Le taux de participation au dépistage du cancer du sein a tendance

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Extension de la tranche d’âge des femmes invitées de manière
systématique à participer au programme fribourgeois de dépistage du
cancer du sein de 70 jusqu’à 74 ans révolus à partir du 1er janvier 2014
1. Recommandation de la Fédération suisse des programmes de dépistage, swiss
cancer screening
En date du 24 février 2012, la Fédération a adressé à tous les programmes de dépistage du
cancer du sein la demande d’harmoniser dans les cantons la limite d’âge supérieure de la
population cible et de l’étendre à 74 ans révolus, en réalisant cette recommandation jusqu’en
2015.
A ce jour, les programmes existants de Berne, Genève, Neuchâtel et Jura ont déjà décidé de
cette extension.
2. Coût et prise en charge financière de cette extension
Le remboursement de la mammographie de dépistage par les assureurs maladie est réglé par
l’art 12e, lettre c de l’OPAS (ordonnance sur les prestations dans l’assurance obligatoire des
soins) qui recommande la mammographie de dépistage dans le cadre de programmes
organisés conduits par les cantons dès 50 ans et n’a pas fixé de limite d’âge supérieure, la
fixation de celle-ci étant de la compétence des instances de santé publique.
A ce jour, nombreuses sont les femmes de plus de 70 ans qui sollicitent déjà d’elles-mêmes une
poursuite de leur participation dans le cadre du programme ou qui effectuent sur prescription de
leur médecin une mammographie hors programme. Comme le coût de la mammographie de
dépistage dans le cadre des programmes organisés est sensiblement inférieur au coût des
mammographies effectuées hors programme, les charges relatives à cette extension ne
devraient pas avoir d’incidence importante sur les coûts de la santé.
Il ressort par ailleurs des estimations effectuées par les responsables du programme que les
coûts engendrés par cette extension de la limite d’âge pour le volet santé publique à charge du
canton (coût de l’envoi des invitations, augmentation du nombre annuel de mammographies
traitées, mesures du contrôle de la qualité), pourront être absorbés sans augmentation de la
part incombant aux pouvoirs publics.
3.
3.1.
Argumentaire scientifique
Allongement de l’espérance de vie de la population féminine suisse
La tranche d'âge 50-69 ans, initialement recommandée, trouve son origine dans les études
randomisées effectuées de 1965 à 1990. Les limites ont été définies entre le début de la
ménopause et l'espérance de vie moyenne d’une femme. Depuis 1980, cette espérance de vie
1
s’est élevée de 5 ans en moyenne en Europe. Historiquement, la Suisse avait déjà une longue
espérance de vie et, en 2012, une femme de 70 ans a encore, en moyenne, 17.8 ans à vivre.
Comparaisons internationales de l’espérance de vie des femmes à l’âge de 70 ans :
1 Japon
89.7
2 Monaco
88.9
3 France
88.6
4 Andorre
88.1
5 Suisse
87.8
La Suisse se situe au 5e rang sur 192 pays
3.2.
Incidence du cancer du sein et évolution selon l’âge
La Suisse présente un taux d’incidence du cancer du sein parmi les plus élevés au monde.
L’incidence du cancer du sein croit avec l’âge, tout d’abord de manière exponentielle, se
stabilisant à un niveau élevé après 70 ans. Parmi les femmes atteintes, environ 45 % ont plus
de 65 ans. Et bien que l’on note une baisse du nombre de cas ces dernières années dans la
population des femmes ménopausées, liée à une diminution des hormonothérapies de
substitution, le risque d’être atteinte d’un cancer du sein reste élevé chez la femme âgée.
D’une génération à l’autre : évolution des causes de décès de 1970 à 2004, OFS
D’une génération à l’autre : évolution des causes de décès de 1970 à 2004, OFS
Ainsi, le cancer du sein reste un réel problème de santé publique chez la femme plus âgée car
avec l’allongement de la durée de vie, la proportion de cancers diagnostiqués chez les femmes
de plus de 65 ans est en augmentation.
3.3.
Age et pratique du dépistage systématique dans le cadre des programmes
Le taux de participation au dépistage du cancer du sein a tendance à diminuer avec l’âge.
L’enquête suisse sur la santé mentionne qu’entre 40 et 64 ans une femme sur 5 (19.4 %) dit
avoir subi une mammographie durant l’année qui précède pour seulement une femme sur six
(15.3 %) au-delà de 64 ans. Ce qui a pour conséquence la découverte de cancers à des stades
plus avancés.
2
Aux Pays-Bas, un des premiers programmes de dépistage en Europe, la décision d’étendre
l’âge des mammographies de dépistage de 69 à 74 ans, basée sur le rapport du Conseil de
santé, a eu lieu en 1998 déjà. Les éléments importants qui en ressortent sont les suivants : chez
les femmes de plus de 70 ans, tout comme chez les femmes plus jeunes, les cancers du sein
détectés par le dépistage sont de taille plus petite que celle des cancers détectés hors
dépistage, et s’accompagnent moins fréquemment d’une atteinte des ganglions lymphatiques
axillaires. Il est de plus probable que le dépistage par mammographie dans la population des
femmes plus âgées réduise la mortalité due au cancer du sein.
La France a étendu l’âge du dépistage jusqu’à 74 ans en partant du constat que, chez les
patientes âgées, les cancers du sein sont diagnostiqués à un stade plus avancé que chez les
patientes plus jeunes, que ces cancers sont 3 fois plus souvent métastatiques, que l’involution
adipeuse de la glande mammaire permettait un examen clinique plus facile et une interprétation
de la mammographie plus aisée, et finalement que les anomalies bénignes étaient plus rares.
D’autres pays comme la Grande-Bretagne, la Suède, Israël et le Canada ont également étendu
l’âge à plus de 70 ans.
3.4.
Bénéfice de la mesure
On constate une réduction de la mortalité plus importante avec la mammographie de dépistage
pour les femmes de 70 à 74 ans que parmi les femmes de 50 à 69 ans. Le risque absolu de
cancer étant plus élevé dans cette tranche d'âge, le bénéfice absolu de la mammographie
semble comparable à celui des femmes de 50 à 69 ans.
La comparaison des effets entre les tranches d’âges se trouve dans le tableau ci-dessous. Pour
éviter un décès par cancer du sein, il faut dépister beaucoup moins de femmes de 70 à 74 ans
que de femmes plus jeunes, la réduction du risque absolu de décès par la mammographie étant
particulièrement grande dans cette population. Par ailleurs, on note que, dans cette tranche
d’âge de 70 à 74 ans, les résultats faussement positifs à la mammographie, de même que les
biopsies inutiles sont plus rares (Table 2, Réf. : CMAJ 2011, 183, 1991).
3
4.
Conclusion

