D Éditorial

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Éditorial
D
ans le cadre de mon travail, j’ai régulièrement l’occasion de parler avec des infirmières
et infirmiers en oncologie œuvrant d’un bout à l’autre du Canada. J’aime savoir ce qu’ils
font et les écouter parler de leur pratique. Je suis constamment émue par leurs descriptions des
façons dont ils font une différence dans la vie des patients et de leur famille. Et je suis curieuse
de savoir comment ils gèrent les défis qui se présentent dans leurs lieux de travail et comment ils
s’assurent que les patients reçoivent le genre de soutien et de soins dont ils ont besoin.
Récemment, j’ai remarqué trois thèmes récurrents dans ces conversations. Trois défis importants pour les infirmières et infirmiers en oncologie, à savoir : les modèles de soins, le champ de
la pratique et le travail en équipe interprofessionnelle.
Le terme « modèle de soins » fait référence à la façon dont les organismes gèrent leur personnel et l’environnement dans lequel les soins sont prodigués. L’adoption d’un modèle de soins
met souvent en jeu différentes façons de travailler, ainsi que de nouveaux rôles et responsabilités.
Le concept de « champ de la pratique » sert souvent à déterminer si les infirmières exercent pleinement leur pratique. Beaucoup trop souvent, j’entends des voix revendiquer que les infirmières
et infirmiers puissent exercer leurs compétences pleinement, parce que leurs rôles actuels sont
trop restreints et axés sur la tâche et, dans bien des cas, comprennent trop de responsabilités
non liées aux soins infirmiers. Le dialogue entourant le travail en équipe interprofessionnelle est
perçu comme une façon de déterminer la combinaison gagnante de soins (basés sur des données
probantes et conformes aux besoins du patient) aux patients au moment opportun (sans attentes
exagérées), offerts par un fournisseur de soins approprié (le membre de l’équipe qui possède les
connaissances et les compétences nécessaires pour répondre au besoin cerné du patient).
Il s’agit là de questions complexes qui ont d’importantes implications pour les infirmières et
infirmiers en oncologie et leur exercice. Elles ont également d’importantes ramifications pour
les patients et les soins aux patients. En tant que groupe professionnel, les infirmiers et infirmières en oncologie devraient se parler de ces enjeux. Nous nous devons de comprendre les
influences sous-jacentes qui alimentent ces changements dans les soins de santé, étudier l’impact des diverses approches et anticiper les résultats de certaines orientations pour les patients
et leurs familles. Je suis certaine que les différents modèles de soins, champs de pratique et rôles
des membres d’équipes interprofessionnelles auront différentes répercussions sur les soins aux
patients et sur leurs résultats finaux.
Afin d’engager la discussion et de participer aux résultats de ces discussions, nous devons
comprendre les besoins des patients, les meilleures façons d’y répondre et les types de contributions que nous pouvons faire en tant qu’infirmières / infirmiers et membres d’équipes interprofessionnelles. Nous devons arriver à décrire clairement chacun de ces aspects — et en parler — et
à savoir ce qui répond le mieux aux besoins des patients.
J’espère que les articles et rubriques contenus dans ce numéro de la Revue nourriront le dialogue sur ces questions. Les articles de Wilkins, d’une part, et de Loughery et Woodgate, d’autre
part, jettent un éclairage sur les besoins de deux populations de patients plutôt uniques en leur
genre. Wilkins décrit les points de vue de personnes ayant reçu plus d’un diagnostic de cancer
primitif, tandis que Loughery et Woodgate se concentrent sur les besoins en soins de soutien de
femmes qui vivent avec le cancer du sein dans des milieux ruraux. Les infirmières et infirmiers
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Volume 25, Issue 2, spring 2015 • Canadian Oncology Nursing Journal
Revue canadienne de soins infirmiers en oncologie
sont très bien placés, à titre de travailleurs de première ligne, d’éducateurs ou de chercheurs,
pour contribuer au bassin de connaissances scientifiques sur les besoins des patients, puisqu’ils
peuvent saisir les points de vue de ces personnes et les aider à les communiquer. Nous serons
plus en mesure de défendre leurs droits et intérêts et d’organiser une prestation de soins efficace
et significative si nous adoptons des approches davantage centrées sur le patient, sur la personne.
L’article de Janzen et Perry décrit les actions d’infirmières en oncologie dans des contextes de
soins marqués d’un sentiment de futilité et d’impuissance. Les actions prises par ces infirmières
pour veiller aux besoins des patients dans ces situations reflètent ce qui peut arriver lorsque
les infirmières et infirmiers ont l’occasion d’exercer pleinement leur pratique en vertu de leur
préparation.
L’article de Savage et collègues, ainsi que les contributions d’O’Leary et de Severson, mettent
l’accent sur le besoin de leadership judicieux et de stratégies variées pour soutenir le personnel
infirmier dans ses démarches d’éducation continue et dans ses efforts visant à fournir des soins
de qualité dans l’environnement complexe de soins de santé. Nous devons assurer une planification intentionnelle de l’éducation et de la défense des intérêts dans le lieu de travail pour faire en
sorte que les infirmiers et infirmières en oncologie aient accès aux connaissances et aux compétences nécessaires pour exercer pleinement leur pratique. Lorsque ces conditions sont remplies,
les résultats pour les patients et leurs proches sont meilleurs.
Il est crucial que les organismes professionnels soient en mesure de décrire des normes de
pratique infirmière en oncologie et d’articuler les connaissances et compétences requises pour
les adopter. Nous devons mettre en place des stratégies novatrices d’éducation continue et de
perfectionnement professionnel en vue d’aider le personnel infirmier à maintenir ces normes
et d’élargir son champ de compétences. Le leadership d’organismes infirmiers professionnels
comme l’ACIO/CANO (c.‑à‑d. établissement de normes, offre d’occasions d’apprentissage, création de réseaux infirmiers et de communautés de pratique) offre aux infirmières et infirmiers
une orientation dans leurs milieux de travail. Cela contribue à leur capacité de parler des rôles
infirmiers, de l’influence des soins infirmiers sur les résultats pour les patients et de ce qui
constitue des approches exemplaires en matière de pratique ou de soins.
Les patients atteints de cancer, les survivants et leurs proches ont besoin d’infirmières et d’infirmiers forts qui comprennent leurs points de vue et leurs besoins en tant qu’individus vivant
avec le cancer. Ils ont besoin d’infirmiers et d’infirmières qui poursuivent leur éducation tout au
long de leur carrière et qui se tiennent au courant des avancées dans leur domaine. Et ils
méritent des infirmières et infirmiers qui sont engagés dans le remaniement du lieu de travail,
dans l’exercice d’une pratique interprofessionnelle et dans l’élaboration de modèles de soins
ayant, comme considération centrale, le patient et sa famille. Les patients ont besoin d’infirmiers
et d’infirmières en oncologie qui sont bien préparés à défendre les besoins des personnes vivant
avec le cancer et qui adoptent des approches à la fois scientifiques et axées sur la personne.
Margaret Fitch, inf., Ph.D.
Rédactrice en chef
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