Dépression

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CTION
A clinique
LE TROUBLE DÉPRESSIF MAJEUR
Traiter en vue d’une rémission
et de la restauration
du fonctionnement optimal
LE TOUR D’HORIZON
DU SPÉCIALISTE
Martin Katzman
MD, FRCPC
Directeur clinique,
START Clinic for Mood
& Anxiety Disorders
Professeur adjoint
Université de Toronto
Toronto (Ontario)
LE POINT DE VUE
DU GÉNÉRALISTE
Jeff Habert, MD,
CCFP, FCFP
Shops on Steeles Medical Centre
Thornhill (Ontario)
Action clinique est un document commandité,
publié régulièrement afin de transmettre aux
médecins québécois les plus récentes données
cliniques et thérapeutiques. Avant de prescrire
tout médicament, veuillez consulter la monographie correspondante.
Cet article a été rendu possible grâce au soutien
de Pfizer Canada inc. Les opinions et
l’information qui y sont présentées sont celles
de l’auteur ou des auteurs et ne reflètent pas
nécessairement les points de vue et opinions
de Pfizer Canada inc.
On estime à quelque trois millions (10 % de la population) le nombre de Canadiens qui souffrent
d’épisodes dépressifs au cours d’une année –un nombre qui ne cesse d’augmenter. Pourtant, seulement un quart de ces cas (750000 personnes) sont détectés et diagnostiqués, et encore moins
(187500) sont diagnostiqués et adéquatement traités, soit à peine plus de 6 % de la population
concernée. Il y a donc fossé entre la prévalence et la détection de la dépression, d’autant plus que
le taux de rémission n’est que de 40 % à 55 %.
Selon le DSM-IV-TR (Diagnostic and Statistical Manual, 4th Edition, Text Revision), les symptômes de cette affection – plus généralement connue sous le nom de trouble dépressif majeur
(TDM), mais aussi de dépression clinique, de dépression majeure, de dépression ou de
trouble unipolaire – sont une humeur dépressive et une réduction marquée de l’intérêt ou du
plaisir dans pratiquement toutes les activités, et qui durent pendant au moins deux semaines.
De même, au moins trois des symptômes suivants doivent aussi être présents : gain ou perte
de poids, augmentation ou diminution du sommeil ou du niveau d’activité psychomotrice,
fatigue, sentiment de culpabilité ou d’inutilité, perte de la capacité de se concentrer et pensées
récurrentes de mort ou de suicide.
Tandis que le TDM peut affecter des personnes de tous âges, on pose ce diagnostic à un âge
de plus en plus jeune (20 ans dans 40 % des cas, 27 ans dans l’ensemble). Pour des raisons que
l’on ignore, les femmes sont deux fois plus sujettes que les hommes à présenter un TDM. Toutefois,
avant l’âge de la puberté, il n’y a pas de différence entre les garçons et les filles. L’adolescence est
une période à haut risque en ce qui concerne le TDM: environ 14 % des décès d’adolescents sont
dus au suicide, et 20 % à 35 % des jeunes homosexuels masculins et féminins font des tentatives
de suicide. Les autres facteurs de risque sont l’apparition du trouble à un plus jeune âge, un faible
niveau d’éducation ou de revenu, et le fait d’être séparé ou divorcé.
Publié grâce à une subvention à visée éducative de Pfizer Canada Inc.
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Le trouble dépressif majeur
PERSPECTIVE
Le TDM est une maladie chronique récurrente associée à de
fréquentes rechutes et récurrences, même si une rémission
se produit chez environ 50 % des
hommes et des femmes au bout
d’un an. Toujours est-il que les
épisodes récurrents sont extrêmement courants. Les patients
qui ont été hospitalisés pour un
premier épisode de dépression
ont 50 % de chances de l’être à
nouveau au cours de leur vie,
tandis que ceux qui ont déjà été
hospitalisés ont 50 % de chances
de l’être à nouveau dans les trois
ans. Chez un patient qui a connu
deux épisodes, le risque de récurrence est de 80 % à 90 %.
Il est essentiel de détecter tôt
le TDM pour enrayer les coûts
croissants et réduire les effets
nocifs qui y sont associés. Les
deux ou trois premiers mois sont
critiques pour la réussite du traitement et pour éviter que la maladie ne devienne chronique.
Les personnes atteintes de TDM
posent souvent un défi aux médecins de première ligne en ce qui
concerne leur traitement. Selon les
statistiques, 1,3 % des patients d’un
omnipraticien ont été dépressifs
au cours du mois précédent et
comme un cabinet médical a 2 000
patients en moyenne, cela signifie
que jusqu’à 26 cas de dépression
pourraient passer inaperçus. Dans
une étude multicentrique menée
par l’OMS, les symptômes dépressifs mineurs et infracliniques
étaient encore plus courants que
les symptômes au seuil du TDM,
et les patients présentaient au
moins deux symptômes de
dépression dans 59 % des cas.
L’enquête DIRECT (Depression Insights REalities Challenges
and Thoughts), commanditée par
Wyeth Pharmaceutiques, a été
menée afin savoir quelles sont
les préoccupations et les obstacles
au niveau des soins primaires du
point de vue des médecins de
première ligne et des psychiatres.
Les résultats de l’enquête ont montré que la majorité des médecins
de première ligne traitent 90 %
des patients atteints de TDM sans
consulter un spécialiste. Les omnipraticiens attribuent ce taux relativement bas de consultations des
spécialistes à la difficulté d’accéder
aux ressources dont disposent ces
derniers. L’enquête a également
révélé que les omnipraticiens
considèrent que les trois principaux obstacles affectant le résultat du traitement sont la présence de comorbidités, l’accès aux
ressources et les problèmes de
temps. Les psychiatres, de leur
côté, ont classé les obstacles différemment, plaçant les problèmes
de temps en tête, suivis par la
complexité du traitement, le niveau de connaissance et la formation spécialisée requis, et la présence de comorbidités (figure 1).
Parce que les données de
l’enquête DIRECT laissent penser
que les médecins de première
ligne et les psychiatres ont parfois
une perception différente de la
prise en charge du TDM dans le
contexte des soins primaires, les
soins en collaboration sont de la
plus grande importance. Les médecins de première ligne qui ont
accès à des soins en collaboration
ont fait état d’une meilleure connaissance des problèmes psychiatriques et d’une plus grande aisance pour les traiter, ainsi que d’une
plus grande satisfaction vis-à-vis
des services de santé mentale et
d’un plus grand intérêt pour le
domaine de la santé mentale.
Les soins en collaboration
L’importance des soins en collaboration devient plus apparente au
vu des statistiques produites par
l’Initiative canadienne de collaboration en santé mentale (ICCSM).
Sur une période d’un an, 10 % des
Canadiens ont utilisé des services
de santé mentale et les omnipraticiens sont les professionnels de
la santé auxquels ils ont eu recours en priorité. Dans la moitié
des cas, quand un médecin de
Figure 1
Présence de
comorbidités
famille était consulté, un autre professionnel ou un spécialiste de la
santé mentale était également
impliqué, ce qui indique un potentiel pour les soins de santé
mentale en collaboration.
