20 octobre 2015 Les Canadiens élisent un gouvernement libéral majoritaire Les Libéraux ont provoqué un raz-de-marée dans la région Atlantique et ont gagné du terrain vital au Québec et en Ontario qui comptent le plus de députés fédéraux. Et si l’Alberta, la Saskatchewan et certaines régions rurales ont résisté à la poussée libérale, Justin Trudeau a réussi à enlever des circonscriptions dans chaque province et domine dans les grands centres urbains diversifiés du Canada. Qu’est‐ce que cela signifie? Répartition des sièges Le Parti libéral a remporté la majorité des sièges, dépassant nettement que les prédictions des sondages. Partis de 34 sièges seulement à la dernière élection générale, Justin Trudeau et les candidats libéraux ont gagné l’élection dans 184 circonscriptions. Le premier ministre Stephen Harper a démissionné de la direction de son parti qui a perdu 67 sièges, et n’a plus que 99 élus. Le NPD n’a pas réussi à bonifier ses gains remarquables de 2011. Le parti a conservé 44 sièges, comparativement à 103 il y a quatre ans. Avec 10 députés élus, le Bloc québécois a mieux tiré son épingle du jeu qu’en 2011, mais n’obtient pas le statut de parti officiel. Son chef, Gilles Duceppe, n’a pas réussi à gagner son pari et à retourner à Ottawa d’où il avait été évincé en 2011. La chef du Parti vert, Elizabeth May, a été réélue. Les libéraux de M. Trudeau prendront les rênes du pouvoir relativement rapidement, entrant en fonction dans deux semaines à peine avec un caucus qui comprend beaucoup de nouveaux députés. Mais M. Trudeau peut compter sur de nombreux vétérans, à côté d’un groupe de députés très médiatiques et couronnés de succès parmi lesquels il pourra choisir les membres de son cabinet. Comme toujours, son choix pour le ministère des Finances très en vue sera analysé de près. Majoritaires, les libéraux disposeront de quatre années pour mettre en œuvre leur plateforme électorale. Résultats des élections : Les implications politiques Il ne faudrait pas sous-estimer l’ampleur politique de la victoire libérale. Le parti a fait passer le nombre de députés élus de 34 en 2011 à 184, ce qui représente la plus forte augmentation du nombre de sièges conquis par un parti entre deux élections dans l’histoire canadienne. De plus, les 40 sièges remportés au Québec par les libéraux représentent le meilleur résultat de ce parti dans la province depuis 1980, quand le parti dirigé par Pierre Elliott Trudeau (le père de Justin) avait remporté 74 des 75 circonscriptions. En plus de cette victoire écrasante, le fait que M. Harper ait annoncé sa démission et la probabilité que Thomas Mulcair, le chef du NPD en fasse autant, donne au premier ministre Justin Trudeau la possibilité de gouverner quasiment sans opposition pendant au moins un an. Nous pensons qu’il profitera de ce vide politique pour accélérer la mise en œuvre d’une grande partie de son programme. ÉLECTIONS FÉDÉRALES 2015 L’élection d’un gouvernement majoritaire élimine l’incertitude qu’aurait inévitablement suscitée un gouvernement minoritaire sur les marchés financiers.. Quant aux relations entre les paliers fédéral, provincial et municipal, tout indique qu’une ère nouvelle commence. Les libéraux se sont engagés à faire de la collaboration avec les provinces un des sujets prioritaires. Concrètement, M. Trudeau a promis de réinstaurer les conférences des premiers ministres. Il a promis des fonds supplémentaires pour la santé et entend renégocier les transferts aux provinces dans ce domaine, bien que contrairement au NPD, il n’a jusque-là pas promis de maintenir le taux de croissance annuel de 6% des transferts dans la santé qui doit être remplacé par un nouveau taux plus faible à partir de 2017-2018. On peut également s’attendre à une plus grande coopération entre le fédéral et les provinces sur la lutte contre le changement climatique. Et le plan libéral d’investissement en infrastructures – un des points forts de la plateforme gagnante – devrait également faire du gouvernement fédéral un partenaire plus solide dans les secteurs vitaux du transport en commun, du logement social et des infrastructures vertes. Qu’est‐ce