Amiodarone Utilisée d’abord comme vasodilatateur dans le traitement de l’angor, l’amiodarone (Cordarone®, Corbionax®) s’est révélée l’un des antiarythmiques les plus actifs. Elle fait partie de la classe III dans la classification des antiarythmiques de Vaughan-Williams (voir « Quinidine »). L’amiodarone agit en inhibant la sortie du potassium de la cellule. Elle prolonge ainsi la durée de la repolarisation et, par là même, la durée du potentiel d’action. En inhibant l’entrée du sodium et du calcium, elle diminue l’amplitude du potentiel d’action du nœud sinusal. Enfin, elle possède des effets α- et â-antiadrénergiques en agissant comme un antagoniste non compétitif sur les récepteurs α et â. L’amiodarone est utilisée dans la prévention des récidives des tachycardies ventriculaires et supraventriculaires. L’amiodarone est très liposoluble. Sa distribution est bonne dans les tissus bien perfusés après une dose unique ; on observe une accumulation tissulaire progressive en administration chronique. La concentration d’amiodarone dans le myocarde est de 10 à 15 fois supérieure à celle du plasma. L’absorption de l’amiodarone est lente (pic plasmatique atteint en 4 à 5 heures après une dose orale) et sa biodisponibilité est faible et variable selon les sujets (20 à 80 %). Elle est très fortement liée aux protéines plasmatiques (95 %). Sa demi-vie plasmatique est de 50 jours. Son métabolisme est essentiellement hépatique. Par déalkylation, on obtient la déséthylamiodarone, métabolite pharmacologiquement actif, qui s’accumule aussi dans les tissus. L’excrétion de l’amiodarone est principalement biliaire et l’élimination rénale sous forme inchangée est négligeable (< 0,5 %). La principale caractéristique de l’amiodarone est son accumulation progressive dans l’organisme et son élimination prolongée (élimination biliaire et fécale pendant plusieurs mois après arrêt du traitement). Parallèlement, l’effet antiarythmique est retardé et se poursuit 10 à 30 jours après l’interruption du traitement. L’amiodarone est une molécule riche en iode (37 % de son poids) qui subit un métabolisme particulier : • une partie de l’iode se détache et est éliminée sous forme d’iodure dans les urines ; • l’autre partie de l’iode est éliminée après passage hépatique dans les fèces. Augmentant la charge intrathyroïdienne en iode, l’amiodarone interfère avec le métabolisme des hormones thyroïdiennes à différents niveaux : • inhibition de la transformation périphérique de la thyroxine (T4) en triiodothyronine (T3) par blocage de la thyroxine 5′-monodésiodase ; • diminution de la fixation de la T3 sur les récepteurs nucléaires. On observe fréquemment des modifications transitoires des hormones thyroïdiennes pouvant entraîner une hypothyroïdie ou une hyperthyroïdie. Ces variations imposent un suivi régulier de la fonction thyroïdienne au cours du traitement (dosage de la TSH tous les 6 mois). Chez certains sujets, on décrit encore les effets indésirables suivants : dépôts cornéens intraépithéliaux (régressant à l’arrêt du traitement), réactions de photosensibilisation, modifications électrocardiographiques (augmentation de l’intervalle QT, déformation de l’onde T), bradycardie, fibrose pulmonaire, allergie à l’iode. Le dosage s’effectue par une technique de chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS) avec détermination simultanée de l’amiodarone et de la déséthylamiodarone. La zone thérapeutique pour un adulte, avant la prise suivante du médicament, à l’état d’équilibre, est de 0,75 à 3,75 μmol/l (0,5 à 2,5 mg/l). Le taux de déséthylamiodarone est inférieur à celui de l’amiodarone au début du traitement (pendant quelques jours) puis, à long terme, devient supérieur en raison de sa demi-vie d’élimination plus importante. Après l’arrêt du traitement, l’amiodarone et la déséthylamiodarone sont détectées pendant une longue période. ☞ ( Flécainïde, Iode, Quinidine et Hydroquinidine Delhotal B, Poirier JM, Peytavin G. Suivi thérapeutique de l’amiodarone. In : Marquet P. Suivi thérapeutique pharmacologique pour l’adaptation de posologie des médicaments. Paris : Elsevier, 2004 ; pp. 355-360. Grunenberger F, Pradignac A, Ruellan A, Andres E, Goichot B, Schlienger JL. Conduite à tenir devant une hyperthyroïdie à l’amiodarone. Feuillets Biol 2001 ; 42/239 : 41-47.