Quel est notre devoir éthique face au soulagement

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Quel est notre
devoir éthique
face au soulagement
de la douleur ?
Johanne Roy, infirmière au secteur clinique de la DSI
Représentante du CII au comité de bioéthique du CHUQ
Cette nouvelle chronique, Réflexions éthiques,
portera sur les enjeux éthiques en lien avec la profession
infirmière. Nous vous proposons une réflexion à partir
d’un article paru dans "The Journal of Clinical Ethics"
concernant un dilemme éthique par rapport au soulagement de la douleur en fin de vie.
Les intervenants sont donc
invités à adhérer aux décisions
des parents d’assurer le confort
et de traiter la douleur dans
ce contexte comme une
urgence médicale.
Suffering in Children at the End of life :
Recognizing an Ethical Duty to Palliate,
Joanne Wolfe, Vol. 11 Number 2, Summer 2000.
Dans l’article, on présente aussi quelques principes fondamentaux permettant d’analyser la situation avec un
regard éthique. Une recension des écrits permet de citer
les connaissances scientifiques concernant le soulagement de la douleur chronique et le fait qu’il y a peu de
données empiriques qui soutiennent la croyance que
l’utilisation appropriée d’opioïdes hâterait la mort. De
plus, des études ont démontré qu’après avoir vécu
l’expérience, la majorité des parents sont favorables à un
traitement énergique de la douleur pour leur enfant en
phase terminale, même si cela devait abréger sa vie.
Cet article discute d’une problématique reliée au
soulagement de la douleur chez un enfant atteint de
maladie terminale, en présentant l’histoire d’une fillette
de 3 ans et 8 mois admise pour tumeur cérébrale
envahissante sans espoir de guérison. Malgré une
grande peine, les parents décident de concentrer leurs
efforts afin de rendre plus confortables les conditions de
vie de leur enfant pour cette dernière partie de sa vie.
Pendant une certaine période, la douleur de l’enfant est
bien soulagée par l’administration de morphine de
courte et de longue action. L’enfant est bien, peut se
mouvoir (en fauteuil roulant) et interagir avec les amis et
la famille. À la suite d’un incident ayant occasionné un
délai dans l’administration de la médication requise par
la mère, le médecin demande une consultation en
éthique. En effet, plusieurs membres du personnel
craignent de donner trop d’analgésie alors que l’enfant,
malgré la présence de céphalée, continue de parler et
de jouer. Selon eux, une surdose pourrait entraîner un
arrêt respiratoire, le décès, ou rendre l’enfant trop somnolente, la privant ainsi d’une certaine qualité de vie
dans ce contexte.
L’article cite David J. Roy, éthicien montréalais. Celui-ci
décrit plusieurs principes éthiques qui peuvent guider
les cliniciens dans les interventions en fin de vie, chez un
patient souffrant, tout en préservant sa dignité. Ces
principes sont les suivants : principe de solidarité,
principe de complexité, principe d’individualisation,
principe de proportionnalité, principe d’une mission personnelle et principe d’humanité. L’auteur ajoute un
principe de famille.
À partir d’une recherche réalisée auprès de 126 adultes
(Singer et al.), l’auteur décrit cinq domaines de qualité
de soins en fin de vie que les patients ont eux-mêmes
identifiés. Pour eux la qualité de vie réfère à : recevoir
un soulagement de la douleur adéquat et une
bonne gestion des symptômes, éviter un prolongement excessif de la vie (acharnement),
avoir une sensation de contrôle sur la situation,
soulager le fardeau et soutenir les relations avec
les êtres chers. Ainsi, chez l’adulte comme chez
l’enfant, le soulagement optimal de la douleur
est un aspect essentiel de la qualité de vie et un
devoir éthique pour le personnel.
À la suite de l’étude de la situation, la consultation en
éthique recommande de traiter activement toute
douleur rapportée par les parents ou le personnel. On
spécifie que s’il y a une différence de perception dans
l’intensité de la douleur qui conduit à un désaccord dans
la gestion de la situation, un traitement combatif de la
douleur doit alors être préconisé. De plus, on reconnaît
que les parents de l’enfant, à titre de responsables du
maintien des valeurs morales de la famille, ont le droit
ainsi que la responsabilité de prendre des décisions
éthiques au nom de l’enfant. En effet, il n’y avait aucun
élément justifiant de disqualifier les parents de ce
privilège puisque leur comportement démontrait une
prise en charge adéquate des besoins de l’enfant.
Info-Soins
Le bulletin des soins infirmiers du CHUQ
17 février 2004
De cette façon, le patient et sa famille peuvent être
assurés d’un minimum de compassion dans les soins en
fin de vie.
Nous invitons les lecteurs à participer à la rédaction
de cette chronique ou à nous suggérer d’autres sujets.
II
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