Micro-économie : Introduction Licence 1 Droit Economie Saïd SOUAM Professeur Université Paris Ouest Nanterre La Défense February 9, 2013 1 Pourquoi l’économie ? On pourrait e¤ectivement commencer ce chapitre introductif en se posant cette question et une autre toute aussi importante : Qu’est-ce que l’économie ? Si on se refère au 19ème siècle, une des ”meilleures” dé…nitions est celle donnée par Alfred Marshall dans ses Principes de l’économie en 1890. ”L’économie, c’est l’étude de l’humanité dans les a¤aires courantes de la vie”. Depuis cette époque, le savoir économique a beaucoup évolué. Cette dé…nition reste toutefois encore d’actualité. Pourquoi donc s’intéresse-t-on encore aujourd’hui à l’économie ? La première raison que l’on pourrait invoquer c’est que cela nous permet de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons. De nombreuses questions que vous vous posez ou que vous n’osez pas poser sont des questions d’ordre économique. Une deuxième raison est que l’étude de l’économie fera de vous un citoyen plus avisé de la vie économique. En e¤et, tout au long de notre vie nous sommes amenés à prendre des décisions stratégiques notamment d’ordre économique. Ne ce serait que pour décider une fois que vous avez obtenu votre Licence de continuer une ou deux années d’étude supplémentaires (faire un Master) ou aller directement sur le marché du travail. 1 Une troisième raison possible est que l’étude de l’économie va probablement vous faire mieux comprendre les enjeux des politiques économiques des gouvernements et voir si on ne vous raconte pas des bobards... On peut avancer que l’objet d’étude fondamental de l’économie est l’utilisation des ressources rares. Chaque jour, nous mangeons du pain, de la viande, des légumes, nous buvons de l’eau, du lait, nous respirons de l’air plus ou moins pollué. Nous nous chau¤ons, nous portons des vêtements, nous utilisons des voitures et des transports en commun, nous écoutons la radio et regardons la télévision... Certains de ces produits ou services (l’air) sont disponibles directement et en quantités telles que leur utilisation ne pose a priori aucun problème. Ce sont des biens dits libres. Mais la plupart de ces services sont disponibles en quantités limitées, ou bien sont obtenus à partir de biens disponibles en quantités limitées. L’eau, par exemple, pour être consommée doit être collectée, traitée puis transportée jusqu’aux points d’utilisation. Pour avoir plus de lait, il faut augmenter le nombre de vaches, mais ceci suppose d’accroître la surface agricole consacrée à l’élevage. En ce qui concerne les matières premières, elles sont vraisemblablement disponibles en quantités illimitées (du moins à l’échelle de l’univers). Toutefois, les ressources connues sont épuisables ou limitées à court ou moyen termes. La plupart des biens mettent en oeuvre un processus complexe de production et de distribution (penser par exemple au nombre d’opérations mises en jeu pour contruire une voiture). Quand un bien est disponible en quantité limitée, son emploi entraîne des choix dans la mesure où tous les besoins ne peuvent être satisfaits. Cela implique un choix de rationnement. D’où l’idée de partage (ou d’a¤ectation) des ressources. Si on admet que le but ultime de l’activité économique est la satisfaction des besoins individuels, ces choix impliquent des arbitrages entre par exemple : 1. Consommation directe ou indirecte : le pétrole peut être utilisé pour se chau¤er ou pour fabriquer l’électricité permettant de se chauffer ; le lait peut être bu ou transformé en beurre ou en fromage. 2. Consommation immédiate ou future : le blé peut être consommé ou servir de semence ; une usine peut fabriquer des voitures ou des 2 machines-outils permettant ensuite de fabriquer d’autres voitures ; une part des ressources humaines peut être a¤ectée à la Recherche & Développement (R&D) de nouveaux produits ou de nouvelles techniques de production (on aboutit à ce qu’on appelle dans le langage technique des innovations de produits ou de process). Un autre exemple primordial consiste dans l’arbitrage entre consommation et épargne. Sachant que demain je serai à la retraite et donc que mes revenus seront plus faibles qu’aujourd’hui, je suis incité à épargner aujourd’hui pour pouvoir maintenir mon niveau de vie demain. C’est l’idée selon laquelle les consommateurs (ou ménages) préfèrent lisser leurs consommations (cf. la théorie du cycle de vie de Franco Modigliani et celle du revenu permanent de Milton Friedman). 