Recommandations pour l`accueil des enfants et des

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Recommandations élaborées par le
CRFTC en lien avec: le Réseau TC
Ile-de-France, l’ADEP, le CMPJAFSEF, la Fondation Vallée.
Soutenues par La Fondation
Caisse d’Epargne, la Fondation
de France.
Les membre du groupe de travail:
Marie-Thérèse Aeschbascher, Elisette
Andrianaja, Guy Benamozig, Jean
Chambry, Patricia De Collasson,
Gabrielle Marioni, Hélène Oppenheim-Gluckman, Isabelle Pourret,
Edouard Thevenin-Lemoine, JeanJacques-Weïss.
Recommandations pour l’accueil des enfants
et des adolescents dont un parent est
traumatisé crânien ou cérébro-lésé
recommandations concernent les modalités d’annonce du traumatisme crânien ou de la lésion cérébrale
Cesacquise
de l’un de leurs parents aux enfants et adolescents et l’accueil de ces derniers par les soignants qui
prennent en charge le blessé.
I.
ETAT DES LIEUX
La réflexion sur les modalités de cette annonce et de cet accueil est quasi inexistante. Peu de recherches
concernent par ailleurs le vécu des enfants et des adolescents ayant un parent traumatisé crânien ou cérébro-lésé.
En ce qui concerne le vécu des enfants, Pessar et al1examinent les effets du traumatisme crânien d’un parent
sur les comportements des enfants entre 2 et 23 ans tels qu’ils sont décrits par le parent non blessé. Il y aurait
chez ces enfants plus de passages à l’acte, plus de problèmes relationnels et émotionnels liés aux changements intervenus dans les capacités parentales du parent blessé mais aussi liés à la dépression de l’époux
non blessé. Uysal et al2, par contre, ne trouvent pas plus de troubles du comportement chez les enfants de
7 à 18 ans dont l’un des parents est traumatisé crânien que dans un groupe d’enfants avec des parents non
malades. Quatre autres articles ou communications se préoccupent des enfants avec un parent traumatisé
crânien ou cérébro-lésé. Le suivi psychologique de trois enfants avec un parent traumatisé crânien est décrit brièvement par Urbach et Culbert3. Urbach4 infère quelques hypothèses sur le vécu des enfants avec un
parent traumatisé crânien en s’appuyant sur des publications plus générales concernant le vécu des enfants
confrontés à la mort ou à la maladie d’un des parents. Murray5 montre que la rédaction d’un fascicule d’information sur la maladie du parent cérébro-lésé a aidé huit enfants entre 5 et 8 ans à faire face aux effets
de celle-ci. F. Butera-Prinzi et al6 ont étudié le vécu de quatre enfants de 7 à 12 ans vivant avec un parent
cérébro-lésé. Les enfants décrivent des sentiments complexes avec un vécu de perte et de traumatisme, un
sentiment d’isolement et de peur face au risque de désintégration de la famille et de violence. Ils font cependant preuve de capacité de résilience . L’étude de Oppenheim-Gluckman et al7 sur le vécu des enfants
de six à douze ans avec un parent cérébro-lésé montre que malgré l’absence de symptômes manifestes, et
1Pessar LF, Coad ML, Linn RT, Willer BS. The effects of parental traumatic brain injury on the behaviour of parents and children. Brain Injury 1993 ; 7,3 : 231-40.
2Uysal S, Hibbard M, Robillarf D, Pappadopoulos E, Jaffe M-The effect of parental traumatic brain injury on parenting and child behavior, The
Journal of head trauma rehabilitation,13,6,1998,57-71
3Urbach J R, Culbert J P.Head-injured parents and their children. Psychosomatics 1991 ; 32, 1 : 24-33.
4Urbach JR. The impact of parental head trauma on families with children. Psychiatric Medecine 1989 ; 7,1 : 17-35.
5Murray W. My Mum/Dad has had a brain injury, 3rd World Congress in Neurological Rehabilitation ; 2002 April 2-6, Venise, Italie.
6Butera-Prinzi F, Perlesz A : Through children’s eyes : children’s experience of living with a parent with an acquired brain injury, Brain Injury, 2004, 18, 1, 83-101.
