Nantes-2012-TAUREAU-Pneumologie (9 Mo)

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Institut Régional de Formation aux Métiers de la Rééducation et
Réadaptation des Pays de la Loire
54, rue de la Baugerie
44230 SAINT-SEBASTIEN-SUR-LOIRE
Prévention des fausses routes post réanimation
Création d’un moyen de transmission
Loïc Taureau
Année scolaire 2011 – 2012
RÈGION DES PAYS DE LA LOIRE
Résumé
L’intubation ou la trachéotomie perturbent le fonctionnement du carrefour aérodigestif. Après extubation, des troubles de la déglutition, caractérisés par la présence
de fausses routes, sont souvent retrouvés. Les fausses routes peuvent entrainer des
conséquences pulmonaires dramatiques, or elles peuvent être évitées en grande
partie par l’application de gestes simples. Le problème est soulevé à partir d’une
constatation, que ces gestes ne sont pas toujours respectés, particulièrement
lorsque les consignes de reprise alimentaire sont transmises oralement. Ce travail
cherche donc, à partir de données fondamentales, à répertorier les consignes
importantes ainsi qu’un moyen de les transmettre au reste du personnel soignant.
Dans un second temps l’outil de transmission établis sera soumis à l’équipe
soignante d’un service de réanimation par le biais d’un sondage.
Mots clefs
Prévention des fausses routes
Pneumopathies
Interdisciplinarité
Transmission de l’information
SOMMAIRE
1. Introduction ................................................................................................................................. 1 2. Constatation ................................................................................................................................ 1 2.1 Présentation du patient ................................................................................................................................ 1 2.2 Examen clinique de la déglutition le 12 septembre ....................................................................... 2 2.3 Reprise alimentaire ........................................................................................................................................ 2 3. Problématique ............................................................................................................................. 3 4. Hypothèse ..................................................................................................................................... 3 5. Données fondamentales ......................................................................................................... 4 5.1 Données relatives à la déglutition .............................................................................................. 4 5.2 Données concernant les fausses routes ................................................................................. 7 5.2.1 Classification des fausses routes ....................................................................................................... 7 5.2.2 Les conséquences des fausses routes : les pneumopathies d’inhalation .................... 9 5.3 Données relatives aux conséquences de la présence d’un corps étranger dans le
carrefour aéro-digestif ......................................................................................................................... 10 5.3.1 Effets de la sonde d’intubation .......................................................................................................... 10 5.3.2 Effets de la sonde nasogastrique .................................................................................................... 11 5.3.3 Effets de la canule de trachéotomie ............................................................................................... 12 6. Création de l’outil de transmission ................................................................................. 13 6.1 Posture ............................................................................................................................................... 13 6.2 Position du soignant ..................................................................................................................... 14 6.3 Caractéristiques de l’aliment ingéré ....................................................................................... 14 6.4 Proposition d’une feuille de transmission ........................................................................... 15 7. Sondage auprès de l’équipe soignante ......................................................................... 19 7.1 Présentation du sondage ............................................................................................................ 19 7.2 Présentation des résultats .......................................................................................................... 20 7.2.1 La feuille est elle compréhensible ? ............................................................................................... 20 7.2.2 Si cette fiche était à votre disposition, l’utiliseriez-vous ? ................................................... 20 7.2.3 Quelle est la place la plus judicieuse pour cette feuille ? ................................................... 20 7.2.4 Remarques et suggestions du personnel soignant ................................................................ 21 7.3 Analyse des résultats ................................................................................................................... 21 8. Discussion ................................................................................................................................. 22 8.1 Critiques de la démarche ............................................................................................................ 22 8.2 Points positifs de la démarche ................................................................................................. 24 9. Conclusion ................................................................................................................................ 24 Références bibliographiques ................................................................................................... 25 1. Introduction
L’intubation ou la trachéotomie associées à une sonde nasogastrique sont des
moyens couramment utilisés dans les services de réanimation. Ces techniques sont
utilisées afin de maintenir la fonction respiratoire et digestive chez les patients dont le
pronostic vital est très engagé. Cette situation nécessaire à la survie du patient
entraine cependant des conséquences sur le fonctionnement du carrefour aérodigestif. Très souvent l’on retrouve après extubation des perturbations dans le de la
fonction de déglutition ; le plus souvent il est constaté un retard ou un non
déclenchement du réflexe de déglutition associé à une perte du réflexe de toux. Lors
de la reprise alimentaire par voie orale après extubation, ces perturbations risquent
d’engendrer des fausses routes pouvant par la suite avoir des conséquences
dramatiques au niveau pulmonaire (les pneumopathies). Ce travail part de
l’observation d’un patient dont la reprise alimentaire s’est mal déroulée suite à son
extubation de part un défaut de transmission de l’information au sein de l’équipe
pluridisciplinaire. Ce travail cherche à soulever l’importance des consignes et des
précautions spécifiques à appliquer lors de la reprise alimentaire du patient
dysphagique ainsi qu’un moyen efficace de communiquer ces informations.
2. Constatation
2.1 Présentation du patient
La reprise alimentaire observée concernera le cas de M. T. Suite à un accident
vasculaire cérébrale ischémique sylvien gauche survenu en 2005, ce patient
présente des troubles phasiques et respiratoires. Le 25 août 2011 M. T est
hospitalisé au centre hospitalier Hôtel Dieu de Nantes, dans le service de
réanimation médicale, suite à une crise convulsive généralisée. À son arrivée à
l’hôpital M. T est intubé, son état de conscience étant fortement altéré, il restera
intubé durant une période de 19 jours.
1 2.2 Examen clinique de la déglutition le 12 septembre
M. T présentant un encombrement anormalement élevé à la salive, et ayant été
intubé sur une longue période, un bilan de la fonction de déglutition à été demandé
aux kinésithérapeutes suite à son extubation le 12 septembre. Dans la matinée un
premier bilan est effectué par les kinésithérapeutes, mettant en évidence un risque
de fausse route silencieuse (absence de toux) en effet, suite à l’introduction d’eau
dans la bouche de M. T, il présente un réflexe de mastication et nécessite plusieurs
réflexes de déglutitions pour avaler. Il est constaté de plus un défaut d’élévation du
larynx lors du réflexe de déglutition (l’ascension du cartilage thyroïde est retardée et
se fait avec difficulté). L’hypothèse est émise que M.T présente un déficit des
mécanismes de protection des voies aériennes. Il y a donc un risque de fausse route
par éparpillement ou fuite du bolus alimentaire pré déglutition ainsi qu’un risque de
fausse route per déglutition par défaut de protection de la trachée. Le réflexe de toux
étant abolit chez ce patient, les fausses routes risquent alors d’être silencieuses et
par conséquent, particulièrement dangereuses. Lors de ce test il est positionné assis
avec la tête en flexion. La consigne est transmise oralement au médecin de ne rien
donner au patient avant que la consistance alimentaire optimale ne soit établie à la
suite d’un bilan de reprise alimentaire en début d’après midi.