3. Di¤érents types de consommation : choix entre les secteurs, tel ou tel produit agricole peut être favorisé, produire plus peut engendrer des problèmes de pollution ; une part des ressources humaines peut être a¤ectée à l’éducation des enfants, à la formation des jeunes ou encore à la santé. 4. Choix entre les individus : Qui consomme quoi ? Qui roule en voiture ? Qui utilise les transports en commun ? Qui peut et qui doit travailler ? Qui béné…cie de l’éducation, des hôpitaux ? De la pollution ? En ce sens, l’économie est une science sociale puisqu’elle étudie le comportement d’agents dits économiques (consommateurs, entreprises, banques, administrations, etc...) ainsi que leurs organisations. Ces agents économiques poursuivent des objectifs qui leur sont propres et sont soumis à des contraintes légales, morales, techniques ou encore pécuniaires. Souvent ces objectifs rentrent en con‡it les uns avec les autres. Se pose alors un problème essentiel en économie : Peut-on résoudre ces con‡its ? Si oui, doit-on le faire de manière autoritaire (en faisant intervenir par exemple l’Etat) ou existe-t-il d’autres manières plus e¢ caces pour le faire ? Beaucoup d’autres questions sont possibles et permettent de donner une première idée de ce qu’est l’économie et ce à quoi elle s’intéresse. 1. Comment les individus choisissent-ils les biens et les services qu’ils consomment et les moyens de production qu’ils utilisent ? En quoi ces choix sont-ils tributaires des nouvelles découvertes et des nouvelles technologies ? 3 2. Quels sont les déterminants du revenu des consommateurs ? Pourquoi certains sont mieux rémunérés que d’autres alors que ceux-ci travaillent autant sinon davantage ? 3. Quels sont les déterminants du chômage ? Pourquoi ces e¤ets ne sont-ils pas les mêmes selon la catégorie socio-professionnelle auquel on appartient ? 4. Pourquoi observe-t-on des hausses ou des baisses de prix ? In‡ation c. désin‡ation. 5. Pourquoi les impôts et les dépenses publiques ? Et quels sont leurs e¤ets sur la vie de tous les jours ? 6. Quels sont les facteurs qui déterminent la structure et le volume des échanges entre pays ? Quels sont les e¤ets des tarifs douaniers sur le commerce international ? 7. A quoi peut-on attribuer les di¤érences de niveau de vie entre les nations ? Ce sont là des questions fondamentales qui résument l’essentiel des préoccupations de la science économique. Elles sont fondamentales pour au moins une double raison : d’abord par leurs énormes répercussions sur les conditions de vie de l’humanité toute entière, ensuite par leur complexité et par les di¢ cultés rencontrées pour apporter des réponses simples et universelles. Ce qu’il faut savoir dès à présent c’est que ces questions suscitent un vif débat entre les économistes et qu’il n’y a pas a priori une pensée unique (c’est même loin d’être le cas, voir par exemple le problème du chômage). Mais il y a parfois des consensus politiques sur le sujet. Ce qui est important pour vous, au moins dans un premier temps, c’est de faire abstraction de vos sentiments et d’aborder l’analyse de ces problèmes avec la rigueur et l’objectivité d’un scienti…que. Un des objectifs principaux de ce cours est de vous faire comprendre comment raisonne un économiste et comment il essaie de résoudre les problèmes qui se posent à lui. Revenons maintenant à ce qu’il y a de commun à toutes ces questions et qu’est-ce qui fait d’elles des questions proprement économiques. 