Séries Quatrième partie Séries de Fourier 1 Séries trigonométriques P Définition. On appelle série trigonométrique toute série d’applications fn pour laquelle il existe deux suites de complexes (an )n∈N et (bn )n∈N∗ telles que, pour n = 0, a0 f : R −→ C f0 est constante et égale à , et pour n ≥ 1, n . t 7−→ an cos(nt) + bn sin(nt) 2 Par abus de notations, une telle série trigonométrique sera notée (R) a0 X + (an cos(nt) + bn sin(nt)). 2 n≥1 Propriété. Une série d’applications est une série trigonométrique si et seulement si elle est de la forme X c + (cn eint + c−n e−int ), 0 (C) n≥1 ou (cn )n∈Z est une famille de complexes. La formule (R) est appelée la notation réelle d’une série trigonométrique et la formule (C) est appelée la notation complexe. On passe d’une écriture à l’autre à l’aide des formules suivantes : ∀n ∈ N ∀n ∈ N an − ibn , 2 an = cn + c−n , cn = an + ibn , 2 bn = i(cn − c−n ), c−n = en convenant que b0 = 0. Démonstration. a0 X • Considérons la série trigonométrique + (an cos(nt) + bn sin(nt)). 2 n≥1 an − ibn int an + ibn −int e + e . Soient n ≥ 1 et t ∈ R. an cos(nt) + bn sin(nt) = 2 2 an − ibn an + ibn Ainsi, en posant cn = et c−n = , 2 2 1 Séries 2 Coefficients de Fourier on a ∀n ∈ N∗ ∀t ∈ R an cos(nt) + bn sin(nt) = cn eint + c−n e−int . a0 . Ainsi la série trigonométrique s’écrit aussi De plus, pour n = 0, on posera c0 = 2 X c0 + (cn eint + c−n e−int ). n≥1 • Réciproquement, considérons une série d’applications de la forme X int c0 + (cn e + c−n e−int ). n≥1 Soient n ≥ 1 et t ∈ R. cn eint + c−n e−int = (cn + c−n ) cos(nt) + i(cn − c−n ) sin(nt). On parvient donc à conclure en posant a0 = 2c0 . 2 Coefficients de Fourier Notation. C2π désigne l’ensemble des applications continues et 2π-périodiques de R dans C. pm On notera C2π l’ensemble des applications continues par morceaux et 2π-périodiques de R dans C. pm Propriété. C2π et C2π sont des C-espaces vectoriels . Notation. Pour toute la suite du chapitre 2), on fixe une application f . pm Sauf indication du contraire, on suppose que f ∈ C2π . Z Définition.X Soit (cn )X n∈Z ∈ C . On dit que la famille (cn ) est sommable si et seulement si les séries cn et c−n sont absolument convergentes. +∞ +∞ X X X Dans ce cas, on note cn = cn + c−n . n∈Z n=0 n=1 pm ∈ C2π Remarque. Informellement, si f est une application développable en série Z trigonométrique, X c’est-à-dire s’il existe une famille (cn )n∈Z ∈ C telle que, pour tout t ∈ R, f (t) = cn eint , alors, pour tout q ∈ Z, (sans chercher à justifier l’interversion) n∈Z Z 2π X 1 Z 2π X 1 −iqt f (t)e dt = cn ei(n−q)t dt = cn δn,q = cq , donc, toujours infor2π 0 2π 0 n∈Z n∈Z mellement), si l’on veut développer une application 2π-périodique sousZ la forme d’une 2π X 1 somme de série trigométrique t 7−→ cn eint , on doit prendre cn = f (t)e−int dt. 2π 0 n∈Z Définition. On appelle coefficients (exponentiels) de Fourier de f les