eTUDE DU CAS N°2 - GASTROSTOMIE

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ETUDE DU CAS N° 2 : GASTROSTOMIE
1- Analyse de la situation de la patiente :
-
Maladie fonctionnelle grave (myopathie)
Dépendance totale sur le plan des actes essentiels de la vie quotidienne
Pronostic vital pessimiste : 18 mois si l’on demeure dans le statu-quo voire le décès par
étouffement (dysphagie)
Forte personnalité de la patiente qui souhaite rester maîtresse de son destin et des actes
médicaux qui la concernent. Refus de toute alimentation par voie directe.
2- Proposition thérapeutique des médecins consultés : alimentation directe par sonde gastrique
(gastrostomie)
Il existe cependant une solution alternative qui est l’alimentation par sonde naso-gastrique.
2- Approche éthique :
- Trois possibilités s’offrent à nous : le statut quo avec tous ses risques, la gastrostomie ou la sonde nasogastrique.
- Principe :
La thérapeutique médicale est fondée sur une relation personnelle entre une confiance et une conscience.
Face au malade, le praticien doit faire preuve non seulement de compétence mais aussi de sympathie car
il ne s ‘agit pas d’appliquer simplement des protocoles, mais de soigner une personne après avoir recueilli
son consentement informé (cf. CPS 1995 §72). 40- Toute intervention sur le corps humain « n'atteint pas seulement
les tissus, les organes et leurs fonctions, mais implique aussi à différents niveaux la personne elle-même ».
L'activité sanitaire ne doit jamais perdre de vue « l'unité profonde de l'être humain, dans l'interaction évidente de toutes ses
fonctions corporelles, mais aussi dans l'unité de ses dimensions corporelle, affective, intellectuelle et spirituelle ». On ne
peut isoler « le problème technique, posé par le traitement d'une maladie déterminée, de l'attention qui doit être accordée à la
personne du malade en toutes ses dimensions. (Charte des personnels de santé du Conseil Pontifical pour la Pastorale de la
Santé –1995)
- Fondement de la licéité des actes médicaux :
Cependant les possibilités techniques, ni les désirs du patient ne peuvent fonder une éthique :41- On ne peut
faire abstraction du corps et ériger la psyché comme critère et source de moralité : la sensibilité et le désir subjectifs ne peuvent
dominer et négliger les déterminations objectives corporelles. La tendance à faire prévaloir les secondes sur les premières est à
l'origine de l'empire actuel de la psychologie sur l'éthique et le droit, qui déduit, à partir des désirs individuels (et des possibilités
techniques), la licéité des comportements et des interventions sur la vie. Le professionnel de la santé ne peut faire abstraction de la
vérité corporelle de la personne et se prêter à satisfaire des désirs, exprimés de manière subjective, ou codifiés légalement et qui
soient contraires à la vérité objective de la vie)
42-Chaque intervention abusive sur le corps est une offense à la dignité de la personne et donc à Dieu qui en est le Seigneur
absolu et unique : « L'homme n'est pas maître de sa propre vie, il la reçoit en usufruit ; il n'en est pas le propriétaire, mais
l'administrateur, car Dieu seul est Seigneur de la vie ». (CPS-1995)
Le patient a un devoir comme un droit à se faire soigner. Il n’est donc pas licite de refuser tout soin et tout
traitement face à la maladie.
- Proportionnalité des soins et du traitement :
Le traitement comme les soins doivent être proportionnés : 64. - Le professionnel de la santé qui se trouve dans
l'impossibilité de guérir ne doit jamais renoncer à soigner. Il est tenu de pratiquer tous les traitements « proportionnés ». Il n'est pas
obligé, au contraire, de recourir aux traitements « disproportionnés ».
Par rapport à la condition d'un malade, il faut retenir comme ordinaires, les traitements où existe un rapport de juste
proportion entre les moyens employés et la fin poursuivie. Là, où on ne tient pas compte de cette « proportion », les
traitements sont considérés comme extraordinaires. (CPS- 1995)
Il est cependant licite de refuser un traitement disproportionné tant au regard des coûts qu’à celui des
risques encourus.
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- Distinction entre soins et traitement :
Dans notre cas, une question peut se poser : l’alimentation artificielle relève-t-elle de la catégorie du
traitement ou des soins ? Car les soins sont toujours dus, alors que le traitement peut être interrompu s’il
devient disproportionné (inefficacité, mort imminente, etc.)120- L'alimentation et l'hydratation, même artificielles,
rentrent dans les cures normales toujours dues au malade quand elles ne sont pas dangereuses pour lui : leur suspension indue
pourrait revêtir la signification d'une véritable euthanasie. (CPS 1995).
En d’autres termes, pour l’Eglise, si le malade doit mourir, ce ne doit pas être à cause d’un défaut
d’hydratation ou d’alimentation, mais du fait de la maladie. Le cardinal William Levada s’est encore
prononcé sans ambiguïté sur cette question le 1er août 2007 suite à l’affaire Piergiorgo Welby à Rome.
- Nous conclurons ce paragraphe sur les principes par ce texte de Philippe Ardouin (Observatiore social
du diocèse de Toulon) :
L’alimentation artificielle est un soin toujours dû
De nombreux bioéthiciens, n’en déplaise à la mission sur la fin de vie, contestent le fait de ranger
l’alimentation artificielle parmi les traitements. Si la procédure relève en effet initialement de la
technique médicale, son but est de répondre à un besoin élémentaire de nourriture qui permet en
définitive la dispensation d’un soin de base. Une fois la sonde posée, l’alimentation devient de l’ordre de
la gestuelle des soins. Plusieurs auteurs classent l’alimentation assistée dans une niche spécifique pour
signifier qu’elle représente un acte technique sans pour autant être réductible à un traitement
thérapeutique classique. Ils suggèrent de la renommer nutrition médicale afin d’insister
sur son caractère ordinaire pour la conservation de la vie.
En effet, l’alimentation assistée ne cherche pas tant à contrecarrer une pathologie organique touchant
cette fonction qu’à pallier un problème simplement mécanique en répondant à un besoin de base de
l’organisme. Le recours à ce geste permet de contourner un défaut de déglutition – patent dans la
situation d’une personne en état végétatif – sans que cela n’équivaille à une incapacité d’assimiler les
nutriments. En aucun cas, on ne peut parler d’obstination déraisonnable ou de traitement
disproportionné au sens de la loi Leonetti puisque justement l’alimentation médicale peut être poursuivie
longtemps sans effet secondaire majeur et avec une grande efficacité pour soutenir la vie du patient dans
le coma : c’est exactement la définition d’un soin proportionné !(Lettre de bioéthique de Philippe
Ardouin du 25/05/2008)
3- Décision :
- Informer la patiente et sa famille sur les risques encourus si l’on demeure dans le statu quo.
- La gastrostomie ou la sonde naso-gastrique ne sont pas particulièrement douloureuses.
L’avantage de la gastrostomie est son caractère discret alors que la sonde naso-gastrique est moins
invasive.
- Face au pronostic vital, des soins appropriés s’imposent. Or, l’alimentation artificielle, relevant
de la catégorie des soins, s’impose naturellement. La patiente comme la famille n’auront le choix
qu’entre les deux possibilités médicales : la gastrostomie ou la sonde naso-gastrique. Tout refus de
soin pourrait alors relever de la catégorie morale de non assistance à personne en danger.
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