Mémoire du Vél d`hiv

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les faits du mois
LE PATRIOTE RÉSISTANT
N° 911 - septembre 2016
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Mémoire du Vél d’hiv
Le 16 juillet 1995, date anniversaire de la rafle du Vél d’hiv, Jacques Chirac reconnaissait pour la première fois la responsabilité de l’Etat ­français
dans la déportation des juifs de France. Après l’adoption d’une proposition de loi portée par Jean Le Garrec, l’organisation annuelle d’une « Journée
nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français et d’hommage aux Justes de France » est instaurée en 2000.
Dimanche 17 juillet 2016 au matin.
La cérémonie officielle rassemble, place
des martyrs juifs du Vél d’Hiv quai de
Grenelle, les derniers témoins et leurs
descendants, les représentants de la
République, les associations et participants, exclusivement présents sur invitation. La veille au soir, les Fils et Filles
des déportés juifs de France à Paris se recueillaient devant la plaque posée à l’emplacement même du Vél d’Hiv. Après la
cérémonie officielle, ceux de l’Association du Convoi 6 feraient de même. Ici,
en chantier, un square sera inauguré l’an
prochain pour que personne n’oublie
ces 16 et 17 juillet 1942, où 13 152 juifs
furent arrêtés par la police française. 1 129
hommes, 2 916 femmes et 4 115 enfants
ont été enfermés dans l’enceinte sportive
du vélodrome d’hiver. Les couples sans
enfants et les célibataires ont été emmenés au camp de Drancy.
Entre les 19 et 24 juillet, les familles sont
conduites du Vél d’Hiv aux camps de
Pithiviers et Beaune-la-Rolande. Adultes
et adolescents ont été les premiers déportés. Brutalement séparés de leurs
parents, près de 3 000 petits enfants en
détresse attendront leur transfert vers
Drancy, avant d’être déportés entre les
17 et 18 août 1942. Aucun n’est revenu.
Une minute de silence associant les
­v ictimes du 14 juillet 2016 précède la cérémonie. Le grand rabbin Goldmann et
le grand rabbin Kauffman récitent des
prières. Suivent les dépôts de gerbes par
Eugène Daumas, président de l’Union
française des associations tziganes, Serge
Klarsfeld, président des Fils et Filles
des déportés juifs de France, Raphaël
Esrail, président de l’Union des déportés d’Auschwitz, Philippe Allouche, pour
la Fondation de la mémoire de la Shoah,
Francis Kalifat, président du Conseil
représentatif des institutions juives de
France, Valérie Pécresse, présidente du
Conseil régional d’Ile-de-France, Anne
Hidalgo, maire de Paris, Jean-Vincent
Placé, secrétaire d’Etat auprès du premier ministre… Tambours, sonnerie aux
morts, Marseillaise, jouée par la garde
républicaine.
Suivent les prises de paroles. « Nous
sommes sous le choc ; notre Nation est en
deuil », lance Raphaël Esrail. Dans les
camps, « la terreur, la mort étaient les
outils majeurs du nazisme. Aujourd’hui
ce sont les mêmes armes, avec le racisme
et l’antisémitisme croissants. Le temps
contemporain est incertain. L’Europe est
fragilisée. L’Europe est nécessaire. » Un
million de juifs ont été gazés à Birkenau.
Les survivants demandent un mémorial,
« lieu d’éducation des consciences contre la
violence », avec le soutien de la France et
de l’Allemagne. A 3 kilomètres, le ­musée
d’Auschwitz « ressemble à un supermar­
ché ». Birkenau est resté à l’abandon des
décennies. La Pologne décline sa responsabilité. « L’impuissance des survivants à
Monument commémoratif de la rafle du vél d’hiv érigé en 1994 dans le
15e arrondissement de paris, œuvre du sculpteur et peintre Walter Spitzer et de
l'architecte Mario Azeagury.
se faire entendre est terrible. Est-ce parce
qu’ils sont éclatés dans plusieurs pays ?
Nous demandons le soutien de tous les
Etats européens pour un projet de nature
européenne. »
Suit l’intervention de Beate Klarsfeld
soulignant qu’aucun allemand non juif
n’a jamais pris la parole en cette occasion.