Z 2π 1 f (t)e−int dt, cn (f ) = 2π 0 où n ∈ Z, et coefficients (trigonométriques) de Fourier de f les Z Z 1 2π 1 2π an (f ) = f (t) cos(nt)dt et bn (f ) = f (t) sin(nt)dt, π 0 π 0 c Eric Merle 2 MP Fénelon Séries 2 Coefficients de Fourier où n ∈ N. Remarque. f étant 2π-périodique, on peut remplacer dans les formules précédentes les intégrales entre 0 et 2π par les intégrales des mêmes fonctions sur un intervalle quelconque de longueur 2π. Notation. Pour tout n ∈ Z, on notera parfois f˙(n) = cn (f ). On note f˙ = (f˙(n))n∈Z . pm F : C2π −→ CZ Propriété. L’application est une application linéaire. g 7−→ ġ Z π 1 |f (t)|dt , Propriété. La suite f˙ est bornée, et, en notant kf k1 = 2π −π kf˙k∞ ≤ kf k1 . Démonstration. Laissée en exercice. Remarque. Dans la propriété précédente, kf k1 est une notation, mais k.k1 n’est pas pm une norme sur C2π . Z π 1 Propriété. Pour tout n ∈ Z, cn (f ) = f (t)eint dt = c−n (f ). 2π −π En particulier, si f est à valeurs réelles, pour tout n ∈ Z, cn (f ) = c−n (f ). Propriété. Pour toutZ n ∈ Z, Z π π 1 1 −int cn (t 7−→ f (−t)) = f (−t)e dt = f (u)einu du = c−n (f ). 2π −π 2π −π En particulier, si f est paire, pour tout n ∈ Z, cn (f ) = c−n (f ), et si f est impaire, pour tout n ∈ Z, cn (f ) = −c−n (f ). Effet d’une Pour tout n ∈ Z, Z π translation. Soit a ∈ZR.π+a 1 1 cn (t 7−→ f (t + a)) = f (t + a)e−int dt = f (u)e−in(u−a) du = eina cn (f ). 2π −π 2π −π+a Propriété. On dispose des relations suivantes : an (f ) − ibn (f ) an (f ) + ibn (f ) ∀n ∈ N cn (f ) = , c−n (f ) = , 2 2 ∀n ∈ N an (f ) = cn (f ) + c−n (f ), bn (f ) = i(cn (f ) − c−n (f )), Propriété. Propriété. 2 Si f est paire, pour tout n ∈ N, an (f ) = π Z Si f est impaire, pour tout n ∈ N, bn (f ) = π f (t) cos(nt)dt et bn (f ) = 0. 0Z 2 π π f (t) sin(nt)dt et an (f ) = 0. 0 Lemme de Riemann-Lebesgue. Soient (a, b) ∈ R2 avec a < b et f : [a, b] −→ C une application continue par morceaux. Alors Z b f (t)eint dt −→ 0. n→+∞ a c Eric Merle 3 MP Fénelon Séries 2 Coefficients de Fourier Démonstration. Au tableau Remarque. La démonstration précédente montre également que Z b f (t)eiλt dt −→ 0. a λ→+∞ λ∈R Corollaire. Les suites (cn (f ))n∈N , (c−n (f ))n∈N , (an (f ))n∈N , et (bn (f ))n∈N convergent vers 0. Démonstration. Soit n ∈ N. Z 2π 1 c−n (f ) = f (t)eint −→ 0 d’après le lemme de Riemann-Lebesgue. n→+∞ 2πZ 0 2π 1 cn (f ) = f (t)eint −→ 0, donc cn (f ) −→ 0. n→+∞ n→+∞ 2π 0 an (f ) = cn (f ) + c−n (f ) −→ 0 et bn (f ) = i(cn (f ) − c−n (f )) −→ 0. n→+∞ n→+∞ Propriété. On suppose que f est continue sur R, et de classe C 1 par morceaux. Alors ∀n ∈ Z cn (f ′ ) = incn (f ). 