MALADIE THROMBOEMBOLIQUE ET LES SOINS INFIRMIERS INTRODUCTION LA MTE présente un risque immédiat potentiellement vital l'EP, alors qu'à distance de l'épisode aigu le risque est lié au développement d'une maladie postthrombotique et plus rarement à l'évolution vers une pathologie pulmonaire chronique. • La notion d’urgence doit rester présente 1 PHYSIOPATHOLOGIE DEFINITION Très fréquentes, les thromboses veineuses des membres inférieurs correspondent à la formation d’un caillot fibrino-cruorique gênant la circulation de retours veineux. Localement, le caillot s’accompagne d’une réaction inflammatoire responsable de la douleurs et des signes généraux. 2 En amont Il provoque une gêne à l’écoulement sanguin responsables d‘ une stase sanguine et d’un œdème tissulaire. En aval • La circulation de retour est diminuée, ce qui favorise l’extension de le thrombose. 3 Épidémiologie On estime à 600 000 le nombre de cas annuels de MTE aux Etats-Unis, dont 30% entraînent un décès, et 250 000 TVP. En France l'incidence annuelle de la MTE est de l'ordre de 50 à 100 000 cas responsables de 5 à 10 000 décès. Épidémiologie 2 EP = cause décès 5000 patients/an Mortalité intra hospitalière: 12% 75%-90% des décès surviennent lors d’un épisode inaugural. EP n’est pas suspectée dans 70-80% des cas diagnostiqués a l autopsie. 4 Épidémiologie 3 On constate une augmentation régulière de l'incidence de la MTE notamment en milieu médical. Cette augmentation est liée à la proportion de plus en plus importante de sujets âgés dans les services de Médecine. Épidémiologie 4 La MTE est une pathologie d'accompagnement c'est-à-dire qu'elle vient le plus souvent compliquer l'évolution d'une autre pathologie ou un geste chirurgical. De ce fait, il s'agit très fréquemment d'une pathologie acquise en milieu hospitalier. La mortalité d'une MTE non traitée est de l'ordre de 30% des cas. 5 Rappel anatomique • Le système veineux des membres inférieurs se compose de deux parties : Un système profond Voisin du trajet artériel et des os et entouré de muscle, avec de bas en haut : les veines surales puis poplité, les veines fémorales, les veines iliaques se jetant dans la veine cave. 6 Un système superficiel, sous cutanée Relié au système profond par des perforantes et se jetant dans le système profond au niveau du pli de l’aine par la veine saphène. L’élargissement de ce réseau forme les varices. • La veine cave se jette dans l’oreillette droite, qui se poursuit par le ventricule droit puis par l’artère pulmonaire qui se divise en plusieurs branches dans les deux poumons. • La veine est composé de tissu élastique (pas de propriété contractile). Le retour veineux est totalement passif . Il se fait dans un seul sens grâce à de nombreuses valvules. La circulation veineuse est grandement aidé par la pompe musculaire : la contraction musculaire comprime et chasse ainsi le sang des veines profondes. 7 Schéma pompe musculaire Rappel physiologique • Le sang est composé de globules rouges, de globules blancs et de plaquettes. Il a tendance naturellement à se coaguler. La coagulation est un phénomène complexe nécessitent : • des plaquettes • de la fibrine, molécule protidique dont la polymérisation permet l’enchevêtrement des composés sanguins. 