« Héritière de Goethe et de Beethoven »,
consciente de sa responsabilité envers
l’avenir, elle s’est engagée pour que les nazis
n’aient aucune impunité, où qu’ils soient
dans le monde. Elle r­ appelle ­l ’action de
son mari et des Fils et filles des déportés
juifs pour rendre aux 4 000 enfants raflés
par des policiers et des inspecteurs français une identité et un visage. Elle rappelle leur participation active à tous les
procès. Dans le mémorial de la déportation, les fils et filles sont désormais lll
Nos actions et leurs conséquences…
En 1942, Edgard Dreyfuss demande à Jean-Joseph et
Anne-Marie-Louise Raclet de cacher ses enfants Nadine,
5 ans, et Jean, 7 ans, à Luzinay, village d’Isère désormais
en zone occupée. Monsieur Dédieu, un ami, fusillé peu
après par les nazis, l’avait averti qu’il ne pouvait pas
rester à Vienne. Par l’intermédiaire de Monsieur Boulud,
maire de Luzinay, ils trouvent refuge dans la famille.
Extraits du témoignage de Jessie Chapuis, arrièrepetite-fille de Justes :
« (…) Mes arrière-grands-parents t­ enaient la boulangerie
de Luzinay. Sous le même toit vivaient les grands-parents
d’Anne-Marie-Louise. La boulangerie était une maison
chaleureuse où plusieurs générations se côtoyaient donnant
l’illusion d’une grande famille malgré plusieurs lignées
d’enfants uniques. Zize et Lili, comme on les appelait,
ont immédiatement accepté la demande de Monsieur
Dreyfuss, ils savaient le ­danger qu’encouraient ces enfants
et c’était pour eux normal car c’était leur devoir.
Nadine et Jean passèrent six mois à la boulangerie sans
aller à l’école, sans sortir de la maison. Mon grand-père,
Robert, avait neuf ans et savait qu’il devait garder le
secret. (…) Zize et Monsieur Boulud raccompagnèrent
les enfants au bout de six mois en juin 1943 sans leur
dire le motif de leur trajet, Zize précisa à Jean que s’ils
étaient arrêtés, lui et sa soeur ne devraient rien dire et
lui expliqua qu’elle dirait qu’ils étaient leurs enfants et
Monsieur Boulud, son époux. Quand ils arrivèrent à
Condrieu, mon arrière-grand-mère et Monsieur Boulud
saluèrent les parents Dreyfuss et partirent tout de suite
sans dire mot. (…) En un temps où la barbarie sévit aussi
à l’inté­rieur de nos frontières ­fran­çaises et européennes,
où la France connaît une montée de l’antisémitisme
et de l’isla­mophobie, où les derniers survivants de la
déportation peinent à se faire entendre dans les classes
des écoles, nous nous interrogeons sur nos ressources
personnelles pour faire face, pour contrer ne serait-ce qu’à
notre échelle, le sectarisme et la xéno­phobie ambiante.
Il en va certainement par là, par ce rappel de l’Histoire ;
dont nous ne connaissons trop souvent que les contours,
et dans laquelle nous piochons aisément pour discourir
sur notre présent sans nous servir de ce qu’elle aurait dû
nous apprendre de plus précieux : l’esprit critique, par
ce rappel de ces tranches de vies dont la valeur s’estime
par la fraternité qu’elles ont disséminée. Mon arrièregrand-père était un homme simple, proche de la nature,
adroit et débrouillard, qui s’en remettait souvent aux
choix de son épouse. Mon arrière-grand-mère était
une femme auto­ritaire, intelligente, passionnée, avantgardiste, ouverte et au cœur d’or. Une femme qui fut
une personnalité dans ce ­v illage de Luzinay, notamment
pour son engagement dans l’Amicale laïque qui proposait
des activités culturelles à destination des jeunes filles.
Elle aurait rêvé d’être chanteuse et accompagnait ses
danseuses au piano. Et grâce au gain des représentations,
des voyages étaient organisés et permettaient à cette
jeunesse campagnarde de découvrir d’autres horizons.
Pendant la guerre, les représentations continuèrent mais
les profits furent versés sur des livrets d’épargne ouverts
pour chaque prisonnier luzinaysard. Je cite cela pour
dire et nommer l’art et la culture souvent délaissés,
hélas, en ces temps sécuritaires comme premier ­vecteur
de rencontre avec l’altérité.
Si l’acte de résistance de mes arrière-grands-parents ne
peut être associé à des actions frontales contre l’ennemi,
il se définit par un esprit plus ordinaire mais tout aussi
essentiel. Si j’ai l’opportunité aujourd’hui de témoigner
au nom de ma famille, de cette famille modeste, c’est
peut-être pour que nous retenions ensemble que la
grandeur de nos actions s’estime à la grandeur de
leurs conséquences. Même si nous ne nous sentons
pas de l’étoffe des plus grands, nous avons en nous la
ressource, si nous le voulons, pour tendre la main aux
gens qui tout autour de nous souffrent et ont besoin de
protection. Quand nous voyons à présent nos amis juifs
quitter leur patrie, la France, invoquant la peur qu’ils
ressentent au quotidien, nous nous inquiétons de notre
force pour lutter férocement contre l’antisémitisme, sans
l’appui de nos concitoyens juifs. En tant que famille
athée, nous remettons nos croyances et nos espoirs en la
République et nous savons que nous avons absolument
besoin du peuple juif pour la composer, l’animer et la
faire grandir.
