Toxicologie des antidépresseurs

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Mercredi 23 novembre
Maya et William
Toxicologie
Mr DELONCLE
Toxicologie des antidépresseurs
I. Classification des antidépresseurs (ATD)
A) Généralités
-dépression: état de souffrance psychique qui se manifeste par :
o tristesse de l'humeur
o douleur morale (sentiment d'inutilité, difficulté de se projeter sur l'avenir)
o inhibition psychomotrice (asthénie psychique, augmentation de la fatigabilité,
difficulté à la concentration)
o anxiété, insomnie, perte d'appétit, amaigrissement
o idée suicidaire
-thérapeutique possible:
o psychothérapie (pour dépression légère)
o sismothérapie (électrochoc sous narcose)
o chimiothérapie (ATD ou thymo-analeptique)
Dans ce cours, on s’intéressera à la chimiothérapie de la dépression.
-ATD: psychotrope appartenant au groupe des psychoanaleptiques
→ susceptible d'améliorer l'humeur déprimée par action sur l'ensemble du syndrome dépressif
-différents groupes existent
1) thymo-analeptique
a. ATD tricycliques
-plus ou moins proches les uns des autres.
-chef de file: imipramine (TOFRANYL) (1957)
-action sur divers types de neurotransmission.
b. ATD atypiques: hétérogénéité structurale
-pas toutes les propriétés pharmacologiques des tricycliques.
-diminution des effets indésirables mais souvent efficacité moindre.
c. Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine: IRS
d. Composé à action duale: sérotoninergique et noradrénergique
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2) thymérétique
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Inhibiteur de la monoamine oxydase: IMAO
B) Classification
Plusieurs critères (aucun satisfaisant) selon:
o la structure chimique
o l'activité thérapeutique
o l'action sur les systèmes de neurotransmission
1) Selon la structure chimique:
a) ATD tricycliques:
- Ils n’ont pas tous les mêmes propriétés par rapport à l'action sur les neurotransmetteurs
- La structure de base: imipramine (TOFRANYL)
o modification de la chaîne latérale
o hétéroatome (N,O,S)
o substitution (Cl)
b) IMAO:
-non sélectif: iproniazide (MARSILID)
-sélectif: IMAO A: moclobémide (MOCLAMINE); toloxatone (HUMORYL)
c) Inhibiteur non imipraminique non IMAO:
ISRS: -fluoxétine (PROZAC)
-paroxétine (DEROXAT)
-citalopram (SEROPRAM)
Ils empêchent de façon sélective la recapture de la 5-HT
2) Selon l’activité thérapeutique
Cette classification est fonction de l’efficacité sur différents types de dépression.
Des études cliniques montrent qu’il n’y a pas de bénéfice à utiliser un antidépresseur plutôt qu’un
autre. Donc le choix du médicament est plutôt fonction des effets indésirables.
• stimulants ou désinhibiteurs (HUMORYL, VIVALAN)
• intermédiaires (DEROXAT, PROZAC, EFFEXOR)
• sédatifs ou anxiolytiques : provoquant une sédation + des effets latéraux
cholinergiques (LAROXYL, ATHYMIL)
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II. Action des antidépresseurs sur les systèmes neurotransmetteurs:
A) Transmission de l’influx nerveux au niveau d’une synapse :
Il existe différents neurotransmetteurs (NT) :
• monoamines = sérotonine, dopamine, noradrénaline
• plus éventuellement le GABA
Ils ont une action sur :
• le comportement
• la motricité
• la conscience et le sommeil
• la régulation de l’humeur
Les neurotransmetteurs sont synthétisés par le neurone pré-synaptique à partir de différents
acides aminés et sont ensuite stockés dans des vésicules synaptiques.
Lorsqu’il y présence au niveau pré-synaptique de l’influx nerveux + Ca2+, il y a libération de NT
dans la fente synaptique.