2.3 Reprise alimentaire
Lors du retour de l’équipe de kinésithérapeutes dans la chambre de M.T, la consigne
n’avait pas été suivie et une infirmière avait entrepris un essai alimentaire à l’eau
gélifiée chez le patient alors alité en position demie assise. L’absence de toux chez
M.T avait fait conclure à la praticienne une absence de fausse route. Quelques
minutes après le début de reprise alimentaire la saturation du patient se mit à
diminuer (initialement à 100% elle descendit aux alentours de 85%) la parole chez ce
patient mit en évidence une voix mouillée, une fausse route est suspectée puis
constatée en faisant tousser le patient. Après avoir désencombré M. T, l’équipe de
kinésithérapeute a pu terminer son bilan et déterminer une consistance (à l’aide
d’épaississant) ainsi qu’une position permettant de réduire les risques de fausses
routes chez ce patient.
2 3. Problématique
La présence d’une sonde d’intubation et d’une sonde nasogastrique, modifie le
fonctionnement du carrefour aéro-digestif ce qui augmente considérablement les
risques de fausses routes lors de la reprise alimentaire. Les fausses routes peuvent
avoir des conséquences dramatiques et aller jusqu’à engager le pronostic vital
(obstruction aérienne, infections pulmonaires). Or elles peuvent être en grande partie
évitées par la mise en place de gestes simples : adaptation de la posture du patient,
de la texture alimentaire, du volume déglutit ou de l’environnement, établies à la suite
d’un bilan. Dans l’exemple présenté de reprise alimentaire c’est la consigne de ne
rien donner à manger au patient qui n’a pas été respectée, cependant il n’est pas
rare que les autres consignes concernant les textures et l’installation du patient ne
soient pas appliquées.
Bien souvent ces consignes sont transmises oralement ou par l’intermédiaire du
dossier de soins et présentent le risque d’être perdues et non appliquées. Le
problème soulevé est donc
« Quelles informations sont à faire passer et comment les transmettre afin
qu’elles soient appliquées ? »
4. Hypothèse
L’hypothèse de départ est qu’un outil de transmission écrit et remplit par des
professionnels formés, à la suite d’un bilan initial de la fonction de déglutition,
réduirait considérablement les risques de fausses routes et les conséquences
gravissimes qu’elles peuvent entrainer à la suite d’une extubation.
La création d’une fiche de transmission contenant des informations relatives à la
posture du patient, les textures et volumes alimentaires a donc été entreprise. L’idée
est de rassembler des informations concrètes et fonctionnelles sur la façon de faire
prendre un repas à un patient, et de les présenter de façon à ce qu’elles soient
comprises et appliquées par n’importe qui. La place d’un tel document est
particulièrement importante, car elle conditionne directement sa consultation par les
membres de l’équipe soignante. L’hypothèse est émise que cette feuille serait
d’avantage consultée et utilisée si elle était le plus proche possible du patient, c’est à
dire directement affichée dans sa chambre.
3 5. Données fondamentales
5.1 Données relatives à la déglutition
Le contenu de cet outil de transmission devra découler de la physiologie de la
déglutition, la connaissance de certaines données fondamentales est donc
nécessaire pour parvenir à la conception d’un tel outil.
La déglutition permet l’alimentation, mais avant tout, la protection des voies
aériennes en acheminant bolus alimentaire, salive et secrétions rhino-pharyngées
vers l’estomac, en évitant tout passage vers la trachée. On parle du double rôle de la
déglutition [1]. Ce phénomène est décomposé en deux phases successives :
laryngo-pharyngée et œsophagienne, précédé d’un temps oral ainsi qu’une étape de
mise en bouche pour l’alimentation.
La phase orale est elle même divisée en deux temps :
• Un premier préparatoire ayant pour
but
la
constitution
positionnement
et
d’un
le
bolus
alimentaire (figure 1) La consistance
alimentaire et reconnue, l’aliment est
mastiqué, mélangé avec la salive
afin de le transformer en un bolus
alimentaire pouvant être dégluti. Ce
dernier
se
trouve
par
la
suite
positionné au centre de la langue.
Lors de cette phase la consistance
alimentaire est particulièrement importante, si elle est trop fluide il y a un
risque de fuite prématuré vers le pharynx, et par la suite de chute dans la
trachée. Certaines textures alimentaires peu compactes peuvent aussi
s’éparpiller et chuter de la même façon dans la trachée. En effet les cycles
respiratoires étant maintenus durant ce premier temps, le larynx est en
position ouverte et la moindre fuite ou le moindre éparpillement risquent de
passer dans les voies respiratoires.
4 • un second temps de propulsion
(figure 2) du bolus alimentaire : la
pointe de la langue se positionne
derrière les incisives, la langue
s’ascensionne
dans
sa
partie
antérieure tandis qu’elle s’abaisse
dans sa partie postérieure de façon
à créer une pente dirigée vers
l’oropharynx. Lors de cette phase, le
voile du palais s’élève permettant le
passage du bolus vers le pharynx
d’une part, et la fermeture de l’accès au rhino-pharynx d’autre part [2].
La phase laryngo-pharyngée débute lorsque le bolus alimentaire atteint l’oropharynx,
la stimulation par le bolus alimentaire de récepteurs spécifiques déclenche le réflexe
de déglutition. Ce réflexe est déclenché par les stimulations tactiles, thermiques et
chimiques de la partie postérieure de la langue, de l’oropharynx, des piliers
antérieurs du voile du palais ainsi que la paroi postérieure du pharynx (zone de
Wassilief). La température, la texture ainsi que le goût du bolus alimentaire déglutit
sont donc particulièrement importants à ce moment car permettent la stimulation et le
déclenchement du réflexe. Lors de cette phase l’extension cervicale augmentera le
risque de fausse route en ouvrant les voies aériennes en cas de déficit des
mécanismes de protection de la trachée. Le réflexe de déglutition sera précédé et
accompagné d’une apnée inspiratoire qui se terminera à la fin de ce réflexe.
