Le Choc Traumatique - Tout un programme

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LE CHOC TRAUMATIQUE
Pr. R GRAICHI
I. INTRODUCTION :
L'état de choc est une pathologie grave nécessitant un traitement urgent qui sera d'abord
symptomatique puis rapidement associé à une réflexion sur le contexte et l'étiologie. Cette
réflexion permettra d'affiner la thérapeutique et de choisir les drogues appropriées à
administrer.
II.POINTS ESSENTIELS :
Le but de la démarche n'est pas tant de faire un diagnostic étiologique précis de l'état de choc
que de rassembler un faisceau d'arguments permettant de transporter le patient vers la
structure hospitalière la plus adéquate.
· L'état de choc est une hypoperfusion prolongée entraînant une ischémie cellulaire avec
production de lactates.
· L'état de choc se révèle souvent par une détresse d'organe (respiratoire, neurologique) qui
motive l'appel au Samu et qui masque le reste de la symptomatologie.
· Le diagnostic de l'état de choc se fera sur la conjonction du contexte, de signes fonctionnels,
de l'examen clinique et d'examens paracliniques simples.
· L'épreuve de remplissage et l'analyse des déterminants de la pression artérielle peuvent
orienter vers le type de choc.
· L'intubation du patient ne sera indiquée qu'en cas de détresse respiratoire ou de troubles de la
conscience. Cela évitera la sédation systématiquement associée et donc l'annulation de la
stimulation des réflexes sympathiques maintenant une pression de perfusion des organes.
· En cas d'état de choc traumatique, un bilan initial précoce permettra de prévenir les équipes
anesthésique et chirurgicale adéquates.
· Il faut, dans le cadre de la traumatologie, savoir très rapidement mettre en condition et
transporter le patient.
III. DEFINITION :
État qui survient quand le cœur ne pompe pas assez de sang pour remplir les artères avec une
pression sanguine nécessaire pour faire parvenir l’ O2 aux organes et aux tissus.
Le collapsus est une chute importante de la pression artérielle. Sa définition est donc
uniquement hémodynamique.
L'état de choc constitue une inadéquation entre les apports en oxygène (O2) et la demande en
O2 cellulaire.
À l'état normal, les apports sont supérieurs à la demande ; il n'y a donc aucune souffrance
cellulaire. Lors d'un état de choc, la demande devient supérieure aux apports ; il s'ensuit une
ischémie cellulaire. Les cellules travaillent en anaérobiose, aboutissant à la production de
lactates. Le choc est donc une hypoperfusion tissulaire prolongée avec ou sans collapsus.
IV.PHYSIOLOGIE - PHYSIOPATHOLOGIE :
Deux choses sont nécessaires pour que le sang et les autres liquides puissent circuler dans
l’organisme : assez de sang et une pression suffisante pour qu’il se déplace.
Deux facteurs aident à maintenir la T.A. nécessaire :
1. La quantité de sang expulsée du cœur à chaque minute (débit cardiaque)
2. La pression créée par la constriction des artères qui crée une résistance (la résistance
vasculaire périphérique). Lorsque les artères se resserrent le sang a moins de place
pour passer met la pression augmente. Au contraire lorsqu’elles se dilatent, le passage
s’élargissant, la pression diminue. Le SNC exerce un contrôle constant de la T.A. en
faisant se resserrer ou se dilater les artères.
Pression systolique : résulte de la contraction du cœur au moment de l’expulsion du sang.
Pression diastolique : la pression qui demeure lorsque le ventricule se dilate.
Lorsque le flux sanguin est entravé, le corps compense de la façon suivante : les muscles
lisses des Vx se contractent, ce qui fait s’éloigner le sang des membres et de l’abdomen et
l’attire vers le cerveau et les organes de la cage thoracique (cœur, poumons, cerveau, SNV
– car toujours besoin de grande quantité de sang oxygéné)
Le cœur subit alors 3 phénomènes qui finissent par diminuer son rendement :
1. La résistance accrue de la circulation du sang dans les capillaires et les muscles oblige
le cœur à travailler plus fort pour pousser le sang dans les vaisseaux.
2. L’apport en O2 diminue alors même qu’il en faudrait plus compte tenu de l’effort
accru demandé au cœur.
3. Il n’y a pas assez de sang pour adéquatement remplir les cavités cardiaque; à moitié
vide, le cœur doit se contracter plus souvent tout en pompant moins de sang ( implique
⇑ Rythme cardiaque et ⇓ de T.A.)