1 En particulier, cn (f ) = o( ) lorsque n tend vers ±∞. n Démonstration. Soit n ∈ Z. R 2π ′ 1 −int cn (f ′ ) = 2π dt 0 f (t)e R 2π 1 −int = 2π [f (t)e−int ]2π f (t)ine dt + 0 0 = incn (f ). Cette intégration par parties est licite car les applications f et t 7−→ e−int sont continues sur [0, 2π] et sont de classe C 1 par morceaux. Corollaire. Soit k ∈ N∗ . On suppose que f est de classe C k−1 sur R, et de classe C k par morceaux. Alors ∀n ∈ Z cn (f (k) ) = (in)k cn (f ). En particulier, cn (f ) = o( 1 ) . nk Démonstration. Par récurrence sur k. Remarque. A la fin du calcul des coefficients de Fourier d’une application, il est bon de vérifier que le résultat obtenu a un ordre de grandeur qui est en accord avec ce corollaire. c Eric Merle 4 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien Remarque. On peut établir des formules analogues pour les coefficients de Fourier trigonométriques. Définition. On appelle série de Fourier de f la série trigonométrique suivante : X a0 (f ) X + (an (f ) cos(nt) + bn (f ) sin(nt)) = c0 (f ) + (cn (f )eint + c−n (f )e−int ). 2 n≥1 n≥1 Lorsque ∀t ∈ D f (t) = c0 (f ) + +∞ X (cn (f )eint + c−n (f )e−int ), n=1 où D est un domaine inclus dans R, on dit que f est développable en série de Fourier sur D. Remarque. Le théorème de Dirichlet que l’on énoncera plus loin montre que si f est suffisamment régulière, elle est développable en série de Fourier sur R. Notation. Pour p ∈ N et t ∈ R, on note Sp (f )(t) = ème p X cn (f )eint . On l’appelle la n=−p p somme partielle de la série de Fourier de f . La série de Fourier de f converge en t si et seulement si, à t fixé, la suite (Sp (f )(t))p∈N admet une limite, et dans ce cas, cette limite est égale à la somme de la série de Fourier de f en t. 3 Point de vue hermitien < ., . >: 2 C2π −→ C Z 2π 1 est un espace f (t)g(t)dt (f, g) 7−→ < f, g >= 2π 0 préhilbertien complexe. On notera k.k la norme hermitienne associée. C2π , muni de Notation. Pour p ∈ Z, posons ep : R −→ C . t 7−→ eipt Propriété. (ep )p∈Z est une famille orthonormale de C2π . Démonstration. Z 2π 1 2 ei(q−p)t dt = δp,q . Soit (p, q) ∈ Z . < ep , eq >= 2π 0 Propriété. Pour tout f ∈ C2π et tout p ∈ Z, cp (f ) =< ep , f >. Notation. Pour p ∈ N, posons e′′ : R −→ R e′p : R −→ R . et p t − 7 → sin(pt) t 7−→ cos(pt) Propriété. La réunion des familles (e′p )p∈N et (e′′p )p∈N∗ est une famille libre et orthogonale de C2π . c Eric Merle 5 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien Démonstration. Les vecteurs de cette famille étant tous non nuls, il suffit d’établir que cette famille est orthogonale. ⋄ Soit (p, q) ∈ NZ2 avec p 6= q. Z 2π 2π 1 1 ′ ′ cos(pt) cos(qt)dt = (cos((p + q)t) + cos((p − q)t))dt, or < ep , eq >= 2π 0 4π 0 h 1 sin((p + q)t) sin((p − q)t) i2π ′ ′ p + q ≥ 1 et p − q 6= 0, donc < ep , eq >= + = 0. 4π p+q p−q 0 ∗2 avec p 6= q. ⋄ Soit (p, q) ∈ NZ Z 2π 2π 1 1 ′′ ′′ sin(pt) sin(qt)dt = (cos((p − q)t) − cos((p + q)t))dt, or < ep , eq >= 2π 0 4π 0 1 h sin((p − q)t) sin((p + q)t) i2π p + q ≥ 1 et p − q 6= 0, donc < e′′p , e′′q >= − = 0. 4π p−q p+q 0 ∗ ⋄ Soit (p, q) ∈ N Z 2π× N. Z 2π 1 1 ′′ ′ sin(pt) cos(qt)dt = (sin((p + q)t) + sin((p − q)t))dt. < ep , eq >= 2π 0 4π 0 1 h − cos((p + q)t) cos((p − q)t) i2π Si p 6= q, alors < e′′p , e′q >= − = 0. 