Gestion des catheters a chambre implantable et voies centrales

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Cathéters à chambre implantable
et dispositifs intraveineux de longue durée
Dr Dominique VIGOUROUX, Anesthésie réanimation - Rangueil
Pr Nicolas CARRERE, Chirurgie digestive - Purpan
On nous demande souvent de poser un « PAC », ou Port-a-cath®. Ce terme se rapporte à une marque déposée
de cathéter à chambre implantable, il existe d’autres fournisseurs, et il faut préférer l’appellation générique.
Le plus souvent, la demande émane de services d’oncologie, d’infectiologie, ou de nutrition. Les patients sont
censés recevoir des produits intraveineux pendant une longue durée, c’est-à-dire de quelques semaines à
plusieurs années. Ce sont souvent des produits à toxicité locale ou d’osmolarité élevée, qui nécessitent l’abord
d’une veine de gros calibre et à grand débit, le plus souvent la veine cave supérieure.
La discussion avec le demandeur permet parfois de choisir un autre type de dispositif intraveineux de longue
durée, que ce soit un simple cathéter central à émergence cutanée, éventuellement tunnellisé, mis en place par
abord direct de la jugulaire ou de la sous-clavière, ou bien par voie périphérique (PICC).
Nous parlerons essentiellement des chambres implantables, en sachant que les cathéters tunnellisés et les
PICC présentent les mêmes impératifs en termes de précautions d’hygiène et de management.
La pose
Il incombe au prescripteur d’informer le patient. Cette information, étayée par un support écrit, permet d’en
décrire le principe, les conditions de mise en place, les complications possibles, les précautions à prendre, et
de recueillir son consentement. L’idéal serait une consultation préalable auprès de l’opérateur.
La pose se fait toujours sous anesthésie locale, éventuellement aidée par une discrète sédation pour les patients
les plus pusillanimes. Le protoxyde d’azote (Méopa® ou Entonox®) a là de bonnes indications. La peau peut
être préparée par un patch anesthésique (Emla®), après détersion et antisepsie. Cela peut très bien se faire en
hospitalisation ambulatoire, il n’est pas nécessaire que le patient soit à jeun.
L’intervention nécessite des conditions d’asepsie chirurgicale, qui ne se trouvent que dans un bloc opératoire.
La technique proprement dite fait appel soit à une dénudation chirurgicale (veine jugulaire externe, ou
interne), soit à une ponction percutanée de la jugulaire interne ou de la sous-clavière, ou encore par abord
percutané d’une veine périphérique du bras sous échographie. L’insertion du cathéter en bonne position est
guidée sous scopie, l’extrémité doit se trouver dans la veine cave supérieure, à proximité de l’oreillette. Le
cathéter, silicone ou polyuréthane, est tunnellisé sous la peau puis relié à la chambre. Celle-ci, en matière
plastique ou en titane, est fixée au plan profond afin d’éviter le risque de retournement, puis la peau est
refermée. Un contrôle radiologique est systématique.
Des complications pendant la pose sont possibles, liées à la technique de ponction
•
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•
Pneumothorax, le plus souvent minime et spontanément résolutif, mais nécessitant parfois un
drainage
Hémothorax, heureusement rarissime
Troubles du rythme passagers si le cathéter est poussé trop loin
Une lésion nerveuse est possible, souvent plutôt une extension de l’anesthésie locale
L’entretien
Quelques principes
On pose un simple pansement sec si la chambre n’est pas utilisée, sinon un pansement transparent par-dessus
l’aiguille permet de voir et dépister une complication locale.
La chambre ne doit être ponctionnée qu’avec des aiguilles spéciales, dites « de Huber » dont le biseau est
étudié pour ne pas carotter le septum. La ponction doit être franche et complète, jusqu’au contact métallique
du fond de la chambre. Les seringues utilisées doivent avoir un volume d’au moins 10 ml, afin d’éviter des
pressions excessives, pouvant être à l’origine de rupture ou de désinsertion. L’injection n’est réalisée qu’après
vérification de l’existence d’un reflux qui signe la position intra vasculaire du cathéter. Cependant, il arrive
que ce reflux soit difficile ou impossible à obtenir, en raison d’un effet de valve à l’extrémité. Il faut parfois
l’accepter, après contrôle radiologique.