Pour réagir à l’état de choc, le corps recourt aux moyens de défense suivants :
• lorsque l’apport sanguin est inadéquat, les Vx se contractent
• les contractions du cœur deviennent plus fortes et plus rapides, ce qui fait
s’accroître le débit cardiaque
• les glandes adrénalines libèrent de l’épinéphrine
• le corps tente de se débarrasser de ses déchets en accélérant la respiration
• au fur et à mesure que l’état de choc progresse, le cerveau qui reçoit de moins
en moins de sang et d’o2 fonctionne de plus en plus au ralenti. La victime
commence par ressentir de l’anxiété et par la suite il se produit un
ralentissement des fonctions intellectuelles puis des fonctions motrices et
sensorielles.
V.ETIOLOGIES :
On distingue 3 causes fondamentales :
• la perte de liquide par le système circulatoire (choc hypovolémique) Une telle
perte résulte habituellement d’une blessure (qui provoque une hémorragie),
d’une brûlure (qui entraîne la perte de plasma) ou d’une déshydratation ( qui
est une perte de liquide). Le cerveau réagit alors en envoyant certains signaux
et en libérant des hormones qui font augmenter le débit cardiaque et la
résistance vasculaire.
• L’incapacité du cœur de pomper suffisamment de sang (choc cardiogénique).
On se retrouve alors dans un cercle vicieux : le cœur ne pouvant pas pomper
suffisamment de sang, le flux sanguin diminue, cela produit une réduction de
la T.A. qui entraîne elle-même un affaiblissement du cœur et un cœur affaibli
ne peut plus pomper suffisamment de sang.
• La dilatation ou la constriction des Vx qui éloignent le sang des organes
vitaux (choc dû à la diminution de la résistance vasculaire périphérique (choc
septique ou choc neurogène)). Ce type de choc peut être causé par différentes
choses et notamment par une blessure à la tête.
Un état de choc peut être causé par tout ce qui peut influer sur le volume de fluide sanguin
dans le corps, sur la résistance vasculaire périphérique ou sur le débit cardiaque.
1. ÉTAT DE CHOC DU À UNE PERTE DE FLUIDE SANGUIN
Le choc hypovolémique hémorragique : résulte d’une perte de sang dans le système
circulatoire, habituellement à la suite d’une hémorragie interne ou externe. Il n’y a pas
suffisamment de sang pour irriguer tous les organes du corps.
Le choc hypovolémique non hémorragique ou métabolique : se produit lorsqu’une
blessure ou qu’une maladie non traitée entraîne une perte importante de liquide. Cela peut
se produite par exemple par une brûlure grave ( qui provoque une perte de plasma) ou par
une maladie grave entraînant une déshydratation ( consécutives à une diarrhée, à des
vomissements ou à une miction excessive).
VI. LE DIAGNOSTIC :
1. DIAGNOSTIC DE L'ÉTAT DE CHOC
Le diagnostic de l'état de choc est parfois difficile à la phase initiale en raison de l'absence de
collapsus et de la prédominance d'un signe fonctionnel respiratoire ou neurologique.
Le motif de l'appel pour une intervention à l'extérieur de l'hôpital est d'ailleurs très souvent
une dyspnée, un coma, un malaise, ou encore une simple altération de l'état général. Ainsi, la
difficulté de la démarche est justement de ne pas passer à côté du diagnostic de choc : nombre
de dyspnées étiquetées « décompensation de bronchopathie chronique obstructive » s'avèrent
être en réalité des chocs septiques ou hypovolémiques ; de la même manière, il arrive qu'on
appelle « accident vasculaire cérébral » un trouble de conscience associé au choc chez le sujet
âgé.
Seul un bilan clinique complet et systématique au chevet du patient permettra de poser le
diagnostic.
2. DONNES DE L’EXAMEN INITIAL
Les premières mesures prises (pression artérielle, fréquence cardiaque, saturation percutanée
en oxygène [SpO2], fréquence respiratoire), associées à un examen clinique rapide du patient ,
permettront de faire le diagnostic.
L'inspection pourra retrouver :
- des marbrures : elles se voient tout d'abord au niveau des genoux, des coudes puis peuvent
s'étendre sur les membres inférieurs, remonter sur l'abdomen et le thorax. Elles traduisent une
vasoconstriction des capillaires cutanés ;
- d'autres signes cutanés : sueurs froides, cyanose ou pâleur, augmentation (> 3 secondes) du
temps de recoloration cutanée.
