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CONGRÈS
RÉUNION
Compte-rendu du 11e congrès
de gynécologie obstétrique
et reproduction Gynazur
Nice, hôtel Le Negresco, du 14 au 16 mai 2014
J. Lutringer*, J. Antomarchi*, F. Deront Bourdin*, D. Quaranta*, E. Lluzar-Gaglio*
La vitrification ovocytaire
et embryonnaire, un
bouleversement médical,
sociétal et de nos pratiques
J. Lutringer*
Repenser la FIV à la lumière de la
vitrification embryonnaire
D’après la communication du Pr Samir Hamamah
(Montpellier, France)
Depuis les années 2000, les mentalités et pratiques
en fécondation in vitro (FIV) ont évolué. Le SET
(Single Embryo Transfer) s’est développé, et la congélation des embryons surnuméraires est devenue une
étape-clé, offrant aux couples des chances de grossesse supplémentaires à partir d’un seul cycle de
stimulation. La technique de vitrification a montré
des taux de survie embryonnaire, d’implantation et
de grossesse nettement supérieurs à ceux obtenus
par congélation lente. Ainsi, l’Agence de la biomédecine (ABM) a validé son utilisation depuis 2010.
Ses objectifs sont d’obtenir un arrêt réversible du
métabolisme, un maintien de l’intégrité cellulaire et
une stabilité génétique à très basse température et
de conserver une viabilité optimale après réchauffement. Cette technique permet d’atteindre une
température de – 25 000 en 2 secondes seulement,
évitant ainsi le phénomène de précipitation et la
formation de cristaux. Plus l’embryon est développé,
meilleure est sa tolérance à la vitrification. Le coût
de celle-ci est cependant 5 fois supérieur à celui de la
congélation lente. En France, 48 centres pratiquent
la vitrification embryonnaire. Parmi eux, 40 (83 %)
ont déjà réalisé des réchauffements, avec des taux
de survie de l’ordre de 80 % et plus, et un taux de
grossesse par transfert entre 20 et 29 % selon le
stade de maturation embryonnaire.
8 | La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014
Parallèlement au développement de la vitrification,
le “freeze all” s’est imposé comme la nouvelle stratégie de prise en charge en FIV. Celui-ci consiste à
désynchroniser le cycle stimulé : tous les embryons
obtenus à partir d’un cycle stimulé sont vitrifiés et
transférés lors d’un autre cycle, spontané ou substitué. Ce processus vise à potentialiser les chances
d’implantation et à augmenter le taux de grossesse
en améliorant la synchronisation endomètreembryon et en sélectionnant des embryons plus
compétents ayant résisté au processus de congélation-décongélation. Il diminuerait aussi l’incidence
du syndrome d’hyperstimulation ovarienne.
Stratégies de transfert des embryons
après cryopréservation
D’après la communication du Dr Saïd Lazrak (Casablanca, Maroc)
Le transfert secondaire des embryons congelés (TEC)
peut se faire au cours d’un cycle spontané ou d’un
cycle artificiel, stimulé ou substitué. Il se fera 3 à
5 jours après l’ovulation spontanée ou le déclenchement de l’ovulation en fonction de l’âge des
embryons. Dans des conditions de cycle substitué,
la progestérone intravaginale doit être prolongée
jusqu’au relais placentaire, soit 8 semaines de grossesse. Il n’existe, à ce jour, pas de preuve suffisante
pour recommander un protocole par rapport à un
autre en termes de taux de grossesse.
Vers une vitrification ovocytaire
sociétale ?
D’après la communication du Dr Joëlle Belaisch-Allart
(Paris, France)
Le désir tardif d’enfant est devenu un phénomène
de société. Les techniques de PMA montrent des
résultats médiocres chez ces patientes avançant
en âge. Ce constat soulève la problématique de la
CONGRÈS
RÉUNION
préservation de la fertilité d’indication sociétale,
et non seulement médicale. En France, les lois de
bioéthique de 2004 et 2011 n’autorisent le recueil
et la conservation des gamètes ou du tissu germinal
qu’en cas de traitement ou de pathologie susceptibles d’altérer la fertilité. Ainsi, de plus en plus de
femmes ont recours à la congélation ovocytaire
dite “de confort” à l’étranger. La préservation de la
fertilité d’indication sociétale se heurte à plusieurs
limites d’ordre éthiques et financières. Néanmoins,
en 2014, il semble indispensable de tenir compte
de l’évolution de notre société et de réfléchir à des
possibilités d’autoriser cette pratique de manière
très encadrée.
Le banking en Espagne/expérience
de la clinique Eugin
D’après la communication du Dr Valérie Vernaeve
(Barcelone, Espagne)
est disponible : l’Inexscreen. Il permet, avec une
bonne fiabilité, de détecter 2 isoformes, la i-hCG
et la β-hCG libre, dont les taux sont diminués dans
les grossesses d’évolution anormale. La voie endovaginale est la référence, elle permet de visualiser
des signes directs (masse latéro-utérine), et des
signes indirects (vacuité utérine, hémopéritoine,
hématosalpinx). Les 2 pièges classiques à éviter
sont : le pseudo sac gestationnel et la grossesse
hétérotopique, retrouvée essentiellement en PMA.
La grossesse jeune de localisation indéterminée
(GJLI) est définie par un test de grossesse positif
et l’absence de signes échographiques. Il convient
d’analyser la cinétique des β-hCG plasmatiques,
associée à un dosage unique de la progestéronémie,
et de répéter les échographies.
Jusqu’où aller avec le traitement
médical ?
D’après la présentation du Dr A. Agostini
Le banking d’embryons et d’ovocytes trouve ses indications dans la prévention du syndrome d’hyperstimulation ovarienne, la réduction des grossesses
multiples et permet d’améliorer les résultats en
FIV (technique du freeze all). Le banking d’ovocytes
permet, de plus, d’optimiser les programmes de don
d’ovocytes (amélioration de l’attribution des phénotypes, etc.) et offre aux patientes la possibilité de
préserver leur fertilité sans nécessité d’une indication
médicale.