Déroulement du réflexe de déglutition : Les muscles des parois postérieures et
latérales du pharynx se contractent créant ainsi une augmentation de pression qui
servira de moteur à la progression du bolus alimentaire. Lors de cette phase,
l’élévation du voile du palais permet la fermeture du sphincter vélo-pharyngé (le
cavum) empêchant ainsi les aliments de passer dans le rhino-pharynx; la fermeture
du larynx (figure 3) permet la protection des voies aériennes par une bascule de
l’épiglotte vers l’arrière et une adduction des cordes vocales; tandis que le sphincter
5 supérieur de l’œsophage s’ouvre laissant
passer le bolus en direction de l’œsophage
(début de la phase œsophagienne) (figure 4).
Les secrétions ou le bolus alimentaire
contournent
alors
l’orifice
aérien
en
empruntant les sini piriformes (replis de part
et d’autre du larynx se rejoignant en arrière
pour former la paroi postérieur du pharynx).
Ce phénomène est associé à un recul de la
langue permettant par une action de piston
d’aider la propulsion du bolus alimentaire. Ici
aussi le volume et la texture alimentaire sont
particulièrement importants, en effet plus la
texture du bolus est visqueuse plus sa
progression se fera lentement. On comprend
donc
que
lorsque
les
mécanismes
de
protections des voies aériennes sont ralentis
il faudra privilégier des textures épaisses. À
contrario, lorsque le patient présente une
faiblesse dans la propulsion du bolus ou dans
l’ouverture du sphincter supérieur de l’œsophage il faudra privilégier des textures
fluides progressant plus vite. De même la position de la tête est à prendre en
considération, bien souvent on considère qu’il faut favoriser la flexion cervicale,
cependant lors des faiblesses de propulsion pharyngée, l’extension cervicale permet
d’augmenter la vitesse de progression du bolus. Dans le cas d’hémiparésies laryngopharyngée nous verrons qu’une rotation de la tête côté parétique associé à une
inclinaison côté sain permet de limiter les fausses routes.
6 La phase œsophagienne termine le processus, le bolus alimentaire entre dans
l’œsophage par l’ouverture du sphincter supérieur (figure 5), et progresse sous
l’action du péristaltisme jusqu’au sphincter inférieur de l’œsophage s’ouvrant et
laissant ainsi passer le bolus dans l’estomac. La déglutition se termine par la reprise
des cycles respiratoires (figure 6).
5.2 Données concernant les fausses routes
Les fausses routes correspondent à un passage d’aliment, de salive, de sécrétions
rhinopharyngées ou de contenu gastrique dans les voies aériennes. Elles peuvent
être mises en évidences en induisant un réflexe de toux ou être asymptomatique
(fausse route silencieuse). Il existe plusieurs types de fausses routes classées en
fonction du moment de leur survenue, avec des étiologies différentes. Pour chaque
étiologie la prise en charge préventive se trouve par conséquent différente.
5.2.1 Classification des fausses routes
On distingue trois types de fausses routes :
• Les fausses routes pré déglutition se produisent lors de la phase orale avant
le déclenchement du réflexe de déglutition. Ce type de fausse route est le plus
souvent causé par un manque d’étanchéité du sphincter glosso-vélique (situé
entre le voile du palais et la base de la langue et empêchant en temps normal
tout écoulement vers le pharynx lors de la phase orale) et est favorisé par
l’extension cervicale et certaines textures alimentaires (fausses routes par
7 fuite liquidienne ou éparpillement intra buccal). Les aliments ou les secrétions
tombent directement dans le larynx toujours en position ouverte sur un mode
respiratoire. On comprend alors que avant la déglutition la flexion cervicale est
à privilégier et l’extension à éviter.
• Les fausses routes per déglutition se produisent pendant le réflexe de
déglutition, elles sont le plus souvent
causées par un défaut dans la
fermeture du larynx. Par exemple dans une atteinte du nerf pneumogastrique
entrainant une hémiparalysie pharyngo-laryngée, le liquide contenu dans le
pharynx va passer directement dans l’hémi-larynx paralysé. Une rotation de la
tête du côté paralysé associée à une inclinaison côté sain réduira les fausses
routes, en effet la rotation de tête d’un côté va venir comprimer le sinus
piriforme homolatéral et favoriser le passage des sécrétions ou du bolus côté
controlatéral à la rotation ; l’inclinaison du côté sain permet de favoriser le
passage côté homolatéral à l’inclinaison par action de la pesanteur [3]. Un
réflexe de déglutition absent ou retardé peut aussi en être la cause (lorsque
les zones réflexogènes sont altérées par exemple). Dans le cas d’un retard
dans le déclenchement du réflexe, un épaississement de la texture déglutie
permet de limiter le risque de fausse route en ralentissant la progression du
bolus. Il est possible aussi d’augmenter la stimulation sur les zones
réflexogènes en utilisant des liquides froids et des boissons gazeuses.
• Les fausses routes post déglutition se produisent après le réflexe de
déglutition lorsqu’il subsiste une stase alimentaire pharyngée, valléculaire
(replis glosso-épiglotique), ou dans les sini piriformes, une partie du bolus
alimentaire non dégluti présente le risque d’être aspiré dans les voies
aériennes lors de la reprise inspiratoire. Ce type de fausse route est favorisé
par des bolus alimentaires épais dont la progression est ralentie. Des fausses
routes post déglutition sont aussi possibles lorsque le sphincter supérieur de
l’œsophage présente un défaut d’ouverture. Dans ce cas, il faudra accélérer
et faciliter le passage du bolus en utilisant l’extension cervicale et des textures
fluides.
8 5.2.2 Les conséquences des fausses routes : les pneumopathies
d’inhalation
Les principales conséquences des fausses routes par inhalation sont pulmonaires :
l’obstruction
aérienne,
les
pneumopathies
chimiques
et
les
infections
pleuropulmonaires. Des complications non pulmonaires peuvent aussi survenir et se
surajouter
au
tableau
clinique :
dénutrition,
déshydratation
et
phobie
de
l’alimentation.
