Histoire de la m é decine, pist

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Histoire de la médecine,
épistémologie et
psychologie médicale
Pr. Jean Naudin
SOLARIS
Sainte-Marguerite
Histoire de la
médecine
En Grèce : 2 écoles

Cnide :




la médecine repose sur la notion de maladie
la maladie a une existence autonome
soigner = localiser le mal dans le corps
Cos : Hippocrate



la médecine traite le malade dans sa totalité, tient compte du
tempérament et de l’histoire du malade
La maladie est une réaction globale de l’individu impliquant le
corps et l’esprit
Soigner = rétablir l’harmonie perdue de l’homme avec son
milieu et avec lui-même
2 grands médecins dans l’antiquité

Hippocrate :
école de Cos
 centrée sur l’Homme
 préfigure la psychosomatique


Galien :
école de Cnide
 centrée sur la maladie
 triomphe au XIX°

Moyen-âge (1)
 L’église
 s'approprie
entièrement la pratique médicale
 interdit les dissections sous peine
d’excommunication
 il ne faut pas « rendre visible ce que Dieu a
caché »
 profond obscurantisme
Moyen-âge (2)

Les conditions du renouveau

émergence de la médecine arabe (Avicenne, Maïmonide,
Averroès)
traduction de l’arabe au latin des auteurs de l’Antiquité
 création des premières universités (Salerne, Bologne,
Montpellier)
 premières dissections en amphithéâtre
 création d’hôpitaux pour lépreux et pestiférés
 Mais le savoir médical ne progresse pas car il reste lié
pour des raisons religieuses à la tradition gréco-latine

La Renaissance (1)
 Marquée par deux grands
 l’invention
événements :
de l’imprimerie par Gutenberg
 En 1455
 donne au savoir un caractère universel
 le savoir médical n’est plus réservé aux seuls initiés
 la
découverte du Nouveau Monde
 En 1492
 épidémies nouvelles
 extension de la syphilis
La Renaissance (2)

L’esprit de la Renaissance :
méfiance à l’égard du dogme
 l’exploration du monde et celle du corps vont de pair
 la santé, distinguée du salut, redevient un bien précieux
 Paracelse, Paré refusent d’écrire en latin
 artistes et médecins apprennent l’anatomie
 première dissection publique à Paris (1478)
 premières avancées scientifiques au XVI° :

 Vésale (1543) : première nomenclature « De la fabrique du
corps humain »
 Servet : première description de la circulation pulmonaire,
brûlé vif
La révolution biologique du XVII° (1)

Repose sur :


Une innovation technique (fin XVI°, Jansen) :
 le microscope
L’application à la médecine des connaissances de la physique



Influence mécaniste grandissante de Descartes


Sanctorius se sert du thermomètre, de la balance et du pulsomètre
rôle de la mesure
le corps est pensé comme une machine
La médecine se tourne vers l’infiniment petit



découverte des cellules,
des globules rouges,
des spermatozoïdes
La révolution biologique du XVII° (2)

Une révolution : la circulation sanguine
Harvey en démontre le principe en réalisant des
expériences sur des daims (1616).
 ll démontre (1628) et décrit circulation, contractions
cardiaques, hémodynamique artério-veineuse.
 déclenche une intense polémique à travers toute
l'Europe (« anti-circulateurs »)
 Louis XIV (1672) charge Dyonis d’enseigner la
circulation au Jardin du Roy
 Ruine la théorie encore dominante des humeurs

Le XVIII° : siècle des Lumières (1)

Début des grandes classifications médicales
dès la fin XVII°, premières nosologies (Sydenham)
 classification des espèces (Linné 1737)
 classification des maladies mentales(Cullen 1785, Pinel)


Un grand foisonnement intellectuel

Les philosophes jettent un regard nouveau sur
 la nature et la religion
 la situation de l’homme dans le monde

Les médecins n’évoluent pas au même rythme
 la clinique est empêtrée
 dans une nosologie héritée des dogmes de l’antiquité
Le XVIII° : siècle des Lumières (2)

Premiers laboratoires
Morgagni tente d'établir une corrélation
 entre signes cliniques et
 anatomopathologie
 pour en tirer un système de classification rigoureux :
méthode anatomo-clinique


Premières vaccinations
Découverte, fin XVIII°, de la vaccination
antivariolique (Jenner)
 Les gouvernements commencent à se soucier d’hygiène
et de santé publique

