Gastrostomie percutanée endoscopique

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Fiche
technique
N° 22
La gastrostomie percutanée endoscopique
La gastrostomie percutanée endoscopique
V. Abitbol, service d’hépato-gastroentérologie, hôpital Cochin, Paris.
La gastrostomie est une technique d’assistance nutritionnelle, qui n’est plus obligatoirement un
geste chirurgical depuis la description en 1980, par Gauderer et Ponsky d’une technique de gastrostomie percutanée endoscopique (GPE) (1, 2). La GPE est actuellement considérée comme la
méthode de choix pour la nutrition entérale à long terme des malades présentant des troubles de
la déglutition avec fausses routes. Elle est aussi utilisée en gériatrie chez le vieillard dénutri, parfois seulement de façon temporaire pour passer un cap (3).
Technique
La commercialisation de plusieurs types de matériel de GPE à usage unique a facilité la diffusion
de cette technique. Les kits de GPE comprennent avec des variantes qui leur sont propres tout le
matériel nécessaire à la réalisation de la GPE (photo 1, p. 146).
Figure. Étapes de la mise en place d’une GPE.
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. V - mai-juin 2002
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La gastrostomie percutanée endoscopique
Photo 1. Plateau technique.
Photo 2. Dépression gastrique obtenue
par palpation abdominale.
Photo 3. Anesthésie locale du trajet
pariétal.
Photo 4. Insertion du trocart.
Photo 5. Passage du fil guide.
Photo 6. Passage transpariétal de la
sonde par traction sur le fil.
Photo 7. Collerette externe maintenant la sonde.
Cette technique est réalisée au mieux par deux opérateurs : un endoscopiste s’occupe de la partie
intragastrique et un aide s’occupe de la partie cutanée (figure). L’aide peut être un autre
médecin, un anesthésiste ou une infirmière d’endoscopie. L’endoscopie progresse jusqu’au genu
inferius, puis au retrait de l’appareil, on se place dans l’estomac. L’insufflation de la cavité gastrique permet son accolement à la paroi abdominale. Après avoir obscurci la salle d’intervention,
l’extrémité éclairée de l’endoscope est localisée et repérée par une marque sur la peau. La
bonne position du point de ponction est toujours vérifiée grâce à la dépression gastrique réalisée
par la palpation pariétale (photo 2). Une désinfection locale à la Bétadine® après rasage et
une anesthésie locale du trajet pariétal sont effectuées (photo 3). La peau est incisée sur environ
5 mm permettant le passage de la sonde de gastrostomie. Par cette incision, le trocart est introduit
dans l’estomac (photo 4). La pénétration dans la cavité gastrique est suivie par l’endoscopiste.
Le mandrin est retiré et un fil guide est passé à travers le cathéter laissé en place (photo 5).
L’opérateur attrape alors le fil guide par une pince passée par l’endoscope et le fait ressortir par
la bouche en retirant l’endoscope. On se retrouve alors avec un fil reliant l’extrémité buccale à
l’extrémité abdominale. L’extrémité buccale du fil est nouée à la boucle d’amarrage de la sonde
de gastrostomie. Par traction sur l’extrémité abdominale du fil, la sonde est introduite dans la
bouche, puis dans l’œsophage et l’estomac. Une forte traction sur le fil permet de traverser la
paroi gastrique et la paroi abdominale. Le passage est facilité par la forme conique du dispositif
(photo 6). La collerette interne est appliquée sur la paroi gastrique sans tension. Une collerette
externe est installée afin de maintenir la sonde (photo 7). Aucune suture à la peau n’est
conseillée car elle augmente les risques infectieux locaux.
La durée moyenne de l’intervention est de 10 à 20 minutes. Elle est effectuée au mieux avec une
courte anesthésie générale en salle d’endoscopie ou, en fonction du contexte, au bloc opératoire.
Suivi de
l’intervention
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• Il est préférable d’entourer le geste par une antibiothérapie prophylactique (4). À l’hôpital
Cochin, l’antibiothérapie (Augmentin®) est débutée avant la pose de la GPE et est poursuivie
jusqu’au troisième jour.
• Le début de l’alimentation est variable selon les équipes. Pour certaines, elle est autorisée précocement ; pour d’autres, 500 ml d’eau sont administrés au deuxième jour, puis en cas de bonne
tolérance, l’alimentation est débutée au troisième jour de façon progressive jusqu’à l’apport calorique souhaité.
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Fiche
technique
N° 22
La gastrostomie percutanée endoscopique
• Les soins locaux se résument à une désinfection de l’orifice cutané de la gastrostomie par de
la Bétadine®.
• Le tube de gastrostomie peut être ultérieurement remplacé par une sonde de plus gros calibre,
une sonde ou un bouton à ballonnet.
• La sonde de GPE peut être laissée en place plusieurs années sans complication (5). En cas
d’ablation, on peut sectionner la sonde au niveau de l’orifice cutané et extraire la collerette interne
par voie endoscopique. Certaines équipes préconisent une simple traction pour retirer des sondes
ayant une collerette souple.
• Au retrait du tube de gastrostomie, l’orifice se referme spontanément le plus souvent en moins
de 48 heures.