L’obstruction aérienne : le tableau clinique varie en fonction de la matière inhalée, en
général l’obstruction des voies respiratoires se caractérise par un bruit anormal aiguë
lors de la respiration (stridor), une difficulté à l’alimentation (dysphagie) et une
dyspnée avec diminution de la saturation en oxygène du patient. En cas
d’obstruction par un produit radio transparent la fibroscopie sera alors nécessaire
pour confirmer le diagnostic.
Les pneumopathies chimiques : surviennent le plus souvent suite à l’inhalation du
contenu gastrique et entraine une atteinte alvéolaire et septale. Les pneumopathies
chimiques se caractérisent par une dyspnée accompagnée de toux et de sibilants.
Elles se compliquent dans plus de 25% des cas d’une surinfection avec 40% de
mortalité.
Les infections pleuropulmonaires secondaires à des fausses routes par inhalations
peuvent entrainer une dilatation des bronches, des emphysèmes, et se compliquer
d’abcès pulmonaires allant même jusqu’à la nécrose.
En réanimation ses pathologies pulmonaires sont particulièrement redoutées de part
le danger qu’elles représentent alors que dans de nombreux cas une surveillance
des repas et la mise en application de gestes simples suffit à diminuer leur incidence.
On comprend donc que la fonction première de la déglutition est bien la protection
des voies aériennes, et que les troubles de cette fonction peuvent avoir des
conséquences dramatique et entrainer le décès de patients, d’où l’importance de la
transmission des informations permettant la réduction de ce risque.
9 5.3 Données relatives aux conséquences de la présence d’un corps
étranger dans le carrefour aéro-digestif
Le carrefour aéro-digestif est une région anatomique assurant les rôles vitaux de la
respiration et de la déglutition. Lorsque le pronostic vital est très engagé et que le
patient ne parvient plus à maintenir sa fonction respiratoire, il peut arriver qu’il soit
nécessaire de l’intuber afin de mettre en place une ventilation mécanique. Il existe
trois voies d’intubation : naso-trachéale, oro-trachéale et sous-mentale (cette
dernière, plus rare, est principalement pratiquée pour éviter la cicatrice d’une
trachéotomie classique). Lorsque la ventilation mécanique doit se poursuivre sur une
durée supérieure à une semaine (dans le cas d’une tétraplégie avec paralysie du
diaphragme par exemple) il est nécessaire de mettre en place une trachéotomie.
L’intubation et la trachéotomie perturbant l’alimentation par voie orale, il est souvent
ajouté à ce dispositif une sonde nasogastrique permettant le maintient de la fonction
digestive. Cette situation nécessaire à la survie du patient risque néanmoins de venir
perturber le déroulement de la déglutition une fois le matériel retiré. Les modifications
les plus souvent rencontrées sont le retard dans le déclenchement du réflexe de
déglutition, un défaut dans l’élévation du larynx et une perte d’efficacité de la toux.
5.3.1 Effets de la sonde d’intubation
La voie d’intubation la plus utilisée est la
voie oro-trachéale. La sonde est introduite
par la bouche, passe en arrière de la
langue, entre les cordes vocales puis dans
la trachée, en arrière du cartilage thyroïde
et en avant des cartilages aryténoïdes
(figure 7 et 8).
Elle peut perturber le déroulement de la
déglutition par atteinte directe du plan
glottique :
• par luxation aryténoïdienne lorsque l’intubation a été traumatique
• par atteinte inflammatoire de l’articulation crico-aryténoïdienne
• par synéchie inter aryténoïdienne, cet à dire une adhérence cicatricielle
10 Ce type d’atteinte entraine une immobilité
des cordes vocales et une diminution de la
capacité de fermeture du larynx avec un
risque de fausse route accru.
La sonde d’intubation étant placée au
contact des zones de déclenchement du
réflexe
de
déglutition,
elle
va
aussi
entrainer des troubles de la déglutition sans
lésion laryngée. En effet l’altération de
récepteurs situés au contact de la sonde
ainsi qu’une augmentation du seuil de
perception à tout corps étranger, causé par une habituation de l’organisme à la
présence de la sonde, pourrait expliquer un retard dans le réflexe de déglutition ainsi
qu’une absence du réflexe de toux [4]. Ces effets ont été étudiés et mis en évidence
pour des intubations prolongées, c’est à dire dont la durée minimale doit être
supérieure à 24 ou 48 heures.
5.3.2 Effets de la sonde nasogastrique
La sonde nasogastrique est un moyen
largement utilisé pour permettre la nutrition
du patient lorsque ce dernier est intubé.
Elle est introduite par voie nasale, se
courbe au niveau du nasopharynx, descend
dans le carrefour aéro-digestif et passe
dans l’œsophage en arrière des cartilages
aryténoïdiens et cricoïde (Figure 9) avant
de se terminer dans l’estomac. Elle peut
cependant entrainer des lésions locales
comme par exemple un œdème de la
muqueuse aryténoïdienne comblant les sini piriformes (Figure 10).
Cet œdème va augmenter le risque de stase alimentaire pouvant être inhalée par la
suite, de plus il diminue la perception des aliments et des sécrétions dans la partie
basse du pharynx ce qui retarde le déclenchement du réflexe de déglutition. Mis à
11 part l’œdème, la sonde nasogastrique
peut entrainer un ensemble de lésions
regroupées sous le nom de « nasogastric
tube
syndrom »
[5]
(artrite
crico-
aryténoïdienne , paralysie des muscles
crico-aryténoïdiens postérieurs, ischémie,
chondrite et nécrose du cartilage cricoïde)
entrainant une diplégie du larynx avec
risque de fausse route accru. Ces lésions
sont favorisées par une position médiale
de
la
sonde
nasogastrique
(inter
aryténoïdienne) plutôt que latérale dans le sinus piriforme. Tout comme la sonde
d’intubation, la sonde nasogastrique entraine une élévation du seuil de perception
pharyngé entrainant un retard dans le déclenchement du réflexe de déglutition,
augmentant les risques de fausses routes per déglutition. De plus la sonde
nasogastrique entraine une hyper salivation difficilement déglutie par le patient. Elle
favoriserait de même le reflux gastro-œsophagien et œsophagopharyngé en
perturbant les mécanismes d’ouverture et de fermeture des sphincters supérieur et
inferieur de l’œsophage [6]. Ce reflux pourrait aggraver l’œdème ainsi qu’entrainer
des pneumopathies.