Mon arrière-grand-mère nous a quittés il y a seulement
trois ans et sept mois à presque cent-trois ans. Nous
imaginons les larmes de joie qu’elle aurait eues de cet
honneur et quel aurait été son effondrement, face aux
votes de son village, dominés par l’extrême droite. Mais
aujourd’hui, son optimisme et sa foi en l’humanité nous
auraient galvanisés. »
6
les faits du mois
liés aux pères, mères, soeurs et frères.
« Sans les fils et filles, quelle mémoire ?
Sans Serge Karlsfeld, je n’aurais rien pu
faire parce que j’étais allemande. Sans
moi, il ne pouvait rien faire. Ensemble
on est forts ! »
lll
Tous comptables
de l’avenir
Michel Rosenfeld, témoin, à 8 ans, de la
rafle du Vél d’Hiv, s’appuie sur Georges
Perec pour dire « je me souviens ». Son
père était au stalag en Autriche. Il habitait avec sa mère dans le 4e arrondissement. L’immeuble avait trois escaliers, A,
B, C. Escalier C, vivaient trois ­familles
juives polonaises. La veille, des rumeurs
avaient circulé. Sa mère avait demandé à sa patronne de passer la nuit avec
son fils à l’atelier au deuxième étage
du 8 rue d’Enghien, au lieu de rentrer
chez elle. L’atelier était grand avec une
fenêtre donnant sur la rue, d’où il a vu
les bus, à l’angle de la rue. A partir de ce
jour, Michel Rosenfeld a perdu sa légèreté d’enfant. Il salue la France de 1792,
dans laquelle les juifs devinrent citoyens.
S’adressant à la jeunesse, il conclut : « à
vous, maintenant, de faire en sorte que
notre passé ne devienne pas votre futur ».
Pierre-François Veil, président du
Comité Français Yad Vashem rappelle
la rafle par la police française sous les
ordres de Bousquet il y a 72 ans, menant
à l’abattoir des personnes ­coupables du
seul fait d’être juives. Les 6 semaines
suivantes jusqu’au 30 septembre, 42 000
juifs furent déportés et en deux ans,
33 000 de plus : Vichy insistait auprès
des nazis pour déporter les e­ nfants. En
zone sud, on vit l’intervention de catholiques et de p
­ rotestants, dont la célèbre lettre pastorale de Monseigneur
Saliège. La France, terre d’asile et d’accueil, manquait à sa parole. Il a fallu
50 ans pour entendre celle de Jacques
Chirac. L'orateur poursuit : « Nous ne
­devons pas laisser les intellectuels de
plateau ­justifier Vichy ; c’est une insulte
aux nombreux Français qui ont sauvé des
juifs de la déportation, Justes parmi les
nations. » Chaque ­a nnée, des dizaines
de dossiers sont ­t raités. Les derniers témoins disparaissent. « Des nuages pèsent
sur l’Europe porteurs des vieux démons
du populisme, de la peur, de la haine de
l’autre. Nous sommes tous comptables
du monde que nous laisserons à nos en­
fants », conclut-il, laissant la parole à
Jessie Chapuis, 26 ans, arrière-petitefille d’un couple de Justes, qui salue la
présence de Nadine et Jean Dreyfuss,
enfants cachés par sa famille (cf. p. 5).
Le président du CRIF succède à la jeune
femme, unanimement saluée. Rendant
hommage à « l’inlassable détermination
des survivants », il nomme Elie Wiesel
et Charles Palant…
Vincent Placé conclut la cérémonie, non
sans adresser ses pensées aux victimes
de Nice le 14 juillet, rappelant longuement les faits de la rafle du Vél d’Hiv,
une des « plus grandes atrocités de notre
Histoire ». Avec Jessie Chapuis, il sera le
seul à évoquer le sort réservé aux « gens
du voyage ». H. A.
LE PATRIOTE RÉSISTANT
N° 911 - septembre 2016
Disparitions
Raymonde Tillon Au nom de la liberté
Dernière survivante des 33 femmes élues députées pour la première fois à la Libération,
Raymonde Barbé-Nédélec-Tillon est morte à Paris le 17 juillet dernier. Inhumée à
Rennes, elle avait fêté ses cent ans.