4π p+q p−q 0 1 h − cos((p + q)t) i2π Enfin, si p = q, < e′′p , e′q >= = 0. 4π p+q 0 ∗ ⋄ Cependant, cette famille n’est pas orthonormale. √ En effet, si p ∈ N , Z 2π 1 1 1 + cos(2pt) 2 ke′p k2 = dt = , donc ke′p k = pour p ≥ 1 et ke0 k = 1. 2π 0 2 2 2 √ 2 ∗ ′′ De plus, on calcule que, pour tout p ∈ N , kep k = . 2 Notation. On pose P = V ect(ep )p∈Z = V ect {e′p /p ∈ N} ∪ {e′′p /p ∈ N∗ } . Les éléments de P sont appelés les polynômes trigonométriques. Pour N ∈ N, on pose PN = V ect(ep )−N ≤p≤N = V ect(e′0 , . . . , e′N , e′′1 , . . . , e′′N ) N X ={ cp ep /(cp )−N ≤p≤N ∈ C2N +1 }. p=−N Les éléments de PN sont appelés les polynômes trigonométriques de degré inférieur ou +∞ [ égal à N . On a P = PN . N =0 Propriété. Soit N ∈ N et f ∈ C2π . La projection orthogonale de f sur PN est pN (f ) : R −→ C t 7−→ c0 (f ) + N X (cn (f )eint + c−n (f )e−int ) = SN (f )(t). n=1 En particulier, parmi les polynômes trigonométriques de degré inférieur à N , SN (f ) est le plus proche de f (au sens de la norme hermitienne), c Eric Merle 6 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien et c’est le seul. On sait alors que kf k2 = kSN (f )k2 + d(f, PN )2 . On dispose aussi de l’inégalité de Bessel : N X n=−N |cn (f )|2 ≤ kf k2 . Démonstration. En effet, pN (f ) = N X < ep , f > ep = p=−N N X cp (f )ep . p=−N Corollaire. Si f ∈ C2π , la famille (cn (f ))n∈Z est de carré sommable. Ainsi, c’est un élément de l2 (Z). Démonstration. C’est une conséquence de l’inégalité de Bessel. Second théorème de Stone-Weierstrass. Si f ∈ C2π , il existe une suite (fn )n∈N de polynômes trigonométriques qui converge uniformément vers f sur R. Démonstration. • Soit n ∈ N. On appelle noyau de Dirichlet d’ordre n l’application Dn : R −→ C t 7−→ Dn (t) = Soit t ∈ R \ 2πZ. Dn (t) = e −int 2n X e ikt =e −int 1 k=0 it(n+ 21 ) sin( 2n+1 t) e 2 Donc Dn (t) = e−int . it sin( 2t ) e2 Ainsi, (1) ∀t ∈ R sin( 2n+1 t) = Dn (t) sin( 2t ). 2 c Eric Merle 7 n X eikt . k=−n − e(2n+1)it , car eit 6= 1. it 1−e MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien 60 y 50 40 Tracé de Dn avec n = 30 30 20 10 x −3 −2 −1 1 2 −10 n X ikt0 n Z X π • Soient t0 ∈ R et n ∈ N. 2πSn (f )(t0 ) = 2πck (f )e = f (t)eik(t0 −t) dt, k=−n k=−n −π Z π ainsi 2πSn (f )(t0 ) = f (t)Dn (t0 − t)dt. Posons t = t0 − u, ce qui est possible car −π u 7−→ t0 − u estZ une application de classe C 1 strictement monotone. On obtient t0 −π 2πSn (f )(t0 ) = f (t0 − u)Dn (u)(−du), mais f et Dn sont 2π-périodiques, donc t0 +π (2) 2πSn (f )(t0 ) = Z π −π f (t0 − u)Dn (u)du. C’est en référence à cette formule que Dn est appelé un noyau. • Soit n ∈ N. On appelle noyau de Fejér d’ordre n l’application Fn : R −→ C n t 7−→ Fn (t) = 1 X Dk (t). n + 1 k=0 Soit t ∈ R \ 2πZ. D’après la formule (1), c Eric Merle 8 MP Fénelon Séries n X 2k + 1 1 sin t = Im Fn (t) = 2 (n + 1) sin 2t k=0 it(n+1) 1 i 2t 1 − e e = Im it 1− (n + 1) sin 2t e t = Im (n+1)1 sin t ei 2 e 2 sin 2 n+1 t 2 it n+1 2 sin t n+1 t 2 sin ei 2 3 Point de vue hermitien ! n X 2k+1 1 ei 2 t (n + 1) sin 2t k=0 t 2 . (n + 1) sin2 2t • Soit α ∈]0, π[. Notons Iα = [−π, π] \ [−α, α]. 