5.3.3 Effets de la canule de trachéotomie
La canule de trachéotomie est placée
entre le larynx et le sternum (figure 11).
La présence de cette canule diminuerait
l’amplitude lors de l’élévation du larynx
pendant
la
phase
pharyngée
de
la
déglutition en fixant la trachée vers
l’avant.
Cette
diminution
d’amplitude
entrainerait une moins bonne protection
des voies aériennes [7]. En outre, la
présence
entrainerait
d’un
une
ballonnet
compression
gonflé
de
l’œsophage pouvant gêner l’ouverture du sphincter supérieur de l’œsophage.
12 D’après une étude réalisée par Buckwalter [8] sur des chiens trachéotomisés en
1986, la trachéotomie perturberait le réflexe de fermeture glottique du fait de
l’absence de résistance ventilatoire. En effet l’absence de flux aérien trans-laryngé
entrainerait une désafférentation du larynx qui perturberait le réflexe de fermeture
glottique. L’absence de pression sous glottique diminuerait aussi l’élévation du larynx
ce qui rend la propulsion pharyngée moins efficace [9]. Cette absence de pression
entraine par ailleurs une diminution de la force de toux qui devient alors moins
efficace en cas de fausse route. Les patients trachéotomisés ont une phase
expiratoire plus courte et présentent donc un risque plus important d’inhalation lors
de la reprise inspiratoire.
Les troubles entrainés au niveau du carrefour aéro-digestif par l’intubation, la
trachéotomie ainsi que la sonde d’intubation sont variés. Leur mise en évidence
nécessitera un examen minutieux par un professionnel formé. En fonction du trouble
rencontré la prise en charge palliative sera différente.
6. Création de l’outil de transmission
Comme nous l’avons vu précédemment, la position du patient, ainsi que les
caractéristiques du bolus ingéré au cours du repas vont influencer le déroulement de
la déglutition. Si ces paramètres sont bien choisis, ils permettent de réduire le risque
de fausse route lors de la prise alimentaire. Nous avons vu qu’il n’existait pas de
solution stéréotypée, chaque trouble de la déglutition va avoir des solutions
palliatives différentes. Nous allons donc chercher dans cette partie, les différents
éléments qui devront êtres transmis au reste de l’équipe soignante, ainsi que le
moyen de les transmettre de la façon la plus pertinente possible.
6.1 Posture
Comme nous l’avons vu, la position de la tête et du tronc influent sur la déglutition et
peuvent gêner ou faciliter ce phénomène. De façon générale l’extension cervicale
étire et plaque le larynx contre les corps vertébraux ce qui gêne l’ouverture du
sphincter supérieur de l’œsophage et favorise les fausses routes alimentaires. À
contrario la flexion rapproche l’épiglotte de la langue ce qui ferme les voies aériennes
et favorise le passage du bolus alimentaire dans l’œsophage [10]. Dans la majorité
des cas, la position la plus favorable pour une déglutition sans fausse route sera la
13 position assise avec une flexion du rachis cervical. Cependant dans certains cas,
lorsque les mécanismes de propulsion sont déficitaires par exemple, l’extension
cervicale augmente la vitesse de progression du bolus alimentaire et minimise ainsi
le risque de fausse route par stase. La rotation du rachis cervical est aussi à prendre
en compte lors des hémiparésies pharyngo-laryngées touchant les sini piriformes par
exemple (qui peuvent être causées comme nous l’avons vu précédemment par
l’intubation et la sonde nasogastrique). Dans ce cas la rotation cervicale du côté
parétique associé à l’inclinaison côté sain favorise l’écoulement du côté sain ce qui
diminue le risque de passage dans la trachée.
6.2 Position du soignant
Lorsque le patient n’est pas autonome pour la prise des repas et nécessite l’aide
d’un soignant, la position de ce dernier est importante. Il doit pouvoir présenter la
cuillère vers la bouche au dessous de la ligne de regard du patient. Les aliments
doivent par la suite être introduits de façon horizontale dans la bouche (la cuillère ne
devra donc pas être levée) de façon à éviter une extension de la tête du patient. Une
légère pression de la cuillère contre la langue stimule la fermeture de la bouche et le
phénomène de déglutition. Par la suite le soignant devra éviter de récupérer des
aliments bavés en frottant la cuillère contre le menton car cela stimule l’ouverture de
la bouche et l’extension cervicale. Lors de la déglutition l’ascension du larynx peut
être contrôlée manuellement par une palpation du cartilage thyroïde. À la fin du
repas la vérification des signes de fausse route par le soignant est indispensable
[11].
6.3 Caractéristiques de l’aliment ingéré
La texture
Plus le bolus alimentaire est visqueux et épais, plus le temps buccal et pharyngé
sera long. Lorsque le réflexe de déglutition et la fermeture du larynx sont ralentis, la
texture du bolus alimentaire peut être épaissie de façon à ralentir sa progression et
ainsi éviter son passage vers les voies aériennes. Dans les cas d’une diminution de
la force de propulsion du bolus alimentaire, il faudra au contraire fluidifier l’aliment de
façon à accélérer sa descente derrière la langue et dans le pharynx sans engendrer
d’accumulation de résidus alimentaire lesquels pourraient, par la suite être aspirés
par les voies aériennes lors de la reprise inspiratoire [12].
14 Le volume
Après le réflexe de déglutition, lorsqu’une partie du bolus alimentaire ne passe pas
dans l’œsophage (déficit d’ouverture du sphincter ou de la force de propulsion) une
stase pharyngée peut se produire risquant par la suite de déborder dans le larynx à
la reprise respiratoire. Plus le volume à déglutir est important plus le risque de stase
alimentaire pharyngé est grand [12].
Le goût et la température
Le goût et la température peuvent moduler le seuil de déclenchement du réflexe de
déglutition. Une étude menée en 1994 [13] met notamment en évidence une
diminution du temps de déclenchement du réflexe de déglutition lors de l’utilisation
de bolus froids lorsque la sensibilité pharyngée est altérée. Cette diminution est mise
en évidence pour des bolus de faible volume car ils sont moins bien perçus en cas
de diminution de sensibilité que les bolus de volume important. L’interprétation de ce
résultat étant que, les bolus de grand volume entrainent une stimulation sensorielle
plus importante et, qu’une diminution de température pour ce même bolus ne permet
pas de stimuler d’avantage le déclenchement du réflexe de déglutition.