Hypotension artérielle
Elle est retrouvée la plupart du temps dans les états de choc sévères. Cependant, à la phase
précoce du choc, elle pourra être « pseudo-normale » du fait de l'élévation des résistances
artérielles secondaires à l'hypercatécholaminergie réactionnelle. La tachycardie fréquemment
associée, également secondaire à l'hyperactivité sympathique, incitera le médecin à se méfier
s'il pense que celle-ci ne peut se rapporter uniquement à une hyperthermie, à une douleur
intense ou à l'anxiété du patient. La pression artérielle, sauf si elle est d'emblée basse, n'est
donc pas un bon reflet de la gravité du choc.
Répercussions neurologiques
Obnubilation, agitation, vertiges, convulsions, coma sont des signes d'ischémie cérébrale
secondaires à l'hypoperfusion et à l'hypoxémie associée.
Répercussions respiratoires
Polypnée ou tachypnée vont lutter contre l'hypoxémie.
Ces répercussions neurologiques et respiratoires sont les premiers éléments visualisés .
Au total, lors d'un état de choc sévère :
Il existe une baisse de la pression artérielle systolique (PAS). Cependant, une PAS dans les
limites de la normale peut se voir au tout début d'un état de choc encore compensé, c'est-àdire au moment où le patient est vu par l'équipe du Samu.
L'association à une tachycardie ou à des marbrures doit déjà alerter. Les mesures très
rapidement effectuées auprès du patient ainsi qu'un examen clinique sommaire permettront de
faire le diagnostic d'état de choc.
La composante métabolique de l'état de choc (hyperlactatémie) , pourrait également retrouver
une baisse de la réserve alcaline, une hyperkaliémie. Cependant, la pratique de ces examens,
même s'ils sont techniquement réalisables, passe en deuxième intention, une fois le patient
stabilisé.
VII. EVOLUTION :
LES STADES DE L’ÉTAT DE CHOC
L’état de choc se développe de façon graduelle; il passe par 3 stades et, à moins d’être
adéquatement traité, aboutit à la mort.
L’état de choc résulte d’une irrigation sanguine inadéquate des tissus du corps. Ce n’est pas
une maladie à proprement parler mais plutôt une conséquence d’un trauma ou d’une maladie.
Une personne peut tomber en état de choc à la suite d’une blessure grave entraînant une
importante perte de sang ou des dommages au cœur, à la colonne vertébrale ou aux poumons,
ou lorsqu’une maladie grave cause une vasodilatation périphérique ou une déshydratation
grave.
Pour parvenir à l’homéostasie (équilibre) et compenser le choc, le corps met en branle une
série de mécanismes complexes. Si l’état de choc est grave ou se prolonge, il peut devenir
irréversible. Savoir reconnaître les signes et symptômes de chacun des stades de l’état de
choc aidera à déterminer la gravité de l’état des victimes et à prendre les mesures appropriées
pour leur venir en aide.
1. Stade du choc compensé :
•
agitation, anxiété, irritabilité, crainte.
•
Léger accroissement de la fréquence cardiaque
•
T.A. normale ou pression systolique légèrement élevée ou pression diastolique
légèrement inférieure à la normale.
•
Peau pâle et froide dans le cas d’un choc hypovolémique, chaude et rouge dans
le cas d’un choc septique, anaphylactique ou neurogène.
•
Léger accroissement de la fréquence respiratoire
•
Légère diminution de la température du corps (sauf dans le cas du choc
septique, où il y a de la fièvre)
2. Stade du choc progressif (non compensé) :
• apathie, confusion, ralentissement de l’élocution.
• Fréquence cardiaque élevée
• Pouls filiforme, ralenti, irrégulier et faible
• Diminution de la T.A.
• Peau froide, moite et cyanosée
• Respiration rapide
• Baisse considérable de la température du corps
• Confusion et incohérence, difficulté à articuler et parfois évanouissement
• Réflexes diminués ou inexistants
• Pupilles dilatées, réagissent lentement.
• T.A. T.T. diminuée et pression diastolique nulle
• Respiration lente, peu profonde et irrégulière
Au premier stade de l’état de choc, le CHOC COMPENSÉ, le corps se sert de ses mécanismes
de défense pour tenter de maintenir un fonctionnement normal. Il y a alors peu de signes et de
symptômes.
