Les soins urinaires - CClin Sud-Est

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HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES
LES BONNES PRATIQUES D’HYGIENE
DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES
2.7
Les soins urinaires
’INFECTION URINAIRE RESTE LA PREMIERE CAUSE d’infections chez la personne âgée (1). La présence de bactéries dans les urines représente
un risque individuel (risque d’infection urinaire
éventuellement bactériémique) et un risque collectif car elle constitue un réservoir microbien (en
particulier de bactéries multirésistantes aux antibiotiques) pouvant donner lieu à une transmission
lors des soins urinaires.
La prévention repose à la fois sur des mesures
spécifiques (mode de drainage des urines adapté,
asepsie lors du sondage) et sur des mesures générales (hydratation suffisante, lutte contre la stase
vésicale). De plus, l’absence de prescription systématique d’antibiotiques en cas de bactériurie asymptomatique contribue à maintenir une écologie microbienne préservée.
L
Choisir la méthode la plus adaptée
pour le drainage des urines
La prise en charge d’un patient âgé comprend
toujours l’évaluation de sa continence urinaire ;
cette évaluation, associée à un bilan urologique permet de choisir la méthode de drainage urinaire la
plus adaptée : accompagnement aux toilettes à espaces réguliers, étui pénien, changes à usage
unique, sondage à demeure, sondages itératifs. La
mise en place d’une sonde urinaire à demeure ne
doit pas être la méthode systématiquement retenue
en première intention.
Les indications de la mise en place d’une sonde
à demeure doivent demeurer ciblées (2) :
• patient présentant une rétention urinaire ne
répondant pas à la rééducation vésicale, non
accessible à un traitement médical ou chirurgical et pour laquelle un autre mode de drainage urinaire (étui pénien, changes à usage
unique ou sondage itératif) s’avère impossible,
• incontinence urinaire aggravant des plaies
(escarres, plaie opératoire),
• soins de fin de vie où les changes et mobilisations sont pénibles et douloureux pour le
patient.
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Recommandations générale sur
l’hygiène des soins urinaires
La perte d’autonomie plus ou moins importante
de la personne âgée amène le personnel à prodiguer
des soins urinaires de façon très fréquente qu’il
s’agisse des changes, de la vidange des poches à
urines, de la réalisation des bandelettes urinaires
ou d’un prélèvement d’urines. La manipulation des
urines souvent infectées (comprenant alors 100 000
à 10 millions de bactéries par millilitre d’urines) est
un geste à haut risque pour la transmission manuportée et la contamination de l’environnement (3)
Des précautions générales s’imposent lorsque
des soins urinaires sont prodigués (4).
◆ Observer une hygiène rigoureuse des mains
(lavage des mains) et de la tenue vestimentaire
(gants et parfois tablier de protection).
◆ Limiter les souillures de l’environnement avec
les urines ; si celle-ci s’est produite, absorber
avec un textile à usage unique, puis réaliser un
nettoyage-désinfectant de la surface en cause.
◆ Désinfecter soigneusement le matériel ou les
surfaces en contact avec les urines : urinoir, bassin, verre à prélèvement, cantine, rebord des sanitaires ou du vidoir.
Recommandations pour la pose
d’une sonde urinaire à demeure
Une sonde vésicale à demeure est un risque potentiel important d'infection nosocomiale. Sa pose
nécessite le respect de règles strictes (4).
◆ Le sondage urinaire ne doit être pratiqué que
lorsqu'il est indispensable, et la sonde retirée
dès qu'elle n'a plus sa raison d'être. La nécessité de maintien de la sonde doit donc être régulièrement réévaluée par l’équipe médico-soignante.
◆ Procéder avec une asepsie rigoureuse : lavage
antiseptique des mains, tenue propre, calot,
masque, gants stériles.
HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6
LES SOINS URINAIRES
◆ L’antisepsie* du méat s’effectue en 4 temps :
nettoyage (toilette génitale large), rinçage, séchage, antisepsie.
Lubrifier la sonde avec une huile stérile non minérale (utiliser par exemple de l’huile de goménol)
◆ Avant de procéder à l’introduction de la sonde,
adapter stérilement la sonde sur le dispositif
de drainage ; à partir de ce moment, sonde et
sac collecteur ne doivent plus être désadaptés ;
cette solidarisation constitue le drainage clos
◆ Gonfler le ballonnet à l'aide d’eau stérile en ampoule.
Recommandations
pour les soins au patient porteur
d’une sonde urinaire à demeure
◆ Observer une hygiène rigoureuse des mains
avant et après les soins de sonde.
◆ Respecter strictement le drainage clos en vidangeant la poche par le robinet spécifique dans
une cantine individuelle.
◆ Effectuer une toilette génitale et anale soigneuse
avec un savon neutre.