L’aiguille est toujours retirée en gardant une pression positive sur le piston afin d’éviter tout reflux de sang
dans l’extrémité du cathéter. Ce retrait peut s’aider d’un dispositif anti-piqûre, ou bien de la participation du
patient qui maintient lui-même la chambre, afin d’éviter une piqûre accidentelle de l’intervenant par effet
rebond. De la même manière le clampage de la ligne en fin d’injection sur un robinet se fait en pression
positive.
Le dispositif peut être utilisé immédiatement, ou bien après cicatrisation.
Un carnet de surveillance a été remis au patient.
Les points non résorbables sont retirés au dixième jour. En attendant, il faut proscrire les bains, en autorisant
une douche rapide avec protection locale par pansement imperméable les premiers jours, et séchage soigneux.
Toutes les manipulations sur la chambre doivent assurer des conditions d’asepsie de type chirurgicale, avec
calot, masque, désinfection des mains, gants stériles, champ stérile. Les manipulations sur la ligne de
perfusion se font par l’intermédiaire de compresses imprégnées d’antiseptique. Chaque nouvelle perfusion
utilise une tubulure neuve. L’aiguille (« gripper ») est changée toutes les semaines. Chaque nouvelle ponction
de la chambre peut bénéficier d’une préparation par patch anesthésique.
Le cathéter et la chambre doivent être rincés régulièrement.
On utilise du sérum physiologique. Il n’est pas nécessaire d’ajouter de l’héparine, dont la durée d’action est
insuffisante, et qui peut être à l’origine d’effets secondaires, voire de surdosages. Ce rinçage doit être
renouvelé après chaque utilisation ; entre deux produits ; après chaque prélèvement ; et sinon au minimum
toutes les quatre semaines.
Il est réalisé avec une seringue d’au moins 10 ml, de façon pulsée et en rotation afin de bien nettoyer la
chambre. L’aiguille est toujours retirée en gardant une pression positive sur le piston.
Chambre implantable
Changer à chaque
produit
Changer tous les 7 jours
Masque
Friction HydroAlcoolique
Changer
toutes
les 24h
Gants stériles
Préparation cutanée 4 temps
Pose pansement transparent
Manipulations :
Friction HydroAlcoolique
+
Compresses stériles imprégnées
d’antiseptique alcoolique
+
Changer bouchon obturateur à
chaque manipulation
+
Changer toutes les 96 heures
Masque
Friction HydroAlcoolique
Gants stériles
Compresses stériles imprégnées
d’antiseptique alcoolique
EOHH CHU Toulouse 2010
Protection bouchon pansement adhésif
2
Les complications
Occlusion, thrombose
C’est une complication fréquente. Il n’y a pas de recommandation concernant une prophylaxie antithrombotique. Les précautions déjà décrites doivent suffire à en diminuer le risque.
Il faut s’en préoccuper dès qu’il semble y avoir une difficulté à l’injection, une diminution du débit, une
disparition du reflux, surtout sans attendre l’occlusion complète. Un contrôle radiologique permet d’éliminer
une autre cause d’obstruction, telle qu’une plicature du cathéter, ou son déplacement. Le protocole de
désobstruction fait appel à une fibrinolyse par streptokinase ou urokinase, en milieu hospitalier.
Dans les cas avancés, il faut rechercher une thrombophlébite par écho doppler (SOS phlébite), qui peut
déboucher sur un traitement anticoagulant systémique, et faire discuter l’ablation du dispositif.
Infection
L’apparition d’une fièvre, surtout si elle est accompagnée de signes locaux, et en l’absence d’autre signe
d’appel doit faire évoquer une infection sur cathéter. Cette suspicion doit faire poser l’indication d’une
hospitalisation rapide et de l’arrêt des perfusions. Cette infection peut être d’origine externe, ou bien interne
par colonisation.
Les examens bactériologiques font appel aux hémocultures par le cathéter et par voie périphérique. Il a été
proposé différents protocoles avec cultures quantitatives, qui restent difficiles à mettre en place.
