles.
Mais d’une manière générale, dans notre enquête à Casablanca,
les difficultés économiques sont soulevées de façon récurrente par
les jeunes interviewés, notamment lorsque sont évoquées les
relations avec les familles et les proches. On remarque, à travers
leurs témoignages, que les phénomènes d’exclusion ou d’abandon
viennent, en grande partie de la maladie, mais aussi des situations
douloureuses engendrées par l’impossibilité de trouver du soutien
de leur entourage proche. Le nombre de cas de veuvage, de
divorce, de rejet et d’expulsion du cercle de la famille et des
proches, rencontrés au moment de notre enquête montre que
l’irruption de la maladie du sida dans le parcours de vie d’un jeune
finit, dans plusieurs cas, par une rupture, un point d’inflexion,
sinon une faiblesse des liens forts (Majdoul, 2015). Dans le cas où
la séropositivité est révélée à l’entourage, soit par la volonté du
malade ou à son insu, le recours aux liens forts, n’est plus une
solution possible pour subvenir aux besoins, et les ressources à
mobiliser sont en état de « déprivation » matérielle et symbolique.
Beaucoup de jeunes séropositifs sont exclus de leur entourage
familial, dès que la séropositivité est révélée. Les formes
d’exclusion subis par ces jeunes se manifestent par le rejet total ou