8 • Cette fibrine est formée après une cascade de réaction chimique faisant intervenir différents facteurs protidiques (les facteurs de la coagulation : II, X, XII, VIII...) produits par le foie. Cette cascade peut être favorisée ou au contraire inhibée par un certains nombres d’enzyme (AT III, protéine C, S). Les anticoagulants peuvent soit diminuer la production d’un certain nombre des ces facteurs (antivitamines K, cette vitamine étant nécessaire pour la production de certains), soit inhibé directement l’une des réactions chimiques de la cascade (héparine et hépariniques). • Le TP-INR (taux de prothrombine) permet de doser indirectement un certain nombre de ces facteurs (en particulier ceux qui sont vitamino K dépendant). Le TCK (temps de céphaline kaolin) ou TCA (temps de céphaline activé) est un autre indice de la coagulation permettant de vérifier l’efficacité des héparines). • Une fois le caillot formé, un certain nombre de réaction enzymatique peut entraîner sa dissolution : c’est la fibrinolyse. Elle peut être favorisée par un certains nombre d’activateurs : les fibrinolytiques. Cette fibrinolyse aboutit à un certains nombres de produits dont les D-Dimères peuvent être dosées dans le sang. 9 Causes • Elle débute par un caillot dans le système veineux des membres inférieurs. La formation de ce caillot est favorisé par : • la stase veineuse, provoqué par une immobilité entraînant la perte de l’effet pompe musculaire. Cette stase est particulièrement prononcée en cas d’alitement prolongée, mais aussi en cas d’immobilisation longue : plâtre ou voyage long. Elle peut être favorisée par un bas débit sur une insuffisance cardiaque. • des anomalies biologiques acquises : modifications hormonales (en particulier oestroprogestatifs surtout si associés au tabac), maladies inflammatoires, cancers... 10 • des anomalies biologiques constitutionnelles (de naissance) : déficit en certains facteurs (AT III, protéines C et S, facteur Leiden (appelé aussi résistance à la protéine C activée)... Cette dernière anomalie étant de loin la plus courante. Ces déficits vont provoquer une maladie thromboembolique récidivante nécessitant un traitement à vie. Elles doivent être systématiquement recherchées en cas d’accidents répétés sans cause habituelle retrouvée. A noter que la prescription d’anticoagulants va perturber le dosage de ces éléments qui ne peut donc être fait qu’avant tout traitement ou à l’arrêt de ce dernier. FACTEURS PREDISPOSANTS • Alitement prolongé. • Accouchement, Prise de contraceptifs oraux. • Chirurgie abdomino-pelvienne et chirurgie orthopédie (la présence de plâtre rend de diagnostic particulièrement difficile ) • • • • • • l age L insuffisance cardiaque L’insuffisance veineuse Polyglobulie (ANOMALIE PRODUCTION DES GLOBULES ROUGES) Les cancers profonds Certains anomalies héréditaires de l’hémostase peuvent favoriser la formation de thrombose veineuse 11 LES PHLEBITES Diagnostic Phlébite superficielle Veine rouge, indurée et souvent visible Douleur Sensibilité au toucher Parfois enflure 12 Phlébite profonde Sensation de chaleur Douleur sourde au mollet ou à la cuisse Fébricule Enflure plus étendue Rougeurs Examen complémentaire D-dimères, hémostases Doppler veineux Phlébographie Cavographie 13 L’embolie pulmonaire : Diagnostic Le tableau clinique comporte une dyspnée une douleur latéro thoracique parfois une hémoptysie une polypnée une tachycardie 14 ECG normal Radio pulmonaire sensiblement normale Fièvre au long cours Douleurs atypiques Malaise ou syncope État de choc Peut être totalement asymptomatique Biologie • Identique à celle de la phlébite (D-Dimères, hémostase, recherche d’une anomalie constitutionnelle si besoin) • La gazométrie artérielle montre une hypoxie et une hypocapnie. Si ces paramètres sont très perturbés, cela est en faveur d’une embolie pulmonaire importante. 15 Imagerie • Elle a deux buts : Faire le diagnostic positif : visualiser le thrombus Faire le diagnostic de gravité : nombre et type d’artères pulmonaires atteintes. La scintigraphie pulmonaire : • De perfusion • de perfusion et de ventilation 16 L’angiographie pulmonaire • Un cathéter est introduit par voie haute (humérale) ou par voie basse (fémorale) jusque dans le tronc de l’artère pulmonaire et un produit de contraste iodé est alors injecté. Plusieurs clichés radiologiques sont alors pris selon différentes incidences. Il permet un diagnostic positif et de gravité. C’est l’examen de référence, à utiliser lorsque les autres explorations ne permettent pas de trancher. C’est cependant un examen invasif, avec le problème de l’injection de produits iodés (insuffisance rénale, allergie) et qui est de moins en moins utilisé. 