Troubles de la marche Cédric Gaxatte Hôpital gériatrique Les Bateliers – CHRU Lille [email protected] Capacité de gériatrie Paris 7 – 25 mars 2013 Programme du jour • La fonction équilibre / la fonction marche • Analyse clinique de la marche – Séméiologie – Les tests de marche • Peut-on proposer une classification des troubles de la marche ? • Troubles de la marche chez le patient chuteur : expérience de l’évaluation multidisciplinaire de la chute à Lille La fonction équilibre La fonction marche Le contrôle postural • Son rôle : maintenir le centre de gravité du corps à l’intérieur du polygone de sustentation Le contrôle postural Centres Intégrateurs : Hémisphères cérébraux Cervelet Tronc cérébral, ganglions de la base Temps de réaction Afférences périphériques : Visuelles Vestibulaires Effecteurs du contrôle postural : Cutanées plantaires Proprioception Musculaires, articulaires Musculature axiale Musculature des membres inférieurs Le contrôle postural Centres Intégrateurs : Maladie d’Alzheimer, Parkinson AVC, HPN Afférences périphériques : Cataracte, DMLA Vertiges Effecteurs du contrôle postural : Neuropathie Déficit moteur, fatigue Syndrome extrapyramidal Arthrose O. Beauchet, SFGG 2012 La marche Système de production du pas • La marche est une succession de déséquilibre posturaux : chute suivie d’une réaction « parachute » ou réajustement postural. • Elle se définit par la succession au niveau de chaque membre inférieur d’une phase d’appui et d’une phase oscillante • Ce qu’on mesure – Les temps d’appui et d’oscillation – La longueur du pas – La largeur du pas – La cadence : nombre de pas par minute – La vitesse de marche… Le cycle de la marche Le cycle de la marche Les modifications de la marche avec l’âge • L’apprentissage de l’enchaînement de ces séquences gestuelles dans l’enfance aboutit à une mémorisation d’un programme moteur. • L’automatisme gestuel en cas de non utilisation chez le sujet âgé peut se perdre et on assiste alors à une perte du « schéma de la marche ». Les modifications de la marche avec l’âge Modifications « physiologiques » avec l’âge •↘ de la vitesse de marche – 10 % de 60 à 70 ans – 20 % de 71 à 80 ans – 30 % au-delà •↘ longueur des pas •↘ hauteur des pas (pas traînants, pas rasants) •↗ élargissement du polygone de sustentation •↘ du temps d’appui unipodal •↗ du temps d’appui bipodal •réduction des amplitudes de dorsiflflexion de la cheville et d’extension des genoux et hanches •Régularité, cadence et trajectoire préservées Pourquoi s’intéresser aux troubles de la marche ? Un peu d’épidémiologie Quelques données • – – • • • • – – – 2 millions de chuteurs chaque année en France 1/3 des plus de 65 ans 50 % des plus de 85 ans Les femmes chutent plus que les hommes mais le sex-ratio diminue avec l’âge et devient proche de 1 après 85 ans. 50% des chuteurs ont déjà chuté 50% des sujets institutionnalisés chutent au moins une fois dans l’année (estimation 1,5 chute par lit) Pour les patients hospitalisés au décours d’une chute (enquête EPAC – BEH 2007) 78% survenue à domicile 16% survenue sur la voie publique La marche était l’activité la plus courante au moment de la chute (69 %) Quelques données • 8 à 19% des sujets âgés non institutionnalisés ont des difficultés pour marcher • Les troubles de la marche augmentent avec l’âge : • 6% chez les 65-69 ans • 34% chez les plus de 85 ans • 50% des sujets institutionnalisés ont un trouble de la marche • L’état thymique d’une personne influence son comportement moteur ⇒ La dépression s’accompagne généralement d’un ralentissement de la marche Les conséquences des chutes • Les principales conséquences : – Traumatismes physiques : fractures, plaies… – Impossibilité de se relever du sol avec séjour au sol supérieur à une heure et ses conséquences – Syndrome post-chute ou de désadaptation psychomotrice – Institutionnalisation • Taux d’incidence des chutes accidentelles avec recours aux urgences : 4,5 pour 100 personnes (♀>♂) • Une personne de plus de 85 ans a 6 à 7 fois plus de risque d’être hospitalisée suite à