« Les femmes étaient reconnues comme ci­
toyennes, en tenant compte de leur travail
dans la Résistance. Nous étions de partis
différents, mais nous nous disions : enfin ! »,
­témoignait-elle devant la presse, 60 ans après
la fondation de l’Assemblée constituante de
l’après guerre.
Orpheline à cinq ans, Raymonde Barbé, née
à Puteaux le 22 octobre 1915 d’un père employé des transports en commun, est placée
dans une pension religieuse d’où elle ­s’enfuit,
adolescente, pour rejoindre son grand frère,
militant communiste et syndicaliste et une
de ses sœurs, près d’Arles.
Gagnant sa vie comme employée de commerce, elle adhère de son propre chef au Parti
communiste français en 1932. Dès sa fondation, elle milite à la Fédération Sportive et
Gymnique du Travail, née en 1934 de l’union
des fédérations sportives ouvrières face aux
fascismes. Sur l’aéroport de Marignane, elle
apprendra à piloter des avions légers. Lors
d’une tournée de propagande, elle rencontre
Charles Nédélec, menuisier parisien venu à
Marseille depuis 1932 pour réorganiser le syndicat. Raymonde Barbé devient Raymonde
Barbé-Nédélec à Arles.
Militant pour la victoire du Front populaire, le couple s’installe à Marseille.
Lorsque Danielle Casanova fondera l’Union
des jeunes filles de France pour créer un
large mouvement féminin, pacifiste et antifasciste, Raymonde organisera sa section
locale. Lors du congrès de fusion de la CGT
les 4 et 5 ­janvier 1935 à Marseille, Charles
Nédélec est élu secrétaire adjoint de la nouvelle Union départementale. Responsable du
Comité de défense de la République espagnole, organisateur de la solidarité, Charles
Nédélec participe aussi à la formation des
Brigades internationales. En 1940, fait prisonnier à Montmédy le 19 juin, envoyé au
stalag II A de Neubrandebourg, il refusera
de travailler pour les Allemands et parvient à
obtenir un rapatriement sanitaire. Lorsqu’il
reviendra en France en septembre 1941,
Raymonde a déjà été arrêtée sur dénonciation. Ils ne se reverront plus.
« La Marseillaise en entier »
A Marseille, « naturellement », Raymonde
a refusé la défaite. Dénoncée, elle est arrêtée
le 31 mars 1941, jugée par le Tribunal maritime de Toulon, section spéciale du régime
de Vichy. Condamnée le 7 octobre à vingt
ans de travaux forcés et vingt ans d’interdiction de séjour, elle est incarcérée à Lyon,
puis Rennes, après Marseille et Toulon. En
prison, elle continue d’agir dans les triangles
clandestins, notamment à Rennes, où la
plupart des détenues sont communistes,
se réclamant d’une culture politique commune, et organisées. Ici, après des manifestations unissant détenues politiques et
détenues de droit commun, elles ont créé un
atelier p
­ olitique séparé des droit commun,
­fonctionnant sous la direction d’un bureau
dirigé par Georgette Cadras. Ici, elles ont arraché après des mois le droit de circuler dans
l’atelier, d’étudier, de faire des lectures collectives, de faire entrer des livres, de donner
des cours. Ici, le 11 novembre 1942, les détenues ont confectionné des insignes tricolores représentant leur sabot de prisonnières,
portées par des surveillantes. Ici, elles ont
réussi à chanter ce jour-là la Marseillaise et le
Chant du Départ « en ­entier ». Ici, ­apprenant
le ­sabordage de la rade de Toulon, elles ont
décidé d’une minute de silence associant
même une surveillante. (1)
Livrée aux Allemands, Raymonde est déportée en 1944 à Sarrebruck puis Ravensbrück.
Elle continue d’organiser l’entraide pour la
survie des plus jeunes, avant d’être envoyée
travailler dans un Kommando dépendant
du camp de Buchenwald pour une usine de
guerre de Leipzig. Là aussi, elle s’applique à
organiser le sabotage des engins de mort.
Le 20 avril 1945, elle profite de l’évacuation du Kommando pour s’évader avec un
groupe de camarades. Elle arrive à Paris où
elle apprend que son mari est « mort d’épuisement » dans la Résistance. (2)
Embauchée par l’Union départementale
CGT des Bouches-du-Rhône, Raymonde
retourne à Marseille, vite nommée responsable de la Commission féminine.