17 Le scanner spiralé des artères pulmonaires • un produit de contraste iodé est injecté en intraveineux. Le mouvement rotatif et longitudinal (caractère spiralé) de la tête du scanner permet de bien visualiser les artères pulmonaires proximales et moyennes et un peu moins bien leur distalité. C’est un excellent examen de diagnostic positif et de gravité, même si les risques liés à l’emploi de produits iodés persistent. 18 TRAITEMENT Le traitement anticoagulant • doit être institué dès la suspicion du diagnostic. Il a pour but : D’empêcher la progression et la migration du caillot De permettre à la fibrinolyse naturelle d’agir • Pour des raisons de rapidité d’action il doit être débuté de manière parentérale (hépariniques) et être relayé par un traitement per os (antivitamine K) 19 Les hepariniques : HÉPARINE • en seringue électrique ou éventuellement de manière fractionnée toutes les 2 h, son emploi impose donc une voie veineuse. • Le contrôle se fait par des TCK ou TCA répétés (2 à 3 fois le témoin) • Les risques sont essentiellement hémorragiques. Exceptionnellement peut survenir une thrombopénie, parfois gravissime. La durée de vie est courte : le patient est pratiquement iso coagulable 2 h après la fin de la perfusion. Les hepariniques : • Les HBPM (héparines à bas poids moléculaires) (FRAXIPARINE, LOVENOX, INNOHEP, FRAGMINE...) • action anticoagulante plus spécifique avec un risque théorique hémorragique plus faible. • le dosage dépend du poids du patient et n’a pas besoin d’être surveillé dans la plupart des cas ce qui donne une grande simplicité d’utilisation. Dans de rares cas, on peut tester son efficacité en dosant le facteur anti Xa. 20 Les antivitamines K (AVK) : • PREVISCAN, SINTROM, APEGMONE, PINDIONE, COUMADINE... C’est un traitement per os, pour le long terme. Il est surveillé par l'INR (doit être entre 2.5 et 3.5). Le patient n'a pas besoin d'être à jeun pour ce prélèvement. Le TP (ou taux de prothrobine ou taux de Quick) était auparavant utilisé mais sa mesure varie d'un laboratoire à l'autre rendant difficile toute comparaison. Les antivitamines K (AVK) : • La durée d’action est longue (plusieurs jours) : pour une même dose journalière, l’INR va se stabiliser au bout de plusieurs jours (cela dépend de l’AVK utilisé). Le surdosage (risque hémorragique) comme le sous dosage (risque d’inefficacité) est donc prolongé. • De nombreux médicaments et même l’alimentation peuvent interférer avec les AVK ce qui rend leur emploi parfois délicat. 21 Les antivitamines K (AVK) : • De nombreux médicaments et même l’alimentation peuvent interférer avec les AVK ce qui rend leur emploi parfois délicat. • Ils nécessitent donc soit une éducation soigneuse du patient, soit un suivi rigoureux par le médecin et/ou l’infirmière. Un traitement mal conduit est parfois plus dangereux que pas de traitement du tout. Le traitement propre à l’embolie pulmonaire • L’hospitalisation est nécessaire. S’il s’agit d’une embolie pulmonaire grave, l’admission en soins intensifs de cardiologie est préférable. • Une oxygénothérapie est mise en route si besoin. • Une anti coagulation ( par HÉPARINE ou par HBPM en une injection) est débutée avec un relais par AVK qui seront continué plusieurs mois 22 Le traitement propre à l’embolie pulmonaire • Le lever est fait après 24 à 48 h d'anticaogulation bien conduite. • Si l’embolie pulmonaire est grave (mauvaise tolérance clinique et/ou importance de l’embolie sur les imageries) avec un risque vital, on peut proposer une fibrinolyse.