4 2 La rareté A la base, un problème économique découle du fait simple mais ô combien pertinent qui est qu’il nous est a priori impossible de satisfaire tous nos désirs et nos besoins. L’économiste dé…nira en général la rareté comme une situation où les besoins et les désirs dépassent les ressources dont on dispose pour les satisfaire. Si vous n’avez que 100 euros et que vous désirez acheter un lecteur MP4 qui coûte 85 euros et un livre qui coûte 45 euros, vous êtes confrontés à la rareté. Vous devez, en tant qu’étudiants, arbitrer entre aller faire la fête ou du sport le week end ou travailler pour combler le retard accumulé dans le cours. Vous êtes dans ce cas confrontés à la rareté du temps (il n’y a que 24 heures par jour et il faut aussi dormir pour se reposer...). En fait, nos besoins et nos désirs ne font pas que dépasser les ressources existantes : ils peuvent être beaucoup plus grands et mêmes être illimités face à des ressources limitées ou …nies (au moins à moyen terme). Nous souhaitons en e¤et tous vivre plus longtemps et en bonne santé, dans l’aisance, jouir du confort et de la sécurité. Personne n’arrive réellement à satisfaire tous ses besoins en même temps. Il subsiste toujours quelque part une insatisfaction en chacun d’entre nous. 2.1 L’activité économique L’activité économique est essentiellement engendrée par la confrontation entre les besoins illimités des consommateurs (ou autres agents économiques) et les ressources limitées dont nous disposons en général. On peut dire que l’activité économique représente l’ensemble des actions que nous entreprenons pour contrer la rareté. En ce sens, on peut dire que l’économie étudie la façon d’utiliser au mieux nos ressources limitées pour satisfaire (et répondre) à nos besoins illimités. Ainsi dé…nie, l’économie a un champ d’investigation qui est très large et qui englobe en tout cas toutes les questions que nous nous sommes posées auparavant. Ce qu’il faut retenir c’est que s’il n’y avait pas de problème de rareté des biens (i.e. si on vivait dans un univers de science …ction où tout serait abondant) les problèmes économiques n’existeraient pas. Vous ferez alors autre chose qu’étudier l’économie. 5 2.2 Les choix Ce problème universel de la rareté nous oblige à faire des choix. En effet, étant dans l’impossibilité de tout avoir il faut faire des choix parmi les opportunités qui s’o¤rent à nous. A la base, tout choix suppose la comparaison de deux choses : d’un côté les avantages que présenterait la possession d’une quantité accrue de certains biens et, de l’autre côté, les inconvénients qu’entraînerait la diminution d’autres biens. Cette comparaison, suivie de la décision qui nous permet de tirer le meilleur parti possible des diverses possibilités qui s’o¤rent à nous porte un nom : l’optimisation. 2.3 Le coût d’opportunité Ayant déjà e¤ectué un choix optimal, on ne pourra plus, simultanément, tout avoir en plus grande quantité. Partant de cette situation optimale, pour augmenter la quantité qu’on possède d’un bien, il faudra renoncer à une certaine quantité d’un autre bien. Autrement dit, tout choix comporte un prix à payer. Et quelle que soit la décision que vous avez prise, vous savez que vous auriez pu prendre une autre. A chaque fois, qu’en raison des ressources limitées, on doit faire un choix le prix à payer est appelé coût d’opportunité. Le coût d’opportunité d’une décision représente la ”valeur” de la meilleure possibilité à laquelle on renonce par cette décision. C’est aussi le sacri…ce de l’option la plus avantageuse parmi celles qu’on écarte. Exemple : Grand dormeur ou Grand sportif Supposez que vous ayez un cours à 8h le lundi matin. Si vous n’allez pas à votre cours, vous avez le choix entre deux possibilités : rester au lit une heure supplémentaire ou consacrer cette heure à faire un jogging. Le coût d’opportunité du cours du lundi matin à 8h ne peut être à la fois la perte d’une heure de sommeil et les bienfaits d’une heure de jogging. Si vous n’envisagez que ces deux possibilités dans l’éventualité où vous n’allez pas à votre cours, il faudra déterminer laquelle des deux possibilités vous valorisez le plus. Si vous êtes un grand dormeur, le coût d’opportunité de votre cours c’est une heure de sommeil. En revanche, si vous êtes un grand sportif cela correspond à une heure d’exercice physique. En revanche, prendre le petit déjeuner tous les matins à la caféteria de l’université ne doit pas être inclus dans le calcul de votre coût d’opportunité 6 à faire des études. Tout comme d’ailleurs le fait de payer un loyer pour votre chambre universitaire. Dans ce dernier cas, cela peut même être en votre faveur puisque, subvention oblige, il coûte moins cher d’habiter en cité universitaire que de louer une chambre ou un studio en ville. 