Flash Info www.antadir.com Année 2011 - Numéro 29 Mars 2011 Journée Thématique LA TRACHEOTOMIE EN 2010 Jeudi 9 décembre 2010 Hôtel National des Invalides - Paris En février 1995, nous organisions avec la Commission Médico-Technique et Socia- l’insuffisant respiratoire chronique grave. Il montrait déjà la défervescence des indications de la trachéotomie de 22% (1252 patients) en 1984 à 11% (3581) en 1994 parallèlement à l’apparition de la ventilation non-invasive (VNI), mais confirmait le besoin d’information de ce moyen de raccordement pour la ventilation mécanique (VM) dont l’efficacité n’est plus à démontrer. Quinze ans après, la trachéotomie ne représente plus que 4,1% (700 patients échelle basse ANTADIR) à 22,7% (236 patients échelle haute ALLP de Lyon) et 19% (552 patients ADEP Assistance Paris) des IRCG parallèlement au développement des indica- Flash Info FÉDÉRATION ANTADIR—66 BD ST MICHEL—PARIS 6 - 01 56 81 40 60 le de l’ANTADIR un premier symposium sur la Trachéotomie particulièrement chez tions de VNI. Toutefois le besoin demeure en indication plutôt dans les pathologies restrictives mais surtout en information, les pratiques s’oubliant vite. Le 9 décembre 2010 dans le cadre somptueux des Invalides nous avons donc refait le point avec des exposés plus concis le matin et des ateliers plus pratiques l’après-midi. La majorité des auteurs étaient déjà présents en 1995 en dehors du Docteur Aissam Bagdach décédé en octobre 2010 à qui nous rendons un profond hommage. Il a été remplacé par le docteur Pierre Bonnette que nous remercions de sa spontanéité. Dr Jean-Marie BEDICAM Centre Médical Edouard Rist - Paris Dans ce numéro : I - Trachéotomie : histoire et physiopathologie II - La trachéotomie chirurgicale III - La trachéotomie percutanée : Pour !! IV - Choix, adaptation et surveillance à long terme de la canule de trachéotomie V - La trachéotomie en 2010 : choix des indications et résultats des différentes Etudes VI - Particularités de la trachéotomie chez l’enfant dans les maladies neuromusculaires et de l’enfant Ateliers : Aspiration endo-trachéale : méthode, hygiène et utilisation des consommables et décret Canules et soins de trachéotomie Accessoires de la trachéotomie patient ventilé et non ventilé 2 4 6 7 10 13 18 20 22 LA TRACHEOTOMIE EN 2010 La Fédération ANTADIR, avec la partici- Le Pr. D. Robert a souligné que certains patients pation de l’ADEP Assistance, a organisé le 9 Dé- pouvaient vivre plus de 50 ans avec une tra- cembre 2010, une journée thématique intitulée chéotomie. « La trachéotomie en 2010 ». Plus de 100 personnes (techniciens, kinésithérapeutes, infirmières, médecins...) ont assisté à sept conférences d’experts et participé à différents ateliers organisés par le groupe de travail des paramédicaux de l’Antadir. L’utilisation de la trachéotomie répond de quatre indications : 1- Pour maintenir la trachée ouverte en cas d’obstruction, 2- Pour pouvoir aspirer en cas de déficit de la toux, 3- Pour protéger des fausses routes, 4- Pour une ventilation mécanique « prolongée ». I : Trachéotomie : histoire et physiopathologie (Pr. Dominique ROBERT, Lyon). Le Pr. D. Robert, pionnier dans la trachéotomie, a tout d’abord rappelé les définitions des termes « trachéostomie » et « trachéotomie » qu’il ne faut pas confondre. En effet, la trachéostomie se définit comme « une ouverture permanente, Histoire de la trachéotomie : on peut distinguer deux périodes correspondant à deux indications différentes de la trachéotomie. Schématiquement, la première période correspond à la trachéotomie en réponse à une obstruction des voies aériennes supérieures (VAS), alors que la seconde correspond davantage à la ventilation mécanique. la peau étant suturée à la trachée avec ou sans canule », alors que la trachéotomie se définit comme « une ouverture temporaire de la trachée maintenue par un tube. Elle se ferme au retrait du tube ». La trachéotomie peut concerner aussi bien les enfants que les adultes. Elle peut être utilisée de façon transitoire ou pour une durée bien plus longue. Page 2 La première période remonte à l’Antiquité, lorsqu’ Alexandre le Grand décrivit pour la première fois la « bronchotomie de sauvetage », en 356 BC. La trachéotomie chirurgicale est apparue en 1718 et s’est développée vers 1850 pour le traitement du croup (diphtérie) avec les professeurs Bretonneau et Trousseau, faisant chuter la mortalité de 100% à 25%. En 1909, Chevalier Jackson a décrit la procédure chirurgicale « réglée » de la réalisation de la trachéotomie, réduisant ainsi la mortalité de 25% à 1%. FLASH INFO Dans la seconde période, la trachéotomie La trachéotomie a trois effets distincts sur la fut utilisée lors du traitement de la poliomyélite ventilation : 1- une augmentation des résistances antérieure aiguë (à Copenhague) en 1952. Elle fut (diamètre interne et longueur) qui entraîne une d’abord utilisée lors d’une ventilation manuelle augmentation du travail en ventilation sponta- puis avec des respirateurs, ce qui a fait chuter la née avec une majoration de la pression expira- mortalité de 80% à 20%. La trachéotomie s’est im- toire de pointe, 2- une diminution de l’espace posée rapidement et a permis le développement mort anatomique de 150 ml à 20 ml, ce qui dimi- de la réanimation « moderne » à partir des années nue la ventilation minute et 3 – une altération 50-60. Elle a ainsi permis le retour à domicile avec d’un des temps de la toux (fermeture de la glot- une ventilation mécanique définitive de patients te) qui va imposer les aspirations trachéales. insuffisants respiratoires chroniques (polio, autre maladie neuro-musculaire, scoliose, BPCO). Concernant ses effets sur la paroi trachéale, la trachéotomie peut entraîner une altération de la Enfin, précisons que la trachéotomie a été le seul fonction « escalator » des sécrétions de la mu- traitement du syndrome d’apnées obstructives du queuse (altération de la fonction ciliaire), une sommeil (SAOS) dans les années 70. En outre, l’in- ischémie par la pression du ballonnet, une sté- troduction de la technique de réalisation de la tra- nose cicatricielle et une remontée progressive chéotomie par voie percutanée, depuis les années vers le haut de l’orifice du fait des pressions po- 70, a simplifié sa réalisation soit pour une canula- sitives liées à la ventilation mécanique qui tend tion classique soit pour une petite canule (4 mm). à repousser en haut la canule. Physiopathologie de la trachéotomie : Dans sa définition, la physiopathologie de la trachéotomie ne concerne pas les complications mais les modifications de la physiologie liées à la présence d’une trachéotomie dans ses modalités diverses, qui se combinent soit aux anomalies liées au contexte pathologique ayant justifié la trachéotomie soit parfois aux variations anatomiques. Dans la physiopathologie de la trachéotomie, il est nécessaire de distinguer les points de la mécanique Au niveau de la phonation, la trachéotomie ne touche pas les cordes vocales ni le larynx (appareil phonatoire). Toutefois, elle peut supprimer totalement ou partiellement le flux expiratoire au travers de l’appareil phonatoire. C’est pourquoi, de nombreuses « stratégies » existent pour autoriser la parole malgré la canule mais toutes doivent établir un flux au dessus de la trachéotomie. ventilatoire, des effets sur la paroi trachéale, de la phonation, de la déglutition, de l’humidification, de l’orifice et de l’esthétique. Page 3 FLASH INFO La fonction de déglutition n’est pas altérée par la trachéotomie, ce qui peut être un argument pour sa réalisation (vs intubation). Cependant, le II : La trachéotomie chirurgicale (Dr. Pierre BONNETTE, Hôpital Foch, Suresnes). ballonnet peut comprimer l’œsophage et l’élévaDe façon traditionnelle, la trachéotomie tion du larynx nécessaire à la déglutition peut être gênée (ce qui favorise les micro inhalations). Concernant ses effets sur l’humidification de l’air, la trachéotomie court-circuite le nez, le pharynx et le larynx, ce qui empêche l’humidification de l’air inspiré. Dans l’immense majorité des cas, une humidification artificielle s’impose soit par un humidificateur chauffant, soit par un échangeur de température et d’humidité. Au niveau de l’orifice cutané, il se développe une fistule mature « permanente », en une semaine. Cette fistule peut être sténosante ou permettre le développement de granulomes rendant difficile les recanulations. chirurgicale se réalise au bloc opératoire, avec un