1.4 Décomposition de E en somme directe de sous-espaces caractéristiques Théorème : Soit u un endomorphisme de E tel que son polynôme caractéristique s’écrive χ(X) = p ∏(X − λ k =1 )α , k k αk > 0 et les λk distincts deux à deux (autrement dit χ est scindé); alors son polynôme minimal est de la forme µ(X) = p ∏(X − λ k =1 ) β (avec 0 < βk ≤ αk) (voir 1.2). On pose : k k Nk = Ker (u − λk Id E )α . Alors : k (i) E est somme directe des Nk (1 ≤ k ≤ p); (ii) Nk = Ker(u − λk Id E ) β ; k (iii) λk est la seule valeur propre de la restriction u/Nk de u à Nk; (iv) Dim Nk = αk; (v) la restriction vk = (u - λkId)/Nk de u - λkId à Nk est nilpotente d’indice βk (1 ≤ k ≤ p); Les sous-espaces vectoriels Nk = Ker (u − λk Id E )α = Ker(u − λk Id E ) β sont appelés sous-espaces caractéristiques (ou spectraux) de u. k k Démonstration : (i) Comme χ(u) = 0 il résulte du théorème de décomposition des noyaux que E est somme directe des Nk; (ii) comme µ(u) = 0 on a pour les même raisons E = Ker(u − λk Id E ) β1 ⊕ ... ⊕ Ker(u − λk Id E ) βr . Mais Ker(u − λk Id E ) β ⊂ Nk pour 1 ≤ k ≤ p donc dim Ker(u − λk Id E ) β ≤ dim Nk. D’autre part k k p n= ∑ dimKer(u − λ Id k k =1 )β = k E p ∑ dimN k =1 par conséquent dim Ker(u − λk Id E ) β = dim Nk et Ker(u − λk Id E ) β = Nk. k k k (iii) soit λ une valeur propre de u/Nk . Il existe x ∈ Nk - {0} tel que u(x) = λx. Comme ( u − λk Id E ) k ( x) = 0 il vient α ( λ − λk ) αk x = 0, soit (λ − λk ) = 0 (puisque x est non nul) ou λ = λk; αj (iv) posons dk = dim Nk. D’après l’exercice 4 2°/ on a χ = p ∏χ k =1 D’après le (iii) χk = ( X − λ k ) soit χ = dk p ∏(X − λ k =1 k où χk est le polynôme caractéristique de u/Nk. ) d donc dk = αk pour 1 ≤ k ≤ p; k k (v) d ’après (ii) ν kβ = 0. Supposons que pour un j ∈ {1; ... ; p} on ait ν j β j −1 k (X − λj ) β j −1 ∏ (X − λ ) k≠ j βk k = 0. Alors le polynôme p annulerait u puisqu’il annule u/Nk pour 1 ≤ k ≤ p et donc ∏(X − λ k =1 ) β ne serait pas le k k polynôme minimal de u. Remarques : Le théorème précédent s’applique à tout endomorphisme u d’un espace vectoriel sur un corps K algébriquement clos (c par exemple); Dans les conditions du théorème précédent, si on pose Ek = Ker(u - λkIdE), on retrouve le résultat : u est diagonalisable ssi dim Ek = αk pour 1 ≤ k ≤ p. (en effet u est diagonalisable ssi βk = 1 pour 1 ≤ k ≤ p (proposition (iv) du 1.2) donc Nk = Ker(u - λkIdE) = Ek = sousespace propre relatif à la valeur propre λk donc dim Ek = αk. Réciproquement si dim Ek = αk alors Ek = Nk (car on a toujours Ek ⊂ Nk) donc E est somme directe des Nk i.e u est diagonalisable). Dans une base adaptée à la décomposition de E en somme directe des Nk la matrice de u est une matrice diagonale de ⎛ M1 ⎞ ⎜ ⎟ matrices : ⎜ % ⎟ où MK = matrice de la restriction u /Nk de u à Nk. ⎜ M p ⎟⎠ ⎝ Exercice 9 1°/ Soit M une matrice dont le polynôme caractéristique χ(X) = p ∏ ( X − λ )α k k =1 µ(X) = p ∏(X − λ k =1 k est scindé. Soit ) β sont polynôme minimal. Montrer que, si M est inversible, il existe des matrices Ai,k k k indépendantes dans Mn(n) telles que pour tout q de n on a : Mq = p ⎛ β i −1 ⎞ i =1 ⎝ k =0 ⎠ ∑ λqi ⎜⎜ ∑ q k Ai,k ⎟⎟ . Si M 'est pas inversible et λj est la valeur propre nulle la relation précédente est valable pour tout entier naturel q supérieur ou égal à βj. 2°/ Applications aux suites récurrentes : s étant un entier naturel non nul, et αi (0 ≤ i ≤ s-1) s scalaires, avec α0 non nul, soit (S') l'ensemble des suites (xn) à valeurs dans K vérifiant la relation de récurrence : xn+s = α0xn +α1xn+1 + ... + αs-1xn+s-1. s −1 Soit l'équation P(r) = rs - ∑α r k k =0 k = 0 (appelée équation caractéristique de (xn)). L'ensemble (S') est un espace vectoriel de dimension s. Si le polynôme P est scindé et si λ1, ... , λq sont les racines de P de multiplicités respectives α1, ... , αq une base de (S') est (n k λni )10≤≤ik≤≤qα −1 i Etant donné (y0, ... , ys-1) ∈ K il existe un unique élément de (S') tel que x0 = y0, ... , xs-1 = ys-1. p (Réf. : Ramis tome 1, p 415 à 417). 3°/ Autre application : convergence de Aq Soit A une matrice (n, n) à coefficients complexes. On pose ρ(A) = Max λ (appelé rayon spectral de A). Montrer que ∈Sp(A) : (Aq converge vers 0 ssi ρ(A) < 1). Le paragraphe suivant donne un autre exemple d’application du théorème précédent.