une chute par rapport à une personne de 65 ans Enquête Epac 2004-2005, C. Ricard InVS, BEH 2007 Quelques données • Au sein de leur patientèle, les médecins généralistes repèrent seulement – 14% des sujets âgés chuteurs – 6 % de ceux qui ont des troubles de la marche • Un examen clinique après une chute est réalisé chez seulement 36 % des chuteurs – Comportant un examen de la marche et de l’équilibre : <1/3 – un examen neurologique : 2/3 Rubenstein et al, JAGS 2001 Mortalité et troubles de la marche Bloem BR, J Am Geriatr Soc 2000 La marche : activité essentielle chez la personne âgée • Elle conditionne : – – – – le niveau d’indépendance (activités de la vie quotidienne) le lieu de vie certains comportements sociaux (sorties) l’état cognitif (Abbott RD et al, Weuve J et al JAMA 2004) • La marche : fonction automatique mais fragile – dégradation rapide des automatismes posturo-cinétiques – importance de l’entraînement Analyse clinique de la marche Anamnèse • Plainte spontanée concernant l’équilibre ou la marche ? • Antécédents de chute(s) ? Si oui – nombre de chute (/ 6 mois, / 1an) ; traumatismes ? – circonstances des chutes : heure, lieu, malaise, activité au moment de la chute – capacité à se relever seul / temps passé au sol • Les antécédents / comorbidités / alcool • Les traitements – Nombre – Modification récente, Automédication • Ancienneté des troubles ; facteurs aggravants • Douleurs ? • Mobilité actuelle, activités habituelles Les bonnes conditions pour examiner la marche • • • • • Un espace long et large (au moins 10 mètres) Suffisamment éclairé Sol « sonore » Marche pieds nus et/ou avec chaussures Les plus : – Un chronomètre – La vidéo Analyse des différents temps de la marche • Transferts assis/debout – – – – Statique assise Signe du tabouret ? Plusieurs essais pour se lever ? Organisation gestuelle • Initiation de la marche – Sure – Piétinement – Enrayage cinétique Analyse des différents temps de la marche • Marche en elle-même : – Attitude générale : tête, tronc, membres – Ballant des bras – Dissociation des ceintures – Pas fluide, régulier – Changement de position : => ½ tour continu ou décomposé – Marche sans aide technique, ni aide humaine – Marche avec aide technique et/ou aide humaine • Transfert debout/assis Analyse des différents temps de la marche • Marche observée à l’insu du patient • Epreuves particulières : – – – – – Marche rapide Marche latérale, marche arrière montée et de descente des escaliers Parcours d’obstacles Marche les yeux fermés • L’examen doit être complété d’une évaluation de l’équilibre et de l’étude des réflexes posturaux, et d’un examen clinique complet Séméiologie des troubles de la marche Troubles de marche d’origine neurologique Démarches déficitaires Atteinte du système pyramidal •Démarche en fauchant de l’hémiplégique •Démarche spasmodique des paraplégiques a une présentation variable selon l'intensité des troubles : – démarche spastique, les pieds ne quittent plus le sol qu'ils raclent de leur pointe et de leur bord externe. – claudication intermittente d'origine médullaire est un déficit moteur non douloureux des membres inférieurs qui n'apparaît qu'après un certain temps de marche. •Démarche des syndromes pseudo-bulbaires et des états multilacunaires : petits pas, le pied glissant sur le sol à chaque pas. Le ballant automatique des bras est conservé. Troubles de marche d’origine neurologique Atteinte du nerf périphérique (SPE) •La démarche en steppant ou steppage. Le pied, plus ou moins ballant, se met en varus équin dès qu'il quitte le sol, et le genou est levé trop haut, sinon la pointe du pied accroche le sol Atteinte musculaire •La démarche dandinante caractéristique des myopathes Résulte de l'atteinte des muscles moyens fessiers. Inclinaison du tronc du côté de la jambe portante •La démarche en « roi de comédie » : le myopathe avance les reins fortement cambrés en lordose, le tronc et la tête rejetés en arrière ce qui, s'ajoutant au dandinement Troubles de marche d’origine neurologique Ataxie = perturbation de l’équilibre