018 . LES DETERMINANTS DE LA CONSOMMATION

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Les déterminants de la consommation
J.DURR
01/2011
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LES DETERMINANTS DE LA CONSOMMATION
• Etudier les déterminants de la consommation c’est dégager et analyser les facteurs qui agissent sur le niveau, la
composition et la variation de la consommation d’une personne ou d’une population. On peut étudier la consommation
de l’ensemble des biens offerts, ou se limiter à celle d’un ensemble ciblé de biens.
Dans le cadre de l’approche managériale de la vente la mercatique s’attache tout particulièrement à analyser les ressorts
du comportement du consommateur. Psychologie, sociologie et autres disciplines y sont mises à contribution pour
cerner au plus près les motivations de l’acheteur. On n’empruntera pas ici cette voie, laissée à l’étude du management.
• C’est principalement dans la perspective de la science économique que seront étudiés les déterminants de la
consommation. On complétera l’approche par la référence à quelques travaux sociologiques sur la question.
Deux grands paradigmes de la théorie économique se partagent principalement l’étude de la consommation : la tradition
néoclassique et l’approche keynésienne. Si le terrain de prédilection de la première est la microéconomie, la seconde se
situe par essence au plan macroéconomique.
1 - LA CONSOMMATION DANS LA PERSPECTIVE MICROECONOMIQUE
a) La rationalité du consommateur.
• Pour les néoclassiques étudier les déterminants de la consommation revient à analyser comment le consommateur
affecte rationnellement son revenu à l’achat de biens à prix donnés pour satisfaire au mieux ses besoins.
• Le partage du revenu entre consommation et épargne relève de la même logique, dans la mesure où, pour les
néoclassiques, épargner c’est placer une partie de son revenu à un prix - le taux d’intérêt - de façon à l’accroître dans le
futur pour pouvoir acheter plus de biens ultérieurement. Placer son épargne peut être considéré comme un achat de
produits de placement permettant d’augmenter une consommation différée. Les choix de consommation sont un
arbitrage entre des biens dans le présent. Le choix entre consommation et épargne est un arbitrage entre des biens dans
le présent et des biens dans le futur. Et au cœur de cet arbitrage, comme de tout arbitrage, un prix : le taux d’intérêt. Et
le même but : maximiser sa satisfaction.
• Besoins, revenu, prix sont les trois donnés qui encadrent la gestion rationnelle des choix du consommateur dans leurs
achats de biens - présents ou futurs.
On retrouve ici la problématique du choix rationnel sous contrainte de rareté, illustré par l’exemple de W. RÖPKE
(1899-1966) : comment faire rationnellement sa malle.
- Un but à optimiser : maximiser sa satisfaction :
- tenir compte de ses préférences relatives aux biens à emporter, dans le cas de la malle
- prendre en compte l’échelle de ses préférences quant aux biens à acheter, dans le cas de l’affectation de son
revenu.
- La contrainte de rareté des moyens :
- pour la malle, ses dimensions
- pour la conso et l’épargne, le revenu.
- La contrainte de prix :
- la place qu’occupent les différents objets dans la malle - c’est le « prix à payer » en termes de place
- le prix des différents biens - leur « place dans le budget ».
Revenu ------------------------------------> Achat biens / épargne --------------------------------------> Besoins
contrainte budgétaire
prix
satisfaction maximale
• On peut intuitivement penser qu’il existe un choix qui maximise la satisfaction globale du consommateur :
l’assortiment de biens qu’il va acheter et la partie de son revenu qu’il va épargner. Ce choix est appelé choix optimum
parce qu’il est le meilleur choix possible.
• Sur le plan de la logique, l’existence d’un tel optimum repose sur des conditions strictes qui ne seront pas envisagées
ici.
Les économistes néoclassiques ont développé des instruments théoriques pour étayer la rationalité économique du choix
du consommateur.
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b) Consommation et revenu
• Une hausse du revenu desserre la contrainte budgétaire. En conséquence le consommateur rationnel va généralement
augmenter sa consommation. L’approche microéconomique permet d’expliquer le lien entre la variation de la
consommation (demande) et celle du revenu.
• Quand le revenu s’élève, la variation de la demande qui en résulte est différente selon les biens. On mesure la
sensibilité de la demande D d’un bien aux variations du revenu par l’élasticité de la demande par rapport au revenu :
ED/R = (∆D/D) / (∆R/R)
∆D/D et ∆R/R sont respectivement les variations relatives de la demande et du revenu.
• Selon la valeur de l’élasticité, on distingue trois types de biens.