Cependant, du fait du manque
de prise de conscience ou de coordination parmi les médecins de
soins primaires, les consommateurs n’ont pas toujours accès à
toute la gamme des services de
santé mentale. Selon l’ICCSM, les
autres obstacles à l’accès aux services de santé mentale sont:
■ Le manque de ressources
pour satisfaire aux besoins
en matière de santé mentale;
■ La stigmatisation et la discrimination qui empêchent les
gens de chercher de l’aide;
■ Les différences linguistiques
et culturelles qui en limitent
l’accès;
■ Les distances géographiques
qui en limitent l’accès;
■ La confusion liée aux différences entre les fournisseurs
de services (p.ex., procédures
pour consulter les spécialistes
et procédures d’accueil);
■ La mauvaise communication
et la connaissance limitée
des rôles, des responsabilités
et des compétences des
différents professionnels de
la santé;
■
La mauvaise coordination et
planification de la réforme
des soins de première ligne et
des soins de santé mentale.
Comorbidités
La détermination des causes ne
représente qu’une partie du défi.
Les complications dues à des comorbidités comme la dépression
associée à la ménopause, le trouble d’anxiété généralisée (TAG),
la phobie sociale, l’état de stress
post-traumatique (ESPT) et la
maladie ou la douleur chronique
constituent certains des principaux problèmes à diagnostiquer.
De nombreux patients dépressifs
présentent aussi des symptômes
somatiques tels que la lombalgie.
Les personnes atteintes de TDM
qui souffrent de douleur chronique sont à risque accru de suici-
de et il faut avant tout se concentrer sur le soulagement de leurs
symptômes dépressifs.
Les troubles d’anxiété apparaissent fréquemment en concomitance avec la dépression :
jusqu’à 80 % des patients dépressifs font état de symptômes d’inquiétude, d’anxiété psychique et
d’anxiété somatique d’intensité
au moins modérée. Les symptômes d’anxiété semblent aussi
plus prononcés chez les personnes âgées dépressives et chez
les patients présentant un problème médical concomitant. La coexistence de troubles dépressifs et
anxieux majeurs est associée à
des obstacles au traitement et à
une mauvaise évolution de l’état
de santé psychiatrique, incluant
une résistance au traitement, un
risque accru de suicide, un risque
L’OMS prédit
que d’ici 2020 le TDM
arrivera au deuxième rang
des causes d’incapacité après
la cardiopathie ischémique.
Les deux principaux obstacles à l’obtention de résultats optimaux par les patients présentant un TDM dans le contexte
des soins primaires : perception des omnipraticiens et des psychiatres
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accru de récurrences et une plus
grande utilisation des ressources
médicales.
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tômes du TDM. Quelle que soit
la façon dont elles sont administrées, elles aident à établir le
degré de gravité du TDM.
DIAGNOSTIC
Le diagnostic du TDM s’appuie
sur les critères du DSM-IV-TR.
On peut se rappeler les critères
symptomatiques à l’aide de la
liste mnémotechnique SIGECAPS
(tableau 1). Les échelles d’évaluation s’appuyant sur les symptômes sont utiles pour établir une
base de départ et elles aident à
évaluer les symptômes prévalents.
Le principe de toutes les échelles,
qu’elles soient administrées par le
patient lui-même ou par un
professionnel de la santé, est
d’évaluer les principaux symp-
Les échelles administrées par
les cliniciens
Les deux échelles d’évaluation les
plus couramment utilisées (principalement dans les essais cliniques), l’échelle de dépression de
Hamilton (HAM-D) et l’échelle
d’évaluation de la dépression de
Montgomery-Asberg (MADRS)
évaluent la gamme des symptômes chez les personnes atteintes
de TDM. Elles permettent de
déterminer le type et l’ampleur
des symptômes. En d’autres
termes, elles permettent d’évaluer
La dépression continue
à être le diagnostic qui
augmente le plus rapidement
au Canada. De 1994 à 2004,
le nombre de visites chez les
médecins pour cause de
dépression a presque doublé.
L’enquête
DIRECT
Comme de plus en plus de cas de dépression sont diagnostiqués et traités dans
le contexte des soins primaires, l’enquête DIRECT (Depression Insights REalities Challenges and Thoughts) a été menée par la compagnie pharmaceutique
Wyeth pour comparer les points de vue des médecins omnipraticiens et des psychiatres sur des aspects essentiels relatifs aux défis que pose le traitement du
TDM. L’enquête a porté sur 23 points pour les omnipraticiens et sur 22 points
pour les psychiatres. Elle s’est intéressée aux obstacles perçus à l’obtention de
résultats optimaux dans le traitement du TDM, aux doses de médicaments, à
l’adhésion au traitement antidépresseur, aux influences sur l’observance, aux
effets secondaires en tant qu’obstacles à des résultats positifs et au fonctionnement des patients traités pour cause de dépression.
Un échantillon représentatif de 3 400 psychiatres et de 4 949 omnipraticiens de l’ensemble du Canada a reçu l’enquête DIRECT par télécopieur ou
par courriel. Au total, 163 omnipraticiens et 111 psychiatres y avaient
répondu au moment où les données ont été analysées. L’enquête a été
menée entre avril 2009 et mai 2009.
le degré de la gravité de la maladie. Ces deux échelles avaient
d’abord été mises au point pour
évaluer l’évolution des symptômes
dans des études portant sur des
agents psychopharmacologiques
et le niveau de corrélation statistique entre les scores qu’elles
permettent d’obtenir est élevé.
L’échelle HAM-D est utilisée
par les professionnels de la santé
pour évaluer le degré de gravité
de la dépression d’un patient et
pour établir une base de départ.
Onze symptômes sont évalués,
depuis l’absence de chaque symptôme jusqu’à son plus haut degré
d’expression : plus le score est
élevé, plus la dépression est grave.
Conçue comme un appoint à
l’échelle HAM-D, l’échelle MADRS
comporte 10 questions que l’on
utilise pour évaluer la gravité du
TDM ainsi que pour surveiller
l’évolution des symptômes durant
le traitement. L’échelle MADRS
comporte sept points (de 0 à 6)
et elle indique généralement une
variation légèrement supérieure
du score total par rapport à
l’échelle HAM-D.
Les échelles autoadministrées
par les patients
Les échelles autoadministrées
s’appuient sur le bon jugement,
le souci de la précision et l’hon-
nêteté du patient, et elles permettent de se faire une idée de
la façon dont il se perçoit. Un
autre avantage de ce genre
d’échelle est que le patient peut
y répondre pendant qu’il attend
pour passer dans le cabinet du
médecin. Le professionnel de la
santé peut alors utiliser les réponses pour aborder les préoccupations du patient et étudier
les symptômes plus en détail.
Le Major Depression Index
(MDI) est un questionnaire en
10 points qui demande au
patient comment il s’est senti au
cours des deux dernières
semaines. Le patient indique la
présence ou l’absence de
chaque symptôme sur l’échelle.
Ce questionnaire peut être utilisé à la fois comme instrument de
mesure en utilisant le score total
et comme outil diagnostique en
l’associant aux algorithmes se
rapportant aux différentes catégories de TDM indiquées dans le
DSM-IV-TR.
Le Patient Health Questionnaire (PHQ-9) est directement
basé sur les critères diagnostiques du TDM du DSM-IV-TR. Il
permet d’évaluer les symptômes
et la déficience fonctionnelle afin
d’aider les professionnels de la
santé à poser un diagnostic
provisoire de TDM. Le degré de
DOSAGE DES MÉDICAMENTS
La plupart des répondants, qu’ils soient omnipraticiens ou psychiatres, ont indiqué que 3 ou 4 visites sont habituellement nécessaires pour trouver la dose efficace d’un antidépresseur. Dans l’ensemble, 68 % des omnipraticiens et 84 %
des psychiatres obtiennent la dose adéquate en 3 étapes ou plus.