bistouri électrique, sous anesthésie générale avec intubation ou ventilation au masque (vérification des paramètres de fréquence cardiaque, tension artérielle et saturation en oxygène). Elle peut aussi parfois se réaliser sous anesthésie locale. Dans l’acte lui-même, la trachéotomie chirurgicale nécessite une incision cutanée horizontale sur l’isthme à 1 cm du cricoïde, une section du peaucier et des un écartement berges. Dans Enfin, l’aspect esthétique est très important à certains cas, quel- considérer pour les utilisations au long cours. Une ques hémostases des veines jugulaires antérieu- approche spécifique du choix de la canule doit res peuvent apparaître. Ensuite, il s’agit de faire être envisagée. une ouverture de la ligne blanche, un écartement des sous hyoïdiens et de libérer l’isthme Conclusion : Par ses effets propres, la trachéotomie a été puissamment efficace dans le traitement des cas de diphtérie, polio ou du SAOS. Même si, de nos jours, les indications de la trachéotomie se sont réduites, elles nécessitent toujours la compréhension de ses effets physiopathologiques. thyroïdien. Deux pinces de Kelly sont alors placées sur l’isthme, ce dernier est sectionné et les deux tranches sont suturées. Concernant l’ouverture de la trachée, elle doit se faire loin du cricoïde et de façon horizontale entre deux anneaux. Le Dr. P. Bonnette a insisté sur le fait qu’une ouverture verticale ou en volet est à proscrire ! Enfin, un fil de rappel est posé sur le bord inférieur. Page 4 FLASH INFO Dans la technique chirurgicale traditionnel- des sous hyoïdiens, une traction avec une pince le, la canulation est faite avec la canule la plus de Kelly sous l’isthme thyroïdien et enfin une grosse, la sonde d’intubation est remontée, le chi- incision horizontale entre deux anneaux en sous rurgien vérifie le positionnement par le retour de isthmique. CO2, un ballonnet gonflé est placé pour quelques jours, les angles de l’incision sont fermés (pour éviter le passage d’air entre la trachée et la peau), la canule est fixée par des fils et un cordon. Le premier changement de canule se fait une semaine après la trachéotomie. Il est alors important de vérifier la présence éventuelle de caillots poussés à la recanulation et s’aider, le cas échéant, d’un guide. Certaines situations sont plus difficiles à gérer par le chirurgien, notamment lorsque le patient présente un cou large et court avec le cricoïde près du manubrium. En plaçant le cou en extension, on peut tirer le larynx vers le haut et ne pas ouvrir la trachée sous le cricoïde, mais plus bas. De même, les patients présentant un goitre (résection de l’isthme), les patients obèses ou ceux présentant un TABC non latéralisé, c'est-à- Les complications possibles d’une trachéoto- dire devant la trachée (lambeau entre lui et la mie chirurgicale sont l’hémorragie veineuse ou canule) ou enfin ceux présentant une trachée artérielle isthmique, la suppuration autour de la calcifiée (souvent trachéotomie ancienne) néces- canule, l’apparition d’un pneumomédiastin si la sitent une attention particulière lors du geste peau a été trop refermée, une obstruction par du opératoire. mucus ou des caillots ou une sortie de la trachée. A ce sujet, le Dr P. Bonnette a rappelé que la meilleure aide au bon positionnement ou repositionnement d’une canule était le repérage avec le doigt. D’autres complications telles que les sténoses et granulomes ou la fistule oesotrachéale sont communes avec celles de la trachéotomie par voie percutanée. Fort de son expérience de chirurgien thoracique, le Dr P. Bonnette a présenté sa technique personnelle de trachéotomie [1]. Il utilise toujours un Conclusion : la trachéotomie chirurgicale des malades de réanimation est un peu lourde (transport et accès au bloc), réservée souvent aux trachéotomies à problème (obèse, cou court, goitre…). Au-delà du bloc opératoire, la trachéotomie chirurgicale est réalisable en service de réanimation. La trachéotomie chirurgicale des insuffisants respiratoires chroniques est mieux adaptée, sous anesthésie générale avec ou sans intubation. éclairage au casque, il repère et choisit l’entrée idéale, réalise une résection cutanéo-graisseuse circulaire du diamètre de la canule, un écartement Page 5 FLASH INFO III : La trachéotomie percutanée : Pour !! La (Pr. Erwan L’HER, Hôpital de la Cavale Blanche, percutanée néces- Brest). site un orifice de Un brin provocateur, le Pr. E. L’Her a d’abord interrogé l’assistance sur le sens d’une discussion relative au choix d’une trachéotomie chirurgicale ou percutanée ? En effet, il est tout à fait favorable au recours préférentiel aux trachéotomies percutanées ! Il faut « arrêter les trachéotomies larges et très visibles ; cela provoque trop de suppurations et des orifices trop larges et inesthétiques ». trachéotomie faible calibre. Il y a moins de cellulite de stomie, ce qui limite le préjudice esthétique et les risques de complications inflammatoires. Par ailleurs, le contrôle endoscopique du geste permet une visualisation du bon positionnement (être parfaitement médian et assurer un bon passage de la canule). Concernant le lieu préférentiel de réalisation de la trachéotomie percutanée, l’étude de D’un point de vue esthétique, la cicatrice est bien Upadhyay. A et al. [3] montre que la prévalence moins visible 24 h après une décanulation suite à des saignements ou des décanulations était une trachéotomie percutanée que suite à une tra- identique pour des trachéotomies percutanées chéotomie chirurgicale ; elle ne l’est quasiment réalisées en unité de soins intensifs ou en bloc plus après trois semaines de décanulation. Se ba- opératoire. L’a priori selon lequel la réalisation sant sur l’étude française de JC. Raphael et al. [2], des trachéotomies au bloc opératoire limiterait il a rappelé que la trachéotomie était une cause les risques est une « fausse idée reçue ». d’altération de l’estime de soi, de l’état physique. L’un des premiers arguments objectifs en faveur de la trachéotomie percutanée est la technique elle -même. En effet, il faut rappeler que la trachéotomie chirurgicale (décrite en 1909 par ChevalierJackson) peut se faire en « pastille », « en flap en U de Björk » ou encore en « Incision en I » ; il n’y a donc pas de standardisation à cette technique ! Au contraire, la trachéotomie percutanée (développée depuis environ 1995) est sécuritaire et repose sur la technique de « Seldinger »: palpation puis D’un point de vue économique, l’étude de Van Natta TL et al. [4] montre que le coût total de réalisation d’une trachéotomie percutanée au lit est de $904 alors que celui d’une trachéotomie chirurgicale au bloc est de $2134. De plus, la réalisation d’une trachéotomie percutanée au lit permet de diminuer de façon significative les risques induits par le transport au bloc opératoire de patients parfois instables [5] contrôle endoscopique, ponction trachéale et insertion du guide métallique. Page 6 FLASH INFO L’étude de B. Hill et al. [6] montre que le nombre de complications après la trachéotomie est de 42% par voie chirurgicale alors qu’il est de IV : Choix, adaptation et surveillance à long terme de la canule de trachéotomie. (Dr. Jean-Marie BEDICAM, Hôpital Edouard RIST – Paris). seulement 15% par voie percutanée. L’étude de Holdgaard H et al. [7] indique que le nombre de saignements mineurs pendant la trachéotomie et le nombre d’infections post-opératoires sont très largement diminués par la technique percutanée, comparativement à la technique chirurgicale. Toutefois, il existe des complications communes à l’ensemble des techniques telles que la refermeture rapide de la stomie, les difficultés de recanulation, l’éversion des cartilages trachéaux et une lésion du mur trachéal postérieur. La trachéotomie chez l’insuffisant respiratoire chronique grave (IRCG) est un court circuit réalisé sur les voies aériennes au niveau de la face antérieure du cou. Elle conserve l’activité des cordes vocales, donc la voix, et doit permettre la déglutition et la toux. Elle constitue un excellent moyen de raccordement pour la ventilation mécanique. Elle est cependant le plus souvent définitive. L’efficacité d’une trachéotomie dépend de l’acceptation du traitement par le patient et son en- En conclusion, le Pr. E. L’Her insiste sur le fait que tourage, de l’éducation, de la surveillance, de la la trachéotomie percutanée peut être pratiquée en bonne collaboration entre médecins et interve- réanimation, au