Il y a 3possibilités :
• fixation du NT sur les récepteurs post-synaptiques → transmission de l’influx
nerveux par l’AMPcyclique
• destruction du NT dans la fente synaptique par un système enzymatique (par la
catéchol ortho méthyl transférase)
• recaptage du NT par des récepteurs pré-synaptiques au niveau de la membrane de
la terminaison pré-synaptique. A ce niveau, soit il est stocké dans des vésicules ou il
est détruit par la MAO au niveau de la membrane mitochondriale
B) Effets des antidépresseurs:
Ils sont capables d’augmenter l’activité des systèmes monoaminergiques :
• inhibition de la dégradation des monoamines par la MAO (NA, sérotonine)
• inhibition de la recapture pré-synaptique
→ action mixte vis-à-vis de plusieurs monoamines (NA, sérotonine)
→ ou action sélective vis-à-vis de la sérotonine en inhibant leur recaptutre (ISRS)
= citalopram, fluoxéine, fluvoxamine, paroxétine
Les antidépresseurs les plus récents sont dépourvus d’activité anticholinergique ce qui
évite :
• les effets secondaires (tachycardie, bouche sèche, constipation, rétention urinaire)
• les contre-indications (glaucome, adénome prostatique…)
Autres effets des antidépresseurs :
• propriétés antihistaminiques
• effets secondaires centraux ((convulsions, sommeil, euphorie, augmentation de l’anxiété))
• effets secondaires cardiovasculaires ((hypotension orthostatique, atteinte cardiaque))
• interactions médicamenteuses dangereuses ((IMAO, alcool))
• possibilité d’accidents « hypertensifs » avec IMAO
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si consommation d’aliments riches en tyramine (fromages fermentés, poissons fumés ou marinés,
aliment avec levure de bierre, salami…) → la tyramine n’est plus dégradée par la MAO
→ « cheese syndrom » (augmentation de la tension artérielle + tachycardie)
III.
Pharmacocinétique-Toxicocinétique:
A) Absorption:
A dose thérapeutique, l’absorption est +/- rapide par le tractus gastro-intestinal (2-8H)
En cas d’ingestion massive, si le médicament a une activité « anticholinergique », l’absorption sera
plus lente (cause = ralentissement du péristaltisme).
B) Distribution:
Lors du 1er passage au niveau du foie, un pourcentage élevé d’antidépresseur est métabolisé (first
pass effect) → la biodisponibilité est réduite (25-70 %).
Dans le sang, les antidépresseurs sont fortement liés aux protéines plasmatiques (fraction libre = 130 %)
On retouve l’antidépresseur dans les hématies et dans le plasma dans des proportions égales
(environ 50/50) (taux sanguin peu élevé environ = 1-2mg/L)
Les antidépresseurs sont lipophiles. On observe donc une grande affinité pour les tissus (bonne
distribution au niveau du foie, rein, surrénale, rate, poumon, coeur, cerveau)
La demi-vie plasmatique est +/- longue. Cela dépend de la variabilité individuelle :
ex:_ 2-3h Tianeptine
_ 8h Anoxapine
_ 48-118h Fluoxétine
L’état d’équilibre sera atteint au bout de 1 à 14j.
C)Métabolisme:
Le métabolisme hépatique est important (microsomal P450)
On peut observer les réactions suivantes :
• Déméthylation oxydative : prépondérante (N-monodéméthylation)
• N-oxydation
• Hydroxylation (+ conjugaison)
• Rupture oxydative de la chaîne latérale
D)Elimination
Les antidépresseurs et leurs métabolites ont la possibilité de passer par le cycle entérohépatique du
fait de l’élimination potentielle par la voie biliaire.
Voie principale d’élimination : urinaire +++
fécale +
salivaire
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Lors d'une grossesse, il peut y avoir des répercussions sur le foetus ou le nouveau né
(convulsions) du fait du passage de la barrière placentaire.
L'élimination rénale est lente alors que la fixation tissulaire est intense→ l'épuration rénale est
inefficace et nécessite une surveillance prolongée.
