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Corpus Médical– Faculté de Médecine de Grenoble
Dysphagies
Professeur Jacques FOURNET
Avril 2003
Pré-Requis :
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Physiologie de déglutition
Motricité œsophagienne
Sémiologie de la dysphagie
Résumé :
La dysphagie est un signe clinique d'expression majeur de la pathologie de la déglutition
et de l'œsophage. Le symptôme a une valeur sémiologique forte : il 'agit d'un signe
clinique d'alarme nécessaire à une investigation ORL ou oeso-gastrique surtout, et parfois
neurologique.
Il doit faire suspecter une lésion organique : obstacle ou trouble de la motricité.
Mots-clés :
Cancer de l'œsophage - Sténose peptique de l'œsophage - Troubles de la déglutition Trouble de la motricité œsophagienne.
1. Introduction
La dysphagie est un signe fonctionnel qui a une forte valeur discriminative et oriente vers une
pathologie organique. La dysphagie est un symptôme grave :
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elle peut entraîner rapidement dénutrition, voire déshydratation
elle peut être grave par l'affection sous-jacente qui la provoque (ex : sténose peptique,
voire cancer)
elle peut occasionner par régurgitation du contenu œsophagien : toux nocturne,
infection broncho-pulmonaire (enfants et personnes âgées notamment).
2. Sémiologie de la dysphagie
Gêne à la progression de la bouchée alimentaire avec sensation d'arrêt dans l'œsophage ou au
creux épigastrique. Il faut préciser le siège de l'arrêt (cervical, rétrosternal ou épigastrique).
2.1. La dysphagie peut être
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incomplète (sujet pouvant s'alimenter) ou totale (sujet incapable de s'alimenter)
elle est habituellement d'installation progressive apparaissant d'abord pour les aliments
solides, puis pâteux, puis liquides. Elle peut être brutale (corps étranger)
elle peut être sélective habituellement pour les solides, plus rarement pour les liquides
(troubles moteurs à évoquer)
elle peut être intermittente ou permanente
elle peut être associée à des douleurs thoraciques à la déglutition (odynophagie) et à
des régurgitations du contenu œsophagien.
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2.2. La dysphagie doit être distinguée
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de l'anorexie : le sujet inappétent peut traduire son trouble par la formule "ça ne passe
pas"
sensation de "boule dans la gorge" des sujets anxieux : cette sensation de gêne est
indépendante de toute déglutition.
2.3. L'examen clinique est souvent négatif
On recherchera une tumeur cervicale, une tumeur épigastrique, des ganglions métastatiques
sus-claviculaires (ganglions de Troisier à gauche).
2.4. Au moindre doute : pratiquer des explorations
De toute façon au moindre doute, devant une suspicion de dysphagie même fugace mais
récidivante, il faut proposer la pratique d'explorations : la dysphagie est corrélée de façon
quasi constante avec une lésion organique +++ .
3. Faits pathologiques
On englobe sous le terme de dysphagie des FAITS PATHOLOGIQUES très divers où l'on
peut distinguer deux types de situation :
• Les dysphagies oropharyngées
• Les dysphagies œsophagiennes.
3.1. Dysphagies oropharyngées
3.1.1. Les lésions inflammatoires ou tumorales oropharyngées
Ces lésions peuvent provoquer ces signes, de même des séquelles de radiothérapie ou
compressions extrinsèques. Le traitement se confond avec celui de la lésion causale (examen
ORL).
3.1.2. Dans les autres cas la dysphagie est en relation avec
une maladie neurologique ou musculaire.
L'atteinte neurologique intéressant la partie basse du tronc cérébral ou les dernières paires
crâniennes. Les dysphagies hautes, d'origine neurologique, sont généralement faciles à
reconnaître : électives pour les liquides, elles s'accompagnent de régurgitations dans les fosses
nasales et de toux de déglutition (par fausse route). Souvent la dysphagie vient s'ajouter à un
tableau neurologique évident (ramollissements cérébraux, sclérose latérale amyotrophique,
poliomyélite antérieure aiguë, polyradiculonévrite). Les troubles de la déglutition aggravent le
pronostic immédiat par le risque de fausse route. Dans les formes graves, le seul moyen
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d'éviter les bronchopneumopathies d'inhalation est le recours à l'alimentation entérale par
sonde de gastrostomie (mise en place par méthode endoscopique actuellement).
Parfois la dysphagie oropharyngée est apparemment isolée, éventuellement révélatrice d'une
affection neurologique débutante ++.