lit du malade et de ce fait, un nants, mais aussi de l’âge du patient, de son état transfert au bloc opératoire n’est pas obligatoire psychique, de ses conditions de vie et de sa pré- par cette technique. Il n’est pas non plus impératif paration que cette trachéotomie soit réalisée uniquement (trachéotomie en urgence ou programmée). par un chirurgien ; il faut privilégier en effet « l’opérateur le plus expérimenté ». Les techniques percutanées semblent équivalentes (voire supérieures) à la trachéotomie chirurgicale. Toutefois, une technique par rapport à une autre ne peut pas être proposée de façon formelle. Néanmoins, il reste important de garder à l’esprit les moindres complications, la simplicité et le bénéfice économique entraînés par la trachéotomie percutanée ! à cette intervention invasive Le patient trachéotomisé doit faire face à différentes contraintes, notamment les difficultés psychologiques liées à la peur du regard des autres et à la crainte de ne pas savoir se prendre en charge de façon autonome. Le patient doit aussi respecter des mesures d’hygiène, savoir réaliser les aspirations endo-trachéales, gérer les problèmes liés à la perte des moyens de filtration et d’humidification naturels (dessèchement des sécrétions), et d’éventuels problèmes de lieux de vie en fonction de l’âge. Page 7 FLASH INFO La trachéotomie peut entrainer des problèmes (moins coûteuse que l’argent, avec trois courbu- de déglutition notamment par la perturbation du res et un bon drainage car les parois sont lisses, réflexe de fermeture glottique, le détournement mais rigide et fragile), en PVC (souple avec du flux aérien transglottique, l’affaiblissement de deux courbures, mais aussi rigide), en silicone la toux glottique, la baisse de la pression sous- (non allergisant, très souple et facile à utiliser glottique, l’atrophie musculaire par non utilisa- mais ballonnet perméable à l’air), en polyuré- tion, la perte de la sensibilité du larynx et de l’hy- thane (nouveau matériau transparent dont la popharynx, les troubles de la coordination dans rigidité doit encore être appréciée). l’ouverture et fermeture glottique, la compression oesophagienne par le ballonnet, la restriction de la Le praticien peut choisir selon différents types mobilité du larynx et le réflexe d’inhibition respi- de canules : rigides ou souples, avec ou sans ratoire avec apnée plus ou moins bien supportée. chemise interne, avec collerette fixe ou mobile, avec ou sans ballonnet (standard ou basse pression < 25 mmHg). La calibration n’est pas nor- La canule de trachéotomie est un tube courbe avec un angle d’environ 110 à 130° dont la partie inférieure pénètre dans la trachée au travers de l’orifice de trachéotomie, l’autre partie est extérieure. Elle peut disposer d’un ballonnet pour réalier l’étanchéité entre la canule et la paroi interne de la trachée ou pas pour permettre une ventilation sans ou avec fuites. Concernant les ballonnets, le malisée (courbes, longueurs, diamètre). Le choix doit aussi être fait sur la présence d’un bouchon, d’une valve de phonation ou d’un nez artificiel, et sur la nécessité ou non d’un raccordement en oxygène. L’aspect esthétique est un point très important pour la qualité de vie du patient et doit être pris en compte dans le choix de la canule. Dr J.M. Bedicam précise que l’idéal est l’utilisation d’un ballonnet à basse pression, bien cylindrique qui ne laisse pas d’aspérité. Une chemise interne (qui peut facilement être enlevée, nettoyée et remise en place) peut être utilisée, de même qu’une collerette mobile. Le choix de la canule doit ensuite optimiser la phonation. Pour cela il faut rétablir un passage d’air vers les voies aériennes supérieures, avec un gradient de pression > 2 cm H20. Le ballonnet doit être dégonflé. Sous ventilation mécanique (VM) on peut utiliser une valve unidirec- Au niveau des matériaux, la canule initialement en latex (c’est le matériau le plus ancien pour les canules à ballonnet mais très traumatisant et plus utilisé), peut être en argent (non allergisante, avec trois courbures et pas de limitation de durée d’utilisation mais rigide et coûteuse), en acrylique Page 8 tionnelle de phonation pendant l’expiration, réglage d’une pression expiratoire positive et maintenir une pression et d’un débit minimum le plus longtemps possible sur les cordes vocales, plus facilement en mode pressionnel que volumétrique. FLASH INFO En ventilation spontanée (VS) avec une valve de phonation, la fenêtre laryngée (quand elle est justifiée) permet à l’air expiré de passer plus facilement vers les cordes vocales et au patient de parler. La présence de fuites trop importantes, une compliance insuffisante ou l’existence d’un syndrome bulbaire ne permettent pas de retrouver une phonation. Dans le choix d’une canule de trachéotomie, il faut aussi distinguer les cas particuliers tels que les patients sous VM permanente, l’existence d’un poumon unique, les laryngéctomisés, la nécessité d’une canule spécifique (Montandon, tube en T de Montgoméry, prothèse silicone en Y ou de type stent), ou avec possibilité d’aspiration au dessus du ballonnet pour prévenir les écoulements dans les voies respiratoires des paralysies oropharyngées. Enfin une canule sur mesure pourra être nécessaire. Les canules Hyperflex ™ par exemple à collerette réglable peuvent être choisies lorsqu’une canule standard ne convient pas à l’anatomie du patient (patients au « cou de taureau » et « sans cou », ou cyphoscoliose) ou ayant des complications trachéale telles que trachéomalacie ou sténose trachéale. Cette canule permet de moduler la longueur du tube et sa texture (souple ou armé) et de s’adapter parfaitement aux contours anatomiques de la trachée. Elle permet également de choisir la collerette, le tube à courbure préformée ou rectiligne armée ; le type, l’emplacement et même le nombre de ballonnets (distal pour la VM sans fuite et /ou proximal pour limiter les fuites au niveau de l’orifice de trachéotomie). Page 9 FLASH INFO Le suivi au long cours est également primor- Enfin en toute objectivité on pourra décider du dial. Il repose sur la gestion du retour à domicile, retrait de la canule avec relais par une ventila- l’éducation du patient, la fréquence, le rôle des tion non invasive en maintenant le bouton ou contrôles et l’entretien de la canule. Il faut notam- du maintien de la canule de trachéotomie ment veiller aux moyens de fixation, à la bonne utilisation des compresses de trachéotomie, à une réalisation correcte des soins locaux, respecter la fréquence des changements et le renouvellement à V : La trachéotomie en 2010 : Choix des indica- domicile. Les incidents et complications éventuel- tions et résultats des différentes Etudes les sont de plus en plus rares et peuvent être pré- (Pr. Jean Francois MUIR, Hôpital de Bois Guil- venues par une surveillance endoscopique régu- laume, Rouen). lière et au moindre signe d’appel. Il s’agit essentiellement de la décanulation accidentelle avec une fermeture partielle de l’orifice, de douleurs, d’hémoptysies, l’apparition d’un granulome, l’ obstruction de la canule, intolérance au matériau, colonisation par des bactéries, inflammation cutanée péri-orificielle, pathologie d’inhalation, voire sténose trachéale. La trachéotomie est actuellement utilisée essentiellement dans la prise en charge d’une insuffisance respiratoire aigue (IRA) et dans le traitement au long cours d’une insuffisance respiratoire chronique (IRC). Depuis que la ventilation non invasive (VNI) est pratiquée, la trachéotomie est généralement proposée en cas Si toutes les conditions sont réunies le sevrage de d’échec de la VNI. la trachéotomie peut s’envisager en différentes étapes : d’abord sevrage partiel ou total de la VM et en VS canule fermée par valve mobile ou bou- A : La trachéotomie dans la prise en charge chon (il n’est pas admissible de maintenir la canu- d’une IRA le ouverte), puis modification de la canule qui de- Une étude réalisée par Esteban A et al. [8] mon- vient plus courte, (dite « laryngée ») arrivant à la tre qu’à travers différents pays, la ventilation limite de l’orifice laryngé et éventuellement dimi- mécanique est délivrée, en unité de soins inten- nution du calibre tout en maintenant l’étanchéité sifs, soit via un tube endotrachéal (75%), soit via au niveau de l’orifice de trachéotomie. Ensuite au une trachéostomie (24%), soit via un masque cours d’une endoscopie bronchique, on adaptera facial (1%) chez