Le risque de développer un cancer du sein augmente avec l'âge. Ainsi, les femmes de plus
de 70 ans font partie d’un groupe à risque. En effet, environ un tiers des cancers du sein
sont diagnostiqués chez les femmes de plus de 70 ans. Cette haute incidence renforce
l’effet positif du dépistage par mammographie.

Actuellement, les femmes âgées de plus de 70 ans ne sont plus automatiquement invitées
pour le dépistage. Toutefois, elles gardent le droit d’y participer tous les deux ans si elles le
demandent. Nous constatons dans le canton de Fribourg une demande croissante de la part
de ces femmes.

Prolonger les invitations systématiques jusqu’à 74 ans révolus permettra aux femmes
concernées de continuer à bénéficier durant 4 ans de plus (= 2 mammographies) de tous les
avantages du dépistage organisé, à un coût inférieur et avec un contrôle de qualité supérieur
au dépistage opportuniste, hors programme. Les femmes des catégories socio-économiques
moins favorisées seront ainsi les premières bénéficiaires de cette mesure.

La LAMal permet cette extension, recommandée par la Fédération suisse des programmes
de dépistage. Nous pensons que la quasi-totalité des programmes existants en Suisse
suivra cette recommandation et adaptera les pratiques.
Août 2013
Rose-Marie Rittener, Dr Stefan Zimmermann
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