et de la coordination motrice •Ataxie statique : station debout altérée •Ataxie locomotrice : se traduit par un trouble de la marche •Ataxie cinétique : anomalie du geste volontaire Démarches ataxiques Ataxie sensitive (atteinte des voies proprioceptives conscientes) •L'atteinte cordonale postérieure entraîne la démarche talonnante. Le patient allonge ses jambes tendues sans presque fléchir le genou et les pieds retombent lourdement sur le sol par le talon. Le trouble est aggravé par l’obscurité. Troubles de marche d’origine neurologique Ataxie labyrinthique •L’équilibre et la démarche dépendent de l’intensité des symptômes – Station debout et marche parfois impossibles (accès de vertiges aigus) – Tendance à la chute, le plus souvent latéralisée, aggravée par la fermeture des yeux – Démarche précautionneuse et instable avec une déviation latérale de la ligne de marche – Formes discrètes : la marche aveugle se fait en étoile Troubles de marche d’origine neurologique Ataxie cérébelleuse •L’atteinte du cervelet affecte à des degrés variables l’équilibre, la posture et la marche. •Elargissement du polygone de sustentation en position debout, les bras plus ou moins en abduction. •A la marche, le sujet ne peut aller droit devant lui, progressant en décrivant des courbes alternativement à droite et à gauche en zigzaguant, les jambes écartées, les bras écartés. Le sujet se penche doucement du côté où il dévie. •Lorsque les oscillations du corps autour de la position d'équilibre sont plus marquées au cours de la progression de la marche, le cérébelleux titube, réalisant la démarche ébrieuse. Troubles de marche d’origine neurologique Ataxie frontale (atteinte des régions préfrontales, bilatérales, souscorticales ou corticales) •Tendance à la rétropulsion, aggravée par la fermeture des yeux •Marche hésitante, incoordonnée, les pieds collés au sol comme si le patient ne savait plus marcher •Souvent amélioré par l’accompagnement du malade (au bras) •Parfois : véritable astasie / abasie •Association aux autres éléments du syndrome frontal : – Troubles du comportement (ralentissement psychomoteur ou jovialité) – Persévérations et stéréotypies gestuelles, grasping – Impossibilité de reproduire des séries de gestes, de rythmes, ou mieux de dessins très simples – troubles de l’attention et de la mémoire (distractibilité) – Troubles du langage (↘ fluidité, persévérations) Troubles de marche d’origine neurologique Troubles de la marche et d’équilibre d’origine extrapyramidale Maladie de Parkinson et des autres syndromes parkinsoniens •Troubles de la marche fréquents, à l’origine de chutes •La démarche parkinsonienne : – Démarrage lent, parfois bégayant (enrayage cinétique) – Tronc incliné en avant, les membres > et < en légère flexion – Perte du ballant des bras – marche à petits pas, pieds trainants – demi-tour décomposé – freezing, caractérisé par l’interruption brutale de la marche, spontané ou provoqué par un stimulus visuel (obstacle dans le champ de vision, franchissement de porte,…) Troubles de marche d’origine neurologique Autres troubles de la marche et d’équilibre d’origine neurologique •La démarche cérébello-spasmodique, caractéristique de la sclérose en plaques, en est un exemple. •L'astasie-abasie, c'est-à-dire l'instabilité à la station debout avec rétropulsion spontanée (astasie) et l'incapacité de marcher en dehors de la présence de tout syndrome pyramidal ou parkinsonien (abasie), est un trouble de la marche pouvant s'observer chez le sujet âgé, avec ou sans lésion frontale. Troubles de marche d’origine douloureuse • Atteintes radiculaires L5 ou S1 unilatérales – appui sur la jambe bref + flexion du genou • Canal lombaire étroit, acquis ou congénital – douleurs à la marche de topographie radiculaire, soulagées assez rapidement par l'arrêt (claudication intermittente radiculaire) ± troubles sensitivo-moteurs transitoires • Myopathies métaboliques – crampes musculaires à l'effort • Claudication vasculaire des membres inférieurs – crampes du mollet, souvent unilatérales, survenant