Evolution de l’hygiène hospitalière Dr Joseph HAJJAR Praticien hospitalier honoraire - Valence De l’antiquité au moyen âge l’hygiène des mains Les ablutions Les mains cause de l’inflammation Il faut se laver les mains, le visage ; les pieds, éventuellement… De l’antiquité au moyen âge les déchets • Surtout des déchets organiques • Une certaine organisation – Toilettes publiques – Fosses en dehors des grandes villes Avant la fin du 17ème siècle • Une période de lutte « sans fin et peu romantique » contre – les maladies – la mortalité infantile et celle de jeunes adultes – les épidémies Au cours du 18ème siècle • Hôtel-Dieu de Paris – 1 000 lits • 3 000 patients et jusqu’à 7 000 (épidémies) • Eau « potable » directement puisée de la Seine • Plaies « nettoyées » quotidiennement avec la même éponge – Taux de mortalité élevé lors de l’épidémie de fièvre puerpérale en 1764 • DIDEROT « …le plus grand, celui qui reçoit le plus grand nombre de malades, le plus riche…et le plus effrayant des hôpitaux… » Les grandes découvertes du 19ème • • • • • • • • • • • • Semmelweis (hygiène des mains) Pasteur (microorganismes) Nightingale (environnement) Lister (antisepsie chirurgicale) Pringle (antiseptiques) Berthollet (hypochlorite de sodium) Poubelle (déchets) Halsted (gant) Fleming (pénicilline) Price (flore cutanée) Rose et Swain (chlorhexidine) Shelanski et Chantor (povidone iodée) Une étape historique Ignace Philippe SEMMELWEIS (1818 -1865) Mortalité maternelle post-accouchement Hôpital Général, Vienne, 1841-1850 Mortalité maternelle (%) 18 Lavage des mains 16 14 12 10 8 6 4 2 0 1841 1842 1843 1844 1845 Médecins 1946 1847 Sage-femmes 1848 1849 1850 « Il a indiqué du premier coup les moyens prophylactiques que l’on doit prendre contre l’infection avec une telle précision que l’antisepsie moderne n’a rien eu à ajouter aux règles qu’il avait prescrites ». In : Louis-Ferdinand DESTOUCHES La vie et l’œuvre de Philippe Ignace SEMMELWEIS. Thèse pour le doctorat d’état en médecine, Paris, 1924. L’ère pastorienne « Ce qui cause l'épidémie, ce n'est rien de tout cela ; c'est le médecin et son personnel qui transportent le microbe d'une femme malade à une femme saine » Louis PASTEUR Académie de Médecine - Mars 1879 (Causes de la fièvre puerpérale) L’hygiène des mains confortée « …si j’avais l’honneur d’être chirurgien, pénétré comme je le suis des dangers auxquels exposent les germes des microbes répandus à la surface de tous les objets, particulièrement dans les hôpitaux, non seulement je ne me servirais que d’instruments d’une propreté parfaite, mais après avoir nettoyer mes mains avec le plus grand soin, et les avoir soumises à un flambage rapide,… » Discours à l’Académie de Médecine – 1878 Florence NIGHTINGALE Au cours de la guerre de Crimée, son action sur l’organisation des soins, la gestion des équipements et de l’environnement est déterminante sur la baisse rapide du taux de mortalité des soldats blessés regroupés dans une caserne militaire. La résistance bactérienne • Découverte de la pénicilline - FLEMING – 1928 avec la recommandations de l’utiliser correctement • 1er cas de résistance du staphylocoque doré (SA) à la pénicilline en 1942 • Puis la pandémie à SARP de 1960 • Et suivront le SARM et d’autres germes à d’autres antibiotiques L’hygiène hospitalière avant la fin des années 80 • Aucune approche officielle ou nationale • Pas de soutien réel des autorités de santé – Résolution n°72/31 du Conseil de l’Europe en septembre 1972 demandant à chaque état membre d’établir un comité de lutte contre les infections non appliquée • Sauf pour quelques hôpitaux, problème considéré comme non prioritaire – Comité de lutte contre l’infection - CLI L’hygiène hospitalière avant la fin des années 80 Des