Ainsi, la clinique Eugin a vu le nombre de TEC quadrupler en 4 ans (466 en 2009, 2 062 en 2013). En 2013,
80 % des receveuses présentaient des embryons en
surnombre congelés, et le taux de grossesse obtenu
après TEC était de 31 %.
La grossesse extra-utérine
en 2014
J. Antomarchi*
Grossesse extra-utérine :
pièges diagnostiques
D’après la communication du Dr Olivier Toullalan
(Cannes, France)
Le diagnostic de grossesse extra-utérine (GEU)
doit être évoqué devant toute femme en âge de
procréer présentant des douleurs abdominales ou
des métrorragies. Le diagnostic repose sur un test
de grossesse positif (urinaire ou plasmatique) et une
échographie pelvienne. Un nouveau test urinaire
Le traitement médical de la GEU par méthotrexate
nécessite une information de la patiente concernant
le suivi et le risque d’échec. L’observance est fondamentale. Ce traitement ne peut être envisagé que
si un plateau technique proposant un traitement
chirurgical est disponible 24 h/24. La prescription
se fait hors AMM. Les facteurs prédictifs d’échec
doivent être connus et recherchés, notamment
un taux de β-hCG > 5 000 UI/L. Pour les GEU peu
actives (β-hCG < 1 500 UI/L, avec une cinétique en
plateau ou décroissante), une attitude expectative
peut être proposée, avec une surveillance armée.
Dans les GJLI, si un traitement par métrotrexate
est décidé, la patiente doit être prévenue du risque
tératogène.
Fertilité après GEU
D’après la présentation de P. Madelenat et Hervé
Fernandez (Paris, France)
La mortalité est faible, mais la morbidité n’est pas
négligeable, notamment concernant la fertilité ultérieure. Des études ont montré qu’une femme ayant
eu une GEU lors de sa première grossesse a moins
de chance de concevoir qu’une femme ayant fait
une fausse couche ou une IVG. Certains facteurs
comme l’âge (> 35 ans), les pathologies tubaires
associées et des antécédents d’infertilité sont des
facteurs de mauvais pronostic de fertilité après
GEU. L’étude randomisée DEMETER a montré qu’il
n’y avait pas de différence significative en termes
de fertilité spontanée après traitement chirurgical
La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014 | 9
CONGRÈS
RÉUNION
et traitement médical, ni entre traitement radical
et traitement conservateur. La qualité du geste
opératoire est fondamentale pour préserver une
fertilité. L’énergie bipolaire est à préférer à l’énergie
monopolaire. Le taux de grossesse dans chaque bras
de l’étude est environ de 70 %. Le recours systématique au méthotrexate permet de faire chuter le
taux d’échec de traitement chirurgical conservateur
de 15 à 1 %.
Bien naître
F. Deront Bourdin*
Césariennes urgentes non programmées,
de quels délais dispose-t-on ?
Intérêt des codes couleur
D’après la communication du Dr René-Charles Rudigoz
(Lyon, France)
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““Compte-rendu
Compte-rendu
du 11e congrès
de gynécologie
obstétrique
et reproduction
Gynazur”
Gynazur”
J. Lutringer et al.
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L’organisation des équipes en salle de naissance doit
être optimale afin de réaliser les césariennes non
programmées dans les meilleurs délais, adaptés au
degré de l’urgence obstétricale.
L’équipe de la Croix-Rousse (Lyon) a mis en place
un vecteur de communication simple et efficace
pour faciliter les transmissions au sein des équipes.
II s’agit d’un code couleur : rouge pour les césariennes très urgentes, orange pour les césariennes
urgentes, vert pour les césariennes non urgentes. Le
délai décision-naissance devait être de 15 minutes
cas de code rouge, 30 minutes en cas de code orange,
et 60 minutes en cas de code vert.
Entre 2000 et 2013, le pourcentage de césariennes
urgentes est resté stable, tout comme le taux des
césariennes codes rouge et orange. L’application
du code couleur a permis une diminution du délai
décision-naissance, passant de 39,5 minutes en
moyenne à 15,1 minutes (code rouge et orange
confondus). Les délais fixés par le code couleur
étaient respectés dans plus de 96 % des cas. Le
code couleur était adapté au degré d’urgence dans
plus de 80 % des cas.
Le système du code couleur est donc un moyen
efficace d’identifier les situations à risque, dans
lesquelles les équipes doivent être mobilisées
rapidement. Il semble nécessaire de mettre en
place, au sein de chaque service, des protocoles
adaptés au niveau de l’urgence obstétricale. Ces
protocoles doivent être élaborés par une équipe
pluridisciplinaire, en tenant compte des spécificités
de chaque structure.
10 | La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014
Bien-être et perception de son corps
par la femme enceinte
D’après la communication du Dr Julie Banet (Marseille,
France)
La grossesse est une période de modifications
physiques et psychiques importantes, qui peut
remettre en cause la notion de bien-être. À chaque
trimestre de grossesse, la femme enceinte passe par
des étapes émotionnelles spécifiques, où se mêlent
angoisse, joie, ambivalence et harmonie.
Le vécu des transformations corporelles au cours
de la grossesse varie énormément d’une femme à
l’autre. Les séances de préparation à l’accouchement
peuvent être un lieu d’écoute et de partage, ce qui
favorise l’acceptation de ces transformations corporelles, tout comme l’attitude positive du conjoint
vis-à-vis de ces modifications.
Le suivi médical d’une grossesse comporte de
nombreux examens et implique plusieurs intervenants. Ceci peut être générateur d’angoisse et rendre
difficile l’établissement d’une relation de confiance. Il
existe un décalage important entre l’image très positive de la femme enceinte qui est véhiculée par les
média, et la réalité de la grossesse, faite d’angoisse,
de doute, d’examen et de responsabilité.
Il existe peu d’études portant le bien-être de la
femme enceinte ou la perception des changements
de son corps. Il est important d’être disponible et à
l’écoute des patientes, afin d’évaluer leur bien être
au cours de la grossesse.