après une certaine distance de marche et qui disparaît au repos Troubles de marche d’origine douloureuse • Toute atteinte ostéo-articulaire du bassin et des membres inférieurs : coxarthrose, gonarthrose +++ => boiterie et impotence douloureuse. • Pathologies podologiques douloureuses – Métatarsalgie de Morton : douleurs localisées des troisième et quatrième espaces interdigitaux => boiterie – Plaies – Déformations osseuses : chevauchement d’orteils, hallux valgus – Hyperkératoses : cors, durillons => Vérifier le caractère adapté du chaussage au pied Troubles de la marche d’origine psychogène • • • • • • • • • • • Marche « sénile » ou précautionneuse Parfois véritable stasobasophobie Lente, mais cadence respectée Réduction de la longueur et de la hauteur du pas (petits pas traînants) Légère augmentation du polygone de sustentation Phase de double appui privilégiée Attaque du pied à plat Attitude en flexion de tête, de tronc, des membres Diminution de la rotation pelvienne Ballant des bras diminué Diminution des capacités de changement de rythme Syndrome de désadaptation psychomotrice (Pfitzenmeyer, 1999) •Il correspond à une “décompensation des fonctions motrices (fonction posturale, marche et automatismes psychomoteurs), liée à un trouble de la programmation de la posture et du mouvement, consécutive à une altération des structures sous-cortico-frontales” •Une des formes clinique : « le syndrome post-chute » J. Morisod, Revue médicale suisse 2007 Syndrome de désadaptation psychomotrice Associe : •des anomalies de la posture, caractérisées par une rétropulsion en position assise comme en position debout •une altération de la marche, se manifestant par un trouble de l’initiation de la marche (« freezing »), une marche à petits pas, avec élargissement du polygone de sustentation, flexion des genoux, sans temps unipodal, ni déroulement du pied au sol •des symptômes neurologiques, comportant une akinésie surtout axiale avec hypertonie oppositionnelle et une altération des réactions d’adaptation posturale et des réactions parachute •une composante psychologique : anxiété majeure La peur de tomber • Plusieurs définitions : – sensation d’insécurité en position debout – appréhension lors de la marche – inquiétude d’intensité variable de la personne âgée face au risque de tomber, qui limite ses performances dans les activités de la vie quotidienne (Tinetti, 1990) – perte de confiance en ses propres capacités lors de certaines activités (« self-efficacy ») (Bandura, 1982) La peur de tomber • La peur de tomber est fréquente chez le sujet âgé – qu’il soit chuteur ou non – 3% 92 % – 50% après une fracture de la hanche (Visschedijk, 2010) • Principale peur rapportée par les personnes âgées (devant la peur de se faire cambrioler, de manquer d’argent…) (Howland, 1993) => il faut la rechercher : « Avez-vous peur de tomber ? » Evaluer la peur de tomber • Nombreuses échelles. Pas de consensus. – – – – – – Echelle dichotomique (Maki, 1991) Falls-Efficacy-Scale (FES) (Tinetti, 1990 ) FES-International (FES-I ) (Yardley, 2005) Short FES-I (Kempen, 2008) Activities-specific Balance Confidence scale (ABC) (Powell, 1995) Survey of Activities and Fear of Falling in the Elderly (SAFFE) (Lachman, 1998) • Evaluent des gradients de peur (« pas du tout/ un peu/ assez/ très inquiet ») lors de la réalisation d’activités de la vie quotidienne Short FES-I en version française 1. Vous habiller et vous déshabiller . Prendre une douche ou un bain 3. Vous lever d’une chaise ou vous asseoir 4. Monter ou descendre les escaliers 5. Atteindre quelque chose au-dessus de votre tête ou par terre 6. Descendre ou monter une pente 7. Sortir (par ex : service religieux, réunion de famille, rencontre d’une association) Pas du tout inquiet 1 Un peu inquiet 2 Assez inquiet 3 Très inquiet 4 1 1 1 1 1 1 1 1 2 2 2 2 2 2 2 2 3 3 3 3 3 3 3 3 4 4 4 4 4 4 4 4 Nous aimerions vous poser quelques questions qui ont pour but de déterminer si vous ressentez de l’inquiétude face à la possibilité de tomber. Répondez en pensant à