PROBLÈMES D’ADHÉSION AU TRAITEMENT
On a noté une grande différence entre les omnipraticiens et les psychiatres
en ce qui concerne l’estimation du taux d’adhésion au traitement antidépresseur chez les patients dépressifs des omnipraticiens. Les psychiatres ont estimé
l’adhésion au traitement antidépresseur des personnes atteintes de TDM à un
taux nettement plus inférieur que ne l’ont fait les omnipraticiens. Les trois
quarts des omnipraticiens – contre seulement un tiers des psychiatres – ont
estimé le taux de non-adhésion au traitement à 30 % ou moins. Les deux
groupes ont été d’accord pour désigner plusieurs causes, dont principalement
le manque d’efficacité immédiate et les effets secondaires ou l’intolérance associés aux médicaments, comme les principaux obstacles à l’adhésion au traitement. Les deux groupes pensent que les effets secondaires qui contribuent le
plus à la non-adhésion au traitement sont le gain ou la perte de poids, la baisse
de la libido ou l’anorgasmie, et la nausée.
ÉVALUATION DU FONCTIONNEMENT
FONCTIONNEMENT
Reconnu comme une cible essentielle du traitement à la fois par les omnipraticiens et par les psychiatres, le fonctionnement a été perçu par plus de 90 %
des psychiatres et des omnipraticiens comme étant au moins aussi important
que la réduction des symptômes quand on traite une dépression. Toutefois,
78,8 % des omnipraticiens et 73,8 % des psychiatres ont déclaré ne pas utiliser d’échelles d’évaluation pour évaluer le fonctionnement.
Près des trois quarts des médecins omnipraticiens qui ont répondu au
sondage ont estimé que plus de la moitié de leurs patients atteints de TDM
retrouvaient leur niveau de fonctionnement antérieur, tandis qu’environ un
tiers seulement des psychiatres ont reconnu la même chose. Les médecins
omnipraticiens ont donc évalué plus positivement que les psychiatres le succès de la résolution des symptômes.
Le fonctionnement a été considéré comme l’aspect le plus important par les
omnipraticiens comme par les psychiatres, reflétant ainsi l’énorme fardeau
imposé par le TDM dans divers domaines, dont les trois principaux que sont le
travail, la vie sociale et la vie familiale. Malgré l’importance du fonctionnement
en tant que critère d’évaluation, 74 % des psychiatres et 79 % des omnipraticiens ont reconnu qu’ils n’utilisent pas régulièrement les échelles d’évaluation
du fonctionnement.
L’enquête DIRECT a montré que bien que les psychiatres et les omnipraticiens aient parfois des avis différents au sujet du traitement du TDM dans
le contexte des soins primaires, les deux groupes considèrent le rétablissement du fonctionnement comme étant au moins aussi important que la
réduction des symptômes.
Publié grâce à une subvention à visée éducative de Pfizer Canada Inc.
dérivation d’un score de gravité
aide aussi à choisir et à surveiller
le traitement.
L’un des instruments les plus
utilisés pour évaluer la gravité du
TDM est l’Inventaire de dépression de Beck (IDB) en 21 questions qui utilise une échelle en
quatre points de 0 (symptôme
absent) à 3 (symptôme très intense). Le test prend entre 5 et
10 minutes, et il comporte des
questions relatives aux symptômes du TDM, à la cognition et
à des aspects physiques. Il en
existe aussi une version abrégée
en 7 points à l’intention des
médecins de première ligne.
Malgré la prolifération d’outils
comme les échelles d’évaluation
– et leur utilité –, nombreux sont
les médecins qui ne les utilisent
pas. Mais beaucoup d’autres facteurs peuvent s’opposer au diagnostic de TDM, en particulier
quand les patients ont une histoire médicale compliquée. Les
obstacles à un diagnostic précis
de TDM sont les contraintes de
temps, le manque de rémunération adéquate, le choix qu’il faut
faire entre un diagnostic psychiatrique et un diagnostic médical, et la nécessité d’exclure tout
autre diagnostic médical avant
d’accepter un diagnostic psychiatrique provisoire et la stigmatisation qui est associée à la maladie mentale.
En Colombie-Britannique, les
médecins utilisent, pour les patients à risque élevé de TDM, une
méthode de dépistage rapide
comportant deux questions qu’on
appelle parfois «PHQ-2»:
Au cours du dernier mois:
a) avez-vous perdu de l’intérêt
ou du plaisir à faire des
choses que vous aimez faire
habituellement ?
et
b) vous êtes-vous senti(e) triste,
abattu(e), déprimé(e) ou
désespéré(e) ?
Une réponse positive à l’une ou
l’autre de ces questions devrait
déclencher une évaluation plus
fouillée en utilisant les critères
suivants :
■ Insomnie ou fatigue
chronique
■ Douleur chronique
■ Affections somatiques
multiples ou inexpliquées
■ Problème médical chronique
(p. ex., diabète, arthrite)
■ Événements cardiovasculaires aigus (infarctus du
myocarde, AVC)
■ Traumatisme psychologique
ou physique récent
■ Autres troubles psychiatriques
■ Antécédents familiaux de
troubles de l’humeur
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Le trouble dépressif majeur
Diagnostic différentiel
Les aspects à prendre en considération dans le diagnostic différentiel de la dépression sont les
troubles thyroïdiens et autres
troubles endocriniens, les effets
secondaires des médicaments, les
tumeurs malignes et les troubles
neurologiques. L’anxiété peut être
causée par des troubles thyroïdiens, par divers médicaments,
dont des médicaments en vente
libre et des produits de phytothérapie, et par l’abus de substances psychoactives.
Comme les symptômes anxieux sont courants chez les
personnes atteintes du TDM, il
est important de chercher aussi
des symptômes de comorbidités
psychologiques tels que le trouble d’anxiété, le trouble bipolaire et la psychose. En fait, la U.S.
National Comorbidity Survey indique que la dépression et le
trouble d’anxiété comorbides sont
la règle plutôt que l’exception
chez près de 60 % des personnes
atteintes de TDM.
Il est néanmoins impératif de
faire une anamnèse et un examen physique, et de demander
toutes les épreuves de laboratoire nécessaires afin de dépister
des maladies susceptibles de
provoquer une dépression. Il faut
aussi faire une revue des médicaments que prend le patient afin
de déterminer si certains d’entre
eux risquent d’exacerber des
symptômes dépressifs.
TRAITEMENT
On emploie habituellement les
termes réponse, rémission, rechute et récurrence pour décrire
le traitement du TDM. La réponse, définie comme une réduction
de 50 % des symptômes, a longtemps été considérée comme un
résultat satisfaisant, mais par la
suite, on a plutôt visé la rémission ou l’absence relative de
symptômes (score inférieur à
7 sur l’échelle HAM-D) et un
retour au fonctionnement psychosocial de départ (c.-à-d. un
rétablissement fonctionnel).
Le traitement comporte généralement deux phases (figure 2).
L’objectif de la phase aiguë, qui
dure de 8 à 12 semaines, est d’obtenir la rémission des symptômes.
La phase d’entretien, d’une durée
d’au moins six mois, mais souvent plus, vise à prévenir les
rechutes ou les récurrences.
La différence entre la rechute et la récurrence est une question de durée dans le temps: une
rechute est une exacerbation des
symptômes dépressifs se produisant durant un même épisode de
dépression (c.-à-d. dans les six
mois suivant une rémission),
tandis qu’une récurrence est un
nouvel épisode dépressif se
produisant après une période de
rémission de six mois.