Hypnose
D’après la communication du Dr Michèle Carlon (Nice,
France)
L’hypnose médicale actuelle a été définie en 1950
par M.H. Erickson et validée par les travaux de
neurosciences de M.E. Faymonville en 1992. De
nos jours, de nombreuses maternités utilisent
l’hypnose dans l’accompagnement de la grossesse ou de l’accouchement. L’hypnose peut
être envisagée comme une expérience relationnelle, dans laquelle le thérapeute va activer les
ressources du patient en utilisant la suggestion.
Il s’agit de mobiliser les perceptions de l’organisme en vue de modifier son comportement et
sa physiologie. Lors d’une séance d’hypnose, la
patiente reste consciente et garde le contrôle de
son comportement. Les perceptions des stimuli
extérieurs, du temps et des sensations corporelles
sont modifiées, et la réceptivité à la suggestion
est augmentée.
CONGRÈS
RÉUNION
D’un point de vue neurologique, on observe une
modulation des connectivités cérébrales du cortex
cingulaire antérieur avec d’autres régions impliquées
dans la gestion du stimulus nociceptif. Cela entraîne
une modulation du codage du message douloureux.
Ainsi, le ressenti d’inconfort peut être diminué de
50 %.
Tous les professionnels en obstétriques peuvent
se former à l’hypnose. L’hypnose peut être un acte
thérapeutique ou un accompagnement lors de
situations anxiogènes et de gestes douloureux. Elle
permet une diminution de la douleur, de l’inconfort,
et un meilleur vécu des situations parfois traumatisantes rencontrées en obstétriques. Elle peut être
une aide intéressante dans la pratique quotidienne
de l’obstétrique.
Remise en questions
en sénologie
D. Quaranta*
Quelle chirurgie après chimiothérapie
néoadjuvante
D'après la communication du Pr Emmanuel Barranger
(Nice, France)
La chimiothérapie néo-ajuvante (CNA) a connu ses
débuts dans le cancer du sein dans les années 1990
avec pour support principal 3 études randomisées
anglo-saxones : les essais américains du NSABP B18
et B27 et l’essai européen de l’EORTC comparant la
CNA à la chimiothérapie adjuvante et concluant en
l’absence de différence significative en termes de
survie globale (SG) et de survie sans récidive (SSR).
Cela a permis la production de recommandations
internationales : “Toute patiente candidate à une
chimiothérapie adjuvante peut bénéficier d’une
CNA”.
Les concepts initiaux de la CNA étaient de
permettre :
➤➤ une chirurgie carcinologique pour les tumeurs
initialement inopérables ;
➤➤ une augmentation du taux de conservation
mammaire pour les tumeurs opérables mais non
accessibles à un traitement conservateur d’emblée.
Dans les années 2000, d’autres études ont légitimées le bénéfice principal de la CNA : accroître
le taux de conservation mammaire en montrant
un “downstaging”dans 1/4 à 1/3 des cas chez des
patientes éligibles à une mastectomie d’emblée.
En ce sens, une étude menée au Centre AntoineLacassagne (Nice) incluant 119 patientes prises
en charge entre 2007 et 2012 a montré que le
taux de chirurgie conservatrice après CNA était
de 72 %.
Du concept initial de conservation mammaire ont
découlé un outil pronostic par l’analyse de la réponse
tumorale in vivo ou pCR (pathological complete
response) et un outil prédictif par l’identification
de facteurs prédictifs de chimiosensibilité.
Des analyses combinées des essais du NSABP B18
et B27 ont permis de mettre en exergue plusieurs
points :
➤➤ le lien entre la qualité de la réponse histologique
(pCR) et la survie (SG et SSR) démontré par Bear en
2006 (1) et Rastogi en 2008 (2) ;
➤➤ l’absence d’influence de la radicalité de la
chirurgie sur le taux de récidive locorégionale (RLR),
après un suivi de 10 ans selon Mamounas en 2012
(3) : 12,3 % de RLR après mastectomie et 10,3 %
après chirurgie conservatrice avec radiothérapie ;
➤➤ la mise en évidence de facteurs indépendants de
RLR après traitement conservateur : âge < 50 ans,
statut axillaire avant CNA, ypN- et réponse histologique du sein.
➤➤ l’influence du sous-type moléculaire sur la
réponse histologique (4, 5) : elle serait plus importante dans les tumeurs “triples négatives” et les
profils HER2+++.
Les indications retenues de CNA (RPC Saint-Paulde-Vence, 2011) s’appuient sur :
➤➤ un objectif carcinologique :
••tumeurs inopérables d’emblée pour des raisons
carcinologiques,
••tumeurs opérables, mais non accessibles à un
traitement conservateur d’emblée ;
➤➤ un objectif pronostique :
••accroître le taux de pCR corrélé à la survie.
La sélection des patientes passe par une bonne
évaluation préthérapeutique de la tumeur. Dans ce
cadre, l’IRM recommandée par la Haute Autorité
de santé (HAS) permet une évaluation précise de
la taille tumorale, la multifocalité (8 à 16 %) et la
controlatéralité (3 %) “occultes”. Elle est également
indispensable, en complément de l’examen clinique,
en cours de traitement pour en évaluer l’efficacité.
Ceci sous-tend la nécessité d’une collaboration
multidisciplinaire entre oncologue médical, chirurgien et radiologue nécessaire à la prise en charge
de ces patientes.
La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014 | 11
CONGRÈS
RÉUNION
Cette “filière chirurgicale” s’articule autour de
3 consultations avec le chirurgien (avant, en cours
et après CNA) à l’issue desquelles seront décidés :
➤➤ le type de chirurgie, conservatrice ou non, en
fonction du risque raisonnable de récidive locale
(marges > 2 mm, âge, taille tumorale résiduelle) ;
➤➤ le volume d’exérèse prévu (réponse à la CNA) par
rapport au volume mammaire ;
➤➤ la localisation de la tumeur ;
➤➤ et le choix final de la patiente, informée du risque
de reprise chirurgicale en cas de marges insuffisantes.
Les techniques d’oncoplastie pourraient aider à
élargir les indications du traitement conservateur
après une réponse “modeste” (6) en permettant de
plus larges exérèses de tissus mammaire. En parallèle
de cette désescalade de la chirurgie mammaire, se
pose la question de la technique du ganglion sentinelle (GS) à la place du curage axillaire systématique
après CNA. L’essai GANEA et d’autres études par
la suite ont démontré la faisabilité de la technique
avec un taux de FN acceptable et proche de celui
sans CNA (7).