la manière dont vous effectuez habituellement cette activité. Si actuellement vous ne faites pas cette activité, répondez à la question en imaginant votre degré d’inquiétude si vous réalisiez en réalité cette activité. Pour chacune des activités suivantes, mettez une croix dans la case qui correspond le plus à votre opinion et qui montre le degré d’inquiétude que vous ressentez face au fait de pouvoir tomber lors de la réalisation de cette activité. Kempen, Age Aging 2008 version française du Pr Chantal Piot-Ziegler Troubles de la marche d’origine psychogène • Marche du dépressif : parfois longueur de pas raccourci et un cycle de marche perturbé. • Marche hystérique – Troubles de la marche polymorphes, dépendants du contexte – Association à une sensation de fatigue ou d’épuisement majeur ou de multiples signes somatiques – pas d’analogie avec tout trouble organique de la marche connu – marche robotique, ou bondissante ou en draguant – début brutal, faisant suite à un choc psychologique – disparition du trouble, soit spontanée, soit par suggestion, traitement par placebo, ou prise en charge psychologique Plusieurs vidéos de troubles de la marche disponibles sur le site du collège des enseignants de neurologie http://www.cen-neurologie.fr/ Rubrique Vidéothèque / séméiologie analystique Les tests de marche Dispositifs d’analyse de la marche Intérêt de ces évaluations spécifiques Get Up & Go Test • • • • • • • Equilibre assis droit sur une chaise à dossier Transfert assis debout Equilibre debout EPREUVE COTEE DE 1 A 5 1 = pas d'instabilite Marche 3 mètres 5 = risque permanent de chute Demi-tour Score > 3 Tour de la chaise Transfert debout assis Timed up & go test • < 20 sec : bonne mobilité • < 14 sec : faible risque de chute • > 30 sec : dépendance pour la mobilité Podsiadlo D, J Am Geriatr Soc 1991 Shumway-Cook A, Phys Ther 2000 Beauchet O, JNHA, 2011 Test de Tinetti modifié Test de Tinetti modifié Interprétation : < 20 points : risque de chute très élevé 20-23 points : risque de chute élevé 24-27 points : risque de chute peu élevé 28 points : normal Les dispositifs spécifiques d’analyse de la marche • Le chronométrage du sujet sur une distance donnée : vitesse spontanée, vitesse maximale. • Les systèmes baropodométriques par capteurs plantaires (semelles embarquées dans les chaussures munies de nombreux capteurs) ⇒ caractériser des anomalies podologiques ⇒ orienter la confection d’orthèses plantaires. Les principaux dispositifs sont F-Scan®, Footscan® et Emed®. • Les systèmes filaires (Locomètre®/Walkmeter®) : l’avant ou l’arrière du pied du patient est relié par un fil à un enregistreur de mouvement pendant une dizaine de mètres de marche Le locomètre Le locomètre Les dispositifs spécifiques d’analyse de la marche • Les tapis ou piste de marche (GAIT-Rite®) : permettent l’analyse de l’ensemble des paramètres spatio-temporels du cycle de marche, y compris la largeur du pas. ⇒ tapis dans lequel sont disposés de très nombreux capteurs de force (mesure des pressions plantaires) • L’accéléromètre tri-axial : basée sur l’utilisation d’accéléromètres, pour détecter respectivement les accélérations linéaires, angulaires et les inclinaisons, en différents points du corps. • L’analyse optocinétique, ou 3D : dispositif d’analyse cinématique composé de 6 caméras infrarouges (Vicon®, Motion Analysis® et Elite®) L’analyse quantifiée de la marche Tapis GaitRite + Système à base de caméra(s) vidéo ± Système d’analyse du mouvement en 3 dimensions ± Plate-formes de forces ± Système d’enregistrement EMG Système Vicon Evaluation de la vitesse de marche • Standardisation du test de marche : – Distance = 4 mètres – Départ arrêté – Marche habituelle – Pas de conseil particulier • Cutoffs pour la vitesse de marche – > 1.0 m/s = vieillissement réussi – < 0.6 m/s prédictif d’un état de santé altéré et d’un déclin fonctionnel • La vitesse de marche = marqueur de fragilité • Analyse de 9 études de cohorte – 35 485 patients > 65 ans vivant à domicile - Suivi 9-21 ans • Réduction de la mortalité de 