Le XIX° : la médecine fondée sur les preuves (1)

Généralisation de la méthode anatomo-clinique
(Bichat)
Bayle : paralysie générale
 Naissance de disciplines nouvelles


Nouveaux moyens d’investigation clinique :
Percussion (Corvisart 1808)
 Auscultation (Laennec 1807) : stéthoscope = trouvaille


Naissance de la physiologie moderne :

Magendie (1817):
 « s’en tenir aux faits

» (Dr Maugredie)
Claude Bernard (1865):
 médecine expérimentale,
 fonction glycogénique du foie
Le XIX° : la médecine fondée sur les preuves (2)

Progrès de la chirurgie :



Pasteur :





anesthésie (chloroforme, 1846),
antisepsie
Streptocoque,
staphyllocoque,
vaccin antirabique
la bactériologie (1877) abat le mythe de la génération spontanée
Médecine = science :

Radiologie
techniques d’investigation,
 chimie de synthèse

Le XX° siècle (1)

Ère des examens para-cliniques



Multiplication des disciplines



morcellement de la clinique
croisement des disciplines
Multiples avancées cliniques et thérapeutiques



imagerie
biochimie
ère de l’efficacité thérapeutique et de la prévention
maladies mortelles  maladies chroniques
La théorie de l’évolution est généralisée



des preuves de l’évolution observables tous les jours
découverte de l’ADN
théorie de l’évolution  théorie générale de l’évolution
Le XX° siècle (2)
 Deux théories générales révolutionnaires
à la fin du XIX°
 Darwin : la théorie de l’évolution des espèces
 Freud : la psychanalyse
 Forment le cadre dans lequel se construit la pensée
scientifique

 Du progrès à l’ère du soupçon
 la médecine est-elle fondée sur des preuves ou sur des
valeurs ?
 grandes guerres, bombe atomique, génocides
 progrès technique : nécessite un supplément d’âme
 la psychanalyse se développe dans le monde entier
Grands courants de la psychiatrie (1)

La pensée psychiatrique


Est d’abord une clinique
Originalité de la psychiatrie :
Elle fait une grande place à la subjectivité
 Sa clinique est inséparable de l’histoire de la pensée
 Repose sur l’écoute


4 grands courants dominent la psychiatrie :
Magico-religieux
 Organiciste
 Psychopathologique
 Courants extrinsèques

Grands courants de la psychiatrie (2)

4 grands courants dominent la psychiatrie :

Magico-religieux
 folie = maladie sacrée

Organiciste
 Maladies mentales = maladies du cerveau
 Exemple paradigmatique de la paralysie générale
 pharmacologie

Psychopathologique
 Maladies mentales = dérèglements de l’esprit
 Suit le paradigme de la psychanalyse
 Diversité des psychothérapies : psychanalyse, TCC

Courants extrinsèques
 Psychothérapie institutionnelle
 Thérapies familiales
 Antipsychiatrie
Epistémologie
Le canard-lapin
Ludwig Wittgenstein
Qu’est-ce qu’une révolution scientifique ? (1)
Thomas Kuhn

La science progresse de manière discontinue
non par accumulation
 mais par rupture


Ces ruptures
sont appelées révolutions scientifiques
 correspondent à un renversement des
représentations du monde
 nous voyons le monde selon le regard que nous
posons sur lui.

Qu’est-ce qu’une révolution scientifique ? (2)
Thomas Kuhn

Exemple du poids au bout d’une ficelle
Pour Aristote : un pendule
 Pour Newton : un objet freiné dans sa chute


La révolution copernicienne
Pour Aristote :
 le soleil tourne autour de la terre (système
géocentrique)
 l’homme est au centre de l’univers
 Pour Copernic :
 la terre tourne autour du soleil (Système
héliocentrique),
 l’homme n’est plus au centre de l’univers

Qu’est-ce qu’un paradigme ?

