ELEVATION SERIQUE DES SUBSTANCES REAGISSANT AVEC L’ACIDE THIOBARBITURIQUE AU COURS DE L’HEPATITE VIRALE AIGUE B M.J. LOHOUES-KOUACOU 1, D. SESS 2, A. KADJO 2, I. OUATTARA 3, E. NZI 2, L. NIGUE 4, B.M. CAMARA 1, E. NIAMKEY 3 RESUME Buts : les buts de cette étude prospective sont d’évaluer le niveau de TBARS au cours de l’évolution des hépatites virales aiguës et de rechercher une corrélation entre les TBARS et les transaminases. Patients et méthodes : 16 patients atteints d’hépatite virale aiguë B, associée ou non au virus D et 32 porteurs asymptomatiques du virus B sont inclus dans cette étude prospective. La détermination des TBARS, des transaminases et des marqueurs viraux a été effectuée à différents temps de l’évolution de la maladie (J0, M1, M3, M6). Résultats : comparativement aux porteurs asymptomatiques, la phase aiguë de l’hépatite virale s’accompagne d’une élévation significative des ALT (291,25 + 1,73UI/1 VS 1,90 ± 0,74 Ul/1). Ces modifi c ations diminu e n t significativement au cours de l’évolution de la maladie. En outre, il existe une corr é l ation positive entre les TBARS et les transaminases (P < 0,05). Conclusion : le stress oxydatif joue un rôle important dans l’activité de l’hépatite virale. Les antioxydants qui empêchent les effets délétères des radicaux libres pourraient être utilisés comme moyen thérapeutique dans l’hépatite virale. Dans les conditions physiologiques, les radicaux libres produits sont aussitôt neutralisés par les antioxydants enzymatiques et non enzymatiques. Cet équilibre est rompu en pathologie car les mécanismes de défense s’avèrent insuffisants pour neutraliser les radicaux libres en excès (4-6). Au cours des infections virales (7, 8), la destruction du virus s’accompagne d’une consommation massive d’oxygène, génératrice de RL. En effet au cours de l’hépatite virale aiguë, une hyper-production des substances réagissant avec l’acide thiobarbiturique (TBARS) est retrouvée (9, 10), de même qu’une diminution du glutathion réduit (11, 12). Les buts de cette étude sont de déterminer le niveau des TBARS au cours des hépatites aiguës et de rechercher une corrélation avec les transaminases. PATIENTS ET METHODES Patients Cette étude porte sur 42 patients (34 hommes et 14 femmes) âgés de 25,6 ± 4,7 ans. Les signes cliniques et paracliniques ont permis de distinguer : 16 cas d’hépatite virale aiguë B dont 4 sont associés au virus D (3 cas de surinfection et 1 cas de co-infection) ; et 32 cas de « portage asymptomatique « du virus B. Tous les porteurs du virus B ayant des lésions hépatiques chroniques sont exclus. INTRODUCTION Méthodes La Côte d’Ivoire est une zone de forte endémicité pour le virus B de l’hépatite (VHB)(1, 2). L’infection par les virus de l’hépatite induit une réaction immunitaire qui aboutit à une lyse hépatocytaire. Celle-ci évolue en cas de chronicité vers la cirrhose et le carcinome hépato-cellulaire. Les radicaux libres grâce à leur électron non ap p a ri é attaquent les constituants lipidiques et protéiques de la cellule et provoquent la mort cellulaire (3). Les marqueurs viraux (Ag HBs, Ac anti HBc de type IgM et Ac anti D de type IgM) sont détectés par la technique E 1 A de 2è génération avec les kits cobas. Une biopsie du foie est faite chez les « porteurs asymptomatiques» pour éliminer une hépatopathie chronique. Le dosage des TBARS est effectué selon la méthode de YAGI (13) modifiée (14). Elle mesure les substances issues 1. Service de gastro-entérologie, CHU de Cocody, Abidjan (Côte d’Ivoire) 2. Service de Médecine Interne CHU de Treichville, Abidjan. 3. Laboratoire de Biochimie médicale, CHU de Cocody, Abidjan. 4. Département de Biostatistique, UFR des sciences Médicales, Abidjan . Médecine d'Afrique Noire : 2000, 47 (5) ELEVATION SERIQUE… 237 de la lipopéroxydation réagissant avec l’acide thiobarbiturique. 50 µl de plasma réagissent en milieu acide à 95°c avec 100 µl d’une gamme étalon de malondialdéhy d e (MDA). Les substances combinées au MDA sont extraites au butanol et mesurées au fluorimètre digital 450 pour une longueur d’onde d’excitation de 515 nm et une longueur d’onde d’émission de 553 nm. Les résultats sont reportés sur la courbe d’étalonnage et ex p rimés en nMol de MDA/ml de plasma, après multiplication par un facteur de correction égal à 20. Figure 1 : Evolution des transaminases et des TBARS TBARS 350 ASAT Transaminases UI/l ALAT TBARS nMol/ml 6 + p < 0,006 300 * p < 0,05 5 * 250 4 Les différents paramètres et la séquence des prélèvements sont résumés dans le tableau 1. 