Actuellement, l’essai GANEA 2 évalue le risque de
RL, la SSR et la SG pour les tumeurs T2-3 (double
détection) selon le schéma suivant : groupe 1 : N +
(cytoponction +) avant CNA  GS + CA ; groupe 2 :
N0 (cytoponction -) avant CNA  GS (CA si GS +
ou non détecté).
En France, la technique du GS n’est pas encore
complètement acceptée et pratiquée après CNA,
bien qu’elle soit recommandée par un panel d’experts
internationaux (8).
Qu’en est-il de la procédure du GS avant CNA ?
Elle est recommandée par certaines équipes, car elle
permet une stadification initiale plus précise avec
un meilleur taux d’identification. Néanmoins, elle
peut faire perdre une information pronostique chez
les patientes N+ (pCR) et nécessite une intervention
supplémentaire.
La CNA permet une conservation mammaire dans
des situations où celle-ci n’était pas envisageable
d’emblée sans impact négatif sur la SG et la SSR
avec un taux de RL comparable à la chimiothérapie
adjuvante. Cette désescalade chirurgicale mammaire
s’accompagne d’un paradoxe au niveau axillaire qui
ne bénéficie actuellement de ce downstaging, la
procédure du GS après CNA n’étant pas (encore)
un standard en France.
Une sélection rigoureuse des patientes candidates
à la chirurgie conservatrice est la clé d’une chirurgie
carcinologique optimale.
12 | La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014
Chirurgie chez les femmes à risque
génétique sévère
D'après la communication du Dr Séverine Alran (Paris,
France)
Les femmes mutées BRCA1 ou 2 sont à haut risque
de cancer du sein et de l’ovaire. Le risque cumulé
à l’âge de 70 ans pour les BRCA1 est de 57 à 65 %
pour le sein et 40 % pour l’ovaire. Il est moindre
pour BRCA2 : 45 à 49 % pour le sein et 10 à 18 %
pour l’ovaire.
En consultation de ville, le score de Eisinger
fondé sur l’interrogatoire permet d’orienter les
patientes vers une consultation d’oncogénétique
s’ il est ≥ 3 : une mutation BRCA identifiée dans
la famille est côtée 5 ; 4 pour un cancer du sein
chez 1 femme < 30 ans ou un cancer du sein chez
un homme ; 3 si le cancer du sein survient chez
une femme entre 30 et 39 ans ou s’il s’agit d’un
cancer de l’ovaire.
Pour ces femmes à risque (FAR), mutées ou à haut
risque familial, un protocole de prise en charge a
été mis au point. Pour les “femmes indemnes”, il
convient :
➤➤ dès 20 ans : d’effectuer un examen clinique tous
les 6 mois ;
➤➤ dès 30 ans : une IRM, une échomammographie
tous les ans et une échographie pelvienne ;
➤➤ avant 40 ans : de proposer une mastectomie
bilatérale prophylactique ou une surveillance ;
➤➤ dès 40 ans : de proposer une annexectomie bilatérale (BRCA1).
Pour les femmes “atteintes”, une mastectomie unilatérale prophylactique ou une surveillance sont
discutées au cas par cas.
La chirurgie thérapeutique chez la femme atteinte
de cancer sera :
➤➤ conservatrice ou radicale pour le sein atteint ;
➤➤ préventive et à différer après le traitement
complet du cancer en cours pour le sein controlatéral ; l’alternative étant la surveillance.
◆◆ La mastectomie prophylactique
Son objectif principal est de diminuer le risque de
survenue d’un cancer du sein. Son impact sur le taux
de mortalité reste à démontrer.
Pour 70 % des cas, il s’agit de reconstruction
mammaire immédiate par prothèse, avec conservation de l’étui cutané, et éventuellement de la plaque
aréolo-mammelonnaire.
Cette chirurgie n’est pas sans risque : en plus des
dommages psychologiques causés par une modification de l’image de soi, on note 60 % de réinterven-
CONGRÈS
RÉUNION
tion du fait de complications chirurgicales. Malgré
ces éléments, la chirurgie préventive est en plein
essor. Elle a été multipliée par 3 en 20 ans avec une
croissance exponentielle après mai 2013 où “l’effet
Angelina Jolie” est indiscutable.
La chirurgie annexielle sera à discuter selon l’âge
de la patiente, le type de mutation BRCA, les antécédents familiaux de cancer ovarien et l’âge de
survenue.
Pour les mutées BRCA1, elle se justifie dès l’âge
de 40 ans, voire à partir de 35 ans si le projet de
maternité est accompli. Pour les mutées BRCA2,
l’annexectomie préventive bilatérale peut-être plus
tardive, à partir de 45 ans.
Ses bénéfices sont multiples, puisqu’elle diminue
le risque de survenue de cancer de l’ovaire et du
sein (effet antiestrogénique) et améliore la survie
chez les FAR BRCA1 (9). Cependant, la rançon de
cette chirurgie peut être lourde de conséquences
avec, en plus des effets de la ménopause précoce,
l’obligation parfois de renoncer à un éventuel projet
de maternité.
L’annexectomie prophylactique est réalisée chez
40 % des FAR en France, et chez plus de 80 % après
le “parcours FAR” à l’Institut Curie.
Le “parcours FAR” s’inscrit dans le temps au travers
de plusieurs consultations médicales avec généticiens, chirurgiens, onco-psychologue. Il abouti à
une décision médicale multidisciplinaire et partagée
avec la patiente.
Nouveautés en radiologie
interventionnelle
D'après la communication du Dr Ronan Plantade
(Nice, France)
La radiologie interventionnelle obéit à des recommandations européennes (10) et françaises (11).