Lorsqu’une hémorragie n’est pas enrayée, les mécanismes de défense du corps ne peuvent
plus suffisamment compenser. Le patient passe alors au 2e stade de l’état de choc; le CHOC
PROGRESSIF. Afin de pouvoir continuer à fournir du sang oxygéné aux organes vitaux, le
corps retire du sang des membres et de l’abdomen, pour le diriger vers le cœur, les poumons
et le cerveau. Parmi les signes et les symptômes de ce stade de l’état de choc, on peut
mentionner une peau marbrée ou cyanosée, une diminution de la T.A. et des changements
importants relativement au niveau de conscience.
Il n’y a pas de symptômes immédiats clairs du CHOC IRRÉVERSIBLE, qui est le stade final.
Les dommages commencent habituellement à se manifester après plusieurs jours, lorsque les
organes se mettent à cesser de fonctionner et à mourir. À ce dernier stade, le sang est retiré du
foie et des reins et concentré dans le cœur et le cerveau; le foie et les reins meurent alors.
Ensuite, les Vx ne parviennent plus à maintenir la pression nécessaire pour irriguer le cerveau
et le cœur; le sang commence à s’éloigner de ces organes vitaux et le patient meurt.
SIGNES ET LES SYMPTÔMES DE L’ÉTAT DE CHOC
Il est à remarquer que les changements les plus évidents en ce qui concerne les signes vitaux
ne se manifestent qu’assez tardivement dans l’évolution de l’état de choc
Il est essentiel de savoir qu’une tension artérielle faible est un signe très sérieux mais tardif
d’un état de choc; une personne peut donc être dans un état de choc grave et avoir quand
même une T.A. presque normale.
La diminution de l’apport de sang rend la peau pâle, moite et cyanosée.
Lorsque le débit cardiaque diminue, le pouls s’accélère (le cœur tentant de compenser la
diminution du débit)
Quand la T.A. diminue, le pouls s’affaiblit
Une irrigation sanguine inadéquate du cerveau entraîne de l’anxiété, de la confusion, de
l’apathie et l’évanouissement.
Une irrigation sanguine inadéquate à l’estomac cause des nausées et des vomissements.
SIGNES ET SYMPTÔMES COMMUNS À TOUS LES ÉTATS DE CHOC SAUF LE
CHOC ANAPHYLACTIQUE
-
agitation, anxiété, peur, désorientation, confusion mentale, et expression d’abattement
ou d’angoisse
impression de fin imminente
peau froide et moite (sauf choc septique)
transpiration profuse
très grande soif
nausées ou vomissements
peau initialement terne et crayeuse, puis cyanosée
respiration irrégulière et peu profonde
étourdissement
perte de conscience ou changement relativement au niveau de conscience
pouls faible et rapide
paupières partiellement ou totalement fermées; pupilles dilatées; yeux ternes et vitreux
tremblement des bras et des jambes, ou de tout le corps, comme si le patient avait très
froid
hypotension (signe tardif) diminution graduelle et régulière de la T.A. (jusqu’à 90/60
ou plus bas), éventuellement au point où il devient impossible de la mesurer.
CHOC HYPOVOLÉMIQUE :
Choc hypovolémique
Choc hémorragique (hémorragies).
Plasmorragies: perte de plasma (brûlures).
Déshydratation: perte de liquide.
•
•
•
•
•
Pouls rapide, faible, filant
Soif
Absence ou ralentissement du retour capillaire
Hypotension
( baisse de la pression sanguine)
Diminution de l’état de conscience
Respiration rapide, peu profonde
Transpiration
Peau pâle, froide, moite
Anxiété, agitation
VIII. LE TRAITEMENT :
1.Gestes immédiats
Une fois le choc diagnostiqué, il faudra effectuer des gestes simples de maintien des fonctions
vitales tout en essayant d'en déterminer l'étiologie :
- allonger complètement le patient s'il n'existe pas de détresse respiratoire ; sinon mettre les
jambes à l'horizontale, le patient étant en position demi-assise. Les jambes peuvent être
également surélevées par un coussin ;
- mise en place d'une ou deux voies veineuses de gros calibre avec soluté cristalloïde ou
colloïde ;
- oxygénation voire intubation en cas de détresse respiratoire importante ou de coma ;
- monitorer le patient avec un oxymètre de pouls, un scope, un brassard à tension branché sur
un oscillomètre programmé pour une mesure automatique à intervalles courts de la pression
artérielle.