(RTPA, STREPTASE, UROKINASE...). • Cette dernière a pour but de dissoudre rapidement le caillot. Elle est injectée en une cure de perfusion de courte durée. Le traitement propre à l’embolie pulmonaire • Le risque hémorragique n'est pas négligeable : il est capital de respecter les contre-indications (chirurgie récente, maladie de l’hémostase, ponction artérielle, HTA non maîtrisée, AVC récent...) • Exceptionnellement, on peut être amené à porter une indication à une thombectomie chirurgicale, ce qui nécessite l’utilisation d’une circulation extracorporelle et ne peut donc être faite qu’en certains centres spécialisés (Tours ou Paris dans la région Centre) 23 Le traitement preventif • En cas d’alitement, et particulièrement en péri opératoire de certaines chirurgies (petit bassin notamment), une anti coagulation par HBPM à petites doses en une injection journalière est faite de manière systématique. Ce traitement n’est pas anodin économiquement parlant : il constitue le premier poste de dépense en pharmacie au CHRO • Les bas de contention doivent être systématiquement appliqués chez les patients alités afin de favoriser le retour veineux et d’éviter touts stases veineuse • La meilleure prévention consiste en un lever précoce. LE QUIZZ QCM • Une seule réponse exacte pour chaque question ! 24 1 : De bas en haut, on trouve les veines : fémorale, puis surale, puis poplité, puis iliaque. surale, puis poplité, puis iliaque, puis fémorale surale, puis poplité, puis fémorale, puis iliaque poplité, puis surale, puis fémorale, puis iliaque 2. Quelle affirmation parmi les suivantes est fausse ? Des D-Dimères bas rendent peu probable le diagnostic de maladie thromboembolique. La phlébographie est l'examen utilisé en routine pour le diagnostic de phlébite L'échographie-doppler permet de visualiser directement le caillot. Les signes cliniques de phlébite sont très souvent frustres ou inexistants. 25 3. Quel est le tableau biologique le plus typique d'une embole pulmonaire. D-dimères bas, hypoxie, hypercapnie D-dimères élevés, normoxie, normocapnie D-dimères bas, hypoxie, hypocapnie D-dimères élevés, hypoxie, hypocapnie Tous ces anticoagulants s'administrent par voie parentérale sauf un : SINTROM HEPARINE LOVENOX INNOHEP 26 5. Quel est le meilleur traitement préventif de la maladie thromboembolique en particulier en post operatoire? HEPARINE à doses efficaces Contention élastique des membres inférieurs Lever précoce fibrinolyse IV 6. Quel est le terrain qui n'augmente pas le risque de maladie thromboembolique ? Prise d'oestro-progestatifs alcoolisme cancer immobilité prolongée 27 7. Dans le traitement de l'embolie pulmonaire, quelle est l'affirmation fausse ? Un traitement anticoagulant par HEPARINE ou HBPM doit être débuté d'emblée Un relai par AVK doit être fait. Le lever ne sera autorisée qu'après au moins une semaine. Une oxygénothérapie peut être nécessaire Quel est l'affirmation fausse ? La scintigraphie pulmonaire nécessite l'injection de radio-isotopes Le scanner spiralé des artères pulmonaire ne nécessite pas d'injection. L'angiographie pulmonaire nécessite une ponction veineuse La radiographie pulmonaire ne permet pas d'affirmer la présence ou l'absence d'une embolie pulmonaire. 28 A propos de la contention élastique des membres inférieurs, quelle est l'affirmation fausse ? Doit être portée obligatoire jour et nuit Doit être portée au moins plusieurs mois Doit être posée avant le lever ou au moins après un repos allongé d'une dizaine de minutes Permet de diminuer le risque de maladie post phlébitique Les AVK Ont un délai d'action de quelques heures Sont surveillés plus facilement par le TP (comparaison aisée possible entre différents laboratoires) S'administrent en sous cutané. Nécessite une éducation du patient 29