◆◆ Les nouveaux systèmes de guidage
Dans les années 1990, les systèmes de guidage
amovibles sur mammographe diagnostique ne
permettaient qu’une définition moyenne, que le
capteur soit analogique ou numérique, et dans
des conditions peu confortables pour la patiente
qui devait rester assise ou debout. À présent, le
guidage stéréotaxique accessoire grand champs
est un système numérique à accès multiples avec
de nombreux avantages : il offre une haute résolution et un gain de temps chez la patiente, plus
confortablement installée. Avec une table dédiée,
la patiente est positionnée en procubitus, elle ne
voit rien ; son sein descend par gravité.
◆◆ Les biopsies sous IRM
Il s’agit d’une technique performante dont le
développement est insuffisant en France pour
plusieurs raisons : un accès à l’IRM encore limité,
des temps d’occupation longs, des indications
très limitées et un investissement onéreux (pas
de prise en charge).
Les macrobiopsies fragmentaires (MF) [Mammotome®] sont effectuées par des systèmes coaxiaux
couplés à une aspiration permettant une série de
prélèvements contigus de 100-300 mg. Les inconvénients majeurs de cette technique sont une mesure
lésionnelle indirecte, faite par extrapolation, et une
architecture fragmentée.
Les macrobiopsies monoblocs (Système Intact®) :
cette technique permet l’obtention d’un prélèvement unique de 1 à 3 g en 9 secondes. Le démarrage électrocommandé de la procédure déploit
un “panier” tout autour de la lésion. Ce panier
est formé de 5 tiges métalliques doubles reliées
entre elles par un filament électrique permettant
le passage d’un courant de radiofréquence (RF)
et ainsi la découpe du tissu mammaire.
Les avantages sont nombreux : outre l’obtention d’un
“gros” prélèvement, cette technique offre un meilleur
ciblage pour les désorganisations architecturales, des
mesures fiables avec une architecture lésionnelle
respectée, une analyse des berges d’échantillon et
des marges libres et une distinction supérieure des
hyperplasie canalaire atypique et des carcinome
canalaire in situ.
La réalisation de macrobiopsies monoblocs obéit
néamnoins à certaines contraintes : une épaisseur
mammaire minimale de 25 mm (versus 12 mm pour
les MF) ; la réalisation sous IRM, le port d’implants
et pacemaker sont contre-indiqués ; la longueur
de l’incision cutanée est de 10 mm (versus 4 mm
pour les MF).
Au vu de ces éléments, sa faisabilité n’est que de
50 % (versus > 90 % pour les MF)
◆◆ Les clips
Leur utilisation est en augmentation et répond à des
recommandations : leur mise en place est requise dès
que la lésion risque de ne plus être individualisable
ou reconnaissable.
Il s’agit avant tout d’un repère pour le radiologue,
parfois approximatif (effet accordéon), des corrections sont alors effectuées par le radiologue lors du
repérage préopératoire. Le chirurgien ne doit donc
pas chercher le clip, mais se fier aux indications du
radiologue et au positionnement du harpon.
La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014 | 13
CONGRÈS
RÉUNION
◆◆ Les techniques de destructions tumorales
Leur intérêt est reconnu depuis les années 1990 pour
le foie, le poumon, le rein et l’os. Ces techniques sont
en cours d’évaluation pour le sein. L’indication pourrait être un petit cancer chez une femme inopérable.
Le principe consiste à placer une sonde au centre
de lésion afin de la détruire par le chaud (radiofréquence, micro-ondes, laser interstitiel, ultrasons
focalisés de haute intensité) ou par le froid (cryothérapie).
La radiologie interventionnelle est en pleine expansion ces 20 dernières années, avec une augmentation du nombre d’actes et de gestes variés pour le
radiologue. Elle offre la perspective de procédures
plus légères pour le patient.
Les limites de la chirurgie
ambulatoire
E. Lluzar-Gaglio*
Le rôle de l’anesthésiste
D’après la communication du Dr Daniel Maslowski
(Nice, France)
Les recommandations de la Société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR) de 2010 sont venues
modifier et compléter celles de 1994. Les interventions concernées par la chirurgie ambulatoire sont les
interventions courtes (1 h à 1 h 30), programmées, à
faible risque et aux suites généralement simples. Les
critères sociaux et médicosociaux ont été modifiés ;
la compréhension du malade et son entourage sont
toujours des points importants de la prise en charge
en ambulatoire. En revanche, l’éloignement n’est
plus une contre-indication stricte, cela dépendra
de l’intervention et de l’état du patient. De même,
l’accompagnement n’est plus strictement nécessaire
le soir de l’intervention ; la conduite est cependant
toujours contre-indiquée. Les consignes de sortie
doivent être données avant l’intervention. Il n’y a pas
plus de complications postopératoires en chirurgie
ambulatoire, mais la morbidité est augmentée,
notamment en termes de douleurs, nausées ou
fatigue. Les traitements préventifs antiémétiques et
antalgiques doivent donc être anticipés, tant en peropératoire qu’en postopératoire, sur les ordonnances
de sortie. Les limites principales au développement
de la chirurgie ambulatoire sont liées à l’organisation
d’unités indépendantes avec un personnel formé à
la chirurgie ambulatoire.
14 | La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014
Expérience de la chirurgie endoscopique
(cœlioscopie et hystéroscopie)
en chirurgie ambulatoire
D’après la communication du Pr Hervé Fernandez
(Paris, France)
La chirurgie en ambulatoire nécessite une organisation
centrée sur le patient et concerne donc les interventions
programmées, mini-invasives, courtes, après évaluation
anesthésique préopératoire. Les contre-indications
principales sont représentées par la classification anesthésique ASA, l’obésité et les toxiques consommés.
En gynécologie, 50 % des actes peuvent être réalisés
en ambulatoire, notamment en hystéroscopie et en
cœlioscopie. En France, seules 36 % des interventions
gynécologiques sont réalisées en ambulatoire, contre
50 à 60 % ailleurs en Europe. L’augmentation de la
chirurgie en ambulatoire permet de diminuer les coûts
d’hospitalisation et d’augmenter l’occupation des lits.