6.4 Proposition d’une feuille de transmission
Dans son article sur les voies aériennes supérieures après extubation, Mme De
Chavigny [14] soulève l’importance de la transmission de consignes de façon écrite
non seulement à l’équipe soignante, mais aussi à la famille en proposant une
pancarte avec les différentes consignes inscrites à l’entrée de la chambre du patient.
De même, le centre hospitalier Notre Dame et Reine Fabiola proposent un
avertissement mural sous forme de fiche (Figure 12) accompagné d’une feuille de
consignes plus détaillées (figure 13), adaptable pour chaque patient, se trouvant
dans le dossier infirmier du patient. (Ces documents sont tirés du livre de Didier
Bleeckx" Dysphagie évaluation rééducation des troubles de la déglutition" [15])
15 L’inconvénient des pancartes proposées par Mme De Chavigny et par le service de
médecine interne de Reine Fabiola est qu’elles se contentent de consignes trop
vagues et risquent d’induire le personnel ou la famille en erreur. En effet dans les
deux cas on peut lire « fléchir la tête » et « épaissir les liquides », or comme nous
l’avons vu précédemment, bien que la flexion de tête et l’épaississement des liquides
soit le plus souvent nécessaires, certains cas nécessitent au contraire, des textures
fluides et une posture d’extension (lors des défauts de propulsion par exemple). En
revanche la deuxième feuille proposée à Reine Fabiola est très intéressante car elle
offre la possibilité d’être adaptée au cas par cas, pour chaque trouble de déglutition
rencontré. Cependant cette feuille ne parle pas des postures d’extension, ou des
volumes conseillés pour l’alimentation.
16 Pour les raisons évoquées précédemment, le support de transmission choisi est la
feuille de transmission. Cette feuille doit contenir des informations sur la position du
patient ainsi que sur les textures et les volumes alimentaires, qui peuvent être
adaptés pour chaque patient en fonction de leurs déficits de structures et / ou de
fonctions. Étant donné que chaque texture et volume ont leur indication propre (en
effet un patient peut très bien faire des fausses routes avec des aliments épais et
volumineux alors qu’il en sera autrement pour un autre patient), il a été convenu de
représenter les données « Textures » et « Quantités » dans un tableau avec des
cases à remplir par OUI ou NON (Tableau 1).
Dates :
liquide
Eau
épaississement 1
Epaississement 2
Eau gélifiée
Textures
Compote / Yaourt
Aliments
mixés
moulinés
morceaux
1/2 cuillère à café
Quantités pour l'eau
1 cuillère à café
1 cuillère à soupe
1 gorgée au verre
Tableau 1 : textures et quantités
Ces textures et quantités sont basées sur le test de capacité fonctionnelle de la
déglutition de Bordeaux établie par M. Guatterie et V. Lozano [16] [Annexe 1]. Les
textures pour l’eau on cependant été modifiées : dans le test initial l’eau est épaissie
à l’aide de compote alors que dans le service il était utilisé de l’épaississant en
poudre.
17 En ce qui concerne la position du sujet, il a été choisi de la représenter par un
schéma du patient assis avec la tête en légère flexion (figure 14) car il s’agit de la
position permettant d’éviter le plus souvent le risque de fausse route. Ce schéma est
donc placé sur la feuille, à gauche du tableau sur les textures et quantités.
La feuille comportera un champ « commentaires » de façon à préciser si la position
doit être adaptée par des postures d’extension ou de rotation, de cette manière la
feuille n’est pas surchargée de multiples schémas présentant diverses positions du
patient. Ce champ peut être utilisé pour préciser d’autres commentaires : « ne pas
oublier de mettre le dentier au patient » par exemple, ou bien « ne donner que des
liquides froids au patient »
À la fin de la feuille de transmission sont rappelés les signes de fausses routes
pouvant être observés lorsque le réflexe de toux est aboli : déglutitions répétées, voix
mouillée, dyspnée et désaturation.
Cette feuille (figure 15) est remplie par le masseur kinésithérapeute du service de
réanimation à la suite d’un examen clinique analytique de la déglutition, ainsi qu’un
test de la capacité fonctionnelle de la déglutition de Bordeaux, visant à déterminer
les textures et quantités pouvant être ingérées sans fausse route par le patient. Le
praticien remplit ensuite la feuille en inscrivant OUI ou NON dans les différentes
18 cases. La case commentaire permet de préciser des éventuelles spécificités
(postures, adaptation de la température, aide technique nécessaire).
7. Sondage auprès de l’équipe soignante
7.1 Présentation du sondage
Afin d’évaluer la pertinence de l’outil ainsi crée, un sondage a été entrepris dans le
service de réanimation médicale de l’hôpital Hôtel Dieu de Nantes. Un exemple de la
feuille de transmission a été distribué à tous les membres de l’équipe soignante,
accompagné d’un questionnaire à choix multiple portant sur l’utilité et la
compréhensibilité de l’outil, ainsi que sur la place la plus judicieuse de ce
document : dans le dossier du patient ou bien sur le tableau blanc dans la chambre
du patient. Une autre question a été posée concernant la fonction au sein de l’équipe
de la personne interrogée afin de faciliter l’analyse des résultats.
19 7.2 Présentation des résultats
Sur cinquante questionnaires distribués vingt trois sont revenus
7.2.1 La feuille est elle compréhensible ?
La feuille est compréhensible pour 87% du
service (20 personnes), les médecins la
trouvent compréhensible pour 88% d’entre (7
sur 8) eux, les infirmières à 100% (10) et les
Non 13%
Oui 87%
aides soignants à 60% (3 sur 5)
7.2.2 Si cette fiche était à votre disposition, l’utiliseriez-vous ?
La question porte ici sur l’utilisation de la
feuille de transmission pour adapter la prise
des repas et en aucun cas
sur le
remplissage des cases, lequel sera effectué
Non 13%
Oui 87%
par des professionnels formés. La feuille
semble utilisable pour 87% du service (20
personnes), pour 88% des médecins, (7 sur
8) 100% des infirmières (10) et 60% des aides soignants (3 sur 5). Dans ce sondage
la totalité des personnes ayant répondu qu’ils ne se serviraient pas de cette feuille de
transmission
justifie leur réponse par le manque de compréhensibilité de cette
dernière (il s’agit des mêmes personnes qui ont répondu que la feuille proposée
n’était pas suffisamment compréhensible).