2.4 Concurrence et coopération Lorsque les besoins des individus excèdent les ressources, il y a con‡it entre les besoins, face à l’a¤ectation des ressources disponibles. La concurrence représente cette lutte pour obtenir la maîtrise de ressources devenues rares. Revenons à l’exemple de tout à l’heure : vous n’avez que 100 euros et vous désirez acheter un lecteur MP4 qui coûte 85 euros et un livre qui coûte 45 euros. Le lecteur MP4 et le livre sont ici en concurrence pour l’utilisation des mêmes 100 euros. C’est exactement la même chose qui se passe quand un étudiant doit arbitrer entre réviser ses cours et aller à la fête. Tout un chacun se doit de rivaliser avec les autres pour obtenir la plus grande part possible des ressources rares existantes. Pour organiser et restreindre ce type de rivalité, les sociétés humaines ont établi des règles dont l’origine et l’évolution découlent directement du problème de la rareté : par exemple comment rationner l’utilisation de l’eau dans un village africain ou dans une ville occidentale. Deux contextes di¤érents peuvent aboutir à des solutions adoptées di¤érentes. La coopération peut parfois résoudre de manière plus harmonieuse bien des problèmes économiques. La coopération est synonyme dans ce cas de la réalisation d’un travail en commun en vue d’atteindre un même but. Il y a coopération à chaque fois qu’on s’entend sur des règles précises pour atténuer les rivalités et prévenir les con‡its (toujours le problème de l’eau qui peut parfois et même souvent engendrer de graves tensions entre pays limitrophes, notamment au proche-orient). Cependant, la coopération aussi répandue soit-elle ne résout pas tous les problèmes économiques et n’élimine en tout cas pas toute forme de concurrence. Une coopération repose quelque part sur une concurrence préalable (exemple du mariage, mais avant le mariage il y a concurrence pour la recherche de l’âme soeur). 7 3 Principes de base de l’économie Commençons d’abord par donner la dé…nition la plus communément admise de l’économie : ”L’Economie est une science qui analyse le comportement humain comme l’allocation, à des …ns données, de moyens rares ayant des usages alternatifs”Robins (1932) : ”L’économie est la science qui étudie comment les ressources rares sont employées pour la satisfaction des besoins des hommes vivant en société, elle s’intéresse aux opérations essentielles que sont la production, la distribution et la consommation des biens, d’autre part aux institutions et aux activités ayant pour objet de faciliter ces opérations”Malinvaud (1975). Ces dé…nitions mettent en exergue un principe fondamental de l’économie : partant du fait que les ressources sont rares les agents doivent faire des choix. Cela à tous les niveaux : 1. Dormir plus ou venir au cours de microéconomie ? 2. Dépenser plus d’argent pour la culture ou pour l’armée ? Ces choix se font sous contraintes (ressources rares) et répondent à des incitations, cherchent à satisfaire des besoins (à des …ns données). C’est notamment un des objectifs fondamentaux que d’expliquer ces choix. Fondamentalement, retenons donc qu’une économie c’est un mécanisme qui permet de répartir des ressources rares en vue d’utilisations concurrentes. Ce mécanisme doit résoudre trois questions essentielles : Quoi ? Comment ? Pour qui ? Allocation des ressources : qui doit allouer quoi à qui et pourquoi ? Quelle organisation adopter ? Economie centralisée ou économie de marché ? Quels produits et services produire et en quelles quantités ? Faut-il construire de grandes maisons individuelles ou de petits appartements collectifs ? Quelles méthodes appliquer dans le processus de production des biens et services ? A l’intention de qui doit-on produire les biens et services ? 