Les indications en gynécologie concernent, outre les
interruptions volontaires de grossesse ou les ponctions d’ovocytes réalisées en routine en ambulatoire,
la chirurgie endo-utérine, la chirurgie du prolapsus et
la cœlioscopie. En chirurgie endo-utérine, par exemple,
l’hystéroscopie est un acte marqueur pour la Caisse
primaire d'assurance maladie (CPAM) et ne doit être
réalisée en hospitalisation complète que pour des
raisons médicales, sans entraîner de surcoûts pour
l’hôpital. En cœlioscopie, la chirurgie ambulatoire est
possible pour certaines indications. Grâce aux progrès
de l’anesthésie et de la prise en charge des douleurs, les
indications de chirurgie ambulatoire vont être élargies,
et les critères d’éligibilité à la chirurgie ambulatoire sont
remplis par beaucoup d’interventions de gynécologie.
Expérience concernant la chirurgie
du prolapsus
D’après la communication du Dr David Hamid (Strasbourg, France)
En France, 30 % des femmes sont concernées par le
traitement chirurgical du prolapsus et 11 % des femmes
de plus de 70 ans auront recours à la chirurgie. Sur
40 000 procédures, 32 000 sont aujourd’hui réalisées
par voie vaginale, avec une durée moyenne de séjour
(DMS) de 3,6 jours. L’expérience menée à Strasbourg
concerne la mise en place d’une prothèse antérieure
transvaginale exclusive (mini-invasive) sous-péritonéale. La technique de pose est courte et assortie
d’une faible mortalité postopératoire (peu algique,
peu de rétention d’urines et de saignements). Ainsi,
32 patientes ont été prises en charge en ambulatoire
pour une cystocèle isolée, un prolapsus du fond vaginal
CONGRÈS
RÉUNION
ou complet, d’importance variable. La sortie était autorisée, après retrait de la mèche et de la sonde urinaire à
2 heures en postopératoire, et si la miction spontanée
était reprise avec un résidu < 150 cc au BladerScan.
Le contrôle postopératoire avait lieu à 7 jours et à
1 mois. Quatre patientes sont restées hospitalisées,
2 pour non-satisfaction et 2 pour raisons médicales
(brèche vésicale et rétention urinaire). Il n’y a pas eu de
réhospitalisation et les seules complications mises en
évidences à J7 étaient une ecchymose ou une cystite.
En conclusion, le protocole de chirurgie ambulatoire
est bien accepté par les patientes pour les interventions adaptées et sans surrisque opératoire. Le bon
déroulement de la prise en charge tient donc dans une
organisation pluridisciplinaire chirurgien/anesthésiste/
personnel soignant. Le suivi des patientes et le rappel
à J1 participent à l’adhésion des patientes.
Impacts médico-économiques
D’après la communication de Nicolas Bronsard (Nice,
France)
Les modifications récentes de tarification de la CPAM
tendent à promouvoir et revaloriser la chirurgie ambulatoire avec la disparition des bornes basses. La liste
exhaustive des soins externes a été mise à jour en
2013. D’autre part, la liste des gestes marqueurs de
chirurgie ambulatoire est passée de 17 à 38 gestes
entre 2009 et 2012. Les problèmes de tarifications et
de rapports coût/bénéfice engendrés pour les hôpitaux, que ce soit en hospitalisation traditionnelle ou
en ambulatoire, soulignent à nouveau l’importance
du codage des actes. Pour les actes non marqueurs,
selon les morbidités du patient, le séjour sera plus
avantageux en hôpital de jour ou en hospitalisation
complète. Les actes marqueurs ne doivent en revanche
pas être réalisés en hospitalisation complète en l’absence d’indication médicale, sous peine d’entraîner
des coûts supplémentaires. Les autres avantages
économiques de la chirurgie ambulatoire tiennent
dans la réduction des coûts liés à la prise en charge des
infections nosocomiales, de la désorientation temporospatiale des personnes âgées, etc., dont l’incidence
est diminuée en cas de prise en charge ambulatoire.
Données actuelles et objectifs de nos
tutelles. Comparatif France/Canada
D’après les communications du Pr Hervé Fernandez
(Paris, France) et du Dr Philippe Laberge (Québec,
Canada)
Au Canada, la réalisation de l’hystérectomie totale
par voie cœlioscopique est de plus en plus souvent
réalisée en ambulatoire, chez des patientes sélectionnées en fonction de leur compréhension, de leur âge, de
leur score ASA, prises en charge pour des pathologies
bénignes et sous certaines conditions d’éloignement
et d’accompagnement. Avec la mise en place de protocoles précis d’anesthésie, de prise en charge postopératoire et des conditions précises de sorties, 62 % des
hystérectomies totales cœlioscopiques ont été réalisées
en ambulatoire en 2013, avec 10,8 % de complications. En France, la prise en charge en ambulatoire est
mise en place sous accord préalable décidé en 2008
pour 17 gestes, dont en gynécologie, de chirurgie de
l’utérus, de la vulve, du vagin, en procréation médicalement assistée, cœlioscopie gynécologique et pour la
tumorectomie sur sein sans ganglion sentinelle. L’avenir
est à l’élargissement des indications à la cœlioscopie
tubaire, la kystectomie, la tumorectomie avec GS,
voire l’hystérectomie ou la myomectomie.
La pré-éclampsie
E. Lluzar-Gaglio
Définition et conséquences de
l’hypertension artérielle de la grossesse :
peut-on prédire la pré-éclampsie ?
D’après la présentation de Cynthia Trastour (Nice,
France)
L’hypertension artérielle (HTA) gravidique est
définie par une TA systolique ≥ 140mmHg et/ou une
TA ≥ 90 mmHg après 20 semaine d’aménorrhée (SA),
et s’associe à une protéinurie > 0,3 g/24 h dans la
pré-éclampsie. On sait aujourd’hui qu’il s’agit d’un
trouble de la placentation avec un défaut d’invasion des artères spiralées utérines qui a lieu entre
8 et 18 SA. S’en suit une hypoperfusion placentaire
avec une ischémie placentaire responsable d’un
stress oxydatif libérant des facteurs placentaires
qui entraînent une dysfonction endothéliale. De
ces mécanismes découlent le syndrome fœtal et
le syndrome maternel. La pré-éclampsie entraîne
des complications maternelles (éclampsie, HELLP
syndrome, hématome rétroplacentaire, coagulation
intravasculaire disséminée [CIVD], etc.) et fœtales
graves (retard de croissance intra-utérin [RCIU], mort
fœtale, prématurité induite). Peut-on les éviter et
prédire la pré-éclampsie ? Il n’existe aucun critère
clinique ou biologique qui prédit la survenue d’une
pré-éclampsie dans une population de femmes
enceinte tout venant. La présence de facteurs de risque
maternels de pré-éclampsie – bien connus, notamLa Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014 | 15
CONGRÈS
RÉUNION
ment un antécédent personnel de pré-éclampsie ou
une anomalie de coagulation responsable de thrombophilie –, mais aussi chez le partenaire, comme une
pré-éclampsie précédente chez une autre femme ou
un changement de partenaire, nous permettent de
classer les femmes dans une population à haut risque,
et d’instaurer une surveillance du doppler des artères
utérines et un traitement par aspirine.