On appelle paradigme :



Un point de vue théorique général communément
adopté par les scientifiques et renvoyant à des croyances
sociales porteuses d'un point de vue sur la nature.
Révolution scientifique = changement de paradigme.
Les changements de paradigme résultent de crises


Conséquences d’énigmes irrésolues
Mettant en échec les fondements du cadre scientifique
en place, qui n’a pas les outils théoriques et pratiques
pour les résoudre.
Quelques révolutions scientifiques (1)

Copernic : système géocentrique →
héliocentrique



l’homme n’est plus au centre de l’univers
rôle du calcul dans l’étude de la nature
Harvey : la découverte de la circulation
sanguine






le cœur n’est plus l’origine du souffle vital
mais un organe (comparé au soleil) au centre d’une
circulation
controverse des anti-circulateurs
enseignée à la demande de Louis XIV par Dyonis au
jardin du roi
reprise par Descartes pour étayer sa doctrine dualiste
le corps est une machine
Quelques révolutions scientifiques (2)

Darwin : la théorie de l’évolution




sélection des espèces
l’homme et le singe ont un ancêtre commun
l’homme est un animal parmi d’autres
Freud : la psychanalyse




hypothèse de l’inconscient
l’homme n’est plus maître de lui-même
Il s’interroge :
Que veut dire être normal ?
Deux grands modèles étiologiques
à lire : Georges CANGUILHEM : le Normal et le Pathologique
DOCTRINE
ONTOLOGIQUE
FONCTIONNELLE
Cause
Quelque chose d’autre que
l’homme, un être
Perturbation et mécanismes
physiologiques
Exemples
Carences, microbes
Diabète, dysfonctions,
Paradigme
Microbiologie (Pasteur)
Physiologie (Bernard)
Racines
historiques
Hippocrate (entité morbide),
Linné (classification
Naturaliste)
Hippocrate (doctrine humorale), Comte
(positivisme), Broussais, Bernard
Concepts
Méd. des espèces, des
lésions, des spécificités
Méd. de l’exagération, des réactions, de
la mesure
Localisation
La maladie s’inscrit dans
l’espace (le corps)
La maladie s’inscrit dans le temps
(l’histoire, la durée)
Modèle
thérapeutique
Combattre la maladie
comme une ennemie
Rétablir l’équilibre du milieu intérieur
Différence
Santé/maladie
Différence de qualité : santé
et maladie sont deux états
distincts
Différence de quantité : il y a une
continuité entre le normal et le
pathologique (un écart)
Le normal et le pathologique (1)
 L’homme et la norme se comprennent
ensemble :
 Pour
Claude Bernard
 l’état pathologique est une simple modification
quantitative de l’état normal
 il y a une continuité entre l’état normal et l’état
pathologique
 Pour
Canguilhem
 il y a aussi une différence de qualité entre normal
et pathologique : le pathologique est une
altération de l’état de santé, c’est un état autre
 Le pathologique n’est pas une absence de normes
 Il n’est pas le contraire vital de normal mais le
contraire vital de sain
Le normal et le pathologique (2)

Santé et maladie, normal et pathologique
sont deux pôles d’un même équilibre vital
 La S n’est pas simplement l’absence de M
 Aucun critère purement quantitatif ne peut être
trouvé pour déclarer un homme sain


La norme n’est pas la moyenne statistique
Le normal doit se référer à l’individualité
 Le sentiment du pathologique naît d’un jugement de
valeur (« normatif »)
 Ce jugement est posé par le malade
 Le seuil de souffrance à partir duquel une personne
se sent ou non malade dépend de l’individu seul


La vie crée des normes (normativité biologique).
Psychologie médicale
La relation soignant-soigné (1)

Rencontre entre



Interpersonnelle







une personne souffrante et
un professionnel devant lui porter secours.
Médecin
Malade
Infirmier
Famille
Passe par la maladie
S’exerce dans un cadre social
Faite d’attente et d’espérance.
La relation soignant-soigné (2)

Une relation inégale
asymétrique
 complémentarité des rôles

 le médecin est actif
 la malade est passif
vrai dans les maladies aiguës
 mais de + en + participative
 dans les maladies chroniques
 nouveaux métiers, nouveaux intervenants :

 Associations
 Travailleurs pairs
Le malade et la maladie



La maladie est une expérience habituelle :
chaque être humain est concerné
Les réactions de la personne face à la maladie
s’organisent en fonction de sa personnalité et
des représentations de la maladie qu’il se sera
forgé sous l’influence de la culture dans laquelle
il vit.
la maladie est à la fois :
un état : altération biologique (disease)
 un ressenti : vécu du malade (illness)
 une construction sociale : norme sociale (sickness)