- Les biens inférieurs, atypiques, dont la consommation baisse quand le revenu augmente : ED/R < 0
Ce sont des biens dépréciés par les consommateurs. Quand le revenu augmente ils sont remplacés par d’autres biens.
Ex. la saucisse basique par rapport à la charcuterie fine.
- Les biens normaux, dont la consommation augmente avec le revenu mais dans une proportion moindre : 0 < ED/R < 1
Ex. les vêtements.
- Les biens supérieurs, dont la consommation augmente dans des proportions supérieures à celles du revenu : 1 < ED/R
Ex. les produits de luxe.
c) Consommation et prix.
• Généralement la demande varie en sens inverse du prix. Quand le prix d’un bien baisse, sa demande augmente en
général. L’analyse économique distingue deux effets d’une variation du prix d’un bien sur sa consommation (demande).
On envisage ici une baisse du prix.
- l’effet de substitution. Quand le prix d’un bien baisse, ce bien devient moins cher relativement aux autres biens. Le
consommateur aura alors intérêt à acheter plus de ce bien au détriment d’autres biens
- L’effet de revenu. La baisse du prix d’un bien augmente le pouvoir d’achat du consommateur. Elle équivaut à une
hausse de son revenu. Il pourra augmenter son achat du bien et/ou d’autres biens.
• La demande d’un bien est plus ou moins sensible à la variation de son prix Px. On mesure cette sensibilité par
l’élasticité de la demande par rapport au prix :
ED/Px = (∆D/D) / (∆Px/Px)
• L’élasticité de la demande par rapport au prix est presque toujours négative parce que la demande varie en sens
contraire du prix. On distingue différents types de réaction de la demande par rapport à la variation du prix.
- Demande élastique : forte réaction face à une variation du prix : ED/Px < -1 (-2, -3…). Ex. voyages.
- Demande inélastique (ou rigide): la variation du prix affecte peu la demande : -1 < ED/Px < 0 (-0,2, -0,1…). Ex.
tabac.
- Demande perverse, atypique : elle varie dans le même sens que le prix : ED/Px > 0. Ex. certains biens de luxe.
2) LA CONSOMMATION DANS LA PERSPECTIVE MACROECONOMIQUE
a) L’approche keynésienne de la consommation.
• L’approche macroéconomique n’est pas issue au départ de l’agrégation de comportements microéconomiques. Pour
les néoclassiques la perspective microéconomique était suffisante. Pour deux raisons.
- Les comportements rationnels des agents économiques s’harmonisent entre eux sur les marchés. Si ceux-ci sont
parfaits, un équilibre général de tous les marchés assure le fonctionnement global de l’économie. Point besoin de
macroéconomie.
- L’offre globale trouve toujours une demande globale à sa hauteur. Des déséquilibres partiels sont possibles, et ils
sont régulés sur les marchés où ils ont lieu. Mais globalement, il n’y a pas de risque de surproduction. Pourquoi ? Parce
que l’offre génère un revenu qui est toujours dépensé :
- soit en consommation
- soit en investissement, dans la mesure - on l’a vu - où l’épargne est forcément placée pour rapporter des
intérêts, donc mise à la disposition des investisseurs - donc dépensée.
• Cependant, dès les origines de la science économique, certains auteurs ont émis des doutes sur l’impossibilité de la
surproduction généralisée. Par exemple T. R. MALTHUS (1766-1834) envisage la possibilité d’une insuffisance de la
demande globale.
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C’est J. M. KEYNES (1883-1946) qui théorise dans « la théorie générale » (1936) la possibilité d’une insuffisance de la
demande globale nécessaire au maintien de l’activité économique au niveau assurant le plein emploi de la maind’œuvre disponible. Et c’est sur le terrain macroéconomique qu’il situe sa démonstration. Celle-ci s’appuie sur un
changement radical du statut de l’épargne. Produit d’un arbitrage rationnel dans la pensée néoclassique, l’épargne se
retrouve définie par soustraction chez Keynes : elle est la part du revenu qui n’est pas consommée. Elle est un reste, un
résidu. Elle n’est plus le revers de l’investissement, elle n’est plus que de la non dépense. Qui doit être compensée par
de la dépense - l’investissement - pour que la dépense globale reste à la hauteur de l’offre globale. Et là, rien n’est
moins sûr a priori. Un équilibre de sous-emploi est dès lors possible.
• Si l’épargne est un reste, c’est que le niveau global de la consommation ne résulte pas d’un arbitrage avec elle. Il est
déterminé ailleurs. Par quoi ? Par le niveau du revenu global lui-même. KEYNES invoque, de façon assez vague, une
fonction de consommation macroéconomique qui relie le niveau global de consommation au revenu global.