8 Ce qu’il faut retenir et savoir c’est qu’il existe des principes de base en économie qui s’appliquent à pratiquement tous les cas de …gure (en tout cas à ceux que nous étudierons cette année). Principe 1 : Les agents économiques doivent faire des choix. Principe 2 : Le coût d’un bien est ce à quoi l’on est prêt à renoncer pour l’obtenir (cf. la notion de coût d’opportunité). Principe 3 : Les agents rationnels pensent en termes marginaux. C’est la comparaison entre le coût marginal d’une action et son béné…ce marginal qui importe. Tant que la di¤érence est en faveur du béné…ce, il est optimal pour un agent rationnel de réaliser cette action. Principe 4 : Les agents réagissent aux incitations (exemple de la ceinture de sécurité). Principe 5 : L’échange est béné…que à tout le monde (cf. la théorie du commerce international, analyse de Ricardo des avantages comparatifs c. analyse d’Adam Smith sur les avantages absolus, théorie des facteurs proportionnels ou HOS pour Heckscher-Ohlin-Samuelson). Principe 6 : Il s’avère qu’en général les marchés constituent une manière e¢ cace d’organiser l’activité économique. Ceci est un principe important et quelque peu paradoxal. En e¤et, pourquoi a priori des millions d’individus réussissent à coordonner leurs actions pour faire fonctionner de manière harmonieuse l’économie. Pourquoi ces millions d’individus mus par une volonté égoïste n’engendrent-ils pas le chaos ? Pourquoi si vous voulez acheter du pain, une paire de baskets, vous trouvez facilement des commerçants qui vendent justement du pain en assez grande quantité ou des paires de baskets à votre pointure ou de la marque que vous souhaitez ? L’économie pourrait être beaucoup plus chaotique : avec des périodes de surproduction de baskets et d’autres de pénuries de baskets. Globalement, il n’en est rien. C’est Adam Smith (dans son ouvrage La richesse des nations paru en 1776) qui le premier a mis en évidence ce phénomène qu’il explique par la main invisible du marché. Principe 7 : Le gouvernement peut parfois améliorer les résultats du marché. Quand la main invisible d’Adam Smith est en panne (on parle de défaillances de marché), une intervention des autorités peut être souhaitable soit pour rétablir l’e¢ cacité de l’allocation des ressources, soit pour rendre 9 cette allocation plus équitable en un sens que l’on dé…nira plus loin dans le cours. Ce sont là les principaux fondements de l’analyse microéconomique qui sera développée dans notre cours. 4 4.1 Les composantes d’une économie Les décideurs A priori toute personne ou groupe de personnes habilitées à e¤ectuer des choix et à prendre des décisions. On distingue essentiellement en économie trois groupes au moins dans un premier temps en économie fermée. 4.1.1 Les ménages On désigne par ménage toute personne vivant seule ou tout groupe de personnes vivant ensemble, et qui agit comme une unité de prise de décision. 4.1.2 Les entreprises C’est un organisme qui produit des biens et services, quelle que soit sa spécialisation, sa taille ou le niveau de sa production. 4.1.3 Le gouvernement C’est un organisme qui remplit deux types de fonctions : d’une part, la fourniture de biens et de services aux ménages et aux entreprises, d’autre part, la redistribution des revenus et de la richesse entre les citoyens (Exemples : systèmes de santé publics, l’enseignement, les services de police, la sécurité en général, le respect de la loi, etc...). 4.2 Les ressources productives d’une économie En général, les ménages fournissent aux entreprises et aux gouvernements les facteurs de production : le travail, la terre, le capital, le capital humain, etc... 10 5 Systèmes économiques et économie de marché Pour produire et répartir les biens et services, plusieurs systèmes ont été imaginés. La science économique souhaite étudier ces systèmes, leurs propriétés, leurs performances et leurs défauts. Un des systèmes les plus répandus est l’économie de marché avec propriété privée. 1. Les biens sont échangés librement, à un prix déterminé par un équilibre d’ensemble entre l’o¤re et la demande. 2. Chaque consommateur utilise le revenu dont il dispose (revenus du patrimoine, salaires, dividendes distribués par les entreprises) pour se procurer, aux prix du marché, les biens qu’il désire. 