1 Soit n ∈ N. Pour tout t ∈ Iα , |Fn (t)| ≤ , (n + 1) sin2 α2 1 CVU −→ 0, ce qui montre que Fn −→ 0. donc sup |Fn (t)| ≤ 2 α n→+∞ Iα (n + 1) sin t∈Iα 2 n→+∞ = n 1 X Sk (f ). Ainsi, σn (f ) est la moyenne de • Pour tout n ∈ N, posons σn (f ) = n + 1 k=0 Césaro de la suite des sommes partielles de la série de Fourier de f . CVU Nous allons montrer que σn (f ) −→ f , ce qui prouve le théorème, car, pour tout R n→+∞ n ∈ N, σn (f ) ∈ P. • Soient n ∈ ZN et t ∈ [−π, π]. D’après la formule (2), π 2πσn (f )(t) = −π f (t − u)Fn (u)du. Pour l’application constamment égale à 1, que l’on note encore 1, cette dernière formule Z π n 1 X Fn (u)du = 2πσn ( 1)(t0 ). Or, σn ( 1) = montre que Sk ( 1), et Sk ( 1) = 1 n + 1 k=0 −π n 1 X 1= 1 car Sk ( 1) est la projection de 1 sur Pk et 1 ∈ Pk . Ainsi, σn ( 1) = n + 1 k=0 Z π et Fn (u)du = 2π. Ainsi, −π Z π Z π 2π|σn (f )(t) − f (t)| = |f (t − u) − f (t)|Fn (u)du. (f (t − u) − f (t))Fn (u)du ≤ −π −π c Eric Merle 9 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien 30 y 25 20 Tracé de Fn avec n = 30 15 10 5 x −3 −2 −1 1 2 • Fixons α ∈]0, π[ et découpons cette intégrale selon les intervalles [−π, −α], [−α, α] et [α, π]. f étant supposée continue sur [−π, π], elle est bornée, donc il existe M > 0 tel que, pour tout u ∈Z [−π, π], |f (u)| ≤ M Z . Ainsi, Z −α 2π|σn (f )(t)−f (t)| ≤ π 2M Fn (u)du+ −π α 2M Fn (u)du+ α −α |f (t−u)−f (t)|Fn (u)du. Soit ε > 0. f est continue, donc d’après le théorème de Heine, elle est uniformément continue sur le compact [−π, π]. Ainsi, il existe α ∈]0, π[ tel que, pour tout (x, y) ∈ ε [−π, π]2 vérifiant |x − y| ≤ α, |f (x) − f (y)| ≤ . 2 Soit t ∈ [−π, π]. D’après les inégalités ci-dessus, Z α ε 2π|σn (f )(t) − f (t)| ≤ 4M π sup Fn (u) + Fn (u)du. u∈Iα −α 2 CVU Or Fn −→ 0, donc il existe N ∈ N, tel que, Iα n→+∞ ε . Soit n ≥ N . 4M Z ε ε π Pour tout t ∈ [−π, π], 2π|σn (f )(t) − f (t)| ≤ 4M π + Fn (u)du ≤ 2πε. 4M 2 −π pour tout (n, u) ∈ N × Iα , si n ≥ N , Fn (u) ≤ Remarque. Les deux premiers points de cette démonstration restent valables lorsque pm f ∈ C2π . Ceci servira pour la démonstration du théorème de Dirichlet. Théorème. P est dense dans C2π (pour la norme hermitienne). c Eric Merle 10 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien Démonstration. La convergence uniforme implique la convergence en moyenne quadratique sur l’intervalle borné [−π, π]. Corollaire. ∀f ∈ C2π k.k SN (f ) −→ f . N →+∞ Démonstration. Soit f ∈ C2π . • Soit N ∈ N. d(pN (f ), f ) = min{d(g, f )/g ∈ PN }, or {d(g, f )/g ∈ PN } ⊆ {d(g, f )/g ∈ PN +1 }, donc d(pN (f ), f ) ≥ d(pN +1 (f ), f ). Ainsi