• Il donne une spécification de cette fonction : la propension marginale à consommer : quand le revenu global
augmente, la consommation globale augmente aussi, mais en proportion moindre. La propension marginale à
consommer c’ mesure cette proportion : c’ = ∆C/∆R
c’ < 1
b) La théorie keynésienne a suscité des critiques.
• Le courant néoclassique a cherché à l’intégrer dans son corpus en lui trouvant des fondements microéconomiques.
• Les essais de vérification empiriques de la fonction keynésienne ont donné des résultats probants, mais incapables de
rendre compte de la complexité du phénomène. Ce qui n’est pas étonnant dans la mesure où la définition keynésienne
est peu rigoureuse parce qu’elle ne relève que du bon sens étayé par une connaissance empirique de la vie économique.
Et qu’elle vise un but qui la dépasse - montrer la possibilité du sous-emploi.
• Pour mieux rendre compte des faits observés, des travaux de microéconomie ont fait intervenir d’autres facteurs
déterminant du niveau de la consommation au niveau macroéconomique:
- l’inertie de la consommation par rapport au revenu courant : théories de J. DUESENBERRY et de T. BROWN.
- la prise en compte d’un effet de richesse : le consommateur ne se réfère pas uniquement à son revenu courant, mais
tient compte de l’ensemble de ses revenus futurs, qu’il anticipe - càd de la richesse globale à laquelle il aspire : théories
du revenu permanent de M. FRIEDMAN et du cycle de vie de F. MODOGLIANI.
3 - APPROCHES SOCIOLOGIQUES
• La consommation n’est pas seulement l’expression de la rationalité économique d’un homo economicus abstrait
œuvrant sur des marchés. Elle s’inscrit aussi dans l’épaisseur des rapports sociaux, qui ne se réduisent pas aux relations
de marché. Elle est un acte social au sens où :
- elle est marquée par des habitudes, des normes, des valeurs et des représentations collectives qui lui donnent du
sens
- elle permet à l’acteur social de se positionner dans les différents champs et milieux sociaux par des pratiques
largement symboliques qui permettent tout à la fois de se différencier et de s’intégrer.
On mentionnera quelques contributions majeures de la sociologie à l’étude de la consommation.
• L’effet de démonstration. Selon J. DUESENBERRY (1918 -) les membres d’un groupe social donné ont tendance à
imiter la consommation d’un groupe au revenu supérieur (supérieur mais proche) pour faire la démonstration de leur
statut (1949). Ce constat conforte la théorie keynésienne selon laquelle les ménages pauvres auraient une propension à
consommer plus forte que la moyenne. Cela tiendrait au fait qu’ils tentent d’imiter les plus riches qu’eux. Cependant la
plus forte propension à consommer des ménages modestes tient surtout au fait que certaines consommations sont
difficilement compressibles. Ainsi, plus le revenu est faible, plus la consommation en prend une part importante.
• L’effet de distinction et la consommation ostentatoire. T. VEBLEN (1857-1929), dans une étude de la haute
bourgeoisie aux Etats-Unis (Théorie de la classe de loisir - 1899) remarque que celle-ci gaspille du temps dans les
loisirs et des biens dans sa consommation. Le but de ce gaspillage est de montrer son statut social supérieur - il est
ostentatoire. Le concept de consommation ostentatoire est très important en sciences sociales. Il a été repris par d’autres
sociologues, tels que P. BOURDIEU et J. BAUDRILLARD.
L’effet VEBLEN décrit une conséquence que peut avoir la consommation ostentatoire : l’augmentation du prix d’un
biens conduit à l’augmentation de sa consommation.
• La consommation comme langage. Dans « le système des objets » (1968) J. BAUDRILLARD (1929-2007) se livre à
une réflexion sur les objets du quotidien. Il constate que ceux-ci ne puisent plus leur sens dans leur fonction pratique
mais dans leur matérialité. Leur diffusion industrielle et leur sujétion aux consignes versatiles de la mode ne les
empêchent plus de se constituer en un système cohérent de signes. La consommation devient un langage. Deux ans
après, dans « La société de consommation » il définit le rôle de la consommation dans les sociétés occidentales comme
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un élément structurant des relations sociales. Ainsi, la consommation n’est plus, pour chaque individu, le moyen de
satisfaire ses besoins mais plutôt de se différencier.
• L’effet d’appartenance. Pour P. BOURDIEU (1930-2002) (« La distinction » - 1979) la consommation est dictée par
des normes sociales. Elle est un moyen de se distinguer des autres et de montrer son appartenance à un groupe social
donné. Les individus se comportent selon leur position sociale. Mais le groupe au statut le plus élevé a tendance à
imposer son modèle de consommation aux autres.
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