7Oppenheim-Gluckman H, Marioni G, Virole B, Aescbascher MT, Canny-Verrier F : Vécu des enfants dont l’un des parents est cérébro-lésé,
étude préliminaire. Annales de Médecine Physique et de Réadaptation, 2003, 46 525-38
Oppenheim-Gluckman H, Marioni G, Virole B, Aescbascher MT, Canny-Verrier F Le dessin de la famille chez les enfants dont l’un des parents
est cérébro-lésé. Neuropsychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, 2003,51,525-38
Recommandations pour l’accueil des enfants et des adolescents
dont un parentest traumatisé crânien ou cérébro-lésé tout au long du parcours de soins. p.1
l’apparente adaptabilité de l’enfant à la situation créée par le traumatisme cérébral d’un des parents,
il existe un impact fort du handicap du parent sur le vécu de l’enfant et celui-ci s’exprime surtout à
travers le dessin de la famille. Dans ces dessins, la fréquence des anomalies de la représentation picturale
des corps des personnages et la fréquence des représentations de personnages vacillants, fantomatiques ou
«dans les airs» sont étonnantes et sont des traits «caractéristiques» associés à la représentation d’une structure
familiale perturbée par la présence d’un parent handicapé. Ces résultats suggèrent l’existence d’un impact
inconscient fort du handicap du parent sur l’enfant et sur l’ensemble de la représentation qu’il a du «corps
familial». La seule étude sur le vécu des adolescents avec un parent cérébro-lésé est celle de OppenheimGluckman et al8. Les adolescents présentent plus de signes d’appel symptomatiques que les enfants, en
particulier, des affects dépressifs, des difficultés scolaires, un fort sentiment de solitude malgré le maintien
d’une vie sociale et un fort sentiment d’insécurité. Environ la moitié des adolescents ont du mal à reconnaître
leur parent malade, le vivent comme un étranger et s’attribuent des caractéristiques du parent malade en lien
avec les conséquences de cette maladie, ce qui témoigne de difficultés des processus d’identifications et de
construction de l’identité. Ils ne trouvent pas, dans plus de la moitié des cas, d’interlocuteurs dans leur milieu
familial, scolaire ou amical qui puissent les aider à la fois dans leurs difficultés à faire face au quotidien au
handicap du parent et aussi à « faire avec » les questions existentielle liées à la maladie du parent. Ils expriment le besoin de mieux comprendre la maladie de leur parent et de rencontrer d’autres adolescents
dans le même cas qu’eux. En ce qui concerne le dessin de la famille, on retrouve, comme chez les enfants,
des anomalies de la représentation des corps des personnages, en particulier l’absence de mains ou la présence
de mains sans doigts, et l’absence de pieds ou la présence de pieds « moignons », la présence de personnages
fantomatiques, vacillants, « dans les airs ».
Ces études montrent l’importance d’une réflexion sur les modalités d’annonce du handicap du parent
auprès de cette population.
II.
RECOMMANDATIONS
D’où les recommandations suivantes élaborées par le CRFTC9 (Centre Ressource Francilien du Traumatisme Crânien), en lien avec le réseau TC Ile-de-France.
Ces recommandations ne concernent pas les enfants et les adolescents dont l’un des parents est en état végétatif chronique ou en état de mutisme akinétique. En effet, l’extrême difficulté à faire face à ces situations et
le traumatisme psychique qu’elles génèrent chez les enfants et les adolescents n’ont pour l’instant jamais été
évalués. De même, dans la mesure où il n’y a aucune étude sur les enfants ou les adolescents confrontés à la
mort de l’un de leur parent après un traumatisme crânien ou une lésion cérébrale, nous n’avons pas inclus ce
problème dans nos recommandations.
8Oppenheim-Gluckman H, Marioni G, Virole B, Aescbascher MT, Canny-Verrier F : Personal experience of children with a brain injured parent,
communication au congrès international sur le traumatisme crânien organisé par IBIA, Stockholm, Mai 2003
Oppenheim-Gluckman H, Marioni G, Chambry J, Aescbascher MT, Graindorge C. Vécu des adolescents dont l’un des parents est cérébro-lésés,
étude préliminaire. Annales de Réadaptation et de Médecine Physique, 2005, 48, 650-661
Oppenheim-Gluckman H, Marioni G, Chambry J, Aescbascher MT, Graindorge C. Le dessin de la famille chez l’adolescent avec un parent cérébro-lésé, étude préliminaire. Neuropsychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, 2005, 53, 254-262
9Le CRFTC a été contacté par l’ADEP (Association d’Entraide des Polios et Handicapés) à la suite des deux recherches sur le vécu des enfants
et des adolescents avec un parent cérébro-lésé menées dans le cadre de la Cellule d’Etude et de recherche sur la psychopathologie du traumatisme crânien (ADEP), en collaboration avec d’autres structures (Centre Médical Jacques Arnaud à Bouffémont, Fondation Vallée à Gentilly).
L’une de ces recherches a été financée par la Fondation de France
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dont un parentest traumatisé crânien ou cérébro-lésé tout au long du parcours de soins. p.2
Tout au long du parcours de soins
Il est nécessaire de prévoir dans les différentes structures de soins pour patients cérébro-lésés et aussi lors
du retour à domicile des mesures d’accueil spécifiques pour les enfants et les adolescents avec un parent
cérébro-lésé. L’aide au conjoint non blessé, dans ses aspects sociaux, quotidiens, psychologiques, dans la
mesure où elle prévient sa dépression et les effets d’épuisement liés au stress (burn-out) a aussi un rôle par
rapport aux enfants et adolescents car elle l’aide à assumer au mieux ses fonctions parentales et à maintenir sa
juste place. L’aide au parent cérébro-lésé par rapport à ses fonctions parentales souvent mises à mal par
les effets de la lésion cérébrale doit aussi faire partie des préoccupations des soignants, des programmes de
rééducation et de réadaptation de façon personnalisée et en fonction des capacités du blessé.