Éducation des patients
Comme la dépression est une maladie chronique cyclique, l’éducation des patients joue un rôle
essentiel. Plusieurs importants
messages doivent être assimilés
par les patients dès le début du
traitement. Le premier est qu’ils
sont tous susceptibles de subir
des rechutes et que l’adhésion au
traitement et le respect des
rendez-vous de suivi sont indispensables pour garantir des
progrès constants. Il faut également expliquer aux patients que
les antidépresseurs ne sont pas
générateurs de dépendance, qu’il
faut les prendre tous les jours et
qu’il faudra attendre deux à quatre
semaines avant de commencer à
obtenir une réponse. Les patients
doivent aussi savoir que leurs
symptômes peuvent croître et décroître, et qu’il ne faut pas cesser
de prendre les antidépresseurs,
même si on se sent mieux. Les
effets secondaires potentiels
doivent être passés en revue en
mettant particulièrement l’accent
sur le fait que des effets secondaires modérés sont courants,
mais qu’ils ne sont généralement
que temporaires.
Une évaluation régulière est
essentielle pour surveiller les
risques de suicide et pour détecter le plus tôt possible des rechutes précoces ou des
rémissions partielles afin que le
traitement puisse être modifié
au besoin. Des mesures de résultats valides doivent être utilisées
à tous les stades pour surveiller
la réponse au traitement.
De façon générale, les médecins de première ligne ont tendance à être moins intéressés
par l’obtention d’une rémission
que par un soulagement rapide
et une amélioration notable des
symptômes, tandis que les
psychiatres préfèrent se concen-
du recaptage de la sérotoninenoradrénaline (IRSN). Ce sont les
pierres angulaires de l’approche
pharmacologique. Les antidépresseurs atypiques, comme le bupropion et la mirtazapine, sont également couramment prescrits.
Pour choisir un antidépresseur,
on doit connaître l’historique du
traitement de la dépression du
Les effets secondaires
sont associés à l’abandon
précoce du traitement.
trer sur l’obtention d’une rémission. Mais ils opteront tous pour
un médicament qui soit à la fois
bien toléré pour favoriser l’adhésion au traitement et suffisamment efficace pour obtenir une
rémission et améliorer le bienêtre. L’impact de l’échec de
l’obtention d’une rémission est
important. Les patients qui
n’obtiennent pas une rémission
complète sont plus susceptibles
de devenir des dépressifs chroniques, de subir des rechutes et,
en fin de compte, de passer une
plus grande partie de leur vie
dans un état dépressif.
Une méta-analyse a montré
que les psychothérapies et les
traitements par antidépresseurs
fondés sur des données probantes sont tout aussi efficaces
pour les patients atteints de TDM
de léger à modéré. Pour les cas
graves, cependant, l’issue du traitement est grandement améliorée
grâce à un traitement associant
pharmacothérapie et psychothérapie. De plus, on sait que la préférence des patients pour la psychothérapie plutôt que pour les
antidépresseurs peut jouer un
rôle dans l’adhésion au traitement (tableau 3).
Traitement pharmacologique
Les antidépresseurs les plus couramment prescrits sont les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la
sérotonine (ISRS) et les inhibiteurs
patient et l’historique de ses réponses ou non-réponses à d’autres
antidépresseurs utilisés précédemment, et dresser la liste de ses
autres maladies et des médicaments sur ordonnance et en vente
libre qu’il prend.
L’étude STAR*D
L’étude randomisée STAR*D (Sequenced Treatment Alternatives
to Relieve Depression), menée
dans 18 cabinets de médecine générale et dans 23 services de consultations psychiatriques externes, a comparé les résultats à long
terme de divers traitements appliqués à des malades externes présentant un TDM non psychotique.
L’objectif principal de l’étude était
de déterminer quels traitements
sont les plus efficaces quand un
premier traitement pharmacologique n’a pas donné une réponse
satisfaisante.
Les patients ont d’abord été
traités par le citalopram en monothérapie. Si les symptômes demeuraient après 8 à 12 semaines
de traitement, jusqu’à 4 autres
niveaux de traitement étaient proposés, dont une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et
d’autres médicaments. Aucun
placebo n’a été utilisé.
Au niveau 2, les sujets pouvaient choisir entre, d’une part,
changer de traitement pour le
bupropion à libération prolongée, la sertraline ou la venlafaxi-
Tableau 1
Tableau 2
LISTE MNÉMONIQUE SIGECAPS DES CRITÈRES DU TDM
FACTEURS DE RISQUE DE SUICIDE
S : Sommeil perturbé (insomnie, hypersomnie)
I : Intérêt (perte de l’intérêt, du plaisir et de la joie de vivre)
G : Grand sentiment de culpabilité et autodénigrement
E : Énergie diminuée et fatigue
C : Concentration (problèmes de)
A : Appétit modifié (diminué = perte de poids; accru = gain de poids)
P : Psychomotricité perturbée (ralentissement psychomoteur ou agitation)
S : Suicide (pensées suicidaires)
ne, et, d’autre part, opter pour la
TCC ou pour une augmentation
de la dose de citalopram associée au bupropion, à la buspirone ou à la TCC.
Les sujets qui n’avaient toujours pas obtenu de rémission se
sont vu proposer les choix de
traitement du niveau 3, soit changer de médicament pour la mirtazapine ou la nortriptyline, ou y
ajouter du lithium, de la triiodothyronine, de la sertraline ou de
la venlafaxine. Le niveau 4 comprenait le passage à la tranylcypromine ou à une association de
mirtazapine et de venlafaxine.
Au niveau 1, environ un tiers
des participants ont obtenu une
rémission et 10 % à 15 % ont réagi
sans toutefois obtenir de rémission. Au niveau 2, dans le groupe
des sujets qui ont changé de
médicament, les symptômes ont
disparu chez environ 25 % des
participants. Les trois nouveaux
médicaments ont donné à peu
près les mêmes résultats et ont
tous été aussi sécuritaires et bien
tolérés. Dans le groupe où des
médicaments ont été ajoutés, les
symptômes ont disparu chez environ un tiers des participants. La
TCC figurait aussi au niveau 2 en
tant que traitement de remplacement ou d’appoint, mais les résultats n’avaient pas été publiés au
moment de mettre sous presse.
Au niveau 3, les symptômes
ont disparu chez 12 % à 20 % des
participants et les deux médicaments utilisés ont à peu près
donné les mêmes résultats, ce qui
laisse penser qu’il n’y a pas eu
d’avantage clair pour l’un ou
l’autre des médicaments en matière de taux de rémission ou
d’effets secondaires. Au niveau 4,
les symptômes ont disparu chez
7 % à 10 % des participants sans
différences significatives sur le
plan statistique entre les médicaments pour ce qui est de la
rémission, du taux de réponse ou
des effets secondaires.
Globalement, les symptômes
ont disparu chez environ la moitié
des sujets de l’étude STAR*D après
deux niveaux de traitement. Sur
l’ensemble des quatre niveaux de
traitement, les symptômes ont
Psychosociaux
Historiques
Cliniques/Diagnostiques
Premières Nations
Sexe masculin
Âge avancé
Célibataire
ou personne vivant seule
Tentative de suicide antérieure
Antécédents familiaux de suicide
Antécédents familiaux d’utilisation
de substances
Désespoir
Psychose
Problème médical
Abus de substances
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disparu chez près de 70 % des
sujets qui n’ont pas abandonné
l’étude (tableau 4). Le taux de
participants qui ont abandonné
l’étude a toutefois été significatif
et a augmenté à chaque niveau.
Changer de médicaments ou
en associer plusieurs
Les antidépresseurs sont généralement considérés comme
étant aussi efficaces les uns que
les autres parce que leurs taux
de réponse se sont avérés similaires dans les essais cliniques.