2.Analyse du mécanisme du choc
Une fois les gestes d'urgence effectués, le problème est d'essayer d'analyser plus finement le
mécanisme responsable du choc. Le contexte, les antécédents recueillis auprès du patient, de
la famille ou des témoins, ses traitements déclarés ou ordonnances retrouvées auprès de lui
ainsi que les signes fonctionnels et d'examen clinique orienteront vers quatre types de chocs :
anaphylactique, septique, hypovolémique ou cardiogénique. Cette démarche est fondamentale
car elle induira une conduite à tenir spécifique et un transport du patient vers la structure
hospitalière la plus adéquate (réanimation, salle de déchoquage ou directement au bloc
opératoire, service de cardiologie avec chirurgie cardiaque à proximité).
3.Intérêt de la mesure de la pression artérielle différentielle
Lorsqu'on mesure une pression artérielle, il faut systématiquement prendre à la fois la PAS et
la pression artérielle diastolique (PAD). L'importance du choc ne se mesure pas uniquement à
la chute de la PAS. Les valeurs de PAD et de pression artérielle différentielle (PAd) sont
importantes à prendre en compte.
Une PAD basse associée à un maintien de la différentielle signifie une vasoplégie. En effet, la
baisse des résistances artérielles systémiques, quel qu'en soit le mécanisme, entraîne une
baisse de la PAD (dont elles sont un des déterminants) et ainsi une baisse secondaire de la
PAS. Les deux types de chocs dans lesquels une vasoplégie est souvent retrouvée sont les
chocs septique et anaphylactique.
Une PAD peu ou non abaissée associée à un pincement de la PAd signifie que le primum
movens de la baisse de pression artérielle est la PAS. En effet, la PAS est déterminée par le
volume d'éjection systolique donc par la précharge et la contractilité myocardique, mais aussi
par l'impédance aortique et le niveau de PAD. Ainsi, une baisse de la PAS sans baisse notable
de la PAD sera due à une hypovolémie (hémorragie, déshydratation...) ou à une défaillance
cardiaque avec réaction réflexe sympathique aboutissant à une augmentation des résistances
artérielles systémiques. La PAD ne s'effondrera donc pas.
Ainsi, la simple analyse des pressions artérielles systolique et diastolique par un oscillomètre
peut donner une idée précise du type de choc.
4.SIGNES CLINIQUES ET CONDUITE A TENIR :
Diagnostic évident
Choc hypovolémique
C'est le cas par exemple d'un choc traumatique (plaie par arme blanche ou à feu,
défénestration, accident de voie publique...) ou d'une hémorragie extériorisée (épistaxis, plaie
vasculaire pulsatile ou non) pour lesquels, dans la grande majorité des cas, l'étiologie est
hémorragique.
Le contexte est évident. Il existe une pâleur, une augmentation du temps de recoloration
cutanée, une pression artérielle différentielle pincée, une pression artérielle systolique
maintenue (choc compensé) ou diminuée (choc décompensé), une tachycardie, une polypnée,
des éventuels troubles de conscience allant de la somnolence à l'obnubilation, l'agitation ou le
coma. Une mesure basse du taux d'hémoglobine capillaire ou un microhématocrite permettra
de conforter le diagnostic. Cependant, à la phase précoce du choc, les valeurs retrouvées
peuvent être encore normales.
Ce peut être également une hypovolémie par perte plasmatique (déshydratation,
vomissements, diarrhées, brûlure étendue...). Seront alors retrouvés des signes de
déshydratation extra et intracellulaire. L'hémoglobine capillaire sera normale, voire
augmentée.
Le traitement consistera en un remplissage vasculaire. En cas de choc hémorragique, un point
de compression en cas d'hémorragie externe, un pantalon antichoc dans le cadre d'une
hémorragie extrême sous-diaphragmatique (bassin, abdomen), sont un préalable indispensable
à toute expansion volémique. Le remplissage a minima va permettre de récupérer une
pression artérielle systolique aux alentours de 75-80 mm Hg en l'absence de traumatisme
crânien.