3. Les entreprises o¤rent des biens et demandent du travail ou d’autres facteurs de production. En France, à peu près 85 % des biens et services sont produits de cette façon. Dans ce cas, l’économie doit analyser les déterminants de l’o¤re et de la demande ; étudier leur ajustement, etc... De nombreuses questions : Comment déterminer les prix des biens et services ? Quel sera le prix du lait ? Quel est l’impact d’une hausse du prix du lait sur sa consommation ? Pourquoi les voitures japonaises coûtent-elles moins cher que les voitures américaines ? Prix d’une police d’assurance ? D’une action d’une entreprise cotée en bourse ? Pourquoi y a-t-il de l’in‡ation ? Comment détermine-t-on les quantités produites ? Impact d’une augmentation du taux d’intérêt sur l’investissement des entreprises ou l’épargne des ménages ? Quels sont les e¤ets des changements institutionnels ? Quels sont les impacts d’une réforme …scale sur l’emploi, la consommation, l’investissement ou l’épargne ? Comment réformer la PAC ? Dans les économies où les décisions de production et de distribution étaient centralisées et appuyées sur des informations transmises par di¤érents 11 relais locaux (ex. pays de l’Europe de l’Est), on parle d’une coordination par directives par contraste avec la coordination par le marché. En France, certains pans entiers du secteur public (défense, sécurité nationale, éducation, santé) sont organisés sur le même type de modèle. L’Union Européenne a toutefois fait reculer les interventions directes des Etats dans de nombreux domaines et pas des moindres. Questions : 1. Quels sont les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de ces systèmes ? Comment l’information doit-elle circuler ? 2. Quelle est l’e¢ cacité de tels systèmes ? Quel est le degré de satisfaction des consommateurs ? Peut-on comparer les e¢ cacités de systèmes di¤érents (secteur public ou privé d’une économie mixte, organisation de la santé, EU c. France,...) ? 3. Quelles sont les conséquences d’une nationalisation, d’une privatisation ? Un tel changement de structure implique-t-il nécessairement un changement réel ? Quel est l’impact de l’introduction de la concurrence dans des domaines autrefois en monopole d’Etat (électricité, gaz, etc...) ? 4. Dans quel ordre procéder pour les changements majeurs (problème de la transition des pays de l’Est et des pays encore en développement, cf. les livres de J. Stiglitz pour une critique virulente de la mondialisation telle que menée par les institutions internationales que sont le FMI et la Banque Mondiale...) ? Il apparaît à première vue que ce sont des questions a priori très complexes. 6 Macro et Micro économie Il existe essentiellement deux voies pour répondre aux questions que nous avons soulevées ci-dessus. 12 6.1 La Macroéconomie C’est une partie de l’analyse économique qui s’intéresse à la dé…nition de grands agrégats (emploi total, produit national, épargne, taux de chômage, indice de prix, investissement, masse monétaire, taux d’intérêt, balance commerciale, etc...) susceptibles de résumer les données de base d’une économie. Une économie est découpée en un petit nombre de secteurs (agriculture, industrie, tertiaire, biens de consommation …nale, biens d’équipement, ...) et les acteurs économiques (décideurs) sont agrégés en grandes classes (ménages, entreprises, Etat, ...). 6.2 La Microéconomie La deuxième voie met quant à elle l’accent sur les di¤érents acteurs (individus, consommateurs, entreprises, partis politiques, syndicats, etc...) de l’économie. Elle s’intéresse essentiellement à l’analyse des comportements individuels, pour comprendre les grandes variables économiques. Cela repose sur un certain nombre d’hypothèses et peut adopter plusieurs approches. La plupart des questions peuvent ainsi être abordées de deux façons. 