Indications
Les indications de la GPE sont celles d’une alimentation entérale amenée à se prolonger dans le
temps et, particulièrement, en cas de troubles de la déglutition et de fausses routes (6). Il s’agit
le plus souvent de patients neurologiques (accident vasculaire cérébral, maladies dégénératives
du système nerveux central, etc.) avec une sonde naso-gastrique mal supportée, et de sujets
atteints de cancer ORL à différents stades de traitement et d’évolution. En gériatrie, la GPE est
parfois indiquée dans les dénutritions et/ou en cas de refus d’alimentation. Le syndrome de glissement du vieillard est un refus d’alimentation pour une raison mal définie, avec une dénutrition
qui s’installe. La GPE permet parfois de passer un cap avec une reprise secondaire d’un comportement alimentaire normal.
Contreindications
En cas de sténose d’origine ORL empêchant le passage de l’endoscope, des dilatations préalables peuvent précéder la pose de GPE.
Les contre-indications sont peu nombreuses et doivent être respectées afin d’éviter des complications graves. La pose de GPE est contre-indiquée en cas de troubles de la coagulation.
L’impossibilité de transilluminer correctement la paroi abdominale en endoscopie est une contreindication formelle. Elle peut être liée à une obésité, à une ascite, à une interposition d’anse
digestive ou du foie gauche en avant de l’estomac. Les modifications inflammatoires ou néoplasiques de la paroi gastrique antérieure contre-indiquent la GPE.
La chirurgie abdominale antérieure n’est qu’une contre-indication relative. La GPE peut être
posée si la transillumination est possible. Une grande prudence s’impose en cas de cirrhose
hépatique et de varices œsophagiennes et/ou d’une gastropathie d’hypertension portale, parfois
associées à des troubles de la coagulation avec un risque hémorragique.
Résultats
La mise en place de la sonde est possible dans plus de 95 % des cas (7). Les taux de mortalité
liés à la GPE sont très faibles (0 à 1 % des cas selon les études). Les complications ont une
fréquence de 3 à 35 % dans les plus grandes séries publiées (7-10).
Les complications mineures peuvent comporter :
• des infections cutanées bénignes autour de l’extrémité abdominale de la sonde pouvant être
prévenues par une antibiothérapie prophylactique et pouvant être traitées par des antiseptiques
locaux et/ou une antibiothérapie (4) ;
• un pneumopéritoine, le plus souvent radiologique et régressif sans douleurs ni fièvre, ni hyperleucocytose ;
• ou un iléus réflexe spontanément régressif au décours de la pose.
Les complications majeures n’excèdent pas 1,6 % des cas. Elles peuvent comporter :
• une fistule gastro-colique, surtout si le patient a des antécédents de chirurgie abdominale avec
des risques d’adhérences intrapéritonéales ;
• une hémorragie gastrique surtout en cas de troubles de la coagulation ;
• une péritonite par perforation intestinale ou colique, exceptionnellement une infection pariétale
grave à type de fasciite nécrosante.
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Conclusion
La gastrostomie percutanée endoscopique (GPE) est une technique d’assistance nutritionnelle de
mise en place facile et rapide, au prix d’une faible morbidité lorsque les contre-indications sont
respectées. La GPE est peu onéreuse et bien tolérée, même à long terme ; elle permet d’assurer
l’apport calorique nécessaire avec un confort de vie quasi normal chez les patients.
■
Références bibliographiques
1. Gauderer MWL, Ponsky JL, Izant RJ. Gastrostomy without laparotomy : a percutaneous endoscopic technique.
J Pediatr Surg 1980 ; 15 : 872-5.
2. Ponsky JL, Gauderer MWL. Percutaneous endoscopic gastrostomy : a nonoperative technique for feeding gastrostomy.
Gastrointest Endosc 1981 ; 27 : 9-11.
3. Abitbol V, Selinger-Leneman H, Gallais Y et al. Résultats de la gastrostomie per endoscopique (GPE) chez le
sujet âgé : étude prospective dans un hôpital gériatrique. Gastroenterol Clin Biol 2002 (sous presse).
4. Jain NK, Larson DE, Schroeder KW et al. Antibiotic prophylaxis for percutaneous endoscopic gastrostomy : a
prospective randomized controlled clinical trial. Ann Intern Med 1987 ; 107 : 824-8.
5. Hull MA, Rawlings J, Murray FE et al. Audit of outcome of long term enteral nutrition by percutaneous endoscopic gastrostomy. Lancet 1993 ; 341 : 869-72.
6. American Society for Gastroentestinal Endoscopy. Rôle of PEG/PEJ in enteral feeding. Gastrointest Endosc
1998 ; 48 : 699-701.
7. Larson DE, Burton DD, Schroeder KW et al. Percutaneous endoscopic gastrostomy. Gastroenterology 1987 ;
93 : 48-52.
8. Ponsky JL, Gauderer MWL, Stellato TA et al. Percutaneous approaches to enteral alimentation. Am J Surg 1985 ;
149 : 102-5.
9. Foutch PG, Haynes WC, Bellapravalu S et al. Percutaneous endoscopic gastrostomy (PEG). A new procedure
comes of age. J Clin Gastroenterol 1986 ; 8 : 10-5.
10. Beau P, Kull E, Kaffy F et al. La dénutrition est un facteur de risque indépendant de complications précoces
après pose d’une gastrostomie percutanée endoscopique. Gastroenterol Clin Biol 2001 ; 25 : 891-5.
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