7.2.3 Quelle est la place la plus judicieuse pour cette feuille ?
Le choix de la place d’une fiche de
transmission
est
très
important
car
il
conditionne directement sa consultation par
Dossier
médical 17%
les membres de l’équipe soignante. La feuille
Tableau blanc
83%
doit pouvoir être lue pour adapter la prise
20 alimentaire, mais ne doit pas être visible à l’extérieur de façon à garantir le secret
médical. Deux solutions ont donc été envisagées : une feuille dans le dossier de
soins du patient, situé avec les autres transmissions du personnel soignant, ou bien
une feuille affichée sur le tableau blanc à l’intérieur de la chambre du patient. Le
personnel interrogé à répondu à 83% (19 personnes) qu’il était plus judicieux de
placer cette feuille sur le tableau blanc dans la chambre du patient plutôt que dans le
dossier médical : 100% des médecins, (8 personnes) 80% des infirmières (8
personnes sur 10) et 60% des aides soignants (3 personnes sur 5)
7.2.4 Remarques et suggestions du personnel soignant
En plus des questions à choix multiple, il a été donné au personnel la possibilité de
soumettre des remarques et suggestions sur le prototype de feuille qui leur a été
distribué. Les plus pertinentes concernent l’ajout de paramètres comme la nécessité
de fournir une paille au patient pour éviter les fausses routes aux liquides par
exemple ; ou bien l’ajout de boissons gazeuses, en effet celles-ci stimulent
d’avantage le déclenchement du réflexe de déglutition lorsque le seuil de
déclenchement de ce dernier a été augmenté par la présence de matériel
d’intubation.
En plus de ces suggestions, plusieurs des personnes interrogées ont fait la remarque
qu’il n’y avait pas d’épaississant en poudre dans le service et uniquement de l’eau
gélifiée, alors que, l’épaississant était bel et bien présent dans le service ; cette
remarque met en évidence une méconnaissance du personnel sur certains outils mis
à leur disposition.
Enfin, certains membres du personnel ayant répondu que cette feuille de
transmission n’était pas compréhensible l’ont en réalité confondue avec une feuille
de suivi alimentaire diététique.
7.3 Analyse des résultats
Les remarques du personnel concernant l’ajout d’autres éléments à la feuille de
transmission sont intéressantes, et prouvent l’intérêt des membres du service dans la
prévention de la fausse route.
On observe malgré tout dans ce sondage que 40% des aides soignants estimaient
que la compréhensibilité de la feuille proposée pouvait être améliorée, il y avait
notamment un quiproquo avec la feuille de suivi alimentaire diététique. Il s’est avéré
21 cependant que l’ambiguïté était levée simplement en affichant un exemple concret
de feuille remplie. On comprend donc qu’avant de mettre cette feuille en application il
faudra la présenter au personnel avec des exemples concrets.
La méconnaissance des outils mis à disposition du personnel (soulevée par les
remarques concernant l’épaississant en poudre) interroge encore une fois sur la
communication dans le service, ainsi que sur la sensibilisation des risques et des
complications des fausses routes. De plus, même lorsque la feuille était comprise
certains membres du personnel ne comprenaient pas toujours l’intérêt des
adaptations de positions du patient. Ces remarques laissent penser à un manque de
sensibilisation du personnel. On peut formuler l’hypothèse qu’une formation interne
sur les risques des fausses routes et sur le matériel mis à disposition améliorerait les
connaissances et l’intérêt du personnel sur les problèmes de fausses routes.
Concernant la place du document, on observe que la majorité du personnel pense
qu’il serait plus judicieux de l’afficher dans la chambre du patient sur le tableau blanc.
On comprend ici que la plupart des praticiens considèrent que le meilleur moyen de
faire passer une information concernant un patient est que celle-ci soit la plus proche
possible de ce patient.
De la même façon que lorsqu’un patient se trouve en isolement, les consignes
concernant les troubles de la déglutition doivent être visibles et accessibles le plus
facilement possible; non seulement pour le personnel soignant, mais aussi pour la
famille qui souhaite apporter un aliment au patient.
8. Discussion
8.1 Critiques de la démarche
Lors du travail effectué, la mise en évidence du problème de transmission servant de
point de départ à cette réflexion est purement qualitative et ne se base que sur
l’observation d’un seul patient. Il semblerait judicieux, pour mettre en évidence un
problème dans la transmission des informations, de mener une étude quantitative de
paramètres mesurables.
Ici seul l’aspect concernant la transmission d’information a été étudié. Or il semble
illusoire d’imaginer que la seule mise en application d’une feuille de transmission
22 dans un service, supprimerait la totalité des problèmes de reprise alimentaire
rencontrés.
Il semblerait logique dans ce cas, d’évaluer les connaissances de l’ensemble du
service sur la déglutition, ses troubles, leurs conséquences et les moyens à
disposition pour les limiter. Cette évaluation semble d’autant plus nécessaire que lors
du sondage effectué, certains membres du personnel rencontraient des difficultés de
compréhension.
Un questionnaire distribué à l’ensemble du personnel permettrait d’évaluer ces deux
aspects : d’une part la communication entre les différents personnels de soins,
notamment sur la reprise alimentaire et les troubles de la déglutition ; et d’autre part
les connaissances de chacun sur les problèmes de fausses routes. La mise en
évidence d’une méconnaissance serait alors le point de départ d’une réflexion sur la
nécessité de formations complémentaires.
De façon à ne pas surcharger la feuille de transmission, certaines informations
n’apparaissent pas, comme par exemple, sur la façon de nourrir un patient lorsqu’il
est incapable de s’alimenter par lui même. Encore une fois la solution envisageable
serait la formation du personnel sur les précautions à prendre avec un patient
dysphagique.