Le déficit de la motricité d'origine neurologique a pu être nettement déterminé dans certaines
situations. Il possède par lui-même une certaine spécificité étiologique par la clinique :
• Apraxie bucco-lingo-faciale
• Amyptrophie - fasciculations, dyskinésie
• Déficit moteur, sensitif ou sensoriel
• Déficit au niveau des paires crâniennes (V, VII, IX, X, XI, XII)
• Ophtalmoplégie – ptosis
• Etude de la phonation = dysarthrie, dysphonie
• Examen neurologique général
Tableau : exemples de troubles moteurs responsables de dysphagies oro-pharyngées
(J. Fournet)
3.1.3. Diagnostic étiologique
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L’orientation doit être basée sur un examen clinique rigoureux
Il permet d’orienter d’emblée (avec explorations adaptées) :
o sur une affection neurologique
o sur une affection musculaire
o un trouble iatrogène (neuroleptique par exemple)
o un examen ORL
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En l’absence d’orientation évidente :
o vidéoradiographie de la déglutition +++ : elle permet d'étudier les durées de
déglutition, d'éliminer un diverticule de Zenker développé à partir de la paroi
postérieure du pharynx parfois volumineux.
o examen ORL
o endoscopie digestive
o manométrie œsophagienne :
ƒ étude du sphincter supérieur de l'œsophage.
ƒ étude de la motricité œsophagienne
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3.2. Dysphagie oesophagienne
C'est une gêne à la progression de la bouchée dans l'œsophage ou au creux épigastrique. Il est
utile de faire préciser le siège de l'arrêt, la nature des aliments déclenchants.
3.2.1. L'interrogatoire
Il est nécessaire pour établir l'allure évolutive de la dysphagie et pour la replacer
éventuellement dans un contexte pathologique : habitudes (tabac ou boissons alcoolisées) ;
symptômes de reflux gastro-œsophagien ; possibilité d'une maladie générale (sclérodermie).
Des particularités sémiologiques sont parfois observées dans les maladies de la motricité
œsophagienne : déclenchement paradoxal de la dysphagie par certains aliments liquides,
majoration ou sédation nette de la dysphagie par les boissons froides.
3.2.2. Les investigations complémentaires : Elles sont
toujours nécessaires
3.2.2.1. La radiologie pulmonaire (face - profils)
Elle permet d'étudier le médiastin postérieur et de rechercher une compression extrinsèque.
3.2.2.2. L'endoscopie : examen principal et essentiel au
diagnostic
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Parfois l'existence d'une sténose infranchissable par l'appareil standard rend nécessaire
l'usage d'un appareil de faible calibre de type pédiatrique (diamètre = 7 mm). On peut
ainsi étudier les parois de la zone sténosée et examiner l'estomac.
En cas de sténose œsophagienne infranchissable, la pratique des biopsies sous
endoscopie n'est pas toujours satisfaisante alors qu'elles sont faites, bien entendu,
systématiquement dans tous les cas. Les prises intéressent la paroi située au-dessus de
la lésion, à moins qu'elles ne soient faites à l'aveugle dans la sténose. Le
cytodiagnostic par brossage, à travers la sténose est alors d'un grand intérêt. Il est
également aussi possible d'effectuer des biopsies secondairement après dilatation
œsophagienne conduite sous contrôle radio-endoscopique.
3.2.2.3. Manométrie œsophagienne
Elle permet l'enregistrement continu simultanément en plusieurs points de l'œsophage.
• On enregistre à la partie supérieure la pression du sphincter supérieur de l'œsophage et
sa relaxation lors de la déglutition.
• En l'absence d'anomalie de la motricité œsophagienne, on enregistre dans le corps de
l'œsophage une pression de repos légèrement inférieure à la pression atmosphérique.
La déglutition est suivie d'une onde positive (contraction) qui se propage
régulièrement le long du corps de l'œsophage (péristaltisme primaire).
• Le sphincter inférieur de l'œsophage est situé à la jonction oesogastrique. Il se
caractérise par une zone d'élévation permanente de la pression de repos (tonus de
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base). Chaque déglutition est suivie d'une relaxation du sphincter ; celle-ci intervient
au moment où la contraction œsophagienne atteint la partie inférieure du corps de
l'œsophage.
Tableau : mise en oeuvre des investigations en cas de dysphagie oesophagienne
(J. Fournet)
3.2.2.4. Tomodensitométrie thoracique
Elle permet par les coupes axiales transverses :
• l'étude des compressions extrinsèques
• l'extension pariétale médiastinale et ganglionnaire des lésions néoplasiques de
l'œsophage.
3.2.2.5. L'écho-endoscopie
Ne concerne que les petites tumeurs pour apprécier leurs extensions et pour caractériser les
petites lésions.
3.3. Le diagnostic étiologique
La mise en œuvre des investigations est commandée par la recherche d'une lésion pariétale
oesocardiale sténosante ou obstruant la lumière. Les deux grandes causes sont le cancer de
l'œsophage et la sténose peptique.
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Tableau : Principales causes de dysphagie oesophagienne
(J. Fournet)
Tableau : Principales données fournies par la manométrie œsophagienne
(J. Fournet)
Les résultats de la manométrie doivent être confrontés aux données cliniques, radiologiques et
endoscopiques.
Malgré l'affinement des méthodes d'investigation, certaines dysphagies ne peuvent être
expliquées, ni par une lésion pariétale, ni par un trouble patent de la motricité. C'est le cas des
dysphagies accompagnant les états d'anxiété (œsophage "hyper sensible"). Le malade se plaint
d'une sensation de blocage œsophagien dont l'importance varie avec celle des troubles
psychiques.
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