On n’en est plus à l’ablation systématique du cathéter par principe de précaution, d’autant que les abords
veineux peuvent être devenus difficiles chez certains patients, rendant le dispositif très précieux. Avant donc
d’envisager cette sanction, il est raisonnable d’essayer un traitement conservateur. En l’absence de signes de
gravité, et selon les résultats bactériologiques, on peut en effet procéder à une tentative de stérilisation du
cathéter par un verrou antibiotique plus ou moins ciblé sur la bactériologie, renouvelé quotidiennement. Il est
bien sûr associé à une antibiothérapie systémique.
Complications locales
Extravasation
L’apparition d’une rougeur, d’un œdème ou d’une douleur peuvent signer une injection sous-cutanée.
La cause en est le plus souvent une erreur de ponction, en dehors de la chambre, souvent favorisée par une
chambre trop petite ou difficile à repérer sous un tissus adipeux abondant. Mais il arrive aussi que le cathéter
se déconnecte de la chambre, ou qu’il se rompe (en particulier sous la pince costo-claviculaire). Une
opacification radiologique en fait le diagnostic. Il ne reste plus qu’à enlever et changer le dispositif.
Un problème particulier concerne l’extravasation de produits de chimiothérapie cytotoxiques. Il s’agit alors
d’une urgence grave qui peut nécessiter une intervention chirurgicale avec ablation, lavage, drainage, voire
excision de tissus nécrosés.
Désunion, ulcération
Cette complication est souvent favorisée par une cicatrice trop proche du rebord de la chambre, avec effet de
billot et d’ischémie, surtout chez des patients dénutris ou débilités. L’attitude est alors fonction de la gravité et
des risques de surinfection, depuis l’abstention momentanée des manipulations avec soins locaux, jusqu’à
l’ablation pure et simple.
Cas des cathéters à émergence cutanée
Dans le cas des cathéters tunnellisés en silicone, il arrive que la partie externe, ou le connecteur se rompe, sous
l’effet de clampages répétés. Rappelons à ce sujet qu’il y a une zone renforcée destinée au clampage, et qu’il
ne faut pas utiliser de clamps ou de pinces en dehors de cette zone. Ceci pour dire qu’il existe des kits de
réparation en fonction des marques, et qu’on peut souvent ne pas changer complètement le cathéter. Cette
réparation se fait en milieu stérile.
Pour ce type de cathéter, il faut aussi signaler le redoutable risque d’ouverture accidentelle sur l’extérieur,
avec selon la position du patient :
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•
soit embolie gazeuse qui peut être massive et mortelle,
soit perte sanguine pendant toute une nuit…
Rappelons enfin qu’il n’y a pas de contrindication au port de la ceinture de sécurité, ni à la pratique du sport
(non violent), et que le titane n’interfère pas avec les portiques détecteurs de métaux ni avec l’IRM.
En fin de traitement
On va nous demander l’ablation de ce cathéter, qui rappelle trop sa maladie au patient.
Cette intervention est très simple, en hospitalisation ambulatoire, voire en externe, sous anesthésie locale au
bloc opératoire.
Cependant, ces dispositifs sont étudiés et faits pour être tolérés très longtemps et il n’y a donc aucune urgence
à les enlever. Pour le patient, l’ablation est la preuve qu’il est guéri… Pour nous aussi.
Références
Guide d’évaluation de la qualité et de la surveillance des chambres à cathéters implantables ANAES,
11/02/2000
Documents qualité CHU / MO-CLIN-II- 12 : Chambres à cathéter implantable, 2010
Lettre circulaire n°96-2517 du 24 mai 1996 relative à la sécurité des dispositifs médicaux et à l'utilisation des
chambres à cathéters implantables
Lettre circulaire DH/EM 1 n ° 96-6225 du 28 octobre 1996 relative à la sécurité des dispositifs médicaux.
Utilisation des chambres à cathéter implantables et des aiguilles.
Livre V bis notamment les articles L. 665-5 et R. 665-41 du code de la santé publique
Norme NF S 94-370-1 relative aux chambres à cathéter implantables
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