Quid des biomarqueurs pour détecter la prééclampsie ? Le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (Vascular Endothelial Growth Factor
[VEGF]), le facteur de croissance placentaire (Placental
Growth Factor [PlGF]), la PAPP-A ou le s-Fjt-1 (Fms-like
tyrosine kinase) ont été évoqués. En effet, le dosage
de ß-HCG > 2,50 MoM ou de PAPP-A < 0,50 MoM
(réalisés dans le dépistage du risque de trisomie 21)
sont facteur de risque de pré-éclampsie ou de RCIU.
La concentration circulante de PlGF, facteur angiogénique de la famille des facteurs de croissance de
l’endothélium et marqueur de la fonction endothéliale, diminue avant les signes de pré-éclampsie. Il
pourrait être utilisé à l’avenir dans un test combiné
d’estimation du risque de pré-éclampsie associant le
dosage de la PPAP-A et du PlGF, le doppler de l’artère
utérine, ainsi que des renseignements sur la patiente,
ses antécédents et la grossesse en cours. Il permettrait de dépister 93 % des pré-éclampsies sévères,
avec seulement 5 % de faux positifs. En conclusion,
la prédiction de la pré-éclampsie en 2014 passe par
l’anamnèse et la surveillance de la TA, de la bandelette
urinaire et des dopplers. Les tests de dépistage qui
représentent l’avenir ont une bonne spécificité mais
une faible sensibilité.
Prévention primaire de la pré-éclampsie ?
D’après la présentation de Georges Boog (Nantes,
France)
La pré-éclampsie représente la deuxième cause de
mortalité maternelle (16 %), et multiplie par 4 le
risque de RCIU et par 5 la mortalité périnatale. Le
risque de récurrence varie entre 11 et 65 % en cas
de pré-éclampsie au 2e trimestre. De nombreuses
supplémentations ont été étudiées en prévention,
avec des points d’impact possible à différentes étapes
de l’installation de la pré-éclampsie. Le manque de
calcium (Ca++) stimule la parathyroïde et la libération
de rénine, ce qui entraîne une augmentation du Ca++
intracellulaire dans les muscles lisses des vaisseaux et
une vasoconstriction, agit sur la diminution du volume
intravasculaire et l’augmentation de la réactivité vasculaire. Cependant, la supplémentation en Ca++ n’a
pas montré d’efficacité dans la prévention de la pré-
16 | La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014
éclampsie et n’est pas recommandé en dehors d’une
carence. Les vitamines C et E agissent sur le stress
oxydatif, mais la supplémentation n’a pas montré
d’efficacité, que ce soit sur les populations à haut
ou à bas risques. Les pré-éclampsie sont même plus
graves en cas d’apport trop important, et il y a plus
de ruptures prématurées des membranes (RPM). La
supplémentation en vitamine D agit sur l’invasion
trophoblastique et sur les résistances vasculaires ;
un apport de 400 UI/j est recommandé. L’aspirine a
prouvé son effet sur la dysfonction endothéliale. Elle
est efficace chez les patientes à haut risque si elle
est instaurée avant 16 SA ; elle agit principalement
sur les formes sévères et les formes précoces de prééclampsie, mais ne diminue pas les formes modérées
ou à terme. Enfin, les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) diminuent les résistances vasculaires
mais sont indiquée uniquement en cas de thrombophilie en association avec l’aspirine. L’identification
des facteurs de risque nous conduit à mettre en place
les mesures préventives hygiénodiététiques (contrôle
du poids, de la TA, de la glycémie) et médicamenteuses (aspirine 100 mg/j, vitamine D de 12 à 35 SA).
Prise en charge de la pré-éclampsie
en 2014
D’après la présentation de Bassam Haddad (Créteil,
France)
La conduite à tenir en cas de pré-éclampsie va
dépendre de sa sévérité et du terme d’apparition.
Au-delà de 36 SA, l’arrêt de la grossesse doit être
envisagé en cas de pré-éclampsie modérée ou
sévère, selon le CNGOF. En revanche, avant 36 SA,
devant une pré-éclampsie modérée, l’expectative
avec surveillance rapprochée en hospitalisation ou
en ambulatoire est envisageable. Dans le cas d’une
pré-éclampsie sévère avant 34 SA, les études ont
montré une diminution des décès périnataux et des
complications maternelles par la corticothérapie
prénatale et l’expectative permettant la prolongation de la grossesse le plus possible, et ce d’autant
plus que le diagnostic de pré-éclampsie est précoce.
Au-delà de 30-32 SA, les complications sont similaires quel que soit le terme, et il n’y a pas de bénéfice
fœtal à prolonger la grossesse. D’après les recommandations du CNGOF, avant 34 SA, la grossesse
peut être maintenue sous certaines conditions, et en
dehors des situations qui nécessitent une extraction
en urgence (œdème aigu du poumon [OAP], HTA
non contrôlée, hématome rétroplacentaire [HRP],
éclampsie, etc.) ou dans les 48 h (barre épigastrique,
HELLP syndrome, oligoamnios sévère, anomalies du
CONGRÈS
RÉUNION
RCF, etc.). Dans la pré-éclampsie sévère avec RCIU
sévère associé, l’extraction après corticothérapie
prénatale est recommandée après 32 SA. Avant 32 SA,
l’expectative sera tentée en l’absence de complication
sévère ou d’anomalies des doppler associées. La prééclampsie sévère avant 24 SA s’accompagne d’une
mortalité et d’une morbidité majeure ; dans ce cas,
ou si elle est associée à un RCIU sévère avant 25 SA,
une interruption médicale de grossesse peut être
discutée. L’éclampsie survient pour 50 % en anténatal, 10 % en intrapartum et 40 % en postpartum,
dont 35 à 70 % au-delà de 48 h après la naissance.