Néanmoins, plusieurs aspects doivent être pris en compte quand on
fait passer un patient d’un antidépresseur à un autre. La méthode
habituelle utilisée pour changer
d’antidépresseur consiste à introduire graduellement le nouveau
médicament tout en réduisant progressivement la dose du premier.
Il est parfois nécessaire d’arrêter complètement la prise du
premier médicament et de prévoir
une période de lavage avant de
commencer à prendre le nouveau
médicament. Cela est impératif
quand on passe à un inhibiteur de
la monoamine aminase (IMAO)
ou qu’on l’abandonne, et cela est
probablement l’option la plus
sûre quand le changement implique un ISRS et la néfazodone.
Une association avec un deuxième antidépresseur (comme le
bupropion ou la mirtazapine ajoutés à un ISRS ou à un IRSN) ou
l’ajout d’un antipsychotique atypique, comme la quétiapine XR
ou l’aripiprazole (emploi non conforme au Canada), l’olanzapine
ou la rispéridone, sont aussi des
stratégies efficaces pour traiter un
TDM réfractaire. Le lithium et la
triiodothyronine (T3) sont aussi
des options, mais ces agents sont
moins fréquemment utilisés depuis
que nous disposons de médicaments plus modernes au profil
d’effets secondaires plus favorable.
Options non
pharmacologiques
La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) permet de modifier les pensées et les comportements afin de réduire les
symptômes dépressifs, tandis
22/09/10
12:50
Page 5
que la thérapie interpersonnelle
(TIP) se concentre sur des situations relationnelles telles que les
conflits ou les «transitions de rôle»
(changements brutaux de vie inducteurs de stress). La thérapie
par résolution de problèmes
(TRP) utilise une approche structurée pour identifier et résoudre
activement des problèmes qui
contribuent à la dépression. Le
système CBASP (Cognitive Behavioural Analysis System – système d’analyse cognitive comportementale de psychothérapie),
spécialement conçu pour traiter
la dépression chronique chez les
adultes, est une synthèse des
thérapies interpersonnelle et
cognitivo-comportementale.
Le type de psychothérapie le
plus fréquemment utilisé est la
TCC, qui permet aux patients
d’identifier les pensées automatiques et mésadaptées, et les
croyances biaisées qui peuvent
mener à une humeur dépressive.
Les patients apprennent à utiliser des stratégies pour modifier
ces croyances ainsi que des
modèles de raisonnement
souple. La TCC est limitée dans
le temps (jusqu’à 16 séances),
mais elle donne des résultats de
longue durée parce que les
patients apprennent à comprendre pourquoi et comment
ils vont dans la bonne direction,
et ce qu’il faut faire pour continuer dans ce sens.
ECT
L’électroconvulsothérapie (ECT)
est un des moyens les plus efficaces de soulager les symptômes
de dépression majeure et elle
peut également être extrêmement efficace chez les patients
atteints de TDM grave, ceux qui
sont à risque élevé de suicide ou
ceux qui présentent des symptômes psychotiques concomitants
ou qui sont en état de catatonie.
L’ECT suscite rapidement une
réponse et est associée à peu
d’effets secondaires. L’amnésie
rétrograde est l’effet secondaire le
plus fréquemment associé à
l’ECT; mais ce problème se résout
la plupart du temps en quelques
mois – de façon plus ou moins
Tableau 4
RÉSULTATS DE L’ÉTUDE STAR*D SUR LA RÉMISSION
Médicaments
% de rémission
NIVEAU 1
Citalopram
36,8 %
NIVEAU 2 – changement
Bupropion SR
Sertraline
Venlafaxine XR
NIVEAU 2 – ajout
Bupropion SR
Buspirone
NIVEAU 3 – changement
Mirtazapine
Nortriptyline
NIVEAU 3 – ajout
Lithium
Triiodothyronine (T3)
Sertraline
Venlafaxine XR
}
}
NIVEAU 4 – changement seulement
Tranylcypromine OU
Mirtazapine + venlafaxine XR
complète, toutefois. Le taux de
rechutes à la suite d’une ECT est
cependant élevé et une pharmacothérapie ou des ECT d’entretien
peuvent s’avérer nécessaires de
façon permanente.
PRONOSTIC
Dans de nombreux cas, le TDM
est chronique et récurrent,
posant un problème de santé
tout au long de la vie. Les patients qui ne se rétablissent que
partiellement entre des épisodes
semblent être particulièrement à
risque de récurrence.
L’échec du traitement du TDM
est de l’ordre de 30 % à 40 %. Par
ailleurs, plus de 60 % des patients
traités n’obtiennent pas de rémission pour diverses raisons,
qu’il s’agisse d’obstacles s’opposant aux soins ou d’effets secondaires. Quelle que soit la
raison, les personnes atteintes qui
ne sont pas traitées en vue d’une
Tableau 3
QUELQUES FAITS RELATIFS AU TRAITEMENT DU TDM
■
■
■
■
■
■
■
Globalement, la non-adhésion au traitement antidépresseur va jusqu’à 70 %.
60 % des patients cessent leur traitement antidépresseur dans les six mois.
44 % des patients des omnipraticiens cessent leur traitement antidépresseur dans les quatre mois.
28 % des patients des omnipraticiens cessent leur traitement antidépresseur au bout d’un mois.
Le taux de récurrence ou de rechute du TDM est de l’ordre de 80 %.
À la suite d’un épisode de TDM, le risque d’un second épisode est de 50 %.
À la suite de deux épisodes de TDM, le risque d’un troisième épisode est de 80 % à 90 %.
Publié grâce à une subvention à visée éducative de Pfizer Canada Inc.
30,6 %
% de rémission cumulé
}
67,0 %
13,7 %
13,0 %
rémission subiront probablement
une rechute et le risque qu’elles
soient réfractaires au traitement
sera accru. Obtenir une rémission et la maintenir est pour le
patient sa meilleure chance de se
rétablir complètement de son
épisode dépressif. Mais le plus
important est d’évoluer vers le
mieux-être pour donner au
patient une bonne chance de
retrouver une vie agréable.
Amélioration précoce
De nombreuses études rétrospectives nous fournissent un
ensemble substantiel de données
probantes sur pratiquement tous
les groupes d’antidépresseurs, ce
qui permet fortement de penser
qu’on peut observer une véritable
réponse à la pharmacothérapie
dans les quatre premières semaines de traitement et même, dans
certains cas, dans les deux
premières semaines. De plus,
une amélioration précoce grâce
à un traitement antidépresseur
est un prédicteur utile sur le plan
clinique des résultats thérapeutiques subséquents chez les personnes atteintes de TDM. L’optimisation du traitement au début
de la thérapie n’est cependant pas
prise en compte dans les lignes
directrices cliniques.
L’étude EMC (Early Medication Change) est une étude prospective qui examine pour la
première fois les effets d’un changement de médicaments au 14e
jour plutôt qu’au 28e jour comme
on le fait habituellement. L’objectif
est de vérifier si les patients à qui
on fait changer de médicament
plus tôt sont susceptibles d’obtenir
une rémission, comparativement
à ceux qui sont traités conformément aux lignes directrices
actuelles (c.-à-d. avec un
changement de médicament après
28 jours de traitement sans obtenir
de réponse). Si la stratégie de
l’étude EMC aboutit à une proportion significativement plus élevée
de patients en rémission, cela
pourrait avoir un important impact
sur divers aspects du traitement du
TDM, y compris sur les lignes
directrices cliniques et, plus
important encore, sur le bien-être
des patients.