L’accueil des enfants et des adolescents par les soignants qui s’occupent du blessé tout au long du parcours de
soins a pour but avant tout de ne pas aggraver le traumatisme psychique et la perte des repères du groupe
familial.
Les divers services qui s’occupent du patient ou les praticiens qui s’occupent du patient lors de son retour à
domicile doivent se préoccuper du maintien des liens entre le parent blessé et ses enfants sous des formes
appropriées et en fonction de chaque cas.
Les médecins qui suivent le patient doivent proposer une rencontre avec les enfants, en présence ou non du
ou des parents suivant les circonstances, pour donner des informations adaptées sur la maladie aux différents
moments de l’évolution du patient.
Il peut être proposé parallèlement et si nécessaire aux membres du groupe familial de rencontrer, ensemble
ou séparément, pour un ou quelques entretiens, un psychothérapeute travaillant dans la structure de soins qui
pourra les aider à mieux faire face au traumatisme psychique et à la perte des repères relationnels que constitue
la maladie. La préoccupation des compétences parentales et du vécu des enfants ou adolescents fait partie de
ces entretiens.
Les différentes structures de soins devront disposer d’une liste de psychothérapeutes correspondants permettant d’adresser les parents ou les enfants et adolescents si un travail psychothérapeutique plus prolongé devait
être engagé.
Un travail de liaison avec les interlocuteurs de l’enfant ou de l’adolescent (enseignants, famille élargie) ne
peut être systématique, mais doit faire partie des préoccupations de ceux qui les rencontrent.
La formation des soignants à l’accueil des familles et des enfants doit faire partie des préoccupations des
structures qui prennent en charge les patients cérébro-lésés.
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Période de réanimation
Afin de ne pas aggraver le burn-out du parent sain et la perte des repères du groupe familial, le service devra
mettre en place des outils de communication permettant que celui-ci comprenne le fonctionnement du service et les objectifs des soins. Il devra mettre à disposition la documentation existante et indiquer les interlocuteurs susceptibles de l’aider (assistante sociale, Association de Familles de Traumatisés Crâniens, juriste)
et les démarches à entreprendre.
La possibilité pour l’enfant ou l’adolescent de rendre visite à son parent blessé devra être évaluée au cas
par cas et tenir compte des désirs des parents et de l’enfant. D’autres modalités de liens entre le parent blessé
et l’enfant pourront être proposés (dessins, photos, enregistrement etc…).
Période de rééducation
Les services de MPR et les soignants de ces services doivent être disponibles pour accueillir les enfants lors
des visites auprès du parent blessé et favoriser la reprise de contact avec celui-ci sous des formes appropriées,
en fonction de chaque cas et en tenant compte des troubles du parent blessé.
L’équipe devra être attentive dans son approche rééducative et réadaptative à revaloriser la compétence parentale du parent cérébro-lésé.
La préparation des permissions avec le blessé, mais aussi avec le conjoint et les enfants, fait partie des missions du service, ainsi que la discussion avec le groupe familial à l’issue de celles-ci. Ces permissions et ces
discussions permettent de préparer la sortie du milieu hospitalier et le retour à domicile quand il est possible.
Après hospitalisation
Après la sortie, le groupe familial (patient, conjoint, enfant) doit pouvoir rencontrer en fonction de ses besoins un interlocuteur médical ou paramédical qui lui permet de mieux comprendre le retentissement des
séquelles du blessé dans la vie quotidienne et dans la relation à l’autre. Le soutien du conjoint, la prévention
de son burn-out et la mise en place d’aides spécifiques sont des éléments importants pour l’aider à maintenir
ses compétences parentales. Se préoccuper de la reprise ou du maintien du lien entre le parent blessé et
ses enfants et de sa place de parent dans la famille après sa sortie de l’hôpital doit être une préoccupation des
équipes médico-sociales même quand le parent blessé ne vit plus dans la famille.
Des lieux de rencontre (groupes de paroles, club pour les familles) peuvent faciliter l’accès de l’enfant ou de
l’adolescent, ainsi que celui de ses parents, à des interlocuteurs diversifiés, ce qui est aussi une aide souvent
nécessaire.
III
FORMATION DES SOIGNANTS
La sensibilisation des soignants et des personnes relais (généralistes, médecins libéraux, paramédicaux,
auxiliaires de vie, assistantes sociales, etc) à la prise en charge de ces enfants et de ces adolescents est
nécessaire. Des organismes tels que le CRFTC et le réseau TC Ile de France ont pour mission de la favoriser
par la mise à disposition d’outils adaptés.
Pour
en
savoir
plus
Consultez le site du CRFTC,
http://www.crftc.org
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