la suite (d(pN (f ), f ))N ∈N est une suite décroissante minorée par 0. Elle converge donc vers l = inf d(pN (f ), f ) ≥ 0. N ∈N k.k • P étant dense dans C2π , il existe une suite (fn ) ∈ P N telle que fn −→ f . n→+∞ Soit n ∈ N. Il existe N ∈ N tel que fn ∈ PN . Ainsi d(fn , f ) ≥ d(pN (f ), f ) ≥ l ≥ 0. Donc ∀n ∈ N d(fn , f ) ≥ l ≥ 0. D’après le théorème des gendarmes, l = 0. Formule de Parseval. Soit f ∈ C2π . Alors 1 |cn (f )| = 2π n∈Z X 2 Z 2π 0 |f (t)|2 dt. Démonstration. Soit N ∈ N∗ . N X 2 |c0 (f )| + (|cn (f )|2 + |c−n (f )|2 ) = kpN (f )k2 −→ kf k2 . N →+∞ n=1 Ecriture réelle de la formule de Parseval. |a0 (f )|2 X |an (f )|2 + |bn (f )|2 + converge et Soit f ∈ C2π . Alors la série 4 2 n≥1 +∞ 1 |a0 (f )|2 X |an (f )|2 + |bn (f )|2 + = 4 2 2π n=1 Z 2π 0 |f (t)|2 dt. Démonstration. |a0 (f )|2 a0 (f ) , donc |c0 (f )|2 = . c0 (f ) = 2∗ 4 Soit n ∈ N . an (f ) − ibn (f ) 2 an (f ) + ibn (f ) 2 2 2 |cn (f )| + |c−n (f )| = + 2 2 (an (f ) − ibn (f ))(an (f ) − ibn (f )) = 4 (an (f ) + ibn (f ))(an (f ) + ibn (f )) + 4 |an (f )|2 + |bn (f )|2 = . 2 c Eric Merle 11 MP Fénelon Séries 3 Point de vue hermitien F : C2π −→ f 7−→ est injective et elle conserve le produit scalaire. Ainsi, si f ∈ C2π vérifie ∀n ∈ Z cn (f ) = 0, alors f 2 et, pour tout (f, g) ∈ C2π , Propriété. L’application linéaire 1 cn (f )cn (g) = 2π n∈Z X Z l2 (Z) conserve la norme, donc elle f˙ = 0, 2π f (t)g(t)dt. 0 Démonstration. • On rappelle que l2 (Z) est un espace préhilbertien complexe lorsqu’on le munit de < ., . >: (l2 (Z))2 −→ X C cn d n . ((cn )n∈Z , (dn )n∈Z ) 7−→ n∈Z La norme hermitienne associée est k.k2 : l2 (Z) −→ R sX (cn )n∈Z 7−→ |cn |2 . n∈Z D’après la formule de Parseval, pour tout f ∈ C2π , kf˙k2 = kf k, ce qui prouve la conservation de la norme. 2 • D’après une identité de polarisation, si (f, g) ∈ C2π , 4 < f, g > = kf + gk − kf − gk + ikg + if k − ikg − if k = kf˙ + ġk2 − kf˙ − ġk2 + ikġ + if˙k2 − ikġ − if˙k2 = 4 < f˙, ġ >, ce qui prouve la conservation du produit scalaire. Propriété. (Admise) Si f : R −→ C est une application 2π-périodique et continue par morceaux, les propriétés suivantes restent Zvalables. 2π |Sn (f ) − f |2 −→ 0, n→+∞ Z 2π X 1 2 ⋄ P arseval. (cn (f ))n∈Z est de carré sommable et |cn (f )| = |f (t)|2 dt, 2π 0 n∈Z Z 2π X 1 cn (f )cn (g) = f (t)g(t)dt. ⋄ C onservation du produit scalaire. 2π 0 n∈Z Cependant il est possible que tous ses coefficients de Fourier soient nuls sans que f = 0. ⋄ C onvergence en moyenne quadratique. 0 Exemple. Soit f : R −→ R l’unique application 2π-périodique telle que ∀t ∈] − π, π[ f (t) = t et f (π) = 0. f étant impaire, pour tout n ∈ N, an (f ) = 0. ∗ Soit n ∈ NZ . En intégrant par parties, π Z π 2 π 2 2 −t cos(nt) 2 bn (f ) = + t sin(nt)dt = cos(nt)dt = (−1)n+1 . π 0 π n πn 0 n 0 c Eric Merle 12 MP Fénelon Séries 4 Théorèmes de Dirichlet f est 2π-périodique et continue par morceaux. On peut donc appliquer la formule Z +∞ X 2 1 π 2 π2 de Parseval. = . On a donc démontré la formule bien connue t dt = 2 n π 3 0 n=1 suivante : +∞ X π2 1 = . 