La migraine M BOULIN 2015 Cas clinique Mlle B Q1 • Mlle B, 28 ans se dit migraineuse mais ne sait pas trop quoi prendre au moment de ses crises. Que lui dire? Réponse 1 • Sans être médecin, vous devez quand même lui poser quelques questions pour différencier céphalées classiques (qui requiert paracétamol) des céphalées migraineuses (qui ne requiert pas/peu paracétamol ni antalgiques purs qui sont plutôt inducteurs de céphalées par abus d’antalgiques…. Réponse 1 • La questionner sur ses habitudes d’automédication (ce qu’elle prend, ce qui marche, ne marche pas, si elle prend d’autres médicaments… • Lui demander si elle a déjà vu un médecin pour ses céphalées (qu’elle en parle sinon la fois prochaine) Question 2 • Elle vous dit qu’elle prend à chaque crise de l’aspirine 500 mg les jours de crise à chaque repas pour protéger son estomac. Que lui répondre ? Réponse 2 • L’aspirine à posologie antiinflammatoire est un traitement largement recommandable dans les formes peu sévères Il faut lui dire, qu’il ne sert à rien d’attendre les repas (elle n’aura pas d’ulcères en prenant une fois de temps en temps de l’aspirine en dehors des repas! et que le ttt doit être pris dès les prodromes et au plus vite pour limiter intensité + durée dans le cas d’une céphalée migraineuse) Réponse 2 • L’aspirine à posologie antiinflammatoire, c’est strictement >500 mg et il faut plutôt recommander de prendre 1 g en 2 prises rapprochées sans dépasser 3 g/j • Evidemment, questionner la patiente sur les CI éventuelles de la prise d’aspirine (anticoagulant, saignement…) Réponse 2 • Lui conseiller donc d’en parler à son généraliste si – Aspirine peu efficace ou nécessite plusieurs prises pour faire passer la crise – Aspirine occasionne EI – Retentissement pour elle Question 3 • C’était « évidemment » le cas pour elle d’autant qu’elle ne prenait pas au mieux l’aspirine. Elle est donc allé voir son généraliste qui diagnostiquant des migraines sans aura d’intensité non négligeables a prescrit : – Almogran® 12,5 mg cp : 1 cp dès la survenue de la céphalée (maximum 2/j) – Profémigr® 150 mg : 1/2 cp dès survenue de la céphalée sans dépasser 150 mg/j À prendre en alternance en cas de crise • Le traitement prescrit vous paraît il adéquat (juste classe)? Réponse 3 • Les traitements recommandés de la crise migraineuse sont : – Les AINS type ketoprofène ici, acide acétylsalicylique, ibuprofène, naproxène Apranax®, diclofénac Voltarène® même s’ils ne sont pas spécifiques ont prouvé leur efficacité – Les triptans (spécifiques) type ele-Relpax, frova-Tigreat, naraNaramig, zomi-Zomig, suma-, rizatriptan Maxalt Rappel : les antalgiques sont à limiter voire éviter en raison notamment du risque de céphalées induites par abus Question 4 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. les 2 médicaments doivent être pris en même temps 2. si la patiente n’a plus de céphalées à 2h, il lui faut reprendre l’un ou l’autre au choix pour éviter que la céphalée ne revienne 3. si l’AINS a moyennement marché il est possible de renouveler la prise à 2h 4. Si l’un ou l’autre n’a pas marché à 2h il faut reprendre l’autre médicament à 2h Réponse 4 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. les 2 médicaments doivent être pris en même temps F 2. si la patiente n’a plus de céphalées à 2h, il lui faut reprendre l’un ou l’autre au choix pour éviter que la céphalée ne revienne F 3. si l’AINS a moyennement marché il est possible de renouveler la prise à 2h OUI 4. Si l’un ou l’autre n’a pas marché à 2h il faut reprendre l’autre médicament à 2h OUI Recommandations 2013 • Il est recommandé de « tester » 3 fois un AINS avant de tester 3 fois un triptan, puis potentiellement de changer de triptan… • Les AINS contrairement aux triptans peuvent être pris dès aura dans le but de réduire la céphalée post-aura • En cas d’echec de monothérapie, il peut être associé un AINS + un triptan Question 5 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. Elle peut prendre préventivement l’un ou l’autre lorsqu’elle ne peut éviter certaines situations provoquant des crises (règles, altitude…) 2. Si la patiente n’a pas pris Almogran dès le début de la céphalée, il ne sert plus à rien de prendre le médicament 3. Si Almogran n’a pas marché, elle peut en reprendre 1 cp 2 h après 4. Si Almogran a marché mais que la céphalée revient à 12h, elle peut reprendre un cp sans dépasser 2/24h Réponse 5 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. Elle peut prendre préventivement l’un ou l’autre lorsqu’elle ne peut éviter certaines situations provoquant des crises (règles, altitude…) Jamais en prévention 2. Si la patiente n’a pas pris Almogran dès le début de la céphalée, il ne sert plus à rien de prendre le médicament Faux 3. Si Almogran n’a pas marché, elle peut en reprendre 1 cp 2 h après Pas recommandé, ne marche pas 4. Si Almogran a marché mais que la céphalée revient à 12h, elle peut reprendre un cp sans dépasser 2/24h OUI Question 6 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. Si à la crise suivante, l’un n’a pas marché et que l’autre n’a pas été essayé, il faut l’essayer alors 2. Il est possible que si Almogran® n’a pas marché à une crise, Tigreat® pourrait marcher et être prescrit lors d’une nouvelle consultation 3. Lors de la crise, la patiente pourrait prendre avec Almogran® un autre triptan (pas de délai de 2h à attendre) ou de la DHE Réponse 6 • Que dire à la patiente par rapport à son ordonnance 1. Si à la crise suivante, l’un n’a pas marché et que l’autre n’a pas été essayé, il faut l’essayer alors OUI 2. Il est possible que si Almogran® n’a pas marché à une crise, Tigreat® pourrait marcher et être prescrit lors d’une nouvelle consultation OUI 3. Lors de la crise, la patiente pourrait prendre avec Almogran® un autre triptan (pas de délai de 2h à attendre) ou de la DHE STRICTEMENT CI Réponse 6 • Il faut absolument respecter un délai minimum de 2-34h (dépend molécule) entre deux prises de triptan (que ce soit le même ou un autre!); risque majeur d’HTA +++, vasospasme, accident gravissime Question 7 • Quelles sont les contre indications à l’utilisation des triptans ? (penser à questionner le patient) Réponse 7 • Pathologie cardiaque, ischémique « sévère » – IDM, vasospasme coronarien, pathologie vasculaire périphérique • – AVC, AIT – HTA non contrôlée Child C (métabolisme hépatique) Réponse 7 • CI médicamenteuses : – Triptans, DHE et tous les dérivés de l’ergot de seigle (ERGOTISME ++++) – Ne sont pas des CIs mais attention aux IRSS (syndrome sérotoninergique) et aux inh/inducteurs enzymatiques Eletriptan, extrait Vidal • Le comprimé d'élétriptan doit être pris aussi précocement que possible après le début d'une crise de céphalée migraineuse, mais il est également efficace lorsqu'il est pris à un stade ultérieur. • Il n'a pas été démontré que le comprimé d'élétriptan pris au cours de la phase d'aura prévient la crise de céphalée migraineuse. C'est pourquoi I'élétriptan ne sera pris qu'au cours de la phase céphalalgique de la crise migraineuse. • Le comprimé d'élétriptan ne doit pas être utilisé en prophylaxie. Eletriptan, extrait Vidal • L'élétriptan ne doit pas être utilisé en même temps que d'autres inhibiteurs puissants du CYP 3A4 (par ex : le kétoconazole, l'itraconazole, l'érythromycine, la clarithromycine, la josamycine) et les inhibiteurs de la protéase (ritonavir, indinavir, nelfinavir…). • Fréquent : somnolence, céphalées, étourdissements, fourmillements ou troubles de la sensibilité, hypertonie, hypoesthésie, fatigabilité musculaire + VERTIGES Traitement de la crise, suite En dernière intention = Dérivés de l’ergot de seigle = ergotamine et dihydroergotamine (DHE) IM, IV, SC Ergotamine efficace (disparition de la céphalée dans 60% des cas 2 h après la prise) Gynergène caféiné® qui augmente son absorption Vasoconstriction des artères cérébrales… 2 mg dès les prodromes sans dépasser 6 mg/j Mal toléré : nausées, vomissements +++, vertiges Ergotisme Vasoconstriction artérielle intense produisant des signes et symptômes d'ischémie périphérique vasculaire. En cas de non-traitement une gangrène est possible. La plupart des cas d'ergotisme sont associés à une intoxication chronique et/ou un surdosage et/ou une interaction Accumulation d’ergotamine ou ses dérivés par non métabolisation hépatique (par inhibiteurs du cytochrome P450) Contre indiqué (comme triptans) avec triptans, antiprotéases, macrolides (sauf spiramycine), voriconazole et autres antifongiques azolés + nombreuses associations déconseillées + CI cardiovasculaires des triptans Traitement de la crise, suite La DHE n’existe plus que sous forme injectable [Ikaran, Seglor, génériques buvables, cp retirés en 2013 en raison du rapport bénéfice / risque défavorable] Question 8 • Il s’agit d’une autre patiente que vous connaissez, migraineuse (avec aura notamment, anciennement ophtalmiques) qui vient elle renouveler son traitement : - Avlocardyl® 40 mg : 1/2-0-1/2 QSP 3 MOIS Commentez Réponse 8 Il s’agit d’un traitement de fond Celui ci est entrepris si crises sévères, invalidantes, fréquentes (> 3/ mois) ou inefficacité du traitement des crises A discuter au cas par cas Sachant qu’il existe