12% par 0,1 m/s Studenski et al, JAMA 2011 Risque d’événements péjoratifs et vitesse de marche Houles, Cahiers de l’année gérontologique 2010 Etude de la variabilité de la marche • Variabilité de la marche = Fluctuations d’un pas à l’autre • L’œil humain ne détecte pas les petites variations • Évaluation : Amplitude calculée à partir du coefficient de variation = (écart-type /moyenne) x 100 – Longueur du pas – vitesse de marche – cadence • Variabilité plus élevée chez les sujets âgés • Variabilité de la marche = marqueur du risque de chute Hausdorff JM, Hum Mov Sci 2007 Beauchet O, J Am Geriatr Soc 2003 Les tests en double tâche • Stop walking when talking test • Mesure de la vitesse de marche (10m) – En situation normale – Avec exécution d’une tâche manuelle (ex; port d’un verre) – Avec exécution d’une tâche « intellectuelle » (ex : compter à l’envers de 2 en 2 à partir de 30) – Avec une tâche manuelle et une tâche intellectuelle "Stops walking when talking" as a predictor of falls in elderly people. Démence n = 26 Dépression n = 25 ATCD d’AVC n = 20 Lundin-Olsson, Lancet, 1997 Lorsqu’un patient présente une modification de la marche ou des performances attentionnelles au cours d’une double tâche Prédiction du risque de chute : OR = 5.3 (95% CI, 3.1-9.1) Beauchet O et al. Eur J Neurol. 2009 Les paradigmes de double tâche Double tâche • Définition : Réaliser simultanément une tâche attentionnelle en marchant • Évaluation : Comparaison des performances entre les conditions de simple et double tâche Modifications des performances sous double tâche : • Interprétées comme des interférences dues à une compétition des besoins attentionnels requis pour chaque tâche • Dépendant principalement de la capacité à répartir correctement l’attention entre deux tâches (fonctions exécutives ++) Diapositive empruntée à O. Beauchet, SFGG 2012 Pashler H, Psychol Bull 1994 Démence et troubles de la marche • Prévalence des troubles de la marche – – – – – – Allan et al. JAGS 2005 90% : Démence parkinsonienne 79% : démence vasculaire 75% : DCL : Légère 40% / Modérée 87% / Sévère 100% 43% : Maladie de Parkinson 25% : Maladie d’Alzheimer : Légère : 0% / Modérée : 33% / Sévère : 50% 7% : Groupe contrôle • Un trouble de la marche oriente vers une démence non MA (RR=15) • Le type de troubles de la marche permet de différencier le type de démence non MA • Le risque de chute semble maximal lorsque la démence est à un stade modéré puis décroît (confinement ?) Démence et troubles de la marche • Les modifications de marche sous double tâche détectent la démence débutante Pettersson, Dement Geriatr Cogn Disord. 2005 • Chutes précoces dans certaines formes de démences • Les liens entre les troubles de la marche, la cognition et la survenue de chutes reposent sur les fonctions exécutives Beauchet, J Mot Behav 2005 Peut-on proposer une classification des troubles de la marche ? Classification de Nutt, Marsden et Thompson (1993) En fonction du niveau du contrôle moteur • Niveau supérieur : structures corticales, NGC, mésencéphale – Choix des réponses posturales et locomotrices en fonction de l'environnement , des motivations... – Perturbations multiples : organisation, initiation et coordination des réponses posturales et locomotrices • Niveau intermédiaire : atteintes des voies sensori-motrices ascendantes ou descendantes (ataxie cérébelleuse, hémiparésie) – Sélection appropriée des synergies, mais défaut d'exécution • Niveau inférieur : atteinte des systèmes sensoriels et musculosquelettiques – Réduction d'activité et incoordination des synergies posturales et locomotrices Nutt JG, Neurology 1993 Classification d’Alexander et Goldberg (2005) Cleve Clin J Med 2005 Basée sur le niveau de déficit sensitivo-moteur. • Niveau 1 « faible » – La marche ataxique sensitive (atteinte du système vestibulaire, des voies de la sensibilité profonde et des nerfs périphériques) : Démarche instable, talonnante – La marche douloureuse due à l’arthrose. Boiterie – La marche déficitaire périphérique due à une myopathie ou à une