des patients en insuffisance res- un « bouton de trachéotomie » , permettant de ré- piratoire aigue (66%), en exacerbation de BPCO aliser un bilan complet (explorations fonctionnel- (13%), dans le coma (10%) ou chez des patients les respiratoires, test de marche, SaO2 nocturne ou atteints de pathologies neuromusculaires (10%). mieux polygraphie ventilatoire…). Page 10 FLASH INFO En théorie, la trachéotomie permet d’aug- BPCO exacerbés. Ces résultats ont été confirmés menter le confort du patient, d’augmenter sa l’année suivante par l’étude randomisée de Gi- mobilité, de lui permettre de parler et de s’ali- rault C et al. [13]. menter par la bouche, d’améliorer la mécanique respiratoire (diminution des résistances des voies aériennes et du travail respiratoire), de diminuer la fréquence des pneumopathies acquises sous ventilation mécanique, d’accélérer le sevrage et probablement d’augmenter l’efficacité des aspirations. Ceci a été confirmé par différents travaux de la littérature. En effet, des études randomisées portant sur des patients polytraumatisés ont montré que la trachéotomie précoce (entre 3 et 7 jours) permettait d’accélérer le sevrage et de diminuer de façon significative la durée de la ventilation mécanique comparativement à la trachéotomie tardive (> 7 jours) [9-11]. Ces trois mêmes études ont également montré que les risques relatifs de pneumopathies acquises sous ventilation mécanique étaient de 56%, 78% et 49% avec la trachéotomie précoce alors qu’ils étaient respectivement de 53%, 96% et 57% avec la trachéotomie tardive. La ventilation non invasive peut –elle être proposée en alternative à la trachéotomie ? Alors, pour qui et quand faut-il envisager une trachéotomie ? La conférence de consensus de la SRLF, en 2001, a indiqué que la trachéotomie devait être envisagée pour des patients avec troubles de la déglutition, des patients comateux, ou ceux présentant une obstruction des voies aériennes supérieures, des critères de réintubation difficile, ou des patients « insevrables » du respirateur (> 30 jours). Il faut également prendre en compte l’existence d’une IRC sous jacente. Concernant l’aspect temporel, on peut probablement se baser sur une approche anticipatoire (mais pas de critères prédictifs de la durée de ventilation invasive) ou sur la notion de ventilation prolongée (> 30 jours). Toutefois, le Pr. J.F. Muir a rappelé que l’on pouvait s’abstenir de la trachéotomie dans le cas de certaines insuffisances respiratoires chroniques responsables d’une insuffisance respiratoire aigue (fibrose pulmonaire évoluée, dilatation des bronches, maladie neuro-musculaire rapidement progressive de A ce sujet, l’étude multicentrique randomi- type SLA), ou chez des sujets âgés, ou immuno- sée de Nava S et al. [12] a mis en évidence que la déprimés ou en cas de refus du patient ou de sa VNI augmentait de façon significative la proba- famille, ou enfin dans le cadre d’un environne- bilité de sevrage (88% vs 68%) et la survie des ment social déficient au sortir de l’hospitalisa- patients à 60 jours (92% vs 72%), diminuait la tion (pas de structure d’accueil). Les données de durée de séjour en unité de soins intensifs (10,2 l’Observatoire jours vs 16,6) et les risques de pneumopathies confirment la diminution du nombre de patients nosocomiales, comparativement à la ventilation trachéotomisés à domicile qui est passé de 1068 à mécanique (1/25 vs 7/25) chez des patients 700 entre 1995 et 2009. Page 11 de la Fédération ANTADIR FLASH INFO B : La trachéotomie dans le traitement au long cours d’une IRC La décanulation doit être envisagée d’un point de vue clinique pour un patient peu ou pas sé- Différentes études ont montré que l’espéran- crétant, sans granulome endotrachéal et capable ce de vie dans l’insuffisance respiratoire était amé- de déglutir et de passer en ventilation sponta- liorée après une trachéotomie, quelle que soit la née. Il faut que l’étiologie soit peu évolutive et à pathologie chronique : cyphoscoliose, myopathie prédominance restrictive. Enfin, le patient doit de Duchenne, postpolio, séquelles de tuberculose, être volontaire et entouré ; des essais de canule sclérose latérale amyotrophique. [14-16]. L’étude bouchée doivent être probants (Algorithme du Française du Pr JF Muir portant sur plus de 250 Dr. Jesus Gonzalez). L’étude de J.R. Bach et al. patients [17] a confirmé ces bénéfices de la ventila- [20] portant sur 62 essais de décanulation chez tion à domicile par trachéotomie, notamment chez des patients IRC neuromusculaires, a montré les patients BPCO sévères. Concernant la VNI, que la valeur du débit expiratoire de pointe McEvoy et al. [18] ont montré en 2009 que la VNI (DEP) était un critère déterminant de la réussite associée à l’oxygénothérapie était significative- de la décanulation. Ainsi, les patients présentant ment plus efficace sur la survie à 5 ans des pa- un DEP < 160 l/min ont eu un échec de décanu- tients BPCO stables et sévères, que l’oxygénothé- lation (n= 15), les patients présentant un DEP rapie isolée. Toutefois, ces bénéfices sur la survie =160 l/min ont eu soit un échec (n= 2) soit une semblaient avoir un prix sur la qualité de vie des réussite (n= 2), alors que ceux présentant un patients. Dans une étude randomisée, Bourke et DEP > 160 L/min ont eu une décanulation réus- al. [19] ont montré que la VNI améliorait de façon sie (n= 43). significative la survie et la qualité de vie des patients atteints d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA) sans dysfonction bulbaire. En revanche, chez les patients présentant une SLA avec une dysfonction bulbaire, la VNI améliore les troubles du sommeil mais n’améliore pas la survie comparativement aux soins conventionnels. La trachéotomie en 2010 chez les insuffisants respiratoires chroniques graves doit concerner des patients insevrables de la ventilation endotrachéale, des patients parvenus à l’extrême de la VNI (24h/24), des patients pour qui la VNI est impossible, inefficace ou contre-indiquée, des patients avec des troubles de la déglutition ; elle doit également se décider en fonction de l’étiologie sous-jacente et du contexte d’aval. Enfin, le choix d’une VNI ou d’une trachéotomie peut aussi être influencé par les systèmes de remboursement ! Page 12 FLASH INFO VI : Particularités de la trachéotomie Le Pr. B. Estournet a analysé l’évolution des trachez l’enfant dans les maladies neuro- chéotomies réalisées dans son service en 30 ans. musculaires et de l’enfant. Elle constate que le nombre annuel de trachéotomies n’a pas changé (15 par an en 1973 ; 10 par (Pr. Brigitte Estournet, Hôpital Raymond Poinca- an en 1981, 14 par an en 1990 et 11 par an en ré, Garches). 2002). De même, les pathologies concernées ont peu changé entre 1973 et 2001, avec le même On constate que la trachéotomie est de moins en moins pratiquée de nos jours. En effet, l’utilisation de la ventilation non invasive (VNI) et l’efficacité des appareils d’aide à la toux ont réduit les indications de la trachéotomie chez l’enfant comme chez l’adulte. Le rapport de la conférence de consensus de « the American College of Chest Physicians » [21] stipule que les indications de la ventilation invasive concernent les patients ayant une indication de VNI mais des problèmes tels qu’un encombrement bronchique incontrôlable malgré l’utilisation de moyens d’aide à la toux ou des troubles de la déglutition avec des fausses routes chroniques et des pneumonies à répétition ; les patients ayant une insuffisance respiratoire symptomatique ne tolérant pas ou n’étant pas améliorés par la VNI ; les patients nécessitant une ventilation continue (>20 heures) à cause d’une faiblesse extrême ou d’une paralysie totale des muscles respiratoires ; ou enfin les patients et soignants préférant la ventilation invasive. La trachéotomie peut être proposée même si la VNI est efficace ; notamment quand la ventilation est nécessaire la majorité du temps. On peut proposer une ventilation buccale, mais il faut pouvoir désencombrer le patient en urgence. Page 13 nombre de patients atteints d’un syndrome de détresse respiratoire aigue, tétraplégiques, présentant des maladies neuromusculaires, neurologiques ou des patients dans le coma. Quand la ventilation devient nécessaire, on essaie en première intention la ventilation non invasive sauf si les troubles de la déglutition sont importants, si l’encombrement trachéobronchique domine le tableau clinique, s’il existe des anomalies