IV. Etiologies des intoxications:
Elles sont fréquentes et souvent très graves : marge de sécurité faible.
o Tentatives d'autolyse nombreuses : ces médicaments sont très toxiques (souvent
associés à EtOH+++) et chez les malades dépressifs (idée latente) cette levée de l'inhibition
peut provoquer :
- conduites violentes
- passage à l'acte
L'association des antidépresseurs et des Benzodiazépines anxiolytiques en début de traitement
provoque une diminution des risques de tentative d'autolyse.
o Toxicomanie à la « fluoxétine » : cela provoque des troubles du comportement (bouffées
délirantes, conduites agressives)
o Intoxication accidentelle chez l'enfant (traitement de l'énurésie, trouble du
comportement, apprentissage)
Rq: Paroxétine DEROXAT déconseillé < 15 ans cat toxicité élévée chez enfants.
V. Symptomatologie des intoxications:
Il y a un temps de latence = 1-4H entre la prise du médicament et les 1ers symptomes.
Syndrome anticholinergique (« atropine-like ») peut précéder un coma :
 troubles nerveux
 mydriase
 sécheresse des muqueuses
 rétention urinaire
 constipation
 tachycardie sinusale
→ cela peut déboucher sur un coma : dans 60% des cas, et de profondeur modérée.
o
Troubles cardiovasculaires caractérisés par :
 augmentation de la tachycardie sinusale
 troubles de la repolarisation
 troubles de la conduction auriculo ventriculaire et intraventriculaire
→ Tout cela peut aboutir à un arrêt cardiaque.
La toxicité cardiaque est plus faible avec les ISRS et les antidépresseurs non imipramiques et non
IMAO de structure originale.
o
Facteurs de gravité de l'intoxication :
 hypoxémie : favorise les troubles cardiaques
 convulsions (possibles hors coma) : risque d'arrêt cardiaque si répétées
 associations médicamenteuses : par ex,les tricycliques + IMAO ou antidépresseur +
cardiotropes...
Cela peut être responsable d 'intoxications aiguës graves.
o
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Le pronostic du traitement est fonction de :
o dose absorbée
o associations médicamenteuses
o age
o survenue de complications cardiaques
o rapidité de mise en oeuvre du traitement
o surveillance de l'intoxiqué (continue et prolongée)
VI.
Traitement des intoxications:
1. Traitement épurateur:
lavage gastrique + charbon actif (interruption du cycle entéro-hépatique : les
molécules présentes dans le tractus gastro-intestinal sont absorbées par le
charbon)
o épuration extra rénale : intérêt limité car l'épuration est lente au niveau rénal
du fait de la très forte liaison au niveau tissulaire.
o
2. Traitement symptomatique:
coma : ventilation assistée + apport calorique, surveillance hydroélectrolytique et pH
convulsions : diazépam IV
syndrome atropinique : Benzodiazépine par IM; éventuellement antagoniste
anticholinestérasique (ésérine)
o troubles cardiaques :
 tachycardie : traitement temporaire par physostigmine
 collapsus : correction immédiate par IV d'ions Na+ (lactate, bicarbonate), cela peut
provoquer une hypokaliémie éventuelle (corriger par Kcl)
o
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VII.
Toxicologie analytique:
On fait une analyse directe de : urine, liquide de lavage gastrique.
• En présence d'oxydants (K2CrO4/H2SO4), on obtient une réaction colorée.
• Il existe aussi un test immunoenzymatique (problème : il y a une possibilité d'interférence
avec la phénothiazine)
L'extraction de ces liquides biologiques se fait en milieu alcalin par des solvants organiques non
miscibles dans l'eau (éther, dichloro-méthane...)
→ extrait organique
→ CCM : révélation UV ou avec un réactif oxydant (NaNO2/HClO4) ou par une réaction de
précipitation de tous les alcaloïdes (réaction iodoplatinique)
→ CPG (ionisation), CPG(SM)
→ HPLC (UV)
Dosage du sang ou du plasma par déconjugaison des métabolites par hydrolyse enzymatique.
→ CPG, HPLC, radio-immuno essai.
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