Marqueurs biologiques de la thrombose Pourquoi doser les D-dimères? Les D-Dimères sont des marqueurs d’activation de la coagulation et de la fibrinolyse. La coagulation entraîne la formation d’un caillot de fibrine, tandis que la dégradation ultérieure par le système fibrinolytique génère un mélange de produits de dégradation de la fibrine dont les D-Dimères. Dans de rares situations il n’y pas d’élévation du taux de D-Dimères, notamment en cas de petits thrombus, de traitements anticoagulants ou d’anomalies de la fibrinolyse. Néanmoins, de petites quantités de D-Dimères sont présentes dans le plasma de patients sains, en raison du renouvellement physiologique du fibrinogène plasmatique. Les méthodes de dosage des D-Dimères. Les tests validés pour l’EP sont surtout le Vidas DD Exclusion ®, et dans un moindre mesure le test Tinaquant® (latex quantitatif, Roche) et le STA Liatest® (latex quantitatif, Stago). La VPN étant influencée à la fois par la sensibilité mais également par la prévalence de la maladie, le niveau de probabilité clinique auquel un test D-Dimères peut être appliqué dépend de sa sensibilité. La sensibilité est en lien avec la sécurité du test et doit être proche de 100% pour réduire le nombre de faux négatifs. La spécificité est quant à elle liée à son utilité pour la pratique clinique, puisque sa valeur conditionne la nécessité de recourir à d’autres examens pour confirmer le diagnostique. Du fait d’une valeur prédictive négative (VPN) élevée, le test D-Dimères est déterminant pour exclure rapidement une maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV). Devant une suspicion clinique de thrombose, faut-il doser les D-Dimères ? Le seul dosage biologique qui peut être utile à ce jour est celui des D-Dimères. Après l’examen clinique, le test D-Dimères est recommandé comme première étape de l’investigation de patients présentant une suspicion de MTEV. Cette stratégie est efficace en terme de coûts et permet d’exclure en toute sécurité une MTEV chez 30 à 50% des patients non hospitalisés présentant une suspicion. Dans le cas de probabilité pré-test élevée ou de test D-Dimères positif, il est nécessaire de réaliser des examens d’imagerie. Ainsi le taux mesuré des D-Dimères est intégré dans le raisonnement clinique global car il ne peut isolément conduire à une décision de mise en place d’un traitement anti thrombotique aux urgences. En revanche, sa sensibilité proche de 100% permet d’exclure l’embolie pulmonaire chez les patients dont la probabilité est faible ou intermédiaire, alors qu’en présence d’un taux normal, environ 1 patient sur 10 pourrait toujours présenter une embolie pulmonaire lors d’une probabilité clinique forte. Quelles sont les conditions d’interprétation du taux des D-Dimères lors d’une suspicion de thrombose? En cas de probabilité clinique non forte, la valeur d’exclusion du test est conservée. De nombreuses circonstances s’accompagnent d’une augmentation des D-Dimères : infection, inflammation, cancer, chirurgie, traumatisme, insuffisance rénale, antécédents de thrombose et traumatismes et brûlures, et les complications thrombotiques secondaires aux anévrismes, dissections, fibrillation auriculaire et coagulation intravasculaire disséminée. De même, chez les femmes enceintes, l’utilité du test est réduite, mais les D-Dimères gardent leur place car il est particulièrement intéressant d’éviter des examens irradiants dans ce contexte, qui ne sont cependant pas contre-indiqués et qui doivent être réalisés si les DDimères sont positifs. Par ailleurs, leur coût-efficacité est démontré, même dans les populations où la spécificité est moins importante (sujet âgé, femmes enceintes). Un seuil de D-Dimères ajusté à l’âge a récemment été proposé (seuil ajusté = âge x 10 après 50 ans). Sa validation pragmatique est en cours. Si le taux des D-Dimères est associé à l’importance du caillot, il n’est pas un marqueur pronostique validé. Enfin, il n’y a aucun argument convaincant pour adapter les doses d’un traitement anticoagulant curatif ou préventif au taux de D-Dimères. Perspectives Actuellement le test des D-Dimères doit être utilisé comme un test d’exclusion lorsque la probabilité clinique est faible ou intermédiaire. Des perspectives intéressantes sont en cours de validation afin de pouvoir adapter le résultat en fonction de l’âge. Parmi les approches en cours et dans les 5 ans à venir, il est désormais possible d’imaginer qu’un profil personnalisé de risque de thrombose puisse être associé à chaque patient. Auteur : Morgan JAFFRELOT Service d’accueil des urgences, SAMU 29 CHRU de Brest 157 Bd Tanguy Prigent 29238 Brest Cedex Courriel : [email protected] Références : Wells PS, Anderson DR, Rodger M, Forgie M, Kearon C, Dreyer J, Kovacs G, Mitchell M, Lewandowski B, Kovacs MJ. Evaluation of D-Dimer in the Diagnosis of Suspected DeepVein Thrombosis. N Engl J Med 2003; 349: 1227-35. Carrier M, Righini M, Djurabi RK, Huisman MV, Perrier A, Wells PS, Rodger M, Wuillemin WA, Le Gal G. VIDAS D-dimer in combination with clinical pre-test probability to rule out pulmonary embolism. A systematic review of management outcome studies. Thromb Haemost 2009; 101: 886-92 Jaffrelot M, Le Ven F, Le Roux PY, Tissot V, Rame E, Salaun PY, Le Gal G Thromb Haemost (2012) vol. 107 (5) pp. 1005-7. External validation of a D-Dimers ageadjusted cut-off for the exclusion of pulmonary embolism Douma RA, le Gal G, Sohne M, Righini M, Kamphuisen PW, Perrier A, Kruip MJ, Bounameaux H, Buller HR, Roy PM. Potential of an age adjusted D-dimer cut-off value to improve the exclusion of pulmonary embolism in older patients: a retrospective analysis of three large cohorts. Bmj 2010; 340: c1475 Righini M, Nendaz M, Le Gal G, Bounameaux H, Perrier A. Influence of age on the costeffectiveness of diagnostic strategies for suspected pulmonary embolism. J Thromb Haemost 2007; 5: 1869-77. 12/2012