que cela signifie pour l’économie? Disposant d’une majorité de sièges au Parlement, le gouvernement libéral a les mains libres pour mettre ses politiques en application. La pièce maîtresse de la plateforme libérale, à savoir l’augmentation de CA$60 milliards des dépenses d’infrastructures à CA$125 milliards au cours des dix prochaines années, est une bonne nouvelle pour l’économie canadienne, non seulement parce qu’elle soutiendra la croissance du PIB mais aussi parce qu’elle accroîtra la croissance potentielle de l’économie qui avait été entravée par des années de sous-investissement. L’injection de fonds immédiate par Ottawa devrait accélérer le lancement de projets d’immobilisations des municipalités et des provinces. Mais les avantages pour l’économie dont on a beaucoup parlé ne se ressentiront probablement qu’en 2016-2017 en raison des décalages habituels entre l’adoption au Parlement et la première pelletée sur les chantiers. Ce délai pourrait être plus court pour certaines municipalités qui ont dans leurs cartons des projets prêts à démarrer, mais dans la plupart des cas, les délais seront probablement longs en attendant le traitement des demandes de permis. Il existe cependant des raisons valides de s’inquiéter des projets du gouvernement Trudeau d’augmenter les cotisations et les prestations de retraite. Forcer les Canadiens à épargner peut les aider à enrichir leur pécule pour leurs vieux jours, mais, dans l’immédiat, cela freinera la consommation. Et comme les dépenses de consommation représentent environ 60% de l’économie, il ne faudrait pas en sous-estimer l’effet négatif sur la croissance. Sur un plan positif, l’expansion du Régime de pensions du Canada (RPC) à l’échelle fédérale devrait permettre à l’Ontario d’abandonner ses propres plans de revalorisation des cotisations et prestations de retraite. Nous espérons que l’effet négatif de l’expansion du RPC sur les dépenses de consommation soit quelque peu amorti par les changements proposés de l’impôt sur le revenu des particuliers. La plateforme libérale promettait une réduction d’impôt pour la classe moyenne de 22% à 20.5% et la création d’une nouvelle tranche d’imposition de 33% pour les plus hauts revenus. Or, la classe moyenne a normalement une plus grande propension marginale à consommer que les Canadiens à revenu élevé, l’impact global net devrait donc être positif pour les dépenses de consommation. Les déficits budgétaires augmenteront pour permettre de réaliser ces dépenses supplémentaires. Cela dit, les taux de croissance économique sur lesquels reposent les hypothèses du Parti libéral – qui sont en fait les prévisions du directeur parlementaire du budget – sont trop optimistes à notre avis. Donc le déficit et le ratio dette/PIB seront probablement un peu plus élevés que ce qui a été annoncé, du moins au cours des deux prochaines années. Mais cela n’est pas nécessairement négatif pour le dollar canadien. Avec des mesures de relance budgétaire, il est moins probable que la Banque du Canada soit obligée d’assouplir encore sa politique monétaire, ce qui, dans les faits, permet d’enrayer la dépréciation du huard. Conséquences pour le marché obligataire Notre modèle de la juste valeur laisse penser que la taille du déficit budgétaire présenté dans la plateforme libérale pourrait entraîner une augmentation d’environ 10 à 15 points de base des rendements à 10 ans, toutes choses étant égales par ailleurs. Il est peu probable que quelques années de déficits relativement modestes fassent de l’ombre aux autres emprunteurs ou mettent en péril la note AAA du Canada. Le gouvernement fédéral du Canada continuera de conserver un fardeau de dettes relativement faible et de jouir d’une souplesse budgétaire 2 ÉLECTIONS FÉDÉRALES 2015 exceptionnelle, les besoins de financement nets restant comparativement modestes. Cela dit, l’incertitude actuelle concernant les perspectives économiques mondiales, y compris l’évolution de la conjoncture aux États-Unis et en Chine, pourraient facilement avoir un effet beaucoup plus marquant sur nos taux intérieurs à long terme. Par conséquent, il sera difficile de faire