professionnels motivés créent en 1982 • Société française d’hygiène hospitalière – SFHH • Société des infirmiers et infirmières en hygiène hospitalière de France - SIIHHF La LIN à partir de 1988 • Décret de 1988 du Ministère de la santé – « Définition de l’infection nosocomiale » – « Obligation pour tous les établissements publics d’avoir un CLIN »…étendue aux établissements privés en 1999 » …mais 3 ans après on parle de CLIN « papier » ! Des expériences locales limitées de coopération en hygiène hospitalière • Concept « d'équipe de secteur » en 1992 – Dispositif original en Rhône-Alpes – Pour un secteur sanitaire et non un établissement en particulier • Création de l’EIDLIN Notion d’équipe inter-établissement dans la circulaire de 1995 Coopération inter-établissement dans le programme PIN de 2009-2013 Missions de l’EIDLIN • Faciliter la mise en place du programme de LIN • Définir et mettre en place une politique de surveillance • Assister le CLIN-EOH dans la réalisation et l’évaluation du programme d’actions • Coordonner et contrôler la qualité des formations Des raisons majeures pour aller de l’avant • Coût généré par l’affaire du sang contaminé • Confrontation avec la résistance bactérienne aux antibiotiques • Consensus émergeant autour de l’importance de la surveillance et de la prévention Les bases solides de la LIN - 1990-2000 • Structures – National : CTIN • CTINILS • CSSS du HCSP – Inter-régional : CCLIN • ARLIN – Local : CLIN / EOH • Programme national LIN • Textes réglementaires et recommandations nationales 1er programme national 1995 – 2000 (étendu à 2004) • 2 objectifs majeurs – Réduire de 30% les IN et les SARM – Renforcer ou mettre en place les EOH • 4 actions principales – Diffuser les recommandations nationales – Former l’EOH – Mettre en œuvre la surveillance • Une enquête nationale de prévalence tous les 5 ans • Réseaux spécifiques de surveillance en incidence – Améliorer l’information délivrée au patient EOHH – Circulaire de 1995 • Structure – Service ou Département ou UF rattachée à autre service – Personnel mis à disposition du CLIN dans les établissements de petite taille (< 400 lits) – Equipe inter-établissement • Composition – Tous les ES de 400 lits ou plus • Au moins 1 IDE hygiéniste à TP – Tous les ES de plus de 800 lits • Au moins 1 PH à TP EOHH – Circulaire de 1995 • Rôle – Assiste le CLIN dans ses missions • Missions – Mise en œuvre de la politique de prévention du RI – Elaboration de protocoles de soins et évaluation de leur application – Investigation d'épidémies – Surveillance des infections nosocomiales …pas encore d’autonomie… Manuel d’accréditation ANAES – 1999 L’EOHH-PIN – Circulaire de 2000 • Rôle et missions – Expert dans la gestion du RI – Mettre en œuvre et évaluer le programme CLIN = structure de pilotage • Composition – 1 PH pour 800 lits et 1 IDE « en position hiérarchique » pour 400 lits (objectif à atteindre en 3 ans) – Secrétariat, autres professionnels – Compétences nécessaires Nouveaux challenges • Sur le plan national – Mise en place du signalement des IN – Développement des indicateurs IN • Pour l’EOHH-PIN – Evolution des missions autour du contrôle et de l’évaluation – Questionnement sur sa place dans la prévention des IN Triple questionnement • Scientifique – Edicter des mesures basées sur la preuve servant de référentiels pour évaluer leur application • Expertise – Acquérir une formation scientifique en HH et un diplôme d’habilitation nationale • Légitimité – Contrôler les pratiques professionnelles versus conseiller les professionnels pour une amélioration de la sécurité et qualité des soins (ASQS) De bons résultats • Diminution des IN – Confirmée par les 2 ENP de 1996 et 2001 • Diminution significative des AES – Divisés