maxillo faciales empêchant une ventilation efficace, et/ou s’il existe des anomalies pulmonaires obstructives avec oxygénodépendance. Les différents travaux de la littérature [22-24] montrent que les principales causes sont les maladies chroniques nécessitant une assistance ventilatoire (55% des cas) ou une obstruction des voies respiratoires (45% des cas). Dans 70% des cas, les patients ont moins de 3 ans ; voire souvent moins de 1 an dans le cas d’une obstruction des voies respiratoires ou d’une ventilation prolongée. La mortalité est de 10 à 30% dans 0 à 4% des cas liée à la trachéotomie. Enfin, la décanulation est réussie dans 30 à 70% des cas, après 4 à 40 mois. Dans 25% des cas, les causes sont neurologiques (maladies neuromusculaires et lésions du tronc cérébral), FLASH INFO ou neuromusculaires avec des atteintes restricti- Les conditions de la réussite de la trachéotomie ves telles que les pathologies sévères néonatales sont basées sur un dialogue préalable avec la ou précoces avec troubles de la déglutition, les famille et l’enfant, le bon choix d’une canule formes sévères du jeune enfant où le désencom- adaptée à chaque patient (morphologie, âge, dé- brement est problématique, les formes progressi- pendance, esthétique), un matériel complet réglé ves aboutissant à une dépendance respiratoire en milieu hospitalier, l’éducation de la famille majeure, les pathologies avec troubles de la déglu- avant le retour à domicile, un retour envisagé tition majeurs, telles les myasthénies congénitales seulement si l’enfant est stable et pas trop jeune. ou auto-immunes, ou encore l’insuffisance respiratoire chronique telles les malformations costovertébrales et les traitements orthopédiques lourds. Chez le petit enfant où l’utilisation de la VNI est difficile, certains traitements par plâtres et halo justifient la mise en place préalable d’une trachéotomie. De plus, l’arthrodèse vertébrale peut être faite quelle que soit la capacité vitale mais, dans la période post opératoire, une ventilation invasive est nécessaire jusqu’au retour de la capacité vitale antérieure : précisons que la trachéotomie n’est pratiquement jamais faite si elle n’a pas été programmée en préopératoire. Comment choisir la canule de trachéotomie ? Le Pr. B. Estournet a expliqué que s’il existe des fausses routes itératives, il faut utiliser une canule non fenêtrée et à ballonnet. Toutefois, le ballonnet ne permet pas d’empêcher complètement les fausses routes. C’est pour- quoi, des canules sans ballonnet sont souvent utilisées, associées à une gastrostomie, un traitement antireflux et des patchs de Scopoderm. Dans les autres cas, il est préférable d’utiliser une canule sans ballonnet permettant les fuites, associée à une valve de phonation ou une canule fenêtrée. Il faut aussi garder à l’esprit que la canule idéale n’existe pas ! Concernant la technique de trachéotomie par voie Elle devrait être : assez souple pour se mouler chirurgicale ou tanscutanée, il existe peu de don- sur la courbure trachéale, faite d’un matériau nées dans la littérature pour l’enfant. Par voie causant le minimum de réaction tissulaire, être chirurgicale sans résection du mur trachéal ; des disponible en plusieurs tailles et longueurs et fils d’attente doivent être passés dans le mur tra- avoir un tube interne amovible pouvant être chéal pour permettre une recanulation facile les nettoyé. En pratique, la position de la canule premiers jours. Chez l’adulte, la voie percutanée dans la trachée doit être vérifiée en position as- paraît plus sure mais dépend de l’expérience des sise et couchée soit par radio ou fibroscopie. De équipes [25]. même, il faut régulièrement vérifier l’absence de complication par fibroscopie : granulomes sus stomie, intra-trachéaux ou lésions ulcèrantes au bec de la canule ou sténose. Page 14 FLASH INFO Les recommandations de la conférence de mots avec l’insufflation du ventilateur. Dans le consensus précisent que si une ventilation invasi- cadre de l’utilisation d’une canule à ballonnet, il ve est nécessaire, il faut préférer un mode de ven- faut proposer dès que possible une synthèse vo- tilation volumétrique en mode assisté contrôlé. cale. Les modes barométriques de type BPAP nécessitent des évaluations complémentaires. De plus, il est recommandé de fournir aux patients des moyens de ventilation avec batteries pour favoriser leur mobilité. Enfin, une humidification par réservoir d’eau chauffée doit être préférée aux filtres. Chez le nourrisson, l’évolution est souvent favorable et permet une décanulation ultérieure. Chez les enfants, les principales causes de trachéotomie sont neurologiques. Ils sont souvent stables et faciles à ventiler, les complications sont rares (obstructive, granulation...) mais la dépendance respiratoire en France gène souvent Concernant le matériel, le Pr. B. Estournet rappel- la scolarité puisque peu d’assistants scolaires le qu’il s’est nettement amélioré. Toutefois, le pro- sont spécifiquement formés pour les prendre en blème d’un autre ventilateur sur le lieu de scolari- charge. L’adolescence est l’âge le plus difficile té se pose encore pour l’enfant. De l’enfance à l’â- pour accepter la ventilation qui signe souvent ge adulte, chaque âge pose des problèmes diffé- l’aggravation de la maladie et accroît le senti- rents du fait des causes de la dépendance ventila- ment de dépendance. toire mais surtout de l’environnement social. Concernant les nourrissons, c’est la période à risques où la morbidité et la mortalité sont les plus hautes. En effet, le risque de décanulation et de débranchement du ventilateur est très élevé chez les bébés peu paralysés (2%), ils sont souvent instables avec reflux gastro-oesophagien, vagotonie, bronchospasmes (Syndromes myasthéniques congénitaux) et une surveillance particulière à la maison (SpO2) est nécessaire car les alarmes des ventilateurs sont souvent insuffisantes. De l’encombrement ou de la trachéotomie, qui est la poule et qui est l’œuf ? A l’époque de la VNI, de l’assistant à la toux et du percussionaire, seuls les patient totalement dépendants ou chroniquement encombrés sont trachéotomisés ! La trachéotomie dans le cadre d’un encombrement bronchique nécessite un interrogatoire clinique soigneux. Le praticien doit déterminer si l’encombrement existait avant la trachéotomie, sa période de survenue (nuit, au fauteuil, après une infection…) ainsi que le type de sécrétions Chez les jeunes enfants, la trachéotomie peut (claires, purulentes, bouchons etc...). Il faut aussi avoir des répercussions sur le langage : une tra- réaliser un bilan complémentaire en fonction de chéotomie précoce retarde l’acquisition de la pa- l’orientation diagnostique (radio du thorax, bi- role. Cependant, si les enfants ont une canule sans lan ORL, fibroscopie avec ou sans canule, bilan ballonnet, un langage normal apparaît vers l’âge digestif, bilan d’atopie) et étudier la canule. de trois ans quand l’enfant peut coordonner les Page 15 FLASH INFO En présence de stase salivaire et de trou- Le reflux gastro-oesophagien est aussi très fré- bles de la déglutition, l’encombrement est clair et quent et doit être évoqué devant des encombre- permanent, souvent sus canulaire. Le diagnostic ments nocturnes brutaux. Le bilan repose sur clinique repose sur les troubles de la déglutition et une évaluation clinique avec une pHmétrie et la réalisation d’une fibroscopie via le trachéosto- une fibroscopie. Le traitement est classique avec me sans canule. Le traitement se fait par Patch de Motilium, Prépulsid et Débridat ou Urécholine. Scopoderm, par le choix de la bonne canule Dans le cas d’une majoration sous traitement, il (petite, souple et bien placée) ou discussion de la faut faire une manométrie oesophagienne pour possibilité d’une canule avec ballonnet. éliminer une achalasie et un méga œsophage. L’encombrement respiratoire nécessitant une trachéotomie peut être d’origine ORL : telles les infections ORL hautes (sinusites), basses (végétations adénoïdes hypertrophiques ou hypertrophies amygdaliennes). Dans ce cadre, il faut envisager un bilan ORL complet et traiter la cause. Une autre cause possible est l’existence d’une inflammation trachéale, d’origine allergique (recherche d’un terrain atopique, analyse de la périodicité des encombrements et traitement par antihistaminiques, corticoïdes inhalés ou salbutamol) ou post-infectieux (fréquent après certaines Une mauvaise canule peut être une cause d’encombrement