◆ Fixer la sonde.
◆ Suspendre la poche à urine de façon à ce qu’elle
se trouve à un niveau plus bas que la vessie.
◆ Le port d’une sonde urinaire ne contre indique
pas la douche.
◆ Surveiller l’intégrité du système de drainage et
l’absence d’obstacle à l’écoulement des urines.
◆ Ne pas laisser la poche en contact avec le sol y
compris lors des mobilisations du patient.
◆ Pour la réalisation de prélèvement d'urines, utiliser
le site de ponction après l’avoir désinfecté avec
un produit alcoolique ; le ponctionner avec du
matériel stérile et de façon aseptique.
◆ Le changement de sonde ne doit pas être systématique ; il est indiqué en cas de problème
mécanique (fuite, mauvais écoulement).
◆ Veiller à une hydratation suffisante du patient
sauf contre-indication médicale : il convient donc
de programmer et noter les boissons.
◆ Certaines mesures ne sont d’aucune utilité pour
la prévention des infections urinaires sur sonde :
lavage de vessie systématique à titre préventif,
prescription d’antibiotiques de façon systématique, toilette antiseptique du méat urinaire.
Recommandations
pour le sondage itératif
Le sondage itératif est utilisé en phase de rééducation de l’incontinence urinaire. La répétition
des sondages peut accroître le risque d’infection.
Outre les mesures générales décrites ci-dessus,
on peut recommander d’utiliser pour chaque nou-
HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6
veau sondage des dispositifs stériles à usage unique
et prêts à l’emploi pour diminuer les manipulations.
Recommandations pour les soins
au patient porteur d’un étui pénien
Chez l’homme, ce dispositif est souvent bien
adapté pour la prise en charge de l’incontinence ; le
risque d’infection urinaire est à surveiller (5) en particulier s’il existe un résidu postmictionnel ou si le
port de l’étui pénien est permanent sur une longue
durée.
◆ Changer l’étui pénien tous les jours.
◆ Effectuer tous les jours une toilette soigneuse
permettant le dépistage des complications locales de ce dispositif : ulcération, macération,
surinfection (mycose), phimosis.
Recommandations
pour les soins au patient porteur
de changes à usage unique
Ces protections n’annulent pas le risque d’infection urinaire mais contribuent à le minimiser (5,
6). Leur utilisation doit s’accompagner des mesures
suivantes :
◆ Une fréquence de change suffisante, y compris
lorsqu’on utilise des couches à haut pouvoir d’absorption : 4 à 6 fois par jour en fonction du niveau
de risque d’escarre calculé pour le patient.
◆ Une toilette cutanée et muqueuse réalisée à
chaque change pour éliminer toute trace d’urine
et éviter la macération en milieu humide et riche
en bactéries.
Bibliographie
1 - WARREN JW. Catheter associated bacteriuria in longterm care facilities. Infect Control Hospit Epidemiol 1994,
15: 557-562.
2 - OUSLANDER JG, SCHNELLE JF. Assesment, treatment
and managementof urinry incontinence in the nursinghome. In Rubenstein LZ, Wiedland D, eds. Improving
care in the nursing home. Newbury Park, CA : Sage Publications, 1993, 131-159.
3 - SANDERSON PJ, ALSHAFI KM. Environnemental contamination by organisms causing urinary tract infection.
J. Hosp. Infect 1995, 29: 301-303.
4 - Cent recommandations pour la surveillance et la prévention des infections nosocomiales. Bull.Epidém.Hebd.
1992, numéro spécial. (document en cours de révision
en 1997).
5 - ZIMAKOFF J, STICKLER DJ, PONTOPPIDAN B, et al. Bladder
management and urinary tract infections in danish hospitals, nursing homes, and home care : a national prevalence study. Infect Control Hospit Epidemiol 1996, 17:
215-221.
6 - NORDQVIST P, EKELUND P, EDOUARD, et al. Catheter-free
geriatric care. Routines and consequence for clinical infection, care and economy. J Hosp Infect 1984, 5: 298-304.
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HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES
Lexique
AFNOR
biofilm
Association Française de Normalisation.
Association ayant pour mission de coordonner
les programmes de normalisation en France et d’encourager la diffusion et l’application des normes.
Ensemble de micro-organismes et de leurs sécrétions macromoléculaires qui sont présents sur la
surface d’un matériau (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination).
antisepsie
bionettoyage
Opération au résultat momentané permettant,
au niveau des tissus vivants, dans la limite de leur
tolérance, d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus, en fonction des
objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment
de l’opération (AFNOR NF T 72 101).