La maladie entre toujours dans un récit
La normalité



Classiquement, la santé se définit par l’absence de
maladie.
OMS (1946) : la santé est « un état complet de bien-être
et de satisfaction à la fois physique, mental et social ».
La normalité



peut s’entendre en termes de moyenne : c’est le cas des
normes biologiques
La normalité implique aussi la notion de valeur. C’est parce
que les hommes se sentent malades qu’il y a une médecine
La santé apparaît comme relevant à la fois :


Du système de valeurs que l’on se donne
D’une normalité biologique.
Guérison et maladie

Dans les maladies aiguës :



la notion de guérison est liée à celle de retour à l’état antérieur
(en fait impossible)
Dans les maladies chroniques :


notion plus relative
le plus souvent « apprendre à vivre avec » (sa fragilité, sa
vulnérabilité, son handicap)



le soignant joue alors un rôle dans « l’apprentissage »
le soignant aide le malade à mieux se connaître
le soignant aide le malade à surmonter les crises liées à la maladie.
Les réactions du malade

Être malade signifie :



être en situation de faiblesse :
être en situation de dépendance.
Les réactions du malade face à la maladie

adaptation



Régression





une réaction normale au début qui favorise le suivi du traitement
des « bénéfices secondaires »
déni de la maladie


attitude qui permet au malade de changer sans pour autant désorganiser son
existence.
La qualité de l’adaptation dépend de la personnalité, du système de
valeurs
Refus par peur de la maladie,
témoigne d’une grande fragilité psychique.
vécu de persécution
isolation
L’interaction inné / acquis


Changement de paradigme
 FAUX : un gène = un caractère
 VRAI : un gène = une protéine
Le développement est à la fois



L’identité est à la fois



gènétique
épigénétique
biologique
culturelle
Attention : les paradigmes anciens restent actifs


Le gène de la schizophrénie
L’homosexualité des mouches
L’influence de la culture

La culture influence :






Les pratiques de soin et les représentations de la médecine
L’expression des symptômes
L’expérience de la douleur
La discrimination des symptômes corporels par le malade
L’intérêt spécial porté à une région du corps
La définition des maladies




L’ethnopsychiatrie




qualification d’un fait comme pathologique ou non
distinction de nouvelles catégories nosographiques : MPD, fibromyalgie
description de maladies spécifiques d’une culture (amok)
La comparaison des cultures révèle des invariants
Héritière de la psychiatrie coloniale : attention à l’ethnocentrisme !
Ne pas attribuer à la culture ce qui n’est que la conséquence de l’exil
Intérêt d’écouter les patients parler leur propre langue

Rôle fondamental de l’interprète dans la consultation avec un étranger
Le réseau sémantique de la tuberculose

La tuberculose : maladie littéraire


Phtisie et spleen (1° moitié du XIX°):






Héréditaire, inévitable, fatale, lente
spleen, jeunes gens amoureux,
permet de vivre intensément et
tragiquement.
La maladie sort de la sphère de l’intime
Maladie  support d’un genre littéraire
Tuberculose et misère (fin XIX°,
début XX°)




Dumas, Balzac, Zola, Kafka, Céline, Mann
BK, symbole de la révolution pastorienne
Contagion, prévention, vaccin (BCG),
hygiène, dispensaires,
mais aussi : fléau social, misère,
promiscuité, isolement, sanatorium (Zola,
naturalisme, réalisme social)
Tuberculose  SIDA
Sarah Bernardt : « La dame aux camélias » (Alexandre Dumas, 1848)
Le paradoxe de l’identité humaine
Paul Ricœur

La médecine est à la fois



Fondée sur des preuves
Fondée sur des valeurs
Tout homme est à la fois

Le même et soi-même






Identité idem : le caractère
Identité ipse : la promesse
Fragile et responsable
Dépendant et autonome
Chaque homme est un monde
Respecter la singularité de chacun
Malades et citoyens

Rôle croissant des associations d’usagers






Participation des usagers à la vie de la cité



Reconnaissance des droits des malades
Lutte contre la stigmatisation
Espace de parole
Espace de formation
Forums de discussion sur internet
Rôle croissant des GEM
Droit à la différence
Rôle des institutions



Faciliter l’accès aux soins
L’état et les élus
Les organisations caritatives


Exemple de MDM
Prisonniers, sans papiers : il y a en France des non-citoyens
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