La mise en application de la feuille de transmission établie a été entreprise dans le
service de réanimation. Cependant le manque de temps pour ce travail, ne permet
pas à l’heure actuelle de présenter de résultats. L’évaluation de l’efficacité de l’outil
de transmission créé a été recherchée par la mise en application de la feuille dans le
service concerné pour un patient extubé. Ce dernier doit présenter des facteurs
prédictifs de fausse route, un encombrement salivaire important et une perte du
réflexe de toux (engageant d’avantage le pronostic vital en cas de fausse route lors
de la reprise alimentaire). Après extubation le kinésithérapeute du service réalise
alors un bilan analytique et fonctionnel de la déglutition avant de remplir la feuille de
transmission et de l’afficher sur le tableau blanc dans la chambre du patient. Afin
d’évaluer la transmission de l’information une feuille d’émargement avec un stylo a
été placée à côté de la feuille de transmission, cette feuille devra être signée par
chaque membre du service ayant utilisé la feuille de transmission lors des prises
alimentaires du patient. Le nombre de praticiens ayant alimenté le patient étant
connu, il est alors possible de calculer la proportion de personnes ayant utilisé la
23 feuille de transmission. Cette étude est surveillée par le kinésithérapeute du service
afin d’observer les conditions réelles lors des repas, et d’ainsi recueillir un maximum
d’informations tant sur le plan quantitatif que qualitatif.
8.2 Points positifs de la démarche
Malgré les critiques faites précédemment, ce travail a permis de sensibiliser le
personnel du service de réanimation sur l’importance de la déglutition et notamment
sur l’impact que peuvent avoir les fausses routes sur le pronostic vital du patient.
Bien que la constatation initiale de cette étude soit purement qualitative, elle aura
aussi permis de sensibiliser le personnel à l’importance des gestes qui peuvent
limiter les risques de fausse route lors de la prise des repas, et de l’importance de la
communication dans le service. Cette étude a permis de renforcer la place du
kinésithérapeute en réanimation et l’importance capitale qu’il a dans la prévention
des complications pulmonaires des fausses routes par inhalation.
9. Conclusion
Ce travail souligne l’importance de l’évaluation des troubles de la déglutition, mais
surtout de la communication entre le praticien qui les met en évidence et celui qui
aura la tâche d'alimenter le patient.
Il est mis en évidence que dans de nombreux cas, les informations et les consignes
découlant de l’examen sont perdues, et que par conséquent, la transmission de
l’information pourrait être améliorée. Ce travail porte uniquement sur la transmission
de l’information mais mériterait d’être complété par des études quantitatives.
Notamment portant sur les connaissances du personnel avec un sondage par
exemple. Un tel travail serait le point de départ d’une réflexion portant sur
l’importance de la formation du personnel sur la déglutition et ses troubles.
24 Références bibliographiques [1] Pascal Azou - Anatomie et physiologie de la déglutition normale - Kinésithérapie
la revue A. 2007 n°64 pp. 14-18
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dysfonctionnement : déglutition et circonspection - Kinésithérapie la revue A. 2007
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pharyngoesophageal dysphagia. - Archives of Physical Medicine and Rehabilitation
A. 1989, vol. 70, n° 10, pp. 767-771
[4] Michel Guatterie & Valérie Lozano – Quelques éléments de la physiologie de la
déglutition - Kinéréa 2005 n°42 pp 2-9
[5] Apostolakis Louis W. ; Funk Gerry F. ; Urdaneta Luis F. ; Mcculloch Timothy
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review of the literature - Head & neck A. 2001, vol. 23, n° 1, pp. 59-63
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frequency of transient esophageal spincter relaxations - Gastroenterology A. 1992,
vol. 103, n° 4, pp. 1236-1240
[7] D. Robert G. Bonmarchand – Les troubles de la déglutition postintubation et
trachéotomie - Réanimation A. 2004, vol. 13, n° 6-7, pp. 417-430
[8] Buckwalter JA, Sasaki CT - Effect of tracheotomy on laryngeal function - Otolaryngologic Clinics of North America A. 1984, vol. 17, n° 1, pp. 41-48
[9] Gross RD, Mahlmann J, Grayhack JP - Physiologic effects of open and closed
tracheostomy tubes on the pharyngeal swallow. The Annals of otology, rhinology &
laryngology A. 2003, vol. 112, n° 2, pp. 143-152
[10] Michel Guatterie & Valérie Lozano - Déglutition et dysphagie en neurologie –
La lettre du médecin rééducateur 1997 n°43 pp 3-9
[11] Jean-Pierre Bleton – La prise en charge paramédicale des troubles de la
déglutition des accidents vasculaires cérébraux – Kinésithérapie scientifique n°423
juin 2002 pp 45-46
[12] Guatterie M, Lozano V. Problèmes de déglutition posés chez le patient adulte
en réanimation. Actes du XIème congrès de la société de kinésithérapie en
réanimation 1998. p. 154-5 Paris.
25 [13] Bish E. M. ; Logemann J. A. ; Rademaker A. W. ; Kahrilas P. J. ; Lazarus C.
L. - Pharyngeal effects of bolus volume, viscosity, and temperature in patients with
dysphagia resulting from neurologic impairment and in normal subjects - Journal of
speech and hearing research A. 1994, vol. 37, n° 5, pp. 1041-1049
[14] Danièle De Chavigny – La rééducation des voies aériennes supérieures après
extubation – Kinésithérapie Scientifique n°490 Juillet 2008
[15] D. Bleeckx – Dysphagie évaluation rééducation des troubles de la déglutition 2002
[16] M. Guatterie, V Lozano – Test de capacité fonctionnelle de la déglutition –
Actes congrès européen Around dysphagia dysarthria dysphonia - Toulouse 2003
[17] A. Nougaret – Déglutir pour respirer et non pour se nourrir – Rééducation post
réanimation - 2010
[18] Jean-Pierre Bleton - La prise en charge paramédicale des troubles de la
déglutition des accidents vasculaires cérébraux – Kinésithérapie Scientifique n°423
Juin 2002
[19] L. Crevier-Buchman, S. Borel, D. Brasnu – Physiologie de la déglutition
normale – EMC 2012
[20] Ludovic Dehaut, Christian Decourcelle, Marianne Ader, Julie Gallet - Adulte
cérébro-lésé et dysphagie : du dépistage à la guidance familiale – Kinésithérapie
Scientifique n°516 décembre 2010
26 Annexe 1 : Test de capacité fonctionnelle de la déglutition Aliment mixé : présentant une certaine cohésion, mais
suffisamment tendre et mous pour qu’une simple
pression de la langue suffise à le déformer et à le fragmenter
Aliment mouliné : texture inhomogène, présence de petits morceaux
Aliment en morceaux : suffisamment petits pour ne pas avoir à être machés
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