contraintes liés au traitement (durée = plusieurs mois, toxicité, efficacité relative) Question 10 • Que redire à la patiente à propos de propranolol par rapport à ces autres traitements « antimigraineux » (triptan, AINS…) Question 10 • Autant il ne faut prendre les autres antimigraineux qu’en cas de crises=symptômes (pas à l’aura, mais au début des céphalées) alors que pour le ttt de fond, il faut être observant au quotidien dans le but de réduire l’intensité et la durée des crises Question 12 • Finalement, le propranolol est stoppé, remplacé par Laroxyl® Amitriptyline 3 gouttes à prendre le soir. Commentez, quel conseil de prise faut il donner à la patiente Réponse 12 Après échec du traitement de fond par béta bloquant (propra ou métoprolol +++), il est possible que le patient reçoive topiramate ++ (3 molécules ayant prouvé leur efficacité et avec AMM traitement de fond), un antidépresseur tricyclique à faible dose (clomipramine, amitriptyline); ces molécules toujours à augmenter progressivement, voire autres molécules type Sibelium® (flunarizine), Nocertone® (oxétorone), Sanmigran® (pizotifène), methysergide (Desernil® CI avec triptans) notamment….il est même possible d’en associer certaines Tous les antidépresseurs tricycliques sont à prendre le soir car sédatifs (sauf si 2 prises/j) Question 13 Quels conseils généraux sont à donner au patient migraineux ? Conseils au patient Doses maximales à respecter pour triptans et dérivés qu’ils auraient encore… Interactions médicamenteuses nombreuses (ergot et triptan +++) Eviter facteurs déclenchants si possible : stress, aliments comme chocolat, alcool, fromages, luminosité, odeurs… Repos en atmosphère sombre, sommeil de courte durée, application d’eau froide auraient une certaine “efficacité” durant la crise Relaxation Les thérapeutiques adjuvantes • Traitement antidépresseur ou anxiolytique si besoin – Anxiété et dépression • Souvent associés à la migraine • et favorisent la survenue des crises – Si besoin, le diriger vers un psychiatre ou un psychologue Les thérapeutiques adjuvantes • Le froid – Glaçon dans gant de toilette, … • Cobalt – Action antistress : 3 cures d’1 mois/an • Acupuncture • Ostéopathie Les thérapeutiques adjuvantes • Phytothérapie – Migrastick: HE (menthe poivrée, lavande..) effet froid + massage front, tempe, nuque • Homéopathie – Nux Vomica en 7CH, Gelsenium en 5CH, Iris Versicolor en 7CH, Ignatia en 7CH et Actasa Racemosa en 7CH, respectivement pour les nausées, vomissements, atteintes visuelles, de stress et des règles. efficacité non prouvée Les thérapeutiques adjuvantes • Certaines techniques, complémentaires du ttt de crise et de fond, ont prouvé leur efficacité – Relaxation / gestion du stress • Permet le contrôle et la maîtrise de soi – la diminution des tensions musculaires (aggravées par la douleur) – la réduction de l’hyperactivité sympathique (tachycardie, sueurs) liée au stress – Biofeedback • Se pratique en milieu hospitalier ou dans les centres anti-douleur • Repose sur l'utilisation de moyens électriques de visualisation du stress qui permet ainsi d'apprendre plus efficacement les méthodes de relaxation. – Techniques cognitivo-comportementales • Croyances souvent erronées de la maladie : reformulation, acceptation, réassurance du patient Les thérapeutiques adjuvantes • Cefaly® – Serait efficace et diminuerait le nombre de médicament pris par le patient – Mais non remboursé et coûte 300 euros… L’éducation du patient • Essentielle – Fournir les bonnes informations et les bons conseils • Migraine ≠ céphalée de tension – Céphalée plus diffuse, non pulsatile, non aggravée par l’effort, parfois accompagnée de photo et phonophobie – Mais souvent associée et intriquée chez le même patient – Poser les bonnes questions ! • Hygiène de vie ++ L’éducation du patient • Bonne observance • Rassurer le patient et bien expliquer la logique du ttt – Ttt de crise/ttt de fond • ttt de crise : à prendre ponctuellement au début des céphalées migraineuses • ttt de fond est à prendre quotidiennement pendant plusieurs mois • Prévention des abus médicamenteux – Lui poser des questions afin de détecter un éventuel échappement thérapeutique – Dépister les patients qui ne savent pas qu’ils sont migraineux L’éducation du patient Date de la crise Intensité Médicament consommé Efficacité Facteurs déclenchant supposé Début Fin Début Fin 1- de 1 à 10 2- bonne, moyenne, nul Agenda type, consultations spécialisées migraine dans service de neurologie, pousser le patient à les remplir et les amener à la consultation pour l’aide à la prescription du neurologue