Observance
L’observance thérapeutique peut
être un important obstacle à la
réussite d’un traitement. De multiples facteurs influent sur
l’adhésion du patient à son traitement, dont des facteurs spécifiquement liés au médecin, spécifiquement liés au patient ou
spécifiquement liés aux médicaments, qui sont connus pour
constituer les trois composantes
de la non-adhésion au traitement.
Les facteurs spécifiquement liés
au médecin sont les fréquents
appels des patients, l’éducation
inadéquate du patient, le manque
de suivi et la prescription de
médicaments inappropriés.
5
AC_Depression:PS_AC_Diabete_V2_AM_110707
22/09/10
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Page 6
Le trouble dépressif majeur
Les facteurs spécifiquement
liés au patient sont les événements indésirables, les
problèmes de coût des médicaments, la disparition de la
dépression, la non-perception
d’un bienfait, le désagrément, le
manque de motivation, la stigmatisation ou un réseau social
défaillant et les symptômes de
soulagement ou de mieux-être.
Les facteurs spécifiquement liés
aux médicaments sont les doses
ou les posologies compliquées,
les complications survenant à la
suite de l’ajout d’un deuxième
agent, les délais d’action retardés, les comprimés uniques par
rapport aux comprimés multiples, les dosages sous-thérapeutiques et les événements
indésirables associés au traitement ou à la tolérabilité des
médicaments.
Pour garantir un meilleur degré d’observance thérapeutique
de la part du patient, les médecins doivent choisir et instaurer
correctement le traitement. L’éducation du patient en ce qui con-
cerne les événements indésirables, le délai d’action et la
durée souhaitée du traitement
joue un rôle important dans
l’amélioration de l’observance.
Arrêt du traitement
La plupart des antidépresseurs
sont associés à des effets indésirables quand on cesse brutalement de les prendre. Le fait de
parler aux patients des symptômes associés à l’arrêt du traitement peut aider à éviter qu’ils ne
cessent brutalement de prendre
leurs antidépresseurs et à réduire
leur anxiété si des effets indésirables se produisent à la suite de
l’abandon du traitement.
Un grand nombre d’effets –
étourdissements, nausées, fatigue,
douleurs musculaires, frissons,
anxiété et irritabilité –, qu’on
appelle parfois syndrome de
sevrage, ont surtout été associés
à l’abandon brutal des ISRS et
des IRSN. Bien que ces symptômes ne soient pas dangereux
et qu’ils se dissipent habituellement au bout d’une semaine ou
deux, ils peuvent être très pénibles et très désagréables.
Tandis que les symptômes
associés à l’abandon du traitement peuvent se produire avec
tous les antidépresseurs, chaque
médicament peut donner lieu
à des symptômes différents en
cas d’arrêt brutal du traitement.
Quand on veut cesser de prendre
un antidépresseur, il faut en réduire progressivement la dose à
raison de 25 % par semaine afin
de minimiser l’apparition d’effets
secondaires associés au sevrage.
Tableau 5
ADHÉSION AUX TRAITEMENTS ANTIDÉPRESSEURS EN MÉDECINE GÉNÉRALE
RAISONS DE L’ABANDON DU TRAITEMENT ET MOMENT OÙ CELA SE PRODUIT
Raison
%
Moment
Pertinence clinique
On se sent mieux
Effets secondaires
Autre (p. ex., peur de la dépendance)
À la demande du médecin
Manque d’efficacité
35 %
30 %
17 %
15 %
15 %
6,1 semaines
4,5 semaines
8,0 semaines
3,2 semaines
1,0 semaine
Rappeler de respecter le traitement
Demander quels sont les effets secondaires et les traiter
Expliquer que les antidépresseurs ne génèrent pas de dépendance
Continuer à prendre le médicament même si on se sent bien
Rappeler que le médicament ne commence à être efficace qu’après quatre semaines environ
52 % des patients ont cessé de prendre leur médicament à l’intérieur d’une période de 12 semaines; les deux tiers n’en ont pas informé leur médecin.
Adapté de Maddox JC et coll. The compliance with antidepressants in general practice. J Psychopharmacology,1994;8(1):48-52.
Le point de vue du généraliste
PERSPECTIVE
Les médecins de famille font le
dépistage des cancers du sein, du
côlon et de la prostate, du diabète
et de la dyslipidémie, mais ils n’ont
pas le temps de faire activement
le dépistage de la dépression, dont
la prévalence est pourtant plus
forte que l’une ou l’autre de ces
maladies. Cela est exacerbé par la
stigmatisation qui est associée à la
dépression, qui fait que les personnes atteintes répugnent à en
parler. Les patients croient être en
mesure de gérer eux-mêmes leur
dépression et qu’ils finiront par
s’en remettre tout seuls un jour ou
l’autre. Les médecins de famille
rédigent plus de 80 % des ordonnances d’antidépresseurs, ce qui
montre bien le rôle important
qu’ils jouent en ce qui concerne
les soins des patients dépressifs.
Il est impératif que les médecins de famille prennent le temps
d’expliquer aux patients que la
dépression n’est pas une maladie
mentale, mais plutôt un désé-
quilibre chimique au niveau du
cerveau. Quand les patients ont
compris cela, les médecins de famille peuvent marquer un point en
leur demandant s’ils se penseraient
capables de gérer l’hypertension
ou le diabète sans une aide médicale ou sans médicaments.
La façon dont les médecins de
famille abordent la dépression va
probablement changer en même
temps que leur rémunération va
évoluer. De plus en plus de médecins optent désormais pour le
paiement par capitation plutôt que
pour le paiement à l’acte. Ils pourront ainsi passer plus de temps
avec leurs patients pour explorer et dépister les problèmes de
santé mentale.
Le Personal Health Questionnaire à neuf questions (PHQ-9),
l’échelle de dépression de Hamilton à sept questions (HAM-D7) et
l’Inventaire de la dépression de
Beck (IDB) sont les autoquestionnaires les plus couramment
utilisés pour évaluer la gravité des
symptômes de la dépression. Ils
sont très faciles à utiliser en contexte de soins primaires. L’échelle
d’incapacité de Sheelan (SDS) est
un autre autoquestionnaire facile
à utiliser en contexte de soins primaires pour évaluer le degré d’incapacité des patients dans les trois
principales sphères de leur vie que
sont leur travail, leur vie sociale et
leur foyer ou leur vie familiale.
Ces échelles s’administrent rapidement et facilement dans le cabinet achalandé des médecins de
famille et elles pourront servir pour
poser un diagnostic ou pour évaluer périodiquement les progrès
du patient.
DIAGNOSTIC
La plupart des médecins de famille n’utilisent pas d’échelles
d’évaluation pour déterminer la
présence d’un TDM. En ColombieBritannique, où il existe un code
des soins en santé mentale, les
médecins touchent un honoraire
forfaitaire pour administrer
certaines échelles d’évaluation
telles que l’IDB. Cela peut être
différent dans d’autres juridictions
puisque les méthodes de rémunération ne sont pas les mêmes. Cela
dit, les médecins de famille devraient être attentifs aux symptômes en se servant de la liste mnémonique SIGECAPS (tableau1).
Si on soupçonne la présence
d’une dépression, un PHQ-9 est
facile à administrer. Le médecin
doit aussi être à l’affût des pensées
suicidaires. (Voir le tableau2 pour
une liste des facteurs de risque
historiques, psychosociaux et cliniques de suicide.)
D’autres problèmes qui se
posent pour diagnostiquer le
TDM sont le manque de temps,
de disponibilité et de ressources. L’interaction moyenne
entre un médecin et un patient
dure de 7 à 15 minutes. De ce
fait, il est difficile de démêler
les symptômes du TDM – qui
ne se présentent pas toujours
simplement.