6.2.1 Approche positive La première, essentiellement descriptive (positive), étudie les di¤érents systèmes pour prédire leur fonctionnement. Il s’agit donc d’expliquer ce qui peut se passer dans un système économique suite à un changement d’un paramètre fondamental de l’économie. On peut citer quelques exemples : étude de l’impact de la baisse de la TVA sur la consommation ; e¤et des incitations …scales ou des subventions à la production agricole (comment fonctionne la PAC, etc...). L’a¢ rmation ”Si le prix des cigarettes augmente, la demande de cigarettes diminue” est une a¢ rmation d’économie positive. En e¤et, sous certaines hypothèses (assez générales et qui semblent bien s’appliquer à ce produit), la théorie économique prévoit cette réaction. C’est aussi une a¢ rmation con…rmée empiriquement. Elle peut par ailleurs s’étendre à d’autres biens sauf à ceux qu’on appelle les biens de Gi¤en. On retiendra donc qu’une a¢ rmation d’économie positive décrit le monde tel qu’il est. 13 6.2.2 Approche normative La deuxième approche cherche à évaluer le fonctionnement du système. Dans ce second cas, on juge en bien ou en mal les di¤érents systèmes. Cela pourrait se traduire par un classement selon un jugement de valeur qui reste à dé…nir. Exemples : chercher la meilleure réforme …scale, le meilleur système de retraite, etc... Il se pose à ce niveau de l’analyse un problème important concernant l’objectif recherché. Un système est jugé meilleur en quel sens ? Le rôle de l’économiste ne peut consister qu’à déterminer la meilleure façon d’atteindre l’objectif …xé. L’a¢ rmation suivante ”Il faut augmenter le prix des cigarettes a…n d’en diminuer la consommation”est au contraire une a¢ rmation dite d’économie normative. Elle sous-tend en e¤et que la consommation de cigarettes est nuisible pour la santé (du fumeur et de son entourage). Dans ce cas, une augmentation du prix est souhaitable a…n de réduire la demande, ce qui pourrait améliorer le bien-être de la société dans son ensemble. Une a¢ rmation d’économie normative décrit un point de vue du monde. Elle utilise pour cela une dé…nition particulière du Bien, du Mal ; du Juste et de l’Injuste... En e¤et, ce n’est pas parce qu’une augmentation du prix des cigarettes en fait diminuer la demande, qu’elle est désirable pour tout le monde. En particulier, les fumeurs y perdent (puisqu’ils sont prêts à prendre le risque de fumer, ils intègrent pour ainsi dire le risque pour leur santé mais pas le coût pour la société : on parle dans ce cas d’externalités négatives...). Vous verrez dans la suite de vos études qu’il s’agit de l’une des raisons qui peuvent aboutir à ce qu’on appelle communément des défaillances de marché. En revanche, la sécurité sociale y gagne : il y aura a priori moins de cancers (donc tout le monde y gagne). Les non-fumeurs y gagnent aussi : moins de nuisance, moins de fumeurs passifs. Les producteurs, les vendeurs, les distributeurs de cigarettes y perdent quant à eux. 14 7 Les modèles économiques Comme toute science, l’étude de l’économie impose des simpli…cations. Estce à cause de cela que les économistes font parfois (certains diront souvent) des prévisions erronées ? La science économique s’appuie sur des hypothèses simpli…catrices car si on veut avancer on ne peut pas faire autrement sauf à ne faire de l’économie qu’une science descriptive sans aucun pouvoir prédictif. Ce temps est révolu et une amélioration de notre compréhension des phénomènes économiques passe nécessairement par des modélisations qui sont des simpli…cations de la réalité. Le danger vient de la tentation d’extrapoler les résultats obtenus à partir d’un jeu donné d’hypothèses à une situation di¤érente. Pour répondre à des questions aussi pertinentes que celles concernant par exemple la lutte contre le chômage ou la lutte contre la drogue, nous sommes amenés à concevoir et formuler des théories économiques. Une théorie économique est un ensemble d’énoncés positifs qui permet de comprendre et de prévoir les décisions économiques des agents économiques (ménages, entreprises, syndicats, etc...). Pour ce faire, on construit un modèle économique dont on véri…e ensuite le bien-fondé. Mais qu’est-ce qu’un modèle ? Un modèle est en général plus petit que ce qu’il est censé représenter. Bien entendu, vu la complexité de la réalité il ne cherche pas à reproduire tous les détails. Ce qu’il faut savoir, c’est que le choix des éléments qu’on inclut dans le modèle ne doit avoir rien d’arbitraire. Il devrait découler de décisions conscientes et bien pesées. Le problème avec les modèles économiques c’est qu’ils ne sont pas matériels. Il est de ce fait impossible de comparer l’objet réel au modèle pour décider si la représentation est …dèle. Un modèle économique est en quelque sorte une économie arti…cielle ou imaginaire. Il comporte deux éléments essentiels : les hypothèses et les implications. 