bronchique, notamment en raison de sa forme, du matériau et des produits de nettoyage ou décontamination de la canule. Il faut vérifier la place de la canule par radio et/ou fibroscopie transcanulaire. Ne pas oublier de choisir le modèle de canule le plus adapté, parmi les nombreux modèles proposés. Le Pr. B. Estournet précise que l’encombrement bronchique n’est pas une fatalité ; il faut en chercher la cause. On peut le plus souvent améliorer la situation… mais pas toujours. viroses, pouvant durer plusieurs semaines, amélioré par les corticoïdes oraux). Les foyers de fibrose organisés avec dilatation des bronches sont, de même, des sources d’infections chroniques (sur atélectasies infectieuses non diagnostiquées, sur compressions bronchiques par le rachis). La prise en charge repose sur la prévention par le traitement des atélectasies (Percussionaire, fibroscopie) et des lordoses. Il faut aussi traiter la rétention purulente chronique par antibiotiques alternés, Per- Quels impacts de la trachéotomie sur l’enfant, ses parents ? Une étude [26], réalisée auprès de 26 parents dont 7 d’enfants décanulés, à Londres, a rapporté des effets négatifs sur tous les aspects étudiés : sommeil, relations, vie sociale et possibilité de travailler. Les auteurs insistent sur la nécessité d’une meilleure préparation préopératoire et d’un meilleur soutien pour de telles familles. cussionnaire quotidien ou drainage et, enfin, discuter d’une chirurgie après évaluation pluridisciplinaire. Page 16 FLASH INFO Les études sur la qualité de vie des parents d’enfants trachéotomisés montrent dans tous les pays que les parents passent en moyenne 8 heures par jour à effectuer des soins. Leur responsabilité est décrite comme stressante et parfois écrasante. Ils recherchent la normalité mais rapportent un sentiment profond d’isolement et sont blessés par les réactions qu’ils rencontrent dans leur environnement quotidien. Cependant, ils disent aussi « ressentir des choses positives » [27;28]. Une étude prospective s’est intéressée à la qualité de vie chez des patients Duchenne ventilés au long cours [2]. Au total, 52 patients, d’âge moyen 25 ans +/-5 dont 16 en VNI et 36 avec trachéotomie ont été inclus. Les résultats montrent que la qualité de vie ne dépend pas du type de ventilation. Leur indice de qualité de vie est aussi bon que celui des étudiants sans problèmes, du même âge. En revanche, leur plus grand problème est en rapport avec leur vie sexuelle (70%) et leur état physique (40 %). Toutefois, ces patients passent plus de la moitié de leur temps avec des pensées positives (92%). Références bibliographiques : 1.Bonnette. D, 19.Bourke. et al. Lancet Neurol 2006;5:140-147 J Chir 1999;136:208-209. 2.Raphael. JC et al. Rev Neurol 2002;158:453-460 20.Bach. JR et al. Chest 1996;110:1566-1571 3.Upadhyay. A et al. J Am Coll Surg 1996;182:51-55 21.Consensus de « the American College of Chest Physicians » Chest 1998 Sup. Vol 13 4.Van Natta. TL et al. Ann Surg 1998;227:618-626 22.Fraga. JC et al. J Pediatr 2009;85:97-103 5.Indeck. M et al. J Trauma 1988;28:1020-1025 23.Caron. JD et al. Laryngoscope 2000;110:1099-1104 6.Hill. B et al. J Trauma 1996;40:238-244 7.Holdgaard. H et al. Acta Anesth Scand 1998;42:545- 24.Graf. JM et al. Pediatr Pulmonol 2008;43 :788-794 550 25.Freeman. BD et al. Chest 2000;118:1412-8 8.Esteban. A et al. 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Plus ou moins fréquentes par nycthémère, ces aspirations ne sont pas planifiées ; elles doivent toujours être effectuées rapidement, dans des conditions d’asepsie rigoureuse et de façon atraumatique. Au cours de cet atelier, trois points ont été abordés : le matériel (sondes, aspirateurs de mucosités), l’aspiration du patient et l’entretien du matériel. Le matériel : Trois types de sondes, de longueur variant entre 30 et 50 cm, sont disponibles sur le marché : sondes extra souples en latex, sondes souples ou rigides en silicone, PVC ou polyuréthane. Le choix d’une sonde est fonction de son diamètre (6 à 20 Ch) qui doit être adapté au diamètre interne de la canule. L’embout terminal peut être biseauté, avec un rebord arrondi ou avec un ou plusieurs œillets latéraux. Selon la LPP, une personne trachéotomisée doit disposer à domicile d’un aspirateur sur secteur et d’un aspirateur sur batterie. Ce dernier sert de matériel de secours en cas de panne ; plus petit et maniable, il est pratique à emporter lors des déplacements. Un filtre anti reflux équipe certains aspirateurs, permettant d’éviter le passage d’eau dans la machine. L’aspiration du patient : Tout d’abord, le patient doit être installé confortablement, dans la mesure du possible en position demi assise de façon à dégager le cou. Le geste qui va être pratiqué doit lui être expliqué et dans le cas d’une assistance ventilatoire, il faut le prévenir que l’appareil va être débranché en fin d’inspiration ; en effet, il faut éviter de pratiquer l’aspiration au travers du raccord de ventilation, de façon à éviter tout risque infectieux. Les étapes du geste d’aspiration sont décrites, en insistant tout particulièrement sur la longueur de la sonde à introduire ; elle doit être sensiblement équivalente à la longueur de la canule. Une sonde trop profondément introduite peut entraîner des lésions de la trachée et fait tousser le patient. Lorsque l’on rencontre des difficultés pour introduire la sonde, il ne faut pas forcer ; cela signifie la présence d’un bouchon muqueux qui, en retirant la chemise interne, va être évacué. Page 18 Lorsque la canule ne possède pas de chemise interne et que le patient est en souffrance, il convient de faire un échange de canule. Dans tous les cas, il faut veiller à ne pas pousser le bouchon ; on peut instiller du sérum physiologique (environ 2 ml). Pour éviter la formation de bouchons, il faut fluidifier les sécrétions : il faut inciter le patient à beaucoup boire, humidifier la pièce et, sur prescription médicale, un humidificateur peut être placé sur le ventilateur ou mis à la disposition du patient (nez artificiel, humidificateur ultrasonique). La présence de sang dans les mucosités aspirées signifie, le plus souvent, un geste traumatique lors des aspirations précédentes mais nécessite une surveillance accrue voire, si saignement trop important, le recours à l’équipe médicale. Dans le cas d’une aspiration non productive, il faut vérifier que l’aspirateur de mucosités est en état de fonctionnement, que le bouchon du bocal est bien fermé et qu’il n’y a pas de fuites au niveau du tuyau. L’entretien du matériel : Après chaque aspiration, la sonde et le tuyau doivent être largement rincés en faisant des aspirations d’eau. Si la prescription médicale indique une sonde par jour, la faire tremper dans une bouteille d’eau bouillie et refroidie jusqu’à la prochaine utilisation. Il est précisé que la LPP ne stipule pas si l’on doit utiliser une sonde par aspiration ou une sonde par jour. Tous les jours, le bocal des aspirations est vidé dans les toilettes puis lavé à l’eau savonneuse, rincé et séché. Dans le cas de bocaux à usage unique, il est interdit de les jeter dans une poubelle ordinaire ; un système de containers est mis en place au domicile du patient et ils sont collectés périodiquement par le prestataire de santé à domicile ou un sous-traitant. Les tuyaux sont également nettoyés quotidiennement à l’eau tiède savonneuse. Avant de les remettre en place, il faut vérifier leur intégrité. Lorsque l’aspirateur de mucosités est muni d’un filtre anti reflux, il faut surveiller la saturation de façon à maintenir une bonne dépression et le changer selon le besoin. A l’issue de cet atelier, les participants ont souhaité un document spécifique sur le déroulement du geste d’aspiration. FLASH INFO Décret VII : Les aspirations endo-trachéales : concordance entre la législation et la réalité du terrain en 2010 (Michèle Paget, Reims, et Gilbert Dragar - Fouquières-lez-Lens) Dans un premier temps, les intervenants ont rappelé le cadre juridique concernant la pratique des aspirations endotrachéales. Le décret n° 99-427 du 27 mai 1999 stipule en particulier que « les aspirations endo-trachéales ne peuvent être pratiquées … que sur prescription médicale …. par des personnes ayant validé une formation spécifique définie par arrêté du ministre chargé de la santé. » L’arrêté du 27 mai 1999 précise la durée de formation (5 jours dont 2 pour l’enseignement théorique et 3 pour l’enseignement clinique et