TRAITEMENT
La majeure partie des détections
et des traitements de la dépression se font maintenant au niveau
des soins de première ligne plutôt
que dans un contexte psychiatrique, et la plupart des médecins de
famille ne sont pas formés pour
ça. Cela dit, ils peuvent apporter
un soutien thérapeutique – et ils
le font.
Il y a deux options pour le traitement du TDM –la psychothérapie et la pharmacologie –, qui
doivent toutes deux être expliquées au patient. La psychothérapie, en particulier la thérapie
cognitivo-comportementale, peut
être aussi efficace que les médicaments, mais elle est difficile et
chère à mettre en œuvre. Les ressources publiques sont limitées et
leurs listes d’attente sont longues.
Par conséquent, le traitement
pharmacologique est devenu la
base du traitement du TDM.
Il est important que les médecins de première ligne expliquent
AC_Depression:PS_AC_Diabete_V2_AM_110707
Figure 2
22/09/10
12:50
Page 7
Résultats obtenus au cours
du traitement de la dépression
Adapté de : Lin et coll. Med Care, 1995; 33:67-74.
à leurs patients que la dépression
est due à un déséquilibre biochimique dans le cerveau et que c’est
une maladie au même titre que
l’hypertension ou le diabète. C’est
ce qui explique la nécessité d’utiliser des médicaments et d’adhérer
au traitement.
Le choix d’un antidépresseur
est souvent fonction de son profil
d’effets secondaires puisque l’efficacité des divers antidépresseurs
est très similaire. Une méta-analyse de 182 essais cliniques portant
sur des antidépresseurs utilisés
pour le traitement du TDM a
montré que le taux de réponse
était de 53,8 % chez les sujets qui
avaient pris un antidépresseur,
contre 37,3 % chez ceux qui
avaient reçu un placebo.
Les antidépresseurs modernes
sont plus faciles à utiliser du fait
de leur meilleure tolérabilité et
de leur profil d’effets secondaires plus favorable. L’objectif
ultime du traitement de la
dépression est d’obtenir une
rémission complète. Cela semble
plus facile à obtenir en utilisant
un traitement d’association.
La non-adhésion à un traitement antidépressif est fréquente et c’est une source non reconnue d’échec du traitement (voir
le tableau 5 pour les différents
facteurs de non-adhésion au
traitement). Malgré les multiples
classes d’antidépresseurs et les
différentes sortes de psychothérapies dont nous disposons, de
nombreux patients ne parviennent pas à obtenir une rémission
après l’essai d’un premier traitement. Cela a d’importantes implications cliniques puisque des
symptômes résiduels ont été
associés à un risque plus élevé
de rechutes et de récurrences.
Le fait de ne pas réussir à obtenir une rémission et de se contenter d’une réponse a pour conséquences :
■ un plus grand risque de
rechute;
■ un risque accru de résistance
■
■
■
■
au traitement;
des limitations psychosociales permanentes et un
handicap au travail;
l’aggravation du pronostic
des problèmes médicaux;
l’utilisation accrue des
services médicaux; et
une hausse soutenue des
risques de suicide et d’abus
de substances.
PRONOSTIC
L’éducation des patients fait toute
une différence en matière d’amélioration du taux de réponse et
l’amélioration du taux de réponse
fait toute une différence en matière d’évolution de l’état de santé
des patients. Si la psychoéducation peut entraîner une meilleure
adhésion au traitement, elle est
confrontée à des obstacles généraux tels que les visites trop
courtes et trop rares, et un modèle de rémunération à l’acte pénalisant les médecins qui prennent
le temps d’éduquer les patients et
Publié grâce à une subvention à visée éducative de Pfizer Canada Inc.
de chercher à comprendre ce
qu’ils ressentent et ce qu’ils
pensent. Ces obstacles sont
exacerbés par l’accès limité aux
spécialistes de la santé mentale
et par le manque d’outils faciles
à utiliser pour suivre l’évolution
des patients.
Les médecins de famille peuvent toutefois améliorer l’adhésion au traitement grâce à trois
étapes simples. Lors de la première visite, ils doivent expliquer
le diagnostic (et l’étiologie biochimique du trouble), le traitement,
les risques d’effets secondaires,
ce qu’il faut attendre du ou des
médicaments et prescrire le médicament qui sera le mieux toléré et le plus approprié à chaque
cas. Le médecin doit également
demander au patient s’il trouve
que l’approche envisagée est raisonnable et s’il a des craintes au
sujet du médicament utilisé. Enfin,
le médecin doit prévoir des visites
de suivi deux semaines et quatre
semaines plus tard afin de sur-
veiller l’évolution du patient en
temps opportun.
Lors de chaque visite de suivi,
le médecin de famille doit présumer que le traitement n’a pas été
bien respecté et demander au
patient s’il prend son médicament comme prescrit, s’il ressent
des effets secondaires et quels
symptômes devraient être atténués pour qu’il retrouve le niveau
de fonctionnement prémorbide.
Le médecin doit aussi suggérer
de continuer à prendre le ou les
médicaments afin d’obtenir une
rémission et de la maintenir. Si le
patient tient absolument à cesser
de prendre le médicament, le
médecin doit proposer d’en
superviser le sevrage.
7
AC_Depression:PS_AC_Diabete_V2_AM_110707
22/09/10
12:50
Page 8
Études de cas
1 : Dépression avec anxiété comorbide
PRÉSENTATION.
Un homme de 45 ans à la longue histoire de dépression se présente chez son psychiatre avec un ensemble de symptômes. Il se plaint de manquer d’énergie, de se sentir anxieux
et d’être irritable. Il présente également un gros problème de concentration et de mémoire, ainsi qu’une importante anergie et une fatigue incapacitante, il fait de l’hypersomnie,
il a un besoin incontrôlé de sucre et il est boulimique.
Il est directeur du marketing,
marié, il a une petite fille et un
deuxième enfant est en route.
C’est à l’âge de 19 ans qu’il a
subi son premier épisode de
dépression, qui avait été traité
avec succès par le citalopram
dosé à 40 mg. Il indique avoir
subi depuis des rechutes récurrentes et infracliniques se manifestant annuellement de façon
saisonnière, en hiver. Il indique
aussi que ces épisodes récurrents
étaient moins graves que le
premier, en partie, pense-t-il,
parce qu’il continuait à prendre
du citalopram, ce qui peut avoir
atténué ses symptômes. À l’âge
de 35 ans, il a réduit sa dose à
20 mg et cela n’a fait aucune différence, dit-il, puisque ses rechutes hivernales réapparaissaient chaque année, même à la
dose plus élevée. Il a finalement
abandonné son médicament à
l’âge de 42 ans. Il fait état d’antécédents familiaux de dépression
et du suicide de deux cousins du
côté de son père.
En ce qui concerne ses symptômes, ils sont apparus à la suite
d’une promotion récente qu’il a
obtenue et il avoue avoir des difficultés avec son nouveau patron.
Aussi, sa crainte de ne pas être à
la hauteur de ce qu’on attend de
lui agit-elle probablement comme
un facteur déclenchant dans
l’aggravation de ses symptômes.
Il reconnaît également que le
fait d’avoir un enfant en bas âge
et une femme enceinte n’a fait
qu’ajouter à ses soucis.
Depuis son enfance, le patient
fait face à ses défis dans l’anxiété.
Il se dit timide et il craint qu’on
le juge au travail. À tel point qu’il
prend de l’alcool pour se donner
du courage en société, même s’il
est généralement bien noté.