Le traitement de choix est le sulfate de magnésium
pour la prévention de la survenue d’une éclampsie
en cas de signes imminents, et pour la prévention du
risque de récidive. Le protocole d’administration est
le suivant : 4 g en 20 minutes, puis 1 g/h à la seringue
électrique, pendant 24 h en prévention de la première
crise et pendant 48 h en prévention de la récidive. La
surveillance porte sur les réflexes ostéotendineux, la
fréquence respiratoire et la diurèse.
La pré-éclampsie : les expériences
algérienne, marocaine et tunisienne
D’après les interventions de Madjid Barkat (Algérie),
Abdelilah Chenfouri (Maroc) et Bechir Zouaoui
(Tunisie)
En Algérie, la pré-éclampsie représente la première
cause de décès maternel devant l’hémorragie de la
délivrance ; un tiers des décès sont dus à une prééclampsie survenue en post- ou prépartum. Une étude
multicentrique dans les maternités d’Alger, Oran et
Constantine retrouve 13 % de pré-éclampsie, principalement entre 25 et 29 ans, pour 56 % chez les nullipares et diagnostiquées après 39 SA dans 2/3 des cas.
Cinq décès ont été constatés, dont 4 liés à un HELLP
syndrome. L’incidence s’explique par une augmentation du risque en raison de grossesses tardives et
d’obésité. Au Maroc et en Tunisie, la pré-éclampsie
est la deuxième cause de mortalité après l’hémorragie
de la délivrance. Dans les pays en développement,
le risque de pré-éclampsie est multiplié par 7, celui
d’éclampsie par 3 et celui de décès par 14. Le diagnostic
de pré-éclampsie y est souvent fortuit, au moment
de la mise en travail, en raison d’un manque de suivi.
La pré-éclampsie : le rôle du néphrologue
D’après la présentation d’Élisabeth Cassuto (Nice,
France)
L’HTA pendant la grossesse peut rentrer dans
2 cadres différents : soit la grossesse est la cause
de l’HTA (dans 8 % des grossesses), soit la grossesse révèle une maladie rénale préexistante chronique compliquée d’HTA, dans 1 grossesse/1 000
(polykystose rénale, uropathie malformative,
glomérulonéphrite, néphropathie diabétique ou
indéterminée). Le dépistage de la maladie rénale
chronique passe par la bandelette urinaire dès le
début de grossesse et nécessite une confirmation
biologique et un avis néphrologique précoce. La fonction rénale doit être évaluée en cas d’antécédents,
d’HTA précoce ou de signes urinaires. L’étiologie de
la maladie rénale n’influence pas le déroulement
de la grossesse, mais l’HTA, l’éclampsie, le RCIU, la
prématurité, etc. sont d’autant plus fréquents que
la maladie rénale chronique est sévère. La grossesse
en dialyse est rare mais possible, et la fécondité
est améliorée après transplantation rénale. Il est
important de planifier la grossesse en cas de maladie
rénale chronique. À l’inverse, la pré-éclampsie peut
être à l’origine de la maladie rénale, associant HTA
et protéinurie glomérulaire avec diminution de la
filtration glomérulaire, et être à l’origine de lésions
endothéliales et fibrosantes plus ou moins réversibles. Après une pré-éclampsie, il est recommandé
de prévoir une consultation avec un néphrologue à
2 à 3 mois post-partum – pour vérifier la guérison
et l’absence de pathologie sous-jacente –, et d’en
prévoir une en préconceptionnel pour une future
grossesse. Cela s’applique tout particulièrement pour
les pré-éclampsies précoces et sévères, même si en
théorie, toute pré-éclampsie devrait bénéficier de
cette consultation. Le bilan comprend, outre le bilan
classique de pré-éclampsie, un bilan immunologique,
une échographie rénale et un bilan de thrombophilie. Dans 4 à 65 % des cas, une néphropathie
est mise en évidence et nécessitera une biopsie
rénale si la protéinurie persiste au-delà de 6 mois
en post-partum. Il est important de noter que la
pré-éclampsie est un facteur de risque rénal et
cardiovasculaire qui multiplie par 3 le risque d’HTA
et d’infarctus, et par 8 le risque d’AVC.
La pré-éclampsie : le rôle de l’anesthésiste
D’après la présentation de Marc Raucoules Aimé (Nice,
France)
L’évaluation pré-anesthésique clinique et biologique
précoce est très importante, notamment en ce qui
concerne la coagulation et l’évolution de la thrombopénie. Les recommandations de la société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) fixent
le seuil de plaquettes à 75 000 pour la péridurale et
50 000 pour la rachianesthésie, à condition que le
La Lettre du Gynécologue • n° 390/391 - mai-juin 2014 | 17
CONGRÈS
RÉUNION
Les auteurs n’ont pas précisé
leurs éventuels liens d’intérêts.
taux soit stable sur plusieurs numérations et que la
pose soit réalisée par un opérateur entraîné. L’anesthésie péridurale est le gold standard et permet de
stabiliser la pression artérielle utéroplacentaire avec
une bonne tolérance. En fonction des conditions, la
péridurale est à privilégier sur la rachianesthésie en
raison d’une meilleure tolérance hémodynamique,
mais la rachianesthésie sera préférée à l’anesthésie
générale dès que possible, en raison des difficultés
d’intubation et surtout d’extubation liées aux
œdèmes laryngés. Enfin, les recommandations de
2009 précise que l’anesthésie locorégionale est
possible après une crise d’éclampsie si la patiente
a repris conscience, qu’elle est stable cliniquement,
sans déficit neurologique. La décision relève d’une
discussion multidisciplinaire en salle de naissance.■
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