2 n 6 n=1 4 Théorèmes de Dirichlet Théorème de Dirichlet. Soit f : R −→ C une application 2π-périodique et C 1 par morceaux . Pour x ∈ R, on pose 1 g(x) = (f (x+ ) + f (x− )), 2 + − où f (x ) et f (x ) désignent les limites à droite et à gauche de f en x. La série de Fourier converge simplement sur R et sa somme vaut g. Ainsi +∞ 1 (f (x+ ) 2 ∀x ∈ R a0 (f ) X + an (f ) cos(nx) + bn (f ) sin(nx) 2 n=1 +∞ X = c0 (f ) + cn (f )einx + c−n (f )e−inx . + f (x− )) = n=1 Démonstration. Reprenons les notations de la démonstration du second théorème de Stone-Weierstrass. Dn : R −→ C n X Soit n ∈ N. On a noté t 7−→ D (t) = eikt . et on a montré que n t) = DnZ(t) sin( 2t ), et que (1) ∀t ∈ R sin( 2n+1 2 k=−n π (2) ∀t0 ∈ R 2πSn (f )(t0 ) = −π f (t0 − u)Dn (u)du. • Soit t0 ∈ R. Coupons l’intégrale précédente en deux intégrales sur les intervalles [0, π] et [−π, 0] et pratiquons le changement de variable v = −u sur la seconde intégrale. On obtient Z Z 0 π 2πSn (f )(t0 ) = 0 donc f (t0 − u)Dn (u)du + 2πSn (f )(t0 ) = Z 0 f (t0 + v)Dn (−v)(−dv). Or Dn est paire, π π (f (t0 − u) + f (t0 + u))Dn (u)du. Pour l’application Z π constamment égale à 1, que l’on notera 1, cette dernière formule 2Dn (u)du = 2πSn ( 1)(t0 ) = 2π, car Sn ( 1) est la projection de 1 sur montre que 0 Pn et 1 ∈ Pn . Ainsi, 2π(Sn (f )(t0 ) − g(t0 )) = c Eric Merle Z π 0 − (f (t0 + h) − f (t+ 0 ) + f (t0 − h) − f (t0 ))Dn (h)dh. 13 MP Fénelon Séries 4 Théorèmes de Dirichlet − f (t0 + h) − f (t+ 0 ) + f (t0 − h) − f (t0 ) • Pour h ∈]0, π], posons α(h) = . sin( h2 ) De même que f , α est une application continue par morceaux sur ]0, π]. f étant C 1 par morceaux, il existe β > 0 tel que f/]t0 −β,t0 [ coı̈ncide avec une application notée f − , de classe C 1 sur [t0 − β, t0 ]. f (t0 − h) − f (t− f − (t0 − h) − f − (t0 ) ′ 0) Fixons h ∈]0, β[. = −→ −f − (t0 ). h→0 h h h∈]0,β[ f (t0 + h) − f (t+ ′ 0) −→+ f + (t0 ), où f + est une application De même, on montrerait que h→0 h de classe C 1 sur un intervalle de la forme [t0 , t0 + β ′ ] qui coı̈ncide sur ]t0 , t0 + β ′ [ avec h h ′ ′ f . Comme de plus sin( ) ∼ au voisinage de 0, α(h) −→+ 2(f + (t0 ) − f − (t0 )). h→0 2 2 ′ ′ On pose donc α(0) = 2(f + (t0 ) − f − (t0 )). Ainsi, α est une application continue par morceaux sur [0, π]. La valeur d’une intégrale n’étant pas modifiée si on change un nombre fini de valeurs de l’application intégrée, d’après la formule (1), Z π 2n + 1 α(h) sin( 2π(Sn (f )(t0 ) − g(t0 )) = h)dh. 2 0 • En posant h = 2u, le lemme de Riemann-Lebesgue montre que Z π Z π 2 2n + 1 α(h) sin( h)dh = 2α(2u) sin((2n + 1)u)du −→ 0. n→+∞ 2 0 0 Ainsi Sn (f )(t0 ) −→ g(t0 ), c’est-à-dire que pour tout t0 ∈ R, n→+∞ X (ck (f )eikt0 + c−k (f )e−ikt0 ) converge et a pour somme g(t0 ). c0 (f ) + k≥1 On a ainsi prouvé le théorème de Dirichlet. Remarque. g coı̈ncide avec f en tout point de continuité de f . Exemple. La fonction créneau. Soit f : R −→ R l’unique application 2π-périodique telle que f (0) = f (−π) = 0, f/]−π,0[ = −1 et f/]0,π[ = 1. f est impaire, donc ∀n R ∈ N an (f ) = 0. 