7.1 Les hypothèses d’un modèle économique Elles constituent le fondement même du modèle. Elles permettent de faire le partage, parmi les nombreuses données d’un phénomène, entre ce qui est important et ce dont on peut faire abstraction. Finalement, ce sont elles qui dé…nissent les relations de cause à e¤et entre les phénomènes et nous autorisent ainsi à faire des prédictions. 15 Les hypothèses de base en économie et que nous ferons tout au long de ce cours sont les suivantes : 1. Les agents économiques ont des préférences. Ce terme est utilisé pour désigner les goûts et les aversions des consommateurs ainsi que l’intensité de ces sentiments. 2. Les agents économiques disposent de dotations initiales en ressources rares et disposent également de technologies pour la transformation de ces ressources en biens et services. 3. Les agents économiques optimisent. Faire un choix rationnel du point de vue des économistes, c’est prendre la meilleure décision ou opter pour la meilleure des possibilités parmi celles qui sont o¤ertes. 4. Les actions de divers agents doivent être coordonnées. Ainsi, la décision d’une personne d’acheter un bien ou un service doit coïncider avec la décision d’une autre de vendre ce bien ou ce service. 7.2 Les implications d’un modèle économique Les implications d’un modèle économique sont les résultats de ce modèle. C’est en quelque sorte ce que ce modèle ”produit”. En général, les implications d’un modèle économique constituent les valeurs d’équilibre des prix et des quantités de di¤érents biens et services. On dit qu’on a atteint une situation d’équilibre quand tous les individus ont optimisé leurs choix (compte tenu de leurs préférences et de leurs connaissances, des ressources et des technologies dont ils disposent) et quand les décisions des uns sont coordonnées et compatibles avec celles des autres. 7.3 Les modèles, les théories et...la réalité Certains théoriciens discutent de leurs modèles comme s’il s’agissait de la réalité. Un modèle reste un modèle, c’est à dire quelque chose d’abstrait. Il représente une liste d’hypothèses et d’implications. Tout ce qu’on fera, c’est essayer d’expliquer le comportement véritable des agents économiques à l’aide de modèles qui prêtent aux individus des choix rationnels et qui représentent comme une situation d’équilibre le résultat de l’interaction entre les décisions 16 de ces individus. Avant de tenir pour bonne une théorie, on se doit de véri…er ces modèles créés. La méthode utilisée en général consiste à confronter les prédictions du modèle avec les faits observés dans la réalité. On conçoit d’abord un modèle, on utilise ensuite ces implications pour déduire des prédictions sur les événements réels, puis on confronte ces prédictions avec la réalité. Si les faits contredisent les prédictions de la théorie, on devra rejeter la théorie pour en adopter une qui soit plus conforme à la réalité, ou bien tenter d’améliorer le modèle en modi…ant les hypothèses. References [1] Robert Pindyck, Daniel Rubinfeld et Michel Sollogoub, Microéconomie, Pearson Education, 7ème édition, 2007. Site compagnon : http://wps.pearsoned.com/ema_fr_pindyck_microeco_7/ [2] Etienne Wasmer, Principes de microéconomie. Méthodes empiriques et théories modernes, Pearson Education, 2010. Site compagnon: http://wps.pearsoned.com/wasmer_microeconomie/157/40425/10348954.cw/index.html [3] Michael Parkin, Robin Bade et Patrick Gonzalez, Introduction à la microéconomie moderne, ERPI, 3ème édition, 2005. [4] Gregory Mankiw, Principes de l’économie, Economica. [5] Pierre Picard, Eléments de microéconomie 1. Théorie et applications, Monchrestien. [6] Problèmes économiques : revue hebdomadaire qui reprend de manière souvent simpli…ée des articles d’actualité sur un problème économique particulier. A lire absolument pour votre culture économique et pour la compréhension de ce que les économistes font. Quotidiens économiques : par exemple Les Echos, La Tribune, le Financial Times, etc... 17