Kinesither Rev 2016;16(179):1–2 Éditorial Individualiser la prise en charge de la BPCO : simple mode ou occasion de collaborations productives ? To personalize the taking care of COPD patients: Single effort or productive team joint effort? Nicolas Roche a, Hugues Gauchez b epuis quelques années, l'idée d'une individualisation de la prise en charge des patients est de plus en plus en vogue dans le domaine de la santé, que ce soit auprès des professions médicales ou paramédicales. Le concept d'une prise en charge standardisée, semblable pour tous les malades porteurs d'une maladie donnée à un stade de sévérité donné, a du plomb dans l'aile. Dans le domaine des traitements pharmacologiques pour les maladies respiratoires, les exemples se font de plus en plus nombreux. Chez les patients porteurs de cancers bronchiques, près d'une demi-douzaine de mutations au sein des cellules tumorales ont été identifiées comme susceptibles de conditionner le choix des thérapeutiques selon la voie cellulaire à cibler. Dans l'asthme sévère, l'existence d'un contexte allergique à au moins un allergène per annuel autorise l'utilisation de traitements dirigés contre les IgE, anticorps de l'allergie) ; l'existence d'une éosinophilie sanguine (disponible en routine dans toute numération formule sanguine) oriente vers un traitement ciblant des molécules impliquées dans l'attraction et/ou l'activation de ces cellules. Dans la BPCO, le taux d'éosinophiles sanguins pourrait être utilisé pour guider les décisions d'instituer une corticothérapie inhalée (quoique ce point soit l'objet de controverses). Mais la prise en charge et sa personnalisation ne se limitent pas aux traitements pharmacologiques, bien au contraire ! Prenons l'exemple de la BPCO : l'éducation à la santé et l'éducation thérapeutique, l'aide au sevrage tabagique, le réentraînement à l'effort, l'ergothérapie, le soutien psychologique, la prise en charge nutritionnelle jouent un rôle essentiel. Toutes ces interventions peuvent être proposées de manière groupée, dans le cadre de la réhabilitation respiratoire, en centre ou en ambulatoire. Mais elles peuvent également être dispensées individuellement. Dans un cas comme dans l'autre, la collaboration entre les différents intervenants est essentielle, notamment pour que les objectifs et moyens des différentes interventions soient réellement adaptés aux besoins propres de chaque patient, plutôt que de résulter d'une sorte de « copiécollé ». Un des objectifs généraux majeurs dans la BPCO comme dans de nombreuses autres maladies chroniques (et même, plus largement, dans la population générale) est de remobiliser les malades, de leur permettre de retrouver un niveau satisfaisant, et gratifiant pour eux, d'activité physique. En effet, le niveau d'activité est lié de manière évidente à la qualité de vie, mais aussi à la survie. Mais tous les malades n'ont pas les mêmes possibilités, les mêmes motivations, les mêmes limitations, les mêmes envies. Appliquer à tous la même stratégie d'entraînement et de reprise d'activité est donc voué à l'échec. Or, dans un objectif de reprise d'activité, les intervenants possibles sont nombreux, qu'ils soient des « professionnels de l'activité physique » ou de simples conseillers : kinésithérapeute bien sûr mais aussi médecin généraliste, pneumologue, spécialiste en médecine physique et réadaptation, cardiologue, psychologue et/ou psychiatre, ergothérapeute, infirmière d'éducation, professeur d'activité physique adaptée, coach, pharmacien. . . Cette multiplicité a conduit à proposer le terme « multidisciplinaire » pour qualifier la prise en charge. Mais ce terme ne met pas suffisamment en valeur les nécessaires interactions entre ces différents professionnels, pour offrir une prise en charge coordonnée, dans laquelle les informations nécessaires sont échangées au fil des besoins. Un des obstacles à cette interdisciplinarité est le temps nécessaire pour sa mise en œuvre, qui vient s'ajouter au temps directement passé auprès du patient. Ceci est paradoxal quand l'on D a Service de pneumologie, hôpital Cochin, 27, rue du FaubourgSaint-Jacques, 75014 Paris, France b Lille sous-groupe « interdisciplinarité », groupe BPCO de la SPLF, 64, avenue Alfred-Lefrançois, 59200 Tourcoing, France Auteur correspondant : N. Roche, Service de pneumologie, hôpital Cochin, 27, rue du FaubourgSaint-Jacques, 75014 Paris, France. Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2016.09.002 © 2016 Publié par Elsevier Masson SAS. 1 Éditorial considère la vitesse d'échange d'informations permises par les outils de communication à notre disposition. À nous de mettre en place les plates-formes d'échange adaptées, bien sûr dans le respect des désirs des patients. 2 N. Roche, H. Gauchez Déclaration de liens d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.