2 2 π 2 ∗ Si n ∈ N , bn (f ) = π 0 sin(nt)dt = − πn [cos(nt)]π0 = πn (1 − (−1)n ). 1 De plus f est une fonction C par morceaux et 2π-périodique. On peut donc appliquer le théorème de Dirichlet. Comme ∀t ∈ R f (t) = 12 (f (t+ ) + f (t− )) (on dit que f est une fonction de Dirichlet), ∀t ∈ R, f (t) = +∞ X n=0 4 sin((2n + 1)t). π(2n + 1) Le théorème de Dirichlet prouve notamment la convergence de la série ci-dessus, ce que l’on aurait du mal à montrer directement. c Eric Merle 14 MP Fénelon Séries 5 Cas des applications T -périodiques +∞ π X (−1)n π , on obtient = , résultat déjà établi au chapitre 2 4 2n + 1 n=0 relatif aux séries entières. En particulier, pour t = Théorème de Dirichlet uniforme. Soit f : R −→ C une application 2π-périodique que l’on suppose C 1 par morceaux et continue . Alors la famille (cn (f ))n∈Z est sommable . Dans ces conditions, la série de Fourier de f converge normalement sur R et sa somme vaut f . Démonstration. Au tableau 5 Cas des applications T -périodiques • Dans ce paragraphe, on fixe un réel T strictement positif, et une application f : R −→ C, T -périodique . h : R −→ C T . h est 2π-périodique . • On note x 7−→ f x R 2π 2π −int 1 T • Pour n ∈ Z, cn (h) = 2π 0 h(t)e dt. Posons x = t 2π . On obtient que R T 1 −inx 2π T dx, ce qui nous conduit aux notations suivantes : cn (h) = T 0 f (x)e Z 2π 1 T f (t)e−int T dt, cn (f ) = T 0 où n ∈ Z, et Z Z 2π 2 T 2π 2 T f (t) cos(nt )dt et bn (f ) = f (t) sin(nt )dt, an (f ) = T 0 T T 0 T où n ∈ N. Théorème de Dirichlet. Supposons que f est C 1 par morceaux. Pour x ∈ R, on pose 1 g(x) = (f (x+ ) + f (x− )), 2 + − où f (x ) et f (x ) désignent les limites à droite et à gauche de f en x. La série de Fourier de f converge simplement sur R et sa somme vaut g. Ainsi +∞ a0 (f ) X 2π 2π 1 + − + an (f ) cos(nx ) + bn (f ) sin(nx ) ∀x ∈ R 2 (f (x ) + f (x )) = 2 T T n=1 +∞ X 2π 2π = c0 (f ) + cn (f )einx T + c−n (f )e−inx T . n=1 Si de plus f est continue sur R, la série de Fourier converge normalement sur R et sa somme vaut f . c Eric Merle 15 MP Fénelon Séries 5 Cas des applications T -périodiques Démonstration. Il suffit de se ramener à h. Formule de Parseval. X Si f est continue par morceaux. Alors la série |c0 (f )|2 + (|cn (f )|2 +|c−n (f )|2 ) converge n≥1 et +∞ X 1 |c0 (f )| + (|cn (f )| + |c−n (f )| ) = T n=1 2 2 2 Z T 0 |f (t)|2 dt. Ecriture réelle de la formule de Parseval. |a0 (f )|2 X |an (f )|2 + |bn (f )|2 + converge Si f est continue par morceaux, alors la série 4 2 n≥1 et Z +∞ 1 T |a0 (f )|2 X |an (f )|2 + |bn (f )|2 + = |f (t)|2 dt. 4 2 T 0 n=1 c Eric Merle 16 MP Fénelon