pratique), le mode opératoire (les Instituts de Formation en Soins Infirmiers -IFSI) en collaboration avec les directeurs des soins ont en charge la formation des personnes aux aspirations endo-trachéales) et qu’une attestation doit être délivrée au candidat par l’IFSI. Toujours dans cet arrêté, l’article 4 concerne les membres des familles des personnes trachéotomisées qui peuvent également être formées aux aspirations endo-trachéales, dans le service où est prise en charge la personne trachéotomisée ; « le chef de service évalue les connaissances théoriques et cliniques des intéressés et leur délivre en conséquence une attestation. » En novembre 1999, la circulaire DPS/PS 3 n° 99-642 conforte le rôle des IFSI dans la formation mais indique que ces instituts « pourront faire appel le cas échéant à des intervenants extérieurs ». Après ce rapide rappel des textes législatifs, les intervenants ont présenté le constat sur le terrain. Certes, la très grande majorité des personnes trachéotomisées effectuent elles-mêmes les aspirations (environ 80% des personnes ne présentant aucune atteinte neuromusculaire des membres supérieurs) et des familles formées effectuent également les aspirations endo-trachéales. Cependant, des personnes trachéotomisées ne sachant pas s’aspirer et dont les familles ne sont pas formées ne sont pas exception. Concernant l’attestation délivrée par le chef de service aux membres des familles ayant suivi une formation dans le service, elle n’est que très rarement rédigée. De même, dans la plupart des cas, il n’y a pas de prescription médicale au domicile pour les intervenants extérieurs pratiquant des aspirations endo-trachéales. Les intervenants ont également souligné que, compte tenu de la prise en charge de plus en plus fréquente de ces personnes par des organismes de maintien à domicile (SSIAD, ADMR, ADAP …), les besoins de formation des personnels sont croissants et que les IFSI peuvent difficilement voire pas du tout répondre aux demandes. Pour pallier ces insuffisances et eu égard aux prestations générales relatives à la trachéotomie et définies dans la LPP, deux questions sont posées : comment optimiser l’application du décret (multiplication des formations, délivrance de l’attestation de formation par le chef de service). Quelle est la position des SARD vis-à-vis du décret ? De la discussion qui a suivi cette présentation, il convient de retenir que l’implication des SARD dans les programmes de formation, élaborés par les IFSI, est disparate d’une région à une autre : certains sont sollicités pour assurer la formation théorique au sein des IFSI, d’autres non. Au domicile, les infirmiers prestataires de santé à domicile ne sont pas légalement habilités à faire la formation aux aspirations, tant auprès des personnes trachéotomisées que de leur entourage. Pourtant, de part leur diplôme, ils en ont la compétence et, d’après la LPP, « conseil, éducation, fourniture de matériel et formation à leur utilisation » font partie de leurs missions : comment éduquer sans effectuer le geste ? Page 19 FLASH INFO ATELIER « Canules et soins de trachéotomie » Valérie GAËREL, Suresnes, Marie-Thérèse DANIEL, Paris, et Isabelle DUPIRE - Fouquières-les-Lens La longueur de la canule est calculée de la collerette à l’extrémité de la canule. Certaines canules sont de longueur fixe et d’autres, grâce à leur collerette réglable, permettent d’atteindre la longueur interne souhaitée. Le diamètre interne est référencé par la mesure « ID » et le diamètre externe par la mesure « OD ». Attention aux équivalences : à ce jour en effet, il n’existe pas de nomenclature commune pour les fabricants. Une canule dite « 8 » n’aura pas les mêmes caractéristiques de diamètre interne, externe et de longueur selon le fabricant, d’où l’importance d’une prescription médicale précisant la référence exacte du modèle choisi. Une canule de trachéotomie est un tube courbe, avec un angle d’environ 110° à 130° dont une partie pénètre dans la trachée au travers de l’orifice de trachéotomie, et dont l’autre partie est extérieure. Elle doit être choisie selon la morphologie du sujet, c'est-à -dire selon : - Le diamètre et longueur de la trachée : une canule trop étroite risque d’induire des résistances et être source de gêne lors des aspirations endo-trachéales. Une canule trop large risque de léser les parois trachéales et le change de canule peut être rendu plus difficile. - La courbure et forme de la trachée : en effet, la forme de la canule doit respecter les éventuelles déviations trachéales comme en cas de cyphoscoliose par exemple. Une canule doit donc être non gênante, centrée dans la trachée, et son extrémité à distance de la carène. La prescription médicale doit préciser la référence complète du modèle choisi et indiquer ainsi : Longueur, courbure, diamètre interne, diamètre externe, matériau, présence ou non d’une fenêtre, type de fenêtre, présence ou non d’un ballonnet, type de ballonnet, type de collerette. De nombreuses courbures sont disponibles (dénommées Hautant, Krishaber, Portmann). Page 20 Historiquement réalisées en argent, les matériaux des canules ont évolué. L’acrylique, certes rigide, est moins coûteux que l’argent et ses parois lisses permettent un bon drainage des sécrétions. L’utilisation du PVC a permis de concevoir des canules moins rigides, sa souplesse améliorant le confort du patient. Le silicone est un matériau non allergisant mais les ballonnets se révèlent souvent poreux. De nouveaux matériaux sont à l’étude, comme le téflon par exemple. Le moyen de fixation de la canule est un élément important pour le patient. Chez l’enfant, on préférera le cordon noué, assurant un maintien efficace. Chez l’adulte, de nombreux modèles en mousse ou tissu avec crochets ou Velcro permettent un maintien fiable tout en améliorant le confort. La canule dite « externe » est celle en contact avec la paroi trachéale. La canule dite « interne » se glisse à l’intérieur de l’externe et permet différentes fonctions selon les besoins du patient (canule interne à collerette plate, canule interne parlante, canule interne avec raccord de ventilation). Les canules sans ballonnet sont utilisées pour les trachéotomies sans ventilation ou avec ventilation dite « à fuite », c’est-à-dire tolérant le passage d’un petit pourcentage d’air entre le corps de la canule et la trachée vers les voies aériennes supérieures. Les paramètres et alarmes de ventilation sont ajustés et validés dans ces circonstances. Chez l’enfant, les canules à ballonnet sont à proscrire car le ballonnet risque de déformer la paroi trachéale, encore en cours de croissance. FLASH INFO Les canules avec ballonnet sont utilisées chez les patients plus particulièrement difficiles à ventiler. Le ballonnet gonflé, remplissant la lumière trachéale, empêche ainsi toute fuite vers les voies aériennes supérieures et garantit ainsi le volume insufflé par le respirateur. Le ballonnet n’est en aucun cas une sécurité de maintien en place de la canule. Dans certains cas, il peut être prescrit de le gonfler pendant les repas, afin de minimiser les risques d’inondation bronchique lors de trouble de la déglutition et de fausse route. Le ballonnet à basse pression permet une meilleure répartition des pressions sur les muqueuses trachéales mais la proéminence du ballonnet dégonflé peut gêner lors du change de la canule. Le ballonnet à haute pression peut altérer la circulation sanguine dans le tissu trachéal par sa forte pression sur les muqueuses mais la mise en place de la canule est facilitée grâce au ballonnet collabé sur le corps de la canule, une fois dégonflé. Quel que soit le modèle de ballonnet, il est important de ne pas trop le gonfler. La quantité d’air injectée doit être nécessaire et suffisante. En effet, le ballonnet doit assurer une bonne étanchéité et ne pas être traumatisant pour les parois de la trachée. Une petite astuce : faire parler le patient lorsque l’on gonfle progressivement le ballonnet. Dès qu’il ne peut plus émettre de sons, noter alors la quantité d’air injectée qui correspond ainsi à un gonflage suffisant et sans excès. Pour les patients ventilés sous respirateur, lors du gonflage progressif du ballonnet, stopper le gonflage lorsque le volume courant expiré égale le volume courant insufflé. Tout patient trachéotomisé peut parler. Différents dispositifs peuvent aider et faciliter la phonation. Quel que soit le système utilisé (doigt, valve parlante, bouchon,..) l’air