neuropathie. Démarche dandinante, claudication radiculaire du canal lombaire étroit, steppage unilatéral ou bilatéral (polyneuropathie) Classification d’Alexander et Goldberg (2005) • Niveau 2 « modéré » – Marche de l’hémiplégique et de l’hémiparétique. Spasticité et fauchage du membre inférieur. – Marche du paraplégique et du paraparétique. L’hypertonie pyramidale fixe en extension les membres inférieurs qui sont posés alternativement en avant par une inclinaison de rotation du tronc du côté opposé (c’est une démarche de gallinacé). – Marche parkinsonienne. Démarche à petit pas traînants avec rétropulsion, sans élargissement du polygone de sustentation, sans ballant des bras. Un retard à l’initiation, un demi-tour décomposé, des blocages et un piétinement sur place. – Marche ataxique cérébelleuse. Démarche ébrieuse, faite d’embardées. Station debout avec oscillations et élargissement du polygone de sustentation. Classification d’Alexander et Goldberg (2005) • Niveau 3 « élevé » – Marche sénile. Peur de tomber. Démarche précautionneuse, lente, avec pas traînants, ballant des bras diminué, tronc en flexion et légère augmentation du polygone de sustentation. – Marche frontale. Difficulté à initier le mouvement, petits pas traînants, polygone de sustentation élargi. Les membres inférieurs s’entrecroisent avec piétinement sur place. • Autres types de marche – Marche non étiquetée – Marche normale – Marche impossible • Un trouble de la marche peut être la conséquence d’un déficit à plusieurs niveaux. La plupart des psychotropes, notamment par leur action sédative, participent également à l’altération des fonctions sensitivo-motrices. Classification proposée par Azulay • Classification à partir du trouble fonctionnel principal ⇒ Permet d’orienter la prise en charge thérapeutique Azulay JP, Rev Neurol (Paris) 2010 Classification de Snijders Snijders et al, Lancet Neurol 2007 Démarche diagnostique en 3 étapes Données cliniques Confirmation diagnostique Signes et symptômes Tests cliniques associés Ex : déséquilibre lors des Ex: hypotension manœuvres de déstabilisation orthostatique Syndrome clinique Ex : marche parkinsonienne (suspicion de syndrome parkinsonien atypique) Caractéristiques de la marche Ex : marche à petits pas Investigations complémentaires Ex: IRM, biologie, EMG… Test thérapeutique éventuel Ex : L-dopa, arrêt BZD Evolution Ex : apparition d’un syndrome cérébelleux Diagnostique probable Ex : atrophie multisystématisée Autopsie Preuve histopathologique Confirmation diagnostique Ex : atrophie olivo-ponto-cérébelleuse Traduit et adapté de Snijders, Lancet Neurol 2007, Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 Démarche diagnostique en 3 étapes Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 1ère étape : Description de la marche Signes et symptômes associés 2ème étape : Diagnostic syndromique Principes thérapeutiques Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 2ème étape : Diagnostic syndromique Principes thérapeutiques Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 3ème étape : autopsie Limites de ces classifications • Association fréquente d’atteintes à plusieurs niveaux • Ne prennent pas en compte – Les maladies cardio-vasculaires – Le déconditionnement à l’effort • Ne prennent pas en compte la iatrogénie • « Rigidifient » a priori le diagnostic • Ne prennent pas ou peu en compte les aspects cognitivoémotionnels Kemoun G, SFGG 2012 Quelle prise en charge thérapeutique devant un trouble de la marche ? Prise en charge thérapeutique • Dépend directement des problèmes identifiés ⇒ Importance de l’étape diagnostique ⇒ Traitement des maladies sous-jacentes • Supprimer ou limiter les facteurs aggravants : alcool, iatrogénie, douleur… • S’assurer d’un bon chaussage • Kinésithérapie – – – – – Tenir compte des comorbidités, du déconditionnement Renforcement musculaire Travail proprioceptif Travail de la posture et de l’équilibre Travail de la marche ± aides techniques • Prise en charge comportementale : réassurance PIEDS MAL CHAUSSÉS, CHUTES ASSURÉES ! UN BON CHAUSSAGE Possède un avant pied large Maintient le pied, Est à la bonne pointure Possède des talons de 3 à 4 cm, à base large Tient le talon Est muni de semelle antidérapante, En cas de problème, n ’hésitez pas à en parler au kinésithérapeute du service Prise en charge - particularités • Développement d’activités physiques spécifiques basées sur le rythme pour améliorer la marche et diminuer le risque de chutes – Exemple : rythmique Jacques Dalcroz Trombetti A, Rev Med Suisse 2011 Chez le patient dément • prise en charge pluridisciplinaire • personnalisation, ciblage des objectifs • association d’exercices stimulant force et équilibre • intégration de tâches sollicitant attention, mémoire immédiate, mémoire de travail et praxies, • travail en double tâche Manckoundia P, Ann Readapt Med Phys 2008 Ce qu’il faut retenir • Intérêts de la double tâche dans l’évaluation des troubles de la marche du sujet âgé ⇒ Détection simple et efficiente du risque de chutes ⇒ Les modifications de marche sous double tâche détectent la démence débutante (troubles des fonctions exécutives) … • Importance de l’approche diagnostique devant un trouble de la marche 1. Description, signes associés 2. Caractérisation 3. Prise en charge thérapeutique 4. Réévalutation L’expérience lilloise de l’évaluation multidisciplinaire de la chute L’expérience lilloise • • • • À l’origine : 1 gériatre, 1 neurologue, 1 rééducateur + ophtalmo, kiné, ergo, diététicienne, assistante sociale, podologue 1 journée d’hospitalisation A l’issue de la consultation – Information du patient / de(s) l’aidant(s) – Rééducation spécifique – Courrier au MT indiquant les facteurs de risque de chute identifiés et reprenant les recommandations • Propositions d’investigation(s) complémentaire(s) • Modifications environnementales • Modifications thérapeutiques Le profil des patients Caractéristiques Age Moyen > 85 ans Sexe (F/H) Patient vivant en institution Patient vivant seul ADL (moyenne / médiane) Utilisation d’une aide technique de marche Diabète Hypertension ensemble des patients (n=641) (%) 80,6 ans 28% 2,7/1 25 % 57 % 5,0 / 5,5 42 % 17 % 54 % Prévalence des chutes dans les 6 mois précédents la consultation Facteurs de risque de chute Nb chutes dans les 6 mois (médiane) Séjour au sol > 1 heure Peur de tomber Hypotension orthostatique Maladie de Parkinson Démence MMS moyen Dépression Antécédent de fracture Nb médicaments >4 Prise d’au moins un psychotrope Get up and go > 20 secondes Au moins un facteur environnemental Trouble proprioceptif Trouble de la marche Trouble de l’équilibre Déficit visuel 3 ± 3,7 30 % 79 % 22 % 9% 47 % 24,1 22 % 40 % 69 % 55 % 58 % 77 % 71 % 87 % 66 % 45 % Anomalies de l’examen neurologique retenues comme facteurs de risque de chutes • Des troubles de la sensibilité profonde (diapason) (59%) • Des troubles cognitifs (43 %) • Des anomalies du tonus musculaire ou une diminution franche de la force musculaire (25%) • Un syndrome cérébelleux (17%) • Une akinésie (17%) • Des troubles de la sensibilité superficielle (17%) • Un syndrome parkinsonien (7 %) • 85% des symptômes, syndromes ou maladies observés n’étaient pas connus au moment de l’évaluation multidisciplinaire A Guillochon et al, Rev Neurol (Paris) 2009 Troubles de la marche observés chez les chuteurs adressés en consultation de la chute à Lille selon la classification d’Alexander et Goldberg (2005). Prévalence (n = 266) (%) Marche sénile 70 (26.3 %) Marche douloureuse et myopathique 58 (21.8 %) Marche ataxique sensitive 52 (19.5 %) Marche parkinsonienne 45 (16.9 %) Marche normale 27 (10.2 %) Marche hémiplégique et hémiparétique 8 (3 %) Marche ataxique cérébelleuse 5 (1.9 %) Marche frontale 4 (1.5 %) Marche non étiquetée 24 (9 %) Marche impossible 8 (3 %) Guillochon, Rev Neurol (Paris) 2010 Les propositions faites à l’issue de l’évaluation multidisciplinaire n = 135 Puisieux F et al, Am J Phys Med Rehabil 2001 Incidence des chutes dans les 6 mois précédents la consultation Incidence des chutes dans les 6 mois après la première consultation