E N U N E RÉFÉRENCE Aortic stenosis: an underestimated risk factor for perioperative complications in patients undergoing noncardiac surgery. Kertai MD, Bountioukos M, Boersma E et al. Am J Med 2004;116: 8-13. LE FOND Le but de cette étude rétrospective dirigée par D. Poldermans était de déterminer l’incidence des complications périopératoires (décès, et infarctus du myocarde : IDM) pour des patients porteurs d’un rétrécissement aortique (RA) et soumis à une chirurgie non cardiaque (vasculaire dans 46 % des cas). Ont été comparés 108 patients ayant un RA, moyennement serré pour 92 d’entre eux (gradient moyen de 25 à 49 mmHg), serré pour 16 d’entre eux (gradient moyen ≥ 50 mmHg), et 216 patients sans RA. Dix-neuf patients (6 %) sont décédés ou ont constitué un infarctus du myocarde pendant la période périopératoire : 15 d’entre eux (79 %) appartenaient au groupe RA, et en particulier au sousgroupe RA serré, où l’incidence de ces deux complications atteint 31 % (cinq patients sur seize), versus 11 % pour les RA moyennement serrés et 2 % pour les patients indemnes de RA. Lorsque l’on tient compte de l’index de risque cardiaque (IRC), qui attribue un point à chaque paramètre suivant : chirurgie à haut risque, cardiopathie ischémique, antécédent d’insuffisance cardiaque ou de pathologie cérébrovasculaire, diabète insulinodépendant, créatinine supérieure à 2 mg/dl, on n’observe aucune des complications recherchées en présence ou en l’absence de RA pour un IRC nul puis, avec le cumul des points (de 1 à plus de 3), le RA est associé à un risque périopératoire croissant par rapport aux autres sujets : IRC à 1 = 10 % contre 3 %, IRC à 2 = 16 % contre 3 %, et IRC supérieur à 3 = 29 % contre 6 %. La Lettre du Cardiologue - n° 378 - octobre 2004 R É F É R E N C E . . . Rétrécissement aortique (RA) et chirurgie non cardiaque C O M M E N T A IR E S Lors de cette étude, la présence d’un RA (gradient moyen ≥ 25 mmHg) et sa sévérité augmentent les taux de décès et d’IDM périopératoires dans le cadre d’une chirurgie non cardiaque : après ajustement des facteurs de risque cardiaque associés, pour l’ensemble des patients ayant un RA, l’incidence de ces complications est multipliée par cinq. Il faut aussi tenir compte des critères de l’IRC, car, en leur absence, il n’a été constaté ni décès ni IDM périopératoire en cas de RA même serré (éventualité cependant rare, puisque seuls 18 patients porteurs d’un RA avaient un IRC nul et que l’effectif des RA serrés n’était ici que de 16 patients). Quelles en sont les implications pratiques ? En premier lieu, il est justifié, au terme de ces résultats, d’effectuer une échocardiographie doppler pour les patients présentant un souffle systolique aortique suspect lors de la consultation d’anesthésie afin de confirmer l’existence d’un RA et d’apprécier son degré, ce dans le but d’évaluer le risque de l’intervention prévue et d’adapter la prise en charge du patient en per- et postopératoire. En second lieu, en cas de RA serré symptomatique, une intervention cardiaque (remplacement valvulaire aortique si chirurgie non cardiaque programmée, voire dilatation percutanée si chirurg i e urgente) est logique avant de réaliser l’intervention prévue. La décision est plus délicate face à un RA serré asymptomatique, certaines situations pouvant inciter à une intervention cardiaque préalable : antériorité de bilans échocardiographiques constatant un RA de progression rapide (≥ 0,3 m/s par an), hypertrophie ventriculaire gauche importante (> 15 mm) due au RA, possibilité d’évaluation à l’effort démasquant une réponse anormale à l’exercice, dysfonction systolique ventriculaire gauche débutante, etc. En dehors de ces cas particuliers, la décision doit faire l’objet d’une réflexion adaptée à chaque patient prenant en compte les bénéfices escomptés et l’estimation globale (RA et IRC) du risque de la chirurgie non cardiaque (“The decision for prophylactic valve surgery before major non-cardiac surgical procedures should be taken on an individual basis”, The European Society of Cardiology, 2002). B IB L IO G R A P H IE Quinze références sont annexées à l’article de M.D. Kertai et al., dont les recommandations de K.A. Eagle et al. (ACC/AHA Guideline Update for Perioperative Cardiovascular Evaluation for Noncardiac Surgery – Executive Summary – Circulation 2002;105:125767), auxquelles on peut adjoindre les recommandations européennes contemporaines sur la prise en charge des valvulopathies asymptomatiques (Iung B et al. Eur Heart J 2002;23:1253-66). À l’article est associé un éditorial de L. Goldman (Am J Med 2004;116:60-2). MOTS-CLÉS Rétrécissement aortique - Risque Chirurgie non cardiaque. T IR É S À P A R T D. Poldermans, Department of Vascular Surgery, Room H921, Erasmus Medical Center ; Dr Molewaterplein 40, 3015 GD Rotterdam, The Netherlands. E-mail : [email protected] C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil 39