En septembre 1945, elle est élue conseillère générale du 6e canton de Marseille et
un mois plus tard, députée de la 1re circonscription des Bouches-du-Rhône sur la liste
de François Billoux. Elle restera députée
communiste de 1945 à 1951.
Contre l’esprit de démission
1) Mise à pied le 19 mars 1943 pour « complicité avec les détenues politiques » (voir l’article
de Corinne Jaladieu, « Résistances en prison »,
Criminopolis (mis en ligne le 4 février 2014).
2) Charles Nédélec a participé à la préparation
des accords du Perreux avec, entre autres missions, celle d’assurer la liaison entre le bureau de
la CGT et quatorze fédérations clandestines en
cours de reconstruction. A l’automne 1943, il représentait Benoît Frachon au Comité ­directeur
du Conseil National de la Résistance. Pris d’un
malaise dans une rue de Paris, il est mort d’une
hémorragie ­cérébrale le 3 mai 1944.
Sources : Dictionnaire biographique Maitron,
articles de René Lemarquis et Antoine Olivesi
et d'Antoine Olivesi et Gérard Leidet.
Georges Séguy
« S’unir pour une cause
commune »
Membre du Comité d’honneur de la
FNDIRP jusqu’en 2013, Georges Séguy,
ancien secrétaire général de la CGT, est
mort le samedi 13 août. Il avait 89 ans.
« S’il y a un vers de l’Internationale que je ne
chante pas, c’est bien “Du passé faisons table
rase !” » assurait le président honoraire de
l’Institut d’Histoire Sociale de la CGT. (1) dans
notre rubrique A bâtons ­rompus, Georges
Séguy évoquait ce jour où, apprenant l’exécution de Pierre Sémard, ami de sa famille,
fusillé par les nazis le 7 mars 1942, il décida
de quitter l’école pour rejoindre la Résistance
« à temps plein ». Pour réaliser tracts, faux
papiers et journaux, il apprendra à 15 ans
le métier de conducteur- t­ ypographe et deviendra agent de liaison.
Sur les bancs de l’Assemblée, elle a rencontré
Charles Tillon, ancien chef des FTP, député
de Seine-Saint-Denis, maire d’Aubervilliers,
ministre du général de Gaulle de 1944 à 47.
Sans « explication plausible », le PCF décide,
en 1950, de ne pas renouveler la candidature
de Raymonde aux élections. Elle épouse le
« mutin de la Mer noire » en 1951. Ils auront
deux filles. Lorsque Charles Tillon et André
Marty sont exclus du Comité central en 1952,
Raymonde Barbé-Nédélec-Tillon soutient
son époux. Elle quitte son emploi à la mairie
de Drancy pour le suivre à Montjustin dans Georges Séguy et Suzanne Barrès-Paul
les Basses-Alpes, puis à Aix-en-Provence. En aux obsèques de Marcel Paul en 1982.
1970, ils seront tous deux exclus pour avoir
Fils d’un cheminot syndicaliste touloufermement condamné l’invasion des chars sain, Georges Séguy s’est inscrit tout gamin
dans le sillage de son père. En 1936, il a assoviétiques en Tchécoslovaquie.
Raymonde et Charles Tillon se retirent en sisté à la réunification de la CGT au congrès
Bretagne en 1974. En 2002, Germaine Tillion de Toulouse. La même année il a vu naître
préfaçait l’unique livre de Raymonde titré : la SNCF et l’avènement du statut des cheminots. Dès 1940, Georges Séguy prend part aux
J’écris ton nom, Liberté.
Lui rendant hommage le 25 juillet à Rennes réunions clandestines des jeunesses commuau nom de la République, Jean-Yves Le Drian nistes, organisant les lancers de tracts anticoncluait : « (…) Raymonde Tillon-Nédélec a nazis et anti-vichystes du 6 novembre, lors de
traversé la fureur de ce siècle en ne renonçant la visite du Maréchal à Toulouse. A l’école, il
jamais à son exigence démocratique. Nous lui entraîne même ses camarades dans une grève
sommes reconnaissants d’avoir ­témoigné, par des cours obligatoires d’allemand et d’insses actes, de ce que peuvent la conviction et truction civique à la gloire de Vichy. Agent
l’engagement contre l’injustice et l’arbitraire ». de liaison, il sera en relation avec les FTP, les
Croix de guerre 1939-45, Chevalier de FTP-MOI, le Front national, les Jeunesses
la Légion d’honneur, Raymonde Barbé- communistes, mais aussi des organisations
Nédélec-Tillon était l’une des très rares gaullistes, catholiques, socialistes… Arrêté
femmes d
­ écorées de la Médaille militaire.
par la Gestapo en 1944 sur dénonciation,
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