par 4 en 10 ans • Stabilité du % de SARM – Autour de 30 à 35% • Mise en place des EOH dans 70% des ES • Diffusion de près de 340 textes réglementaires et 145 guides et recommandations dont ceux de la Société française d’hygiène hospitalière Les challenges du 21ème siècle • • • • • Information des usagers Signalement des IN Produits hydro-alcooliques (PHA) Infection associée aux soins (IAS) Tableau de bord des IN Contexte • Affaire de la Clinique du Sport - 1993-1996 – Épidémie de spondylodiscites (M. xenopi) en rapport avec un dysfonctionnement dans les procédures de désinfection (58 cas) – Conséquences majeures • Médiatisation • Loi de mars 2002 (loi « Kouchner ») • Création d’une association de victimes « LE LIEN » (s’ajoutant aux associations d’usagers / consommateurs) • Autres affaires ou « scandales sanitaires » – Sang contaminé – Hormone de croissance – « Vache folle » Signalement • Signalement = alerte = évènements « sentinelles » potentiellement révélateurs d’un dysfonctionnement ou risque de transmission à des tiers, d’apparition ou de diffusion de cas semblables nécessitant une investigation et/ou des mesures à prendre apport d ’aide extérieure éventuelle Signaler quand on doit réagir, changer ou améliorer les pratiques Entre le 25 octobre et le 13 décembre 2004… Enterobacter sakazakii sévit Chez des nouveau-nés prématurés ou hypotrophes Concerne 5 établissements (A, B, C, D et E) Infection certaine 2 cas de méningites †† Oct 2004 Infection probable 1 cas de conjonctivite 1 cas de colite hémorragique Colonisation 5 cas de colonisation digestive ALERTE NATIONALE : investigation InVS + DGS/DHOS + C.CLINs TOUS ont consommé du lait Pregestimil® (laboratoire Mead Johnson Nutritionals) 2 retraits des lots de Pregestimil® , dont 1 au niveau international Etude des pratiques professionnelles dans les biberonneries Diffusion d’indicateurs au public Décision du Ministre de la santé • « … nous avons besoin de disposer d’outils de surveillance des IN…dont la survenue renseigne le mieux sur la qualité des soins et la prévention… » • « …permettre des comparaisons au sein d’un même établissement et…se situer par rapport aux autres… » • « …les données devront prendre place dans un tableau de bord avec d’autres indicateurs… » Saisine de l’InVS par le Ministre de la santé en date du 21 mars 2003 Liste des indicateurs • Tableau de bord des indicateurs « IN » • Indicateurs de qualité Accès sur le site www.scopesante.fr ET Obligation de leur affichage dans les ES PHA • Efficacité de la friction avec un PHA Lavage simple Empreintes de mains après Lavage antiseptique Photos de l’institut d’hygiène de Strasbourg Friction 2ème programme national 2005-2008 Cinq orientations majeures • Adapter les structures et faire évoluer le dispositif de LIN • Améliorer l’organisation des soins et des pratiques des professionnels • Optimiser le recueil et l’utilisation des données de surveillance et du signalement • Mieux informer les patients et communiquer sur les risques infectieux liés aux soins • Promouvoir la recherche sur les mécanismes, l’impact, la prévention et la perception des IN Nouvelles définitions de l’IN en 2007 • Abandon de la distinction stricte entre nosocomial et communautaire • Concept d’infection associée aux soins (IAS) – L’IAS comprend l’IN au sens de contractée dans un ES – Critère principal = délivrance d’un acte ou d’une prise en charge de soins par un professionnel de santé (ou le patient ou son entourage encadrés par un professionnel de santé) – Concernés = patients, malades ou non, professionnels de santé et visiteurs Quelques exemples de résultats • Programme d’actions annuel élaboré par 96% des établissements de santé (ES) • Responsable du signalement désigné dans 94 % des ES • Présence des usagers dans le CLIN • 1 million d’heures de formation dispensées et 2 campagnes nationales « hygiène des mains » • Publication des indicateurs du tableau de bord • Projets de recherche nationaux y compris des sociétés savantes • ENP 2006 la plus importante jamais menée dans le monde – 2 337 ES (95 % des lits d’hospitalisation) et 358 467 patients Bilan du programme 2005-2008 • Globalement positif avec une baisse des IN – 12% des patients infectés (IN acquises) – 40% des patients infectés par un SARM • Mais encore des progrès à faire… – – – – Consommation de PHA Surveillance des ISO Bon usage des ATB … Et sur le terrain • De la simple morosité à la plus grande inquiétude – Mise en place de la loi HPST • Réorganisation du fonctionnement des ES et de leur mode de financement (T2A) • Intégration de la LIN dans une gestion globale de la sécurité des soins – Manque de communication sur les résultats obtenus dans le domaine de la LIN – Extension des missions des EOH (au-delà du RI) et la formation des futurs professionnels 3ème programme national 2009-2013 • Plan national stratégique de prévention des IAS – 3 programmes sectoriels : établissements de santé, établissements médico-sociaux, soins de ville – 2 plans : BMR et ATB • Programme de prévention des infections nosocomiales – Correspond au secteur établissements de santé Et sur le terrain • Appui supplémentaire pour l’EOH – Objectifs du programme • … • Renforcer la structuration de la prévention des IN – Révision des standards EOH (ratio) et missions – Coopération inter-établissements – Résultats attendus pour 2013 • 100% des ES en conformité avec les spécifications de l’encadrement en personnel des équipes opérationnelles d’hygiène (EOH) Décret du 12/11/2010 relatif à la lutte contre les évènements IAS dans les ES • Définition de l’évènement indésirable (EI) • Objectifs et organisation de la GRAS • Volet relatif aux IN (IAS contractées dans un établissement de santé) – Programme et EOH (caractère obligatoire de sa constitution avec la double valence médecin ou pharmacien ET infirmier) – Rôle d’expertise en matière de prévention du RI nosocomial – Nécessité d’une formation adaptée à l’exercice de ses missions – Accès aux données et aux informations (plaintes et réclamations) – Disparition du CLIN « mode 1988 », mais liberté d’organisation Et sur le terrain • L’implication dans les gestion des risques – Un nouveau challenge à relever ! – Des atouts indiscutables ! • Antériorité, expertise, travail quotidien – Un engagement sans renoncer à la spécificité du RI – Se motiver et motiver les professionnels pour continuer et progresser – Maintenir, voire augmenter les ressources pour y arriver En guise de soutien, la fusion des 2 sociétés en 2012 30 ans d’existence Aujourd’hui… « EIDLIN » en 2015 • Service d’hygiène et d’épidémiologie • Pôle santé publique et médicotechnique • Structurée en 3 unités fonctionnelles – EOH du CHV – Equipe inter-établissements (15 établissements sanitaires publics et privés) – Equipe EHPAD (43 établissements médico-sociaux) • Personnel – – – – 3 praticiens hygiénistes 7 infirmières hygiénistes 1 bio-technicienne hygiéniste 2 secrétaires Hier, aujourd’hui et demain Hier, aujourd’hui et demain Hier, aujourd’hui et demain Diapositive empruntée au Dr B Coignard - InVS Hier, aujourd’hui et demain Hier, aujourd’hui et demain Encore de quoi faire ! • Simplifier les organisations, les circuits, les messages • Renforcer l’action des acteurs de terrain • Mettre le patient au centre de la Gestion de la qualité et de la sécurité des soins – De manière adaptée à la taille des ES – Avec des moyens adéquats – En assurant des conditions et une ambiance de travail optimales • Mutualiser les moyens