la distinction entre les effets du changement du paysage politique intérieur sur les taux d’intérêt de ceux dus à d’autres causes. Avant l’élection, les observateurs s’entendaient pour dire que la Banque du Canada resterait sur la touche pendant le plus clair de l’année prochaine. Au cours de sa campagne, Justin Trudeau a dit qu’il entreprendrait des pourparlers avec les provinces sur la manière d’améliorer le RPC dans les trois mois suivant son entrée en fonction. Selon l’issue de ces négociations et le moment du lancement du programme d’infrastructures, l’effet net sur la croissance et par conséquent sur les perspectives de la politique monétaire reste peu clair. Au moment de rédiger ces notes, nous nous attendons à ce que la BdC maintienne sa politique monétaire sans changement pendant la prochaine année. Sur le marché des changes, nous considérons l’élection d’un gouvernement majoritaire proposant des mesures de relance budgétaire comme un point positif net pour le dollar canadien. Notre nouvelle fourchette pour le taux USDCAD est de 1.25 à 1.35 (auparavant 1.35 à 1.40). Marché boursier / Devises Bien que les mouvements de l’indice S&P/TSX et du dollar canadien restent principalement déterminés par le contexte économique mondial et son incidence sur les prix des produits de base, nous voyons dans le résultat de l’élection un effet positif net pour les deux marchés. Les entreprises du Canada verront le Parti libéral maintenir l’impôt sur les sociétés fédérales à 15% (comme le préconisaient les conservateurs), contrairement au NPD qui avait exprimé l’intention de le hausser à 17%. Sur un plan plus technique, le gouvernement libéral aura rapidement une décision difficile à prendre sur le régime de recapitalisation des six grandes banques du Canada, ce qui sera l’enjeu législatif le plus important pour ce secteur : agir immédiatement en adoptant une législation élaborée sous le gouvernement précédent ou attendre et étudier davantage la question. Nous espérons que le gouvernement interviendra rapidement dans ce dossier alors que beaucoup d’autres autorités de réglementation bancaires du monde vont de l’avant avec des régimes similaires. De nouveaux retards législatifs au Canada pourraient accentuer l’incertitude dans le secteur bancaire et miner les valorisations ainsi que la capacité des six grandes banques à renouveler leurs structures de capital conformément au cadre réglementaire de Bâle III. 3 ÉLECTIONS FÉDÉRALES 2015 ÉCONOMIE ET STRATÉGIE Bureau Montréal 514 879-2529 Bureau Toronto 416 869-8598 Stéfane Marion Marc Pinsonneault Warren Lovely Économiste et stratège en chef Économiste principal DG, recherche et stratégie secteurs publics [email protected] [email protected] [email protected] Paul-André Pinsonnault Matthieu Arseneau Économiste principal, Revenu fixe Économiste principal [email protected] [email protected] Krishen Rangasamy Angelo Katsoras Économiste principal Analyste associé, géopolitique [email protected] [email protected] Généralités : Banque Nationale Marchés financiers est une unité de Financière Banque Nationale Inc. (FBN), filiale en propriété exclusive indirecte et division de la Banque Nationale du Canada. Ce rapport a été produit par FBN. La Banque Nationale du Canada est une société ouverte inscrite à la cote des bourses canadiennes. Les informations contenues dans les présentes proviennent de sources que nous jugeons fiables, toutefois nous n’offrons aucune garantie à l’égard de ces informations qui pourraient s’avérer incomplètes. Les opinions exprimées sont fondées sur notre analyse et notre interprétation de ces informations et elles ne doivent pas être interprétées comme une sollicitation ou une offre visant l’achat ou la vente des titres mentionnés dans les présentes. Résidents du Canada : À l’égard de la distribution du présent rapport au Canada, FBN endosse la responsabilité de son contenu. Pour obtenir de plus amples renseignements au sujet du présent rapport ou pour effectuer une opération, les résidents du Canada doivent communiquer avec leur conseiller en placement FBN. 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