Ruptures distales du triceps au coude Dr J.E. AYEL (TOULOUSE), Dr A. DEGHRAR (SOISSONS), Dr ELKHOLTI(VILLEURBANNE), Dr R. GUINAND (TOULOUSE), Dr A. VIDIL (PARIS) La rupture distale du triceps reste une pathologie exceptionnelle et représente seulement 0,8% des ruptures tendineuses du membre supérieur. De diagnostic clinique pourtant simple, elle est un véritable piège diagnostique. La présentation est en effet volontiers aspécifique, parfois paucisymptomatique, à type de bursite rétro-olécranienne posttraumatique ecchymotique, le terrain variable, chez un homme trentenaire le plus souvent, mais aussi de tout âge, et le traumatisme peu spécifique : extension forcée du coude, choc direct sur un coude en flexion, accident de la voie publique. Les facteurs favorisants classiques, et volontiers décrits, sont loin d’être constants : hyperparathyroïdie, insuffisance rénale éventuellement dialysée, diabète, polyarthrite rhumatoïde, ostéogenèse imparfaite, syndrome de Marfan, hygroma volontiers infiltré, ou patient sportif de force consommant parfois des anabolisants. La déhiscence classique du tendon rompu est rapidement masquée par l’œdème post-traumatique, et dans près de la moitié des cas, le diagnostic n’est pas fait à la phase aigüe mais au stade chronique à plus de 3 semaines. La rupture peut être partielle ou totale, perturbant d’autant la démarche clinique et diagnostique initiale. Parfois bien tolérée, la plainte fonctionnelle à type de faiblesse de l’extension du coude contre pesanteur doit attirer l’attention. La radiographie du coude peut être faussement rassurante et trompeuse : une ossification postérieure en regard de l’insertion olécranienne du tendon signe d’une tendinopathie préexistante et favorisante doit alerter le clinicien, ce d’autant plus qu’elle est située à distance de l’olécrane, signant la désinsertion tendineuse. Au moindre doute, l’échographie et surtout l’IRM permettront de confirmer le diagnostic, de préciser le caractère total ou partiel de la rupture et surtout l’importance de la rétraction tendineuse, qui guideront la prise en charge thérapeutique. Le traitement en est résolument chirurgical, que la rupture soit totale ou partielle. Le traitement fonctionnel peut être éventuellement envisagé chez des patients peu demandeurs, présentant une rupture partielle, faisant appel à une immobilisation du coude en extension pendant un mois. Le traitement de référence comprend une réinsertion tendineuse directe, en position anatomique sur le footprint au niveau de l’olécrane, par des points transosseux ou des ancres en double rang. Pour les ruptures partielles, la réinsertion du plan tendineux superficiel désinséré semble également possible sous arthroscopie. Dans le cadre de rupture chronique et ancienne, l’importance de la rétraction et la dégénérescence tendineuse proximale peuvent rendre la réinsertion anatomique directe difficile ou impossible : les gestes de renforts sont alors nécessaires et font appel à des plasties locales à partir de l’anconé, des autogreffes (tendons DIDT, long palmaire), ou des allogreffes (tendon calcanéen). Dans les 2 cas, la réinsertion suivie d’une immobilisation courte d’au moins 2 semaines en légère extension doit permettre de débuter une rééducation précoce, protégée et progressive. Les résultats sont habituellement bons voire très bons, permettant de retrouver un coude normal ou quasi normal, même pour les ruptures chroniques, mais avec une récupération beaucoup plus lente pour ces dernières. Quelques cas de rupture itérative, à distance d’un premier épisode, sont décrits : leur évolution reste favorable après réinsertion anatomique directe, éventuellement associée à une plastie de renfort. De description rare, chez une population particulière, la faiblesse et l’incompétence de l’appareil extenseur sur arthroplastie du coude est connue du fait d’une voie d’abord ne le respectant pas ou peu, ou de la qualité tissulaire chez des patients volontiers plus âgés et présentant une atteinte rhumatismale. L’efficacité de l’appareil extenseur est garante d’un bon résultat fonctionnel et du verrouillage du coude prothèsé, nécessitant sa réparation en cas de désinsertion, selon les mêmes techniques, même si les gestes de plastie locale ou de renfort sont plus souvent nécessaires. Véritable piège diagnostique, le clinicien doit savoir évoquer une rupture distale du triceps devant une bursite rétro-olécranienne ecchymotique posttraumatique, et au moindre doute prescrire une échographie et surtout une IRM afin de parvenir au diagnostic. De prise en charge aisée, sous réserve d’une technique chirurgicale stricte, l’évolution à terme se fera généralement vers la récupération d’un coude normal ou quasi normal.