En cas de traumatisme crânien associé, il faudra maintenir une perfusion cérébrale minimale
et remplir le patient de façon plus importante afin de maintenir une PAS de 90 mm Hg
comme recommandé . Ce ne sera que dans des conditions extrêmes et malgré le remplissage
préalable, qu'afin de maintenir le patient en vie avec une pression minimale, on pourra être
amené à administrer des catécholamines en intraveineux, adrénaline ou noradrénaline, à la
seringue électrique en débutant à environ 0,5 mg·h-1. Ce débit sera augmenté de façon
progressive toutes les 10 minutes, en cas de besoin, le temps d'arriver à l'hôpital.
En cas d'hypovolémie non hémorragique, le remplissage avec des cristalloïdes et/ou de
colloïdes sera également le premier traitement après la pose de deux voies veineuses de gros
calibre.
Dans certains cas de chocs hypovolémiques très sévères, la tachycardie réflexe d'origine
sympathique est remplacée par une bradycardie (plus ou moins importante). Une des
explications physiopathologiques serait la mise en jeu de mécanorécepteurs cardiaques situés
au niveau de la paroi ventriculaire gauche. Ceux-ci seraient stimulés par un très mauvais
remplissage diastolique, combiné à de vigoureuses contractions ventriculaires entraînant une
compression des cellules myocardiques. Ce phénomène ne se produirait qu'après stimulation
extrême du sympathique avec tachycardie initiale. Les voies afférentes seraient vagales non
médullaires. Cette bradycardie réflexe permettrait donc un meilleur remplissage diastolique et
une diminution des phénomènes hémorragiques sous-endocardiques dus à la compression
myocardique . L'absence de tachycardie lors d'une hémorragie est donc un signe imminent de
collapsus circulatoire majeur imposant comme seule thérapeutique un remplissage rapide et
massif. Il ne faut surtout pas utiliser de parasympatholytique, type atropine, du fait du risque
d'induction de trouble rythmique à type de fibrillation ventriculaire.
Diagnostic non évident :
Chaque type de choc a une explication physiopathologique propre. Cependant, ils peuvent
évoluer au fil du temps induisant une intrication rendant difficile l'analyse clinique et
étiologique. Le choc septique est à la fois hypovolémique par augmentation de la perméabilité
vasculaire mais également cardiogénique par sa composante dépressive myocardique, et
vasoplégique du fait de l'action vasculaire des médiateurs de l'inflammation.
Le choc anaphylactique est vasoplégique mais également hypovolémique. Le choc
hémorragique peut rapidement impliquer une défaillance multiviscérale. Par ailleurs, les
antécédents du patient ne sont pas toujours clairs mais également intriqués surtout chez le
sujet âgé aux antécédents pulmonaires mais aussi cardiaques ou bronchospastiques (asthme,
bronchopathie chronique obstructive).
Ainsi, le mécanisme du choc n'est pas toujours évident d'emblée. Le but est alors, non pas
d'essayer de faire un diagnostic fin, mais de maintenir une pression de perfusion. Un premier
élément qui peut orienter est le test de remplissage. Un autre geste est de maintenir surélevées
les deux membres inférieurs. La pression artérielle est mesurée juste avant et juste après le
test. Celui-ci va permettre de voir très rapidement si la prédominance est cardiogénique ou
non cardiogénique. L'augmentation de pression artérielle secondaire au test ainsi que la non
aggravation clinique du patient témoignent d'un choc non cardiogénique. La continuité de ce
remplissage pourra être bénéfique.
S'il n'y a pas du tout d'amélioration hémodynamique par le test de remplissage, le problème
semble donc être cardiogénique et on peut penser alors que la dobutamine puisse être le
médicament de première intention. Elle pourra être secondairement associée à l'adrénaline ou
la noradrénaline s'il faut ajouter une action plus vasoconstrictrice, en pratique, si le collapsus
persiste.
IX.CONCLUSION
L'état de choc est de diagnostic généralement simple même si c'est rarement le motif d'appel
d'une intervention de Samu. En revanche, son mécanisme exact et son étiologie ne sont pas
toujours simples à déterminer. Le but de l'équipe médicalisée est de maintenir les fonctions
vitales du patient, d'assurer une surveillance stricte pendant le transport et de l'orienter au
mieux vers la structure hospitalière la plus adaptée. Le premier traitement sera le plus souvent
le remplissage par macromolécules. La bonne connaissance de la pharmocodynamie des
drogues vasoactives est indispensable pour un complément de traitement.
Ce document est diffusé sur www.blousesblanches.org avec l’accord de l’auteur
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