Quand il est sous pression, il a
souvent des céphalées, des nausées et des diarrhées, mais il sait
que ces symptômes proviennent
de son inquiétude chronique. Ce
patient répond à des critères de
trouble d’anxiété généralisée
(TAG) et de phobie sociale en
rémission partielle.
À la suite de l’apparition de ce
nouvel épisode, le patient est allé
consulter, il y a 18 semaines, son
médecin de famille, qui lui a prescrit du citalopram 50 mg pendant
deux semaines avant de réduire
la dose à 40 mg. Son score à l’Inventaire de la dépression de Beck
(IDB) était de 32 lors de sa première visite et il était plutôt suici-
daire, mais son score n’est plus
que de 24 actuellement. Il a grossi de près de 10 kg lors de cet
épisode. Son médecin de famille
pense que ce gain de poids s’est
produit avant l’instauration du traitement par le citalopram (c.-à-d.
qu’il est dû à la dépression ellemême), mais que le traitement l’a
peut-être exacerbé.
Le psychiatre a apporté plusieurs
modifications au traitement du
patient. D’abord, il a changé
l’ordonnance de citalopram générique pour du Celexa, ce qui s’est
traduit par une plus grande efficacité et par l’atténuation des diarrhées
du patient. Son score à l’IDB est
descendu à 20, mais il n’a plus
bougé. Par conséquent, le psychiatre
a de nouveau changé son médicament pour la venlafaxine XR (à
libération prolongée) à raison de
37,5 mg une fois par jour. Mais le
patient s’est plaint que la venlafaxine le rend irritable, l’empêche de
dormir et lui donne des nausées.
Une fois de plus, il a changé
de médicament pour passer à la
desvenlafaxine à libération prolongée (Pristiq) à raison de 50 mg
une fois par jour, ce qui a été très
bien toléré. De très légères nausées se sont dissipées après deux
ou trois jours en prenant de la
nourriture et son score à l’IDB est
descendu à 14 en moins de quatre
semaines. Au bout d’un mois, il
s’est retrouvé en rémission avec
un score inférieur à 5 à l’IDB.
L’ajout d’une thérapie cognitivocomportementale pourra aider ce
patient à éviter les rechutes. Il est
sur la liste d’attente d’un psychologue et il entreprendra le traitement dans un mois.
2 : Dépression modérée sans complications
PRÉSENTATION.
Une femme de 41 ans téléphone au cabinet de son médecin et demande à la secrétaire, qu’elle connaît bien, de lui prendre un « long rendez-vous ». Le médecin de famille
indique à sa secrétaire de réserver 30 minutes en fin de journée le jour même.
La patiente, qui est responsable
des ressources humaines dans
une grande entreprise, dit être
très fatiguée depuis six semaines. Le médecin de famille
examine les résultats des analyses sanguines effectuées lors
de son dernier bilan de santé et
il note qu’ils sont normaux, y
compris la thyréostimuline
(TSH). La patiente avoue se
sentir souvent triste; elle n’a pas
d’appétit et elle a perdu
quelques kilos. Elle dort mal du
fait qu’elle se réveille de bonne
heure et bien qu’elle ait souvent
e n v i e d e p l e u r e r, e l l e n ’ y
parvient pas.
Elle n’a pas d’énergie et elle
n’a pas fait d’exercice depuis
plus d’un mois. Elle n’est pas
efficace au travail; on dirait
qu’elle n’arrive pas à se concentrer et qu’elle trouve son travail
plus stressant que d’habitude.
De façon générale, elle est plus
anxieuse, inquiète et irritable, et
elle se fâche plus facilement
contre ses deux adolescents. Sa
relation avec son mari est
tendue; ils ne communiquent
pas et ils n’ont pas eu de relations sexuelles depuis deux
mois. Elle ne voit personne et
elle ne téléphone plus à ses amis
comme elle le faisait d’habitude.
Elle affirme ne pas avoir de
pensées suicidaires.
La patiente est alerte et d’apparence soignée, mais elle à l’air
déprimé. Son score à l’échelle
d’incapacité de Sheehan (SDS)
est de 8/8/7 (travail/vie sociale/
famille), soit un total de 23, ce
qui évoque une légère dépression. Elle répond aux critères du
TDM du DSM-IV-TR.
Son médecin lui parle de la
base biochimique de la dépression ainsi que des options thérapeutiques que sont la psychothérapie et les médicaments. Il
passe en revue les avantages et
les inconvénients de chaque
méthode ainsi que les différents
médicaments, leurs effets secondaires et ce qu’il faut en attendre.
Comme elle est très occupée, et
malgré ses craintes, elle accepte
d’entreprendre un traitement par
un antidépresseur. Son médecin
de famille décide de commencer
avec un tout nouveau IRNS, la
desvenlafaxine 50 mg, puisqu’il
semble être facile à utiliser (p. ex.,
gain de poids et dysfonctionnement sexuel minimaux). Il lui prescrit également du clonazépam 0,5
mg à prendre au besoin pour traiter son anxiété ou son insomnie en
lui expliquant que ce médicament
est pour une utilisation à court
terme. Il ne lui en prescrit que
30 pilules.
Le médecin consacre quelques
minutes à faire un peu de psychoéducation afin d’améliorer
l’adhésion au traitement. Il explique à la patiente qu’il faudra
attendre de trois à quatre semaines
avant que la desvenlafaxine ne
commence à faire effet et il passe
en revue les effets secondaires
potentiels. Il dit aussi à la patiente qu’elle va devoir poursuivre le
traitement pendant environ neuf
mois et qu’elle ne devra pas
l’abandonner quand elle commencera à se sentir mieux. Il lui
garantit que ces médicaments ne
génèrent pas de dépendance. Il
l’encourage aussi à essayer les TCC
que l’on trouve sur Internet et il lui
suggère de consulter le site
MoodGym (http://moogym.anu.
edu.au/welcome).
Trois semaines plus tard, lors de
la visite de suivi, la patiente lui
avoue que la première semaine a
été pénible. Elle se sentait étourdie et vaguement nauséeuse, mais
elle est contente de dire qu’elle
commence à aller mieux. Son
humeur s’améliore, elle est moins
anxieuse, irritable et colérique. Elle
ne dort toujours pas bien, mais il
y a une certaine amélioration. Elle
s’entend mieux avec son mari et
Références
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ses enfants, et ça se passe aussi
mieux au travail.
Son médecin l’encourage à
continuer à prendre son médicament à la même dose et à prendre
un nouveau rendez-vous de suivi
pour dans 2 ou 3 semaines. Si
l’état de sa patiente ne continuait
pas à s’améliorer, le médecin pourrait augmenter la dose de desvenlafaxine à 100 mg. Il pourrait aussi
ajouter un deuxième antidépresseur, tel que le bupropion XL (à
très longue durée d’action) (qui est
également efficace pour lutter
contre le dysfonctionnement
sexuel que provoquent les ISRS et
les IRSN) ou un antipsychotique
atypique tel que la quétiapine XR
(à libération prolongée), qui peut
être associé à une prise de poids,
mais qui est bénéfique pour les
problèmes de sommeil, d’humeur
et d’anxiété. Les antipsychotiques
atypiques plus récents, comme
l’aripiprazole, ne semblent pas
entraîner de prise de poids.
Éditrice: Janet Smith
Directrice de comptes: Pauline Shanks
Rédactrice en chef: Deirdre MacLean
Journaliste: Julie Cohen
Directeur artistique: Dino Peressini
Ce supplément est publié par: Le Groupe des publications d’affaires et professionnelles, 1200, avenue McGill
College, bureau 800, Montréal (Québec) H3B 4G7
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