111360 19-20 6/03/08 7:22 Page 19 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Pratique infirmière Annonce du diagnostic et accompagnement psychologique Dominique ORJUBIN AFIC Christine CHENEAU Oncologue médical, Institut Claudius-Régaud, Toulouse Luce DOMIGO psychologue clinicienne, Institut Claudius-Régaud, Toulouse La cancérologie aujourd’hui Elle s’intègre dans le dispositif du plan Cancer (mesure 40). Il faut toujours avoir conscience : - qu’il n’existe pas de bonne façon d’annoncer un diagnostic ni une annonce standard : chaque personne, chaque cas est différent ; - que la perception de la situation par le médecin est différente de celle du patient (selon la gravité du diagnostic, le parcours de vie du patient, etc.) ; - qu’il sera toujours difficile d’entendre, d’accepter un diagnostic, même si l’annonce est « bien » faite. Une première consultation d’annonce, c’est parler : - d’un diagnostic (prononcer le mot cancer est important, cela permet de s’y familiariser) ; - d’un plan de traitement (il peut être long) ; - de demain (le premier traitement, la rechute éventuelle). L’annonce permet donc de mettre en place une relation au long cours. Les traitements sont en progrès continuels, notamment avec de nouveaux médicaments comme les antiangiogéniques et les thérapeutiques ciblées… On assiste aussi à l’amélioration des soins de support : augmentation du taux de confort du patient, utilisation des facteurs de croissance (d’où une diminution de la sensation de fatigue). Les mécanismes moléculaires sont démantelés au fur et à mesure des découvertes scientifiques. Mais qu’en est-il de la relation avec le patient ? Relation médecin-patient Elle ne doit pas être exclusive, l’équipe soignante étant tout autant concernée que le médecin. C’est une réelle préoccupation en oncologie. Elle représente 50 % du travail médical et, paradoxalement, n’est enseignée dans aucune formation spécifique. Il est important que cette relation ne se limite pas aux explications techniques mais aborde d’autres thèmes. Pourquoi annoncer ? L’article 35 du Code de déontologie médicale indique l’obligation au médecin de faire cette annonce pour permettre au patient, en recevant l’information de la bouche du médecin, de réaliser ce qui lui arrive et de donner un sens à sa maladie. Le choix des mots employés par le praticien est primordial. Il permettra d’installer un lien de confiance au sein de cette nouvelle relation soignantsoigné. L’annonce C’est une des premières étapes de la relation médecin-patient. Elle détermine cette dernière à long terme. Bulletin Infirmier du Cancer 19 Vol.7-n°3-juillet-août-septembre 2007 111360 19-20 6/03/08 7:22 Page 20 Pratique infirmière Préparation prier le contenu de la consultation d’annonce déjà effectuée, de poser les questions importantes à ses yeux et d’évoquer son devenir. Des informations concrètes et pratiques lui seront données, qui lui permettront de se reconstruire quelques repères, dans un monde où, désormais, tout a changé pour lui. A ce niveau, l’accompagnement psychologique du patient peut relever de la relation d’aide infirmière. Plusieurs choses sont à retenir : - ne pas obliger la personne à parler, la laisser exprimer ses besoins, ses interrogations ; - débuter puis construire l’entretien à partir de ses attentes et de ses demandes suite à la consultation d’annonce; - attention au déni : en tenir compte ; - ambivalence/au savoir ; - rassurer sans banaliser, rester prudent dans ses propos et attentif aux dires et comportements du patient. Cet entretien d’aide, ainsi construit, pourra permettre au patient de reprendre un peu plus la maîtrise de sa vie, de redevenir un sujet. Il n’est pas seulement une maladie, mais un être humain en vie, capable de faire des choix en toute dignité, de vivre cette situation, d’exprimer ses émotions selon sa personnalité propre. C’est là que se situe l’accompagnement du soignant quel qu’il soit : médecin, infirmière. L’orientation vers un spécialiste (psychologue ou psychiatre) se posera (et se proposera) lorsque le patient adressera des demandes qui dépassent le cadre des compétences du soignant. Une annonce se prépare à l’avance en s’assurant des résultats des différents examens médicaux et en donnant un rendez-vous de consultation au patient, en lui précisant que le résultat de ses examens lui sera communiqué lors de cet entretien. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Préliminaires Il ne faut jamais faire d’annonce par téléphone, employer des mots simples et donner les informations par étapes : ne pas en dire ni trop, ni trop peu et toujours vérifier si le patient a bien compris ce qui lui a été dit. Les étapes La consultation doit se dérouler en respectant plusieurs critères importants. Le praticien : - devra se consacrer entièrement au patient, au contenu de cette consultation ; - en amont, devra prévoir un endroit calme, sans appels téléphoniques intempestifs ; - proposera au patient la présence d’un tiers (famille, ami(e) proche…) lors de la prise de rendez-vous ; - être attentif à la portée de ses propres mots, réajuster si nécessaire (écoute du patient, de ses besoins, de ses questions, ses attentes) ; - être particulièrement vigilant sur son comportement « non verbal », à travers lequel des messages contradictoires à ses intentions, à son discours, peuvent être captés par le patient. Certains mécanismes de défense, qui en sont parfois l’origine, peuvent amoindrir la qualité de la relation, la confiance qui s’instaure entre le médecin et le soignant, lors de cette consultation d’annonce. Conclusion On peut penser que le caractère traumatisant d’une mauvaise nouvelle, au-delà de la nature de l’information, peut être profondément lié à la façon dont l’information a été transmise au patient, aux représentations qu’il s’en fait et à tout ce qu’il peut y associer. En percutant brutalement sa vie de façon inattendue, à un moment particulier de son existence, l’événement, neutre à la base, va devenir traumatisant. Chaque être humain est singulier. Un même événement (annonce ou diagnostic) sera vécu différemment par chacun. C’est cette particularité même qui fera de la consultation d’annonce une rencontre, un travail complexe et riche, au cas par cas et en interdisciplinarité. Ce travail aura sa limite dans l’accompagnement psychologique du patient : celui-ci ne pourra pas faire l’économie du réel auquel il est confronté et de la solitude profonde qui y est associée. Après l’annonce Résumer brièvement les points clés de l’entretien, vérifier la bonne compréhension du patient. L’objectif à court terme est le prochain rendez-vous. Accompagnement psychologique Le « psy » est-il incontournable ? L’annonce du diagnostic entraîne le plus souvent une réaction de choc chez le patient. Il est en état de sidération : ses mécanismes psychiques sont bloqués, paralysés, rendant l’intervention d’un psychologue souvent discutable. Cependant, un temps spécifique de rencontre à court terme sera prévu. Il permettra au patient de se réapproBulletin Infirmier du Cancer 20 Vol.7-n°3-juillet-août-septembre 2007