Procédé de nettoyage, applicable dans une zone
à risques, destiné à réduire momentanément la biocontamination d’une surface. Il est obtenu par la
combinaison appropriée d’un nettoyage, d’une évacuation des produits utilisés et des salissures à éliminer, de l’application d’un désinfectant.
cas acquis
antiseptique
Selon AFNOR NF T 72 101, un antiseptique est
un produit ou un procédé utilisé pour l’antisepsie
dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé sont sélectifs, cela doit être précisé. Ainsi, un
antiseptique ayant une action limitée aux champignons est un antiseptique à action fongicide.
Le caractère acquis d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée dans un service a été réalisé et si
celui-ci est négatif. La découverte d’une telle bactérie au cours du séjour plus de 48 à 72 heures
après l’admission chez un patient antérieurement
négatif laisse présumer que la bactérie a été acquise par transmission au cours du séjour.
bactéricide
Produit ou procédé ayant la propriété de tuer les
bactéries dans des conditions définies (AFNOR,
Comité Européen de Normalisation).
Produit ou procédé ayant la propriété d’inhiber
momentanément les bactéries dans des conditions
définies (AFNOR).
Le caractère importé depuis un autre établissement d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée du
patient dans le service a été réalisé et si celui-ci est
positif. La découverte d’une telle bactérie chez un
patient moins de 48 à 72 heures après l’admission
laisse présumer que la bactérie a été transmise antérieurement par rapport au séjour actuel.
biocontamination
colonisation (colonisé)
Contamination d’une surface (biologique ou
inerte) ou d’un fluide par des micro-organismes véhiculés par l’air (contamination aéroportée ou aérobiocontamination), par des êtres vivants (la contamination par contact avec les mains en est la
modalité majeure) ou par les objets. (Association
pour la Prévention et l’Étude de la Contamination)
Présence d’une bactérie dans un site qui en est
normalement exempt, mais cette bactérie n’est
responsable d’aucun symptôme local ou général
d’infection ; exemple : présence d’une bactériurie
isolée à Staphylococcus aureus dans les urines sans
aucun signe d’infection urinaire.
bactériostatique
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cas importé
HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6
désinfectant
nettoyage
Produit ou procédé utilisé pour la désinfection,
dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé est sélectif, ceci doit être précisé. Ainsi, un
désinfectant ayant une action limitée aux champignons est désigné par : désinfectant à action fongicide (AFNOR NFT 72 101).
Opération d’élimination des salissures (particulaires, biologiques, liquide,...) avec un procédé faisant appel dans des proportions variables les unes
par rapport aux autres, aux facteurs suivants : action
chimique, action mécanique, temps d’action de ces
deux paramètres et température.
désinfection
nettoyage-désinfectant
◆ Opération au résultat momentané permettant
d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou
d’inactiver les virus indésirables portés par des milieux inertes contaminés, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment
de l’opération (AFNOR NFT 72 101). L’usage du
terme « désinfection » en synonyme de « décontamination » est prohibé.
Produit présentant la double propriété de détergence et de désinfection (Société Française d’Hygiène Hospitalière).
◆ Terme générique désignant toute action à visée
antimicrobienne, quel que soit le niveau de résultat, et utilisant un produit pouvant justifier in
vitro des propriétés autorisant à le qualifier de
désinfectant ou d’antiseptique. Il devrait logiquement toujours être accompagné d’un qualificatif et l’on devrait ainsi parler de :
• désinfection des dispositifs médicaux (= du
matériel médical)
• désinfection des sols,
• désinfection des surfaces par voie aérienne,
• et même désinfection des mains ou d’une plaie
(Société Française d’Hygiène Hospitalière et
Comité Européen de Normalisation).
◆ Élimination dirigée de germes destinée à empêcher la transmission de certains micro-organismes
indésirables, en altérant leur structure ou leur
métabolisme indépendamment de leur état physiologique (CEN)
HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6
porteur (portage)
Présence d’une bactérie dans un site où sa présence est habituelle sans qu’elle soit responsable
d’infection ; exemple : présence de Staphylococcus aureus dans les narines ou dans d’entérobactéries dans les selles.
précautions standard
Ensemble des précautions d’hygiène qui s’appliquent à tout patient sans tenir compte de l’existence d’une éventuelle infection. Ces précautions
intègrent la protection du personnel vis à vis des liquides biologiques, la prévention des accidents
d’exposition au sang et les bonnes pratiques d’hygiène visant à limiter la transmission des micro-organismes hospitaliers lors des soins. Les précautions standard concernent l’hygiène des mains, les
techniques de soins, le nettoyage et la désinfection du matériel de soins, l’entretien des locaux ,
de la vaisselle et du linge, la prévention des accidents d’exposition aux liquides biologiques dont le
sang. L’application des précautions standard est indispensable à l’efficacité d’une politique de contrôle
des infections nosocomiales.
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