Cahier de l’auto-immunité – médecine interne – Dr Khadija Moussayer
atout dans le génotype - a représenté un avantage de survie très supérieur à
l’inconvénient d’une éventuelle MC. Ce dernier danger était au demeurant
pratiquement inexistant du fait que ces populations ne consommaient pas
traditionnellement de gluten avant la colonisation. Elles subissent maintenant de
plein fouet ce risque avec les modifications de leurs habitudes alimentaires.
L’excès d’hygiène perturbateur
Un autre exemple concerne le diabète de type 1 qui progresse partout dans le
monde avec un taux annuel de plus de 3 %. Dans certains pays comme la Finlande
(pays le plus touché au monde avec un taux de prévalence de 64/100 000
personnes), le nombre de cas de cette pathologie devrait doubler dans les 15 ans à
venir (4). De plus en plus d’enfants en bas âge en sont atteints alors que,
traditionnellement, ce diabète se manifestait en général entre 10 et 14 ans.
L’excès d’hygiène est actuellement mis en avant parmi les causes explicatives de
cette « épidémie ». Un univers trop « aseptisé» empêcherait en effet le système
immunitaire des enfants d’apprendre à reconnaître ses ennemis. Les cellules
immunitaires, par manque de maturité, sont en quelque sorte désorientées et
s’attaquent alors par erreur à notre propre corps (5,6) en l'occurrence dans le cas du
diabète de type 1 aux cellules productrices dans le pancréas de l'insuline, utile à la
régulation du glucose dans notre corps.
Une étude sino-danoise (7) est venue indirectement conforter cette thèse en
montrant que les bébés nés par voie basse et exposés aux premières bactéries au
travers du rectum de la mère ont un risque moindre de contracter des allergies que
les bébés nés par césarienne. Le microbiote intestinal a ainsi un rôle fondamental
dans le bon développement de notre système immunitaire.
Plus globalement, la survenue des maladies auto-immunes s’explique par
l’accumulation de plusieurs facteurs s’associant comme les pièces d’un puzzle. Les
premiers sont génétiques ; les seconds sont sexuels, impliquant le rôle du
chromosome X et des hormones féminines, d’où la nette prédominance des femmes
à contracter ce type de pathologies ; et les troisièmes environnementaux (8),
impliquant notamment les virus (en particulier celui d’Epstein Barr responsable de la
mononucléose infectieuse), les bactéries, les rayons UV, le tabac, des agents
toxiques, l’alimentation… La prise en compte des interactions entre tous ces
paramètres est nécessaire à une meilleure compréhension de ces pathologies.
Un patrimoine génétique inadapté
Dès 1962, un chercheur, J Neel, a émis l’hypothèse plus générale que des variants
génotypiques bénéfiques pour les humains pendant des milliers d’années seraient
devenus « contre-productifs » du fait du progrès et de la modification de notre milieu
(9). Ainsi, un génotype « d’épargne » assurant l’utilisation optimale de la nourriture,
autrefois très utile dans un univers fait de pénuries et de famines, n’a plus sa
pertinence auprès d’individus à régime alimentaire satisfaisant ou abondant, d’où
l’augmentation de la fréquence du diabète non insulinodépendant (10) ou de
l’obésité.
De même, la pauvreté en sel de la ration alimentaire de l’homme, pendant une très
longue période de son histoire, a provoqué une sélection positive des gènes
impliqués dans sa rétention. Notre consommation actuelle souvent trop forte n’est
plus adaptée à notre constitution génétique, d’où le développement de l’hypertension
(11).