suit la filière normale pour remonter par les voies aériennes supérieures et donc vers les cordes vocales. Bien entendu, dégonfler le ballonnet le cas échéant. En cas de difficulté de phonation, la canule peut être fenêtrée (orifice unique ou perforations multiples) afin de favoriser le passage de l’air vers les cordes vocales et améliorer ainsi l’élocution. En supprimant les rôles du nez (humidificateur- filtreréchauffeur), les sécrétions d’un patient trachéotomisé peuvent devenir sèches ou collantes. Les dispositifs appelés « nez artificiels », mis en place sur prescription, résolvent ces problèmes en récupérant l’humidité naturellement expirée et en la restituant à l’inspiration suivante. Il existe des moyens simples de fluidifier les sécrétions et de minimiser les risques de bouchons muqueux. Par exemple : apports hydriques suffisants, hygrométrie correcte de la pièce, humidificateur d’ambiance, appareil d’humidification par aérosol. Page 21 Afin d’éviter au maximum tout risque d’infection, il est impératif de maintenir l’orifice de trachéotomie très propre. Le soin d’orifice (soin non stérile) doit être réalisé tous les jours, voire plusieurs fois par jour si le patient est très sécrétant, avec une compresse imbibée de sérum physiologique ou d’eau bouillie puis assécher soigneusement par tamponnement avec une compresse afin d’éviter la macération, source d’altération cutanée et d’infection. Nettoyer également la canule interne le cas échéant. Renouveler la compresse ou la compresse hypoallergénique placée autour de la canule. Il est important de surveiller l’état cutané du pourtour de l’orifice afin de signaler toute anomalie au médecin. Selon l’état des berges de l’orifice (irritation, inflammation..) et sur prescription, appliquer avec une compresse un produit antiseptique. La périodicité du changement de la canule, définie par le prescripteur, varie en fonction du patient, de sa pathologie, de l’abondance des secrétions et du type de canule. Une fréquence de changement minimum d’une fois par semaine est recommandée, sauf cas particulier. Si présence d’une canule interne, celle-ci doit être nettoyée aussi souvent que nécessaire et au minimum deux fois par jour. Il est primordial de préparer tout le matériel et de vérifier son intégrité avant le change afin que le soin soit rapide pour éviter le rétrécissement de l’orifice trachéal. S’il s’agit d’une canule à ballonnet, vérifier le bon état de celui-ci en le gonflant à l’aide d’une seringue. Bien le dégonfler ensuite, mais pas trop pour éviter les arêtes vives qui gêneront au passage de l’orifice trachéal. Le mandrin (canule interne avec extrémité en forme d’olive) facilite le passage de la canule par l’orifice trachéal lors du change de canule et se retire immédiatement après la pose. Le change de canule est très souvent un moment appréhendé par le patient et son entourage. Le changement de canule est un geste de soin qui doit, au regard de la loi, être réalisé par des personnes qualifiées. Néanmoins, d’après la loi également, ce geste peut être confié à des personnes de l’entourage qui ont été formées lors de l’hospitalisation du patient. Quelle que soit la nature du soin, il est primordial de se laver les mains avant et après chaque soin. Dans le contexte du domicile, il ne s’agit pas d’un geste stérile mais d’un geste propre. Sauf en pédiatrie où les diamètres des canules sont très petits, les canules se nettoient et se réutilisent, à condition d’être en bon état bien sûr. FLASH INFO Laisser tremper la canule dans un récipient d’eau additionnée de savon liquide neutre au maximum 10 minutes. Nettoyer l’intérieur et l’extérieur de la canule à l’aide d’un écouvillon de diamètre adapté. Rincer abondamment à l’eau courante. Sécher avec une compresse et stocker la canule dans une boîte hermétique réservée à cet usage, elle-même nettoyée régulièrement. Il est important de ne jamais dissocier un jeu de canule. L’étiquette de l’emballage initial et la date d’ouverture de la canule sont conservées dans cette boîte. La durée d’utilisation d’une canule est à compter à partir de la première ouverture de son emballage. Le numéro de lot inscrit sur l’emballage est à conserver afin de pouvoir le fournir en cas de défectuosité. La durée d’utilisation maximum après ouverture dépend du type de canule : se référer aux notices des fabricants. ATELIER « Accessoires de la trachéotomie : patient ventilé et non ventilé » Dr Hélène Prigent - Garches, Henriette Letellier - Caen, Françoise Jeanne - Toulouse et Séverine Hermier - Rouen Les intervenantes rappellent tout d’abord la prise en charge LPP allouée au patient porteur d’une trachéotomie et permettant une prestation complète : éducation technique, fourniture de matériels (consommables et appareils assurant l’humidification, les aides aux traitements et la phonation), les prestations générales (livraison, astreintes …). L’humidification est indispensable, voire prioritaire, pour éviter l’obstruction des voies respiratoires ; les accessoires dédiés à l’humidification sont multiples et utilisables tant pour les patients ventilés (nez artificiel, filtre) que pour les patients respirant spontanément (humidificateur, nez artificiel). A noter qu’un marqueur de saturation manque sur ces dispositifs ; il permettrait d’indiquer la durée d’utilisation en cas de prise en charge par plusieurs personnes. Actuellement, les intervenants notent sur le matériel la date du changement, à l’aide d’un feutre. Page 22 Par ailleurs, les patients trachéotomisés nécessitent souvent des traitements type aérosolthérapie, oxygénothérapie. Les appareils de nébulisation (pneumatiques ou ultrasoniques) sont soit installés aux côtés du patient non ventilé et reliés à lui via un masque adapté sur l’orifice de trachéotomie, soit insérés directement au circuit de ventilation afin de permettre l’inhalation des médicaments prescrits (fluidifiants, bronchodilatateurs, anti-inflammatoires, antibiotiques, antifongiques …). Les générateurs d’aérosol pneumatiques conviennent à tous les traitements sauf recommandations des laboratoires. Les générateurs d’aérosol ultrasoniques ne sont pas compatibles avec les suspensions. De même, l’oxygène est distribué au patient par branchement direct, soit sur la trachéotomie via un dispositif (valve de phonation et nez artificiel avec site O2) muni d’un raccord à oxygène ou positionnement d’un masque sur l’orifice de trachéotomie, soit sur le circuit de ventilation (raccord intégré au ventilateur ou à adapter au circuit de ventilation, ce qui évite de déconnecter les circuits de ventilation des patients ventilés 24 heures sur 24). A noter que les installations d’oxygène (liquide ou concentrateur) et d’aérosols sont cumulables aussi bien en ventilation artificielle qu’en respiration spontanée. En plus de ces accessoires, il existe des valves de phonation permettant au patient non ventilé de communiquer, malgré sa trachéotomie. Cette possibilité est également offerte aux patients ventilés, malgré une ventilation continue limitée chez les patients atteints de BPCO et nécessitant des volumes respiratoires plus stricts que chez les patients présentant une maladie neuromusculaire et pour lesquels la ventilation avec fuites est possible. Le constat montre cependant que les pneumologues experts en ce domaine manquent, autant que les orthophonistes, pour des séances de rééducation phonatoire. Malgré tout, ces dispositifs variés permettent aux patients trachéotomisés d’assurer leur traitement et l’entretien de leur trachéotomie, tout en poursuivant leur vie sociale dans les meilleures conditions possibles, avec l’aide de leur prestataire de santé. FLASH INFO Flash Info est publié par la Fédération ANTADIR - 66 Bd St Michel - 75006 Paris Site internet : www.antadir.com Directeur de la Publication : Pr Jean-François Muir Comité de rédaction : Dr. J.M. Bédicam, Dr. P. Bonnette, A. Couillard, M.Th. Daniel, G. Dragar, I. Dupire, Pr. B. Estournet, V. Gaërel, S. Hermier, F. Jeanne, H. Letellier, Pr. E. L’Her, L. Mounier, Pr. J.F. Muir, M. Paget, Dr. H. Prigent, Pr. D. Robert. Réalisation : Fédération ANTADIR Coordination : Annie Combal, Sylvie Niay. « Ce document est la propriété intellectuelle de l’Antadir qui en est l’auteur : toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement préalable de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (Article L122-4 du Code de la Propriété intellectuelle). Page 23 FLASH INFO