10 13 18 22 Vision d’avenir Le mystérieux monde des ententes particulières pour omnipraticiens L’affaire Paul-Aimé Joncas Rencontre avec le Dr Robert Ouellet CRITIQUE ET ANALYSE diminuer d’autant la marge de manoeuvre du gouvernement pour les dépenses de programmes dans les prochaines années. Il existe au moins deux alternatives: au lieu d’utiliser la réserve budgétaire de 2,3 G$ pour financer son plan sur le ralentissement économique, le gouvernement pourrait décider d’appliquer cette réserve au déficit accumulé de 5,8 G$, le diminuant à 3,5 G$. Cette mesure aurait probablement un impact économique plus favorable que de financer des mesures ponctuelles par un surendettement. VISION D’AVENIR PAR FRANÇOIS-PIERRE GLADU, MD [email protected] DERNIER EN INVESTISSEMENT EN SANTÉ Gonflée par l’accumulation de déficits budgétaires pendant 30 ans, la dette provinciale du Québec est devenue la plus élevée per capita au pays. La loi sur le déficit zéro de 1998, si douloureuse fut-elle, avait pour but de rétablir l’équilibre budgétaire: bref, on arrêtait d’emprunter sur le dos de nos enfants pour payer notre épicerie. L’importance de la dette provinciale dans le PIB commencerait donc à diminuer d’elle-même au fur et à mesure que notre économie grandissait. Cette perspective permettait aux nouvelles générations d’entrevoir l’avenir avec optimisme. Même si la dette n’augmentait pas, elle demeurait la plus importante des 10 provinces canadiennes: le paiement de 7 G$ par année en intérêts sur la dette grugeait année après année 13 % du budget provincial, limitant d’autant notre capacité à financer les dépenses de programme (sécurité sociale, santé, éducation, transport). C’est l’équivalent de 35 % du budget de la santé! Ce qui explique en grande partie pourquoi le Québec est la province qui investit le moins dans son réseau public de la santé1. C’est pourquoi l’Association des jeunes médecins du Québec (AJMQ) et Force jeunesse ont proposé en 2005 la mise sur pied d’un Fonds des Générations destiné au remboursement de la dette provinciale. Nous proposions d’y verser 1,7 G$ par année2 afin de réduire de moitié le ratio d’endettement net3 du Québec d’ici 10 ans. Le Fonds a été créé par le gouvernement mais ne reçoit à ce jour que 500 M$ par an, versés à même les profits d’Hydro-Québec, soit 30 % seulement de ce qui était proposé. Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. 10 Santé inc. janvier / février 2009 Aussi, le Québec pourrait choisir de réinvestir le champ fiscal libéré par la diminution de 2 points de TPS par le fédéral. Cette mesure, des plus impopulaires en période électorale, demeure pourtant celle qui aurait le plus de bénéfice sur la santé économique du Québec. Près de 2,5 G$ par année seraient orientés vers le rétablissement de l’équilibre budgétaire perdu actuellement. Ce dernier serait vraisemblablement atteint sans coupure dans les services essentiels (comme en 1998) et sans hausse d’impôt sur le travail, néfaste pour la rétention des ressources humaines et pour la productivité du Québec, dont dépend notre richesse collective. Or, le Vérificateur général du Québec nous a appris avant les dernières élections qu’il y a un déficit de 5,8 G$ accumulé au cours des dernières années par le gouvernement. La proposition du gouvernement de repousser ce déficit accumulé vers la dette provinciale viderait de tout son sens le Fonds des Générations. Elle aurait aussi de graves répercussions sur l’équité fiscale intergénérationnelle et sur la capacité du gouvernement à financer adéquatement les dépenses de programmes à l’avenir. La révélation d’un nouveau déficit accumulé ramène d’abord sur le tapis la vision morose de l’avenir qui avait cours il y a 10 ans. Pire, l’étude des documents économiques du Québec révèle qu’après la loi sur l’équilibre budgétaire de 1998, la dette a augmenté de 10 G$ sur 5 ans sous le PQ et de 14 G$ sur 5 ans sous le PLQ4. Du 24 G$ d’augmentation de dette, 18 G$ sont attribuables aux nouveaux déficits accumulés. La dette et sa récente augmentation sont aux trois quarts des déficits accumulés, donc ne reposant sur aucun actif physique ou financier. À des fins politiques, on a donc anéanti les efforts économiques, fiscaux, et surtout les sacrifices en santé (mises à la retraite, listes d’attente…) que tout le peuple du Québec a consentis à la fin des années 1990. Ce recul historique fait et fera mal. En effet, la population active commencera à décliner dès 2011, avec le début des retraites des baby-boomers. Dès lors, il y aura de moins en moins de citoyens qui se partageront le financement des missions de l’État, dont le paiement de la dette. L’impôt des particuliers au Québec Bref, vaut mieux être taxé un peu plus maintenant que bien davantage plus tard alors que le bassin de contribuables sera plus restreint. Et soyons honnêtes: personne n’a ressenti la baisse de TPS. De même, la hausse de la TVQ n’aura aucun impact néfaste sur la croissance économique si son produit sert à éviter le surendettement de l’État et la hausse subséquente des impôts. est déjà le plus élevé au Canada, et il devra obligatoirement augmenter pour compenser le bassin plus réduit de contribuables. L’exode des jeunes, le travail au noir et la stagnation économique ne manqueront pas de suivre l’affaiblissement de la compétitivité du Québec face à ses voisins immédiats. À moyen et long terme, ce cercle vicieux enclenché par le retour aux déficits entraînera l’incapacité du Québec à faire face à ses obligations quant au paiement de la dette provinciale. En d’autres mots, la faillite. Les conséquences d’un relâchement budgétaire vont aussi se faire sentir à court terme. Jusqu’ici, l’augmentation de la dette ne s’est pas traduite par une augmentation du service de la dette en raison de la baisse des taux d’intérêts en période de croissance économique à inflation contrôlée. Or le Canada entre en récession, et les économistes s’entendent pour dire qu’elle sera plus importante au Québec, avec l’augmentation du chômage et de l’inflation qui s’ensuivront. Dans ce contexte, rajouter 5,8 G$ de déficits accumulés sur la dette équivaut à augmenter les intérêts annuels sur celle-ci de 400 à 500 M$. Ces sommes récurrentes équivalent à au moins 2 % du budget de la santé. Ainsi, une telle décision viendrait Le Québec, premier en dette publique, dernier en investissement en santé: l’un ne va pas sans l’autre. On doit craindre pour l’avenir de notre réseau public de la santé si chaque nouvelle campagne électorale n’a pour conséquence que de restreindre toujours davantage la capacité de nos gouvernements à le financer à long terme. Continuerons-nous encore longtemps cette fuite en avant? ⌧ 1 À 28 % des dépenses provinciales totales (selon le système de gestion financière du Canada), le Québec est 10e sur 10 provinces, loin derrière ce que le ROC investit en santé (36 %). 2 La coalition demandait également au gouvernement de renoncer aux baisses d’impôt afin de financer le remboursement de la dette. 3 Soit la dette publique nette sur le produit intérieur brut (PIB). 4 Budget du Québec 2008-2009; Tableau 4.1 du livre de l’économiste Louis Gill, en ligne : http://cla siques.uqac.ca/contemporains/gill_louis/rembourser_dette_pub lique/gill_remboursement_dette_pire.doc janvier / février 2009 Santé inc. 11