200 Tableau 1 : Calendrier des paramètres étudiés 150 Porteurs asymptomatiques Hépatite aiguë + J0 M1 M3 M6 J0 50 ALT/AST + + + + + 0 J0 + AgHBs + IgM antiHBC + IgM anti D + + + + + + + + + + + + + + + + Biopsie du foie + Les tests de Student pour les mesures appariées et non appariées et le test de corrélation linéaire sont utilisés. RESULTATS L’ h é p atite virale aiguë s’accompagne au début d’une élévation des TBARS (5, 28 ± 1,73 nMol/ml) concomitante à l’hyper-transaminasémie ALT(291,25 ± 189,73 Ul/1) et AST (301,44 ± 229,97 Ul/l). Au cours de l’évolution de cette hépatite, les TBARS et les transaminases régressent simultanément et significativement dès le premier mois et demeurent bas (fig.1). 3 2 100 Paramètres TBARS * + * + * M1 M2 * 1 * M3 Temps mois En outre, une corrélation positive est retrouvée entre les TBARS et les ALT d’une part et d’autre part entre les T BARS et les AST (P < 0,01) avec un coefficient de corrélation respectivement égal à 0,66 et 0,70. A la fin de l’étude, 12 patients sur 16 ont éliminé le virus B soit une fréquence de 75 %. Les TBARS des patients ayant éliminé le virus et ceux encore porteurs ne sont pas statistiquement différents aussi bien en présence (3,53 ± 1,96 nMol/ml VS 4,65 ±1,15nMol/ml) qu’en absence de cytolyse (3,07 ±1,30 nMol/ml VS 2,66 ±1,03 nMol/ml). Les TBARS sont statistiquement plus élévés au cours de l’hépatite aiguë comparativement au «portage asymptomatique» (5,28 ± 1,73 nMol/ml VS 1,90 ± 0,74 nMol/ml) P<0,01. Par contre il n’existe pas de différence entre les TBARS des patients guéris de leur hépatite et ceux porteurs chroniques asymptomatiques du virus(3,07 ± 1,30 nMol/ml VS 1,90+-0,74 nMol/ml P = 0,36). COMMENTAIRES Une élévation des TBARS est retrouvée dans notre étude à Médecine d'Afrique Noire : 2000, 47 (5) M.J. LOHOUES-KOUACOU, D. SESS, A. KADJO , I. OUATTARA, E. NZI , L. NIGUE, B.M. CAMARA, E. NIAMKEY 238 la phase de cy t o lyse hépat i q u e. HIGUERAS (9) et SUEMATSU (10) ont publié des résultats similaires au cours des hépatites virales aiguës. En effet, les niveaux de TBARS étaient respectivement de 12,07 ± 1,80 nMol/ml et 6,40 ± 1,76 nMol/ml. La lipopéroxydation est encore plus importante en cas d’hépatite fulminante au cours de laquelle une destruction massive du foie est constatée (9). Une réduction du glutathion réduit, témoin d’une augmentation du stress oxydatif est mise en évidence aussi bien dans le plasma que dans les globules rouges des patients souffrant d’hépatite virale aiguë mais aussi d’hépatopathie alcoolique (11, 12). Pour tous ces auteurs, les Radicaux Libres sont en rapport avec l’activité de la maladie. En effet, dans notre étude, il existe d’une part une corrélation entre les TBARS et les transaminases et d’autre part, une production basse des TBARS chez les patients sans cytolyse aussi bien « porteurs asymptomatiques « (1,90+-0,74 nMol/ml) que guéris de leur hépatite virale aiguë (3,07 ± 1,30 nMol/ml). Nous pouvons donc dire en accord avec ces auteurs que les Radicaux Libres jouent un rôle important dans la genèse de la lyse hépatocytaire induite par les virus de l’hépatite. Mais ils ne permettent pas de prédire l’évolution vers la guérison ou le portage chronique de la maladie. CONCLUSION L’infection aiguë par les virus de l’hépatite induit une élévation des TBARS, témoin d’une production excessive de Radicaux Libres. Cette hyper-production de Radicaux Libres est concomitante de la cytolyse avec une corrélation positive entre les transaminases et les TBARS. Le stress oxydatif joue donc un rôle physiopathologique important car il conduit à la lyse hépatocytaire. Les antioxydants pourraient donc réguler cette lyse hépatocytaire et empêcher l’évolution vers l’hépatite aiguë grave. BIBLIOGRAPHIE 1 - SOMBO MF, SEKA SJ, CABANNES R. Prévalence des marqueurs HBs et anti HBs du virus B de l’hépatite dans la population ivoirienne. Publ. Med. Afr. 1987 ; 85 : 43-9. 2 - LOHOUES-KOUACOU MJ, TOURE M, HILLAH J, CAMARA BM, N’DRI KOUAME KJ et al. Transmission materno-fœtale du virus B de l’hépatite en Côte d’Ivoire. Plaidoyer pour la vaccination de masse. Cah. Santé 1998 ; 8 : 401-4. 3 - FABER JL, KYLE ME, COLEMAN JB. Biology of diseases. 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